Brefs rappels sur l`histoire des zoonoses

Transcription

Brefs rappels sur l`histoire des zoonoses
Rev. sci. tech. Off. int. Epiz., 2000, 19 (1), 15-22
Brefs rappels sur l'histoire des zoonoses
(1)
J. Blancou & F.-X. Meslin
(2)
(1) Directeur général, Office international des épizooties, 12, rue de Prony, 75017 Paris, France
(2) Coordonateur, Risques pour la santé publique liés aux animaux et aux aliments, Département pour la
surveillance et l'action, Programme des maladies transmissibles. Organisation mondiale de la santé, Avenue
Appia, CH-1211 Genève 27, Suisse
Résumé
À partir des quelques documents existant sur les modalités de surveillance et de
contrôle de certaines zoonoses aux temps passés, il est possible de retracer
l'histoire de la lutte contre ces maladies. Les mieux connues avant le X X siècle
étaient, notamment, la rage, la fièvre charbonneuse, la morve, la tuberculose, la
peste humaine, la fièvre jaune, la grippe et certaines zoonoses d'origine
parasitaire.
e
L'analyse des faits historiques permet de tirer un certain nombre de leçons sur
l'influence, positive ou négative, qu'ont eue les idées des anciens auteurs sur
l'étiologie de ces maladies, leur contagiosité ou leur prophylaxie. Ces leçons
rappellent aux responsables actuels de la lutte contre les zoonoses émergentes
l'urgence d'une recherche approfondie sur l'étiologie et le mode de transmission
de ces zoonoses comme l'importance de l'application immédiate du résultat de
ces recherches à leur prophylaxie.
Mots-clés
Étiologie - Fièvre charbonneuse - Fièvre jaune - Histoire - Peste - Prophylaxie - Rage Tuberculose-Zoonoses.
Introduction
L'histoire d e s z o o n o s e s , qui r e m o n t e p o u r certaines d'entre
elles à la plus haute Antiquité, p e u t s'avérer riche
d'enseignements p o u r les responsables actuels d e la santé
publique, qu'ils soient confrontés à la résurgence d e ces
maladies o u à l'émergence d e n o u v e a u x agents p a t h o g è n e s .
Nous n e rappellerons q u e b r i è v e m e n t l'histoire d e s
principales z o o n o s e s (maladies transmissibles d e l'animal à
l ' h o m m e ) dans la p r e m i è r e partie d e cet article, puisqu'elle est
généralement assez b i e n c o n n u e et déjà retracée dans d e
n o m b r e u x ouvrages ( 1 , 9 , 1 1 ) .
Nous n o u s attarderons e n revanche à étudier, dans la s e c o n d e
partie, les m e s u r e s a d o p t é e s jadis par les m é d e c i n s et les
vétérinaires p o u r lutter contre ces z o o n o s e s , e n analysant plus
e n détail les fondements et les résultats d e ces mesures.
Les principales zoonoses
e
Parmi les maladies rapportées avant le XX siècle, auxquelles
n o u s limiterons notre exposé, plusieurs avaient été
suffisamment b i e n décrites p o u r être identifiées e n leur t e m p s
avec une quasi-certitude c o m m e d e s z o o n o s e s , et elles sont
e n c o r e présentes d e n o s jours : il s'agit n o t a m m e n t d e la rage,
d e la fièvre charbonneuse, d e la m o r v e , d e la tuberculose et d e
la peste h u m a i n e .
Nous y rajouterons q u e l q u e s maladies infectieuses m o i n s
importantes, o u plus difficiles à reconnaître, ainsi q u e les
z o o n o s e s parasitaires les plus faciles à identifier.
La rage
Cette maladie fait partie, s e l o n Lépine, « d e celles qui ont le
s o m b r e privilège d'avoir depuis toujours p r é o c c u p é l'esprit
d e s h o m m e s » (14).
Rapportée, semble-t-il, dix-huit siècles avant J.-C. dans les
textes b a b y l o n i e n s ( c o d e Eshuna), elle a été décrite ensuite par
les anciens auteurs dans toutes les régions d u m o n d e (Égypte,
Inde, Grèce, Perse, R o m e ) , puis aux différentes é p o q u e s d e
notre ère.
Les s y m p t ô m e s d e la m a l a d i e étaient d o n c fort b i e n c o n n u s
depuis l'Antiquité, aussi b i e n c h e z l ' h o m m e q u e c h e z l'animal
et le danger d e la morsure d e s chiens était b i e n associé à
l'existence d'un « virus » (au sens d e p o i s o n ) dans la gueule d e
l'animal enragé.
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La transmission possible à l ' h o m m e d e la rage d u c h i e n (et
d'autres carnivores), curieusement niée par Aristote (IV siècle
avant J . - C ) , fut ensuite affirmée durant toute l'Antiquité
romaine (14).
e
La lutte contre la rage canine fit essentiellement appel à des
mesures d e prophylaxie sanitaire mais les innombrables
traitements qui furent tentés c h e z l ' h o m m e , depuis
l'Antiquité, attestent d e l'impuissance d e s guérisseurs devant
ce m a l jusqu'à la fin d u XIX siècle (2, 7).
e
La fièvre charbonneuse
Contrairement à la rage, la fièvre charbonneuse n e fut
reconnue qu'assez tard c o m m e une entité m o r b i d e b i e n
définie c h e z l'animal. Sa transmissibilité à l ' h o m m e fut, e n
revanche, affirmée d è s l'Antiquité, et rarement niée par la
suite.
La tuberculose
La tuberculose h u m a i n e a été b i e n décrite depuis la haute
Antiquité et s o n existence a été p r o u v é e par l'analyse d e s
lésions spécifiques observées sur d e s m o m i e s égyptiennes et
incas. La tuberculose des animaux était, par contre, m o i n s
b i e n connue, malgré les q u e l q u e s cas décrits q u e l q u e s siècles
avant notre ère par les Indiens (chez les éléphants) o u par
Aristote (chez les bovins et les porcins). Bien q u e la
tuberculose pulmonaire d e s animaux ait été r e c o n n u e
post-mortem par les Romains et les Grecs qui e n avaient
observé les « cavernes » et ulcères, ses causes réelles n e furent
jamais découvertes avant l'isolement d u bacille causal, par
Koch, en 1882.
Le caractère contagieux d e la tuberculose c h e z l ' h o m m e fut
affirmé par Fracastor dès 1546, tandis q u e le caractère
z o o n o s i q u e d e la tuberculose animale (pourtant s o u p ç o n n é
par Aristote), n e fut reconnu qu'au milieu d u XIX siècle ; la
maladie n e fut pas combattue avant le XX siècle (2, 9 ) .
e
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Les s y m p t ô m e s d e la maladie ont été longtemps confondus
avec ceux d'une envenimation par morsure o u d'une
intoxication, e n raison d e la rapidité d e s o n évolution. La
cause réelle d e la maladie n'a pas été c o n n u e avant
l'observation d e Bacillus anthracis au m i c r o s c o p e , mais la
notion d e « c h a m p maudit » apparaît dans d e s textes
antérieurs à l'ère chrétienne (2).
La lutte contre la fièvre charbonneuse fut également longue à
mettre e n œuvre, car le réservoir d e l'agent causal était mal
identifié, sans doute d u fait d u caractère tellurique d e la
maladie. Aucune mesure d e prophylaxie médicale, ni b i e n sûr
de traitement, n e pouvait e n effet venir à bout des é p i d é m i e s
observées c h e z l'animal o u l ' h o m m e avant l'identification d e
l'agent causal et la découverte d e s antibiotiques (2, 15).
La morve
Cette affection était c o n n u e plusieurs siècles avant notre ère
(Aristote l'a décrite c h e z l'âne), mais jusqu'au XVIII siècle les
hippiatres considéraient ses formes chronique et aiguë c o m m e
deux maladies différentes. Attribuée aux causes les plus
variées (externes o u internes), la source réelle d u contage n e
fut s o u p ç o n n é e qu'au XVII siècle, et le bacille d e la m o r v e ne
fut isolé q u ' e n 1884.
e
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Le caractère contagieux d e s cas déclarés c h e z les é q u i d é s fut
admis d è s le IV siècle. E n revanche, la possibilité d e la
transmission d e la maladie d u cheval à l ' h o m m e fut l'objet
d'âpres querelles entre « savants » jusqu'au début des années
1800, et cette incertitude causa la perte d'innombrables vies
humaines (15).
e
La m o r v e fut assez b i e n contrôlée, par les hippiatres grecs puis
au Moyen Âge, par d e s mesures d'isolement d e s chevaux
atteints et par la destruction d e s cadavres, mais les traitements
furent b i e n entendu impuissants, et m ê m e déconseillés par les
vétérinaires les plus éclairés (2).
La peste humaine
La première description confirmée d'une grande é p i d é m i e d e
peste remonte au règne d e l'empereur Justinien, e n l'an 5 4 2 .
Elle c o m m e n ç a sans doute e n Basse-Égypte et dura 50 o u
60 ans. Elle prit rapidement l'allure d'une véritable p a n d é m i e
qui aurait fait, directement o u indirectement, plus d e
100 millions d e victimes (12). Il est possible q u e d'autres
maladies aient contribué à cette h é c a t o m b e , mais l'on
considère q u e la peste sous sa forme b u b o n i q u e fut
responsable d e la plupart d e s décès. Une s e c o n d e p a n d é m i e ,
a p p e l é e la « Peste Noire », débuta e n Asie centrale au
XIV siècle (17), d'où elle aurait été i m p o r t é e e n E u r o p e par
u n navire. Bien q u e la peste pulmonaire fut la forme
prédominante d e cet é p i s o d e (transmission directe, entre
humains, d u bacille pesteux), d e s cas d e forme ganglionnaire
( b u b o n i q u e ) , transmis par les rats, furent également fréquents
dans certaines z o n e s rurales d'Angleterre (7). Cette p a n d é m i e
aurait fait d'innombrables victimes e n Asie, mais surtout e n
Europe, o ù plus d e 25 millions d e personnes, soit le quart d e
la population e u r o p é e n n e , s u c c o m b è r e n t à la maladie (8).
e
Le caractère hautement contagieux d e la peste h u m a i n e a été
reconnu dès les premières grandes é p i d é m i e s , mais la source
d u contage et surtout les modalités d e sa transmission
restèrent longtemps insoupçonnées.
La fièvre jaune
Il s e m b l e qu'il y ait toujours e u d e u x foyers distincts d e fièvre
j a u n e : l'un e n Afrique et l'autre aux Amériques. E n 1495, u n e
é p i d é m i e atteignit l'île d'Hispaniola. Plus tard la maladie
apparut à Cuba (1762) et à Saint-Domingue (1803). E n 1 7 2 3 ,
elle atteint le Portugal puis l'Espagne o ù 10 0 0 0 p e r s o n n e s
meurent à Cadix e n 1741 et 80 0 0 0 dans tout le pays e n 1 8 0 2 .
E n 1870, la fièvre jaune se p r o p a g e d u Brésil, o ù elle fait
15 000 victimes, à l'Angleterre, puis aux États-Unis
d'Amérique e n 1886 o ù 2 0 000 morts sont rapportées. Dans
les Amériques, aux XVIII et XIX siècles, la fièvre j a u n e était
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considérée par la plupart d e s gouvernements d e la région
c o m m e l'une d e s m a l a d i e s les plus graves d u fait d e s o n
impact sur la santé p u b l i q u e et sur le d é v e l o p p e m e n t
industriel et c o m m e r c i a l .
Les zoonoses parasitaires
La seule z o o n o s e parasitaire b i e n c o n n u e d e p u i s d e s t e m p s
très anciens est la Cysticercose, décrite par Hippocrate et
Alistote. Mais le lien entre les f o r m e s adultes d e s ténias et leurs
formes larvaires n e fut d é m o n t r é qu'au XIX siècle, par
infestation expérimentale d e l ' h o m m e avec d e s cysticerques
récoltés c h e z le p o r c (2).
e
La première description précise d'une grave é p i d é m i e d e
fièvre j a u n e r e m o n t e au XVIII siècle, o ù la maladie fit d e s
ravages e n A m é r i q u e d u Sud, e n A m é r i q u e centrale, dans les
Caraïbes et e n A m é r i q u e d u Nord. E n 1 8 0 2 , 29 0 0 0 d e s
3 3 0 0 0 soldats e n v o y é s p a r N a p o l é o n à Saint-Domingue
moururent d e cette maladie. En 1898, lorsque les États-Unis
d'Amérique déclarèrent la guerre à l'Espagne et envahirent
Cuba o ù la m a l a d i e était e n d é m i q u e , les troupes américaines
payèrent également u n lourd tribut à u n virus contre l e q u e l les
Cubains étaient naturellement immunisés d è s leur plus j e u n e
âge (10). À cette occasion, d e s observations détaillées furent
faites sur l'impact d e s m é t h o d e s expérimentales d e lutte
contre cette maladie, qui conduisirent après q u e l q u e s
hésitations à la m i s e e n p l a c e d e p r o g r a m m e s nationaux d e
lutte anti-vectorielle.
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Depuis 1 9 4 2 , grâce à la vaccination, aucune é p i d é m i e grave
de fièvre j a u n e n'a été signalée dans les Amériques (13).
La grippe
La première é p i d é m i e d e grippe h u m a i n e s e m b l e être
survenue e n l'an 1 1 7 3 . E n 1493 u n e é p i d é m i e d é b u t a à
Saint-Domingue, après le s e c o n d voyage d e Christophe
C o l o m b et elle fit 3,7 millions d e victimes dans les années
suivantes. E n l'an 1580, u n e p a n d é m i e affecta l'Afrique, l'Asie,
l'Europe et les Amériques. Plus tard, treize autres grandes
é p i d é m i e s furent rapportées au XVIII siècle, et d o u z e au
XIX siècle. La plus sévère p a n d é m i e , survenue au XX siècle,
dite d e « grippe espagnole », fit entre 2 0 et 4 0 millions d e
morts d e 1918 à 1920 (3). L e s relations entre c e s é p i s o d e s d e
grippe h u m a i n e et les infections par virus influenza affectant
les animaux (porcs et volailles n o t a m m e n t ) ont fait, et font
encore l'objet d e n o m b r e u s e s r e c h e r c h e s et spéculations
scientifiques. Cependant, d e s éléments récents sont venus
conforter l'hypothèse q u e le virus responsable d e cette
p a n d é m i e était d'origine animale.
e
e
e
La fasciolose n e fut p a s décrite avant l e XIV siècle et s o n cycle
n e fut élucidé qu'au XX siècle.
e
Le cycle d e la trichinellose n e fut établi q u ' e n 1860.
Les leçons du passé
Dans la s e c o n d e partie d e cet article il n o u s a paru intéressant
d'étudier les r é p o n s e s qu'ont a p p o r t é e s les responsables d e la
santé p u b l i q u e et d e la santé animale au défi p o s é par les
z o o n o s e s , avant l'identification d e leurs causes réelles.
Cette étude a p o u r b u t d'analyser les erreurs qu'ont p u
c o m m e t t r e m é d e c i n s o u vétérinaires à leur é p o q u e o u , au
contraire, d'apprécier à posteriori la valeur d e s m é t h o d e s d e
surveillance et d e lutte qu'ils ont m i s e s e n œ u v r e .
De telles situations pourraient se représenter d e n o s jours,
malgré les progrès d e la science ; la perplexité d e s autorités
sanitaires vis-à-vis d e s m e s u r e s à prendre lors d e s premiers cas
d ' e n c é p h a l o p a t h i e spongiforme b o v i n e e n est l'illustration la
plus récente.
e
Les questions fondamentales q u e se sont p o s é e s les anciens
auteurs n'étaient, e n effet, p a s très différentes d e celles
auxquelles doivent r é p o n d r e , aujourd'hui, c e u x qui sont
confrontés à l'apparition d'une nouvelle entité p a t h o l o g i q u e à
caractère z o o n o s i q u e , avéré o u potentiel.
Origine des cas primaires de zoonoses
Si, d è s la plus haute Antiquité, la transmission possible d e
certaines maladies d e l'animal à l ' h o m m e n e faisait p a s d e
d o u t e (voir ci-dessus), l'origine d e s cas primaires d e c h a q u e
maladie restait u n mystère.
Les autres zoonoses infectieuses
D'autres maladies infectieuses transmissibles d e l'animal à
l ' h o m m e ont été d é c o u v e r t e s avant le XX siècle, m a i s leur
caractère z o o n o s i q u e n'a été affirmé q u e plus tard.
e
La n o t i o n d e contagium vivum, c'est-à-dire, l'affirmation d'une
origine m i c r o b i e n n e d e s maladies, n e sera d é v e l o p p é e qu'au
XVIII siècle, m ê m e si elle avait, semble-t-il, été é v o q u é e par
Varron d è s le 1 siècle : cet auteur soupçonnait déjà « d e
petits animaux q u e l e s y e u x n e peuvent voir » d'être à l'origine
des diverses « pestilences » p o u r l ' h o m m e et les animaux
(11).
e
Parmi ces maladies o n peut citer la brucellose d e s ruminants
(dont la contagiosité n e fut a d m i s e q u ' e n 1875 et la
transmission à l ' h o m m e par le lait d e c h è v r e n e fut d é m o n t r é e
q u ' e n 1 9 0 5 ) , la fièvre d e la Vallée d u Rift (identifiée s e u l e m e n t
en 1931) o u la leptospirose, peut-être à l'origine d e
l'interdiction faite par l e s H é b r e u x d e c o n s o m m e r d u p o r c ,
mais r e c o n n u e seulement au XX siècle (2).
e
e r
Auparavant, les causes d e s cas primitifs d'une z o o n o s e ,
c o m m e celles d'autres maladies infectieuses, avaient été
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attribuées successivement à la colère d e s dieux, aux d é m o n s ,
aux variations climatiques, aux fermentations végétales o u
animales, aux h u m e u r s viciées d e s corps, etc.
Dans le cas d e la rage, c'est Galien qui s o u p ç o n n a le premier,
au II siècle, qu'un principe v é n é n e u x pouvait préexister dans
la gueule d u c h i e n enragé, être transmis par sa morsure, puis
s'amplifier dans l'organisme : « la diathèse, prenant s o n point
de départ d'une quantité d e salive très petite, et augmentant
dans le corps, se manifeste quand elle est arrivée à un
d é v e l o p p e m e n t considérable ». Cette thèse sera reprise au
III siècle par Aurelianus N e m e s i u s puis, e n 1546, par
Fracastor qui parla d e g e r m e s (semina) « capables d e se cacher
dans d e petits permis » (8). Tous c e s auteurs avaient d o n c
correctement déduit d e leurs observations q u e le siège d e la
virulence était salivaire et q u e celle-ci pouvait se manifester
sans q u e s o n agent soit nécessairement visible à l'œil nu. La
démonstration expérimentale n ' e n sera cependant apportée
q u ' e n 1 8 0 3 par Zinke, et l e virus rabique n e sera isolé qu'un
siècle plus tard, p a r Remlinger. Entretemps, Pasteur, sans
m ê m e avoir isolé le virus, réussit à produire e n 1885 u n
vaccin constitué uniquement d e matières virulentes atténuées
(14).
e
La source d u contage d e la p e s t e h u m a i n e resta m é c o n n u e
jusqu'à la découverte d e s bacilles d e la peste par Yersin e n
1897 (18). L'origine d e la maladie était p r é c é d e m m e n t
attribuée soit aux « m i a s m e s » évaporés d e s cadavres, o u d e s
sols o ù ils étaient enfouis, soit à u n e conjonction malheureuse
des planètes (15).
L'étiologie virale d e la fièvre jaune fut élucidée par Stokes dans
les années 1920, p e u avant q u e Noguchi, qui affirmait qu'il
s'agissait d'une leptospirose, ne se soit mortellement
contaminé e n manipulant d e s produits infectés (15).
e
Pour c e qui est d e la fièvre charbonneuse, Aristote attribuait
l'origine d e s cas observés c h e z l e cheval (branchos) à
l'ingestion d e scarabées, o u à la morsure d e s lézards o u d e s
musaraignes ; Végèce, au V siècle, accusait les vers
intestinaux d'être à l'origine d e s cas observés c h e z les bovins
(morbus alienatus) (11). Après d e multiples autres h y p o t h è s e s
(excès alimentaires s e l o n Rufus e n 1250, pollution d e l'air
selon Smith e n 1673, épuisement physiologique d'après
Hurtrel d'Arboval e n 1838, etc.), c e sont finalement les
observations d e Pollender a u m i c r o s c o p e ( 1 8 4 9 ) , puis l e s
travaux expérimentaux d e Davaine (1863), d e Pasteur et d e
K o c h (1876), qui démontrèrent l'origine bactérienne d u
contage et sa conservation dans l e s « c h a m p s maudits ».
e
La cause primitive d e la m o r v e d e s é q u i d é s fut d'abord
attribuée par les hippiatres grecs (Apsyrte et Végèce) à
l'absence d e vésicule biliaire c h e z le cheval o u à la corruption
de l'air. Au Moyen Âge, elle fut attribuée à d'autres facteurs
extrinsèques (fatigue, soif, etc.) jusqu'aux travaux d e Labessie
d e Solleysel (1664) qui é v o q u a le premier l'existence d'un
« venin » transmissible à distance d'un cheval à l'autre. L a
nature microbienne d e ce venin, s o u p ç o n n é d è s 1873 par
Chauveau, fut d é m o n t r é e dix ans plus tard par d e s
microbiologistes allemands et français.
L'étiologie d e l'infection tuberculeuse resta longtemps
mystérieuse. L'action d'un agent transmissible, é v o q u é e par
Fracastor d è s 1546, fut réaffirmée par Marten e n 1720, lequel
attribua la phtisie « à u n e certaine e s p è c e d'animalcula,
créatures trop petites p o u r être visibles à l'œil n u », c e qui sera
confirmé e n 1865 par Villemin (2).
La nature d e s « infusoires é p i d é m i q u e s », l o n g t e m p s
s o u p ç o n n é s d'être les agents responsables d e la grippe, n e fut
dévoilée qu'au XX siècle (15).
e
La première l e ç o n à tirer d e cette b r è v e synthèse est q u e les
h y p o t h è s e s les plus p r o c h e s d e la réalité et l e s plus f é c o n d e s
sont celles qui ont fait a p p e l à la n o t i o n « d'envenimation »,
puis à l'intervention d'un agent m i c r o s c o p i q u e vivant. C'est,
e n effet, d e cette n o t i o n q u e découla celle d e la contagiosité d e
la maladie, et d o n c d e la nécessité d'isoler les m a l a d e s o u d e
détruire leurs cadavres (voir ci-dessous).
La s e c o n d e l e ç o n est q u e la confusion entre les causes
favorisantes d e s maladies infectieuses (physiologiques et
environnementales) et leurs causes réelles, fut e x t r ê m e m e n t
fréquente et q u e c'est elle qui a conduit aux plus graves
erreurs d e stratégie prophylactique.
Notion de contagiosité
C o m m e n o u s venons d e l'indiquer, la notion d e contagiosité
découlait, b i e n souvent, d e l'étiologie s u p p o s é e d e la maladie.
C'est ainsi q u e la notion d e venin transmissible d'un animal
malade à l ' h o m m e , admise très tôt p o u r la rage, entraîna ipso
facto celle d e la contagiosité. De m ê m e , il s e m b l e q u e certains
p e u p l e s d'Asie aient fait, depuis d e s siècles, la relation entre la
mortalité qu'ils observaient c h e z certains
rongeurs
(marmottes, rats) et la survenue d'une é p i d é m i e d e p e s t e
humaine (4, 5, 6 , 1 2 , 1 6 ) .
En revanche, la contagiosité d e la fièvre charbonneuse, d e la
tuberculose et surtout d e la m o r v e , plus souvent attribuée à
des causes extrinsèques, n e fut a d m i s e q u e tardivement. Cela
était d'autant plus regrettable q u e , dans le cas d e la fièvre
charbonneuse et d e la m o r v e , les auteurs d e l'Antiquité avaient
été b e a u c o u p plus perspicaces.
La question cruciale d u danger d e la c o n s o m m a t i o n d e la
chair o u d'autres produits dérivés d'animaux atteints d e c e s
z o o n o s e s fut également très souvent mal a p p r é h e n d é e à
certaines é p o q u e s . Il est, par e x e m p l e , étonnant d e constater
que le danger d u contact avec la chair o u la p e a u d'animaux
morts d e fièvre charbonneuse, qui était déjà clairement signalé
dans les Géorgiques d e Virgile, fut ensuite c o m p l è t e m e n t
ignoré jusqu'au XVI siècle. De m ê m e , le danger d e la
e
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c o n s o m m a t i o n d e s produits issus d'animaux tuberculeux
(déjà signalé dans le Talmud) fut contesté j u s q u ' e n 1 8 6 3 , e n
Europe (2).
Les méthodes de lutte
L'idée d'une vraie prophylaxie m é d i c a l e , par vaccination, n e
pouvait être avancée avant la découverte d e s m i c r o b e s , mais il
aurait p u être p o s s i b l e d e contrôler, voire d'éradiquer,
certaines z o o n o s e s par la seule application d e m e s u r e s d e
prophylaxie sanitaire.
Prophylaxie s a n i t a i r e
Certaines d e s m e s u r e s p r o p o s é e s avant le XX siècle étaient
particulièrement pertinentes et fort efficaces lorsqu'elles
étaient b i e n appliquées.
e
Dans le cas d e la rage, ces m e s u r e s comprenaient, n o t a m m e n t ,
le port obligatoire d e la muselière p o u r les chiens agressifs
( r e c o m m a n d é par l'Avesta, e n Inde, six siècles avant J.-C.), le
contrôle d e la divagation d e s chiens ( r e c o m m a n d é par l e
Talmud, au IV siècle), et leur abattage, r e c o m m a n d é e n Chine
plusieurs siècles avant J.-C., puis dans
l'Antiquité
gréco-romaine, o ù l'abattage était pratiqué à certaines
p é r i o d e s d e l'année, lors d e s Kynophantes o u d e s Dies
caniculares (14). Par la suite, c e s m e s u r e s furent, semble-t-il,
oubliées : l'interdiction d e divagation d e s c h i e n s o u leur
abattage e n cas d'épizootie d e rage n e furent appliqués qu'au
début d u XVIII siècle e n E u r o p e et le port d e la muselière n e
fut rendu obligatoire q u e plus tard e n c o r e , au Royaume-Uni
(1871) o u e n France ( 1 8 8 4 ) .
e
e
Pour c e qui est d e la fièvre c h a r b o n n e u s e , l'isolement d e s
bovins atteints d e cette m a l a d i e fut rendu obligatoire e n
Espagne d è s le XVI siècle, puis e n France par u n arrêté royal
d e 1784. C e dernier arrêté prévoyait aussi l'abattage d e s
malades incurables, m a i s il fut rarement appliqué. La
destruction
et
l'enfouissement
de
cadavres
furent
r e c o m m a n d é s à la fin d u XVIII siècle.
e
furent d o n c rendus obligatoires (en E u r o p e ) qu'à partir d e s
années 1890. La m i s e au point d e la tuberculine par K o c h (en
1891) facilita considérablement l'abattage sélectif d e s sujets
contaminés. Il e n fut d e m ê m e p o u r la prise e n c o m p t e d e la
contagiosité d e la brucellose, dont le réservoir b o v i n , puis
caprin, n e fut r e c o n n u qu'à la fin d u XIX siècle.
e
La lutte contre les z o o n o s e s dont l e réservoir est u n e e s p è c e
animale sauvage et le vecteur u n a r t h r o p o d e fut plus délicate à
mettre e n œ u v r e ; le meilleur e x e m p l e e n est celui d e la p e s t e
h u m a i n e . Il s e m b l e q u e les Indiens o u les Mongols, qui
avaient fait la relation entre la mortalité qu'ils observaient c h e z
les rongeurs et la survenue d e cas d e peste h u m a i n e (voir
ci-dessus), aient pris d e s m e s u r e s p o u r se protéger d u contact
avec ces animaux (12, 16, 17). E n revanche, il n e s e m b l e pas
q u e les autres p e u p l e s aient été aussi perspicaces. C'est ainsi
q u e , m ê m e après la découverte d u bacille d e la peste et la
r e c o m m a n d a t i o n d e Yersin d e lutter contre les rats, la peste fit
e n c o r e d e très n o m b r e u s e s victimes à H o n g Kong, e n 1 9 0 1 ,
faute d e m e s u r e s appropriées p o u r lutter contre ces rongeurs.
Le rôle d e réservoir d u bacille d e ces animaux n e fut
définitivement admis q u ' e n 1905 et l e rôle d e vecteur d e s
p u c e s n e fut r e c o n n u q u e b i e n plus tard.
U n autre e x e m p l e est celui d e la fièvre jaune. Le rôle d e s
m o u s t i q u e s dans la transmission d e la maladie fut découvert
d è s 1881 par u n savant cubain, Finlay, puis confirmé par
R e e d e n 1 9 0 0 . Mais il fallut attendre plusieurs années avant
q u e les autorités sanitaires n e tirent les c o n s é q u e n c e s d e ces
découvertes et organisent d e s c a m p a g n e s d e désinsectisation,
qui permirent d e contrôler la m a l a d i e à Cuba, puis au Brésil et
e n Bolivie (1).
Quant à la prophylaxie sanitaire d e s endoparasitoses
( é c h i n o c o c c o s e , fasciolose, trichinellose), elle fut m i s e e n
place il y a m o i n s d'un siècle, après q u e les cycles d e ces
parasites aient été scientifiquement décrits.
e
e
Pour lutter contre la m o r v e , les hippiatres byzantins d u IV et
d u V siècles (Apsyrte, puis Végèce) r e c o m m a n d a i e n t
l'isolement d e s c h e v a u x atteints. Ces sages précautions furent
oubliées j u s q u ' e n 1 6 6 4 : Solleysel rappelle alors qu'il faut n o n
seulement séparer les c h e v a u x atteints, m a i s également les
e m p ê c h e r d e b o i r e dans le m ê m e seau. En 1784, u n arrêté d u
roi d e France oblige à isoler les animaux m a l a d e s (après
marquage) et à abattre c e u x reconnus incurables par les
experts. L'enfouissement d e s cadavres d e c h e v a u x m o r v e u x
fut préconisé par Végèce (lorsque les cavaliers Huns
envahirent l'Europe), m a i s n e fut à n o u v e a u r e c o m m a n d é
qu'au XVIII siècle. Au XIX siècle, la découverte d e la
malléine par Kalning (qui se contamina mortellement avec le
bacille qu'il cultivait) permit d e repérer et d'abattre plus
rapidement les animaux m a l a d e s .
e
e
e
La tuberculose animale n e fut c o n s i d é r é e c o m m e contagieuse
qu'au XIX siècle. L'isolement d e s m a l a d e s et leur abattage n e
e
Prophylaxie médicale
Aux p r e m i e r s siècles d e notre ère, les Romains (Cominelle,
Gratius Faliscus) r e c o m m a n d a i e n t d e prévenir l'apparition d e
la rage c h e z les petits chiens e n leur coupant la q u e u e o u e n
procédant à l'ablation d'un « petit ver situé sur la langue » ( e n
fait, le r a p h é lingual) ; cette dernière m é t h o d e fut e m p l o y é e
jusqu'au XVIII siècle. C'est à partir d e 1875 q u e les travaux
d e Galtier, puis d e Pasteur et ses collaborateurs, permirent
u n e vaccination préventive d e s animaux contre la rage. Cette
vaccination n e fut, cependant, a p p l i q u é e à grande échelle q u e
b e a u c o u p plus tard, car le vaccin s'étant avéré efficace après
contamination c h e z l ' h o m m e , la lutte contre la rage canine fut
u n m o m e n t délaissée.
e
L e premier vaccin d e la fièvre c h a r b o n n e u s e fut inventé par
Toussaint ( 1 8 8 0 ) et amélioré par Pasteur ( 1 8 8 1 ) . Les vaccins
contre la m o r v e , m i s au point e n 1 8 8 2 , n e furent
pratiquement jamais utilisés car leur e m p l o i contrariait la
prophylaxie sanitaire, b a s é e sur l'abattage d e s c h e v a u x
Rev. sci. tech. Off. int. Epiz., 19 (1)
20
réagissant à la malléine. Il e n fut d e m ê m e p o u r la tuberculose
b o v i n e : après essai d e plusieurs vaccins à bacilles vivants
atténués, dont le bacille Bilié d e Calmette et Guérin (BCG), la
vaccination fut a b a n d o n n é e e n Europe à partir d e s années
1950 au profit d e l'abattage d e s animaux réagissant à la
tuberculine. De m ê m e , les vaccins efficaces contre la
brucellose n'ont été commercialisés q u e tardivement, aussi
b i e n p o u r les bovins q u e p o u r les petits ruminants, car il fallait
éviter qu'il n'interfèrent avec la prophylaxie sanitaire b a s é e sur
la détection des anticorps spécifiques.
Les vaccins d e la peste humaine, d e la fièvre j a u n e et d e la
grippe n e furent découverts et d é v e l o p p é s qu'au XX siècle,
après l'isolement d e s agents responsables d e ces trois
maladies.
e
Conclusions
Au terme d e c e bref p a n o r a m a historique d e la surveillance et
d u contrôle d e s z o o n o s e s aux t e m p s passés, les quelques
conclusions suivantes semblent utiles à dégager.
L'étude clinique et é p i d é m i o l o g i q u e immédiate d e toute
maladie animale émergente et l'évaluation d e sa capacité à
affecter la santé publique, m ê m e si s o n caractère z o o n o s i q u e
n'est p a s avéré, sont essentielles au succès d e sa surveillance,
d e s o n contrôle et d e s o n éradication éventuelle. De tous
temps, ce succès a e n effet d é p e n d u d e la détermination d e la
contagiosité d e la maladie, d e ses m o d e s d e contagion
(directe, indirecte, vectorielle, alimentaire) et d e la d o s e
infectieuse requise ( d o s e létale 5 0 % ) . Si cette détermination
peut découler d e l'observation et d e l'expérimentation dans le
cas d e s maladies à transmission directe, elle est plus difficile
lorsqu'il existe d e s réservoirs des agents pathogènes e n cause
(sol, eaux, porteurs sains, espèces animales susceptibles, etc.),
o u e n cas d e cycle b i o l o g i q u e c o m p l e x e (notamment
parasitaire). Cela explique q u e d e résultats très positifs aient
p u être obtenus d è s l'Antiquité dans la lutte contre la m o r v e
o u la rage, mais pas contre la fièvre charbonneuse, la
tuberculose, la peste, la fièvre jaune o u les maladies
endoparasitaires. La m ê m e difficulté est rencontée,
aujourd'hui, avec des maladies dont le réservoir est e n c o r e
inconnu : maladie d e Marburg, infections par le virus Ébola,
par les paramyxovirus porcins o u m ê m e par le virus d e la
fièvre d e la Vallée d u Rift, par e x e m p l e .
La connaissance précise d e l'étiologie d'une z o o n o s e n'est pas
indispensable p o u r imaginer et appliquer des mesures d e lutte
efficaces, à la condition q u e le cycle b i o l o g i q u e ait été élucidé,
o u q u e le rôle des e s p è c e s animales vertébrées o u invertébrées
e n cause ait été démontré. Le simple contrôle d e s sources d u
contage (par isolement o u abattage d e s animaux m a l a d e s et
par destruction d e s cadavre et d e s matières virulentes) ainsi
q u e la réduction d e s facteurs d e risque (mauvaise hygiène,
mauvaise alimentation, surpopulation, habitat insalubre)
peuvent suffire à réduire l'impact d e la maladie, voire à
l'éradiquer. Toutefois, n o t a m m e n t dans le cas d e s maladies
vectorielles, l'application d e mesures d'hygiène générale peut
n'avoir aucun effet sur la taille d e la population d e vecteurs.
Tel fut le cas lors d e la c a m p a g n e d e lutte contre la fièvre
jaune, organisée à la Havane e n 1900, o ù l'usage d e larges
quantités d'eau afin d'assurer u n e propreté satisfaisante
contribua à accroître le n o m b r e d e gîtes favorables à la
reproduction d e s moustiques.
En cas d e maladies d'origine alimentaire, certains interdits o u
précautions concernant la c o n s o m m a t i o n d e produits
d'origine animale peuvent être très efficaces, aussi b i e n p o u r
l ' h o m m e q u e pour ranimai. C'est ainsi q u e , d è s le XIV siècle,
les bergers évitaient les pâtures marécageuses, o ù ils avaient
observé des limnées, p o u r protéger leurs m o u t o n s d e la d o u v e
d u foie ; e n revanche, l ' h o m m e continuait à manger d u
cresson couvert des larves parasitaires, c o m m e l'atteste
l'analyse des fosses d'aisance d e s châteaux d u XVII siècle (2).
e
e
Il a été également montré q u e l'existence d e d o n n é e s
expérimentales convaincantes, qui auraient p u conduire à la
définition d'une nouvelle stratégie d e lutte, n'a p a s toujours
été prise e n considération e n t e m p s voulu par les responsables
d e la santé h u m a i n e o u animale. Il pourrait b i e n e n être d e
m ê m e , d e n o s jours, malgré la vitesse à laquelle circule
l'information.
Toutes c e s leçons d u passé pourraient d o n c inspirer c e u x qui
sont aujourd'hui responsables d e la lutte contre les z o o n o s e s ,
avérées o u potentielles, qu'elles soient d u e s à d e n o u v e a u x
parasites, à d e nouveaux m i c r o b e s , o u à d e s agents n o n
conventionnels. Ces responsables doivent n o t a m m e n t se
convaincre q u e tout retard dans la reconnaissance d e d o n n é e s
scientifiques b i e n établies, puis dans leur application à la
prévention o u au traitement d'une z o o n o s e , peut entraîner la
perte impardonnable d'innombrables vies humaines.
21
Rev. sci. tech. Off. int. Epiz., 19 (1)
A brief historical overview of zoonoses
J. Blancou & F.-X. Meslin
Summary
By studying the surviving documents describing surveillance and methods of
control of zoonoses in the distant past, the history of the fight against these
diseases can be retraced. Prior to the 20th Century, the best known zoonoses
w e r e , amongst others, rabies, anthrax, glanders, tuberculosis, plague, yellow
fever, influenza, and certain zoonotic parasitic diseases.
An analysis of historical events yields a number of lessons as to the positive and
negative influences of past theories regarding the aetiology, contagiousness and
control of these diseases. These lessons serve as a reminder, to all those involved
in the fight against emerging zoonoses, of the urgent need for extensive research
on the aetiology and mode of transmission of these zoonoses, in addition to the
need for timely application of the findings of such research to disease control
activities.
Keywords
Aetiology - Anthrax - Control - History - Plague - Rabies - Tuberculosis - Yellow fever Zoonoses.
Breve repaso de la historia de las zoonosis
J. Blancou & F.-X. Meslin
Resumen
A partir de los pocos documentos que existen sobre las modalidades de vigilancia
y control de determinadas zoonosis aplicadas en épocas antiguas, es posible
reconstruir la historia de la lucha contra esas enfermedades. Antes del siglo XX,
las mejor conocidas eran sobre todo la rabia, el carbunco bacteridiano, el
muermo, la tuberculosis, la peste humana, la fiebre amarilla, la gripe y ciertas
zoonosis provocadas por parásitos.
El análisis de los hechos históricos brinda una serie de enseñanzas sobre la
influencia, positiva o negativa, que ejercieron las ideas de tos autores antiguos
acerca de la etiología, la contagiosidad o la profilaxis de esas enfermedades.
Dichas enseñanzas vienen a recordar a los actuales responsables de la lucha
contra las zoonosis emergentes la imperiosa necesidad de investigar a f o n d o la
etiología y el modo de transmisión de esas enfermedades, y ta importancia de
aplicar inmediatamente a su profilaxis el resultado de esas investigaciones.
Palabras clave
Carbunco bacteridiano - Etiología - Fiebre amarilla - Historia - Peste - Profilaxis - Rabia
- Tuberculosis - Zoonosis.
Rev. sci. tech. Off. int. Epiz., 19 (1)
22
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