Les laïcités – Québec/France : jeu de miroir

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Les laïcités – Québec/France : jeu de miroir
ISPEF
Institut des Sciences et
Pratiques d’Education et de
Formation
Les laïcités – Québec/France : jeu de miroir
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Conférence débat le 07 mars - 15h-17h - amphi Benveniste - Entrée libre
Le laboratoire Éducation, Cultures, Politiques (ECP) et l’Institut des sciences et pratiques d’éducation
et de formation (ISPEF) organisent une conférence débat à trois voix avec mesdames Micheline
Milot, sociologue sociologue (UQAM, Québec) Jacqueline Gautherin, philosophe (Lyon 2), et
monsieur Philippe Foray, philosophe (Université de Saint-Etienne).
La laïcité est-elle un rempart contre l’altérité ? Le cas du Québec
Micheline Milot, professeure de sociologie, Université du Québec à Montréal
Au Québec, la notion de laïcité a été introduite dans l’usage social et la rhétorique politique très
récemment, en lien direct avec les accommodements raisonnables pour motifs religieux dans la
sphère publique (port du kirpan sikh et du voile musulman, etc). Face à l’altérité religieuse, la laïcité
apparaît à certains comme un outil d’interdiction, efficace et légitime, des manifestations de
l’appartenance religieuse en dehors de la sphère privée. Dès lors devenue objet de débat social, la
conception de la laïcité se montre néanmoins polymorphe. En effet, d’autres acteurs de la société
civile, des intellectuels et des politiciens considèrent que la laïcité est non seulement compatible
avec la liberté de manifester sa religion, mais en constitue la garantie.
Il est remarquable que la logique d’interdiction au Québec se calque parfaitement à la fois sur les
contraintes les plus strictes de la laïcité française et sur des argumentaires similaires faisant appel à
l’identité nationale et au patrimoine historique. Or, une telle application du principe de laïcité entre
en nette contradiction avec les instruments juridiques du Québec (et du Canada) et
l’instrumentalisation politique de la laïcité se trouve, quant à elle, en porte-à-faux avec la tradition
politique d’intégration et de reconnaissance des droits fondamentaux.
Laïcité et politique. Quelques considérations sur la politisation
contemporaine de la laïcité française
Philippe Foray, professeur d’université, Université Jean Monnet Saint-Etienne, ECP
La période récente a vu, en particulier à l'occasion des dernières échéances électorales, une forte
récupération du thème de la laïcité dans les discussions politiques. Que la laïcité ait une dimension
politique, c'est une évidence.
Mais cette récupération contemporaine et même cette instrumentalisation dit autre chose. D'une
part, elle a lieu à propos d'une confession particulière, l'islam. D'autre part, elle conduit certains à
l'affirmation d'une conception particulière, quasi "patrimoniale" de la laïcité, qui ne laisse pas
d'interroger. Le développement de l'islam en France nous ferait-il découvrir la laïcité "à la française"
sous un jour inattendu? "
L’imbroglio de la question laïque en France
Jacqueline Gautherin, professeur émérite, Université Lumière Lyon 2
La « question laïque », qui semblait s’être stabilisée en France après le refroidissement de la guerre
scolaire, ne cesse aujourd’hui de se réchauffer, de se déplacer, de se compliquer. Les terrains de
controverse se sont multipliés (outre l’école, les établissements publics et parfois privés, et ce qu’on
nomme communément « l’espace public »), ainsi que les objets de contestation (le hijab, le niqab, les
savoirs scolaires religieusement chauds, la viande halal, les marques des fêtes traditionnelles, la
mixité…) et les acteurs suscitant, alimentant les polémiques et se revendiquant de conceptions
divergentes de la laïcité.
Certes, la mobilisation d’un grand nombre d’acteurs confrontant diverses logiques de laïcisation n’est
pas nouvelle, comme le montrent, par exemple, les débats parlementaires qui ont précédé la loi de
1905. Celle-ci définit les rapports entre la République et les religions sous une forme à la fois libérale
et civique. Or on constate depuis quelques années plusieurs tentatives de redéfinition de la
laïcité (avec épithètes) : l’une s’appuie principalement sur un idéal de liberté de conscience ; une
autre s’efforce d’articuler cet idéal avec celui du respect des appartenances religieuses ; une autre
encore se fonde sur une conception quasi-jacobine bien commun… sans parler de la récupération
nationaliste de la thématique de la neutralité de l’Etat. Dans le même temps, la « question laïque »
se trouve transformée en question sociale, au-delà du champ des institutions publiques.
L’intervention analysera cet imbroglio particulièrement visible dans les débats sur les forums.
Amphithéâtre BENVENISTE Rue 5/7 rue Raulin - Lyon 7ème