Déclinaison régionale du Plan National d`Action en faveur du Milan

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Déclinaison régionale du Plan National d`Action en faveur du Milan
 Déclinaison régionale
du Plan National d’Action
en faveur du Milan royal
Bilan 2011
Avec le soutien de : Référence du document : MICHEL L. 2012. Déclinaison régionale du Plan National d’Action en faveur du Milan royal : Bilan 2011. EPOB, 23 p. Déclinaison régionale
du Plan National d’Action
en faveur du Milan royal
Bilan 2011
Rédaction : Loïc MICHEL (EPOB) – Février 2012 Relecture : Hugues BAUDVIN (La Choue), Anne‐Laure BROCHET (EPOB), Pierre LECLAIRE (LPo Côte‐d’Or), Thomas MAURICE (LPo Côte‐d’Or) & Thibaut MESKEL (LPo Côte‐d’Or) Crédits photographiques : Loïc MICHEL (sauf mention contraire) 1 Milan royal en Bourgogne : Bilan 2011
SOMMAIRE RÉSUMÉ & MOTS‐CLÉS .................................................................................................................... 4 REMERCIEMENTS ............................................................................................................................ 4 INTRODUCTION ............................................................................................................................... 5 BILAN 2011 ...................................................................................................................................... 5 1. Zone d’étude ............................................................................................................................. 5 2. Suivi des populations hivernante et nicheuse .......................................................................... 5 2.1. Hivernage 2010‐2011 ................................................................................................... 5 2.2. Nidification 2011 .......................................................................................................... 9 2.2.1. Bilan de la nidification 2011 ........................................................................... 9 2.2.2. Baguage et marquage alaire ........................................................................ 12 2.2.3. Suivi des jeunes Milans royaux après l'envol ................................................ 13 2.2.4. Contrôles de Milans royaux marqués en Bourgogne .................................... 14 3. Conservation et restauration du Milan royal en Bourgogne .................................................. 14 4. Actions de communication / sensibilisation ........................................................................... 15 5. Nouvelles actions entreprises en 2011 ................................................................................... 16 5.1. Prospections de boisements en période hivernale.................................................... 16 5.2. Étude comparative entre le Milan royal, la Buse variable et le Milan noir ................ 17 5.3. Analyse des facteurs de mortalité du Milan royal ..................................................... 18 5.3.1. Étude du régime alimentaire du Grand‐duc d'Europe .................................. 18 5.3.2. Prospections « mortalité » sous les lignes électriques .................................. 20 5.3.3. Découverte de cadavres de Milans royaux ‐ autopsie et analyses toxicologiques ......................................................................................................... 20 5.3.4. Analyse des causes d'échec de la nidification ............................................... 21 5.4. Identification des Milans royaux reproducteurs ........................................................ 21 CONCLUSION ................................................................................................................................. 22 BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................................. 23 2 Milan royal en Bourgogne : Bilan 2011
LISTE DES TABLEAUX Tableau 1 : Bilan des suivis de nidification de 2007 à 2011 ................................................................................... 10 Tableau 2 : Nombre de jeunes Milans royaux bagués et marqués entre 2007 et 2011 ......................................... 12 Tableau 3 : Différents codes de couleurs des marques alaires posés sur de jeunes milans en Bourgogne en 2011
.............................................................................................................................................................................. 12 Tableau 4 : Dates moyennes de ponte, d'éclosion et d'envol des jeunes par espèce, en 2011 .............................. 17 LISTE DES FIGURES Figure 1 : Situation géographique de l'Auxois en Bourgogne ................................................................................. 6 Figure 2 : Localisation des dortoirs hivernaux de Milans royaux recensés en Bourgogne en 2011 ......................... 7 Figure 3 : Bilan des suivis de la population hivernante de Milans royaux de 2006 à 2011 ..................................... 8 Figure 4 : Carte de la nidification des Milans royaux en Bourgogne en 2011 ....................................................... 10 Figure 5 : Nombre de couples producteurs, de jeunes à l'envol et de jeunes produits, par espèce ....................... 18 Figure 6 : Sites occupés par le Milan royal et le Grand‐duc d'Europe dans l'Auxois en 2011 ................................ 19 LISTE DES IMAGES Image 1 : Jeune Milan royal marqué en 2011, sur la commune d'Uncey‐le‐Franc ................................................ 13 Image 2 : Jeune Milan royal à l'envol, observé à Chevannay ................................................................................ 13 Image 3 : Milan royal adulte s'alimentant sur la placette de Flavigny‐sur‐Ozerain ‐ © EPOB .............................. 15 Image 4 : Placette d'alimentation nouvellement installée sur l'ISDND de Drambon ............................................. 15 Image 5 : Buse variable adulte .............................................................................................................................. 17 Image 6 : Milan noir adulte ................................................................................................................................... 17 Image 7 : Grand‐duc d’Europe adulte ................................................................................................................... 18 Images 8 : Mâle du couple de Vitteaux observé à 5 km de son nid le 16/05/2011 (à gauche) et au‐dessus de son nid le 17/05/2011 (à droite) ................................................................................................................................... 22 3 Milan royal en Bourgogne : Bilan 2011
RÉSUMÉ & MOTS‐CLÉS Résumé : En 2011, le programme d'action « Milan royal » a suivi son cours. La mise en œuvre des différentes actions a contribué à l'amélioration des connaissances sur l'espèce. Le suivi de la population nicheuse, avec la localisation de nouveaux couples (« certains », « probables » et « possibles ») a permis d'avoir une idée encore plus précise sur la répartition de l'espèce en Bourgogne. Une nouvelle placette d'alimentation a été installée en octobre dans un centre de traitement de déchets, situé sur la commune de Drambon. Un Milan royal a fréquenté le site à plusieurs reprises. Parmi les placettes mises en place les années précédentes, au moins deux ont accueilli des Milans royaux de nombreuses fois en hivernage et en période de reproduction. Associées aux actions menées depuis 2006, de nouvelles études comme les suivis de Milans noirs et de Buses variables ou encore sur le régime alimentaire du Grand‐duc d'Europe, ont été entreprises cette année et vont nous permettre de mieux cerner la problématique du Milan royal en Bourgogne. Ces actions engendreront dès 2012 la rédaction d'un plan régional d'actions en faveur du Milan royal. Mots‐clés : Milan royal / Milvus milvus / programme de restauration / Auxois / Bourgogne REMERCIEMENTS L'EPOB remercie :  Toutes les personnes qui ont participé, de près ou de loin, à la bonne conduite des actions mises en œuvre en faveur du Milan royal.  Les associations naturalistes bourguignonnes ayant collaboré au programme Milan royal.  Les municipalités de Flavigny‐sur‐Ozerain et de Commarin.  Le groupe SITA‐Suez pour son soutien à la création d'une nouvelle placette d'alimentation, contribuant à la conservation du Milan royal.  L'Office National des Forêts pour sa mise à disposition d'un grimpeur. Nous tenons à remercier les différentes structures qui subventionnent nos actions, sans qui leur réalisation serait impossible :  Le Conseil Régional de Bourgogne.  La Direction Régionale de l'Environnement, de l'Aménagement et du Logement de Bourgogne.  L'Europe avec les Fonds FEDER Enfin, merci aux acteurs du réseau Milan royal, qui se battent chaque jour pour la sauvegarde de cette espèce. 4 Milan royal en Bourgogne : Bilan 2011
INTRODUCTION Depuis sa création en 2005, l'EPOB, la fédération des associations ornithologiques bourguignonnes, mène différentes activités en faveur des oiseaux. L'étude et la protection d'espèces à valeur patrimoniale figure parmi les grands axes de l'EPOB. C'est dans ce cadre que s'inscrit depuis 2006, le suivi et l'étude du Milan royal. Ce programme, établi à l'échelle de la Bourgogne, répond à des missions précises, découlant directement du Plan National d'Action dont les priorités sont le maintien et la restauration des populations de Milans royaux en France. Aux niveaux national et européen, cette espèce menacée bénéficie donc d'une attention particulière. Un réseau de spécialistes a vu le jour et tente de répondre efficacement aux objectifs fixés par ce plan. Issu de cette collaboration, le partage des connaissances permet de mieux cerner la problématique du Milan royal sur l'ensemble de son aire de répartition. En Bourgogne, le suivi des populations nicheuse et hivernante, ainsi que les actions de conservation et de sensibilisation figurent comme les objectifs principaux. Ces différentes actions menées en faveur du Milan royal seront développées successivement dans ce rapport. Enfin, un point sur les nouvelles activités initiées en 2011 sera également fait. BILAN 2011 1. Zone d’étude La Bourgogne est un vaste territoire qui se caractérise par une multitude de paysages. On y trouve notamment des zones de bocage, favorables à l'installation du Milan royal. Celui‐ci apprécie en effet l'association entre l'élevage extensif et la polyculture. Ces habitats types sont bien représentés dans l'Auxois, où la quasi‐totalité de la population nicheuse est établie. De ce fait, les suivis de population sont largement concentrés dans cette région naturelle (Figure 1). Des prospections ponctuelles sont néanmoins réalisées dans toute la région, notamment par des bénévoles, permettant ainsi la localisation de nouveaux couples. 2. Suivi des populations hivernante et nicheuse 2.1. Hivernage 2010‐2011 Comme chaque année, des prospections de dortoirs hivernaux de Milans royaux ont été effectuées durant l'hiver 2010‐2011 (Figure 2), selon deux méthodes distinctes :  La première méthode, effectuée intégralement par le chargé d'étude, consiste à réaliser en voiture des parcours dans des secteurs favorables, en fin d'après‐midi. Au total, ce sont 28 heures et 477 kilomètres, répartis sur sept dates, qui ont été consacrés à ces recherches.  La deuxième méthode, quant à elle, consiste à se positionner près de dortoirs régulièrement fréquentés, dans le but d'observer d'éventuels oiseaux. Dans le cadre du comptage national 5 Milan royal en Bourgogne : Bilan 2011
simultané, des sites susceptibles d'abriter ou ayant déjà abrité des dortoirs de Milans royaux ont été contrôlés les 8 et 9 janvier 2011. Sont principalement fréquentées les ISDND (Installations de Stockage de Déchets Non Dangereux), bien réparties dans la région et qui représentent pour les milans des garde‐manger attractifs. Leur visite a permis de recenser cinq dortoirs, abritant une cinquantaine de Milans royaux au total. Figure 1 : Situation géographique de l'Auxois en Bourgogne 6 Milan royal en Bourgogne : Bilan 2011
Figure 2 : Localisation des dortoirs hivernaux de Milans royaux recensés en Bourgogne en 2011 Côte‐d'Or Un seul dortoir a été recensé cette année en Côte‐d'Or, sur la commune de Pouillenay. Sur ce site, connu pour avoir accueilli deux à quatre Milans royaux durant l'hiver 2009‐2010 (MAURICE 2010), 16 individus y ont établi leurs quartiers d'hiver cette année. Un suivi régulier du dortoir a permis de constater que les oiseaux ont séjourné sur le site durant tout l'hiver. Le seul autre site de Côte‐d'Or ayant fait l'objet d'une prospection spécifique est l'ISDND de Drambon. Connu pour avoir été fréquenté par deux à trois Milans royaux durant l'hiver dernier (MAURICE 2010), aucun oiseau n'y a été contacté cette année. Saône‐et‐Loire Deux dortoirs ont été recensés sur les sites suivants :  Granges : le dortoir se trouvait sur le site de l'ISDND, assurant l'alimentation des milans en période hivernale. Ce site avait accueilli un seul individu durant l'hiver 2008‐2009 (MAURICE 2010). Lors de la journée de contrôle effectuée le 8 janvier, ce sont 14 Milans royaux qui y ont 7 Milan royal en Bourgogne : Bilan 2011
été comptabilisés, constituant ainsi le deuxième dortoir de la région.  Chagny : le dortoir était situé dans une forêt de plaine, proche de l'ISDND. L'hiver dernier, 4 Milans royaux et 1 Milan noir avaient été contactés sur ce site. Un an plus tard, l'effectif est sensiblement le même avec 3 à 5 individus. Yonne Deux dortoirs localisés sur les sites suivants :  Sauvigny‐le‐Bois : ce dortoir historique se situe à moins de 200 m du centre d'enfouissement technique de la SITA, en lisière d'un petit bois de feuillus. Découvert durant l'hiver 2006‐2007 (MAURICE 2007) et fréquenté sans interruption au fil des années, avec un nombre variable d'hivernants, ce site a été une fois de plus utilisé par les milans cette année. 9 individus y ont été observés le 9 janvier.  Saint‐Florentin : à l'instar du dortoir de Sauvigny‐le‐Bois, le dortoir de Saint‐Florentin accueille régulièrement des hivernants. Situé dans un petit boisement de chênes en plaine céréalière, il a abrité 13 Milans royaux durant l'hiver 2007‐2008 (MAURICE 2008). Cette année, 5 individus y ont été comptabilisés le 2 février, puis 4 individus le 14 janvier. Le centre d'enfouissement technique de Duchy, qui semble être le principal point de ravitaillement des milans, se trouve à moins d'un kilomètre et demi du dortoir. Nièvre Aucune donnée n'a pu être recueillie pour ce département. La localisation des dortoirs découverts cette année renforce l'idée que le Milan royal fréquente préférentiellement les centres de traitement de déchets, ainsi que les abords des fermes et hameaux. La Figure 3 fait le bilan depuis l’hiver 2006‐2007 des dortoirs hivernaux et des effectifs recensés. Figure 3 : Bilan des suivis de la population hivernante de Milans royaux de 2006 à 2011 8 Milan royal en Bourgogne : Bilan 2011
Outre les recensements d'hivernants effectués sur les différents dortoirs hivernaux, plusieurs observations ponctuelles ont été faites durant l'hiver 2010‐2011. En voici quelques exemples :  06/01/2011 : sur la commune de Pouillenay, tandis que le ciel couvert fait place aux averses et que les 16 Milans royaux fréquentant le dortoir sont tous perchés, une cinquantaine d'autres individus vole en direction du sud‐ouest.  08/01/2011 : toujours à Pouillenay, alors que les Milans royaux habituels sont au dortoir, une dizaine d'autres individus migre en direction du sud‐ouest.  18/01/2011 : à Missery, deux Milans royaux observés pendant une demi‐heure, volent ensemble près du site de nidification suivi. Il s'agit probablement d'oiseaux locaux, profitant d'une source connue de nourriture proche et relativement abondante toute l'année.  02/02/2011 : un individu en chasse, survolant les champs à faible altitude, observé à Flavigny‐
sur‐Ozerain.  04/02/2011 : Sur la commune de Martrois, un individu perché sur un arbre en compagnie de deux Buses variables, s'envole après quelques minutes d'observation.  09/02/2011 : deux Milans royaux survolent la placette d'alimentation mise en place en 2009 sur la commune de Flavigny‐sur‐Ozerain.  15/02/2011 : un groupe de sept individus volant ensemble est observé sur la commune d'Uncey‐
le‐Franc.  10/03/2011 : deux milans profitent d'une ascendance thermique qui leur permettra de poursuivre leur route migratoire en direction du nord‐est.  13/03/2011 : Il est près de 15h30 lorsque 13 Milans royaux sont repérés en train de migrer vers le nord‐est.  15/03/2011 : 10h00, un Milan royal en migration vers le nord‐est est repéré sur la commune de Chevannay. Deux heures plus tard, à Turcey, quatre individus sont observés, dont deux migrent vers le nord‐est, les deux autres étant des oiseaux locaux paradant sur leur site de nidification.  Plusieurs observations de Milans royaux en chasse sont faites chaque année proche de sites de nidification. Pour la plupart, elles relèvent très probablement d'individus sédentaires, exploitant leurs zones de chasse habituellement fréquentées en période de nidification (VALET 1975). 2.2. Nidification 2011 2.2.1. Bilan de la nidification 2011 Pour la sixième année consécutive, la Bourgogne a fait l'objet d'un suivi de la nidification des couples de Milans royaux. Ce suivi est effectué dans le cadre du Plan National d'Action proposant différentes mesures en faveur de l'espèce. Cette année encore, l'essentiel de ce travail s'est porté sur l'Auxois, vaste territoire d'exception abritant la quasi‐totalité de la population régionale. Néanmoins, les observations intéressantes réalisées en dehors de l'Auxois ont bénéficié d'une attention toute particulière, ce qui a permis de récolter des indices de nidification « probables » et « possibles » sur plusieurs sites. 9 Milan royal en Bourgogne : Bilan 2011
Depuis le début des suivis de l'espèce en Bourgogne, on assiste à une augmentation des effectifs nicheurs. Il faut cependant relativiser cette tendance qui est aussi probablement le fruit d'une meilleure connaissance des exigences de l'espèce et du territoire étudié, acquise au fil des années. En 2011, pas moins de 14 couples nicheurs « certains » ont été recensés, soit deux de plus que l'année précédente. Ils ont tous fait l'objet de suivis tout au long de la saison de nidification. Concernant les couples « probables », dont les individus sont fréquemment observés en période de nidification dans des zones favorables, 13 ont été identifiés. La fréquentation de 11 sites par des couples « possibles » a également été soupçonnée (Tableau 1, Figure 4). La détermination de l’indice de reproduction « possible », « probable » ou « certain » dépend des comportements observés (voir MAURICE 2010 pour plus de détails). Tableau 1 : Bilan des suivis de nidification de 2007 à 2011 Nidification certaine Nidification probable
Nidification possible TOTAL 2007
8
1
8
17
2008
10
2
8
20
2009
11
4
5
20
2010
12
5
8
25
2011 14 13 11 38 Figure 4 : Carte de la nidification des Milans royaux en Bourgogne en 2011 10 Milan royal en Bourgogne : Bilan 2011
Sur les 14 sites où la nidification a été attestée, 11 avaient déjà accueilli un couple l'année précédente. Trois nouveaux sites (deux en Côte‐d'Or et un en Saône‐et‐Loire) occupés par des couples nicheurs ont été trouvés cette année. Au total, au moins 9 de ces couples ont produit un total de 16 jeunes à l'envol. La taille des nichées se compose de la façon suivante :  Quatre nichées d'un seul jeune.  Trois nichées de deux jeunes.  Deux nichées de trois jeunes. Nous avons constaté que pour tous les sites ayant subi un échec pendant la nidification en 2010 (n = 3), les couples se sont déplacés de plusieurs centaines de mètres vers de nouveaux nids. Ainsi, le couple de Grésigny‐Sainte‐Reine a niché à 650 m du « nid 2010 » ; 500 m pour celui de Grigon et environ 300 m pour le couple d'Uncey‐le‐Franc. A également été constaté le fait que ces couples ont tous occupé des nids situés dans les parties supérieures des coteaux. Ceux de Grésigny‐Sainte‐Reine et de Grignon étaient situés respectivement à 53 et 85 m plus haut que les nids précédemment utilisés. Se reproduire et donner des jeunes étant la priorité de tout animal, ces constatations démontrent qu'un échec de nidification semble engendrer une recherche de solutions dès l'année suivante, par le déplacement vers une autre aire. Ce phénomène a favorisé la réussite de la nidification des trois couples concernés, produisant cinq (deux nichées de deux et une nichée de un) jeunes à l'envol. A l'inverse, tous les couples ayant réussi leur nidification en 2010, n'ont pas changé de nids. Cette année, deux cas d'échecs ont été observés. Le premier concerne un couple établi sur la commune de Thoisy‐le‐Désert, où il a niché en 2008 et 2009. Cette année, une première observation d'un couple volant au‐dessus du site de nidification a été faite le 21 mars. Quatre jours plus tard, le couple parade et entame le rechargement de l'aire. La femelle, très instable sur le nid ne semble pas avoir pondu. Les deux oiseaux iront même visiter un nid proche le 23 mai, période correspondant normalement à la présence de jeunes au nid. Par la suite, à partir du 21 juin, un seul oiseau sera observé sur le site de nidification. A cette date, une prospection dans les environs du site permettra de trouver plusieurs plumes de Milan royal, attestant la mort d'un oiseau. Le second cas d'échec a été constaté sur le site de Missery, où une ponte avait été théoriquement déposée le 18 mars. L'observation de la femelle, toujours couchée sur son nid près de deux mois plus tard, engageait sérieusement la thèse de l'échec. À cette époque, il aurait normalement dû y avoir des jeunes âgés d'une vingtaine de jours. Afin de confirmer l'hypothèse de l'échec, une seconde vérification était entreprise une semaine plus tard. À cette période, le nid semblait avoir été abandonné, aucun oiseau, jeune ou adulte, n'y étant observé. De plus, aucun indice de présence de jeunes n'était visible au pied de l'arbre. Ces deux nids ont par la suite été contrôlés et des indices y ont été récoltés (cf. § 5.3.4. Analyse des causes d'échec de la nidification). Un troisième couple, pour lequel la femelle a été trouvée morte sur son nid, a fait l'objet d'une attention particulière. Survenu en pleine période d'élevage du jeune, l'évènement a incité le mâle adulte à redoubler d'efforts pour mener son jeune jusqu'à l'envol. Le baguage de ce dernier, deux jours après cette macabre découverte, a été l'occasion de récupérer le corps (cf. § 5.3.3. Découverte 11 Milan royal en Bourgogne : Bilan 2011
de cadavres de Milans royaux ‐ autopsie et analyses toxicologiques). 2.2.2. Baguage et marquage alaire Depuis le début du programme de baguage des Milans royaux en Bourgogne, un total de 51 jeunes a été bagué (Tableau 2). Tous ces oiseaux ont également été munis de marques alaires, sortes de cartes d'identité permettant une identification à distance relativement simplifiée. Cette année, 16 individus ont été bagués et équipés de marques alaires (Tableau 3, Image 1). Ce chiffre est en constante augmentation depuis 2007. Tableau 2 : Nombre de jeunes Milans royaux bagués et marqués entre 2007 et 2011 Nombre de jeunes marqués 2007
2008
2009
2010
2011 9 ‐ 11 15 16 Tableau 3 : Différents codes de couleurs des marques alaires posés sur de jeunes milans en Bourgogne en 2011 12 Milan royal en Bourgogne : Bilan 2011
Image 1 : Jeune Milan royal marqué en 2011, sur la commune d'Uncey‐le‐Franc 2.2.3. Suivi des jeunes Milans royaux après l'envol En 2011, plusieurs jours ont été consacrés au suivi des jeunes Milans royaux marqués (Image 2). Sur 16 jeunes, plus de la moitié a fait l'objet d'un suivi après l'envol. Les données obtenues permettent d'affirmer qu'après l'envol, la majorité des oiseaux reste près de trois semaines sur le site de naissance. Certaines de ces observations ont également fourni des données sur l'émancipation des jeunes. En effet, trois d'entre eux ont été contrôlés à plusieurs reprises dans une vallée voisine de leur site de naissance, à plus de trois kilomètres de ce dernier. Deux adultes étaient régulièrement observés en leur compagnie. La prise de photographies à distance, à l'aide d'une longue focale, a facilité la lecture des marques, parfois rendue délicate aux jumelles. Cette méthode a permis d'identifier avec certitude les individus contrôlés. Image 2 : Jeune Milan royal à l'envol, observé à Chevannay 13 Milan royal en Bourgogne : Bilan 2011
2.2.4. Contrôles de Milans royaux marqués en Bourgogne A ce jour, trois de « nos » oiseaux ont pu être contrôlés. Le premier, benjamin d'une fratrie de trois poussins, a été bagué et marqué en juin 2007 et revu trois ans plus tard, à une dizaine de kilomètres seulement de son lieu de naissance, dans le département de l'Yonne (MAURICE 2010). Deux nouveaux contrôles ont été faits cette année, dans le Puy‐de‐Dôme. Ils concernaient des individus de première année marqués en 2011. Le premier avait été observé en train de chasser, le 18 juin. Le second a malheureusement été trouvé mort le 27 novembre, suite à un empoisonnement indirect à la bromadiolone. 3. Conservation et restauration du Milan royal en Bourgogne La mise en place de placettes d'alimentation figure parmi les actions phares du plan national d'actions du Milan royal. Ces structures, inspirées des charniers mis en œuvre dans le cadre des programmes de réintroduction des vautours dans les Grands Causses, sont un moyen de pallier à la disparition des ressources alimentaires, dont pâtit le Milan royal (LPO MISSION RAPACES 2008). En Bourgogne, quatre placettes d'alimentation ont vu le jour. Sauvigny‐le‐Bois La première placette, de type "portoir", a été installée en 2009 sur la commune de Sauvigny‐le‐Bois (89), directement dans l'enceinte de l'ISDND. Le choix de ce site a été motivé par le fait que des hivernants réguliers sont observés chaque année. De plus, plusieurs observations d'individus en période de nidification ont été faites dans des secteurs proches du site. La placette accueille aujourd'hui les Milans royaux en hivernage. Flavigny‐sur‐Ozerain Il s'agit de la seconde placette mise en place en 2009. Située sur un site naturel, elle se différencie de la première par sa construction composée d'une dalle de béton, située au centre d'un espace grillagé de 20 mètres de côté. Cette structure a été alimentée en déchets carnés durant toute l'année 2011. La mise en place d'un appareil photo automatique a révélé la fréquentation par plusieurs Milans royaux (Image 3). Les premiers, observés régulièrement en hiver, provenaient probablement d'un dortoir situé à 4.5 km du site. D'autres sont venus s'y nourrir durant la période de nidification. Un adulte d'un couple suivi, dont le nid était établi à moins de 3 km, fréquentait régulièrement le site. Une nichée de trois jeunes a été constatée dans le nid en question, tout comme chez deux couples de Buses variables proches. Ces constatations confirment le rôle important des placettes d'alimentation. 14 Milan royal en Bourgogne : Bilan 2011
Image 3 : Milan royal adulte s'alimentant sur la placette de Flavigny‐sur‐Ozerain ‐ © EPOB Commarin La placette de Commarin, mise en place en 2010 sur le site d'une ancienne décharge, ne semble avoir jamais été fréquentée par les Milans royaux. En revanche, nombre de Corneilles noires et quelques Buses variables s'y alimentaient de manière assidue. Drambon La dernière placette d'alimentation a été installée en octobre 2011 sur le site de l'ISDND de Drambon (Image 4), sur lequel des Milans royaux hivernants sont régulièrement observés. Sa création a été possible grâce à un partenariat établi entre la Ligue pour la Protection des Oiseaux et le groupe SITA‐SUEZ. La structure, très récente, accueille déjà des Buses variables et Corneilles noires. Un Milan royal a été observé à plusieurs reprises chassant sur le site, en novembre‐décembre Image 4 : Placette d'alimentation nouvellement installée sur l'ISDND de Drambon 2011. L'individu n'a pas encore été vu s'alimenter sur la placette. 4. Actions de communication / sensibilisation Une conférence sur le thème du Milan royal a été donnée le 14 juin 2011 au Muséum d'Histoire Naturelle d'Autun. Une quinzaine de personnes a assisté à cette présentation abordant les différents aspects de la biologie et de l'écologie de l'espèce, ainsi que les actions réalisées en sa faveur. 15 Milan royal en Bourgogne : Bilan 2011
Au même titre que la conférence, sur l'année scolaire 2010‐2011, une dizaine d'animations dans des écoles primaires de l'Auxois a été réalisée par un animateur de la Ligue pour la Protection des Oiseaux de Côte‐d'Or. En septembre 2011, une manifestation organisée par les chambres d'agriculture de Bourgogne, avec la collaboration du réseau Bocages de Bourgogne, portait sur la valorisation de la haie. À cette occasion, la parole a été donnée à différents acteurs du territoire. L'EPOB, représentée par son Président et par le chargé d'études, a été sollicitée pour témoigner des rapports étroits existant entre le bocage et l'avifaune, et notamment le Milan royal. Cette journée, visant un large public et en particulier les agriculteurs, a réuni une trentaine de personnes. Enfin, trois formations à la reconnaissance et à la connaissance du Milan royal ont visé plusieurs salariés du centre de traitement de déchets de Drambon, suite à l'installation d'une nouvelle placette d'alimentation sur le site en novembre 2011. Au cours de ces différentes manifestations, un grand nombre de plaquettes d'information sur la conservation du Milan royal dans l'Auxois a été distribué. Sa diffusion a également été faite auprès des différents acteurs du territoire (agriculteurs, chasseurs, habitants, promeneurs...), rencontrés directement sur le terrain. 5. Nouvelles actions entreprises en 2011 L'année 2011 a été marquée par la mise en œuvre de nouvelles actions s'inscrivant toutes dans un but d'amélioration des connaissances du Milan royal. 5.1. Prospections de boisements en période hivernale Cette action, élaborée lors de l'hiver 2009‐2010, a pris sa vitesse de croisière lors de l'hiver 2010‐
2011. Un nid de Milan royal établi dans de grands boisements est parfois difficile à localiser en période de nidification. En effet, l'accès au nid étant bien souvent très discret, le suivi de la nidification n'est pas toujours facilité. C'est à partir de ces constatations qu'est née l'idée de prospecter en hiver les boisements autour des sites de nidification connus. Le but étant de localiser, dans un rayon d'un kilomètre autour de chaque nid, le maximum d'aires de rapaces susceptibles d'accueillir le Milan royal et ainsi éviter de passer du temps inutilement à les chercher au printemps. Ces recherches préalables permettent de faciliter le suivi de la nidification ainsi que le baguage des jeunes. Au fil des années, la somme de données récoltée permettra d'avoir une cartographie des nids étoffée. 16 Milan royal en Bourgogne : Bilan 2011
5.2. Étude comparative entre le Milan royal, la Buse variable et le Milan noir Chaque espèce, animale ou végétale, appartient à un écosystème complexe au sein duquel elle joue un rôle important. De ce fait, la connaissance d'une espèce ne pouvant se limiter qu'à elle seule, il convient d'élargir notre champ d'étude à d'autres espèces aux exigences écologiques proches (régime alimentaire, habitat...). Par ailleurs, le fait d'avoir une vision globale du sujet permet de fournir des éléments de réponses appropriés en termes de conservation et de protection. Dans le cadre de l'étude du Milan royal en Bourgogne, il est intéressant de comparer certains de ses aspects écologiques avec ceux de la Buse variable (Image 5) et du Milan noir (Image 6), bien représentés dans notre région. En effet, ces deux espèces ont un régime alimentaire similaire à celui du Milan royal. Les micro‐
mammifères, vers de terre, batraciens, insectes, petits oiseaux et charognes figurent à leur menu. Les types d'habitats utilisés en période de nidification sont également sensiblement les mêmes. Image 5 : Buse variable adulte L'intérêt d'une telle comparaison est de comprendre les facteurs influant sur la présence ou l'absence de Milans royaux dans des secteurs à priori favorables. Seront pris en compte le régime alimentaire, la taille et la santé des nichées, indices reflétant la disponibilité et la qualité de la nourriture. L'histoire de l'évolution de chacune des trois espèces devra également être prise en considération, afin de préciser les résultats. Dans un premier temps, les prospections de boisements menées en hiver dans des secteurs fréquentés par le Milan royal, ont permis de localiser une quarantaine de nids de rapaces. Ceux‐ci ont ensuite été contrôlés une première fois en mars‐avril, de manière à connaître leur statut d'occupation. Au total, 14 couples reproducteurs de Buses variables et 7 de Milans noirs ont été suivis et nous ont fourni des informations sur la taille des nichées, ainsi que sur les dates de ponte, d'éclosion et d'envol des jeunes. Image 6 : Milan noir adulte Le Tableau 4 met en évidence ces données pour les trois espèces concernées. Il apparaît que les dates moyennes de ponte et d'éclosion de la Buse variable sont proches de celles observées chez le Milan royal. En revanche, le Milan noir, tenu par son statut de migrateur strict, a pondu en 2011 plus tardivement, avec près de trois semaines de décalage. Tableau 4 : Dates moyennes de ponte, d'éclosion et d'envol des jeunes par espèce, en 2011 Dates Ponte Éclosion Envol des jeunes Buse variable
(n=10) 13 avril
16 mai
5 juillet
Milan noir
(n = 5) 3 mai
5 juin
17 juillet
Milan royal (n = 9) 10 avril
12 mai
25 juin
17 Milan royal en Bourgogne : Bilan 2011
La Figure 5 fait apparaître le nombre de couples producteurs, de jeunes à l'envol et de jeunes produits par couple. Il montre que la production de jeunes de Milans noirs est supérieure à celle de la Buse variable et du Milan royal. Cette espèce opportuniste voit ses effectifs augmenter depuis quelques années dans nos contrées. Figure 5 : Nombre de couples producteurs, de jeunes à l'envol et de jeunes produits, par espèce Malgré les résultats obtenus, il est important de ne prononcer aucune conclusion hâtive, des comparaisons sur une seule année ne reflétant pas forcément la réalité. À l'avenir, il sera très intéressant d'approfondir les études sur ces deux espèces, et de confronter les résultats à ceux dont nous disposons pour le Milan royal. Cependant, l'étude du Milan royal ne peut pas se limiter à ces deux seules espèces, étant donné qu'il évolue au sein d'un écosystème composé de nombreux éléments comme ses proies, ses concurrents ou encore ses prédateurs. C'est pour cela que des prospections "Grand‐duc d'Europe" ont été entreprises cette année dans le but d'analyser le régime alimentaire de l'espèce, capable de capturer le Milan royal. 5.3. Analyse des facteurs de mortalité du Milan royal 5.3.1. Étude du régime alimentaire du Grand‐duc d'Europe Dans une optique d'analyse des facteurs de mortalité du Milan royal en Bourgogne, une étude concernant le régime alimentaire du Grand‐duc d'Europe (Image 7) devrait être entreprise très prochainement. Ce prédateur nocturne étant tout à fait capable de capturer des oiseaux de la taille du Milan royal, il n'est pas impossible de trouver cette espèce dans son spectre alimentaire. 18 Image 7 : Grand‐duc d’Europe adulte Milan royal en Bourgogne : Bilan 2011
En Bourgogne, le Grand‐duc d'Europe connaît depuis quelques années une expansion vers le nord, où il recolonise ses territoires perdus. La population régionale, estimée à plusieurs dizaines de couples, est répartie dans les quatre départements. L'espèce est présente dans l'Auxois et se reproduit souvent dans des zones fréquentées par le Milan royal (Figure 6). Figure 6 : Sites occupés par le Milan royal et le Grand‐duc d'Europe dans l'Auxois en 2011 L'analyse du régime alimentaire de ce prédateur permettra de mettre en évidence les relations existant entre les deux espèces. Le Grand‐duc est doté d'une grande capacité à capturer des proies allant du plus petit insecte au renard adulte. Cette analyse nous apportera par ailleurs une multitude d'informations sur la diversité animale. Dans un premier temps, des prospections ciblées sur des sites favorables ont été réalisées dans l'Auxois. Des écoutes nocturnes au suivi de la nidification, 34 heures ont été nécessaires. Ces recherches, menées sur 17 sites différents, ont permis d'en recenser trois nouveaux occupés par l'espèce. Parmi eux, deux ont abrité un couple reproducteur. Un seul des deux couples a produit deux jeunes à l'envol, tandis que l'autre a subi un échec durant la couvaison. Le troisième site a abrité une 19 Milan royal en Bourgogne : Bilan 2011
femelle seule, cherchant vraisemblablement à attirer un partenaire. Dans un deuxième temps, la récolte de pelotes de réjection sera effectuée sur les différents sites occupés. S'en suivra une analyse complète qui nous permettra d'avoir une idée précise sur l'alimentation du Grand‐duc d'Europe et par conséquent, sur ses zones de chasse. Cette opération devra être menée sur plusieurs années pour donner de bons résultats. Tout récemment, Christian Riols a trouvé des restes de deux Milans royaux dans une même pelote de Grand‐duc d'Europe en provenance du Massif Central (com. pers.). Les facteurs potentiels de mortalité du Milan royal sont multiples et ne sont pas simplement naturels, comme peut l'être la prédation par le Grand‐duc d'Europe. Il existe également des facteurs anthropiques qui représentent une menace pour le Milan royal. 5.3.2. Prospections « mortalité » sous les lignes électriques Le développement urbain induit la construction d'infrastructures telles que les routes, les lignes électriques, qui peuvent constituer une menace pour bon nombre d'espèces. Dans le cadre de notre analyse des causes de mortalité du Milan royal, nous nous sommes intéressés aux lignes électriques à moyenne tension. Quatre tronçons de lignes électriques ont été préalablement sélectionnés, en fonction de leur proximité avec des sites fréquentés par le Milan royal. La prospection de chaque tronçon, d'une distance variant de 6 à 7 kilomètres, a été réalisée à pied, directement sous les lignes et les poteaux électriques. Au total, près de 27 kilomètres ont été parcourus entre octobre et novembre 2010. Ces prospections ont permis de noter la présence de plusieurs cadavres d'oiseaux : deux de Buses variables, un de Faucon crécerelle et un de Corneille noire. La découverte de ces quatre cadavres victimes d'électrocution, et trouvés sur un tronçon de moins d'un kilomètre seulement, confirme la dangerosité de telles structures. Face à ce macabre constat, et après avoir exposé les faits à ERDF, les poteaux les plus meurtriers ont été rapidement neutralisés. Afin d'être le plus efficace possible, des actions de ce type devraient être conduites sur un territoire beaucoup plus vaste. 5.3.3. Découverte de cadavres de Milans royaux ‐ autopsie et analyses toxicologiques Le Plan National d'Action prévoit l'autopsie et l'analyse toxicologique des cadavres de Milans royaux, réalisées par un laboratoire spécialisé de l'École Nationale Vétérinaire de Lyon. L'intérêt de ces analyses est d'obtenir des informations sur les causes de la mort, par la recherche d'éventuelles traces l'attestant. À terme, ces opérations devraient permettre d’établir une cartographie et un répertoire des cas et des causes de mortalité sur le territoire national. Cette année, trois cas de mortalité de Milans royaux ont été attestés en Bourgogne :  Un premier cadavre, une femelle adulte morte sur son nid, gisait à côté de son jeune, toujours alimenté par le mâle. L'oiseau a pu être récupéré lors d'une intervention de baguage du jeune. Il a ensuite été envoyé à l'École Nationale Vétérinaire de Lyon où il a fait l'objet d'analyses toxicologiques. L'état de décomposition avancé du corps n'a malheureusement pu livrer de 20 Milan royal en Bourgogne : Bilan 2011
réponses quant à la cause de la mort. Néanmoins, la présence d'asticots et leur consommation des tissus permettent d'exclure une mort par un insecticide.  Le second cadavre, un jeune âgé de quelques jours, a été trouvé au pied de l'arbre abritant son nid, occupé par un autre poussin. La chute depuis ce très petit nid semble être la cause de la mort.  Enfin, un troisième cas de mortalité d'un adulte cantonné a été attesté suite à la découverte de plumes sous un de ses perchoirs habituels. Les rachis des plumes étant mâchonnés, l'hypothèse la plus plausible quant à la cause de la mort est celle de la prédation par un mammifère (martre, renard) pendant le sommeil de l'oiseau, ou directement au sol. 5.3.4. Analyse des causes d'échec de la nidification En rapport avec l'analyse des facteurs de mortalité du Milan royal, pouvant avoir une incidence notable sur la nidification, la visite des nids où cette dernière a échoué a été réalisée pour la première fois, cette année. Sur les 14 sites où la reproduction a été notée comme certaine, deux ont échoué. Dans l'espoir d'obtenir d'éventuelles informations sur les causes d'échec, des contrôles des nids concernés ont été entrepris le 28 juin, avec l'aide du grimpeur de l'Office National des Forêts. Le premier nid visité se situe sur la commune de Thoisy‐le‐Désert. L'absence de mousse et de laine de mouton dans le fond du nid permet d'affirmer qu'il a été abandonné au cours de sa construction et qu'il n'y a, par conséquent, pas eu de ponte. Aucune autre information permettant de comprendre ce qui a conduit le couple de rapaces à une telle issue, n'a été obtenue. Le second nid se trouve sur la commune de Missery, à près de 13 kilomètres au nord‐ouest du nid évoqué précédemment. Nous attendrons le 28 juin pour espérer connaître la véritable cause de cet échec. Ce jour‐là, trois coquilles d'œufs ouvertes sont récupérées dans le nid. La manière dont au moins une coquille était entamée nous laissait supposer une prédation par la Martre, très friande de ce genre de nourriture. Un second œuf semblait avoir reçu un coup de bec, probablement par un corvidé. L'échec de nidification est donc confirmé, sans que l'on en connaisse exactement la cause réelle. S'agit‐il d'une prédation ou d'une simple consommation des œufs après un abandon de la ponte par les milans ? 5.4. Identification des Milans royaux reproducteurs Parmi les nouvelles actions initiées en 2011, une s'est portée sur l'identification photographique des Milans royaux reproducteurs. Ses objectifs sont multiples :  Reconnaissance des adultes reproducteurs.  Connaissance des zones de chasse exploitées en période de nidification.  Confirmation de la présence de nouveaux couples. L'apparence physique de chaque individu diffère pendant la mue. Les plumes en renouvellement façonnent une silhouette propre à chaque oiseau, bien visible en vol. Ces critères permettent l'identification de chaque individu (Image 8). 21 Milan royal en Bourgogne : Bilan 2011
A l'aide d'un super‐téléobjectif monté sur un boîtier réflex, une dizaine d'adultes reproducteurs a pu être photographiée en période de nidification. Grâce à cette méthode, certains des oiseaux photographiés ont été identifiés à plusieurs kilomètres de leur site de nidification. Leur observation nous a ainsi apporté des informations sur les zones de chasse exploitées pendant la nidification et par conséquent, sur les distances d'éloignement par rapport aux nids, les types de milieux fréquentés... Par ailleurs, l'observation proche de sites de reproduction connus, d'individus non identifiés jusqu'alors, peut permettre de déceler la présence d'éventuels nouveaux couples. Cette méthode, associée à une multitude d'observations, a permis de montrer que dans la plupart des cas, en période de nidification, la distance maximale d'éloignement des adultes nicheurs par rapport au nid semble se situer aux alentours de 5 kilomètres. Images 8 : Mâle du couple de Vitteaux observé à 5 km de son nid le 16/05/2011 (à gauche) et au‐dessus de son nid le 17/05/2011 (à droite) CONCLUSION Etudier une espèce, c’est le faire dans sa globalité : collecter un maximum de données sur cette espèce, sans négliger ce qui « l’entoure ». A savoir les concurrents qu’elle peut avoir dans la recherche de nourriture et dans celle de sites de nidification, mais aussi les prédateurs. C’est cette stratégie qui a commencé d’être mise en place cette année et qu’il faudra bien évidemment poursuivre pour arriver à des résultats significatifs. Il va falloir également prendre en compte deux éléments « nouveaux » dans l’Auxois :  La cinquantaine d’éoliennes qui parsèment les paysages de l’Auxois. Bien que cette cause de mortalité soit rare en France dans l’état actuel de nos connaissances, on ne peut pas la négliger.  La possible, probable et vraisemblable certaine arrivée dans l’Auxois de la bromadiolone. Ce poison, destiné à tuer les Campagnols terrestres, tue également, par ricochet, les prédateurs qui les consomment vivants, mourants ou morts (rapaces, carnivores sauvages, sanglier, chiens et chats domestiques). Pour l’instant, un arrêté préfectoral autorise l’utilisation de la bromadiolone dans 145 communes de Saône‐et‐Loire (Brionnais), avec des conditions certes très strictes, mais si la loi reste la loi, les hommes restent des hommes et un poison reste un poison. Il semble très pertinent que pour ces deux menaces les associations départementales généralistes 22 Milan royal en Bourgogne : Bilan 2011
(AOMSL, LPO 21, LPO 89 et SHNA) se mobilisent. Les Milans royaux sont certes dans le collimateur des éoliennes et de la bromadiolone, mais bien d’autres espèces également : oiseaux et mammifères. Dans un premier temps, il serait opportun que des adhérents bénévoles proches de parcs éoliens ou de communes traitées à la bromadiolone (Saône‐et‐Loire pour l’instant) occupent le terrain en recherche d’éventuels cadavres. Dans un second temps, il serait souhaitable de trouver des financements pour que les salariés des associations puissent prendre la relève ou compléter les prospections. Il paraît inconcevable que l’Auxois, dernier réservoir du Milan royal en Bourgogne, ait à déjouer les pièges mortels de la bromadiolone. Selon l’expression d’un spécialiste du Campagnol terrestre : « en diminuant les doses, on limite les risques de mourir ». A méditer et à surveiller très attentivement… BIBLIOGRAPHIE MAURICE T. 2007. Le Milan royal en Bourgogne. Suivi de la population nicheuse régionale en 2007 : bilan et perspectives. EPOB, 48 p. MAURICE T. 2008. Programme bourguignon de restauration du Milan royal ‐ Activités et résultats 2008. EPOB, 26 p. MAURICE T. 2010. Programme de restauration du Milan royal ‐ Bilan 2010. EPOB, 43 p. LPO MISSION RAPACES. 2008. Milan royal – cahier technique VALET G. 1975. La sédentarisation du Milan royal Milvus milvus en Auxois. Alauda XLIII, N°3 23