White Dog», canin le barbare

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White Dog», canin le barbare
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LIBÉRATION LUNDI 2 JUIN 2014
CULTURE
AUSSITÔT VU
CINÉMA Ressortie du film féroce et antiraciste
de Samuel Fuller, censuré pendant vingt-cinq ans.
«White Dog»,
canin le barbare
C’est l’âge de la Fondation
Maeght de Saint­Paul­de­
Vence (Alpes­Maritimes),
inaugurée le 28 juillet 1964
et qui expose, à partir
du 28 juin, une centaine
d’œuvres représentatives
à la fois de la collection
(Adami, Bonnard, Braque,
Calder, Calzolari, Caro,
Chagall, Chillida, Del Re,
Dietman, Giacometti,
Léger, Mitchell, Miró,
Monory, Oh Sufan, Takis,
Tàpies, Ubac) et des prises
de risques de la famille
Maeght, d’Aimé et
Marguerite à Adrien.
A LYON, LES NUITS SONORES
GRANDISSENT BIEN
Refermées dimanche par Kraftwerk et son show 3D qui
retrace toute l’histoire du groupe, pilier fondateur de la
musique électronique, les douzièmes Nuits sonores de
Lyon ont continué de sérieusement grossir et annoncent
approcher les 100000 spectateurs, quelque 12000 par
soir, venus arpenter l’ancien marché de gros situé à la
Confluence, là où se joignent la Saône et le Rhône.
Resserré dans ce quartier que la ville de Lyon veut utiliser
comme vitrine de sa réorganisation urbaine, le festival
électronique a montré ses ambitions mais n’a pas toujours
proposé une programmation à la hauteur. On gardera bien
sûr beaucoup de bonnes choses –la Colonie de vacances
(photo), Efdemin ou Oneothrix Point Never–, mais le sur­
gissement de groupes rock est un peu tombé à plat et la
fête de jour, sur les beaux quais de la Saône, a souvent fait
tapisserie. Il faut parfois passer par ces tâtonnements pour
faire avancer un festival. S.Fa. PHOTO ROMAIN ETIENNE.ITEM
Retrouvez nos reportages aux Nuits sonores sur www.liberation.fr
«Il y a là un sens du romanesque
et de la beauté vraiment physique,
et c’est plus important pour eux que de
se mettre déjà aux jeux vidéo et à l’iPad.»
Jack White ex­White Stripes, expliquant au Guardian
pourquoi il ne laisse ses deux enfants de 6 et 8 ans s’amuser
qu’avec des jouets mécaniques.
50
L’HISTOIRE
LE PRÊTRE ET
LE MOUSTACHU
DE VAN DYCK
En salles depuis mercredi, le film devait être réalisé par Polanski. ARCH DU 7e ART . PARAMOUNT
uand, au début des
années 80, la Paramount met en chantier White Dog, la
consigne est claire : «Jaws
with paws». Autrement dit,
les Dents de la mer avec des
pattes, référence au succès
dévorant du requin (blanc)
de Spielberg, qui avait secoué le tréfonds de l’âme des
plagistes du monde entier
cinq ou six ans avant. C’est à
peu près tout dire de l’ambition mesurée du studio pour
ce film, dont le script traîne
alors déjà depuis six ou sept
ans sur les étagères.
Adapté par Curtis Hanson,
qui avait acheté les droits du
roman de Romain Gary, le
film devait être réalisé par
Roman Polanski avant que ce
dernier, poursuivi pour détournement de mineure, ne
prenne la poudre d’escampette en Europe. Après diverses tentatives avortées dont
un projet de téléfilm, c’est le
vieux Samuel Fuller qui hérite, près de vingt ans après
son dernier film de studio, de
la mise en scène.
Traumatisante. Chien blanc,
le roman de Romain Gary
écrit en 1969, s’appuie sur
une expérience traumatisante vécue par l’écrivain et
sa compagne, Jean Seberg,
lorsqu’ils vivaient à Los Angeles. Le couple s’était entiché d’un chien errant, trouvé
par l’actrice dans une rue. A
plusieurs reprises, le chien,
par ailleurs docile, avait attaqué sans raison des gens de
leur entourage, des Noirs,
exclusivement. Seule expli-
Q
cation possible: le chien avait
été dressé à cet exercice, sans
doute dans un Etat du Sud.
Le roman de Gary, à travers
la tentative de rééducation de
l’animal, est une charge féroce non seulement contre la
perversion du racisme, mais
aussi l’ambivalence coupable
des classes aisées blanches à
une époque où, en dépit des
progrès liés aux droits civiques des Noirs, ces questions
sont encore loin d’être réglées. Au moins autant
qu’aujourd’hui, du reste.
Buffet. En imposant que
le film s’inscrive dans une
veine horrifique, et donc
dans le sillage de Spielberg,
nouveau roi d’Hollywood, la
Paramount entendait donc
atténuer le caractère polémique du film, évacuant la dimension critique du racisme,
cœur du sujet. C’était mal
connaître Fuller. Son film,
violent, osé, sans pitié, n’a
rien perdu de sa virulence. Il
est d’autant plus intéressant
de le redécouvrir dans une
version restaurée, que le film
a subi à sa sortie l’infamie
d’une censure préventive de
la Paramount, interdisant
de fait son exploitation aux
Etats-Unis.
Peu après la fin du tournage,
plusieurs associations de
défense des droits civiques,
dont la plus célèbre, la
NAACP (National Association
for the Advancement of Colored People), avaient protesté, sans avoir vu le film,
contre le message raciste
qu’il véhiculait. Encore une
fois, c’était bien mal connaî-
tre Fuller, combattant infatigable de tous les racismes et
fascismes, qui n’avait qu’une
seule méthode pour atteindre ses ennemis: leur rentrer
droit dans le buffet. Dressé
pour tuer (White dog), interdit de salles de cinéma pendant vingt-cinq ans aux
Etats-Unis, est le dernier
grand film de Samuel Fuller.
BRUNO ICHER
Le père Jamie MacLeod
avait un portrait de mous­
tachu à fraise, acheté
400 livres sterling
(490 euros). La BBC avait
une émission où l’on évalue
les œuvres d’art. Les deux
se sont rencontrés. Une
fois gratté et restauré, le
moustachu s’est révélé être
une esquisse de Van Dyck
pour un portrait des magis­
trats de Bruxelles, détruit
en 1695. Il devrait se vendre
au bas mot 600000 euros
et le prêtre compte s’offrir
avec une paire de cloches
neuves, pour le moins.
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(Pantin)
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