Aspects légaux de la tenue du conseil d`administration
Transcription
Aspects légaux de la tenue du conseil d`administration
6.7. Aspects légaux de la tenue du conseil d’administration : Droits et devoirs de l’administrateur Etre administrateur de PME aujourd'hui, cela ne s'improvise pas. Quels sont les différents problèmes qu'un administrateur peut rencontrer? Quels sont ses droits, mais aussi ses devoirs? Autant de questions auxquelles répond Stéphane Collin, avocat au cabinet CMS DeBacker. Jacqueline Remits LICENCIÉ EN DROIT de l'ULB, doté d'une licence complémentaire en propriété intellectuelle de la KUB, collaborateur senior au cabinet CMS DeBacker, co-auteur de La protection de l'actionnariat minoritaire, Stéphane Collin anime des sessions de Solvay Entrepreneurs depuis plusieurs années. Il a donc l'habitude de mettre à la portée de tous ces notions arides du droit en matière de conseil d'administration. Pour appuyer son propos, il ne manque jamais de citer de quelques exemples. Pour lui, le conseil d'administration doit être sensible aux problématiques de l'environnement. «Lorsque survient un problème lié à l'environnement dans l'entreprise, qui est responsable?», interroge-t-il. «Quels sont les risques encourus sur le plan légal? Et par qui?» Si Stéphane Collin cite plusieurs business cases, les participants ont tout autant la possibilité d'évoquer les problèmes qu'ils vivent au quotidien dans leur entreprise. Autre cas d'école, «lorsqu'une entreprise connaît des difficultés financières, des problèmes de trésorerie, de liquidités, voire qu'elle se retrouve soudain dans l'antichambre de la faillite, il est essentiel que le conseil d'administration soit extrêmement attentif et diligent afin d'être parfaitement informé de la situation réelle de la société, de prendre les décisions adéquates et, le cas échéant, de ne pas poursuivre une activité irrémédiablement compromise.» La loi sur la continuité des entreprises du 31 janvier 2009, entrée en vigueur le 1er avril, remplace désormais la loi sur le concordat judiciaire. «Cette nouvelle législation a pour but la survie de la société et de tout mettre en œuvre afin d'y parvenir. Avec l'ancienne loi, le concordat restait encore trop souvent l'antichambre de la faillite.» Il existe deux codes de corporate governance, le code Buysse, pour les PME, et le code Lippens, qui vient d'être remplacé par le code 2009 de corporate governance, pour les sociétés cotées en Bourse. IHK-Infos 09/2009 Aspects légaux de la tenue du conseil d'administration Après avoir passé en revue la composition du conseil d'administration, avec les mandataires de la société et la subdélégation, Stéphane Collin en vient au statut des administrateurs: leur désignation par l'assemblée générale, leur éventuelle cooptation par le conseil d'administration, la procédure de nomination - révocation, ainsi que le principe de révocation «ad nutum» des administrateurs et la démission des administrateurs. «Un administrateur est révocable «ad nutum» à tout moment par l'assemblée générale. Il faut casser le mythe de la révocation, insiste Stéphane Collin. En effet, si un administrateur est révoqué, alors qu'il est actif dans la société, il n'en garde pas moins ses fonctions distinctes de son mandat d'administrateur, que ce soit, par exemple, de directeur administratif ou de directeur financier.» Et l'avocat d'embrayer sur un autre mythe, celui de la démission des administrateurs. Après en avoir évoqué les modalités, il détaille les fautes qui peuvent être reprochées à l'administrateur démissionnaire, non seulement celles commises avant la démission, mais aussi celles commises par le conseil d' administration après la démission, dansl la mesure où la démission ne produit ses effets, vis-àvis de tiers (y compris le curateur), dès à dater de la publication aux Annexes du Moniteur belge, et pas avant. «Seule cette publication rend la démission opposable.» Le pré carré du conseil d'administration Stéphane Collin entame ensuite le chapitre du fonctionnement du conseil d'administration, avec sa collégialité, sa bonne pratique, la tenue de réunions régulières, la délibération et la présidence. Puis, il en vient à la composition et au fonctionnement du comité de direction. Comment est-il créé et mis en place? En 2002, le législateur a effectué une refonte du droit des sociétés et il a consacré un nouvel organe au sein des sociétés, le comité de direction. Quelles sont les Seite 30 fonctions différentes du comité de direction et du conseil d'administration? «Ce dernier garde toujours son pré carré qui est la politique générale de la société», répond Stéphane Collin. En outre, le conseil d'administration ne peut pas non plus déléguer au comité de direction les pouvoirs que lui reconnaît expressément le code des sociétés: arrêter les comptes annuels, faire un rapport de gestion, des rapports spéciaux dans le cadre de scission et de fusion de la société.» Qu'en est-il du règlement d'ordre intérieur? «Il s'agit de la décision d'un organe visant à compléter les statuts de l'entreprise.» L'avocat développe encore la façon dont est désigné le représentant permanent, lorsqu'une personne morale est nommée administrateur, les conditions de désignation, sa compétence interne et son pouvoir de représentation, ses droits et obligations, ses rapports avec la personne morale administrateur et la personne morale administrée, son caractère unique, l'éventuelle possibilité de subdéléguer et sa responsabilité. Droits et devoirs des administrateurs Les administrateurs sont nommés par les actionnaires. La responsabilité est la même pour tous, actifs et non-actifs. «Parfois, il y a davantage de risques pour les administrateurs non-actifs dans le mesure où l'accès à l'information peut s'avérer plus difficile pour eux.» Les administrateurs ont, à la fois, des droits et des devoirs. «Un des devoirs d'un administrateur est de se demander s'il est compétent», glisse Stéphane Collin. Ceci étant posé, il existe un devoir d'information des administrateurs lors de l'assemblée générale avec le rapport de gestion. Quel est le contenu du rapport de gestion? «Il doit rendre compte de la gestion, être un exposé fidèle de l'évolution des affaires de la société, des événements survenus après la clôture de l'exercice, des circonstances susceptibles d'avoir une influence notable sur le développement de la société, faire le point sur la recherche et développement, les succursales, évoquer la perte reportée éventuelle et, enfin, donner certaines informations spécifiques, notamment au sujet des instruments financiers.» Dans le cas d'une entreprise en difficulté, quels sont les devoirs des administrateurs? «Le premier devoir de chaque administrateur est de s'informer, d'abord au sein du IHK-Infos 09/2009 conseil d'administration et, le cas échéant, auprès de la direction de l'entreprise, de la direction financière, de la direction administrative et de la direction des ressources humaines», répond Stéphane Collin. «L'objectif est de s'assurer d'avoir une vision claire de la situation. Ensuite, il s'agit de veiller aux intérêts des tiers. Et si le passif s'accroît, rester lucide et décider d'arrêter. Et informer les actionnaires. Il y a un devoir de lucidité pour pouvoir poser le constat nécessaire et se demander s'il faut restructurer ou pas, et dans quelle mesure.» En ce qui concerne les droits des administrateurs, Stéphane Collin envisage cette problématique sous forme du droit à l'information. A quoi a-t-on droit? «La réponse est évidente: oui, l'administrateur doit s'informer, qu'il soit actif ou non-actif, afin de pouvoir exercer son mandat en pleine connaissance de cause.» L'information constitue pour les administrateurs également un devoir. Que peut-on donner comme information aux actionnaires et aux tiers? Comment doit réagir un administrateur à l'égard d'un actionnaire qui entend mettre en œuvre ses divers droits à l'information? En effet, l'actionnaire a le droit de demander la convocation de l'assemblée générale (avec une relative publicité, convocation à brefs délais, sans jamais oublier la collégialité du conseil d'administration), celui de participer à l'assemblée générale et de prendre connaissance des documents qui doivent y être communiqués, celui de poser des questions (par exemple, quelles sont les obligations à charge des administrateurs?) et, dans certaines circonstances, celui d'investigation individuelle. L'information en dehors des assemblées générales est également passée en revue avec l'administrateur représentant un actionnaire particulier ou un tiers, le droit d'investigation individuelle de l'administrateur, le devoir de discrétion de l'administrateur, la relation entre un administrateur et l'actionnaire ou le tiers qu'il représente. Les droits des actionnaires? «Ils doivent être informés sur l'état de la société. Le rapport de gestion doit leur être envoyé. Ils ont évidemment le droit de poser des questions et de prendre des informations au dehors», conclut Stéphane Collin. PME KMO juin 2009 Seite 31