maladie d`Alzheimer et fin de vie

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maladie d`Alzheimer et fin de vie
Médecine palliative — Soins de support — Accompagnement — Éthique (2011) 10, 230—244
DOSSIER THÉMATIQUE « GÉRIATRIE »
Maladie d’Alzheimer et fin de vie : aspects évolutifs
et stratégies thérapeutiques
Alzheimer’s disease and end of life: Evolutionary aspects and therapeutic
strategies
Bénédicte Duzan a,∗,1, Pascale Fouassier b
a
b
Service de gériatrie, hôpital Corentin-Celton, 92130 Issy-les-Moulineaux, France
Centre de soins palliatifs gériatriques, hôpital Charles-Foix, 94200 Ivry-sur-Seine, France
Reçu le 15 mars 2011 ; accepté le 14 avril 2011
Disponible sur Internet le 21 septembre 2011
MOTS CLÉS
Démences ;
Fin de vie ;
Soins palliatifs ;
Gériatrie ;
Thérapeutiques
KEYWORDS
Dementias;
End of life;
Palliative care;
∗
1
Résumé La maladie d’Alzheimer est la plus fréquente des maladies cérébrales dégénératives démentielles. Elle se caractérise par une détérioration progressive de la mémoire et des
facultés cognitives. À ce jour, cette maladie est incurable et suit une évolution irréversible.
La démence d’Alzheimer est apparentée à d’autres démences, comme la démence vasculaire,
la démence fronto-temporale ou la démence à corps de Lewy. Les démences sont des maladies chroniques qui réduisent l’espérance de vie. Il est important de bien savoir en reconnaître
les différents stades afin d’adapter progressivement les choix thérapeutiques. Actuellement,
deux écueils majeurs guettent le malade Alzheimer en fin de vie : l’acharnement inadéquat
et l’abandon injustifié. Bien connaître les spécificités de la fin de vie dans le contexte de ces
démences, en particulier les grandes difficultés de communication verbale et leurs conséquences sur l’évaluation du confort de ces personnes malades, permet de proposer une approche
thérapeutique ajustée, respectant la vulnérabilité de cette population.
© 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Summary Alzheimer’s disease is the most common of the degenerative brain diseases involving dementia. It is characterized by gradual memory loss and cognitive decline. Today, this
disease knows no treatment and follows an irreversible death path. There are other dementias
related to Alzheimer’s disease: among them, vascular dementia, fronto-temporal dementia or
Auteur correspondant.
Adresse e-mail : [email protected] (B. Duzan).
Photo.
1636-6522/$ — see front matter © 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.medpal.2011.08.006
Maladie d’Alzheimer et fin de vie : aspects évolutifs et stratégies thérapeutiques
Elderly;
Therapeutics
231
dementia with Lewy bodies. Dementias are chronic diseases, which shorten life expectancy. It
is important to be able to recognize their different stages so as to gradually choose the most
adapted care level. Currently, there are two major pitfalls awaiting the Alzheimer’s sufferers
at the end of their lives: inadequate aggressive therapy and unjustified abandonment. A better
knowledge of the specificities associated with the end of life in the context of such dementias,
especially concerning communication difficulties and their impact on the comfort assessment
of those patients, helps provide adapted care practices, which respects the vulnerability of this
population.
© 2011 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
Introduction
Les malades qui souffrent de la maladie d’Alzheimer ou
d’autres démences apparentées (telles que la démence
fronto-temporale, la démence vasculaire, la démence de
Parkinson ou la démence à corps de Lewy) évoluent inéluctablement vers des stades avancés où ils meurent des
complications liées à cet état. C’est pourquoi il est particulièrement important de savoir reconnaître les formes
évoluées de démence et leur pronostic afin de pouvoir
faire correspondre le niveau des soins à ces caractéristiques et d’éviter l’obstination thérapeutique ou à l’inverse
l’abandon. Dans ce cadre, la démarche spécifique des soins
palliatifs va permettre d’apporter des solutions thérapeutiques adaptées, qui seront susceptibles d’évoluer avec la
sévérité de la maladie démentielle. Cette démarche place
au-dessus de tout le respect de la dignité de la personne
malade et sa qualité de vie. Elle s’inscrit dans un travail
d’équipe incluant, outre les soignants médicaux et paramédicaux, la famille et l’entourage proche du patient.
Cet article se propose de faire un bref rappel sur les
caractéristiques de la démence évoluée et d’aider à savoir
reconnaître les différents stades de cette maladie et leur
degré de sévérité, l’objectif étant de savoir reconnaître la
fin de vie d’un patient atteint d’Alzheimer ou d’une autre
démence apparentée. Ensuite, nous exposerons les spécificités de l’approche palliative chez le dément à un stade
très évolué avec en particulier l’écueil des troubles de
la communication verbale. Sans entrer dans les considérations éthiques, nous discuterons également du problème de
l’urgence avec pronostic vital mis en jeu dans ce contexte.
Fort de ces spécificités, nous vous proposerons différents
protocoles, issus de notre pratique quotidienne en gériatrie et de la littérature parue sur le sujet, permettant de
répondre aux différents symptômes pénibles rencontrés à la
phase terminale chez ces patients.
Évolution naturelle de la maladie
d’Alzheimer
La maladie d’Alzheimer est une maladie chronique dégénérative liée à des lésions cérébrales irréversibles. Elle débute
souvent de manière silencieuse, puis évolue sur une longue
période de vie, très variable d’un individu à l’autre. La survie moyenne (après le diagnostic) est de l’ordre de huit
années pour les patients âgés de 65 à 70 ans au moment du
diagnostic et de trois années pour ceux de 85 ans. La durée
de la phase sévère, sur cette période de vie avec la maladie,
s’étale d’un à trois ans [1]. Mais parfois les malades survivent
plus de vingt ans !
La maladie d’Alzheimer est l’étiologie la plus commune
des syndromes démentiels. Ceux-ci répondent à des critères
diagnostiques précis du DSM-IV et de la CIM 10. Plusieurs
stades évolutifs dans la maladie d’Alzheimer sont différenciés, du stade pré-démentiel (ou prodromal ou mild
cognitive impairment [MCI]) au stade terminal (Tableau 1).
À chaque stade correspondent des critères diagnostiques
permettant de situer le patient. Au stade sévère de la
maladie, il existe une altération profonde des fonctions
supérieures (aphasie, apraxie, agnosie, non-reconnaissance
de l’entourage proche) associée à des troubles du comportement, des troubles de l’alimentation, une incontinence
urinaire et fécale, des troubles de la locomotion menant
à un état grabataire. L’évolution d’un stade à un autre
est progressive, inexorable, sur plusieurs années, pouvant
faire alterner des phases de stabilisation avec des périodes
d’aggravation brutale, parfois déclenchées par des événements intercurrents (chutes, infections, hospitalisations. . .).
Il existe différentes échelles pour aider à quantifier la
sévérité de la démence. Le Mini Mental State Examination
(MMSE) (version consensuelle du Greco [2]) est l’outil le
plus répandu mais s’avère inexploitable dans les démences
très sévères où le patient mutique ne peut collaborer à
l’exploration de ses fonctions cognitives. La Clinical Dementia Rating (CDR) est une échelle numérique permettant au
professionnel de santé de quantifier la sévérité des symptômes de démence en explorant six domaines : la mémoire,
l’orientation, la résolution de problèmes, les activités ayant
trait à l’entretien du domicile, les loisirs et les soins personnels [3]. La Global Deterioration Scale (GDS) de Reisberg
décrit quant à elle sept niveaux d’atteinte du fonctionnement normal à l’affaiblissement intellectuel très grave mais
est essentiellement centrée sur les fonctions cognitives et
donc moins globale que la CDR [4]. Le Tableau 2 permet de
relier les stades de sévérité de la démence aux résultats de
ces différentes échelles [5].
Reconnaître la fin de vie du patient
dément
L’entrée dans la « fin de vie » d’une démence est particulièrement difficile à pronostiquer. On ne peut pas prédire
le risque de décès d’un malade dans les six mois même
si l’on sait que ce risque augmente avec la sévérité de
la démence ou l’âge de la personne atteinte. Une étude
de 2004 menée dans un réseau de maisons de retraite de
232
Tableau 1
B. Duzan, P. Fouassier
Différents stades évolutifs de la maladie d’Alzheimer.
Different evolutionary stages of Alzheimer’s disease.
Stades
Symptômes typiques
Stade 1 : fonctionnement normal
Aucun trouble de la mémoire
Stade 2 : affaiblissement intellectuel très léger
(vieillissement normal ou futur MCI ?)
Plainte subjective de troubles de mémoire
Oublis non apparents pour l’entourage
Stade 3 : affaiblissement intellectuel léger (MCI)
Troubles de mémoire patient (pouvant pertuber certains actes
de la vie courante)
Baisse de l’attention et de la concentration
Troubles évidents pour l’entourage
Négation des troubles par le patient
Stade 4 : affaiblissement intellectuel modéré
(stade léger)
Déficit prononcé des capacités mnésiques et d’attention
Incapacité à accomplir certaines tâches complexes
Négation des troubles par le patient
Stade 5 : affaiblissement intellectuel modérément
sévère (début de démence)
Désorientation temporo-spatiale
Ne peut survivre sans aide
Est encore autonome pour se laver et manger, plus ou moins
pour s’habiller
Stade 6 : affaiblissement intellectuel grave
(démence installée)
Perte de mémoire sévère
Besoin d’aide pour les actes de la vie quotidienne
Modifications de la personnalité
Pertubation du rythme nycthéméral
Stade 7 : affaiblissement intellectuel très grave
(démence avancée)
Perte des fonctions motrices de base
Perte des capacités verbales
Grave déficiences cognitives
Dépendance totale, incontinence
MCI : mild cognitive impairment.
la région de Boston aux États-Unis a montré que moins
de 10 % des résidents atteints de démence avaient été
reconnus comme étant proche de la mort dans les six mois
qui avaient précédé celle-ci [6]. En effet, contrairement
à un malade cancéreux dont l’état s’aggrave brutalement
et de manière précipitée sur la fin, le dément Alzheimer
suit un processus beaucoup plus lent avec alternance de
phases d’aggravation, de stabilisation et d’amélioration
(ce que certains appellent le « lent mourir »). En
Tableau 2
général, le malade Alzheimer ne va pas mourir uniquement de l’évolution cérébrale de sa démence même
mais de complications intercurrentes, le plus souvent
de nature infectieuse ou d’autres comorbidités liées à
l’âge, telles que les pathologies cardiovasculaires et les
pathologies cancéreuses. Si les causes immédiates de décès
ne diffèrent donc pas de celles du patient non dément,
les études montrent que la démence sévère entraîne une
surmortalité [7].
Stade de sévérité de la maladie d’Alzheimer selon les différentes échelles d’évaluation.
Stage of severity of Alzheimer’s disease according to different scales.
Diagnostic
MCI
amnésique
Stades CDR
Stades GDS
Années d’évolution
MMSE
0,5
3
0
30
Maladie
d’Alzheimer
légère
Maladie
d’Alzheimer
modérée
Maladie
d’Alzheimer
modérée à
sévère
Maladie
d’Alzheimer
sévère
4
6
24
1
5
8
19
2—3
6
10,5
15
Non-évalué
7
14—18
10 > 3
Décès
MCI : mild cognitive impairment ; CDR : Clinical Dementia Rating ; GDS : Global Deterioration Scale ; MMSE : score du Mini Mental State
Examination.
Maladie d’Alzheimer et fin de vie : aspects évolutifs et stratégies thérapeutiques
233
En France, une étude qualitative menée au travers d’une
série d’entretiens avec quarante-quatre professionnels de
la santé a permis de décrire trois phases successives de
logique de soins auprès des malades Alzheimer : une phase
de stimulation, une phase de « soins palliatifs chroniques »
et une phase terminale [8]. Dans la phase de stimulation,
les soins cherchent à promouvoir au maximum le maintien
de l’autonomie des patients et à limiter la progression de
la maladie. Au fur et à mesure que la maladie progresse,
les stimulations sont abandonnées au profit de soins de
confort et de plaisir ; les soins médicaux permettant de
maintenir un bon état de santé sont poursuivis (nutrition
et hydratation, traitement des infections et autres pathologies intercurrentes, prévention des complications. . .). Puis,
petit à petit, les soins de confort prennent de plus en plus
de place et l’on entre dans la phase terminale lorsque l’on
décide d’arrêter les soins curatifs. Cette étude montre bien
qu’il n’y a pas de barrières qui séparent une phase de la suivante mais un glissement insidieux qui se fait spontanément
et qui reflète bien notre incapacité à définir précisément
l’entrée en « fin de vie » d’un patient atteint de démence
évoluée. Une étude américaine en cours, nommée Cascade,
dirigée par le Dr Susan Mitchell, a pour objectif de décrire
entièrement l’histoire naturelle de la phase terminale des
démences, d’un point de vue prospectif, et ce afin de pouvoir mieux la définir et la reconnaître [9].
du malade, voire de celui exprimé par le patient quand il
était encore en état de le faire (directives anticipées), il
est important d’avoir su anticiper et éduquer les familles sur
l’évolution de la maladie avant qu’une situation d’urgence
se présente. Enfin, même si la communication devient beaucoup plus difficile en cas de démence très avancée, on peut
jusqu’à un stade tardif de la démence recueillir le désir du
patient sur son « envie de vivre » si on le recherche.
Des outils d’aide à la décision ont été développés pour
aider les professionnels à déterminer à partir de quel
moment les patients souffrant de démence avancée doivent
commencer à recevoir des soins palliatifs. Ainsi le Dr SebagLanoë propose un questionnement simple en dix questions,
issu de son expérience en la matière [10]. Répondre en
équipe pluridisciplinaire à ces questions nécessite une bonne
connaissance du malade, de sa situation pathologique,
d’avoir pris la peine de recueillir le désir du patient si cela
est possible et d’avoir écouté les familles ou les proches.
Cela évite donc de prendre des décisions précipitées. Il faut
aussi garder à l’esprit que le plus souvent notre démarche
diagnostique a été tronquée afin de respecter le confort du
patient et que nous ne raisonnons que sur des hypothèses
de maladie grave. Le malade peut en outre avoir des phases
de rémission inattendue. Il faut donc se conserver le droit
à l’ambivalence et à pouvoir changer d’avis en fonction de
l’évolution de la situation [7].
Prendre la décision de débuter les soins
palliatifs
Spécificités des soins palliatifs chez le
malade Alzheimer
La gestion de la fin de vie de ces malades ne débute donc
pas avec la prise en charge de symptômes indiscutablement
repérables mais dans des contextes variés où le renoncement aux soins curatifs est motivé car ils constituent une
forme d’agression injustifiée devant l’impossibilité de rétablir une situation considérée humainement acceptable pour
le patient. Trois grands cas de figures peuvent être distingués :
• l’apparition brutale d’une maladie grave mettant en jeu
le pronostic vital chez un patient dément par ailleurs ;
• la découverte d’un symptôme faisant suspecter une affection mortelle dont le traitement va s’avérer, d’emblée
ou ultérieurement, trop lourd chez un patient atteint de
démence sévère ;
• la détérioration plus ou moins rapide de l’état général
dans un tableau associant le plus souvent grabatisation,
dénutrition sévère, pneumopathies d’inhalation à répétition et apparition d’escarres multiples chez un patient
atteint d’une démence très sévère.
Les soins palliatifs constituent un modèle particulier de soins
comportant une triple dimension clinique, organisationnelle
et éthique. D’un point de vue clinique, ils s’attachent
à préserver la qualité de vie du patient, à soulager ses
symptômes, à prendre en compte sa souffrance mais également celle de son entourage. Le mode organisationnel
s’appuie sur une démarche collective, en équipe, multiprofessionnelle. La dimension éthique place le patient au
centre du soin et ne fuit pas le temps de la mort. Le concept
des soins palliatifs veille à apporter des soins complets et
actifs à toute personne atteinte d’une maladie grave évolutive mettant en jeu le pronostic vital, en phase avancée
ou terminale [11]. Cela correspond donc parfaitement aux
besoins, en termes de soins, des patients Alzheimer arrivant
dans une phase avancée de leur démence. Ces besoins réels
peinent néanmoins à être satisfaits du fait des caractéristiques propres à cette pathologie.
Dans chaque cas de figure, le processus de décision doit
être guidé par la réponse à des questions concernant le
bénéfice thérapeutique attendu de la solution envisagée,
la qualité de vie qui en découlera, le juste équilibre entre
persister dans des soins curatifs proportionnés et s’obstiner
déraisonnablement. Ces questions doivent se discuter en
équipe interdisciplinaire impliquant tous les intervenants
auprès de la personne démente ainsi que son entourage
familial proche. Mais la décision finale reste sous la responsabilité du médecin traitant seul [7]. Afin de pouvoir tenir
compte de l’avis de tous les membres de l’entourage proche
Difficultés à finir ses jours chez soi
Les soins palliatifs aujourd’hui cherchent à favoriser le
maintien au domicile jusqu’à la fin pour que le malade
décède chez lui entouré de ses proches. Mais les patients
atteints de démence sont souvent institutionnalisés bien
avant la phase terminale soit parce qu’ils présentent des
troubles du comportement qui dépassent la bonne volonté
de leurs proches, soit parce qu’ils sont hospitalisés pendant
la longue phase du « lent mourir » car, faute d’aide adaptée,
les aidants souvent fragiles eux-mêmes s’épuisent au domicile. En institution médicosociale, d’une part, les proches
234
sont moins présents et impliqués, d’autre part, les équipes
sont, encore trop souvent, insuffisamment formées et motivées pour accompagner le dément dans ses derniers jours,
ce qui entraîne fréquemment le transfert à l’hôpital [12].
Or, à l’hôpital, le dément en fin de vie risque d’être plus
exposé au risque d’acharnement thérapeutique, d’abandon
psychologique par manque de disponibilité du personnel
et de sous-estimation de certains symptômes pénibles par
manque de formation aux outils de communication non verbale et d’attention des équipes. Depuis 2007, sous l’égide
de la direction générale de la Santé, le programme Mobiqual
a développé, en partenariat avec la Société française de
gériatrie et gérontologie (SFGG) et la Société française
d’accompagnement et de soins palliatifs (Sfap), une mallette de formation aux soins palliatifs gériatriques pour les
établissements d’hébergement de personnes âgées dépendantes et les services de soins de longue durée [13,14]. En
2010, cette mallette a fait l’objet d’une remise à jour et a
inclus les problématiques spécifiques au domicile.
Difficultés d’admission en unité de soins
palliatifs
À l’origine, les soins palliatifs et les unités développées spécialisées dans l’accueil des personnes en fin de vie (unités
de soins palliatifs [USP]) ont été créés autour de la prise
en charge des malades atteints de cancer, pour lesquels
l’espérance de vie était estimée inférieure à trois mois
(même si cette estimation est toujours sujette à caution).
Or, chez les patients atteints de démence, nous avons déjà
fait la remarque qu’il était difficile de pronostiquer le délai
de survenue du décès. Cela crée une véritable barrière à
l’admission de ces personnes en unité de soins palliatifs classique [12]. Selon une enquête aux États-Unis, seulement 2 %
des patients atteints de démence sévère viendraient terminer leurs jours dans les unités de soins palliatifs américaines
à cause de ce problème [1]. Ces dernières années en France,
sont apparues des unités de soins palliatifs gériatriques qui
pallient ce problème en ne tenant pas compte de ce délai
parfois très long jusqu’au décès. Pourtant, le concept de
l’unité de soins palliatifs n’est pas celui d’un lieu pour
mourir, mais bien d’un lieu pour bénéficier d’une stratégie
thérapeutique ajustée. Le décès au domicile ou en établissement d’hébergement de personnes âgées dépendantes,
entouré par du personnel connu et correctement formé,
peut en théorie être tout aussi souhaitable. Et, en unité de
soins palliatifs gériatrique, les soins procurés reposent sur le
concept de « soins continus » qui entremêlent soins curatifs,
soins palliatifs et soins terminaux, pour coller à l’alternance
de phase d’aggravation et de rémission du malade atteint de
démence évoluée [7,12].
Difficultés liées aux troubles de la
communication
Habituellement, les équipes de soins palliatifs cherchent
à préserver au maximum la lucidité des patients et leur
capacité à communiquer. Chez la personne démente, les
problèmes de communication sont au premier plan dans
les phases avancées de la maladie et il faut donc rechercher d’autres moyens d’interagir avec le patient. Des
B. Duzan, P. Fouassier
approches différentes, centrées sur le toucher, le massage,
la musicothérapie, l’aromathérapie et autres stimulations
psycho-sensorielles ou affectives, peuvent contribuer à
créer des interactions positives hors langage. Pour les soignants, des formations spécifiques à la relation avec ce
type de patients sont nécessaires car beaucoup se trouvent
déstabilisés et trop peu sont en capacité de développer une
compétence innée dans ce domaine. L’impact de cette prise
en charge relationnelle adaptée n’est pas anecdotique. Elle
permet une économie non négligeable de souffrance physique et psychique.
Spécificités des choix thérapeutiques
Il ne faut pas résumer l’approche palliative, chez le patient
dément en phase avancée, à une abstention thérapeutique associée à une prescription d’opioïdes. Chez ce type
de patient, les choix thérapeutiques doivent prendre en
compte leurs multiples vulnérabilités : fragilité cérébrale,
âge avancé et son panel de comorbidités (insuffisance rénale
fréquente, dénutrition), troubles de la communication (le
patient ne se plaindra pas en cas d’effet indésirable). De
ce fait, on doit cibler en première intention des molécules
minorant les effets centraux comme l’oxycodone plutôt que
la morphine. La titration thérapeutique doit être plus fine
et la surveillance des effets indésirables bien organisée. De
même, la galénique et la voie d’administration doivent être
réfléchies. Le recours à des pratiques qui consistent à ouvrir
les gélules et à écraser les comprimés pour les administrer
plus facilement dans une compote ou une crème sont utiles
mais doivent faire l’objet d’une supervision éclairée sur
les incidences pharmacocinétiques et pharmacodynamiques
et sur les alternatives appropriées. Les formes orales en
gouttes ou à dissolution rapide en bouche sont préférées à
tout comprimé ou gélule de taille dissuasive. Lorsque la voie
orale est strictement impossible ou par trop aléatoire, la
voie privilégiée en phase palliative avancée est la voie souscutanée car, pratiquement toujours accessible, elle permet
de répondre aux besoins médicamenteux les plus fréquents
en termes de confort. Dans ce contexte, la voie intraveineuse est le plus souvent écartée d’emblée du fait de la
difficulté à perfuser ce type de malades et de l’impact négatif sur leur confort. Il y a bien sûr des exceptions, notamment
quand le patient dément se trouve en phase terminale du
fait de l’évolution d’une pathologie cancéreuse et qu’il est
porteur d’un Port-a-Cath® qui pourra alors être mis à profit,
en l’absence d’agitation et si l’environnement le permet.
Il est bon de rappeler qu’il n’y a pas d’indication à poser
une sonde naso-gastrique en phase terminale de démence
pour administrer des médicaments de confort. En revanche,
si une gastrostomie a été posée antérieurement, et même
si l’alimentation artificielle a été arrêtée, l’utilisation de
cette voie pour l’administration des médicaments est possible jusqu’au décès.
Réflexion sur le recours aux pratiques de
réanimation et aux transferts
Chez le patient âgé fragile, le succès de la réanimation
cardiorespiratoire est très limité, surtout en institution
Maladie d’Alzheimer et fin de vie : aspects évolutifs et stratégies thérapeutiques
et en présence de comorbidités associées. Seuls 3,5 %
quittent l’hôpital en vie. Pour les patients atteints de
démence, le taux de survie à la sortie de l’hôpital chute
à environ 1 % (la démence divise par trois les chances
de réussite d’une réanimation cardio-pulmonaire) [15]. En
outre, l’environnement d’une unité de soins intensifs n’est
pas adapté à une personne démente, qui est désorientée
et développe souvent un délire. Et les survivants à une
réanimation cardio-pulmonaire ont ensuite des incapacités beaucoup plus importantes qu’avant l’arrêt cardiaque.
Il paraît donc évident que des patients souffrant d’une
démence évoluée ne soient pas soumis inutilement à ces
manœuvres de réanimation [1]. Pour ce faire, il est important qu’une réflexion préalable, hors contexte de l’urgence,
ait eu lieu et que des limitations thérapeutiques claires aient
été posées.
De même, le transfert vers un service d’urgence ou
un hôpital d’un malade atteint de démence évoluée résidant en établissement d’hébergement de personnes âgées
dépendantes n’est pas forcément la meilleure option. On
sait en effet que, même si elle peut s’avérer tout à fait
nécessaire, l’hospitalisation d’une personne atteinte de
démence l’expose à des risques graves tels que dépression, délire, chutes, anorexie, incontinence, grabatisation
et les complications qui en découlent (phlébite, embolie
pulmonaire, infections, etc.). Les études ont montré que
le taux de survie à long terme des résidents traités dans
leur établissement était supérieur à ceux hospitalisés [15].
On peut imaginer bien sûr que les patients transférés sont
les plus graves, ce qui semble justifier à première vue
le recours à l’hôpital, mais il n’est pas évident, dans les
stades avancés de la démence, que les services hospitaliers
aigus offrent une réponse adaptée à la grande vulnérabilité de ces patients et répondent réellement à leurs besoins
en soins de confort. Les explorations, réalisées faute de
connaissances claires sur la situation de base, vont parfois
imposer des contraintes disproportionnées au patient par
rapport aux bénéfices possibles. Bien sûr, le lieu d’origine
(domicile ou établissement d’hébergement de personnes
âgées dépendantes) peut se trouver en difficulté devant une
aggravation, un inconfort rebelle ou une charge en soins
très élevée, mais l’anticipation d’un recours possible à des
structures spécialisées adaptées (réseaux, équipes mobiles
de soins palliatifs) devrait être plus souvent la règle pour
proposer sur place des solutions alternatives [16] ou organiser un relais, même temporaire, sur une unité de soins
palliatifs pour les cas les plus complexes et les situations
d’épuisement. Pour ce faire, il faut que le décès cesse d’être
considéré comme un événement indésirable grave à éviter
absolument. La mort doit redevenir un événement naturel, aléatoire mais prévisible, dont la survenue peut être
acceptée, réfléchie et préparée avec l’équipe et l’entourage
sans entrer pour autant dans un processus d’attente
délétère.
Symptômes pénibles et stratégies
thérapeutiques en phase terminale
Les symptômes pénibles de la phase terminale d’une
démence évoluée diffèrent peu de ceux présents dans
les autres états terminaux. On retrouve la confusion,
235
l’incontinence urinaire, la douleur, la dépression, la
constipation, la perte d’appétit, l’encombrement respiratoire, la dyspnée et la fièvre [1]. Les symptômes comme
la confusion, les troubles de la vigilance et de la déglutition, les perturbations de la communication et la présence
d’escarres surviennent plus précocement et plus intensément que chez les patients non déments. Les symptômes
gênants sont, d’une part, moins bien dépistés, d’autre part,
moins bien traités chez les déments en phase terminale que
chez les autres patients en fin de vie. Ces difficultés sont
liées aux troubles de la communication verbale constants en
phase avancée de démence, à la formation et/ou la disponibilité insuffisante des aidants et aux troubles du comportement très fréquents interférant avec l’administration des
soins et épuisant la bonne volonté des soignants.
Afin de dépister rapidement les problèmes somatiques
pouvant se manifester chez les patients atteints de démence
en phase terminale, l’entourage (famille et soignants) qui
s’occupe du patient à domicile ou en institution doit être
formé pour développer une vigilance attentive (mais non
anxiogène) à un certain nombre d’éléments influençant
le confort global : fièvre, respiration, élimination urinaire, transit, états buccaux, cutanés, articulaires, signes
comportementaux d’appel pouvant faire évoquer un état
douloureux et/ou anxieux. La pratique des soins terminaux
pour les patients Alzheimer en unité de soins palliatifs gériatrique a permis de développer et d’exporter, pour les phases
terminales identifiées, la mise en place de protocoles thérapeutiques déclenchés en cas de constatation de l’un ou
l’autre de ces éléments. Ces protocoles thérapeutiques,
constitués de prescriptions anticipées personnalisées mises
en place par le médecin référent avec l’aide éventuelle d’un
référent spécialisé en soins palliatifs, permettent aux autres
professionnels intervenants d’être guidés dans la prise en
charge thérapeutique palliative et de mettre en place plus
rapidement les soins nécessaires à l’amélioration du confort
de la personne. La présence d’un cahier de liaison au domicile ou en établissement d’hébergement de personnes âgées
dépendantes peut faciliter le partage avec le médecin traitant ou un autre intervenant et accélérer la prise en charge
de l’inconfort dépisté.
En dehors de l’intensification du repérage et de la prise
en charge des symptômes responsables d’inconfort, la prise
de conscience et l’acceptation par les différents protagonistes de l’entrée en phase terminale est aussi l’occasion
de faire le tri des médicaments et de supprimer ceux qui ne
sont plus essentiels voire délétères. De même, la pertinence
de la poursuite des explorations sera étudiée au regard
des modifications thérapeutiques susceptibles d’améliorer
le confort qu’elles peuvent susciter et non pour répondre
à notre besoin de connaissance (savoir par exemple devant
une complication neurologique renoncer à un ultime scanner
ou encore renoncer aux prises de sang itératives qui ne font
que signifier ce que l’évolution clinique nous indique déjà et
poussent insidieusement à une surenchère thérapeutique)
[17]. Enfin, il peut s’avérer nécessaire dans un environnement très médicalisé de formaliser le renoncement à
certaines surveillances réalisées de façon automatique (tension artérielle, saturation en oxygène. . .) pour éviter des
formes d’acharnement thérapeutique liées à l’application
inadéquate de réflexes d’urgence dans un contexte de phase
terminale, voire agonique.
236
Ci-dessous, nous détaillons un certain nombre de
recommandations thérapeutiques appropriées à la phase
terminale.
Surveillance de la température
La découverte d’une fièvre (température supérieure à
38,5 ◦ C) doit faire suspecter la survenue d’une infection,
fréquente au stade terminal, mais peut aussi être le signe
d’une dérégulation centrale ou d’une autre pathologie associée (néoplasie). Le traitement symptomatique de la fièvre
repose sur des mesures simples telles que découvrir la
personne, rafraîchir la pièce et le malade à l’aide de linges
humidifiés, ainsi que sur l’administration de paracétamol.
Lorsque la voie orale est encore possible, la forme sachet
ou lyoc (si l’état de la muqueuse buccale le permet) est
utilisée à la posologie habituelle chez l’adulte. En cas de
troubles de la vigilance ou de la déglutition, la forme
suppositoire est une alternative simple. L’administration
de Perfalgan® par voie sous-cutanée est pratiquée hors
autorisation de mise sur le marché (AMM) par certaines
équipes, mais peut s’avérer inutilement lourde à mettre
en œuvre dans un contexte peu médicalisé (domicile,
établissements d’hébergement de personnes âgées dépendantes).
Si l’infection est avérée, se pose alors la question de
l’antibiothérapie. Cette question mérite réflexion car, en
phase terminale, la réponse n’est pas univoque contrairement à la phase agonique (dernières heures ou derniers
jours), où l’antibiothérapie est inutile, coûteuse et où
elle doit être arrêtée si elle a été débutée antérieurement. Au stade terminal (dernières semaines), le rapport
bénéfice/risque est très aléatoire. Le traitement peut ne
pas être efficace et, s’il est efficace, peut prolonger une
phase terminale qui était déjà pénible. Par ailleurs, les
effets indésirables induits par l’antibiothérapie, comme
les troubles digestifs ou les mycoses, peuvent être, à
leur tour, très inconfortables et doivent être anticipés.
Cependant, dans certains cas, l’infection peut être ellemême source d’un inconfort rapidement maîtrisable par
une antibiothérapie simple, alors systématiquement associée à un traitement antifongique préventif. En revanche,
devant la survenue d’une énième infection respiratoire
par fausse route, la décision d’une prise en charge uniquement symptomatique est tout à fait licite. Néanmoins,
dans certains cas, cette bonne pratique médicale peut
s’avérer difficile à mettre en œuvre si l’entourage n’y
est pas préparé. Le médecin peut se retrouver alors
dans un conflit de devoir entre l’intérêt du patient et
la souffrance de la famille et des temps de concertation seront nécessaires pour gérer cette situation de
crise.
Lorsque le recours à l’antibiothérapie est tenté, il
consistera le plus souvent, dans ce contexte, en une administration par voie sous-cutanée de ceftriaxone (Rocéphine® )
1 g/j pendant huit à dix jours [7]. L’association à de la
lidocaïne est souhaitable pour diminuer la douleur liée à
l’injection. En l’absence d’évolution au bout de 72 heures,
l’escalade des antibiotiques avec la sélection de germes
résistants n’est pas recommandée et il ne faut pas hésiter
à les arrêter. Le traitement symptomatique sera alors seul
poursuivi.
B. Duzan, P. Fouassier
Recherche de la présence de douleurs
Au stade avancé de la démence, le malade n’a plus
les moyens d’exprimer verbalement sa douleur. Or, les
études rapportent que deux-tiers des patients atteints de
démence ont des douleurs, douleurs qui restent souvent
sous-diagnostiquées et sous-traitées. À pathologie douloureuse égale, ces malades reçoivent moins d’antalgiques que
les autres [1]. Il existe pourtant au moins douze échelles
d’évaluation de la douleur chez le sujet âgé dément. En
se basant sur des critères de sensibilité et d’utilité clinique, deux de ces échelles ont été sélectionnées comme
les plus appropriées : l’échelle Pain Assessment Checklist
for Senior with Limited Ability to Communicate (PACSLAC),
qui comporte soixante items, dont une version française a
été validée (la PACSLAC-F) et l’échelle Doloplus-2, qui est la
plus utilisée en France avec dix items à coter de 0 à 3 pour
obtenir un score sur 30 (Annexe 1) [18—20]. Une version
plus rapide, ciblée sur le repérage des douleurs aiguës et
utilisable sans connaissance préalable du patient, en a été
extraite, l’échelle Algoplus, très simple d’utilisation avec
uniquement cinq items cotés « oui » ou « non » (Annexe 2).
Ces items font référence au langage du corps auquel les
intervenants doivent être particulièrement attentifs. Plusieurs indices comportementaux doivent faire évoquer une
douleur potentielle : cris et gémissements, repli, perte de
contact, refus des soins, comportements agressifs, etc. Un
score supérieur ou égal à deux à l’échelle Algoplus permet
de diagnostiquer la présence d’une douleur avec une sensibilité de 87 % et une spécificité de 80 % et donc d’instaurer
de façon fiable une prise en charge thérapeutique antalgique. Il est ensuite nécessaire de pratiquer régulièrement
de nouvelles cotations. L’antalgie instaurée est satisfaisante
quand le score reste strictement inférieur à deux. En France,
une autre échelle est recommandée par l’Agence nationale
d’accréditation et d’évaluation en santé (Anaes) : l’échelle
comportementale de la personne âgée (ECPA) qui comporte
un volet « avant les soins » et un volet « pendant les soins »,
chacun comprenant quatre items à coter entre 0 et 4 (score
sur 32).
Le premier objectif de la prise en charge antalgique est
d’obtenir un bon confort de base au repos et de rechercher
toute cause responsable d’un inconfort supplémentaire. En
ce qui concerne le dépistage, il faut être particulièrement
vigilant, les douleurs n’étant pas verbalisées, et ne pas
hésiter à réaliser un test thérapeutique antalgique en cas
de doute [1]. Les grands principes du traitement de la
douleur par excès de nociception et d’utilisation des morphiniques chez l’adulte restent pertinents mais les adaptations
posologiques seront beaucoup plus prudentes et les voies
galéniques spécifiquement ajustées. Pour éviter les erreurs
lors des changements de voie d’administration ou de molécules, l’utilisation de la « table pratique d’équianalgésie des
opioïdes forts dans la douleur cancéreuse par excès de nociception », disponible sur le site de la Sfap, est recommandée
[21]. Elle est en effet tout aussi utile pour calculer les
équivalences de doses dans la douleur nociceptive non cancéreuse du patient dément âgé en phase terminale quand
le recours aux paliers I et II de l’Organisation mondiale
de la santé (OMS) est devenu inadéquat. Il ne faut pas
hésiter à recourir directement au palier III si la situation
l’impose sans craindre un problème de tolérance à condition
Maladie d’Alzheimer et fin de vie : aspects évolutifs et stratégies thérapeutiques
que la posologie soit ajustée. En revanche, le tramadol
est très variablement toléré par les sujets âgés aux doses
classiques chez l’adulte. Certaines équipes l’utilisent par
voie sous-cutanée et doivent utiliser des posologies initiales
réduites pour prendre en compte une sensibilité plus grande
à l’effet dose. D’autres équipes recourent facilement à
l’utilisation du néfopam (Acupan® ) par voie sous-cutanée
(une demi-ampoule à 20 mg toutes les quatre à six heures)
qui a l’avantage de ne pas générer de constipation ni de
dépression respiratoire, deux effets secondaires auxquels
ces patients sont très sensibles. En revanche, son utilisation par voie sublinguale est déconseillée chez ce type de
patient, incapable de respecter la consigne de le garder
sous la langue, car l’efficacité par voie orale n’a pas été
démontrée. Malgré une faible activité anticholinergique qui
le rendrait en théorie peu recommandée chez le patient
Alzheimer, il s’avère relativement bien toléré en pratique,
cependant il faut rester vigilant au risque de rétention urinaire et épileptique. Enfin, il ne faut pas oublier que ces
pratiques sont hors AMM.
Chez ces patients déments évolués naïfs de morphine,
les doses initiales des traitements antalgiques de palier III
seront réduites de moitié, voire moins (interdoses de morphine de 2,5 ou 1,25 mg par voie sous-cutanée toutes les
quatre heures pour débuter), mais seront ensuite régulièrement augmentées pour atteindre un niveau efficace sans
effet indésirable trop gênant. Chez ces patients, les molécules ayant démontré donner moins de confusion que les
morphiniques classiques, comme l’oxycodone (Oxynorm® ),
seront choisies plus volontiers en seconde intention ou
d’emblée (selon l’intensité du syndrome confusionnel de
base, la posologie et la voie d’administration souhaitée).
Cinq milligrammes d’oxycodone orale sont équivalents à
dix mg de morphine orale. L’hydromorphone (Sophidone® ),
en revanche, trouvera difficilement sa place du fait du
choix restreint sur le plan galénique et posologique. Quelle
que soit la molécule choisie, la titration sera prudente
avec des augmentations de 25 à 30 % au lieu de 50 % chez
l’adulte. Il s’agit néanmoins de persévérer jusqu’à la dose
efficace selon le principe start low, go slow et « ne pas
s’arrêter trop tôt » ! On constate en pratique qu’un grand
nombre de patients paraîtront soulagés avec des posologies de fond inférieures ou égales à l’équivalent de 60 mg
par jour de morphine. Néanmoins, certains nécessiteront
des réajustements réguliers et des posologies beaucoup plus
élevées. Par voie sous-cutanée, des bolus peuvent être répétés toutes les quatre heures, sur un site laissé en place
plusieurs jours ou une seringue électrique à débit continu
peut être mise en place. La morphine pourra être mélangée dans la seringue à d’autres traitements compatibles,
tels que la Scopolamine® ou l’Hypnovel® selon les besoins.
Pour l’oxycodone, il n’existe pas d’étude de compatibilité
avec d’autres produits dans la même seringue. Cependant,
ce type de prescription est peu adapté au contexte des
établissements d’hébergement de personnes âgées dépendantes : les bolus itératifs sont difficilement réalisables du
fait d’une disponibilité infirmière très faible et la délégation
au personnel non infirmier est délicate. Quelques établissements collaborent avec les services d’hospitalisation à
domicile pour la mise en place de seringues électriques
en continu, acceptant l’absence de surveillance nocturne.
La possibilité de bolus à partir de la seringue électrique
237
permet la réalisation de prémédication antalgique aux
soins.
Dans ce contexte non hospitalier où la titration fine
orale ou injectable s’avère difficile à mettre en œuvre,
les formes à libération prolongée d’opioïdes peuvent aussi
être utilisées d’emblée lorsque la voie orale est encore
possible, en commençant par les posologies les plus faibles
à 10 mg sur douze heures. Elles sont néanmoins décrites
comme pourvoyeuses de plus de confusion que les formes
à action rapide [7]. Le recours à des interdoses ponctuelles
complémentaires reste possible pour les accès douloureux
non couverts et surtout pour les douleurs provoquées par
les soins. L’utilisation de l’Oramorph® en flacon gouttes peut
trouver ici sa place grâce à sa simplicité d’utilisation (une
goutte = 1,25 mg de morphine) mais le long délai d’action
nécessite une organisation bien pensée.
La voie transdermique, faisant appel aux patchs de
fentanyl, est également bien adaptée à la douleur de
fond du patient dément, notamment en établissements
d’hébergement de personnes âgées dépendantes et soins
de longue durée ou en cas de troubles de déglutition, mais
sous certaines conditions. Cette forme de fentanyl a pour
avantage d’être souvent mieux tolérée que la morphine
et pour inconvénient d’avoir une maniabilité moindre (car
longue demi-vie et long délai d’action), d’où son utilisation pour traiter des états douloureux stables. Pour le futur,
des formes de fentanyl à libération immédiate (Abstral®,
Instanyl® ) apparaissent, mais actuellement leur usage est
restreint par l’AMM chez les patients qui n’ont pas atteint
depuis plus d’une semaine une dose de fond équivalente
à 60 mg de morphine orale. Pour les autres, on continue
à utiliser des interdoses de morphine ou d’oxycodone. Les
dosages des patchs de fentanyl (Durogésic® ) débutent à
12,5 ␮g/h, ce qui correspond à 30 mg de morphine orale
par jour chez un sujet adulte mais jusqu’à 45 mg chez un
sujet âgé insuffisant rénal. Or, outre le grand âge de la majorité des patients déments, la situation de phase terminale
les expose à un certain degré de déshydratation fonctionnelle qu’il est nécessaire de respecter mais dont il faut tenir
compte dans l’élimination des médicaments.
Pour toutes douleurs induites par les soins jugés indispensables (mobilisations, pansements, pose de sonde,
extraction de fécalome. . .), le recours à une prémédication
médicamenteuse doit être systématiquement réfléchi. Le
méopa (mélange équimolaire oxygène—protoxyde d’azote)
est particulièrement bien adapté à ce type de situation
douloureuse et a toute sa pertinence chez le patient
dément en fin de vie, du fait de son élimination pulmonaire rapide qui réduit l’impact des effets indésirables [22].
Il faut néanmoins avoir en tête quelques particularités de
l’administration du méopa chez ces patients : le masque
devra être maintenu sur le visage par un professionnel
formé, souvent un aide-soignant, mais l’administration reste
sous la responsabilité pleine et entière de l’infirmière. La
surveillance de la vigilance sous méopa peut être plus problématique chez un patient non communicant. La consigne
classique de maintenir le contact verbal n’est plus adaptée. Elle sera remplacée par la surveillance du maintien
d’un contact non verbal : ouverture des yeux, sourire, réactions en réponse à l’appel du soignant. La persistance de
manifestations algiques pendant le soin, lors des premières
administrations, n’est pas toujours synonyme d’inefficacité
238
et pourrait faire abandonner trop tôt une technique pourtant utile. En effet, lorsque les circuits de la douleur
ont été fortement activés, plusieurs séances peuvent être
nécessaires pour voir l’extinction des manifestations douloureuses. Le méopa crée en effet une amnésie du soin
qui limite les phénomènes d’anticipation anxieuse lors des
soins suivants. Toutefois, son efficacité peut être réellement
insuffisante et il est alors nécessaire de l’associer à une
prémédication opioïde.
Certains échecs de prise en charge de la douleur chez le
patient dément sont liés au mauvais dépistage des douleurs
neuropathiques. Or, ces douleurs spécifiques ne répondent
pas aux traitements morphiniques. Leur méconnaissance fait
qu’elles sont peu recherchées et largement sous-traitées.
Une échelle spécifique a été développée pour les mettre
en évidence chez l’adulte cognitivement sain, la DN4. Elle
comporte quatre ensembles de questions auxquelles on
répond par « oui » ou par « non » pour obtenir un score sur
dix [23]. Un total d’au moins 4/10 reflète l’existence d’une
douleur neuropathique. Mais cette échelle nécessite la persistance d’une certaine verbalisation de la part du patient,
capacité qui n’existe souvent plus chez le malade atteint
de démence évoluée. Il faut alors revenir aux échelles
d’hétéro-évaluation citées précédemment. Aussi la décision de tenter un traitement spécifique repose aussi sur
la connaissance du contexte pathologique et des antécédents associés, quand ils sont évocateurs (par exemple,
manifestations douloureuses paroxystiques sur un membre
ischémié ou réactions disproportionnées au passage du
gant de toilette sur les pieds chez un diabétique). Par
le passé, le clonazepam (Rivotril® ) a été fréquemment
utilisé [7]. Mais aujourd’hui, de nouvelles molécules, la
gabapentine (Neurontin® ) ou la prégabaline (Lyrica® ) sont
bien mieux supportées par les sujets âgés que le clonazepam, à l’effet sédatif majeur, à condition de débuter
à des doses inférieures au moins de moitié aux doses de
début chez l’adulte et d’augmenter très progressivement
en respectant les paliers préconisés. En cas de difficultés pour avaler, les gélules de Neurontin® peuvent être
ouvertes sans perdre de leur efficacité, mais rien ne permet de l’affirmer pour ce qui est du Lyrica®. En revanche,
le Lyrica® présente une AMM pour les douleurs périphériques et centrales, l’épilepsie et les troubles anxieux
généralisés, indications qui peuvent se superposer chez
un patient dément douloureux, anxieux et dont le seuil
épileptique peut être abaissé. Malheureusement, lorsque
ces traitements sont débutés, il peut y avoir une vraie
difficulté à évaluer le bénéfice obtenu chez un patient
avec des troubles de la communication. Contrairement au
cas des douleurs nociceptives, où une disparition presque
totale et presqu’immédiate de la douleur est attendue
et peut être correctement repérée, dans le cas des douleurs neuropathiques, le soulagement est souvent partiel en
intensité et/ou en fréquence (quand il s’agit de douleurs
paroxystiques). Non seulement l’amélioration peut donc
être difficile à repérer car discrète, mais l’effet est aussi
différé dans le temps, ce qui rend l’analyse plus ardue et
parfois douteuse. Toutefois, dans le contexte de la fin de vie,
le bénéfice du doute doit profiter au patient et il faut tenter un traitement, sauf bien-sûr dans les derniers moments.
L’effet thérapeutique étant lent à se mettre en place
(une semaine pour la prégabaline, plusieurs semaines de
B. Duzan, P. Fouassier
titration pour la gabapentine), l’initiation de ces traitements n’est alors pas adaptée. Lorsque la douleur
neuropathique suspectée peut correspondre à une douleur périphérique bien localisée, comme dans la douleur
post-zostérienne, le recours à des emplâtres à base de lidocaïne (Versatis® ) peut amener un soulagement rapide et
a l’avantage, du fait de son mécanisme d’action locale,
d’éviter la iatrogénie des médicaments par voie générale.
En revanche, dans les douleurs neuropathiques généralisées de mécanisme central (réactions douloureuses à
l’effleurement d’un hémicorps et notion de processus tumoral ou d’antécédent d’accident vasculaire massif dans
l’hémisphère controlatéral) et lorsque la déglutition est
difficile ou impossible, le recours au Laroxyl® s’avèrera précieux. En effet, malgré ses effets secondaires connus qui
en font un médicament décrié chez le sujet âgé, son administration en goutte ou par voie sous-cutanée à la seringue
électrique permet une titration fine. Son action sur la douleur neuropathique est parfois spectaculaire et son action
antalgique est attestée à des doses très inférieures aux doses
indiquées dans la dépression (doses auxquelles il a acquis
sa mauvaise réputation). Chez le patient dément en fin
de vie qui présente des douleurs neuropathiques centrales,
la posologie initiale est de 5 mg sur vingt-quatre heures,
rapidement augmentée à 10 mg au bout de quelques jours
si la tolérance est bonne puis réajustée individuellement
[24].
Recherche de l’anxiété
L’anxiété est très fréquente chez le patient dément en
phase terminale lorsque les troubles de la vigilance ne sont
pas encore au premier plan. L’anxiété peut être générée
par les troubles cognitifs eux-mêmes, le patient étant dans
un manque de repère et une perplexité permanente qui
nécessite une prise en charge relationnelle spécifique. Si
le recours à une musicothérapeute n’est guère accessible à
toutes les structures, l’utilisation de musique de relaxation
est simple à mettre en œuvre et peut apporter un bénéfice
non négligeable pendant les soins ou lors des moments de
solitude. La présence humaine, lorsqu’elle n’est pas ellemême angoissée, peut être extrêmement apaisante d’où le
rôle essentiel de la présence de la famille ou de bénévoles.
Mais il faut savoir recourir parfois aux benzodiazépines à
petites doses quand cela est nécessaire. Il est possible pour
certains patients que cette anxiété diffuse soit également
l’expression d’une angoisse de mort non exprimée verbalement.
Il peut s’agir également d’une anxiété associée à une
douleur insuffisamment prise en charge. L’anticipation
anxieuse des soins, voire de la moindre approche humaine,
est le plus souvent le témoin d’une mémorisation des douleurs passées. Dans ce cas, la prémédication aux soins
devra être réajustée. Si le méopa ne peut être mis en
œuvre, le recours au midazolam (2,5 mg en bolus souscutané 30 minutes avant le soin pour débuter) en association
avec les opioïdes est classique. Le maintien de la vigilance pendant le soin ne sera pas un objectif en soi, la
priorité étant donnée à la non-mémorisation d’une douleur induite et à une vigilance possible entre les soins.
Si l’anxiété persiste en association avec une douleur permanente insuffisamment contrôlée, c’est le traitement de
Maladie d’Alzheimer et fin de vie : aspects évolutifs et stratégies thérapeutiques
fond qui devra être réajusté, éventuellement associé à
une anxiolyse continue au midazolam (médicament de référence du fait de sa demi-vie courte), avec le challenge de
garder autant que possible un certain degré de vigilance.
Cet objectif devient néanmoins progressivement illusoire
au fur et à mesure que l’on se rapproche du décès et
l’entourage familial devra alors être accompagné dans ce
temps particulier où même le contact non verbal vient
à se perdre. Plus rarement, c’est l’intensité d’un inconfort rebelle qui amène à décider la mise en œuvre d’une
sédation dans les mêmes conditions que chez l’adulte
à la réserve près que le patient ne participe pas à la
décision, sauf dans le cas, encore rare, d’une directive anticipée.
Surveillance de la respiration
L’atteinte neurologique entraîne fréquemment à un stade
avancé des troubles de la déglutition à l’origine de pneumopathies, voire d’encombrements aigus. Le trouble peut
être haut (stase salivaire avec réflexe de déglutition non
fonctionnel) ou bas (excès de sécrétions bronchiques, pneumopathies). Dans les deux cas, si la déglutition semble
amoindrie ou si la vigilance est diminuée, il faut arrêter les
apports par voie orale. Lorsque l’encombrement est permanent et gênant, le traitement asséchant fait appel à la
Scopolamine® , soit sous forme de patch dans les encombrements tout débutants et modérés (un à trois patchs toutes
les soixante-douze heures en fonction de l’efficacité et de
la tolérance, avec un délai d’action de six à douze heures),
soit par voie sous-cutanée en cas d’encombrement important pour une action plus rapide (en trente minutes) et
plus intense. Pour gérer l’apparition d’un encombrement
terminal, il est possible d’administrer une demi à deux
ampoules en bolus (0,25 à 1 mg) toutes les quatre à six
heures, puis prendre le relais avec une seringue électrique
sous-cutanée en fonction de la réponse clinique (trois à sept
ampoules par jour soit 1,5 à 3,5 mg/jour). Lorsqu’approche
la phase agonique, un protocole de prescription anticipée doit permettre de gérer la situation à n’importe quel
moment de la nuit ou du week-end. Il faudra bien sûr
être vigilant au risque de survenue d’un globe urinaire ou
d’hallucinations auquel ce type de patient est clairement
plus exposé. En cas d’hallucinations, la stratégie consistera
soit à baisser la posologie si le symptôme est relativement contrôlé, soit à privilégier un relais par le Scoburen® ,
qui ne franchit pas la barrière hémato-méningée, à raison de 20 mg trois fois par jour ou encore à ajouter de
l’halopéridol (Haldol® ) en sous-cutané à raison de 0,5 à 1 mg
trois fois par jour contre les phénomènes productifs. Limiter
l’encombrement en phase terminale nécessite également
d’anticiper la limitation des apports hydriques artificiels :
arrêt d’une perfusion sous-cutanée d’hydratation, tolérance
d’une déshydratation progressive naturelle en fin de vie.
Si les mesures précédentes n’ont pas été anticipées ou en
attendant qu’elles agissent, la réinstallation du patient en
position demi-assise, un soin de bouche, voire exceptionnellement une mini aspiration laryngée en cas de stase salivaire
importante, permettent une action immédiate sur les bruits
respiratoires difficiles pour l’entourage liés à l’atonie du
larynx en phase agonique.
239
Dans les évolutions terminales des démences, on peut
aussi voir des troubles du rythme respiratoire, de type
bradypnée (fréquence respiratoire [FR] < 10/min) ou polypnée (FR > 30/min). Ces troubles peuvent être intermittents
et ne sont pas réservés à la phase agonique. Concernant
les bradypnées, elles peuvent être directement liées à la
dégénérescence cérébrale et il n’y a alors pas de traitement connu à ce jour ou bien être iatrogène, secondaire
à un traitement par morphiniques. Si la diminution de
la posologie des morphiniques est possible, la bradypnée
sera transitoire. Mais il est parfois préférable pour le confort
du patient de maintenir les doses de morphiniques malgré l’apparition de la bradypnée, qui s’améliorera d’ailleurs
parfois spontanément. En revanche, lorsqu’il existe une
polypnée persistante, on peut diminuer l’impression
d’inconfort potentiel du patient et le ressenti difficile pour
l’entourage en initiant de petites doses de morphine en
bolus ou à la seringue électrique ou bien encore en majorant
un traitement morphinique en cours s’il y en avait déjà un
(on augmente alors la posologie donnée d’environ 30 %) [7].
Surveillance du transit
La survenue d’une constipation est plus fréquente chez les
personnes atteintes de démence évoluée que chez les autres
car l’atteinte neurologique entraîne la disparition de la
motricité digestive. Deux points sont à établir clairement
concernant le transit : l’émission de selles très liquides peut
correspondre à un équivalent de constipation, ce que l’on
appelle communément une « fausse diarrhée », et le médecin doit donc en premier lieu devant un tel tableau faire
un toucher rectal à la recherche de la stagnation de selles
dures. D’autre part, il faut savoir que même en l’absence
d’alimentation orale, un transit persiste. Il faut que le
médecin examine le patient à chaque fois qu’il n’y a pas
eu de selle depuis soixante-douze heures, que surviennent
des selles liquides, un ballonnement abdominal ou encore
qu’apparaissent des troubles du comportement récents type
agitation.
La prise en charge de la constipation chez le patient
dément en fin de vie n’est pas fondamentalement différente
des autres patients en soins palliatifs et les recommandations faites par la Sfap dans ce domaine sont à appliquer
selon les possibilités au cas par cas. En cas de troubles
de la déglutition, l’utilisation des laxatifs lubrifiants type
« Lansoÿl », pourvoyeurs de pneumopathies d’inhalation huileuses, sont clairement à éviter. D’une façon générale, le
recours aux règles hygiéno-diététiques et aux laxatifs oraux
devient de plus en plus difficile à mettre en œuvre en phase
terminale, alors que les traitements visant l’évacuation rectale restent possibles et doivent être planifiés mais peuvent
être vécus comme des agressions itératives et nécessitent,
chez un patient anxieux, la prescription d’une prémédication (midazolam 2,5 mg en sous-cutané) éventuellement
associée à l’application locale de xylocaïne gel, notamment
en cas d’irritation anale ou de poussée hémorroïdaire.
En cas de découverte d’un fécalome nécessitant une
extraction manuelle, il faut prévenir la prévention de
l’inconfort de cette manœuvre et utiliser la même prémédication que pour faire un lavement ou avoir recours au
méopa.
240
Enfin, de très nombreux médicaments favorisent la
constipation. Au stade terminal, les morphiniques en sont les
premiers pourvoyeurs. L’apparition du bromure de méthylnaltrexone (Relistor® ) par voie sous-cutanée offre une
alternative intéressante aux lavements chez les patients
sous-morphiniques qui ne peuvent plus absorber de laxatifs
oraux.
La survenue de nausées ou de vomissements peuvent
traduire l’installation insidieuse d’un fécalome rectal ou
la mauvaise tolérance d’un traitement ou être la conséquence directe de l’évolution d’une comorbidité associée
(occlusion, infection. . .). En l’absence de cause rapidement améliorable, on envisagera un traitement uniquement
symptomatique et une voie d’administration adaptée à la
situation. Le domperidone (Motilium® ), si la voie orale
est possible, a moins d’effets centraux. Si le recours
à la voie sous-cutanée est incontournable, le métoclopramide (Primpéran® ) sera choisi en première intention
(5 à 10 mg en sous-cutanée trois fois par jour ou 20 à
40 mg/24H en perfusion sous-cutanée continue). Le recours
à l’halopéridol peut être utile sur des durées courtes mais en
veillant à ne pas induire une rigidification corporelle sousneuroleptiques.
Surveillance des urines
L’évolution neurologique, l’affaiblissement lié à la fin de vie,
l’état grabataire, les traitements utilisés pour le confort,
la présence d’une constipation, voire d’un fécalome, sont
autant de facteurs favorisants le risque de rétention urinaire. C’est un effet indésirable classique des opioïdes ou de
la Scopolamine® , la rétention apparaissant à l’introduction
ou lors de la majoration du traitement. Chez l’homme,
une maladie prostatique sous-jacente peut aggraver le problème.
En pratique, on s’alerte dès que l’absence d’urines
depuis six heures est notée et/ou lorsqu’il apparaît un état
d’agitation douloureuse. Si un bladder-scan est disponible,
permettant une échographie vésicale, la rétention urinaire
pourra être éliminée ou bien confirmée et quantifiée, des
prescriptions anticipées pourront guider la conduite à tenir
en fonction du volume repéré dans la vessie. Des massages sus-pubiens, la réalisation d’un lavement en cas de
constipation terminale peuvent aider à la vidange vésicale
spontanée et éviter le sondage. S’il n’y a pas eu d’urines
depuis au moins douze heures et si un bladder-scan n’est
pas réalisable, un sondage exploratoire sera nécessaire. Ce
geste pourra être fait sous méopa ou trente à soixante
minutes après une prémédication par du midazolam en souscutanée et en utilisant du gel de xylocaïne urétral pour
l’introduction de la sonde urinaire. Si besoin, un lavement
évacuateur type Normacol® peut être réalisé dans le même
temps.
Le rapport bénéfices/risques et les contraintes d’un
sondage éventuellement itératif ou d’une pose de sonde
urinaire à demeure est à peser au cas par cas. D’une
façon générale, l’asthénie marquée en phase terminale et
le haut niveau de risque de récidive de la rétention, du fait
notamment des traitements associés, rendent le choix de
laisser la sonde en place d’autant plus adapté à la situation.
B. Duzan, P. Fouassier
Surveillance de l’état buccal
Les soins de bouche font partie des éléments prioritaires
des soins de confort en fin de vie. Les soins de base
regroupent le nettoyage régulier des dents et/ou des
appareils dentaires ainsi que le nettoyage des muqueuses
internes et de la langue avec un bâtonnet ouaté humidifié,
l’humidification régulière de la cavité buccale à l’aide, selon
l’état du patient, d’eau gélifiée ou de simples compresses
mouillées, voire d’un brumisateur. En effet, en situation palliative terminale, l’inconfort au niveau de la bouche est
essentiellement dû à la sécheresse [7], favorisée par la
respiration bouche ouverte et par une éventuelle déshydratation (tolérée, voire recherchée, en fin de vie) ainsi que par
les thérapeutiques utilisées. Les substituts salivaires vont
compléter et prolonger le bénéfice du soin de bouche. Chez
le patient très dépendant, voire inconscient, notre préférence va clairement au Bioxtra® en application toutes les
trois heures sur les muqueuses internes et les lèvres dont
la texture gel est plus confortable que les produits sous
forme de spray. L’utilisation des antiseptiques en bain de
bouche n’est pas recommandée en soins d’hygiène de base,
elle doit se faire sur prescriptions sur des durées courtes et
des indications précises.
L’acidité intra-buccale, favorisant la survenue des
mycoses, est à prévenir par des bains de bouche de bicarbonate de sodium 14/1000 trois fois par jour. Les appareils
dentaires seront mis à tremper dans cette même solution,
également en prévention.
En cas de mycose avérée, et de voie orale encore possible, le fluconazole (Triflucan® ) à 50 mg/jour en suspension
buvable est un produit qui a une meilleure acceptabilité et
confort en bouche que la Fungizone® . Si la voie orale n’est
plus possible, le fluconazole injectable peut être utilisé en
application locale au niveau buccal. En revanche, les appareils dentaires seront mis à tremper dans de la Fungizone®
buvable.
Surveillance de l’état articulaire
En phase terminale, en cas de comportement douloureux
lié aux mobilisations, on ne peut faire l’impasse sur la
réflexion concernant l’utilité réelle de ces mobilisations,
qui sont le plus souvent passivement subies. Ainsi, le lever
au fauteuil n’est plus forcément pertinent. La présence
de rétractions tendineuses déjà fixées est malheureusement très fréquentes à un stade neurologique avancé, où
une kinésithérapie visant à maintenir la fonction articulaire
s’avère totalement illusoire, alors que des massages doux,
des enveloppements chauds peuvent favoriser des sensations encore agréables. Le conseil d’un ergothérapeute peut
être utile pour favoriser une installation, qui ne visent plus
à corriger les positions vicieuses ni à réduire les rétractions, mais au contraire à les respecter tout en limitant
les points d’appui afin de diminuer l’inconfort corporel. Aux
moments de la toilette et des changes, les soignants seront
particulièrement attentifs à ne pas provoquer des douleurs induites en tirant sur ces rétractions. La pratique des
massages-effleurages favorise la décontraction musculaire
et la détente. L’installation recherche la position la plus
confortable pour le malade, à adapter régulièrement [7].
Maladie d’Alzheimer et fin de vie : aspects évolutifs et stratégies thérapeutiques
Surveillance de l’état cutané
Les patients en phase terminale de démence sont particulièrement exposés au risque d’escarres de décubitus. Trop
affaiblis pour être levés de façon prolongée, ils passent
plus de 20 heures au lit, voire 24 h/24. De plus, l’évolution
neurologique sévère s’accompagne d’un état de dénutrition grave, sans que l’alimentation artificielle ait démontré
son utilité. Pour prévenir les escarres, il faut soulager les
points d’appui en changeant le positionnement du patient
grabataire très régulièrement et/ou en utilisant autant
que possible des supports spécifiques. Les matelas de haut
niveau de prévention, recommandés, peuvent être loués en
hospitalisation à domicile. L’installation est personnalisée
avec différents coussins pour caler le malade, éviter l’appui
sur les talons ou que les genoux ne pèsent l’un sur l’autre en
décubitus latéral. La bonne hydratation de la peau avec des
crèmes hypoallergéniques type Dexeryl® ou des huiles si la
peau est très sèche (huile à l’arnica de Velleda par exemple)
permet d’assurer une prévention des altérations cutanées.
Les crèmes sont appliquées par massage—effleurage sans
appuyer. On sait maintenant qu’il ne faut surtout pas masser les rougeurs d’appui persistantes qui sont des escarres
de stade 1. Les parfums alcoolisés directement sur la peau
sont proscrits, ils seront déposés sur un vêtement ou un drap
[25].
De même les soins de nursing et de pansements seront
autant que possible non invasifs et encadrés dès que
nécessaire par une prise en charge antalgique adaptée.
Au stade terminal, les pansements ne seront plus faits à
visée curative dans un but de cicatrisation mais auront
pour unique objectif le maintien au propre en limitant les
exsudats, la surinfection et les odeurs, dans l’intention
de limiter l’inconfort. Le choix adapté du type de pansement doit permettre, en l’absence d’infection, de les
espacer au maximum. S’il se dégage de mauvaises odeurs,
on pourra utiliser des pansements à base de charbon
type Actisorb Plus® , la crème Rozex® ou des compresses
imbibées de Flagyl® injectable pendant quelques jours
[7].
241
années à une phase « palliative chronique » qui entremêle
soins curatifs et soins palliatifs pendant des mois, voire plus,
puis dans les dernières semaines, à une phase terminale
palliative pure. Il n’existe aucun consensus écrit énonçant
quels soins choisir à quel stade mais un accord de fait
dans les pratiques quotidiennes des soignants formés pour
s’occuper de ces malades. Tous sont d’accord pour insister
sur l’importance d’une réflexion anticipée faisant intervenir tous les soignants s’occupant du malade concerné et son
entourage proche, afin de définir au préalable les positions
face aux situations à-venir prévisibles. Suivant le modèle
des soins palliatifs, les thérapeutiques sont orientées pour
diminuer au maximum l’inconfort des symptômes pénibles
liés à la fin de vie.
Les conditions humaines de la prise en charge palliative de ces malades dont l’échéance n’est ni connue ni
fixe d’un individu à l’autre et qui ont des troubles bien
spécifiques ne permettant pas de les traiter comme des
personnes aux fonctions cognitives intactes, constituent un
grand défi pour la société. Le besoin est déjà énorme en
la matière et ne va cesser de croître dans les années à
venir. Quelques hôpitaux gériatriques ont développé en leur
sein des unités de soins palliatifs et/ou des équipes mobiles
spécifiquement gériatriques afin de développer et transmettre ce savoir particulier [26]. Bien qu’utiles de par
leur rayonnement sur le plan pédagogique, ces réponses
restent insuffisantes sur le plan numérique. Une évolution complémentaire positive se fait jour peu à peu avec
le recrutement de gériatres ou d’infirmières formées à la
gériatrie, au sein des structures palliatives existantes, initialement conçues uniquement pour des malades sidéens
ou cancéreux jeunes. De même, l’obtention de plus en
plus fréquente d’un diplôme universitaire de soins palliatifs
par les médecins coordonnateurs gériatres en établissements d’hébergement de personnes âgées dépendantes
et les possibles collaborations avec des équipes mobiles
ou des réseaux de soins palliatifs sont des solutions présentes et d’avenir à encourager pour favoriser in fine
l’appropriation, par les médecins hospitaliers et les équipes
soignantes comme par les médecins traitants et les paramédicaux libéraux, d’une démarche palliative gériatrique
éclairée.
Conclusion
Pour les patients atteints de la maladie d’Alzheimer ou
d’une autre démence apparentée, lorsque la maladie évolue, les stratégies thérapeutiques changent en parallèle
passant d’une phase de stimulation évoluant sur quelques
Déclaration d’intérêts
Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en
relation avec cet article.
242
B. Duzan, P. Fouassier
Annexe 1. Échelle Doloplus-2. Reproduite d’après [27], avec permission.
ECHELLE DOLOPLUS
EVALUATION COMPORTEMENTALE DE LA DOULEUR CHEZ LA PERSONNE AGEE
NOM :
Prénom :
DATES
Service :
Observation comportementale
RETENTISSEMENT SOMATIQUE
1• Plaintes
somatiques
2• Positions
antalgiques
au repos
3• Protection
de zones
douloureuses
4• Mimique
5• Sommeil
• pas de plainte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
0
0
0
0
• plaintes uniquement à la sollicitation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1
1
1
1
• plaintes spontanées occasionnelles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
2
2
2
2
• plaintes spontanées continues . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3
3
3
3
• pas de position antalgique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
0
0
0
0
• le sujet évite certaines positions de façon occasionnelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1
1
1
1
• position antalgique permanente et efficace . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
2
2
2
2
• position antalgique permanente inefficace . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3
3
3
3
• pas de protection . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
0
0
0
0
• protection à la sollicitation n’empêchant pas la poursuite de l’examen ou des soins . . . . . . . . . . . .
1
1
1
1
• protection à la sollicitation empêchant tout examen ou soins . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
2
2
2
2
• protection au repos, en l’absence de toute sollicitation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3
3
3
3
• mimique habituelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
0
0
0
0
• mimique semblant exprimer la douleur à la sollicitation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1
1
1
1
• mimique semblant exprimer la douleur en l’absence de toute sollicitation . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
2
2
2
2
• mimique inexpressive en permanence et de manière inhabituelle (atone, figée, regard vide) . . . . . .
3
3
3
3
• sommeil habituel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
0
0
0
0
• difficultés d’endormissement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1
1
1
1
• réveils fréquents (agitation motrice) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
2
2
2
2
• insomnie avec retentissement sur les phases d’éveil . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3
3
3
3
• possibilités habituelles inchangées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
0
0
0
0
• possibilités habituelles peu diminuées (précautionneux mais complet) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1
1
1
1
• possibilités habituelles très diminuées, toilette et/ou habillage étant difficiles et partiels . . . . . . . . .
2
2
2
2
• toilette et/ou habillage impossibles, le malade exprimant son opposition à toute tentative . . . . . . .
3
3
3
3
0
RETENTISSEMENT PSYCHOMOTEUR
6• Toilette
et/ou
habillage
7• Mouvements
• possibilités habituelles inchangées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
0
0
0
• possibilités habituelles actives limitées (le malade évite certains mouvements, diminue son périmètre de marche)
1
1
1
1
• possibilités habituelles actives et passives limitées (même aidé, le malade diminue ses mouvements)
2
2
2
2
• mouvement impossible, toute mobilisation entraînant une opposition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3
3
3
3
RETENTISSEMENT PSYCHOSOCIAL
8• Communication • inchangée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
0
0
0
0
• intensifiée (la personne attire l’attention de manière inhabituelle) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1
1
1
1
• diminuée (la personne s’isole) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
2
2
2
2
• absence ou refus de toute communication . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3
3
3
3
• participation habituelle aux différentes activités (repas, animations, ateliers thérapeutiques,…) . . . .
0
0
0
0
• participation aux différentes activités uniquement à la sollicitation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1
1
1
1
• refus partiel de participation aux différentes activités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
2
2
2
2
• refus de toute vie sociale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3
3
3
3
• comportement habituel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
10• Troubles du
comportement • troubles du comportement à la sollicitation et itératif . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
0
0
0
0
1
1
1
1
• troubles du comportement à la sollicitation et permanent . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
2
2
2
2
• troubles du comportement permanent (en dehors de toute sollicitation) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3
3
3
3
9• Vie sociale
SCORE
COPYRIGHT
Maladie d’Alzheimer et fin de vie : aspects évolutifs et stratégies thérapeutiques
243
Annexe 2. Échelle Algoplus. Reproduite d’après [28], avec permission.
Identification du patient
Evaluation de la douleur
Echelle d’évaluation comportementale
de la douleur aiguë chez la personne âgée
présentant des troubles
de la communication verbale
Date de l’évaluation de la douleur
Heure
..…./..…./..….
..…./..…./..….
..…./..…./..….
..…./..…./..….
..…./..…./..….
..…..h ..…..
..…..h ..…..
..…..h ..…..
..…..h ..…..
..…..h ..…..
OUI
NON
OUI
NON
OUI
NON
OUI
NON
OUI
NON
..…./..…./..….
..…..h ..…..
OUI
NON
1 • Visage
Froncement des sourcils, grimaces, crispation,
mâchoires serrées, visage figé.
2 • Regard
Regard inattentif, fixe, lointain ou suppliant,
pleurs, yeux fermés.
3 • Plaintess
« Aie », « Ouille », « J’ai mal », gémissements,
cris.
4 • Corps
Retrait ou protection d’une zone, refus de
mobilisation, attitudes figées.
5 • Comportements
Agitation ou agressivité, agrippement.
/5
Total OUI
Professionnel de santé ayant réalisé
l’évaluation
Médecin
IDE
AS
Autre
Paraphe
/5
Médecin
IDE
AS
Autre
Paraphe
Références
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/5
Médecin
IDE
AS
Autre
Paraphe
/5
Médecin
IDE
AS
Autre
Paraphe
/5
/5
Médecin
IDE
AS
Autre
Paraphe
Médecin
IDE
AS
Autre
Paraphe
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