Contrat et Patrimoine n°22 (Juin 2012)

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Contrat et Patrimoine n°22 (Juin 2012)
juijn 2012
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22
Votre avocat vous informe
contrat
& patrimoine
dans ce numéro
Consommation
Banque - Crédit
Contrat et obligation
Mandat
#Consommation
Décr. n° 2012-609,
30 avr. 2012
Publication du décret d’application sur les
regroupements de crédits
Pris en application de la loi du 1er juillet 2010
portant réforme du crédit à la consommation,
dite « loi Lagarde », un décret du 30 avril 2012
vient de préciser les conditions dans lesquelles
les opérations de regroupement de crédit
doivent être conclues de manière à assurer la
bonne information de l’emprunteur.
La loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 portant
réforme du crédit à la consommation, dite
« loi Lagarde », a institué une procédure
légale de procédure de « regroupement de
crédits » – jusque là abandonnée à la liberté contractuelle – dans le but de prévenir certains abus
(L. n° 2010-737, 1er juill. 2010, art. 22 ; C. consom., art. L. 313-15). Le texte renvoie à deux
décrets en Conseil d’État le soin d’en préciser les règles d’application. Le décret n° 2012-609 du
30 avril 2012, applicable aux opérations de regroupement conclues à compter du 1er octobre
2012, fixe les conditions dans lesquelles les opérations de regroupement de crédit doivent être
conclues de manière à assurer la bonne information de l’emprunteur. Comme le résume la notice
qui accompagne la publication du décret au Journal officiel, ce texte « impose au prêteur ou à
l’intermédiaire d’établir avant toute offre de regroupement un document qui permettra de faire
le point sur les modalités, les caractéristiques et le bilan de l’opération. Ce document sera rempli,
entre autres, sur la base des informations fournies par l’emprunteur. Si ce dernier ne dispose pas
des informations suffisantes, le prêteur ou l’intermédiaire devra alors le mettre en garde sur les
conséquences possibles de l’opération de regroupement ».
Le décret du 30 avril 2012 met d’abord à la charge du prêteur ou de l’intermédiaire de crédit une
obligation de se renseigner, afin notamment de savoir si l’opération de regroupement envisagée
« a pour objet le remboursement d’un ou plusieurs crédits et, le cas échéant, d’autres dettes »
(art. R. 311-3, IV et V. compl.). Il est prévu que « lorsque l’opération de crédit a pour objet
le remboursement d’un ou plusieurs crédits et, le cas échéant, d’autres dettes, le prêteur ou
l’intermédiaire de crédit établit, après dialogue avec l’emprunteur, un document qu’il lui remet
afin de garantir sa bonne information ». Le professionnel doit répondre « à toute demande
d’explication de l’emprunteur concernant ce document » (C. consom., art. R. 313-12 nouv.). Le
décret ajoute que le document d’information doit être « établi sur un support durable », sans
toutefois en préciser la nature. Ce document doit comporter, « présentées de manière claire et
lisible en caractères dont la hauteur ne peut être inférieure à celle du corps huit », cinq types
d’informations et de mentions (conditions et modalités du remboursement du crédit regroupé,
modalités de mise en œuvre et de prise d’effet de l’opération de regroupement envisagée, ou
encore les éléments permettant à l’emprunteur de procéder à l’évaluation du bilan économique
du regroupement envisagé.
Contrats de service à la personne : recommandation de la Commission des clauses
abusives
La Commission des clauses abusives a adopté, le 15 mars 2012, une recommandation relative
aux contrats de services à la personne. Cette recommandation vise à la suppression de vingtdeux clauses, tant dans les contrats en « mode prestataire » que dans les contrats en « mode
mandataire ». Les contrats de services à la personne en « mode prestataire » sont des contrats par
lesquels le professionnel s’engage à fournir une prestation de services exécutée par un intervenant
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Recommandation CCA
n° 12-01,
15 mars 2012
dont il reste l’employeur ou une mise à disposition à titre onéreux d’une personne physique
au moyen d’une convention. De leur côté, les contrats en « mode mandataire » portent sur le
placement de personnel auprès de personnes physiques employeurs ainsi que pour le compte
de ces derniers l’accomplissement des formalités administratives et des déclarations sociales et
fiscales liées à l’emploi de ce personnel.
Ainsi, la Commission recommande, par exemple, l’élimination, dans les contrats en « mode
prestataire », et lorsque le professionnel s’engage à fournir une prestation de services exécutée
par un intervenant dont il est l’employeur, des clauses ayant pour objet ou pour effet, d’engager
financièrement, dans tous les cas, le consommateur, parent ou tuteur légal, pour les prestations
sollicitées par le mineur non émancipé (Recom. n° 1). S’agissant des contrats en « mode
mandataire », elle recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet, entre
autres, de laisser croire au non-professionnel ou au consommateur, que le mandat est irrévocable
et qu’il ne peut dès lors, en aucun cas, mettre fin au mandat (Recom. n° 17). La Commission
recommande également l’élimination de clauses « transversales », que l’on retrouve dans les
deux types de contrats ; tel est le cas, par exemple, de celle prévoyant que des contrats d’aide
et d’accompagnement à domicile à destination de personnes âgées, de personnes adultes
handicapées ou atteintes de pathologies chroniques ou de personnes relevant de l’aide sociale
à l’enfance peuvent être à durée déterminée (Recom. n° 20) ou de celle laissant croire au
consommateur ou au non-professionnel que l’avantage fiscal prévu pour l’emploi de personnes à
domicile lui est automatiquement acquis (Recom. n° 21).
#Banque – Crédit
Com. 22 mai 2012,
n° 11-17.936
Responsabilité de l’intermédiaire financier pour prêt abusif consenti à son client
Un particulier a ouvert un compte titres auprès d’une banque pour effectuer notamment des
opérations sur le marché à règlement mensuel. Ces opérations s’étant dénouées par des pertes,
la caisse lui a consenti, quelques mois plus tard, un prêt d’environ 18 000 € pour résorber
partiellement sa dette. Puis, de nouvelles pertes ayant été enregistrées à la suite d’opérations
ultérieures sur ce marché, la banque l’a assigné en paiement du solde débiteur du compte. De
son côté, le client a reproché à la banque, qu’il actionne en responsabilité par le biais d’une
demande reconventionnelle, d’avoir manqué à ses obligations d’information et de mise en garde.
La demande du client est rejetée devant les juridictions du fond une première fois, puis une
seconde, sur renvoi après cassation. L’affaire est à nouveau examinée par la haute juridiction,
laquelle se prononce en faveur de la cassation et refuse de donner gain de cause au banquier,
considérant que celui-ci « devait répondre de l’aggravation du solde débiteur du compte causé
par cette faute ».
La Cour de cassation retient ainsi, même si le terme n’est pas utilisé, le manquement du banquier
à son obligation de prudence ou de diligence : lorsqu’il a constaté les premières pertes, il aurait
dû clôturer immédiatement le compte titre, plutôt que de s’obstiner à poursuivre la relation
contractuelle avec un client, qui, manifestement, n’était pas un investisseur suffisamment aguerri
pour être capable de rembourser le prêt consenti pour résorber le solde du compte titre. Bien au
contraire, ce prêt ne pouvait que contribuer à aggraver la situation financière du client. Cette
jurisprudence constitue en réalité une illustration de la figure classique de la responsabilité du
banquier dispensateur de crédit pour soutien abusif : l’idée est qu’il ne faut pas prêter à un client,
entreprise ou particulier, qui n’est pas en état de rembourser sa dette. C’est dire que l’arrêt a en
réalité une vaste portée et la solution qu’il édicte, quoique rendue dans le cadre d’un contexte
réglementaire daté, demeure pleinement d’actualité.
#Contrat et obligation
Clause de porte-fort prévue au contrat
En l’espèce une comédienne a été engagée afin de jouer le rôle d’Elvire dans la pièce Dom Juan de
Molière et le contrat prévoyait que l’artiste avait « priorité de droit pour une éventuelle tournée,
les conditions générales, notamment financières, devant faire l’objet d’un contrat ultérieur avec le
ou les producteurs de la tournée ». Or, la tournée a bien eu lieu mais le nouveau producteur n’a
pas engagé la comédienne. La cour d’appel a considéré qu’il y avait là une clause de porte-fort et
ce raisonnement est approuvé par la chambre sociale.
Une particularité peut être soulignée dans cette affaire puisqu’en l’espèce l’employeur qui avait la
qualité de porte-fort s’était engagé à ce que le tiers, l’éventuel producteur d’une tournée, négocie
en premier lieu avec la comédienne afin que cette dernière reprenne son rôle. La promesse portait
donc sur un acte à venir, à des conditions non encore définies, et non pas sur un acte déjà
négocié, configuration plus classique en matière de porte-fort.
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Soc. 3 mai 2012,
n° 11-10.501
Civ. 1re, 4 mai 2012,
n° 10-13.545
Comme le rappelle la Cour, la clause de porte-fort a pour effet de créer une obligation de résultat
à l’égard du porte-fort qui s’engage à ce que le tiers ratifie l’acte et non pas à faire tout son
possible pour que le tiers ratifie. Le promettant, qui avait engagé sa responsabilité contractuelle,
est condamné à verser des dommages-intérêts à la comédienne.
Reconnaissance de dette : charge de la preuve
Se prévalant d’une reconnaissance de dette souscrite à son profit par un particulier, un second
particulier l’a assigné en paiement de la somme y figurant. La demande est pourtant rejetée par
les juges du fond, au prétexte que la reconnaissance de dette litigieuse, ayant été établie au titre
d’un prêt consenti non pas par un établissement de crédit mais par un particulier, ce prêt est un
contrat réel qui, pour exister, suppose la remise de la somme d’argent qui en est l’objet. Or, le
prétendu prêteur, qui se prévaut de cette reconnaissance de dette, n’apporte pas la preuve de la
remise de ladite somme à son emprunteur. Dès lors, l’engagement de l’emprunteur, c’est-à-dire la
reconnaissance de dette, serait sans cause et n’aurait pas, en conséquence, à être exécuté.
Pour la haute juridiction, qui se prévaut d’une jurisprudence désormais bien ancrée (v. notamment
Civ. 1re, 19 juin 2008, n° 06-19.056), « la convention n’est pas moins valable quoique la cause
n’en soit pas exprimée, de sorte que c’était à [celui] qui avait signé la reconnaissance de dette et
contestait la remise de la somme litigieuse, de rapporter la preuve de ses allégations ». En bref,
le signataire de la remise de la reconnaissance de dettes aurait dû établir que les fonds dont le
remboursement lui est réclamé ne lui ont jamais été remis. Preuve d’un fait négatif qui est, on le
sait, toujours délicate…
#Mandat
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Votre avocat vous informe
juin 2012
Civ. 1re, 4 mai 2012,
n° 11-10.943
Confirmation de la gratuité du mandat non-professionnel
Une personne (A) a donc fait l’acquisition d’un terrain, puis mandate l’ancien propriétaire de
celui-ci (B) pour servir d’intermédiaire avec les propriétaires des parcelles voisines qu’il souhaitait
également acquérir ; il lui verse alors la somme de 1 500 €. Finalement, A informe B qu’il renonce
aux acquisitions et lui réclame le remboursement de cette somme. Il considère, en effet, qu’il
s’agit d’un acompte à voir sur le prix de vente des terrains, qui doit être restitué du fait de la
non-réalisation de la vente. Ce à quoi s’oppose B, qui considère pour sa part que cette somme
est destinée à rémunérer les démarches qu’il a effectuées dans le cadre du mandat qui lui a été
confié ; il est donc en droit de la conserver. Une juridiction de proximité se laisse convaincre par
cette argumentation.
La Cour de cassation, constatant que le mandataire ne prétendait pas qu’une rémunération avait
été convenue, prononce logiquement la cassation. Dans le silence des parties, le mandat est
gratuit. Le mandataire peut seulement prétendre au remboursement de ses débours, c’est-à-dire
des avances ou des frais auxquelles il a dû faire face pour l’exécution de sa mission, là encore, non
allégués en l’occurrence. La solution eut été différente si le mandataire avait exercé le mandat
dans le cadre de sa profession habituelle. En effet, en pareille hypothèse, la Cour de cassation
renverse la présomption de gratuité du mandat (Civ. 1re, 16 juin 1998, Bull. civ. I, n° 211).
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