Monica Bellucci “ÊTRE ACTRICE, C`EST UN ÉTAT SUSPENDU”

Transcription

Monica Bellucci “ÊTRE ACTRICE, C`EST UN ÉTAT SUSPENDU”
MODE
RENCONTRE MODE
Monica Bellucci
“ÊTRE ACTRICE,
C’EST UN ÉTAT SUSPENDU”
Elle termine un film avec Nicolas Cage avant
d’être dirigée par Philippe Garrel : Monica aime
les contrastes. Pour notre numéro Haute Couture,
l’égérie du maquillage Dior prête sa splendeur
italienne au photographe TYEN. Par Richard Gianorio
BAROQUE
Mise en Beauté Dior
avec Diorskin Nude Fond
de Teint Fluide Sable, Fard
à Paupières 1 Couleur
Nude Luminescence,
Crayon Khôl Noir,
Mascara Diorshow Iconic
Noir, Diorshow Brow
Transparent, Sérum
de Rouge Baby Rose.
PHOTO TYEN
LONGUE ROBE BUSTIER
EN FAILLE DE SOIE ROSE
PÂLE, REBRODÉE DE
CRISTAUX, DIOR HAUTE
COUTURE. COLLIER
EN PLATINE, SPINELLES,
DIAMANTS, PERLES
ET BRILLANTS, CARTIER.
FLEURS HERVÉ GAMBS.
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FATALE
ROBE-FOURREAU
DRAPÉE EN ROSE, EN
SOIE FUCHSIA, DIOR
HAUTE COUTURE. BAGUE
COLLECTION CARESSE
D’ORCHIDÉE, CARTIER.
DRAPS FRETTE.
L’ACTEUR RAPHAËL
PERSONNAZ
(lire encadré p. 69) :
PEIGNOIR DESCAMPS.
FLEUR TROUSSELIER.
PHOTO TYEN
Mise en Beauté Dior
avec Diorskin Nude Fond
de Teint Fluide Beige
Moyen, Fard à Paupières
2 Couleurs Cocktail Look,
Dior Style Liner Noir,
Crayon Khôl Noir, Mascara
Diorshow Iconic Noir,
Crayon Sourcils Poudre
Noir, Rouge Dior Crème
de Gloss Nectar de Rose.
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CAPITEUSE
ROBE À BUSTIER DE SOIE
VOILÉE DE DENTELLE
NOIRE, CEINTURÉE
DE TAFFETAS, SUR JUPE
BOULE EN DENTELLE
FUCHSIA BRODÉE,
DIOR HAUTE COUTURE.
BAGUE COLLECTION
CARESSE D’ORCHIDÉE,
CARTIER. RAPHAËL
PERSONNAZ : COSTUME
DIOR HOMME.
VERRE LALIQUE.
FLEURS HERVÉ GAMBS.
Coiffure Jean-Paul Ealet.
Maquillages Dior créés par
Tyen et réalisés par Kim.
Manucure Yana.
Décors Armand de Tayrac
chez l’Éléphant Blanc.
Développement
traditionnel argentique
par l’Atelier Publimod,
retouches par Corinne
Rodriguez by Dahinden.
PHOTO TYEN
RÉALISATION NICOLE PICART
RENCONTRE MONICA BELLUCCI
“IL Y A LA BELLUCCI
ET IL Y A MONICA”
TYEN
MONICA BELLUCCI. – C’est intéressant de m’avoir choisie,
L
e fond de l’air est baroque, du rose
et du mauve, un air de « la Traviata »
s’échappe d’un iPod. Ne manquent
que les effluves des tubéreuses. Le photographe Tyen,
exalté, hurle des mots d’amour à l’attention de Monica
Bellucci, modèle splendide et d’un stoïcisme qui force
l’admiration. « Dans le cadre de mon 6 x 6, les femmes
sont comme des animaux sauvages encagés. Je les excite, elles me donnent tout... » Flamboyante comme les
ors d’un palais romain, vamp du Trastevere ou madone
impassible, la Bellucci donne son regard d’onyx, sa
bouche mise à prix par Dior et ses traits d’une finesse
remarquable. Le rouge et le noir, variation chromatique
autour d’une passion que Tyen s’emploie à rendre viscontienne.
Libérée des mirages argentiques, Monica boit du café et
grignote une pizza. Humble, patiente, charmante avec
tous : c’est une bonne nature. L’air de rien, elle va fêter
vingt ans de cinéma. Pas à pas, elle a élargi son jeu puis
son champ d’action : l’Italie, la France et Hollywood sont
les points cardinaux d’une actrice qui a gagné en gravité ces dernières années, et fait désormais le grand
écart entre superproductions américaines (« The Sorcerer’s Apprentice », avec Nicolas Cage, en tournage) et
films d’auteur (un projet avec Philippe Garrel en 2010).
Autre chose ? Une vie de famille apparemment tranquille auprès de son mari, Vincent Cassel, et de sa fille
chérie, Deva. « Il y a la Bellucci et il y a Monica », résume Tyen qui la connaît bien.
« MADAME FIGARO ». – Vous êtes l’invitée exceptionnelle
de notre numéro Haute Couture. Un flash-back sur vos
années de mannequinat ?
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moi une femme ronde, ou « plantureuse », comme vous
dites en France. Les filles font du 32 aujourd’hui ! Quand
j’ai commencé à faire des couvertures, les stylistes
voulaient me rencontrer, et invariablement
il m’était impossible de rentrer dans les robes haute
couture avec mes seins. Ça ne m’a jamais rendue
malheureuse ; je me disais : pourquoi font-ils
des robes si étroites ? (Elle rit.) En même temps,
le mannequinat, c’est seulement trois ans de ma vie,
c’est-à-dire rien, mais je ne me suis jamais conformée
à ses règles, jamais. Et puis, j’ai cet avantage
de pouvoir perdre des kilos très facilement...
– Comment faites-vous ?
– Je suis la théorie du livre « 4 Groupes sanguins,
4 régimes » : à chaque groupe correspond une
alimentation particulière. Ce qui me convient, ce sont
les protéines, la viande, les légumes et les fruits.
J’évite les laitages, le pain, le sucre. Autrement dit,
mon régime est de ne pas en faire du tout ! J’aime trop
manger. Mais j’ai aussi la chance de ne pas fumer
et de ne pas boire. Quant au « beauty sleep »,
je ne sais même pas ce que c’est. Le « beauty sleep »,
ça n’existe pas quand on a un enfant.
– À vous voir si patiente et si humble tout au long
de ce shooting photo avec Tyen, on se dit que votre ego est
loin d’être inflationniste...
– Mon ego ? J’ai été une fille curieuse, débordante
même. J’étais une provinciale qui étouffait à Pérouse.
Je voulais échapper à cette vie-là. À un moment,
je suis partie sur les routes sac à dos. Et puis il y a eu
l’université, le départ pour Milan, le cinéma. Et ma
fille. Ma fille m’a fait faire un saut en avant inouï : l’ego
d’une actrice s’efface immédiatement devant son
enfant.
– Vous m’aviez dit qu’à un moment donné vous ralentiriez
le cinéma pour votre fille Deva, justement...
– Pour l’instant, elle est encore à la maternelle. C’est
une gitane, comme sa mère, elle me suit partout,
elle parle déjà l’anglais, le français et l’italien, vous
vous rendez compte ? Ma fille de 4 ans a plus voyagé
que ma mère durant toute sa vie ! Ce qui me rend
le plus fière, c’est de la conduire dans la vie doucement,
sans douleur, dans la plus grande sécurité. Je suis
très protectrice avec elle, très rassurante, très câline
aussi. Quand je me réveille le matin, c’est à elle que
je pense en premier.
– Le cinéma vous laisse-t-il assez de temps pour votre vie ?
– J’ai beaucoup de chance d’être une actrice
européenne. Il y a ici une flexibilité qui n’existe pas
aux États-Unis. Là-bas, le système n’est pas sans
brutalité : quand c’est fini, c’est fini, il n’y a pas
de seconde chance. Le cinéma européen est plus
respectueux des actrices : elles peuvent s’absenter
et revenir, travailler toute une vie ; il n’y a qu’à voir
les carrières de Deneuve, Huppert, Baye ou Rampling.
Et puis j’adore le bon ton français, j’adore quand
on m’appelle « Mademoiselle ». Ça me ramène à cette
phrase de Richard Burton : « Un acteur est moins
qu’un homme quand une actrice est plus qu’une
femme. » Être actrice, c’est un état suspendu. On vit
dans un rêve borderline...
– Monica Bellucci est borderline ?
– Elle est bordélique surtout. (Elle rit.) Je suis très
italienne : je suis toujours en retard. Je me souviens
que lorsque j’ai tourné « les Larmes du soleil »,
je suis arrivée avec quarante minutes de retard
à un rendez-vous avec Bruce Willis... Mais si je ne sais
pas toujours organiser mon emploi du temps,
je sais très bien ce qui convient à ma fille, en revanche.
– Vous êtes mariée avec Vincent Cassel. Comment
faites-vous pour éviter les tabloïds ?
– Je n’appartiens pas au monde des « gossips ». Je n’ai
jamais cherché à susciter l’intérêt des tabloïds.
J’ai besoin de ma vie privée, sinon je meurs...
“JE N’APPARTIENS
PAS AU MONDE DES
‘GOSSIPS’. JE N’AI
JAMAIS CHERCHÉ
À SUSCITER
L’INTÉRÊT DES
TABLOÏDS.”
– Vous ne nous direz rien de Vincent Cassel, alors...
– C’est un père magnifique. Et un acteur
que je respecte profondément. Il me comprend.
Quel homme peut accepter que sa femme file
immédiatement à Los Angeles après un coup de fil
pour un casting ? Voilà, nous ne vivons pas
exactement dans une quotidienneté... non, je n’ai
jamais vécu ça, la régularité, se réveiller à heure fixe,
la gym à 6 heures, le bureau, je ne connais pas.
Sauf en vacances, peut-être, mais en vacances
je ne fais absolument rien, niente... RICHARD GIANORIO
RAPHAËL PERSONNAZ
“ELLE INCARNE LA BEAUTÉ,
LE COURAGE, LA VOLONTÉ...”
Jeune acteur de 27 ans, il a été choisi pour incarner
prochainement Alain Delon dans un biopic sur
Romy Schneider. Pour nous, il joue les ténébreux
face à la starissime Bellucci.
– Quel effet pour un jeune comédien
de se retrouver dans le lit de Monica Bellucci
l’espace d’une séance photo ?
– C’est très flatteur, mais grâce à la gentillesse
de Monica Bellucci et à la mise en scène de Tyen,
tout s’est déroulé assez naturellement. J’avais
l’impression d’être dans un film et de jouer
une partition, certes enviable, mais totalement
en dehors de la réalité. Tout s’est donc passé
comme dans un agréable songe.
– Que pensez-vous du fantasme véhiculé
par Monica Bellucci ?
– Elle appartient à cette lignée de femmes hors
de l’ordinaire, comme Sophia Loren ou Claudia
Cardinale. Elles sont indissociables de l’Italie, mais
incarnent aussi merveilleusement des passerelles
entre la France, l’Italie et l’Amérique. C’est
évidemment leur beauté qui frappe au premier
regard, mais c’est leur courage, leur volonté et leur
soif d’ailleurs qui forcent le respect.
– Que ressentez-vous à l’idée d’incarner
Alain Delon prochainement ?
– De l’excitation et aussi une certaine appréhension,
qui est jusqu’à présent un moteur plus
qu’un inhibiteur. Au-delà de l’immense star,
c’est l’homme qui me fascine. Sa vie est un roman
et je l’envisage de cette façon. Je n’ai aucune
illusion sur le fait qu’on ne peut véritablement
R. G.
incarner un tel monstre sacré...
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