Arrêt de la cour d`appel de Paris du 12 février 2016

Transcription

Arrêt de la cour d`appel de Paris du 12 février 2016
Arrêt de la cour d’appel de Paris du 12 février 2016
La compétence du juge français reconnu dans les litiges entre Facebook et ses utilisateurs :
une conséquence de la qualité de « consommateur » reconnue à l’internaute
Les utilisateurs de Facebook pourront désormais se prévaloir de l’arrêt de la cour d’appel de Paris
rendu le 12 février 2016 pour saisir le juge français dans le cadre de leurs contentieux avec le géant
américain, et se voir reconnaître la qualité de « consommateur » dans leurs relations contractuelles
avec le fameux réseau social.
Dans les faits, le différend s’est élevé à la suite de la désactivation par Facebook du compte d’un
utilisateur après la publication par ce dernier d’un contenu jugé contraire aux conditions d’utilisation
du site par le réseau : la reproduction de L’origine du monde » de Gustave Courbet…
Afin d’obtenir la réactivation de son compte, l’internaute assigne la société Facebook Inc., de droit
américain, devant le juge français. Dans son arrêt, la cour d’appel de Paris confirme l’ordonnance
rendue par le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Paris.
Dans un premier temps, la cour d’appel qualifie de contrat de consommation la relation liant
l’utilisateur à Facebook au regard de l’article 15 du règlement du 22 décembre 2000.1 Elle considère
que le contrat a été conclu par l’utilisateur pour un usage pouvant être considéré comme étranger à
son activité professionnelle. Elle ajoute que le contrat a bien été conclu avec une personne qui exerce
des activités commerciales ou professionnelles au sens de l’article 15 car, même si le service proposé
est gratuit, « la société Facebook Inc retire des bénéfices importants de l’exploitation de son activité
(…) ».
Elle en déduit, dans un deuxième temps, que le juge français est compétent pour apprécier de la licéité
de la clause attributive de juridiction contenue dans les conditions générales du réseau Facebook.
Elle se fonde pour cela sur les dispositions spécifiques de ce même règlement du 22 décembre 2000 2
en matière de contrats de consommation. L’article 16 du règlement donne compétence au tribunal du
lieu où le consommateur est domicilié, en l’occurrence en France. La cour d’appel considère ainsi que
ce dernier est fondé à saisir le juge français.
1
Règlement (CE) n° 44/2001 du conseil du 22 décembre 2000 concernant la compétence judiciaire, la
reconnaissance et l’éxécution des décisions en matière civile et commerciale
2
idem
VIGO cabinet d’avocats, lettre d’actualités mars 2016
Elle juge, dans un troisième temps que la clause attributive de compétence au profit des juridictions
californiennes contenue dans les conditions générales du réseau Facebook est abusive au sens de
l’article L 132-1 du code de la consommation, et doit être réputée non écrite. Elle considère que cette
clause a pour effet de créer, au détriment du consommateur « un déséquilibre significatif entre les
droits et obligations des parties au contrat »; et « qu’elle créé une entrave sérieuse pour un utilisateur
français à l’exercice de son action en justice ».
Cette décision pourrait entrainer d’importantes conséquences juridiques pour de nombreux réseaux
sociaux. Nous sommes donc impatients que la Cour de cassation ou la Cour de justice de l’Union
européenne se prononce…
Flora PLENACOSTE
VIGO cabinet d’avocats, lettre d’actualités mars 2016
Emmanuel MERCINIER