Stents actifs : face à l`enthousiasme, un spécialiste français

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Stents actifs : face à l`enthousiasme, un spécialiste français
Stents actifs : face € l'enthousiasme, un sp•cialiste fran‚ais
partisan d'une d•marche plus prudente
STOCKHOLM, 5 septembre (APM) - Les stents lib€rant une mol€cule anti-rest€nose ont
soulev€ l'enthousiasme des cardiologues interventionnels, mais ils n'ont pas d€montr€ un
b€n€fice sur la mortalit€ et le risque d'infarctus et il persiste un risque potentiel de thrombose
tardive qui incite • la prudence, estime le Pr Jean Marco de la Clinique Pasteur • Toulouse.
Le sp€cialiste toulousain de cardiologie interventionnelle s'est exprim€ dimanche au congr‚s
de la Soci€t€ europ€enne de cardiologie (ESC) • Stockholm oƒ il €tait cette ann€e l'orateur
de la Gr„ntzig Lecture, conf€rence portant le nom de l' "inventeur " de l'angioplastie au cours
de laquelle est honor€ chaque ann€e un sp€cialiste du domaine.
Alors que, face aux r€sultats favorables aux stents actifs en termes de rest€nose par rapport
aux stents en m€tal nu, de nombreux cardiologues estiment d€sormais que ces stents seront
• terme donn€s • la quasi-totalit€ des patients, Jean Marco, dont la conf€rence s'intitulait
"stents actifs, promesses et pr€cautions", semble plus r€serv€.
En effet, ces stents permettent de r€duire de fa…on importante le taux de rest€nose, mais on
a finalement peu de donn€es sur les €v€nements cliniques, seules 6 €tudes €taient bas€es
sur des crit‚res cliniques et non angiographiques.
Et dans ces €tudes, les r€ductions des €v€nements cliniques li€s • la l€sion trait€e €taient
exclusivement des r€ductions du risque de nouvelle revascularisation de la l€sion cible. Pour
les d€c‚s et infarctus, il n'y avait pas de diff€rence.
Ce qui est logique puisque ces €tudes n'avaient pas de nombre suffisant de patients pour
pouvoir observer une diff€rence entre les stents nus et les stents actifs sur ces €v€nements
cliniques qui sont rares puisqu'• un an il y a 1% de d€c‚s et entre 3 et 4% d'infarctus. "Il
faudrait une €tude de 30.000 patients pour d€montrer une baisse significative des infarctus"
avec les stents actifs, pr€cise Jean Marco. Ce qui fait quelque peu douter qu'une telle €tude
existe un jour.
Quant aux registres, images de la "vraie vie", ils ne montrent pas non plus de diff€rence sur
les d€c‚s et infarctus.
De plus, concernant le seul b€n€fice r€el observ€, la baisse des revascularisations, qui sont
aussi b€n€fiques pour les patients, le sp€cialiste relativise cet effet. Il rappelle que dans les
€tudes, les patients subissaient une angiographie vers 6-8 mois, pour €valuer la rest€nose.
Or, la pr€sence d'une rest€nose peut inciter le cardiologue • la traiter.
Il existe chez les cardiologues interventionnels un r€flexe "oculo-st€notique" : ils ont
tendance • revasculariser les l€sions qu'ils voient st€nos€es. Mais "il est possible que des
l€sions non significatives en termes h€modynamiques soient trait€es".
Et en effet, c'est ce qu'on observe dans l'€tude ENDEAVOR : le taux de nouvelle
revascularisation des patients avec un stent nu €tait nettement plus €lev€ chez ceux qui
avaient eu une angiographie de suivi que chez ceux qui n'en avaient pas eu et €taient trait€s
uniquement en fonction de la clinique. Et de ce fait, le b€n€fice des stents actifs en terme
d'abaissement du risque €tait plus limit€.
Par ailleurs, alors qu'il a €t€ sugg€r€ que les stents actifs pourraient avoir un int€r†t plus
important dans les situations associ€es • un plus haut risque de rest€nose comme les
bifurcations, les petits vaisseaux ou les patients diab€tiques, Jean Marco a €galement mis
en garde contre le fait qu'il n'y a aucune €tude randomis€e qui ait €valu€ sp€cifiquement ces
situations. Les seules donn€es dont on dispose viennent de petits sous-groupes et "on ne
peut pas conclure".
Du c‡t€ des pr€cautions, le toulousain a mis en avant le probl‚me €mergent des thromboses
tardives. Inaper…ues au d€part car les €tudes cliniques n'€taient pas suffisamment larges
pour d€tecter de tels €v€nements rares, ces €v€nements ont €t€ observ€s plus tard dans
des registres, parfois tardivement, entre 2 et 26 mois apr‚s la pose du stent.
La cause en est encore incertaine. Ces complications tardives pourraient †tre li€es • des
hypersensibilit€s • un composant du stent actif, • une inflammation caus€e par le stent, • un
d€lai dans l'endoth€lialisation du stent • cause de la mol€cule lib€r€e ou • l'arr†t des antiagr€gants plaquettaires.
Quelle que soit la cause, ces €v€nements surviendraient dans 0,35% • 0,72% des cas selon
les donn€es de Rotterdam, ce qui est peu mais, "si un million de stents actifs sont implant€s
par an dans le monde, on pourrait avoir entre 3.500 et 7.200 cas de thrombose tardives", ce
qui est "potentiellement probl€matique, surtout compte tenu de la mont€e de l'utilisation dans
les l€sions complexes", met en garde Jean Marco.
Il faut notamment r€fl€chir • l'implantation des stents actifs chez les personnes ˆg€es -qui
repr€sentent la majorit€ des patients-, car 20% subiront une intervention pour une autre
maladie dans l'ann€e suivant la pose de stent. Or une autre intervention peut n€cessiter
l'arr†t des anti-agr€gants, ce qui augmenterait alors le risque de thrombose du stent, avec
des cons€quences potentiellement graves.
"Le cardiologue doit fournir au patient toutes les informations, dans la transparence. Le
patient doit avoir le choix de recevoir ou non un stent actif". C'est un "principe de
responsabilit€", estime Jean Marco.

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