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R É A L I S AT I O N >
> Les bandes
L’étanchéité a été
entièrement
reprise avec un
complexe mixte
associant
une feuille
bitumineuse et
un asphalte,
surmontés
d’une nappe
drainante. >
© DR
© Didier Plowy/MCC
séparatives ont été
disposées très
précisément,
puis le béton a été
coulé dans
chaque carré
individuellement.
A S P H A LT E
Les colonnes de Buren de nouv
En janvier dernier, après un an et demi de travaux, l’œuvre de l’artiste Daniel Buren a été rendue
aux Parisiens et aux touristes du 1er arrondissement. Pour l’occasion, l’étanchéité de l’ensemble a été
entièrement rénovée.
ans la cour du Palais-Royal, au cœur du 1er arrondissement de Paris, les palissades colorées
qui entouraient les célèbres colonnes de
Buren sont finalement tombées. De son vrai nom
Les Deux Plateaux, cet ensemble de 3 000 m2 érigé en
1986 est de nouveau accessible après seize mois de
chantier. Destinés à restituer les qualités esthétiques,
mais aussi le bon fonctionnement des équipements
techniques (éclairage, fontainerie...) de l’œuvre signée Daniel Buren, les travaux ont également
permis d’effectuer une réfection totale de l’étanchéité.
Les infiltrations avaient en effet occasionné des
désordres dans les soubassements de l’édifice au fil du
dernier quart de siècle.
D
LES INTERVENANTS
Maître d’œuvre : Jean-Christophe Denise, architecte d’opération, agence Perrot
Maître d’ouvrage : Service national des travaux
Étancheur : Chapelec
Étanchéité : Membrane d’étanchéité + asphalte
Asphalte : usine Sofras de Gennevilliers (92)
Drainage : Draina G10 (Siplast)
26 ·
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En charge du lot étanchéité, l’entreprise Chapelec a
opté pour un système différent de la configuration
d’origine : le complexe traditionnel 5 + 15 + 20 a
laissé la place à un système mixte
« Daniel Buren associant une feuille bitumineuse et
tenait à
une couche d’asphalte porphyre sur
conserver
toute la surface de l’installation. Le
l’asphalte,
tout est posé en adhérence, soudé en
revêtement
plein sur un enduit d’imprégnation à
traditionnel,
froid. Une nappe de désolidarisation
mais durable. » installée par dessus l’étanchéité assure le drainage de l’ensemble et supporte les chapes de béton fibré de 80 mm, coulées en
place sur chacun des 216 carrés du damier dessiné
par l’artiste. Quant aux 260 colonnes de granite et de
marbre, elles reposent directement sur le complexe
étanche. En surface, afin de retrouver l’aspect
d’origine, un revêtement de 20 mm d’asphalte a été
posé en indépendance. « Daniel Buren tenait à conserver ce revêtement traditionnel, mais durable, précise
Hassan Bitach, président de Chapelec. La problématique n’était pas décennale, il s’agissait de durer vingt,
trente ans, tout en assurant une étanchéité robuste avec
une protection prévenant les risques pendant les phases
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Colonne granite et marbre
Finition asphalte
ép. 20 mm
Chape béton fibré ép. 80 mm
Drainage
© DR
Étanchéité
>
L’asphalte final
a été coulé en
indépendance sur
la chape de béton
fibré.
uveau étanches
ont eux aussi été
étanchés avec
un complexe
membrane +
asphalte,
remplaçant
l’ancien système
synthétique.
© DR
d’aménagement. À la demande de l’artiste, nous n’avons
pas intégré les habituels agrégats de porphyre afin
d’obtenir un beau miroir noir, contrastant avec le blanc
des colonnes. »
> Les caniveaux
Rehaussement de quelques centimètres
L E S D E U X P L AT E A U X E N D É TA I L
Commandé à Daniel Buren en 1985 par le ministère de la Culture afin de remplacer
le parking de la cour d’honneur du Palais-Royal, Les Deux Plateaux a vite été
rebaptisé « colonnes de Buren » par le grand public. Controversé mais devenu
un passage incontournable de la visite de Paris, l’ensemble est composé de
260 colonnes de granite blanc rayé de marbre noir, disposées en damier et de
hauteur variable. S’y ajoutent trois longs caniveaux où coule une eau vive – et dont
l’étanchéité a également été remplacée – ainsi qu’un dispositif d’éclairage bleu
(dans les caniveaux) et
aux teintes changeantes
(aux intersections des
bandes séparatives). Ces
derniers éléments ne
fonctionnant plus depuis
quelques années déjà,
l’artiste avait vivement
critiqué l’inaction du
gouvernement vis-à-vis
de la dégradation de son
œuvre.
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© Didier Plowy/MCC
Avec l’accord de l’artiste, la partie centrale de
l’installation a été rehaussée de quelques centimètres
afin d’améliorer l’écoulement des eaux pluviales. Pour
ce faire, des formes de pente très minutieuses ont été
réalisées sur chacun des carrés de la partie centrale.
Un véritable casse-tête sur le plan de l’altimétrie imposée par l’architecte. « Les profils inox où viennent
s’insérer les bandes séparatives ont été mis en œuvre très
précisément, puis nous avons coulé le béton dans chaque
carré, explique Hassan Bitach. Le béton fibré a permis
de s’affranchir d’un treillis soudé qui aurait été très
contraignant sur ces petites surfaces. Le matériau présente les mêmes caractéristiques en termes de résistance
tout en étant beaucoup plus homogène, ce qui permet
d’éviter les microfissurations. »
Le budget global des travaux s’élève à 5,3 millions
d’euros, dont près de 315 000 euros pour le lot étanchéité. Initiée en novembre 2008, cette restauration
s’inscrit dans le cadre plus global de la rénovation du
Palais-Royal. Prochaine étape : la réfection des galeries entourant Les Deux Plateaux, notamment leurs
terrasses accessibles. JM
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© Pyc
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< Depuis 2005,
les maçonneries de
la Cité radieuse font
l’objet d’importants
travaux de
restauration.
Un phénomène
de carbonatation
a provoqué ces
dernières années
la corrosion des
armatures
en acier.
© Pyc
Les protections
lourdes des relevés
d’étanchéité seront
reconstituées
à l’identique tout
en respectant
les prescriptions
des DTU. >
CITÉ RADIEUSE
Un symbole en travaux
Véritable icône du toit-terrasse moderne, la toiture de la Cité radieuse n’a toutefois pas échappé aux outrages
du temps. D’importants travaux visent actuellement à lui redonner une étanchéité durable tout en restaurant
ses aménagements, symboles à la sortie de la guerre d’un nouveau mode de vie.
est un ouvrage devenu presque mythique
dans l’histoire de la cinquième façade :
2 200 m2 de toitures accessibles aux habitants comme aux curieux, une piste d’athlétisme, une
école, un gymnase, des gradins pour le théâtre et un
solarium… Près de soixante ans après son inauguration, la toiture de l’Unité d’habitation de Marseille, la
première des cinq construites par Le Corbusier, fait actuellement l’objet d’une vaste opération de restauration. Jusqu’à présent, l’ouvrage n’avait connu que des
réparations ponctuelles. Or, depuis quelques années,
l’emblème du toit-terrasse « moderne » cumule les
désordres, victime de fuites à répétition et d’un mécanisme de carbonatation qui s’attaque aux maçonneries, exposant l’acier des armatures à la corrosion.
Également touchées par ce phénomène, les façades de
l’immeuble bénéficient déjà d’un programme de restauration engagé en 2005. Sur le toit, les opérations
en cours visent la réfection complète de l’étanchéité et
des revêtements de circulation ainsi que la rénovation
de la plupart des édifices en béton qui ont fait la réputation de cette toiture aux confins de l’architecture
et de la sculpture. Un chantier autant symbolique que
sensible pour l’agence SNA de La Ciotat (mandataire)
en charge des travaux : « Nous devons en permanence
chercher des adaptations afin de nous conformer aux
règles de l’art tout en respectant les dimensions et les
formes existantes », explique Serge Hugon, directeur
du secteur PACA-Ouest pour SNA. Pas question en ef-
C’
JARDINIERE
DP3
THEATRE
CHEMINEE
DP3
DP1
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UNE EXPÉRIENCE INÉGALÉE
© Pyc
Édifiée en 1952 pour les besoins de la reconstruction, l’Unité d’habitation phocéenne
est la première application par Le Corbusier de son modèle de «cité-jardin verticale».
À l’intérieur : 337 appartements équipés pour accueillir 1 600 habitants disposant au
bout de leur couloir de tous les services de la ville moderne avec sa rue commerçante,
son hôtel et sa crèche. Au sommet de cette cité verticale de dix-huit étages : une piste
d’athlétisme, un bassin, un gymnase et divers aménagements qui témoignent des
ambitions de l’architecte pour cet étage à l’air libre.
Dès 1910, Le Corbusier fait en effet de la toiture un élément central dans sa
conception de l’habitat. Pour l’avant-garde européenne, le toit plat est alors le slogan
d’une nouvelle architecture libérée des traditions du passé. Mais plus qu’un concept
formel, le pape du Mouvement moderne fera du toit-terrasse un instrument
d’urbanisme, un lieu de rencontre et d’échange qui participe à un nouveau mode de
vie. De ce point de vue, la toiture de la Cité radieuse constitue aujourd’hui encore une
expérience inégalée.
fet sur ce monument classé au patrimoine national en
1986 de modifier le dessin des aménagements imaginés par Le Corbusier. « Cette Unité est en quelque sorte
un prototype, la tête de série des versions qui ont suivi.
Celle qui possède également le programme le plus complet. Elle reste aujourd’hui encore très fidèle à la réalisation de 1952. D’où une exigence forte pour préserver
l’authenticité et l’intégrité du site », souligne François
Botton, architecte en chef des Monuments historiques.
Restituer l’état d’origine
Premier objectif des travaux : mettre en œuvre un
complexe d’étanchéité pérenne et garanti, autrement
dit conforme aux prescriptions des DTU. L’intégralité
de la toiture a ainsi été mise hors d’eau à l’aide d’un
système renforcé, composé de deux membranes soudées en bitume élastomère SBS, d’une épaisseur de
3,5 mm chacune. L’ensemble des protections lourdes a
également été déposé et refait à neuf. Pour
l’entreprise d’étanchéité, le principal enjeu consiste
aujourd’hui à les restituer dans leur état d’origine,
parfaitement connu grâce aux archives très complètes
conservées par la fondation Le Corbusier. « Les formes
en béton protégeant les relevés étaient désolidarisées des
acrotères, explique Serge Hugon. Nous avons créé des
engravures, placé des fers et reconstitué à l’identique les
protections en respectant les géométries et les hauteurs
tracées par l’architecte. »
La réfection de la piste d’athlétisme en asphalte
s’effectue avec la même exigence de fidélité. Au pied
Vue en plan de
la toiture-terrasse
piste en asphalte
dallage en béton
BELVEDERE
TOUR DES ASCENSEURS
JARDINIERE
JARDINIERE
JARDINIERE
DP5
HALTE GARDERIE
DP4
GYMNASE
DP5
PLAN INCLINE
BASSIN
RAMPE D'ACCES
PLAN INCLINE
DP2
CHEMINEE
CHEMINEE
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Posée en
indépendance sur
un double écran,
la nouvelle
étanchéité est
composée de deux
membranes en
bitume élastomère
dont la deuxième
couche est soudée
en plein.
L’ancienne
étanchéité a été
conservée afin
d’assurer le hors
d’eau durant
les travaux.
de l’immeuble, des maquettes ont permis la mise au
point d’un traitement de surface capable de reproduire l’effet d’usure et la teinte spécifique, légèrement
rosé, du matériau. Les 1 200 m2 de piste ont été sablés
de manière à provoquer un vieillissement anticipé du
revêtement en asphalte d’une épaisseur de 20 mm,
coulé sur une chape en mortier.
Dalles en béton fibré
© Pyc
Autre grande zone traitée par l’entreprise : 1 000 m2
de dallage en béton entièrement déposés et remplacés
par des dalles en béton fibré coulées en place. Là encore, le nouveau matériau est vieilli artificiellement
par un grenaillage de billes d’acier. Le soin du détail a
Comme en 1950,
des coffrages en
planches de bois
ont été mis en
œuvre pour
restituer la trame
et la rugosité du
béton : un style qui
sera qualifié dans
les années 1960 de
«brutaliste».
© SNA
© Pyc
R É A L I S AT I O N >
été poussé ici jusqu’à recréer des joints de fractionnement sans modifier le calepinage d’origine. Afin de
conserver les dimensions du complexe initial,
l’étancheur a également sélectionné une couche drainante de faible épaisseur (1 cm) : une nappe à excroissances associée à un non-tissé et disposée entre
le mortier de pose et l’étanchéité.
Débuté en octobre 2009, le chantier de restauration
devrait s’achever en juin. Neuf mois de travaux qui
pourraient être prochainement récompensés par un
classement au Patrimoine mondial de l’humanité.
Depuis trois ans, l’Unité phocéenne ainsi que vingt et
une autres réalisations de l’architecte postulent pour
intégrer la prestigieuse liste de l’Unesco. Après deux
tentatives manquées, le dossier, soutenu par six pays,
sera de nouveau présenté en 2011. Avec ce label, la
Cité radieuse, deuxième monument le plus visité de
Marseille après Notre-Dame de la Garde, pourrait voir
sa fréquentation exploser. Ce sont 30 à 40 % de visiteurs supplémentaires qui passeraient sur son toit-terrasse pour goûter à la vue, au soleil et au ciel… Les
« joies essentielles » selon Le Corbusier. BC
LES INTERVENANTS
Maître d’ouvrage : syndicat des copropriétaires
Unité d’habitation Le Corbusier
Maître d’œuvre : Sud / Sud - Est Architectures
François Bottom
Etanchéité : SNA - agence de La Ciotat
Réfection des ouvrages en béton : Vivian & Cie
Réalisé en béton fibré, le dallage repose sur
une nappe à excroissances servant de couche
drainante.
Les Compagnons de Castellane
Produits d’étanchéité : Paradiene 35 S R4 (Siplast-Icopal)
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M I C H E L P É T U A U D - L É TA N G , C A B I N E T 4 A - A R C H I T E C T E S
« Aller plus loin que la simple
mise hors d’eau du bâti »
Architecte et urbaniste, Michel Pétuaud-Létang œuvre depuis
plus de quarante ans dans le monde de la construction,
notamment à Bordeaux où il a fait ses études et installé sa
première agence. Aujourd’hui l’Atelier aquitain d'architectes
associés (4A) compte dix associés et une cinquantaine
de collaborateurs. En 2007, l’agence 4A a notamment achevé
la restructuration du Regent Grand Hotel, palace réputé
mais fermé depuis une vingtaine d'années dans le centreville de Bordeaux.
Étanchéité.Info : Quel regard portez-vous sur la place du
toit plat dans l’architecture alors que ces espaces sont
souvent abandonnés aux gaines de ventilation et aux
antennes de télévision ?
Michel Pétuaud-Létang : En tant que principe constructif, la toiture-terrasse s’est imposée comme la solution majoritaire pour un grand nombre de typologies
de bâtiments : tertiaire, industriel, public… De ce
point de vue, sa place n’a cessé de s’accroître dans la
construction. Il est vrai que ces espaces sont devenus
le lieu d’implantation privilégié des équipements
techniques. Mais en soi, ce n’est pas une fonction dévalorisante pour le toit-terrasse. L’enjeu porte plutôt
sur l’intégration de cet ensemble dans le bâtiment.
C’est une question de qualité architecturale qui vaut
d’ailleurs pour le toit comme pour la totalité des ouvrages d’un édifice. Dans le domaine de l’habitat individuel, le constat est radicalement différent.
Jusque dans les années soixante, la maison à toit
plat était encore dans l’air du temps. Mais la remise
en cause des principes du Mouvement moderne et
les crises pétrolières ont entraîné des réflexes de protection, un retour vers un concept d’habitat antérieur où le toit en pente, symbole de l’abri, rassure.
É.I : Aujourd’hui, assiste-t-on selon vous à un renouveau du toit-terrasse ?
MP-L : L’idée d’exploiter cette cinquième façade n’est
pas nouvelle. Mais elle se généralise. Désormais, on
cherche de manière plus systématique à aller plus
loin que la simple mise hors d’eau du bâti. La végétalisation, les systèmes photovoltaïques ou encore
les procédés de surtoiture offrent de multiples possibilités de valorisation. Dans le cadre du projet
Euroméditerranée, nous menons actuellement le réaménagement des hangars du port autonome de
Marseille pour lequel nous avons imaginé une sur-
La Technopole
Montesquieu à
Martillac (33),
conçue en 1990
par le cabinet
d’architecture 4A.
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Les Terrasses du
Port à Marseille
(13) : cet ensemble
de 200 000 m2
comprendra
des surfaces
commerciales,
des restaurants,
un parking de
stationnement
couvert de
3 200 places,
un stade et
un centre de fitness
avec piscine.
É.I : Les réflexions autour de la mixité des fonctions au
sein d’un même ouvrage incitent de plus en plus les
concepteurs à valoriser l’espace du toit-terrasse. Le bâtiment multifonctionnel est-il un thème porteur pour
l’architecture ?
MP-L : C’est un parti que je défends et que je tente de
développer dans mes projets. Dans le centre-ville bordelais par exemple, nous réalisons actuellement pour
un maître d’ouvrage privé un complexe mixte associant un auditorium de 1 400 places, des logements,
un parking et des espaces de bureaux. Mais ce type de
projets associant plusieurs fonctions, et parfois plusieurs maîtres d’ouvrage, peut s’avérer complexe pour
des raisons de copropriété, de partage des responsabilités dans le temps ou encore simplement lorsqu’il
s’agit de déterminer qui paye quoi. Il faut donc des
maîtres d’ouvrage qui osent. Les plans locaux
d’urbanisme pourraient également être plus incitatifs.
É.I : Les bâtiments hybrides sont l’une des réponses à la
densification urbaine. L’idée de densifier la ville est-elle
aujourd’hui globalement admise ?
34 ·
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© DR
É.I : Votre cabinet est basé à Bordeaux. La rétention
temporaire d’eau en toiture semble s’être développée
dans la région plus qu’ailleurs. Pour quelle raison ?
MP-L : Bordeaux est une cuvette. Il y a encore une
vingtaine d’années, les orages inondaient la ville.
Les réseaux convergeant vers le centre n’étaient pas
en mesure d’absorber la quantité d’eau rejetée par la
proche banlieue en raison d’une imperméabilisation
croissante des sols. Pour contenir ce phénomène,
outre des solutions collectives de type bassins, les règlements d’urbanisme prévoient des mesures compensatoires à l’échelle de la parcelle avec, dans le cas
de Bordeaux, un débit de fuite limité à 3 l/s par
hectare. Plusieurs techniques de stockage ou
d’infiltration permettent d’y répondre. Les toituresterrasses à rétention temporaire demeurent une solution particulièrement intéressante, surtout lorsque
le bâti touche les quatre coins du terrain.
© DR
toiture de 2 à 3,5 mètres de haut, couverte de capteurs photovoltaïques à la façon des sheds d’une
usine. Cet espace permettra en outre de dissimuler
les équipements techniques, mais également d’y loger les locaux spécifiques aux équipes d’entretien.
D’une certaine manière, le toit-terrasse est ici traité
comme un étage supplémentaire devenu un élément
architecturel fort de notre projet.
MP-L : Elle est en tout cas souhaitée par ceux qui disposent d’un minimum de bon sens. L’étalement urbain est facteur d’isolement et favorise l’usage de la
voiture alors qu’on demande parallèlement au bâti
d’être performant sur le plan énergétique et environnemental. La question de la maîtrise de ce phénomène n’est pas nouvelle. Elle reste toutefois un enjeu
majeur de l’urbanisme des années à venir, même si
la densification de la ville n’est pas forcément une
idée porteuse au plan politique. Aujourd’hui encore,
elle a du mal à passer chez certains élus. La maison
individuelle plantée au milieu de son jardin reste un
idéal pour la majorité des Français et il est difficile
de sortir de ce schéma. D’où la nécessité de travailler
sur des formes d’habitat collectif de qualité qui préservent les besoins d’individualité. Des expériences
intéressantes de densification sont actuellement menées dans le cadre des écoquartiers. Une notion qu’il
faudrait dès maintenant étendre à l’échelle de la
ville, voire de la métropole.
PROPOS RECUEILLIS PAR BASTIEN CANY

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