Les Vacances au bord de la mer Dans l`introduction, dire

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Les Vacances au bord de la mer Dans l`introduction, dire
Les Vacances au bord de la mer
Dans l’introduction, dire en quelques phrases qui est Michel Jonasz, et préciser
l’importance de cette chanson dans sa carrière (voir également ce site).
Concernant l’auteur de la chanson, Pierre Grosz, l’article sur wikipédia permet
d’avoir une idée. L’arrangement musical est de Gabriel Yared.
Après avoir analysé le poème, la simplicité et la richesse des moyens musicaux
employés seront abordés, qu’il s’agisse de la forme, des timbres, de l’harmonie
(grammaire musicale) ou du tempo.
Le texte est constitué de deux strophes, la première contenant seize vers, la
seconde neuf vers. Globalement les rimes sont plates (aabb), mais l’auteur
s’autorise certaines libertés : aux vers quatre à sept, les rimes prennent la forme
cdce ; de même, dans la seconde strophe, la rime du vers cinq est orpheline,
puis les quatre vers suivants se terminent de manière identique. Le nombre de
pieds n’est pas fixe : six, sept, souvent huit et parfois neuf pieds. Les deux
premiers vers du deuxième paragraphe sont identiques aux deux premiers du
premier paragraphe. De même, les vers neuf et dix de la première strophe se
retrouve en sixième et septième lignes de la seconde strophe. Des vers qui se
répètent, une forme précise sans l’être… On peut donc se poser la question de
savoir à quel moment le texte fût écrit : a-t-il précédé la musique, l’a-t-il
accompagné, ou bien a-t-il été plaqué sur une mélodie préexistante ?
La structure musicale n’est pas simple :
l’alternance couplet refrain n’est pas évidente.
trois
ruptures
apparaissent,
Après une introduction au piano très courte (une mesure), le premier couplet,
durant quatorze mesures, se termine par un rallentando, un court silence
précédant le refrain de huit mesures. Un second silence, sans ralentissement,
semble déboucher sur le deuxième couplet, qui étonnamment reprend les deux
premiers vers du poème (voir ci-dessus). Ce couplet numéro deux est écourté
(trois mesures de moins que le premier, donc onze), et le refrain réapparait,
suivi d’une fausse fin. La coda est constituée de quatre mesures reprises trois
fois. Tous ces nombres pour montrer qu’il n’y a pas de régularité dans cette
chanson.
Simplicité de l’orchestration, c’est à première vue ce qui semble évident : un
piano, une contrebasse jouée pizzicato, un orchestre de cordes frottées, deux ou
trois instruments à cordes pincées, et la voix du chanteur. Dans le détail, les
cordes pincées, qui interviennent à partir du refrain, jouent legatissimo. Les
cordes pincées, évoquant une sonorité de type mandoline1, sont présentes dans
le refrain. La contrebasse en pizzicato ajoute les sons graves que le piano, utilisé
quasi exclusivement dans le medium, ne joue pas. Reste le rôle du piano : dans
les couplets, Michel Jonasz place à la main gauche un balancement régulier en
1
J’ai l’impression d’entendre des guitares avec des cordes en acier, jouées à l’aide d’un médiator ou plectre, et
une mandoline…
croche, donc deux notes par pulsation, constitué de la fondamentale de l’accord,
et de la quinte jouée au-dessus. Pour rester dans le même ambitus, il inverse le
sens des deux notes par moment. C’est un accompagnement très utilisé sur les
instruments à cordes pincées et frappées, et ce depuis la période classique
(Mozart, Beethoven s’en servent). Par contre, la main droite est très originale :
les notes des accords sont également jouées sous forme de balancier, mais avec
une carrure de deux mesures2, et une formule rythmique irrégulière, qui déplace
les accents et les repères, créant une nappe sonore mouvante. Cette écriture
pianistique est absente des refrains : d’une part, d’autres instruments s’ajoutent,
d’autre part, la main droite du pianiste dessine des contrechants.
La mélodie composée par Michel Jonasz est également pleine de finesse :
-mélodiquement, elle alterne tensions et détentes ; débutant sur les accords de
la seconde mesure, qui appellent la résolution harmonique de la troisième
mesure (donc un état de détente), elle est proche du procédé de récitatif (peu de
variation de hauteur) dans les deux premières phrases musicales. Par la suite, la
partie vocale et la main droite du pianiste se situeront dans les notes les plus
opposées à la grammaire musicale imposée par les notes graves du piano, créant
un état de tension permanent. Dans le refrain, rare sont les appuis sur des notes
« reposantes » (nombreux retards, par exemple).
-rythmiquement, Michel Jonasz n’a pas utilisé de formule, d’ostinato ; seule
constante, aucune phrase ne commence sur le premier temps d’une mesure.
D’autre part, il privilégie les « glissements », sorte de syllabes qui sont
prolongées, mais dont le début n’est pas stable. Très riche, voire difficile à
reproduire, et pourtant le rythme de cette mélodie semble naturel, facile !
Les accords de cette chanson prennent en compte la grammaire traditionnelle,
mais s’en écartent si besoin. Ré majeur est la tonalité de départ, mais n’est pas
celle de la fin de la chanson (mib majeur). L’enchainement simple (II V I) est
souvent présent (début, par exemple). Un autre procédé identifiable, le cycle des
quintes, est audible mesure quinze et suivantes. Par contre, les accords sont pris
pour des objets sonores individuels dans d’autres parties de ce morceau, et sont
enchaînés chromatiquement pour soutenir la progression descendante de la
mélodie (par exemple, de « On regardait les autres gens » à « …argent »). A
souligner qu’à l’exception de l’accord entendu au début de la chanson (accord de
ré majeur), tous les autres sont riches, constitués de quatre, voire cinq notes
différentes, ce qui a pour effet de brouiller les pistes.
Plusieurs variations de tempo sont présentes dans ces deux minutes cinquante
secondes. Ou plutôt, nous avons l’impression qu’il y a plusieurs changements :
les couplets, de par les rythmes complexes de la mélodie et de la main droite du
pianiste, ne permettent pas de situer avec précision une pulsation. Puis une sorte
d’arrêt marque le début du refrain : en fait le tempo ne change pas, mais un faux
2
Les respirations se font toutes les deux mesures.
silence brouille les repères. Dans le refrain, le 2/2 devient évident : il était
présent depuis le début, mais difficile à cerner. Un second break, avec un
véritable silence, réintroduit les sables mouvants du second couplet. Un
rallentando amène la reprise du refrain, tronqué par un second ralenti, puis les
instruments à cordes pincées reprennent la mélodie, avec un alourdissement du
tempo, dû à une simplification du rythme, lui ôtant cet aspect de jeu avec le
temps.
La voix de Michel Jonasz est liée au succès de cette chanson : ce timbre de
ténor, bien équilibré, possède un aspect légèrement nostalgique, voire
pleurnichard si l’on veut être désagréable, qui tranchait avec toutes les autres
voix de l’époque ; seul la voix de Demis Roussos possède des affinités avec le
sien.
Evoquant les vacances d’une famille aux revenus modestes, cette chanson est
intemporelle. Constitué de mélodies superposées, dont l’écriture est subtile, mais
la mémorisation facile, ce morceau bénéficie des talents d’orchestrateur de
Gabriel Yared : le grain de la contrebasse précédant le second couplet, le
crescendo annonçant « sauf quand on pouvait déjà plus »…. L’absence de
rythmique lourde (ni batterie, ni guitare basse), le flottement de la pulsation, les
ralentissements, l’harmonie incertaine, tout semble évoquer les vagues de
l’océan. L’aspect cathartique de certaines images (les bateaux, les glaces, les
belles couleurs) contrebalance le point de vue de l’auditeur qui se place en
observateur des gens « qui dépensent leur argent » : c’est peut-être cela qui
touche tous les publics. Les auditeurs qui ont connus la résignation, la jalousie,
peuvent partager des émotions. Les autres, ceux qui ne peuvent qu’imaginer,
trouveront des raisons de se consoler : « c’était quand même beau ».
Timbre ; hauteur ; tempo ; intensité ; temps ; durée, rythme ; plan .
Annexe1 : les paroles
On allait au bord de la mer,
Avec mon père, ma sœur, ma mère.
On regardait les autres gens
Comme ils dépensaient leur argent.
Nous il fallait faire attention :
Quand on avait payé
Le prix d'une location,
Il ne nous restait pas grand-chose.
Alors on regardait les bateaux
On suçait des glaces à l'eau.
Les palaces, les restaurants
On n'faisait que passer d'vant.
Et on regardait les bateaux.
Le matin on s'réveillait tôt.
Sur la plage pendant des heures
On prenait de belles couleurs.
On allait au bord de la mer,
Avec mon père, ma sœur, ma mère.
Et quand les vagues étaient tranquilles,
On passait la journée aux îles
... Sauf quand on pouvait déjà plus.
Alors on regardait les bateaux,
On suçait des glaces à l'eau.
On avait l'cœur un peu gros,
Mais c'était quand même beau.
Paroles: Pierre Grosz.
Annexe2 : durée des chansons de l’album « Changez tout ».

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