Les haies champêtres s`im plantent dans

Transcription

Les haies champêtres s`im plantent dans
Vigne
Les haies champêtres s’im
Une association
de Gironde et le syndicat
de Saumur-champigny
aident les vignerons
de leur région à planter
des haies afin d’entretenir
la biodiversité et d’embellir
le paysage. Voici comment
ils procèdent.
L’
association Arbres et paysages
en Gironde a été créée en 1994.
Son équipe de trois techniciens
propose un appui technique à
la plantation de haies dans les zones rurales
du département. Elle conseille de nombreuses propriétés. A Saumur-champigny,
c’est le syndicat qui anime un projet réunissant environ quatre-vingts vignerons.
L’objectif est de planter 30 km de haies
autour des vignes d’ici à fin 2010. 15 km sont
déjà en place. Tous deux ont une approche
plutôt similaire.
1.
Un diagnostic
de terrain

A Bordeaux, « deux techniciens commencent par faire le tour de la parcelle
afin de définir les contraintes pratiques à
la plantation de haies », explique Cédric
haie plantée il y a cinq ans en bordure
d’une parcelle de vigne à Varrains
(Maine-et-Loire). La haie constitue
une barrière aux ravageurs et aux
maladies. Les essences choisies sont
buissonnantes pour éviter de faire
de l’ombre sur les vignes. © M. BALUE
Lauret, de l’association Arbres et paysages en Gironde. Ceux-ci réalisent une
analyse rapide du sol pour déterminer sa
texture, son pH, sa réserve hydrique. Ils
définissent l’emplacement des haies
et réfléchissent aux essences qui pourraient
bien s’adapter.
Dans l’appellation Saumur-champigny, le
personnel de la chambre d’agriculture de
Didier Vazel, vigneron, Domaine de Brizé
à Martigné-Briand (Maine-et-Loire)
« Nous voulons compléter
l’effet des bandes fleuries »
ous avions déjà des
haies sur l’exploitation. Nous avons commencé
à en planter d’autres il y a
environ deux ans, quand
notre commune a engagé un
remembrement des espaces
verts. La commune et la DDE
ont financé en grande partie
la plantation de haies dans
les vignes. Avec les subventions du conseil régional, le
coût de plantation a été nul
pour nous. Avec les haies,
nous voulons compléter
l’effet des bandes fleuries,
La Vigne W N° 213 - octobre 2009
que nous testons depuis
quelques années, sur la
faune auxiliaire. Le but est
d’augmenter et de diversifier
les insectes présents autour
des vignes. Etant placées en
bordure de parcelles et près
des fossés, les haies contribuent aussi au drainage de
l’eau. L’Enita de Bordeaux
m’a conseillé dans le choix
des essences. Je voulais
qu’elles hébergent des auxiliaires et que je puisse facilement les gérer tout seul. J’ai
planté surtout des espèces
2.Ladessélection
essences adaptées

T é m o i g n ag e
«N
Maine-et-Loire répertorie les espèces végétales qui entourent les parcelles concernées
et cible les endroits stratégiques où placer
les haies. « Il est important de faire la liaison
avec les arbres déjà présents », indique Armelle Vinet, de la chambre d’agriculture.
buissonnantes pour qu’elles
restent à une hauteur inférieure à deux mètres. Il faut
bien sûr entretenir les haies,
les tailler régulièrement.
Le pépiniériste qui fournit
les plants remplace ceux
qui n’ont pas pris pendant
les deux ans qui suivent la
plantation. Enfin, il faut aussi
enlever le paillage plastique
trois à quatre ans après la
plantation. »
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Sur l’appellation Saumur-champigny, le
syndicat des producteurs et la chambre
d’agriculture choisissent les plants parmi
les essences locales. Il s’agit principalement
de celles que les techniciens observent aux
alentours de la parcelle. « Elles sont susceptibles de bien se développer et d’abriter
des insectes acclimatés à la zone », justifie
Marie-Anne Simonneau, du syndicat des
producteurs.
En Gironde, l’association opte aussi pour
des espèces locales sélectionnées avec l’aide
de Marteen van Helden, de l’Enita de Bordeaux, qui travaille beaucoup sur le thème
des haies dans la vigne.
Dans les deux régions, les essences utilisées
sont principalement buissonnantes. Leur
faible hauteur évite d’ombrager les vignes
et facilite le passage du matériel viticole.
Mais on trouve aussi quelques arbres et
des espèces tapissantes. Ainsi, cornouiller,
viorne, troène, bourdaine, noisetier, amandier, prunellier, clématites, chèvrefeuille…
se mélangent dans les haies viticoles.
Vigne
plantent dans les vignes
Témoignage
Alain Dourthe, directeur d’exploitation, Château
Faugères, à Saint-Emilion (Gironde), Grand Cru
« Nous avons une quinzaine
d’essences différentes »
Viorne (en haut) et noisetier sont
des essences que l’on retrouve
couramment dans les haies.
© ARBRES ET PAYSAGES EN GIRONDE
A Saumur-champigny, le syndicat réalise
un achat groupé pour tous les viticulteurs,
qui reçoivent ensuite individuellement leur
commande. Arbres et paysages se chargent
également de l’achat des plants ainsi que
de leur livraison.
3.
La préparation
et le paillage du sol

Dans les deux régions, c’est au vigneron
de préparer le sol en vue de la plantation.
L’association girondine préconise un labour
en automne. Le sol doit ensuite être recouvert d’un paillage, juste avant la plantation.
Celui-ci limite la pousse d’herbes concurrentes, maintient une humidité suffisante
et protège les racines du froid pendant les
premières années du développement de
la haie. Il peut s’agir d’un film plastique.
Mais ce type de paillage est contraignant,
car il faut le retirer au bout de trois ou quatre ans. Les paillages biodégradables sont
donc préférables. « Nous optons désormais
pour du paillage en amidon de maïs ou en
feutre, du mulch, ou du broyat de bois »,
indique Cédric Lauret. L’association met
sa dérouleuse à disposition du viticulteur
pour poser le paillage.
Sur Saumur-champigny, la chambre
d’agriculture conseille vivement la paille
de blé, qui se dégrade facilement et laisse
les arbustes de la haie prendre le dessus
progressivement.
« N
ous avons commencé à planter
des haies il y a un peu plus
de dix ans. Nous avons désormais plus de 3 km linéaires de haies, avec un plant
tous les 80 cm environ. Nous
avons beaucoup travaillé
avec l’association Arbres
et paysages en Gironde.
Elle nous accompagne au
niveau technique et pour les
demandes de subventions
auprès du conseil régional,
dont l’aide couvre 40 % du
coût des plants.
Nous plantons les haies en
bordure de parcelles, sur les
talus… Au départ, l’objectif
était surtout d’héberger des
insectes auxiliaires, pour
lutter contre les ravageurs
type vers de grappe. Les
haies ont aussi un rôle de
stabilisation du sol. Elles
limitent l’érosion sur les
parcelles pentues, nombreuses sur le domaine. Puis, les
côtés visuel et environnemental se sont mêlés à la
démarche. Les haies nous
ont permis de morceler les
grandes étendues de vignes
et d’agrémenter les friches
laissées par l’arrachage.
Nous travaillons en viticulture raisonnée et les haies
s’inscrivent bien dans notre
volonté de préserver l’environnement. Nous mélangeons beaucoup d’essences,
pour favoriser la biodiversité
4.

La plantation
de la haie
« Nous livrons les plants à nos clients et
leur indiquons la méthode pour planter les arbustes, précise Cédric Lauret. Ce
sont des plants d’un ou deux ans, car leur
implantation est plus facile. »
« La période idéale pour planter la haie est
fin novembre-début décembre, poursuit Marie-Anne Simonneau. Cela coïncide avec la
plantation des pieds de vignes. » Les deux
spécialistes conseillent aussi de creuser
un trou à la tarière, de placer le plant bien
verticalement et d’étaler les racines, le collet
devant se situer bien à la surface du sol. Une
fois l’arbuste planté, la terre est remise dans
le trou et le paillage rabattu par-dessus.
soins pour assurer
5.Des
un bon démarrage

Les premières années étant décisives,
l’association Arbres et paysages assure le
suivi des haies pendant trois ans. Les techniciens remplacent notamment les arbres
qui n’ont pas bien pris. Ils accompagnent
les viticulteurs dans les opérations d’entretien de la haie : taille, désherbage, arrosage,
recépage, retrait éventuel du paillage.
A Saumur-champigny, ce sont les fournis-
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et pour varier les couleurs
dans le paysage. Près d’une
quinzaine d’essences sont
présentes dans les haies
du château. Bien sûr, elles
nécessitent pas mal d’entretien. Nous effectuons des
plantations régulièrement.
Au début, il faut les arroser
et remplacer les arbres qui
n’ont pas bien poussé. Il faut
aussi veiller à maintenir le
paillage constitué d’écorces
de bois et tailler régulièrement. En tout, je pense que
nous consacrons environ
2 000 à 3 000 euros aux
haies chaque année. »
seurs des plants qui remplacent les sujets
morts ou chétifs. Les viticulteurs entretiennent eux-mêmes leurs haies. Parfois,
le service des espaces verts des mairies s’en
chargent, en même temps qu’ils entretiennent les chemins.
Le premier printemps requiert beaucoup
d’attention. La taille de formation est indispensable au bon développement des jeunes
plants. Elle renforce leur vigueur.
Marine Balue
Estimer l’impact des haies
● A Saumur-champigny, la chambre
d’agriculture, en collaboration avec
l’Enita Bordeaux, l’Esa et l’INH d’Angers,
vérifie l’impact des haies sur la
biodiversité et les niveaux de ravageurs.
A cet effet, elle réalise des piégeages
et des comptages de tous les insectes
dans les parcelles concernées par le
projet. « Il est encore difficile d’estimer
cet impact, constate Armelle Vinet. Car il
faut compter une dizaine d’années pour
que les haies soient bien installées. »
Le viticulteur peut tout de même
observer ses parcelles afin d’estimer
succinctement l’évolution de la quantité
et de la diversité d’insectes présents.
N° 213 - octobre 2009
W La Vigne