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le mag’ cinéma Les Georges John Rambo Réalisé par Sylvester Stallone avec Sylvester Stallone, Julie Benz, Paul Schulze Bien du temps a passé et John Rambo habite en Thaïlande, à la frontière birmane. Ses silencieuses journées sont occupées par du bricolage pour son rafiot et la capture des serpents qu’il revend en ville. Un beau jour, un groupe humanitaire vient taper à sa porte afin qu’il les aide à leur faire passer la frontière birmane en bateau pour apporter soins et vivres (et Bible accessoirement) à la population, victime d’atrocités. Mission effectuée, on revient chercher Rambo pour lui expliquer que l’armée a attaqué le village qu’aidait le groupe et qu’une mission de sauvetage, à base de mercenaires RN 20 N°49 // Mars 2008 bourrins, est en cours. Rambo est donc engagé pour les conduire là où le groupe a disparu. La poignée de mercenaires se retrouve assez rapidement face à une armée d’une centaine de soldats, violeurs et tortionnaires. John Rambo suit la mission de loin... Même commentaire que pour le Rocky Balboa de l’année dernière: je m’attendais à un film facile, bourrin, dans la lignée des « nanards » des années 80, adaptés à la sauce XXIème siècle. Et bien non ! Grosse surprise ! On y retrouve un Rambo qui a totalement perdu foi en ce monde et les gens qui l’habitent («Fuck the world», «Nothing changes»). Il se fiche complètement des atrocités qui se passent à quelques kilomètres de chez lui. Après avoir passé une vie à tuer sur ordre au Vietnam, en Afghanistan et de s’être fait « renier » par ses compatriotes et son commandement, Rambo apparaît complètement dégoûté de tout (et surtout de la guerre), usé et vide de toutes envies. Et comme pour exorciser ses démons qui le bouffent de l’intérieur, il va pour la première fois se lancer dans l’action tout seul, sans qu’il en ait reçu l’ordre direct ou qu’il y soit contraint et forcé. Il va donc déverser toute sa haine, son amertume, son passé, sa violence dans ce dernier combat. Et Rambo qui en a gros sur la patate, c’est pas bien beau à voir. Prenez toutes les scènes les plus violentes des 3 premiers Rambo, multipliez les par 10 et vous arriverez au niveau de la scène d’intro du film. Si des gens qui se font trucider, qui marchent sur des mines ou qui se font canarder à coup d’obus perforants de 20cm (le tout en détails et en gros plan) vous répugne, alors vous aller souvent fermer les yeux. Mais à y réfléchir, on se demande quelles images sont les plus violentes: celles de fiction ou celles tirée de réelles archives TV, qu’on voit au tout début du film. par Kubiak « Je préfère mourir pour une cause que vivre pour rien ! » le mag’ cinéma Les Georges Assurément d’accord avec cet homme de goût - connaisseur de surcroît - qu’est Kubiak, j’aimerai abonder dans son sens... Déjà, c’est vraiment un film hors série comme l’annonçait le titre : le plus violent et ultra-réaliste de la série - radicalement différent des 3 autres. Les effets de la guerre sont volontairement exagérés. Enfin le personnage de Rambo, complètement dépassé par sa propre nature, blasé. En fait, à l’instar de Rocky Balboa qui faisait la peau aux années 90 du Sly, Stallone se débarrasse des démons de Rambo 2 & 3 en dégoûtant le spectateur de la guerre, des spectacles tout public qu’il a pu en faire. John Rambo est, à ce titre, très réussi. Enfin, je crois bien qu’on a trouvé en quelques films et une dizaine de scénario un véritable auteur surdoué. Je ne crois pas que je raterai les prochains Stallone. Ses films sont passionnants parce que profonds et engagés sans être bavards. L’image a un pouvoir saisissant chez lui. John Rambo n’est pas un film à aller voir les yeux fermés: documentez-vous sur l’auteur, l’homme et sa carrière, et posez-vous les bonnes questions: pourquoi un nouvel épisode de Rambo ? Pourquoi maintenant ? Pourquoi à son âge ? Pourquoi ce titre... Seul maître à bord pour un épisode de cette série qui a forgé son image malgré lui, Stallone répondra à toutes ces questions en un peu plus d’1h30, comme un grand, sans chichi ni langue de bois. C’est très convainquant ! Toutefois, moins intimiste et déchirant que le grand Rocky Balboa, on peut bien entendu parler de complémentarité. par Ben Si toi aussi tu aimes le cinéma, relève le défi de la table ronde. Pour plus d’information, tourne les pages de ton ReName ! - Qui es-tu ? - Ton pire cauchemar ! N°49 // Mars 2008 21 RN le mag’ cinéma Les Georges Ridley Scott / Jay-Z : American Gangster The man I worked for had one of the biggest companies in New York City. He didn’t own his own company. White man owned it, so they owned him. Nobody owns me, though. C’est vrai, votre journal préféré n’en avait pas parlé à sa sortie. C’està-dire qu’ici on privilégie la qualité à la quantité ma brave dame ! Il n’est pas près d’arriver le temps où le grand G nous croquera de sa toute puissance pour nous forcer à publier le fruit de ses recherches, tout auréolé peut-être de ses inséparables related links – je vois d’ores et déjà Mme Caquelin qui frotte ses mains pleines de farine, sûre de voir son enseigne s’afficher aux côtés du gastrobonhomme !! AH AH !! Bon, comme RN reste une référence incontournable dans le domaine de la revue d’œuvre audiovisu… pardon ? Parler du sujet, rapport au titre de l’article, tout ça !? Oui, bon, d’accord, j’y viens, ok ! On me fait signe dans l’oreillette que je ne suis pas non-payé pour faire de l’auto-réclame. Tant pis. Je vais donc arrêter de digresser, je ne vais donc pas vous parler de cette magnifique campagne de pub de Brigitte Bardot pour le non-mangeage de Cheval (sacrée Brigitte, du coup j’en ai repris deux fois, dites !), et je vais directement passer à ce pourquoi je pose cette magnifique combinaison de lettres rien que pour vos yeux : American Gangster. Deliver me in Thy righteousness and cause me to escape. And climb Thyn heir unto me. Save me, O’ Lord. Je ne vais pas m’étendre sur le sujet, le film de Ridley Scott est foutrement bien, je vous le recommande. Ce gars-là est quand même impressionnant, il a touché dans sa carrière à tous les styles, a très souvent brillé en posant même plusieurs pavés – on peut même parler de matrices filmiques (oui c’est joli) ayant inspiré nombre d’auteurs... Je vais même vous faire l’affront de citer les plus réussis : The Duellist, Alien, Blade Runner, Gladiator, 1492 : Christophe Colomb, Kingdom of Heaven et, enfin, ce fameux American Gangster. Le récit est classique, c’est un film de gangster, donc ça parle principalement des même thèmes que dans le Parrain, Scarface et compagnie (même Rocky, tiens) : un zeste de rêve américain, une pincée de mafias, de gunfights en pleine rue, de règlement de compte et un héro qui se remet lui-même en question une fois arrivé au sommet… Le film de Scott se démarque par une qualité de récit remarquable, une image digne du maniaque qu’est le réa- RN 22 N°49 // Mars 2008 lisateur (depuis Legend, avec Tom Cruise, ce n’est pas une surprise, Scott c’est canon), et une interprétation bluffante (enfin un grand rôle pour Denzel Washington, un acteur qu’on aime, une nomination aux Oscars pour Ruby Dee qui gagne quand même le Screen Actor Guild Award pour sa performance). Bref, un film bien chouette que l’on va gentiment déposer à côté de ses copains les grands films de gangster, qui ont surtout ceci de mieux : ils étaient là avant. Anywhere there’s o-ppression in the drug profession, flourishes like breverages. Refreshin’; ahhh, sweet taste of sin. Everything I seen made me everything I am. Bad drug dealer or victim, my bag? What came first -- movin’ chickens or the egg? This is why I be so fresh. I’m tryna beat life ‘cause I can’t cheat death. le mag’ cinéma Les Georges Vient alors notre ami Jay-Z, rappeur businessman dirigeant le puissant label Roc-a-fella (Kanye West, Feu Ol’Dirty Bastard…), présent à la projection de l’avant-première… le flash. Jay-Z c’est le mec qui n’a rien à prouver, un des 40 Américains les plus riches selon Forbes, incontestable leader du rap East Coast avec son rival et ami Nas, depuis bien entendu la mort du king, Feu Nothorious B.I.G. pour les deux du fond qui ne suivent pas. Alors pour moi Jay-Z c’est ce mec surdoué, prompt à sortir des rimes géniales, au flow parfois dément, et la diction si caractéristique… C’est aussi deux des 10 albums de rap US les plus marquants de tous les temps : The Blueprint et The Black Album, deux perles redéfinissant à chaque fois les standards de l’époque, rien que ça. Pour le reste de sa massive discographie (11 albums avant celui-ci), je retiens surtout une grande paresse à se recycler, à aller de l’avant, une bonne propension à se reposer sur ses lauriers. Après le Black Album (2003), il était censé se retirer du rap, une retraite bien méritée après 15 ans de bons services, mais a finalement repris le mic pour un Kingdom Come (novembre 2006) pas tellement inspiré, le genre de disque composé sur un pouf entre deux… pareil quoi. I know i shouldnt’ve did that I know its gon’ come right back I know its gon’ destroy everything i made Its probably gon’ get ya boy sent away But this game I play, ain’t no way to fix it Its inevitable that i’m- (fallin’) Alors Jay-Z se dit en admirant le travail de Scott : si j’avais continué à dealer, Shawn Carter aurait pu avoir la même vie que ce Frank Lucas… le rap l’a sorti de là, y at-il des regrets à avoir ? Composé en quelques semaines, cet album concept inspiré du film fait plaisir. Ayant retrouvé un peu d’envie dans son travail, le talent de Jay-Z saute au visage. Les compos signés Diddy et les Neptunes sont chouettes, inspirées de Soul et de Funk, sent la poussière, le vieux vynil. J’adore même les gros riffs qui parsèment le disque, tout ça illustre le sentiment de puissance et d’ascension du personnage principe que Shawny nous peint avec talent, en nous livrant une série de couplets vraiment enthousiasmants. A sa décharge, il faut avouer qu’il est quand même en terrain très très connu… Notons également quelques rares passages à vide sur la galette, un ou deux textes un peu moins bons, deux morceaux hors-série égo-trip pas très bien vus… Au final je vous recommande très chaudement ce disque – au réveil, dans le métro : ça réveille, ça pète bien, ça sent bon le disque fait avec passion et talent. A noter que le booklet d’accompagnement contient tous les textes, souvent gage d’un disque bien écrit, d’un produit bien fini ! Men shall be blessed in Him. All nations shall call Him blessed. In Your name I Pray. par Ben Tourne la page de ton ReName ! N°49 // Mars 2008 23 RN