cour administrative d`appel de Versailles no 10VE03663 du 14/06

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cour administrative d`appel de Versailles no 10VE03663 du 14/06
COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL
DE VERSAILLES
N° 10VE03663
M. Ismaila FAYE
Mme de Boisdeffre
Président
Mme Vinot
Rapporteur
Mme Courault
Rapporteur public
La Cour administrative d'appel de Versailles
5ème Chambre
Audience du 22 mai 2012
Lecture du14juin 2012
Code PCJA : 335-01-03
Code Lebon : C +
Vu la requête, enregistrée le 19 novembre 2010 au greffe de la Cour administrative
d'appel de Versailles, présentée pour M.IsmailaFAYE,demeurant chez M.HinaKonte,21,rue
GeorgesThorettonàGennevilliers(92230),par MeBesse; M.FAYEdemande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1001726 du 14 octobre 2010 par lequel le Tribunal
administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du
2 février 2010 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a refusé de lui délivrer un titre de séjour,
l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination d'une mesure de renvoi ;
2°) d'annuler l'arrêté du 2 février 2010 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de lui délivrer une carte de séjour
temporaire, mention « salarié », dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à
intervenir ou, à défaut, de réexaminer sa situation, sous astreinte de150euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1500euros en application de l'article
L.761-1du code de justice administrative ;
Le requérant soutient que le refus de délivrance d'un titre de séjour est entaché d'erreur
de droit car le préfet des Hauts-de-Seine, qui a demandé au premier juge d'opérer une
substitution de base légale, s'est fondé sur l'article 2 de l'avenant à l'accord franco-sénégalais
alors que l'article 3 de cet avenant trouvait à s'appliquer ; qu'il a droit à la délivrance d'un titre
de séjour salarié, aussi bien sur le fondement de l'alinéa 2 de l'article 42 de l'accord francosénégalais du 23 septembre 2006 modifié par l'article 3 de l'avenant à cet accord, que sur celui
de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la
décision l'obligeant à quitter le territoire méconnaît les stipulations de l'article 8 de la
convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que
l'arrêté est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés
fondamentales :
Vu le décret n° 2009-1073 du 26 août 2009 portant publication de l'accord francosénégalais du 23 septembre 2006 relatif à la gestion concertée des flux migratoires entre la
France et le Sénégal et de l'avenant à cet accord signé le 25 février 2008 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22mai2012:
- le rapport de MmeVinot,président assesseur,
- et les conclusions de MmeCourault,rapporteurpublic;
Considérant que M.FAYE,ressortissant sénégalais né le12janvier 1972, a été titulaire
d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade valable du 30 septembre 2005 au 7 avril 2008 ;
que, le 29 décembre 2009, il a demandé son admission exceptionnelle au séjour en qualité de
salarié en se prévalant des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des
étrangers et du droit d'asile et en produisant un contrat de travail pour un poste d'agent de
propreté ; que, par l'arrêté litigieux du 2 février 2010, le préfet des Hauts-de-Seine a rejeté sa
demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de
destination d'une mesure de renvoi; que M. FAYE relève régulièrement appel du jugement en
date du 14 octobre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa
demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 février 2010 ;
En ce qui concerne les conclusions à fins d'annulation, sur le moyen tiré de l'erreur de
droit et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens :
Considérant que, pour rejeter la demande d'admission exceptionnelle au séjour en
qualité de salarié présentée par M.FAYE,le préfet des Hauts-de-Seine a estimé que le requérant
ne satisfaisait pas à la condition, à laquelle l'articleL.313-14du code de l'entrée et du séjour des
étrangers et du droit d'asile subordonne la délivrance à titre exceptionnel d'un titre de séjour
portant la mention «salarié», de justifier de considérations humanitaires ou de motifs
exceptionnels ;
Considérant, cependant, que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des
étrangers et du droit d'asile relatives aux titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers
et aux conditions de délivrance de ces titres s'appliquent, ainsi que le rappelle l'article L. 111-2
du même code, « sous réserve des conventions internationales » ; qu'aux termes du paragraphe
42 de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006 modifié par l'article 3 de l'avenant du 25
février 2008, entré en vigueur le1eraoût 2009 : « (...) Un ressortissant sénégalais en situation
irrégulière en France peut bénéficier, en application de la législation française, d'une admission
exceptionnelle au séjour se traduisant par la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant :
soit la mention « salarié » s'il exerce l'un des métiers mentionnés dans la listefiguranten annexe
IV de l'Accord et dispose d'une proposition de contrat de travail. / Soit la mention « vie privée et
familiale » s'il justifie de motifs humanitaires ou exceptionnels » ; que les dispositions précitées
du paragraphe 42 de l'accord franco-sénégalais modifié, qui prévoient les conditions de
l'admission exceptionnelle au séjour, en qualité de salarié, des ressortissants sénégalais, font dès
lors obstacle à l'application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du
séjour des étrangers et du droit d'asile relatives à la délivrance de la carte de séjour temporaire
autorisant l'exercice d'une activité professionnelle mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le
fondement du troisième alinéa de cet article, qui ont le même objet ;
Considérant qu'il ressort des stipulations précitées du paragraphe 42 de l'accord que
l'admission au séjour en qualité de salarié d'un ressortissant sénégalais en situation irrégulière
n'est pas subordonnée à l'existence de « motifs exceptionnels ou humanitaires » du demandeur ;
que, par suite, l'arrêté litigieux, par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a rejeté la demande
d'admission au séjour en qualité de salarié présentée par M.FAYEau seul motif que ce dernier
ne justifiait pas de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels, est entaché d'erreur
de droit ; que le préfet des Hauts-de-Seine, s'il a présenté au Tribunal administratif de CergyPontoise une demande de substitution de base légale en fondant le refus de délivrance d'un titre
de séjour sur le paragraphe 321 de l'accord franco-sénégalais modifié, n'a pas présenté de
demande tendant à ce que le paragraphe 42 de l'accord franco-sénégalais modifié soit substitué à
l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et n'a pas
examiné la demande de M. FAYE sur le fondement dudit paragraphe 42 ; qu'il suit de là que
M.FAYEest fondé à demander l'annulation de l'arrêté litigieux ;
En ce qui concerne les conclusions à fins d'injonction :
Considérant qu'aux termes de l'article L.911-1 du code de justice administrative:
« Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un
organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution
dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même
décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. » :
Considérant qu'eu égard au motif de l'annulation prononcée par la Cour, le présent arrêt
implique seulement que le préfet des Hauts-de-Seine réexamine la demande d'admission
exceptionnelle au séjour en qualité de salarié présentée par M.FAYE; qu'il y a lieu d'enjoindre
au préfet des Hauts-de-Seine de procéder à un tel réexamen dans un délai de deux mois à
compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette injonction d'une
astreinte ;
En ce qui concerne l'application de l'article L. 761-1 du code dejusticeadministrative :
Considérant qu'en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il
y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par
M.FAYEet non compris dans les dépens ;
DECIDE:
Article 1er : Le jugement du 14 octobre 2010 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise et
l'arrêté du 2 février 2010 du préfet des Hauts-de-Seine sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet des Hauts-de-Seine de réexaminer la demande d'admission
exceptionnelle au séjour en qualité de salarié présentée par M. FAYE, dans un délai de deux
mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M.FAYEune somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du
code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M.FAYEest rejeté.

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