My dinner with Daamian (and Peter)

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My dinner with Daamian (and Peter)
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My dinner with Daamian (and Peter)
Au Théâtre de la Bastille
mercredi 12 novembre 2014, par Nicolas Romeas
Damiaan De Schrijver et Peter Van den Eede, des passionnantes compagnies
flamandes tg STAN et de KOE, endossent à nouveau au Théâtre de la Bastille
(comme ils l’avaient déjà fait il y a plusieurs années) les rôles élaborés par André
Gregory et William Shawn à partir de la réalité de leurs vies, pour l’incroyable film
de Louis Malle My dinner with André, tiré d’un workshop des années 70. Ou plus
précisément, ils reprennent ce dialogue, essentiel à mes yeux.
Il faut d’abord que je dise ça
Comme toujours avec tg Stan, j’ai adoré cette liberté de jeu, cette intelligente légèreté, cette fraternelle
amitié avec un texte « désacralisé » qui coule et circule simplement entre nous, cette plaisante part
d’improvisation qui change subtilement tout de la relation à ceux qu’on appelle le « public », cette jolie
brèche dans le quatrième mur. Cette respiration d’acteurs qui ne nous étouffent pas, qui incarnent sans
incarner et parlent avec nous autant qu’ils jouent pour nous. Cette intelligence d’une non-incarnation à la
fois rusée et sensible que les gens de théâtre français ont culturellement tant de mal à s’autoriser. Cette
distanciation astucieuse et inventive qui ne se prend pas au sérieux et remet le théâtre à sa place, dans la
vie.
J’ai éclaté de rire, j’ai souri, j’ai aimé. Je n’ai pas seulement assisté à un spectacle, j’ai vraiment vécu avec
eux ce moment où ils se divertissent d’un texte éveilleur d’échos, qu’ils aiment d’un amour très sincère.
Mais, je dois l’ajouter, il y avait dans le film un autre personnage, présent sans l’être et du coup très
présent, présence gênante, embarrassante. Un vieux serveur au regard triste, exploité, à l’âme usée
jusqu’à la corde, élimée, Jean Lenauer, dont on se dit avec douleur qu’il devrait être à la retraite. Or, ce
personnage représente quelque chose de très important, car c’est nous. C’est le peuple, chœur silencieux
au visage très parlant, accusation vivante, muette, désolée, impuissante, loin de tous ces discours.
Privé de voix, séparé de lui-même, dépouillé de sa force propre, l’image même de l’étoffe dont est tissée la
société qu’évoquent nos deux protagonistes, comme s’ils la survolaient.
Alors, voyez-vous, ce que j’aime avec le théâtre c’est que ça donne à penser et à parler ensemble. À
débattre et à s’enrichir mutuellement d’idées nouvelles. C’est fait pour ça à mon avis. Et comme toujours
(mais surtout avec une équipe aussi intelligente et talentueuse), j’aurais aimé que l’on puisse rester
ensemble dans la salle et parler de tout ça.
Nicolas Roméas
http://www.theatre-bastille.com/saison-13-14/les-spectacles/my-dinner-with-andre
PS : On parle aussi de ces choses-là ici…

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