Communes - Gestion et Finances Publiques
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Communes - Gestion et Finances Publiques
Communes Commune - Police municipale - Tranquillité publique - Liberté du commerce et de l’industrie - Référéliberté CE, ordonnance du 8 juin 2005, Commune de Houilles, req. nº 281084 (décision mentionnée aux Tables du Recueil Lebon) [extraits] Considérant qu’en vertu de l’article L. 521-2 du Code de justice administrative, « le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens justifiée par l’urgence peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale à laquelle une autorité administrative aurait porté, dans l’exercice d’un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale » ; Considérant qu’il résulte de l’instruction que, par arrêté du 13 avril 2005, le maire de Houilles a, sur le fondement de ses pouvoirs de police générale, pris une mesure qui doit s’analyser comme une interdiction d’ouverture par la société Cassandre d’un sex shop, au motif que l’établissement projeté portait atteinte à la tranquillité de la population et se trouvait situé à proximité d’équipements destinés à la jeunesse ; Considérant que l’article 99 de la loi du 30 juillet 1987 modifiée interdit l’installation à moins de cent mètres d’un établissement d’enseignement maternel, primaire ou secondaire, d’un établissement dont l’activité principale est la mise en vente ou à la disposition du public de publications dont la vente aux mineurs de dix-huit ans est prohibée ; que l’article 227-24 du Code pénal réprime par ailleurs le fait de permettre à un mineur de voir un message de caractère pornographique et interdit en conséquence la présentation en vitrines ouvrant sur l’extérieur d’articles présentant un tel caractère susceptibles d’être vus par un mineur ; Considérant qu’indépendamment de ces dispositions législatives, il appartient au maire, chargé de la police municipale en vertu de l’article L. 2212-1 du Code général des collectivités territoriales, de prendre à ce titre, conformément à l’article L. 2212-2 de ce code, les mesures permettant d’assurer dans la commune le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques ; que le maire peut faire usage des pouvoirs de police générale dont il dispose à l’égard d’un établissement qui, sans tomber sous le coup ni de l’interdiction édictée par la loi du 30 juillet 1987 ni de l’incrimination prévue par l’article 227-24 du Code pénal, présenterait, en raison des circonstances locales, des dangers particuliers pour la jeunesse ou pour la tranquillité de la population ; Considérant qu’en l’espèce la décision d’interdiction du maire de Houilles est fondée sur des motifs tirés d’une part de la tranquillité de la population, d’autre part de la présence à proximité du commerce litigieux d’établissements scolaires et d’équipements destinés à la jeunesse ; Considérant, sur le premier point, qu’il appartient au juge des référés de se placer, pour apprécier l’existence d’une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale, à la date à laquelle il se prononce ; qu’à cet égard, si l’ouverture, à la suite de la décision du juge des référés du tribunal administratif, du sex shop n’a pas entraîné de troubles particuliers, il résulte de l’instruction que la population du quartier d’habitation de caractère pavillonnaire où se situe le projet de la société Cassandre a témoigné d’une hostilité à ce projet qui s’est traduite par une pétition signée, à la date de l’audience publique, par 1 600 personnes ; Considérant, sur le deuxième point, qu’il résulte de l’instruction, et qu’il a été confirmé au cours de l’audience publique, qu’une école maternelle et une école primaire sont situées certes à plus de cent mètres mais tout de même non loin du commerce litigieux ; que, surtout, la commune aménage à proximité de ce commerce un pôle jeunesse, destiné à abriter des services d’animation, d’information et de loisirs à l’intention des jeunes ; que les travaux de réalisation de cet équipement public doivent s’achever dans les prochains mois ; Considérant qu’eu égard à l’ensemble de ces éléments, et même s’il n’est pas contesté que le projet de la société Cassandre ne tombe sous le coup ni de l’interdiction édictée par la loi du 30 juillet 1987 ni de l’incrimination prévue par l’article 227-24 du Code pénal, la mesure prise par le maire de Houilles, qui repose sur des motifs qui sont au nombre de ceux que les autorités chargées de la police municipale peuvent légalement retenir, apparaît fondée sur des éléments d’appréciation tirés de la tranquillité de la population et de la protection de la jeunesse qui ne font pas apparaître d’atteinte manifestement illégale à la liberté fondamentale que constitue la liberté du commerce et de l’industrie ; que la commune de Houilles est, dès lors, fondée à soutenir que c’est à tort que, par l’ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Versailles a estimé réunies les conditions auxquelles l’article L. 521-2 du Code de justice administrative subordonne la mise en œuvre des pouvoirs qu’il confère au juge des référés ; (...) Note La décision Commune de Houilles du 8 juin 2005, qui sera mentionnée aux Tables du Recueil Lebon, est particulièrement intéressante dans la mesure où non seulement elle contribue à fixer l’interprétation à donner aux dispositions de l’article L. 521-2 du Code de justice administrative (CJA) relatif au référé-liberté mais aussi où elle traite de la conciliation entre la défense d’une liberté fondamentale, en l’espèce la liberté du commerce et de l’industrie, et les nécessités de la tranquillité publique. 152 Jean-Luc PISSALOUX Maître de conférences à l’Université du Littoral - Côte d’Opale Il convient tout d’abord de rappeler brièvement les faits de l’espèce. Par un arrêté du 13 avril 2005, le maire de la commune de Houilles a, sur le fondement de ses pouvoirs de police générale, pris une mesure s’analysant comme une interdiction d’ouverture par la société Cassandre d’un sex shop, au motif que l’établissement projeté portait atteinte à la tranquillité de la population et se trouvait situé à proximité d’équipements destinés à la jeunesse. La société Cassandre a alors saisi, en application de l’article L. 521-2 du CJA, le juge des référés du tribunal administratif de Versailles : celuici, par une ordonnance du 12 mai 2005, a fait droit à la requête de ladite société tendant à ce qu’il soit enjoint au maire de Houilles de suspendre l’exécution de son arrêté du 13 avril 2005. C’est cette ordonnance que le juge des référés du Conseil d’Etat, statuant avec une remarquable rapidité il convient de la souligner, casse avec sa décision du 8 juin 2005. Cette décision permet de préciser une nouvelle fois les conditions de mise en œuvre du référé-liberté (illustrée par d’importantes décisions survenues récemment ; cf. notamment : CE, ordonnance du 28 février 2003, Commune de Pertuis, req. nº 254411, publié au Recueil Lebon ; AJDA 2003, p. 1171, note P. Cassia et A. Béal ; -, 9 avril 2004, M. Vast c/ Commune de Drancy, req. nº 263759, publié au Recueil Lebon ; Gazette du Palais, nº 11, 12 janvier 2005, note J.-L. Pissaloux et D. Linotte) au regard des nécessités de l’ordre public : plus précisément en l’espèce, étaient en jeu, d’une part, la défense d’une liberté expressément qualifiée de liberté fondamentale dans l’arrêt, à savoir la liberté du commerce et de l’industrie, et, d’autre part, les pouvoirs de police administrative générale du maire agissant au titre de la police de la tranquillité publique. Quels étaient les arguments en présence ? D’un côté, la société Cassandre soutenait que l’arrêté municipal du 13 avril 2005 portait une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté du commerce et de l’industrie et que la condition d’urgence était bien remplie ; elle soulignait en effet qu’elle avait réalisé des travaux d’aménagement importants, qu’elle 86e année - nº 2 - février 2006 chronique administrative avait signé un bail commercial l’engageant à payer à son bailleur un loyer pour une durée minimale de trois ans et que l’arrêté litigieux faisait obstacle à l’exercice de l’activité dont elle tirait ses revenus ; elle soulignait encore qu’aucun impératif d’ordre public ne commandait l’interdiction de son activité, et qu’aucune circonstance locale particulière ne justifiait selon elle la décision contestée ; elle faisait observer que les pétitions invoquées par la commune pour justifier de l’opposition de la population locale étaient postérieures à l’intervention de l’arrêté, que la décision du maire ne pouvait pas non plus être prise sur le fondement des dispositions de l’article 99 de la loi du 30 juillet 1987 (le magasin n’est pas situé dans un secteur particulièrement fréquenté par des mineurs) ou de l’article 227-24 du Code pénal, et que dès lors, elle était dépourvue de base légale. De l’autre, la commune mettait en avant plusieurs points : en premier lieu, l’existence d’une école maternelle et d’une école primaire situées non loin du commerce en question ; en deuxième lieu, à proximité de celui-ci, l’aménagement en cours mais très avancé d’un « pôle jeunesse » destiné à abriter des services d’animation, d’information et de loisirs à l’intention des jeunes ; et enfin, en troisième et dernier lieu, l’hostilité de la population à l’égard de l’implantation de la boutique, hostilité concrétisée par une pétition signée à la date de l’audience publique par 1 600 personnes. En l’espèce, le problème était en somme de savoir si, indépendamment des dispositions législatives particulières constituées par l’article 99 de la loi du 30 juillet 1987 modifiée et l’article 227-24 du Code pénal, le maire de la commune avait, dans l’exercice de ses pouvoirs de police administrative générale, pris une mesure d’interdiction grossièrement illégale susceptible de justifier la mise en œuvre des dispositions de l’article L. 521-2 du CJA relatif au référé-liberté. Rappelons les principales dispositions de l’article L. 521-2 du CJA : « Saisi d’une demande en ce sens justifiée par l’urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public (...) aurait porté, dans l’exercice de l’un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale (...) ». La mise en œuvre du référé-liberté requiert donc la réunion des conditions cumulatives suivantes : il faut une atteinte à une liberté fondamentale ; il faut que cette atteinte soit grave et manifestement illégale ; et il faut enfin que la demande soit justifiée par l’urgence, laquelle peut résulter de circonstances particulières (cf. jurisprudence Commune de Pertuis précitée) et semble être d’une signification différente de celle exigée pour que soit prononcée une suspension au titre de l’article L. 521-1 du CJA (cf. même jurisprudence). En l’espèce, il apparaît qu’en raison des circonstances locales particulières ci-dessus rapportées, lesquelles doivent s’apprécier à la date à laquelle le juge des référés se prononce (apport de la décision, d’où prise en compte de la pétition postérieure à l’arrêté attaqué), « la mesure prise par le maire de Houilles, qui repose sur des motifs qui sont au nombre de ceux que les autorités chargées de la police municipale peuvent légalement retenir, apparaît fondée sur des éléments d’appréciation tirés de la tranquillité de la population et de la protection de la jeunesse qui ne font pas apparaître d’atteinte manifestement illégale à la liberté fondamentale que constitue la liberté du commerce et de l’industrie » : dès lors, l’ordonnance de suspension du premier juge des référés n’était pas justifiée, et est en conséquence annulée. Dans cette affaire, le juge des référés du Conseil d’Etat a fait en quelque sorte, au vu des circonstances locales appréciées à la date de la décision, la balance entre les nécessités de l’ordre public et de la tranquillité publique et l’objectif de protection de la jeunesse d’une part, et la défense d’une liberté fondamentale, à savoir la liberté du commerce et de l’industrie, d’autre part, pour estimer qu’en l’espèce, il n’y avait pas d’atteinte grave et manifestement illégale à cette liberté : de ce point de vue, cette décision apparaît dans le prolongement de la jurisprudence bien connue Société Les films Lutetia (CE, Sect., 18 décembre 1959, Rec. p. 693 ; AJDA 1960, p. 21, chr. Combarnous et Galabert ; S. 1960, p. 94, concL. Mayras). Commune - Expropriation d’utilité publique CE, 22 juin 2005, Association Clermont-Ferrand, Transport en commun et Emploi de l’agglomération, req. nos 264294, 264771 et 274798 (décision mentionnée aux Tables du Recueil Lebon) [extraits] Considérant que, sous le nº 264294, l’Association Clermond-Ferrand, Transport en commun, M. YX et la société Centre Spécialités pharmaceutiques demandent l’annulation du décret du 4 décembre 2003 déclarant d’utilité publique les acquisitions et travaux nécessaires à la réalisation par le syndicat mixte des transports en commun de l’agglomération clermontoise de la première ligne de tramway de l’agglomération clermontoise ; que, sous le nº 264771, la SA Transpal Auvergne, la Confédération générale des petites et moyennes entreprises du Puy-de-Dôme, l’Association Clermont-Ferrand, Transport en commun, demandent l’annulation de la délibération en date du 19 décembre 2003 par laquelle le syndicat mixte des transports en commun de l’agglomération clermontoise a décidé, dans le cadre de la réalisation du projet de création de la première ligne de tramway, de porter de 1,6 à 1,7 % à compter du 1er mars 2004 le taux du versement destiné au financement des transports en commun, dit versement transport ; que, sous le nº 274798, M. et Mme Y, M. BY et Mme Y demandent l’annulation de l’arrêté du 3 septembre 2004 par lequel le préfet du Puy-de-Dôme a déclaré cessibles les immeubles nécessaires à la réalisation de la première ligne de tramway de l’agglomération clermontoise ; que ces dossiers présentent à juger des questions semblables ; qu’il y a lieu, de les joindre et de statuer par une même décision sur l’ensemble des décisions attaquées ; 153 En ce qui concerne les conclusions tendant à l’annulation du décret du 4 décembre 2003 portant déclaration d’utilité publique du projet : Sur les interventions : Considérant que Mmes Y et Y, MM. Y, CY, MM. et Mmes ZY et BY ont intérêt à demander l’annulation du décret du 4 décembre 2004 déclarant d’utilité publique les acquisitions et travaux nécessaires à la réalisation par le syndicat mixte des transports en commun de la première ligne de tramway de l’agglomération clermontoise en application duquel a été pris l’arrêté du 4 août 2004 prononçant la cessibilité des terrains nécessaires à la réalisation de la ligne de tramway dont ils demandent par ailleurs l’annulation ; que leur intervention dans l’affaire nº 264294 est par suite recevable ; Sans qu’il soit besoin de statuer sur la recevabilité des requêtes : Sur la légalité externe du décret attaqué : Sur le moyen tiré de l’irrégularité de l’enquête publique : Considérant qu’aux termes de l’article 11-8 du Code de l’expropriation pour cause d’utilité publique : « (...) les observations sur l’utilité publique de l’opération peuvent être consignées par les intéressés directement sur les registres d’enquête. Elles peuvent également être adressées par écrit, au lieu fixé par le préfet pour l’ouverture de l’enquête, au commissaire-enquêteur ou au président de la commission d’enquête, lequel les annexe au registre mentionné à l’article précité » ; qu’il ressort des pièces du dossier que les observations adressées le 17 juin 2002 à la commission par M. YX ont été enregistrées et annexées aux registres ouverts par les commissaires-enquêteurs ; qu’aucune disposition ne fait obligation d’annexer ces observations au rapport de la commission d’enquête ; Sur les moyens tirés de l’insuffisance du dossier soumis à l’enquête publique : En ce qui concerne l’étude d’impact : Considérant qu’aux termes de l’article 2 du décret du 12 octobre 1977 pris en application de l’article L. 122-1 du Code de l’environnement : « (...) L’étude d’impact présente successivement : (...) 2º Une analyse des effets directs et indirects, temporaires et permanents sur l’environnement (...) et le cas échéant sur la commodité du voisinage (...) ou sur l’hygiène, la santé, la sécurité et la salubrité publique ; (...) 6º Pour les infrastructures de transport, l’étude d’impact comprend en outre une analyse des coûts collectifs des pollutions et nuisances et des avantages induits pour la collectivité ainsi qu’une évaluation des consommations énergétiques résultant de l’exploitation du projet, notamment du fait des déplacements qu’elle entraîne ou permet d’éviter ; que le document soumis à l’enquête publique contient en particulier dans sa partie intitulée impacts directs et indirects permanents et temporaires l’ensemble des analyses qui en vertu du 2º de l’article 2 du décret du 12 octobre 1977 doivent obligatoirement figurer dans l’étude d’impact au titre des effets temporaires et permanents sur l’environnement urbain et la santé publique ; qu’il comporte en outre les données prévues au 6º de cet article en matière d’analyse des coûts de pollution ainsi que l’évaluation des consommations énergétiques résultant de l’exploitation du nouvel équipement ; qu’il analyse 86e année - nº 2 - février 2006 chronique administrative en particulier avec une précision suffisante compte tenu du caractère prévisionnel des données en cause l’incidence de la mise en exploitation du tramway sur les autres modes de transport et sur la circulation générale ; En ce qui concerne les éléments du dossier relatifs au coût du projet : Considérant qu’aux termes de l’article L. 11-2 du Code de l’expropriation pour cause d’utilité publique : « L’expropriant adresse au préfet pour être soumis à l’enquête un dossier qui comprend obligatoirement : I.- Lorsque la déclaration d’utilité publique est demandée en vue de la réalisation de travaux ou d’ouvrages : 5º L’appréciation sommaire des dépenses (...) 7º L’évaluation mentionnée à l’article 4 du décret nº 84-617 du 17 juillet 1984 pris pour l’application de l’article 14 de la loi nº 82-1153 du 30 décembre 1982 d’orientation des transports intérieurs, lorsque les travaux constituent un grand projet d’infrastructures (...) » ; que selon l’article 4 du décret du 17 juillet 1984 : « L’évaluation des grands projets d’infrastructure comporte : 1º Une analyse des conditions et des coûts de construction, d’entretien, d’exploitation et de renouvellement de l’infrastructure projetée ; 2º Une analyse des conditions de financement et, à chaque fois que cela est possible, une estimation du taux de rentabilité financière » ; qu’il résulte de la combinaison de ces dispositions que le dossier d’enquête publique relatif à un grand projet d’infrastructures comporte deux analyses financières, l’appréciation sommaire des dépenses d’une part et l’évaluation économique et sociale d’autre part, dont les finalités et les méthodes de chiffrage sont distinctes ; Considérant en premier lieu qu’il n’est pas contesté que le coût global de la réalisation initiale du projet, estimé à 257 millions d’euros lors de l’enquête publique menée du 10 juin au 12 juillet 2002, figure dans le dossier soumis à l’enquête publique dans la partie intitulée appréciation sommaire des dépenses ; que si, selon des données portées ultérieurement à la connaissance des requérants ce coût s’établissait à la date de la déclaration d’utilité publique à 290 millions d’euros, cette évolution de 13 % ne révèle pas une sous-évaluation manifeste qui entacherait la régularité de l’enquête publique ; Considérant, en second lieu, que l’évaluation économique et sociale figurant à la page 266 du dossier d’enquête compare les coûts et recettes annuels d’exploitation de l’ensemble du réseau de transports publics, selon qu’il inclut ou non le tramway projeté ; qu’il en ressort d’une part que les coûts d’exploitation respectifs de la ligne de tramway et du réseau d’autobus si cette ligne est réalisée seront de 41,1 millions de francs (soit 6,27 millions d’euros) et de 159 millions de francs (soit 24,2 millions d’euros), soit un coût d’exploitation total de 200,1 millions de francs (soit 30,51 millions d’euros) qui, rapproché de recettes d’exploitation de 105 millions de francs (soit 16 millions d’euros), implique un déficit d’exploitation annuel de 95,1 millions de francs (soit 14,5 millions d’euros), et d’autre part que, en l’absence de tramway, le coût et les recettes d’exploitation du seul réseau d’autobus s’élèveraient respectivement à 167 millions de francs (25,46 millions d’euros) et 72 millions de francs (soit 10,98 millions d’euros), laissant donc inchangé le déficit d’exploitation de 95 millions de francs (soit 14,48 millions d’euros), pour des charges d’exploitation inférieures de 32,8 millions de francs (soit 5 millions d’euros) ; que si ne figure pas dans ce chiffrage une estimation distincte des coûts de renouvellement de l’infrastructure, cette circonstance ne l’entache pas d’insuffisance, dès lors qu’il est indiqué au paragraphe 3 de la page 265 du même document que les durées respectives de vie des infrastructures, du matériel roulant et des équipements retenues pour évaluer le coût de leur renouvellement, inclus dans les calculs, sont respectivement de 50, 30 et 15 ans et que le coût correspondant contenu dans l’estimation des coûts annuels d’exploitation peut se déduire de ces informations ; qu’il suit de là que doit être écarté le moyen tiré de la méconnaissance de l’article 4 du décret du 17 juillet 1984 ; En ce qui concerne les autres indications du dossier d’enquête publique : Considérant, en premier lieu, que l’indication que le matériel roulant retenu pour le projet de transport en cause n’a pas encore été exploité sur un réseau urbain n’est pas une mention obligatoire du dossier d’enquête ; que le défaut de cette mention n’entache donc pas la régularité de l’enquête publique ; Considérant, en deuxième lieu, que s’il ressort des pièces du dossier que le projet déclaré d’utilité publique n’était plus, à la date du décret attaqué, assuré de bénéficier de la subvention de l’Etat de l’ordre de 24 % du coût total d’opération que mentionnait l’appréciation sommaire des dépenses figurant dans le dossier d’enquête, cet élément nouveau relatif au financement, eu égard notamment aux possibilités de recours à l’emprunt et de hausse du versement de transport, n’impliquait pas en l’espèce une modification substantielle des conditions d’exploitation de l’ouvrage ni de l’économie générale du projet, dont le coût global n’était pas sensiblement accru et dont les caractéristiques physiques demeuraient inchangées, et ne rendait donc pas nécessaire de procéder à une nouvelle enquête avant la déclaration d’utilité publique ; qu’ainsi, cette circonstance n’est pas de nature à entacher d’irrégularité la procédure suivie ; Sur la légalité interne du décret : En ce qui concerne la compatibilité avec le plan de déplacement urbain de la ville de Clermont-Ferrand : Considérant que le moyen tiré de ce que la déclaration d’utilité publique attaquée serait incompatible avec le plan local de déplacements urbains manque en tout état de cause en fait ; En ce qui concerne l’utilité publique du projet : Considérant qu’une opération ne peut être légalement déclarée d’utilité publique que si les atteintes à la propriété privée, le coût financier et, éventuellement les inconvénients d’ordre social ou l’atteinte à d’autres intérêts publics qu’elle comporte ne sont pas excessifs eu égard à l’intérêt qu’elle présente ; 154 Considérant que la création de la première ligne de tramway de Clermont-Ferrand a pour objet d’améliorer sensiblement la desserte et la sécurité dans cette agglomération de 260 000 habitants, tout en diminuant les nuisances sonores ; que ni les atteintes alléguées à la propriété et au cadre de vie des riverains ou à la fluidité de la circulation des véhicules particuliers et de services publics, ni le coût du projet, s’élevant à 290 millions d’euros y compris les travaux de reconfiguration du domaine public rendus nécessaires par le projet, ne sont excessifs au regard des avantages attendus de l’opération ; que celle-ci n’est donc pas dépourvue d’utilité publique ; En ce qui concerne le tracé retenu : Considérant que si les requérants soutiennent que d’autres tracés auraient offert des avantages supérieurs à ceux du tracé retenu par le décret attaqué, au prix d’inconvénients moindres et qu’ainsi aurait été commise une erreur manifeste d’appréciation, il n’appartient pas au Conseil d’Etat, statuant au contentieux, d’apprécier l’opportunité du tracé retenu ; Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l’annulation du décret attaqué ; Sur les conclusions tendant à l’annulation de l’arrêté de cessibilité : Considérant que les requérants demandent l’annulation de l’arrêté du 3 septembre 2004 par lequel le préfet du Puy-de-Dôme a déclaré cessibles les immeubles nécessaires à la réalisation de la première ligne de tramway de l’agglomération clermontoise par suite de l’illégalité dont se trouve selon eux affecté le décret du 4 décembre 2003 déclarant d’utilité publique le projet de construction de cette infrastructure de transport ; qu’ils reprennent à l’appui de leur argumentation les mêmes moyens que ceux qui viennent d’être écartés ; que par suite leurs conclusions dirigées contre l’arrêté mentionné ci-dessus ne peuvent qu’être rejetées ; Sur les conclusions tendant à l’annulation de la délibération du syndicat mixte relevant le taux du versement transport : Considérant que la SA Centre Spécialités pharmaceutiques tient de sa qualité de contribuable local un intérêt à l’annulation de la décision attaquée ; que son intervention dans l’affaire nº 274798 est, par suite, recevable ; Considérant, en premier lieu, que la délibération attaquée en date du 19 décembre 2003 du comité syndical du syndicat mixte de transports en commun de l’agglomération clermontoise comporte le nombre des personnes ayant délibéré ; qu’aucune disposition de ses statuts n’obligeait ledit comité à mentionner dans sa délibération son effectif théorique ; qu’ainsi, le moyen tiré de ce que les mentions de cette décision ne feraient pas la preuve de la régularité de la composition de l’instance qui l’a rendue, doit être écarté ; qu’il n’est pas allégué que les conditions statutaires de quorum n’auraient pas été remplies ; Considérant, en deuxième lieu, que si aux termes de l’article L. 2333-67 du Code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction applicable à la date de la délibération attaquée, l’augmentation du 86e année - nº 2 - février 2006 chronique administrative versement transport au-delà du taux de 1 % n’est possible qu’à la condition que l’Etat ait notifié un engagement de principe sur le subventionnement de l’investissement correspondant, il ressort des pièces du dossier que cet engagement de principe a bien été pris par l’Etat sous la forme d’une lettre du 15 mai 2002 du préfet du Puy-deDôme annonçant l’éligibilité du projet au régime des aides de l’Etat aux transports collectifs urbains de province ; que si ce régime d’aide a été ultérieurement supprimé par la loi de finances pour 2004, ainsi d’ailleurs que la condition correspondante pour le relèvement du versement transport, l’engagement de l’Etat sur la subvention à apporter au projet était constitué à la date de la délibération attaquée ; Considérant, en troisième lieu, que le moyen tiré d’une violation de la règle d’affectation du versement transport des employeurs édictée par l’article L. 2333-68 du Code général des collectivités territoriales ne peut être utilement invoqué qu’à l’encontre d’une délibération budgétaire portant utilisation de cette recette et non de la fixation du taux local de cette contribution, dont la légalité n’est soumise qu’à la condition d’adoption d’un projet d’infrastructure de transport conformément à l’article L. 2333-67 cité plus haut ; Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l’annulation de la délibération attaquée ; (...) Contentieux Contrôle de légalité - Délai de recours - Loi du 12 avril 2000 (art. 18 à 20) - Inapplicabilité des articles 18 à 20 de la loi du 12 avril 2000 aux déférés préfectoraux CE, 1er juillet 2005, Ville de Nice, req. nº 258509 (décision publiée au Recueil Lebon) [extraits] Considérant qu’aux termes de l’article 18 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations : « Sont considérées comme des demandes au sens du présent chapitre les demandes et les réclamations, y compris les recours gracieux ou hiérarchiques, adressés aux autorités administratives. » ; qu’aux termes de l’article 19 de la même loi : « Toute demande adressée à une autorité administrative fait l’objet d’un accusé de réception délivré dans des conditions définies par décret en Conseil d’Etat. (...) Les délais de recours ne sont pas opposables à l’auteur d’une demande lorsque l’accusé ne réception ne lui a pas été transmis ou ne comporte pas les indications prévues par le décret mentionné au premier alinéa. » ; qu’aux termes de l’article 20 de la même loi : « Lorsqu’une demande est adressée à une autorité administrative incompétente, cette dernière la transmet à l’autorité administrative compétente et en avise l’intéressé (...) » ; Considérant que le législateur, qui a eu pour objectif d’améliorer et d’accélérer le traitement des demandes adressées par les usagers des administrations, n’a pas entendu régir par ces dispositions les relations entre les représentants de l’Etat dans les départements et les régions et les collectivités territoriales dans le cadre du contrôle de légalité ; qu’il en résulte que ces dispositions ne sont pas applicables aux demandes adressées par le représentant de l’Etat aux collectivités territoriales dans ce cadre ; Considérant qu’il suit de là qu’en jugeant que le préfet des Alpes-Maritimes était recevable à demander au tribunal administratif de Nice, par un déféré en date du 1er juillet 2002, l’annulation de la délibération du conseil municipal de Nice en date du 20 décembre 2001 et de l’avenant nº 20 à la convention de concession des 11 et 24 juillet 1952 modifiée signé le 24 décembre 2001, au motif qu’aucun délai de recours contentieux ne lui était opposable faute pour la ville de Nice, destinataire du recours administratif qu’il avait formé le 22 février 2002 à l’encontre de cette délibération, de lui avoir adressé l’accusé de réception prévu à l’article 19 de la loi du 12 avril 2000, et que le préfet était, dès lors, recevable à demander la suspension de ces actes, alors que les dispositions de cet article n’étaient pas applicables à cette demande du préfet des Alpes-Maritimes à la ville de Nice dans le cadre du contrôle de légalité, la cour administrative d’appel de Marseille a entaché son arrêt d’une erreur de droit ; que, par suite, la ville de Nice est fondée à demandé qu’il soit annulé pour ce motif ; Considérant qu’aux termes de l’article L. 821-2 du Code de justice administrative, le Conseil d’Etat, s’il prononce l’annulation d’une décision d’une juridiction administrative statuant en dernier ressort peut « régler l’affaire au fond si l’intérêt d’une bonne administration de la justice le justifie » ; que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de régler l’affaire au titre de la procédure de référé engagée ; (...) Considérant qu’aux termes du troisième alinéa de l’article L. 2131-6 du Code général des collectivités territoriales : « Le représentant de l’Etat peut assortir son recours d’une demande de suspension. Il est fait droit à cette demande si l’un des moyens invoqués paraît, en l’état de l’instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de l’acte attaqué. (...) » ; Considérant que, ainsi qu’il a été dit, les dispositions de l’article 20 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, en vertu desquelles une autorité administrative à qui est adressée une demande ne relevant pas de sa compétence la transmet à l’autorité administrative compétente et en avise le demandeur, ne sont pas applicables aux demandes adressées par le représentant de l’Etat aux collectivités territoriales dans le cadre du contrôle de légalité ; que, par suite, la ville de Nice, qui ne détenait plus la compétence en matière de distribution de l’eau depuis le 1er janvier 1982, n’était pas tenue de transmettre à la Communauté d’agglomération Nice-Côte d’Azur, à qui cette compétence avait été transférée, le recours gracieux que le préfet des Alpes-Maritimes avait formé le 22 février 2002 à l’encontre de la délibération de son conseil municipal en date du 20 décembre 2001 qui autorisait le maire à signer l’avenant au contrat de concession pour l’exploitation du service public de l’eau dans la ville de Nice ; qu’ainsi, le recours administratif du préfet des 155 Alpes-Maritimes, adressé à une autorité incompétente, n’a pu conserver le délai du recours contentieux ; que dès lors, son déféré, formé contre la délibération du conseil municipal du 20 décembre 2001 et l’avenant du 24 décembre 2001, enregistré le 1er juillet 2002, était tardif et, par suite, irrecevable ; qu’ainsi, la ville de Nice et la Communauté d’agglomération de NiceCôte d’Azur sont fondées à soutenir que c’est à tort que, par l’ordonnance attaquée, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nice a suspendu l’exécution de l’avenant du 24 décembre 2001 à la concession des 11 et 24 juillet 1952 modifiée ; (...) Contrats et marchés Contrats - Contrat entre un EPIC et une société commerciale - Présence de clauses exorbitantes de droit commun - Contrat administratif TC, 20 juin 2005, Société hôtelière guyanaise, req. nº 3446 (décision mentionnée aux Tables du Recueil Lebon) [extraits] Considérant que le Centre national d’études spatiales (CNES), propriétaire à Kourou (Guyane) d’un hôtel et du terrain attenant, a, à la suite d’une consultation ayant pour objet l’extension de cet hôtel dont la capacité était devenue insuffisante en raison du développement de l’activité spatiale, signé en 1989 avec le groupe Factorim-Vidal, agissant pour le compte de la Société hôtelière guyanaise (SHG) devant être créée, divers accords et en particulier deux promesses de vente de l’hôtel existant et du terrain destiné à son extension ; qu’en 1991, la société SHG a assigné le CNES, qui avait renoncé à la poursuite de l’opération, aux fins d’obtenir réparation de son préjudice ; Considérant que le CNES est, selon la loi du 19 décembre 1961 qui l’institue, un établissement scientifique et technique de caractère industriel et commercial assurant sa gestion financière et présentant sa comptabilité selon les usages du commerce, et qu’en conséquence, les contrats qu’il signe sont soumis au droit privé , à l’exception de ceux comportant des clauses exorbitantes du droit commun ; que contiennent de telles clauses les accords conclus qui confèrent au CNES un pouvoir de contrôle sur son cocontractant, en lui imposant des modalités d’exploitation, en se réservant, postérieurement à la vente, l’appréciation de la qualité du projet architectural ainsi que des normes et du prix des chambres de l’ensemble hôtelier dont la réalisation était à entreprendre avant la réitération des actes définitifs de vente, en garantissant un taux d’occupation des locaux, et en prévoyant des conditions de remboursement pouvant aboutir à une revente en faveur du CNES à un coût déterminé et non au prix du marché ; qu’il suit de là que la demande en réparation relève de la compétence des juridictions de l’ordre administratif ; (...) Note Le principal intérêt de cette décision du Tribunal des conflits Société hôtelière guyanaise c/ CNES, qui sera mentionnée aux Tables du Recueil Lebon, est de 86e année - nº 2 - février 2006 chronique administrative donner une illustration par l’exemple de la notion délicate à cerner de « clauses exorbitantes du droit commun ». Rappelons brièvement d’abord les faits de l’espèce. Dans cette affaire, la Société hôtelière guyanaise (SHG) avait assigné devant les juridictions judiciaires le Centre national d’études spatiales (CNES), « établissement scientifique et technique de caractère industriel et commercial », afin d’être dédommagée du préjudice par elle subi, à la suite de la rupture par le CNES de relations contractuelles nouées en vue de l’extension et de la rénovation d’un hôtel à Kourou. Mais la cour d’appel de Paris devait se déclarer incompétente le 5 novembre 1996 ; et la Cour de cassation rejetait le pourvoi contre cette décision le 16 mars 1999 (cf. Cass. civ. 1re, 16 mars 1999, B. civ. 1999 I, nº 102). La Cour de cassation a en effet estimé que le pouvoir de contrôle du CNES sur la SHG caractérisait l’existence d’un contrat administratif. La décision du Tribunal des conflits, intervenue sur renvoi du tribunal administratif de Cayenne, statue dans le même sens que la Cour de cassation en énumérant les diverses clauses, qui, en conférant au CNES un pouvoir de contrôle sur la SHG, constitue un ensemble de clauses exorbitantes. On le sait, tous les contrats conclus par les personnes publiques ne sont pas des contrats administratifs : nombre d’entre eux sont de droit privé. Dans le silence de la loi, la jurisprudence qualifie de contrats administratifs les contrats qui comportent au moins une clause exorbitante du droit commun ou qui ont un lien étroit avec l’exécution du service public, étant rappelé que le critère de la clause exorbitante s’est dégagé à partir du fameux arrêt Société des granits porphyroïdes des Vosges (CE, 31 juillet 1912, concL. Léon Blum), même si l’expression n’y est point employée. La jurisprudence s’est rarement risquée à donner une définition de cette notion, à l’exception notable d’une décision du Tribunal des conflits Société des combustibles (TC, 19 juin 1952, Rec. p. 628), où l’on peut lire cette observation : « La situation réciproque des contractants n’est pas de celle qui, normalement, serait résultée d’un accord conclu conformément au droit commun ». En vérité, les conclusions du commissaire du Gouvernement Léon Blum sur l’arrêt Société des granits porphyroïdes des Vosges restent toujours d’actualité pour essayer de cerner cette notion, et sont du reste souvent reprises par la doctrine (cf. notamment, R. Chapus, Droit administratif général, tome I, Précis Domat Montchrestien) : il peut s’agir soit de clauses mettant en œuvre des prérogatives de puissance publique, soit de clauses inusuelles dans les conventions entre personnes privées. Néanmoins, l’incertitude subsiste dans bon nombre de cas, d’autant que les clauses réputées exorbitantes – car anormales – se sont banalisées comme l’illustrent en particulier les « contrats » d’assurances. C’est pourquoi l’on ne peut plus se fier à la présence d’une seule clause exorbitante pour estimer que tel ou tel contrat est administratif : il faut en fait analyser l’économie générale du contrat et voir s’il comporte une série de clauses inusuelles en droit privé, par exemple un cahier des charges (cf. CE, 13 janvier 1984, Société Dubigeon-Normandie, Rec. p. 533.). Tel est le cas en l’espèce dans cette décision du Tribunal des conflits du 20 juin 2005, qui n’hésite pas à énumérer les diverses clauses qui confèrent au CNES un pouvoir de contrôle sur son cocontractant, à savoir : – celle imposant d’exploitation ; des modalités – celle réservant, postérieurement à la vente, l’appréciation de la qualité du projet architectural ; – celle réservant encore le contrôle des normes et du prix des chambres de l’ensemble hôtelier ; – celle garantissant un taux d’occupation des locaux ; – et enfin celle prévoyant des conditions de remboursement pouvant aboutir à une revente en faveur du CNES à un coût déterminé et non au prix du marché. Il s’agit là d’une véritable batterie ou panoplie de clauses jugées exorbitantes du droit commun, dont il est intéressant de noter qu’elle ne comprend point celle pourtant souvent citée en exemple, à savoir la possibilité de résiliation de plein droit. Cette décision du Tribunal des conflits est aussi d’autant plus intéressante que les EPIC (établissements publics à caractère industriel et commercial) comme le CNES ne sont plus soumis au Code des marchés publics, et qu’en conséquence, les dispositions de l’article 2 de la loi MURCEF du 11 décembre 2001 aux termes duquel « les marchés passés en application du Code des marchés publics ont le caractère de contrats administratifs » ne leur sont point applicables. Marché public - Procédure adaptée (art. 28 du CMP) - Ampleur de la publicité dans le cadre de la procédure adaptée - Référé précontractuel CE, 7 octobre 2005, Région Nord - Pas-deCalais, req. nº 278732 (décision publiée au Recueil Lebon) [extraits] Considérant qu’aux termes de l’article L. 551-1 du Code de justice administrative : « Le président du tribunal administratif, ou le magistrat qu’il délègue, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation des marchés publics, des contrats de partenariat, des contrats visés au premier alinéa de l’article L. 6148-5 du Code de la santé publique et des conventions de délégation de service public. / Les personnes habilitées à agir sont celles qui ont un intérêt à conclure le contrat et qui sont susceptibles d’être lésées par ce manquement (...). / Le président du tribunal administratif peut être saisi avant la conclusion du contrat. Il peut ordonner à l’auteur du manquement de se conformer à ses obligations et suspendre la passation du contrat ou l’exécution de toute décision qui s’y rapporte (...). / Le 156 président du tribunal administratif ou son délégué statue en premier et dernier ressort en la forme des référés. » ; Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés pré-contractuels du tribunal administratif de Lille qu’afin de sélectionner une entreprise pour le marché relatif à la programmation de l’implantation d’une antenne du musée du Louvre à Lens, qu’elle s’apprêtait à passer en application des dispositions de l’article 28 du Code des marchés publics, la région Nord - Pas-de-Calais a, le 7 janvier 2005, procédé à l’envoi d’un avis d’appel public à la concurrence au journal La voix du Nord et mis en ligne cet avis sur le site Internet du Conseil régional ; que saisi, sur le fondement de l’article L. 551-1 du Code de justice administrative, le juge des référés pré-contractuels du tribunal administratif de Lille, après n’avoir admis la recevabilité de la demande présentée par Mme X au nom d’un collectif de professionnels qu’en tant que cette dernière agissait en son nom et en sa qualité de programmiste en architecture et en aménagement, ayant intérêt à conclure le marché, a, par une ordonnance du 22 février 2005, annulé l’intégralité de la procédure de passation du marché objet du litige ; que la région Nord – Pasde-Calais se pourvoit en cassation contre cette ordonnance ; Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés précontractuels que l’avis d’appel public à la concurrence envoyé au journal La Voix du Nord et mis en ligne sur le site Internet du Conseil régional prévoyait que les dossiers de candidature devaient être envoyés par courrier au service compétent ; que si un des candidats a, de sa propre initiative, envoyé son dossier par télécopie, il a régularisé son dossier par un envoi ultérieur par courrier, lequel est parvenu au service compétent du Conseil régional avant la date limite de présentation des offres ; que, dès lors, en relevant que la région Nord – Pas-de-Calais a admis les candidatures adressées par télécopie, pour en déduire que, ayant ainsi modifié au cours de la procédure de passation du marché les règles de recevabilité des offres prévues dans l’avis d’appel à candidature, elle a manqué à ses obligations de publicité et de mise en concurrence, le juge des référés a dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis ; que, par suite, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de sa requête, la région Nord – Pasde-Calais est fondée à demander, pour ce motif, l’annulation de l’ordonnance attaquée en tant qu’elle a accueilli la demande présentée par Mme X en son nom et en sa qualité de programmiste en architecture et en aménagement ; Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, de régler dans cette mesure l’affaire au titre de la procédure de référé engagée par Mme X devant le juge des référés précontractuels du tribunal administratif de Lille ; Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête ; Considérant qu’aux termes de l’article 28 du Code des marchés publics : « I. Les marchés passés selon la procédure adaptée sont des marchés passés selon des modalités de publicité et de mise en concurrence déterminées par la personne responsable du marché en fonction de leur objet et de 86e année - nº 2 - février 2006 chronique administrative leurs caractéristiques. Ces marchés sont soumis aux seules règles prévues par le titre Ier, le titre II, à l’exception du chapitre 5, les I, II, III, IV, VI et VII de l’article 40 et l’article 79 du présent titre ainsi que les titres IV à VI. (...) / II. – Pour les marchés de fournitures et de services, les seuils en dessous desquels la procédure adaptée est possible sont de 150 000 d HT pour l’Etat et de 230 000 d HT pour les collectivités territoriales. ; que le II de l’article 40 du Code des marchés publics dispose que : Pour les marchés d’un montant compris entre 4 000 d HT et 90 000 d HT, la personne publique choisit librement les modalités de publicité adaptées au montant et à la nature des travaux, des fournitures ou des services en cause. » ; autres moyens de la demande de Mme X, que celle-ci est fondée à soutenir que la région Nord – Pas-de-Calais a méconnu les obligations de publicité et de mise en concurrence qui lui incombaient et à demander, pour ce motif, l’annulation des actes relatifs à la procédure de passation du marché en litige ; (...) Considérant qu’il résulte de ces dispositions que les marchés passés selon la procédure adaptée prévue par l’article 28 du Code des marchés publics sont soumis, et ce, quel que soit leur montant, aux principes généraux posés au deuxième alinéa du I de l’article premier du même code, selon lesquels les marchés publics respectent les principes de liberté d’accès à la commande publique, d’égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures (...) par la définition préalable des besoins de l’acheteur public, le respect des obligations de publicité et de mise en concurrence et le choix de l’offre économiquement la plus avantageuse ; que si la personne responsable du marché est libre, lorsqu’elle décide de recourir à la procédure dite adaptée, de déterminer, sous le contrôle du juge administratif, les modalités de publicité et de mise en concurrence appropriées aux caractéristiques de ce marché, et notamment à son objet, à son montant, au degré de concurrence entre les entreprises concernées et aux conditions dans lesquelles il est passé, ce choix, toutefois, doit lui permettre de respecter les principes généraux précités qui s’imposent à elle ; Il convient d’abord de rappeler brièvement les faits de l’espèce relatifs à l’ouverture à Lens en 2008 d’une antenne du Musée du Louvre. Considérant que le marché en cause a pour objet la programmation de l’implantation d’une antenne du musée du Louvre à Lens, comprenant un bâtiment muséographique et des annexes, pour laquelle l’avis d’appel à la concurrence exigeait des candidats la présentation de références récentes en matière de conception et de programmation de grands musées ; que pour passer ce marché, d’un montant prévisionnel de 35 000 c, selon la procédure adaptée prévue par l’article 28 du Code des marchés publics, la région Nord – Pas-de-Calais a choisi d’envoyer à la publication dans le journal régional La Voix du Nord un avis d’appel public à la concurrence le 7 janvier 2005 et de diffuser cet avis par la voie de son site Internet pendant quinze jours ; que, compte tenu de l’objet du marché, ces mesures ne permettaient pas d’assurer une publicité suffisante auprès des programmistes ayant vocation à y répondre de telle sorte que soient respectés les principes de libre accès à la commande et d’égalité de traitement des candidats ; que la circonstance, qu’indépendamment de la volonté de la région Nord – Pas-de-Calais, l’avis d’appel public à la concurrence a été mis en ligne sur le site du journal Le Moniteur du bâtiment et des travaux publics, est sans influence sur la régularité des mesures de publicité auxquelles elle a procédé ; Considérant qu’il résulte de ce qui précède, et sans qu’il soit besoin d’examiner les Note L’arrêt du 7 octobre 2005 Région Nord – Pas-de-Calais, qui sera publié au Recueil Lebon, est intéressant dans la mesure où il montre les limites de la liberté reconnue aux collectivités publiques par l’article 28 du Code des marchés publics de 2004 en matière de publicité préalable. Dans ce but, la région Nord – Pas-de-Calais a décidé de recourir à un architecte programmiste, dont le coût de la prestation a été évalué à 35 000 c, et a lancé un avis d’appel à la concurrence rendu public le 7 janvier 2005. Mme Véronique X, ellemême architecte-programmiste et présidente du Syndicat des programmistes en architecture et en aménagement, a saisi le juge des référés pré-contractuels du tribunal administratif de Lille d’une demande de suspension de la procédure d’attribution du marché. Par une ordonnance du 22 février 2005, le juge des référés pré-contractuels a annulé tous les actes de la procédure de passation du marché projeté. La région Nord – Pas-deCalais s’est alors pourvue en cassation contre cette ordonnance : le Conseil d’Etat n’a pas accueilli ce pourvoi. Le juge de cassation, après avoir considéré que le premier juge avait dénaturé les pièces du dossier, a annulé l’ordonnance et réglé l’affaire par évocation : il a dès lors répondu à un moyen invoqué en première instance, à savoir l’inadéquation des modalités de publicité et de mise en concurrence choisies par la région ; il a en effet jugé que celle-ci avait méconnu les obligations de publicité et de mise en concurrence qui lui incombaient. En l’espèce, la région Nord – Pas-de-Calais avait avisé les éventuels candidats selon deux modalités : dès le 7 janvier 2005, elle avait mis en ligne l’avis d’appel public à la concurrence sur son site internet ; le même jour, elle avait adressé pour publication l’avis à La Voix du Nord, quotidien diffusé dans le Nord, le Pas-de-Calais et l’Aisne, étant précisé que cet avis publié le 11 janvier 2005 indiquait que les candidatures devaient être déposées avant le 21 janvier 2005. Il convient d’y ajouter la publicité réalisée sur le site internet du journal Le Moniteur faite à la seule initiative de celui-ci. La Haute Juridiction a donc accueilli les moyens invoqués par la requérante, Mme X, pour lesquels les délais étaient insuffisants et la publicité inadaptée : il a en effet considéré que « compte tenu de l’objet du marché, ces mesures ne permettaient pas d’assurer une publicité suffisante auprès des programmistes ayant vocation à y répondre de telle sorte que soient respectés les principes de libre 157 accès à la commande et d’égalité de traitement des candidats », et que « la circonstance, qu’indépendamment de la volonté de la région Nord – Pas-de-Calais, l’avis d’appel public à la concurrence a(vait) été mis en ligne sur le site du journal Le Moniteur du bâtiment et des travaux publics, (était) sans influence sur la régularité des mesures de publicité auxquelles elle a(vait) procédé ». Rappelons, que si pour les marchés de fournitures de services et de travaux d’un montant inférieur à 90 000 c hors taxes, la personne publique choisit « librement » les modalités de publicité adaptée à la nature des prestations recherchées, elle doit néanmoins respecter les principes généraux de la commande publique, et se trouve à cet égard soumise à un strict contrôle du juge administratif. C’était déjà le cas sous l’empire du précédent Code des marchés publics de 2001, avec les marchés passés sans formalités préalables créés par le décret du 7 mars 2001 (cf. CE, avis, 29 juillet 2002, Société MAJ Blanchisserie, req. nº 246921). C’est donc aussi désormais le cas avec les marchés passés selon une procédure adaptée, marchés prévus par l’article 28 du décret du 7 janvier 2004, et qui sont des marchés passés sans formalités préalables au sens de l’article 9 de la loi MURCEF du 11 décembre 2001. L’arrêt du 7 octobre 2005 ne constitue point cependant une innovation jurisprudentielle, d’autant que le Conseil d’Etat avait déjà annulé l’article 30 du nouveau CMP qui prévoyait une absence totale de publicité pour certains marchés (cf. CE, 23 février 2005, ATMMP, req. nº 264712 ; cf. J.-L. Pissaloux, chron. de jurisprudence administrative, La Revue du Trésor, décembre 2005). Fonction publique Fonction publique territoriale Agent non titulaire - Contrat à durée déterminée - Rupture - Motif d’intérêt général CE, 8 juillet 2005, Mme D, req. nº 259615 (extraits) Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la ville de Nantes et l’Institut national de la santé et la recherche médicale (Inserm) ont conclu, le 2 septembre 1991, une convention ayant pour objet de définir les conditions et les modalités de mise à disposition par la ville de Nantes des personnels, des locaux et des moyens nécessaires à la réalisation d’un programme épidémiologique sur le pré-vieillissement conduite sous la responsabilité de l’Inserm pour une durée de six ans ; qu’en vertu des stipulations de cette convention, l’Inserm devait remettre à la ville de Nantes les fonds nécessaires à la rémunération du personnel employé pour cette étude, l’article 3.1.4 de cette convention stipulant que « le personnel rétribué dans le cadre de ce budget est recruté par la ville de Nantes et soumis aux obligations législatives et réglementaires applicables en la matière » ; que dans le cadre de cette convention, Mme D « a été recrutée en qualité de vacataire », par un arrêté du maire de Nantes en date du 86e année - nº 2 - février 2006 chronique administrative 4 juillet 1991 pour une durée de six ans à compter du 15 mai 1991, pour effectuer l’étude sur le vieillissement artériel ; que Mme D a été licenciée par une décision de l’Inserm en date du 14 décembre 1993 ; qu’elle a saisi le tribunal administratif de Nantes d’une demande tendant à la condamnation solidaire de l’Inserm et de la ville de Nantes, ou de l’un à défaut de l’autre, à l’indemniser de son préjudice financier et moral ; que sur appel de l’Inserm, la cour administrative d’appel de Nantes, par un arrêt en date du 20 juin 2003, après avoir annulé le jugement du 31 mai 2001 du tribunal administratif de Nantes accueillant sa demande d’indemnisation de son préjudice moral et financier a rejeté la demande formée devant ce dernier par Mme D ; que Mme D se pourvoit contre cet arrêt ; Considérant qu’aucune du décret du 15 février 1988 pris pour l’application de la loi 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale ne distingue entre les vacataires et les contractuels, quant à la possibilité qu’a l’Administration de résilier à tout moment le contrat d’un agent non titulaire pour un motif d’intérêt général ; que dès lors tant le moyen tiré de l’erreur de qualification juridique qu’aurait commise la Cour en jugeant que Mme D était une vacataire et non une contractuelle, que celui tiré de que la Cour aurait dénaturé les termes de l’arrêté du 4 juillet 1991 pour reconnaître à l’intéressée la qualité de vacataire sont inopérants et doivent, par suite, être écartés ; Considérant qu’en jugeant, par un arrêt suffisamment motivé et exempt de dénaturation, que l’intérêt du service reposant sur des motifs budgétaires et scientifiques pouvait justifier qu’il soit mis fin avant le terme de six ans aux fonctions de Mme D, la Cour n’a pas omis de répondre au moyen tiré de ce que la requérante bénéficiait d’un contrat à durée déterminée de six ans et non d’un régime de vacations ; Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que Mme D n’est pas fondée à demander l’annulation de l’arrêt attaqué ; (...) Installations classées Installations classées - Remise en état du site - Prescription trentenaire CE, Ass. , 8 juillet 2005, Société AlusuisseLonza France, req. nº 247976 (décision publiée au Recueil Lebon) [extraits] Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête : Considérant qu’aux termes de l’article premier de la loi du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l’environnement, dont les dispositions ont été reprises à l’article L. 511-1 du Code de l’environnement : « Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et d’une manière générale les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l’agriculture, soit pour la protection de la nature et de l’environnement (...) » ; qu’aux termes de l’article 23 de la même loi, dont les dispositions ont été reprises à l’article L. 514-1 du Code de l’environnement : « I. – Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, et lorsqu’un inspecteur des installations classées ou un expert désigné par le ministre chargé des installations classées a constaté l’inobservation des conditions imposées à l’exploitant d’une installation classée, le préfet met en demeure ce dernier de satisfaire à ces conditions dans un délai déterminé. Si, à l’expiration du délai fixé pour l’exécution, l’exploitant n’a pas obtempéré à cette injonction, le préfet peut : 1º Obliger l’exploitant à consigner entre les mains d’un comptable public une somme répondant du montant des travaux à réaliser, laquelle sera restituée à l’exploitant au fur et à mesure de l’exécution des mesures prescrites ; il est procédé au recouvrement de cette somme comme en matière de créances étrangères à l’impôt et au domaine. Pour le recouvrement de cette somme, l’Etat bénéficie d’un privilège de même rang que celui prévu à l’article 1920 du Code général des impôts ; 2º Faire procéder d’office, aux frais de l’exploitant, à l’exécution des mesures prescrites ; 3º Suspendre par arrêté, après avis de la commission départementale consultative compétente, le fonctionnement de l’installation, jusqu’à exécution des conditions imposées et prendre les dispositions provisoires nécessaires » ; enfin, qu’il résulte des dispositions figurant à l’origine à l’article 34 du décret du 21 septembre 1977, puis reprises au I de l’article 34-1 depuis l’intervention du décret du 9 juin 1994, qu’en cas de cessation définitive de l’activité, l’exploitant doit remettre le site dans un état tel qu’il ne s’y manifeste aucun des dangers ou inconvénients mentionnés à l’article L. 511-1 du Code de l’environnement et que le préfet peut lui imposer des prescriptions à cette fin ; Considérant qu’il résulte de l’ensemble des dispositions de la loi du 19 juillet 1976, reprises aux articles L. 511-1 et suivants du Code de l’environnement, que l’obligation de remise en état du site est applicable aux installations de la nature de celles soumises à autorisation en application du titre 1er du livre V du Code de l’environnement alors même qu’elles auraient cessé d’être exploitées avant l’entrée en vigueur de la loi du 19 juillet 1976, dès lors que ces installations demeurent susceptibles de présenter les dangers ou inconvénients énumérés à l’article L. 511-1 de ce code ; que, dans cette hypothèse, l’obligation de remise en état du site imposée par l’article 34-I du décret du 21 septembre 1977 pèse sur l’ancien exploitant ou, si celui-ci a disparu, sur son ayant droit ; que lorsque l’exploitant ou son ayant droit a cédé le site à un tiers, cette cession ne l’exonère de ses obligations que si le cessionnaire s’est substitué à lui en qualité d’exploitant ; Considérant qu’incombe ainsi à l’exploitant d’une installation classée, à son ayant droit ou à celui qui s’est substitué à lui, la mise en œuvre des mesures permettant de remettre en état le site qui a été le siège de l’exploitation dans l’intérêt, notamment, de la santé ou de la sécurité publique et de 158 la protection de l’environnement ; que l’Administration peut contraindre les personnes en cause à prendre ces mesures et, en cas de défaillance de celles-ci, y faire procéder d’office et à leurs frais ; Considérant que les pouvoirs de police spéciale conférés par la loi à l’autorité administrative peuvent, par leur objet et leur nature mêmes, être exercés par celle-ci à toute époque et vis-à-vis de tout détenteur d’un bien qui a été le siège de l’exploitation d’une installation classée, dès lors que s’y manifestent des dangers ou inconvénients de la nature de ceux auxquels la législation des installations classées a pour objet de parer ; Considérant, toutefois, que les principes dont s’inspire l’article 2262 du Code civil font obstacle à ce que le préfet impose à l’exploitant, à son ayant droit ou à la personne qui s’est substituée à lui la charge financière des mesures à prendre au titre de la remise en état d’un site lorsque plus de trente ans se sont écoulés depuis la date à laquelle la cessation d’activité a été portée à la connaissance de l’Administration, sauf dans le cas où les dangers ou inconvénients présentés par le site auraient été dissimulés ; Considérant, en outre, que cette même charge financière ne peut être légalement imposée au détenteur d’un bien qui n’a pas la qualité d’exploitant, d’ayant droit de l’exploitant ou qui ne s’est pas substitué à lui en qualité d’exploitant ; que lorsque l’autorité administrative entend exercer les pouvoirs qu’elle tient de l’article L. 514-1 du Code de l’environnement et de l’article 34-1 du décret du 21 septembre 1977 vis-à-vis du détenteur actuel du bien, elle doit suivre la procédure prévue à l’article 18 du décret et prendre une décision motivée ; Considérant qu’il résulte de ce qui précède qu’en jugeant que l’obligation pour l’ancien exploitant de prendre en charge la remise en état du site est insusceptible d’être prescrite, la cour administrative d’appel a entaché son arrêt d’une erreur de droit ; qu’ainsi la société Alcan Holdings France, qui vient aux droits de la société Alusuisse – Lonza France, est fondée à en demander pour ce motif l’annulation ; Considérant qu’il y a lieu pour le Conseil d’Etat de régler l’affaire au fond par application des dispositions de l’article L. 821-2 du Code de justice administrative ; Considérant qu’il résulte de l’instruction que la société Alusuisse – Lonza France a exploité à Marseille, jusqu’en 1968, une usine dans laquelle elle procédait au traitement de la bauxite et que les résidus issus de cette activité industrielle ont été déposés par ses soins, jusqu’en 1953, sur un terrain situé à proximité, chemin des Aygalades, constituant ainsi un crassier ; qu’elle a cédé ce terrain pour partie à la société Unipol en 1980 et pour la partie restante à la commune de Marseille en 1982 ; que le préfet des Bouches-du-Rhône, par des arrêtés en date des 5 janvier 1994, 10 novembre 1995 et 14 novembre 1996, lui a imposé, dans le cadre des pouvoirs qu’il tient de la législation relative aux installations classées, de réaliser des études et d’exécuter des travaux destinés à prévenir le risque d’éboulement du crassier situé sur la partie du terrain cédée à la commune ; 86e année - nº 2 - février 2006 chronique administrative Sur les conclusions tendant à l’annulation des arrêtés préfectoraux des 5 janvier 1994, 10 novembre 1995 et 14 novembre 1996 : En ce qui concerne l’arrêté du 14 novembre 1996 : Considérant qu’il résulte des dispositions combinées des articles 10 et 18 du décret du 21 septembre 1977 que, lorsque le préfet envisage de prendre un arrêté imposant des prescriptions complémentaires à l’exploitant ou à l’ancien exploitant d’une installation classée, celui-ci a la faculté de se faire entendre par le conseil départemental d’hygiène ou de désigner à cet effet un mandataire ; qu’il doit, à cette fin, être informé par le préfet au moins huit jours à l’avance de la date et du lieu de la réunion du conseil et recevoir simultanément un exemplaire des propositions de l’inspection des installations classées ; que ces dispositions ont pour objet non seulement d’informer l’intéressé de la date de la réunion du conseil, mais aussi de lui laisser un délai suffisant pour préparer utilement ses observations ; que, par suite, hors le cas où l’Administration peut justifier de l’urgence s’attachant à la réunion du conseil, leur méconnaissance est de nature à entacher d’irrégularité la procédure suivie ; Considérant qu’il résulte de l’instruction que la lettre en date du 1er octobre 1996 par laquelle le préfet des Bouches-duRhône a informé la société Alusuisse – Lonza France de ce que le conseil départemental d’hygiène se réunirait le 10 octobre suivant ne lui est parvenue que le 4 octobre ; que l’Administration n’établit pas, ni même n’allègue, que la méconnaissance du délai de huit jours prescrit par l’article 10 du décret du 21 septembre 1977 aurait été justifiée par l’urgence à réunir le conseil départemental d’hygiène ; que, par suite, la société Alcan Holdings France est fondée à soutenir que c’est à tort que le tribunal administratif de Marseille a rejeté les conclusions dirigées contre l’arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 14 novembre 1996 et à demander, outre l’annulation, dans cette mesure, du jugement attaqué, celle dudit arrêté ; En ce qui concerne les arrêtés des 5 janvier 1994 et 10 novembre 1995 : Considérant, en premier lieu, qu’ainsi qu’il a été dit, l’obligation de remise en état du site est applicable aux installations de la nature de celles soumises à autorisation en application du titre 1er du livre V du Code de l’environnement alors même qu’elles auraient cessé d’être exploitées avant l’entrée en vigueur de la loi du 19 juillet 1976, dès lors que ces installations demeurent susceptibles de présenter les dangers ou inconvénients énumérés à l’article L. 511-1 ; qu’il résulte de l’instruction, d’une part, que l’usine exploitée par la société Alusuisse – Lonza France aurait été soumise à autorisation en application du titre 1er du livre V du Code de l’environnement et l’était d’ailleurs sous l’empire de la législation antérieure et, d’autre part, que les résidus entreposés chemin des Aygalades présentaient un risque pour l’environnement ; Considérant, en deuxième lieu, qu’à la date à laquelle le préfet a pris le premier des arrêtés contestés, la cessation définitive de l’exploitation de l’usine était intervenue depuis moins de trente ans ; que, par suite, la société Alcan Holdings France n’est pas fondée à se plaindre de ce que le tribunal administratif de Marseille a rejeté le moyen invoqué par elle et tiré de la méconnaissance de la prescription trentenaire ; Considérant, en troisième lieu, que l’obligation de remettre le terrain sur lequel la société Alusuisse – Lonza France avait déposé les résidus issus de son activité industrielle dans un état tel qu’il ne s’y manifeste aucun des dangers ou inconvénients mentionnés à l’article L. 511-1 du Code de l’environnement reposait sur cette société, la commune de Marseille ne s’étant pas substituée à elle en qualité d’exploitant ; qu’est sans incidence à cet égard la circonstance que la société a pris, avant la cessation de l’exploitation, des précautions pour assurer la stabilité du crassier et que les risques de nuisance, et notamment de pollution du ruisseau des Aygalades, ont été aggravés par des travaux de terrassement et des dépôts faits par la commune de Marseille, dès lors que ces risques sont imputables à la présence même des résidus en cause ; que la société ne peut utilement invoquer le moyen tiré de ce que la commune de Marseille aurait méconnu l’obligation d’entretien des berges du ruisseau des Aygalades qui pèserait sur elle en application du Code rural ; Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la société Alcan Holdings France n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que le tribunal administratif a rejeté ses conclusions tendant à l’annulation des arrêtés des 5 janvier 1994 et 10 novembre 1995 ; Sur les conclusions tendant à ce que les prescriptions contenues dans les arrêtés attaqués soient imposées à la commune de Marseille : Considérant qu’ainsi qu’il a été dit l’obligation de remise en état du terrain pesait sur la société Alusuisse – Lonza France ; que, par suite, les conclusions tendant à ce que les prescriptions fixées à cette fin par le préfet soient imposées à la commune de Marseille ne peuvent qu’être rejetées ; Sur les frais de l’expertise ordonnée par le juge des référés du tribunal administratif : Considérant que le tribunal administratif de Marseille, qui a estimé pouvoir statuer sur la demande dont il était saisi sans attendre que l’expert qu’il avait désigné remette son rapport, s’est néanmoins abstenu de se prononcer par le même jugement sur la dévolution des frais de l’expertise ; qu’il a ainsi méconnu la règle applicable, même sans texte, à toute juridiction administrative, qui lui impartit, sauf dans le cas où un incident de procédure y ferait obstacle, d’épuiser son pouvoir juridictionnel ; qu’ainsi le jugement en date du 5 février 1998 doit être, dans cette mesure, annulé ; Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer immédiatement sur la charge des frais de l’expertise ; que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de mettre ces frais à la charge pour moitié de l’Etat et pour moitié de la société Alcan Holdings France ; (...) 쏋 BIBLIOGRAPHIE La coopération intercommunale 5e édition par Bernard PERRIN, administrateur territorial honoraire, praticien reconnu des questions relatives à la décentralisation et au droit de la fonction publique territoriale La coopération intercommunale permet à plusieurs communes, sur le principe du volontariat des élus, de se regrouper pour gérer en commun un certain nombre d’activités ou de services. Elle occupe aujourd’hui une place essentielle dans le paysage local : au 1er janvier 2005, 88 % des communes appartenaient à un groupement intercommunal à fiscalité propre. Néanmoins, du fait de la grande variété des structures intercommunales existantes et de la diversité des champs de compétence correspondants, il est parfois difficile de se repérer dans ce paysage particulièrement composite. Afin de clarifier l’ensemble de ces dispositifs, le présent ouvrage dresse un bilan complet de tous les modes de coopération intercommunale existants, parmi lesquels les élus pourront choisir la formule la mieux adaptée à leurs besoins : coopération contractuelle ou statutaire, communauté de communes ou d’agglomérations, etc. Pratique, l’ouvrage s’appuie sur de nombreuses illustrations – cas d’école ou expériences concrètes – qui témoignent des initiatives multiples et diverses que les données statistiques permettent de mieux qualifier. Entièrement actualisée, notamment pour tenir compte des incidences de la loi du 13 août 2004, cette 5e édition offre à l’ensemble des acteurs de la vie locale un panorama complet de la « carte intercommunale française ». Berger-Levrault, 3, rue Ferrus, 75014 Paris - Site internet : www.editions.berger-levrault.fr 605 pages - Prix : 63 c - ISBN : 2-7013-1481-X 159 86e année - nº 2 - février 2006