LA VIE EST UNE IMMENSE POUPEE RUSSE

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LA VIE EST UNE IMMENSE POUPEE RUSSE
Comportement difficile de l’enfant placé
LA VIE EST UNE IMMENSE POUPEE RUSSE
Vous pouvez constater qu’une formation de courte durée (deux fois deux jours) ne fait qu’effleurer les
problèmes et qu’à la fin vous partirez sûrement avec le sentiment d’une certaine frustration. Les
attentes d’une formation sont souvent très grandes et diversifiées par rapport à son temps réel.
La situation de chaque enfant nous montre un scénario différent sur le pourquoi une intervention
dans sa famille a été nécessaire, sur les signes inquiétants qui ont alertés le social et motivé son
éloignement, quelques fois de force, de ses parents. En regardant de près, nous pouvons comprendre
quels sont les enjeux, différents pour chaque couple, de la place dévolue à l’enfant, de la charge qui
pèse sur lui d’une histoire familiale immanquablement lourde.
Malgré la différence d’un cas à un autre, il y a toutefois quelques constantes. Il est souvent question de
contentieux, de haine et de violence entre les générations, de brouillages, de pactes, de secrets, de
versions mensongères qui circulent et se transmettent au fil du temps et dont l’enfant en fait héritage.
Si nous ne regardons que le mal-être, malheur, souffrance, symptôme à lui seul, nous ne voyons
qu’une petite partie de l’iceberg. Il est important de considérer que tout cela est étroitement partagé
avec les parents même si la famille nous donne l’impression d’être coupée en deux : " les méchants "
d’un côté et les " victimes " de l’autre.
Il y a des familles qui portent des problèmes lourds mais que nous ne rencontrons pas dans notre
parcours professionnel. Il s’agit des personnes qui règlent leurs affaires entre elles et peut-être qu’un
jour on saura, par exemple, que le père abusait de ses filles, que le couple maltraitait ses enfants... mais
tout cela sans bruit, sans que quiconque à l’extérieur le sache, la loi perverse de la famille les ayant
empêché de faire appel à la loi sociale et de bénéficier du regard des institutions.
A mon avis, dans les familles où il y a intervention, pouvant amener au retrait des enfants, il y a déjà
ce premier point de positif : elles ont fait ce qu’il fallait pour que tout le monde s’affole, pour avoir tant
d’intervenants autour d’elles, même si, en regardant de l’extérieur, nous avons l’impression d’une
bagarre sans fin entre les parents d’un côté et les services sociaux, éducatives et juridiques de l’autre.
Je fais le pari que les parents qui étalent leurs difficultés dans la scène sociale, ont trouvé une façon,
bien bizarre, j’en conviens, de demander de l’aide pour dépasser le stade dans lequel ils ont été euxmêmes largués par la génération précédente.
Souvent quand nous plaçons un enfant, nous avons l’idée qu’au-delà de le mettre à l’abri des parents
mal traitants, délinquants, pathologiques..., que nous le protégeons aussi du danger de venir à
s’identifier à ses parents-là et marcher sur leurs pas. Loin de ses parents, l’enfant serait ainsi protégé
de devenir comme son père, sa mère.
Sauf que les troubles de sa famille d’origine, ses conflits, sa violence, continuent d’habiter en lui où
qu’il soit. Il est faux de croire que la séparation physique aurait pour bénéfice le " libérer " l’enfant de
sa fidélité que les liens familiaux imposent, même si dans réalité cela s’avère pesant et douloureux. Le
plus il est dans le flou par rapport à la famille où il est né, le plus in projète sur sa famille d’accueil des
images archaïques, sans toutefois savoir ce qu’il fait. Cela est aveugle en lui.
L’identification aux parents est une réalité et une nécessité structurante. Tout humain est ainsi fait :
notre naissance se fait dans l’autre, qui nous marque de son empreinte et qui signale notre place avant
que nous soyons là.
L’enfant, séparé de sa famille, noyé dans la même histoire qui est la leur, n’est pas capable de
comprendre ce qui leur arrive. Il a peur de tout perdre et de s’y perdre : si ces personnes disparaissent
de sa vie ce sera une souffrance terrible pour lui, car il se verra une pure pièce détachée de son
contexte et de son histoire. L’enfant séparé de sa famille part en amenant avec lui quelques unes de ses
affaires personnelles et habité par ses objets internes : les personnes et les faits qui ont jusque là
constitué sa vie. Pour pouvoir vivre, il a besoin de continuer à dialoguer avec, malgré la distance qui
les sépare. Quelques fois, pour supporter sa douleur, il s’attache encore plus à cette présence en lui, ce
lien d’appartenance peut lui devenir vital.
L’enfant ne doit pas être mis en position d’avoir à choisir entre les personnes. Les professionnels ont
des projets pour lui, mais si l’enfant sent qu’il y a un choix à faire, engageant sa fidélité, le choix est
déjà fait, il ne peut que se ranger dans le camps des parents. Il vaut donc mieux que cette situation ne
se produise pas car il serait sans issue.
Il ne faut pas confondre les registres et penser qu’un enfant, un adolescent révolté contre ses parents,
ne voulant plus les revoir, ni en entendre parler, qu’il serait à l’abri de suivre leurs parcours.
L’expérience nous montre le contraire : le plus un jeune s’acharne pour crier sur les toits sa haine des
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parents, le plus nous pouvons nous inquiéter de son avenir. En effet, souvent, dès qu’il peut décider
de lui-même, il repart à la recherche de son père, sa mère. Ce qui ne s’est pas réconcilié dans son
histoire ne peut que se répéter inlassablement.
Ces familles ainsi marquées par de telles casses sont empêchées de transmettre la vie à ses enfants
sous un mode humanisant, c’est à dire, pouvant leur donner un récit du passé, leur permettant de
comprendre d’où ils viennent et comment les multiples histoires des uns, des autres, se sont
enchevêtrées et déroulées. Egarés dans ce grand brouillard, l’enfant (ni ses parents d’ailleurs) n’a les
moyens de savoir ce que l’on attend de lui, à quoi les voix de ses ancêtres l’autorisent, le commandent.
Dans l’impossibilité de converser avec le générations d’avant et donner un sens à leurs existences sur
terre, les différentes formes de désordre mentale prennent le dessus et la vie personnelle, la formation
de couples et la naissance d’enfants en pâtissent.
Si les parents disent à leur enfant placé qu’on le leur a volé et l’enfant les croit, les deux ont raison. Si
un père, une mère n’est pas capable de se trouver une place paternel, maternel possible, c’est bien
parce qu’ils n’ont pas été autorisés à l’occuper, par leurs propres parents. Sauf qu’ils agissent, ils
déplacent les interlocuteurs et ils pensent vraiment que c’est le juge, les travailleurs sociaux, les
familles d’accueils qui leur ont piqué leur enfant. Les familles d’accueil sont en première ligne dans ce
scénario, car ce sont les personnes qui incarnent de plus près la scène familiale, alors que les autres
professionnels sont plus protégés par le cadre institutionnel plus structuré : des bureaux, des chefs,
des équipes, des réunions, des horaires etc.
Le placement (famille d’accueil, foyer etc.) ne doit rentrer dans le scénario des beaucoup de parents :
un champ de bataille avec les professionnels qui aurait pour fond la question : qui est donc le (bon)
père, la (bonne) mère de cet enfant ? Si vous sentez que ce jeu est en train de se produire avec vous,
mère, père d’accueil, parlez-en rapidement avec votre référent, ou dans le groupe parole. Cela veut
dire, qu’il y a confusion entre les personnes, que les parents sont en rivalités avec vous, que les places
et les rôles ne sont pas clairs et l’enfant en fera les frais.
Les secrets concernant les problèmes qui ont amené à la séparation, l’histoire familiale, le suivi de sa
famille et les incertitudes de son avenir)
Ces questions non éclaircies pour l’enfant sont source permanente de malaise, de mal-être, de
questionnement. Cela entretien un contexte où l’enfant est en permanence en train d’interroger tout
seul, dans son coin, tout ce qu’il lui arrive, ainsi qu’à ses parents et leur avenir en tant que famille.
L’enfant séparé de sa famille, qui grandit sur des bases déchaussées, comme un terrain prêt à
l’effondrer, a besoin des professionnels qui jouent un rôle indispensable en tant que passeurs là où les
parents sont dans leurs propres impossibilités.
Un enfant placé doit pouvoir se faire une idée claire du pourquoi cela se fait pour lui. Avec des mots
simples, à la hauteur de sa compréhension, les personnes qui s’occupent de lui doivent lui dire à peu
près tout ce qui a pesé pour que l’on prenne la décision d’un placement. La séparation de l’enfant
d’avec ses parents peut devenir une scène dramatique, voire tragique où bien des versions (souvent
confuses) apparaissent sur les problèmes de la famille. Ce sont des moments durs à vivre pour tous, y
compris pour les professionnels. On dit beaucoup de choses à la famille et de la famille. Les espaces de
dialogues sont multiples : les rapports, les audiences, les réunions d’équipe, de synthèse, les groupes
parole... Il me semble que tout ce travail doit profiter à l’enfant, aidant chaque professionnel à trouver
à sa place, sa façon de lui donner des explications claires et pouvoir répondre à ses questions.
Souvent les professionnels se soucient de faire le tri de ce qui est vrai ou pas dans les problèmes de la
famille. Cela est fort encombrant et ne fait que les embarrasser alors, qu’à mon avis, ils pourraient
parler avec l’enfant beaucoup plus simplement, lui racontant ce dont ils sont au courrant et se mettre à
sa disposition pour l’écouter et découvrir avec lui sa façon de faire avec les éléments de sa vie, même
(et surtout) si sa réalité est très difficile.
Un autre point que j’aimerais aborder avec vous c’est la question de votre place. Vous avez peut-être
été surprises que dans la première partie de la formation, au lieu de travailler sur des " pistes concrètes
" concernant les problèmes de " vos " enfants, je vous ai amenée en premier, à des réflexions sur le
cadre plus général de la protection de l’enfance et de votre travail.
Pourquoi rentrer dans des considérations sur le " cadre ", alors que vous êtes aux prises avec des
réalités dures à vivre, amenées à materner des enfants enfoncés dans leurs souffrance, meurtris,
solitaires, violents, abandonnés, en échec scolaire... et, malgré tout, souvent " prisonniers " de leurs
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parents, prêts à tout faire pour retourner auprès d’eux et quelques fois dans l’incapacité d’accepter
l’accueil de sa famille remplaçante ?
Il me semble que si vous avez cette question bien claire pour vous même, vous avez déjà en main un
outil important pour aider l’enfant à désamorcer quelques uns des scénarii de ses parents très puissant
dans son esprit et qui le perturbe énormément, l’empêchant souvent de profiter de son placement, de
sa scolarisation etc.
Voyons tout d’abord votre contrat, avec l’organisme qui vous embauche, que ce soit l’ASE, un PFS ou
autre. Pouvez vous dire à l’enfant que vous avez en charge, sans rentrer dans les détails de votre vie
privée, vos motivations pour exercer le métier que vous faites, les formalités de votre contrat
d’embauche : vos droits, vos responsabilités, l’équipe à laquelle vous appartenez (le " groupe parole "
auquel vous assistez est une équipe à citer) et surtout, le travail que vous est du par votre institution ?
Tous les enfants, même les petits peuvent entendre tout cela, avec vos mots à vous et votre façon de
faire.
Qu’est-ce qui peut se passer si vous lui parler de votre contrat ? Craignez vous qu’il vous prenne pour
" son employée " , qu’il ne vous respecte plus en tant que sa mère d’accueil et que votre parole n’est plus
de prise sur lui ? Pensez vous perdre la légitimité pour vous occuper de lui, le punir, si besoin il y a, le
représenter dans votre communauté, comme son adulte référent ?
A mon avis, au lieu de vous enlever une part de légitimité, cette attitude peut, au contraire vous la
consolider. Il saura que vous vous occuper de lui au Nom de... au nom de l’Etat qui vous charge, vous
paye, vous forme, vous donne un cadre pour le faire ... un Etat qui distribue les places, dont la vôtre,
celle de ses parents, la sienne etc. L’Etat a une fonction parentale : il organise la filiation (qui est fils de
qui, de quels noms, quels biens on hérite...) et en ce qui concerne la protection de l’enfance, donc des
générations à venir, il y a un système des lois et d’institutions chargées de le faire (toujours au Nom
de...).
Au delà de toute discussion sur les liens juridiques d’un enfant à une famille, naturel ou adoptée, on
peut se demander si l’enfant appartient à quelqu’un. A mon avis, un des problèmes de beaucoup
d’enfants séparés de leurs familles c’est justement parce que les parents pensent que son enfant leur
appartient pour de vrai (ils le disent d’ailleurs). Au sens de possession, d’objet. L’enfant n’appartient
pas à ses parents, il appartient à leur lignée, avec tout ce que cela comporte comme héritage : du nom,
des biens, d’une mythologie familiale. Il y a ainsi un système de responsabilités : celles des parents
envers leur progéniture et de dettes : celles de l’enfant envers ses parents, qui qu’ils soient. Il ne peut, en
aucun cas, même s’il s’agit des parents malades mentaux, criminels, maltraints, abuseurs... être
exempté de la dette de la vie, même si pour leur protection, ils sont obligés de ne plus les revoir.
Si les professionnels s’autorise, au nom de la souffrance de l’enfant l’autorise à passer outre, à se
libérer de la dette de la vie envers ses parents, nous cassons en lui le maillon qui le relie à sa
généalogie, aux lois universelles de l’humanité, nous faisons de lui un électron libre et les
conséquences sont désastreuses. Il faut expliquer à l’enfant que son père, sa mère ne pouvaient pas
faire autrement, étant donné leurs propres histoires, que néanmoins ils n’avaient pas le droit, d’où
l’intervention des institutions. Il faut lui dire qu’on ne peut pas changer son histoire, que l’on ne peut
pas lui donner d’autres parents, mais qu’on peut l’aider et dans la réalité de sa vie et dans les
questions qu’il se pose concernant son avenir.
L’enfant, comme tout un chacun de nous est bien sur un citoyen, un sujet de droit et je pense qu’on
peut tout à fait lui dire, selon son âge, selon le style de chacun de nous, qu’en France ça marche
comme ça. Que c’est l’Etat qui commande et s’occupe des enfants dont les parents ne peuvent pas le
faire. Que c’est l’Etat aussi qui distribue les rôles, qu’il y a des lois qui organisent les institutions et les
fonctions des personnes là dedans.
Il me semble que c’est un soulagement pour enfant placé de savoir qu’il n’y a pas un jeu en miroir
entre sa mère, son père d’origine, et sa mère, son père d’accueil. En disant à l’enfant les termes de
votre contrat, en lui parlant aussi de l’entourage dont vous avez besoin pour exercer votre métier,
vous décalez les choses pour lui. Vous l’aiderez à comprendre quels sont les enjeux de sa présence
chez vous. C’est important qu’il sache qu’il a été accueilli chez vous parce que vous êtes payé pour le
faire, que vous avez choisi le métier que consiste d’aider les enfants à grandir et devenir des adultes
qui vont avoir des enfants à son tour. Dites lui qu’élever des enfants est une grande responsabilité et
qu’au-delà de votre contrat qui vous relie à une institution, vous devez aussi compter sur votre mari,
compagnon, ami(e), mère, frère, sœur... entourage proche, comme pour vos enfants à vous. C’est très
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dur pour une femme d’assumer seule l’éducation des enfants déjà naturels et je pense que tout enfant
doit savoir que le poids de son existence, de son éducation est partagé par les adultes autour de lui.
Ces personnes lui doivent du respect et lui de même.
Cela me fait penser à un autre aspect non négligeable : vous me direz que vous n’avez pas le droit de "
raconter " la vie de l’enfant placé chez vous et je peux supposer que cette " interdiction administrative
" vous met en difficulté quelques fois, confrontée que vous êtes à des enfants difficiles où les situations
d’urgences ne manquent guère. Essayons de faire la part de choses : personne n’a le droit, ou ne
devrait avoir le droit de déballer la vie d’autrui, ni la sienne d’ailleurs, comme certains parents qui
déversent devant l’école de l’enfant les détails de leur vie intime (y compris sexuelle quelquefois) à un
public voué à n’être que de témoins de scènes qui ne relèvent que de leur conjugalité extravagante.
Mais il me semble que le " raconter " dont on parle ici a bien une autre tonalité. Une mère, un père
d’accueil, doit pouvoir, pour continuer à aider l’enfant dont ils ont la responsabilité administrative et
moral, se faire aider à son tour par tous les adultes de sa confiance de sa communauté personnel et
professionnel.
Il est vrai qu’à l’époque actuelle où les soupçons traînent partout, les adultes qui entourent les enfants,
même en milieu scolaire ou dans d’autres structures, sont de plus en plus craintifs de se " mêler " de
leur éducation et venir à se faire piéger et accuser de bien de choses, pour une raison ou une autre. On
crée ainsi une proximité entre enfants et adultes faite de méfiance et de mise en garde, ce qui est
dommageable pour tous. Pouvoir s’adresser librement à un enfant, lui dire quelque chose de notre
place à nous, lui rappeler les règles du bien vivre dans toutes les circonstances c’est bien une richesse
de la communauté humaine que nous sommes en train de perdre, hélas, au profit de la peur de parler
et encore plus d’assumer tranquillement qu’un adulte - tout adulte - a des responsabilités envers les
générations plus jeunes.
S’il n’arrive pas se représenter de façon claire et organisée tout le monde qui l’entoure et ce que
chaque personne est censé pouvoir faire et ses limites, l’enfant finit par avoir une idée toute à fait
fausse de son entourage. Il peut même sur dimensionner les intervenants, en leur accordant tous des
pouvoirs presque de vie ou de mort sur lui, ce qui ne fait que le solidariser avec ses parents
infantilisés, démunis et de surplus dépossédés d’enfant. Les professionnels, élevés au rang de tout
puissants, deviennent alors des cibles de haines projetées. Aux yeux des parents et enfants, ils se
désincarnent de leurs fonctions, les drames familiaux les emportent tous, sur une scène passionnelle.
Les registres se mélangent, il n’y a plus de frontière entre les uns et les autres, ni de différence entre les
actes.
La distance est nécessaire pour garder la place de chacun protégée par des envahissements de la
pathologie familiale et des souffrances que cela nous entraîne.
La pensée a besoin de remparts pour se structurer, pour reconnaître les différences entre une chose et
une autre. Les enfants qui ne parlent pas nous apprennent beaucoup. En lui demandant de soutenir
notre le regard, en lui explicitant la nécessité de savoir à qui on s’adresse et comment, en lui contenant
quelquefois physiquement nous lui démarquons un moment, où les règles doivent être précises pour
arriver à se comprendre par la parole.
Le sens du mot placer, placer un mot, donner place... c’est tout un caléidoscope. Dès l’instant où la
mère, le père d’accueil délimitent leur place, ils donnent en même temps une place à la famille
naturelle de l’enfant et par ricochet la sienne et celle des enfants du couple d’accueillants. Ce jeu aide
l’enfant à se représenter dans une constellation trop complexe pour son espace de pensée chargée de
problèmes et parasitée par des angoisses multiples.
Les fois où j’ai été amenée à faire ce travail avec des enfants placés et en proie à des symptômes très
lourds, j’ai pu vérifier que l’entretien va bien au-delà des renseignements " administratifs " comme
cela peut paraître. Cela soulève un vrai tabou pour l’enfant qui, en général, ne voulant pas blesser sa
famille d’accueil fait comme si cela ne l’intéressait pas. J’ai pu constater avec étonnement qu’une vraie
curiosité naît de ces discussions et même les enfants renfermés et mutiques peuvent profiter pour
poser des questions tout à fait riches sur les personnes qui l’entourent, leurs droits sur lui, ses propres
droits concernant les décisions à prendre pour son avenir. La différence de tout cela avec les liens
affectifs se tisse en même temps.
Si ses multiples liens avec les personnes qui l’entourent sont clairs (à commencer par le niveau
juridique et administratif) il est alors plus libre et peut davantage accepter et donner de l’affect.
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Père, mère, frère, sœur - famille d’origine, père, mère accueillants, fratrie construite au fils des années
de placement, cela demande une grande capacité de repérage pour investir toutes ces personnes et se
permettre de donner à chacune une place dans sa vie, les aimer, les apprécier, les respecter, savoir
préserver ses liens même si des séparations quelques fois définitives sont inévitables.
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