THERMODYNAMIQUE
Transcription
THERMODYNAMIQUE
THERMODYNAMIQUE Département de Physique Semestre de printemps 2010 Enseignant : Prof. Yi-Cheng Zhang Assistants : Dr. Matú² Medo, Linyuan Lü 17 février 2010 Table des matières 1 LES PRINCIPES DE LA THERMODYNAMIQUE 3 1.1 Variables thermodynamiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 1.2 Equilibre thermique et notion de température . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 1.3 Notions de travail et de chaleur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4 1.4 Le premier principe de la thermodynamique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 1.5 Le deuxième principe de la thermodynamique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 1.6 Entropie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 1.7 Le troisième principe de la thermodynamique 9 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2 FONDEMENTS ET APPLICATIONS 11 2.1 Thermodynamique en forme de théorie axiomatique . . . . . . . . . . . . . . . . 11 2.2 Equation d'Euler et relation de Gibbs-Duhem . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13 2.3 Thermodynamique du gaz parfait . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14 2.4 L'approche de la théorie cinétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16 3 LES POTENTIELS THERMODYNAMIQUES 19 3.1 Le principe du minimum d'énergie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19 3.2 Dénition des potentiels thermodynamiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20 3.3 L'énergie libre de Helmholtz . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22 3.4 L'enthalpie 3.5 L'énergie libre de Gibbs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23 3.6 Les relations de Maxwell . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4 TRANSITIONS DE PHASES 22 27 4.1 Equilibre de phases . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28 4.2 Généralisation pour chimistes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29 4.3 Transitions de phase du premier ordre 30 4.4 Le modèle de van der Waals . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32 4.5 Transitions du deuxième ordre : universalité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Appendice A : Stabilité 37 Appendice B : La transformation de Legendre 40 Littérature 1. Walter Greiner, Ludwig Neise, Horst Stöcker, Thermodynamique et mecanique statistique (aussi en allemand et anglais) 2. Herbert B. Callen, Thermodynamics and an Introduction to Thermostatistics 1 LES PRINCIPES DE LA THERMODYNAMIQUE L'approche macroscopique à la théorie de la chaleur se base sur quelques observations fon- damentales de l'expérience quotidienne et constitue donc essentiellement une théorie phénoménologique. Ses piliers sont la loi de la conservation d'énergie et l'irréversibilité des phénomènes naturels. Dans ce chapitre il s'agira d'énoncer ces principes et de leur donner une formulation précise sous la forme d'axiomes. Nous nous limiterons en général à des systèmes homogènes, sans champ extérieur (tel que le champ gravitationnel), et nous négligerons les eets de surface. 1.1 Variables thermodynamiques Tout système macroscopique consiste d'un nombre énorme d'atomes (ou molécules). Néanmoins il nous sura souvent d'indiquer deux, trois quantités pour caractériser l'état (macroscopique) du système. La raison fondamentale est que les mesures macroscopiques sont à la fois très lentes et très grossières à l'échelle des temps et longueurs typiques des atomes. Ces quantités macroscopiques peuvent être du type de que le volume V d'un gaz, la longueur X coordonnées thermodynamiques telles d'un l, l'aimantation M d'un ferroaimant, ou bien elles peuvent être des facteurs extérieurs du type de forces" telles que la pression d'un l σ, le champ magnétique p, la tension h. 1.2 Equilibre thermique et notion de température En équilibre (absolu) les variables thermodynamiques ne changent pas en fonction du temps. La thermodynamique s'occupe essentiellement des états d'équilibre, il s'agit donc plutôt d'une "thermostatique". (Dans ce cours nous ne discuterons pas la thermodynamique hors de l'équilibre qui représente un domaine important de recherches actuelles). Un problème fondamental est l'étude de systèmes composés, par exemple des gaz ou des liquides séparés par A avec variables X , Y (par exemple X = V , Y = p dans le cas d'un gaz) du système B 0 0 déni par les variables X , Y . Si tout état d'équilibre X, Y du système A peut coexister avec 0 0 tout état d'équilibre X , Y du système B on parle de paroi adiabatique. Si par contre les systèmes A et B , initialement en équilibre et isolé l'un de l'autre, évoluent, après la mise en une paroi. Considérons une paroi rigide et imperméable, séparant le système thermodynamiques contact par l'intermédiaire de la paroi, jusqu'à ce que l'ensemble des deux systèmes atteigne un nouvel équilibre, on parle de paroi thermique. On énonce parfois un diatherme. Les deux systèmes sont alors en équilibre zéroième principe de la thermodynamique en observant que deux systèmes qui sont en équilibre thermique avec un troisième sont en équilibre thermique entre eux. Ceci nous permet d'introduire le concept de Considérons trois systèmes A, B, C température. avec variables thermodynamiques X, Y ; X 0 , Y 0 ; X 00 , Y 00 . A en équilibre thermique avec B qui se trouve dans un état particulier A décrivent alors une courbe, par exemple la courbe α de la gure 1. Nous pouvons aussi xer le système A dans l'état X1 , Y1 et varier les variables 0 possibles de B , ce qui donne par exemple la courbe α de la gure 1. On voit à l'aide du zéroième principe que tous les états sur la courbe α sont en équilibre entre eux, et de même 0 0 pour tous les points de la courbe α . On appelle α l'isotherme de A et α l'isotherme de B . On voit aussi que n'importe quel état sur α est en équilibre thermique avec un état quelquonque 0 0 de l'isotherme α . Nous dirons que α et α sont des isothermes correspondants de A et B . Nous Soit d'abord le système X10 , Y10 . Les points représentatifs de 3 Fig. 1 Isothermes correspondants. Fig. 2 Transformation quasistatique. pouvons répéter cette construction à l'aide d'un état de B en dehors de la courbe obtiendrons de nouveaux isothermes correspondants, par exemple condition nécessaire et susante pour que les systèmes est que les points représentatifs de A et B A et B 00 Y1 B choisi pour tracer les courbes de du système C cause du zéroième principe, le point l'isotherme α soient en équilibre thermique A. A ne dépend pas du système En eet il sut de partir d'un point (gure 1) qui est en équilibre thermique avec le point du système A. 00 et nous soient sur une paire d'isothermes correspondants. Il est facile de se convaincre que la famille d'isothermes de auxiliaire β α0 0 et β dans la gure 1. La 00 X1 , Y1 0 0 X1 ,Y1 de B. 00 X1 , Alors, à est en équilibre thermique avec tous les points de On peut donc généraliser la notion d'isotherme correspondants à un nombre quelquonque de systèmes. Il est alors naturel d'utiliser un paramètre qui a la même valeur pour tous les états des isothermes correspondants de tous ces systèmes, la température. Comme les isothermes d'un système ne dépendent pas du choix de système auxiliaire, la notion de température est une propriété intrinsèque d'un système en équilibre thermique. 1.3 Notions de travail et de chaleur Dans la discussion de l'équilibre thermique nous avons supposé que la paroi était immobile (et implicitement nous avons aussi exclu toute action de forces électriques, magnétiques ou de gravitation). Supprimons l'hypothèse d'immobilité ; alors le système évoluera vers un équilibre mécanique où la pression exercée sur la paroi de dehors est la même que celle exercée de l'intérieur. Augmentons maintenant la pression extérieure, par exemple en ajoutant un poids sur un piston comme dans la Fig. 2. Le système verra son volume diminuer ; il reçoit du milieu extérieur un travail où 4V est le changement du volume du système et 4 pe −pe 4V est la pression extérieure. Le système évolue vers un nouvel état d'équilibre, mais en général il sera impossible de prédire cet état sans résoudre, par exemple, les équations de l'hydrodynamique. Si nous voulons décrire le travail à l'aide de variables thermodynamiques du système, il est nécessaire que pendant la compression le système reste inniment voisin d'un état d'équilibre thermodynamique. Une telle transformation du système est appelée transformation quasistatique. Pour l'exemple de la Fig. 2 ceci peut se faire en ajoutant une masse inniment petite, alors le travail reçu sera δW = −p dV, où (1) p est la pression (intérieure) du système. D'une façon analogue l'élongation (innitésimale) σ donne le travail d'un l avec tension δW = σ dl (2) et un changement innitésimal de l'aimantation correspond à δW = h dM. (3) Il est important de réaliser que le travail est une quantité que l'on ajoute (un ux) et non pas une quantité caractéristique du système. (Si le système traverse un cycle, le travail total fourni n'est pas zéro en général). Le travail inntésimal δW peut donc être considéré comme forme diérentielle, qui n'est cependant pas exacte. Travail et chaleur sont donc deux formes de ux d'énergie. Mais tandis que le travail est dynamiquement contrôlable, la chaleur ne l'est pas. Il est aussi important de noter qu'un processus quasistatique n'est pas nécessairement réversible. Pour un processus réversible il est aussi nécessaire qu'aucun phénomène dissipatif (par exemple d à l'inélasticité d'un l) n'intervienne au cours de la transformation. La notion de chaleur a connu une longue histoire. Elle est associée à ce qui est transféré entre deux systèmes à températures diérentes. Jusqu'au début du dix-neuvième siècle on associait à ce transfert une substance appelée caloric". Mais alors le transfert de chaleur sous forme de rayonnement thermique suggérait qu'il s'agissait du même phénomène qualitatif que la lumière. C'est pourquoi l'évolution de la théorie de la lumière d'une description corpusculaire (Newton) à la description ondulatoire (Huygens, Fresnel) induisait une évolution parallèle dans la théorie de la chaleur. C'était surtout Rudolf Clausius, le père de la thermodynamique", qui reconnaissait que la chaleur n'était qu'une forme d'énergie et qu'elle pouvait être transformée en énergie mécanique (ou électrique) comme celle-ci peut être transformée en chaleur. Les expériences décisives avaient été réalisées par James Joule entre 1840 et 1850. Comme le travail, la chaleur n'est pas une grandeur caractéristique d'un système, mais plutôt une énergie en transit". Il n'est donc pas correct de parler de la chaleur d'un corps" ; un transfert innitésimal de chaleur δQ n'est pas une diérentielle exacte. 1.4 Le premier principe de la thermodynamique Oublions pour un instant la distinction entre les variables macroscopiques et microscopiques et considérons un système thermodynamique comme un ensemble d'atomes obéissant aux lois de la mécanique, de l'électrodynamique ou de la mécanique quantique. Si ce système est isolé du reste de l'univers, son énergie totale est constante. La conservation d'énergie est un des rares principes de la physique qui ont résisté aux diverses évolutions et révolutions de la théorie. 5 Elle est attachée à l'invariance des lois de physique par rapport à une translation dans le temps. La conservation d'énergie est universelle et s'applique aussi aux systèmes thermodynamiques. Pour formuler cette loi dans le langage de la thermodynamique nous considérons un système entouré de parois adiabatiques. Alors on peut changer l'état du système en eectuant du travail adiabatique. L'expérience montre qu'il y a une innité de possibilités pour réaliser la transition d'un certain état initial à un certain état nal, en fournissant toujours le même travail au système. Alors nous pouvons formuler l'énoncé du premier principe de la thermodynamique : Lorsqu'un système quelconque passe d'un état initial déterminé à un état nal déterminé par voie uniquement adiabatique, le travail total qu'il reçoit du milieu extérieur est toujours le même, quel que soit le chemin adiabatique qu'il a suivi entre ces deux états. Il existe alors une fonction U des variables thermodynamiques, telle que Wi→f (adiabatique) = Uf − Ui . Cette fonction est appelée mesurer Uf − Ui . énergie interne. (4) La relation (4) nous donne un moyen pour Il a été réalisé par Joule que le passage de i à f ou de f à i (mais en général pas les deux !) peut être réalisé en fournissant seulement du travail adiabatique. Alors on n'a qu'à mesurer ce travail. Considérons maintenant le cas plus général où le système fait la transition i→f sans la contrainte adiabatique (enceinte diathermane et diérence de température entre le système et son environnement). On constate que le travail fourni est diérent de Uf − Ui . On est donc forcé de conclure qu'une énergie a été transférée sous une autre forme que travail, sous forme de chaleur Q : Uf − Ui = Wi→f + Q , (5) ou, pour une transformation innitésimale, dU = δW + δQ. (6) Ces équations peuvent être utilisées comme dénitions thermodynamiques de la chaleur. En même temps, l'équation (6) représente la forme diérentielle du premier principe. 1.5 Le deuxième principe de la thermodynamique i ∆W Selon le premier principe, il est nécessaire que dans un système qui passe d'un état Uf − Ui soit égal à la somme du travail ∆Q que le système a reçus, mais ce principe ne s'oppose pas au processus inverse de l'état f à i où le système reçoit la chaleur −∆Q et le travail −∆W . Or l'expérience à un état f le changement d'énergie interne et de la chaleur montre que le processus inverse d'une évolution observée n'est jamais réalisé. Un exemple classique est l'expérience de Joule où initialement un gaz est enfermé dans une partie d'un récipient (parfaitement isolé vers l'extérieur). On ouvre le robinet et le gaz se répand dans l'ensemble du récipient. Dans ce processus le gaz n'a échangé ni de la chaleur ni du travail avec l'environnement et Uf − Ui = 0. Le processus inverse, où le gaz se retire spontanément dans le volume original, n'est pas observé, bien que ce serait parfaitement permis selon le premier principe. 6 Un autre exemple est le contact entre deux gaz de températures initiales diérentes. Ils évolueront vers un état d'équilibre thermique, où la température sera la même pour les deux systèmes. En fait, tout processus naturel est une évolution où l'ensemble du système considéré et de son environnement se rapproche constamment d'un état d'équilibre. Si nous considérons l'ensemble du système et de l'environnement comme un système isolé par rapport au reste de l'univers, nous pouvons énoncer cette observation de la manière suivante : Un système isolé qui a subi une évolution ne peut plus revenir à son état initial. Il s'agit ici d'une forme particulière du second principe de la thermodynamique. Il existe d'autres formulations équivalentes, en particulier celles de Clausius et de Kelvin. Selon Clausius, il est impossible de construire une machine qui, opérant suivant un cycle de trans- formations, n'ait produit d'autre eet que le transfert d'une quantité de chaleur d'un corps froid à un corps chaud. Selon Kelvin, il est impossible de construire une machine qui n'ait produit à la n du cycle d'autre eet que l'extraction d'une quantité de chaleur positive d'une source unique et la production d'un travail positif. Il est possible de déduire l'énoncé de Clausius du principe pour le système isolé en considérant comme système isolé la machine et les corps concernés. En fait, il est parfaitement possible de faire passer de la chaleur du corps chaud au corps froid. Si la machine, dont parle Clausius, existait, on pourrait rétablir l'état initial, ce qui contredit au principe. Il est aussi possible de déduire l'énoncé de Kelvin utilisant un raisonnement similaire. En fait, tous ces énoncés du second principe sont équivalents. Les recherches des conséquences du deuxième principe pour les grandeurs thermodynamiques ont été menées dans deux directions, d'un côté celle des cycles de transformation (Carnot, Kelvin, Clausius), de l'autre côté l'étude des surfaces adiabatiques réversibles (Carathéodory, 1909). Dans ce qui suit, nous nous limiterons à l'approche des cycles. Un bref aperçu des surfaces adiabatiques réversibles est donné dans l'appendice A. Pour un cycle au cours duquel le système n'échange de la chaleur qu'avec une seule source le système ne peut pas fournir du travail (énoncé de Kelvin) ; donc il reçoit du milieu un travail positif ou nul, W ≥ 0. Supposons que le cycle soit réversible, c'est à dire l'ensemble du système et de son environnement passe (dans les deux sens) à travers une suite continue d'états d'équilibre. En direction inverse, le système reçoit le travail (et donc aussi −W ≥ 0. Les deux inégalités impliquent Q = 0). Dans le cas d'un cycle réversible les températures des sources système S. W =0 Ti sont égales à celles du Limitons-nous au cas réversible et étendons le résultat à une innité de sources an de représenter une variation continue de la température. Alors nous pouvons remplacer la somme par une intégrale I δQ = 0, T (7) δQ doit T . La relation (7), valable pour un cycle réversible de transformations, où le cercle indique qu'il s'agit d'un cycle, c.-à-d. le système revient à son état initial et être pris à température est connue comme théorème de Clausius. Au cours du cycle réversible le système est toujours innitésimalement voisin de l'équilibre. Il peut donc être représenté à chaque instant par un point dans l'espace des variables thermo- X (le volume d'un gaz) et Y (la pression). T (X, Y ) et la chaleur innitésimale s'écrit dynamiques. Considérons le cas de deux variables La température le long le cycle est une fonction δQ(X, Y ) = a(X, Y )dX + b(X, Y )dY. 7 (8) X X(0) = X(1) Y Y(0) = Y(1) Fig. 3 Cycle réversible et variables thermodynamiques. A γ γ’ O Fig. 4 Integration et les transformations réversibles. Nous paramétrisons le chemin fermé dans le plan X, Y par t, 0 ≤ t ≤ 1. L'expression (7) est alors donnée par l'intégrale curviligne I δQ = T Z 1 dt 0 a (X(t), Y (t)) Ẋ + b (X(t), Y (t)) Ẏ = 0. T (X(t), Y (t)) (9) Pour des cycles réels (avec des processus irréversibles) la relation (9) ne peut pas être écrite en termes de variables thermodynamiques en toute généralité. Mais pour des cas spéciaux comme la conduction thermique inniment lente une telle représentation sera possible. Ce cas sera discuté plus tard. 1.6 Entropie L'entropie est avant tout un concept d'équilibre. Le théorème de Clausius (7), valable pour des cycles réversibles, donc des suites continues d'états d'équilibre, nous permet de dénir cette quantité à une constante près. Considérons une transformation réversible d'un état initial à un état A. O Alors il existe des transformations réversibles qui ramènent le système à son état initial. A l'aide du théorème de Clausius nous avons Z γ:O→A δQ + T Z γ 0 :A→O δQ = 0. T Mais pour obtenir une transformation inverse on n'a qu'à remplacer Z γ 0 :A→O δQ =− T 8 Z γ 0 :O→A δQ T (10) δQ par −δQ, donc Nous trouvons alors Z γ:O→A δQ = T Z γ 0 :O→A δQ . T Pour une origine xe cette intégrale depend seulement du point l'entropie de l'état A (11) A. Nous dénissons donc par Z S(A) = γ:0→A δQ . T Pour un autre choix d'origine une constante s'ajoutera à (12) S(A), mais la diérence des entropies de deux états d'équilibre sera indépendante du choix d'origine, Z S(A) − S(B) = γ:B→A δQ . T (13) Pour une transformation réversible innitésimale le changement de l'entropie est donc une diérentielle exacte, dS = δQ . T (14) C'est le résultat central du deuxième principe pour le cas des transformations réversibles. Considérons un cas particulier d'une transformation irréversible, la conduction thermique entre deux systèmes, initialement séparés par une paroi adiabatique et de températures différentes, T1 > T2 . Supposons aussi que le système entier soit d'abord adiabatiquement isolé et que la paroi adiabatique entre les systèmes est remplacée pendant un instant par une paroi diathermale. Il y aura alors un transfert innitésimal de chaleur du système 1 au système 2, −δQ1 = δQ2 > 0. (15) Il s'agit d'un processus irréversible. Pour calculer le changement d'entropie, nous ramenons les deux systèmes à l'état initial à l'aide d'un réservoirs à températures T1 et T2 . Nous pouvons alors utiliser les relations thermodynamiques, δQ1 = T1 dS1 , (16) δQ2 = T2 dS2 . (17) Le changement de l'entropie totale est δQ1 δQ2 dS = dS1 + dS2 = + T1 T2 1 1 = δQ2 − > 0. T2 T1 (18) Nous concluons que l'entropie d'un système dans une enceinte adiabatique ne décroît jamais. Chaque évolution d'un système isolé thermiquement tend donc à accroître l'entropie. A l'équilibre d'un tel système l'entropie sera maximale. 1.7 Le troisième principe de la thermodynamique Le théorème de Clausius dénit l'entropie d'un système seulement à une constante près. C'est le troisième principe de la thermodynamique qui xe cette constante, en postulant : 9 L'entropie d'un système tend vers une constante universelle pour T → 0, et cette constante peut être choisie zéro. Ce principe attribué à Nernst (1905) a été énoncé et développé pendant l'enfance de la mécanique quantique. Il amène des conséquences importantes pour les grandeurs thermodynamiques à basse température, en particulier pour la reçoit une quantité de chaleur δQ, chaleur spécique. Si un système sa température peut augmenter ou pas, selon la nature du processus. Par exemple la température augmentera pour un gaz à pression constante ou à volume constant. Dans ces cas on dénit la chaleur spécique C= C par δQ . dT (19) T → 0. T > 0 et Le troisième principe implique que la chaleur spécique doit tendre vers zéro pour En fait, considérons un chemin γ (réversible) de T = 0 à un état A à température Cγ (T ). Alors l'entropie est donnée par représentons la chaleur spécique le long ce chemin par T Z S(A) = Cγ (T ) 0 D'autre part, eu égard au troisième principe, S(A) dT . T doit tendre vers zéro pour (20) T →0 et il est nécessaire que Cγ (T ) → 0 pour T → 0. (21) Ce comportement est en eet toujours observé, mais il contredit le théorème classique d'équipartition, selon lequel la chaleur spécique est indépendante de la température (et proportionnelle au nombre de degrés de liberté du système). Le troisième principe reète donc bien l'aspect quantique de la matière. Nous reviendrons à ces questions dans le cadre de la mécanique statistique quantique. 10 2 FONDEMENTS ET APPLICATIONS 2.1 Thermodynamique en forme de théorie axiomatique Nous venons de déduire un nombre de propriétés importantes à partir des principes de la thermodynamique. Il est alors utile de regrouper tous ces résultats sous la forme d'axiomes qui serviront de base précise pour toute la théorie. A priori ces axiomes sont certes moins évidents" que les principes zéro à trois, mais après avoir discuté l'approche conventionnelle, nous les trouverons très naturels et surtout très satisfaisants du point de vue mathématique. Pour plus de détails voir le livre de Callen. Partons d'une description en termes de variables thermodynamiques du type coordonnées (volume V, aimantation M, nombres de moles Ni , i = 1, . . . , n, Toutes ces coordonnées ont la propriété commune d'être etc.). extensives. Considérons deux systèmes identiques et joignons les en un seul système. Alors il est clair que le volume du système total sera le double de celui d'un sous-système. Les paramètres dont les valeurs dans un système composé sont la somme des valeurs dans les sous-systèmes sont appelés paramètres extensifs. Le premier axiome propose que ces coordonnées et l'énergie interne U dénissent les états d'équilibre. Axiome 1 Il existe des états particuliers (appelés états d'équilibre) caractérisés par les paramètres extensifs U (énergie interne) et X1 , . . . , Xr (les coordonnées thermodynamiques telles que le volume V , les nombres de moles Ni etc.). Le deuxième axiome postule que dans un système isolé l'entropie est maximale, une proposition que nous avons déduite du deuxième principe. Axiome 2 Il existe une fonction des paramètres extensifs U, X1 , . . . , Xr , appelée entropie S , avec la propriété suivante : S a un maximum dans l'espace des états d'équilibre. Il est important de noter que la thermodynamique (de l'équilibre) peut seulement comparer des états d'équilibre. Si on parle de maximum on doit être capable de générer des états diérents d'équilibre pour les mêmes conditions extérieures. Ceci peut se faire à l'aide de contraintes internes, par exemple à l'aide d'une paroi adiabatique ou diathermane entre deux gaz. Pour la paroi adiabatique les états d'équilibre sont dénis par S du système composé est égale à la somme SA + SB . UA , VA , UB , VB , et l'entropie Si la paroi adiabatique est remplacée par une paroi diathermane il y aura en général un échange de chaleur entre les deux systèmes, et un nouvel état d'équilibre s'établira. Le deuxième axiome postule alors que l'entropie S du système avec paroi diathermane sera plus grande ou égale à sa valeur en présence d'une paroi adiabatique. Pour tout état d'équilibre il est crucial de connaître la relation fondamentale S = S(U, X1 , . . . , Xr ) . Une fois la dépendance de l'entropie des paramètres extensifs (22) U, X1 , . . . , Xr connue, toutes les propriétés thermodynamiques d'un système peuvent être dérivées de cette fonction. Le troisième axiome spécie le comportement général de cette fonction. Axiome 3 S est additif, diérentiable et monotone croissant en fonction de U . 11 L'additivité implique que l'entropie est un paramètre extensif. Le postulat de monotonie, lié à l'existence d'une température positive, garantit que la relation fondamentale peut être invertie en U = U (S, X1 , . . . , Xr ) . (23) Le quatrième axiome correspond au troisième principe. Axiome 4 L'entropie d'un système arbitraire est zéro dans l'état où Maintenant considérons la relation fondamentale dans la forme avec N1 , . . . , Nn . ∂U ∂S X1 ,...,Xr = 0. X1 = V , X2 , . . . , Xr = Alors on a dU = + ∂U ∂S ∂U ∂N1 dS + V,N1 ,...,Nn ∂U ∂V dV S,N1 ,..,Nn dN1 + · · · + S, V,N2 ,...,Nn ∂U ∂Nn dNn . (24) S,V,N1 ,...,Nn−1 Ces dérivées partielles ont des signications très précises, ∂U ∂S =T (25) = −p (26) V,N1 ,...,Nn est la température thermodynamique, ∂U ∂V S,N1 ,...,Nn correspond à la pression et ∂U ∂Ni = µi (i = 1, . . . , n) (27) S,V,N1 ,...,6Ni ,...,Nn sont les potentiels chimiques pour les diérentes composantes. Ces relations conrment que notre choix de variables indépendantes pour V , N1 , . . ., Nn U est judicieux. Comme aussi bien U que S, sont des paramètres extensifs, les dérivées partielles (25) à (27) ne changent pas si on multiplie tous les paramètres extensifs par le même nombre ; ces dérivées sont des paramètres intensifs. Si on connaît explicitement la relation fondamentale (23), les relations (25) à (27) peuvent s'écrire T = T (S, V, N1 , . . . , Nn ), p = p(S, V, N1 , . . . , Nn ), µi = µi (S, V, N1 , . . . , Nn ), (28) où les membres de droite sont des fonctions connues. Ces relations sont appelées d'état. équations Comme application nous considérons deux gaz séparés par une paroi diathermane. Nous VA , VB et les UA , UB peuvent NA , NB supposons que les volumes nombres de moles que les énergies internes changer. Le système entier est isolé, donc l'énergie restent constants, mais totale est constante, UA + UB = constant . 12 (29) S Selon l'axiome 2 a un maximum à l'équilibre, d'où dSA + dSB = ∂SA ∂UA dUA + VA ,NA ∂SB ∂UB dUB = 0. (30) VB ,NB Comparant (29) et (30) nous voyons que ∂SA ∂UA ce qui signie que les températures = VA ,NA TA et TB ∂SB ∂UB , (31) VB ,NB sont égales. Dans l'approche axiomatique l'égalité des températures suit du principe variationnel pour l'entropie, tandis que dans l'approche des principes thermodynamiques la température est dénie à l'aide de l'équilibre. 2.2 Equation d'Euler et relation de Gibbs-Duhem U , l'entropie S et les coordonnées X1 , . . . , Xr (représenV, N1 , . . . , Nn ) sont des paramètres extensifs. Si les grandeurs S , X1 , . . . , Xr par une constante λ, l'énergie interne doit être multipliée par la même con- Nous avons vu que l'énergie interne tant par exemple sont multipliées stante, U (λS, λX1 , .., λXr ) = λU (S, X1 , . . . , Xr ). Il s'agit donc d'une fonction homogène de degré 1. Dérivant par rapport à (32) λ nous avons ∂U ∂U ∂U S+ X1 + · · · + Xr = U. ∂(λS) ∂(λX1 ) ∂(λXr ) Cette équation doit être satisfaite pour toute valeur de λ (33) et en particulier pour λ = 1; alors (33) correspond à la relation d'homogénéité d'Euler. Alors, à l'aide de (33) et de la relation ∂U = Yj ∂Xj nous trouvons la représentation U = TS + r X (34) Yj Xj (35) j=1 et donc la diérentielle dU = T dS + S dT + r X (Yj dXj + Xj dYj ) . (36) j=1 D'autre part, la généralisation de (24) à un système décrit par les variables dU = T dS + r X Yj dXj . S, X1 , . . . , Xr est (37) j=1 Comparant (36) et (37) nous obtenons S dT + r X Xj dYj = 0 . j=1 13 (38) C'est la relation de Gibbs-Duhem entre les variables intensives, lesquelles ne peuvent donc pas être variées indépendemment. Si nous considérons par exemple un gaz décrit par les variables extensives S, V, N , la relation de Gibbs-Duhem est S dT − V dp + N dµ = 0 . (39) N sont exprimés en termes de T, p et µ, (39) est une équation diérentielle dans les variables T, p et µ. Sa solution Si les équations d'état (28) sont connues et inversibles, c.a.d. S, V et permettra d'exprimer une des variables, à une constante près, à l'aide des deux autres. 2.3 Thermodynamique du gaz parfait L'expérience de Boyle montre qu'à température constante le produit pV est constant. D'autres expériences, en particulier celles de Gay-Lussac, montrent qu'à pression constante le volume du gaz augmente en fonction de la température. Ceci permet à écrire une première équation d'état pV = N RT, où R (40) est une constante universelle, la constante des gaz parfaits", et T est la température empirique du gaz parfait (nous verrons qu'elle cocide avec la température thermodynamique). avant après Fig. 5 Expérience de Joule L'expérience de Joule montre que l'expansion libre d'un gaz, sans qu'il n'échange ni chaleur ni travail avec l'extérieur, ne change pas la température. En tenant compte du fait que l'énergie interne V U ne change pas dans cette expérience et en considérant nous concluons que U ne peut pas dépendre de à volume constant CV = ∂U ∂T V. = V U comme fonction de T et Ceci implique pour la chaleur spécique dU . dT (41) Pour la plupart des gaz (à température ambiante) la chaleur spécique ne dépend pas de T et est donnée par CV = c N R où c= (42) 3 2 pour des gaz monoatomiques (He, Ne, Ar). L'intégration de (41) donne U = c N RT , (43) où nous avons choisi la constante d'intégration égale à zéro. A l'aide des deux équations d'état (40) et (43) et de l'équation de Gibbs-Duhem nous obtiendrons la relation fondamentale du gaz parfait. Nous utilisons les équations d'état pour 14 écrire h U pV Nµ µi + − = N (c + 1)R − , T T T T RT . = N p S = (44) V (45) Alors la relation de Gibbs-Duhem devient NT R R µ dµ (c + 1) − 2 dT − =0 dp + T T p T ou encore (c + 1)R (46) µ dT dp +d =0. −R T T p (47) T µ µ0 p + − − R log = 0. T0 T T0 p0 (48) Cette équation est intégrable (c + 1)R log Les variables intensives T et p peuvent être substituées par des variables extensives à l'aide des équations (40) et (43), T T0 = U N0 U0 N , p p0 = U V0 U0 V , (49) tandis que (44) nous permet d'exprimer µ/T en termes de S/N. Alors nous trouvons la relation fondamentale du gaz parfait " S = S0 + N R log où U U0 c N N0 −c−1 V V0 µ0 . S0 = N (c + 1)R − T0 # , (50) (51) Dans cette dérivation nous avons implicitement identié la température empirique du gaz parfait avec la température thermodynamique, en utilisant les relations générales du dernier chapitre. Pour justier ce procédé, nous considérons un cycle de Carnot et utilisons seulement les équations d'état du gaz parfait et la dénition de la chaleur. Pour un processus isotherme on a dU = 0, donc δQ = p dV = N RT dV . V δQ = 0, nous avons dV = 0, dU + pdV = N R cdT + T V (52) Pour un processus adiabatique, déni par donc c dT dV =− . T V 15 (53) (54) 1 Th 2 4 Tc 3 V Fig. 6 Expérience de Joule Dans un cycle entre deux températures adiabatique T1 et T2 nous commençons avec une compression A → B, c log Dans l'expansion isotherme B→C T1 VA = log . T2 VB le système obtient la chaleur ∆Q(T1 ) = N RT1 log L'expansion adiabatique C→D T2 VC . VB (56) donne c log Finalement, à (55) T2 VC = log . T1 VD (57) le système reçoit la chaleur ∆Q(T2 ) = N RT2 log Les températures thermodynamiques ϑ1 et ϑ2 VA . VD (58) sont dénis par ϑ1 ∆Q(T1 ) T1 log(VC /VB ) =− = . ϑ2 ∆Q(T2 ) T2 log(VD /VA ) (59) D'autre part, à l'aide de (55) et (57), nous avons 0 = log et nous trouvons en eet VA VC VA VC VC VD + log = log = log − log VB VD VB VD VB VA ϑ1 T1 = . ϑ2 T2 (60) (61) 2.4 L'approche de la théorie cinétique L'idée de la matière étant composée de particules indivisibles a été avancée par le philosophe grec Démocrite. Mais l'autorité d'Aristote, qui s'opposait violamment à l'atomisme de Démocrite (Aristote insistait qu'une particule étendue - une propriété nécessaire pour en former 16 de la matière - ne pouvait pas être indivisible) éliminait pour deux millénaires l'hypothèse atomistique. Daniel Bernoulli (1700-1782) était le premier à développer une théorie des gaz basée sur la dynamique des atomes. Il était capable de reproduire la loi de Boyle et de démontrer la proportionnalité entre la température et le carré de la vitesse des atomes. Dans le dix-neuvième siècle c'était d'abord Maxwell qui faisait avancer la théorie cinétique en proposant une distribution de vitesses f0 (~v ) à l'aide de laquelle les équations d'état du gaz parfait peuvent être reproduites. Mais c'était Ludwig Boltzmann qui, autour de 1870, accomplissait la the de dériver la thermodynamique du gaz parfait à partir des lois de la mécanique classique. C'était un véritable triomphe du point de vue mécanistique. L L L vxdt Considérons un récipient cubique de volume le nombre d'atomes avec vitesses normalisée V = L3 avec vx , vx + dvx . La fonction Z ∞ dvx f0 (vx ) = 1. Na Na f0 (vx )dvx f0 (vx ) est donc atomes et soit de distribution (62) −∞ Pour vx > 0 et un intervalle de temps dt donné seulement une fraction Na f0 (vx )dvx vx dt L (63) donne contre la paroi de droite. Chacune de ces particules transmet une impulsion 2mvx à cette paroi. La pression dénie comme force (égale au changement d'impulsion par unité de temps) par surface est donc Z = Pour une distribution satisfaisant à 2Na p= V Z ∞ vx dt 2mvx dvx Na f0 (vx ) L dtL2 0 Z ∞ Na dvx f0 (vx )2mvx2 . V 0 p = f0 (vx ) = f0 (−vx ) (64) nous obtenons ∞ 2Na 1 dvx f0 (vx ) mvx2 = 2 V −∞ 1 2 mv . 2 x (65) D'autre part, pour un gaz parfait l'énergie cinétique est égale à l'énergie totale, donc U = Na Dm 17 2 E v2 . (66) Supposons encore que hvx2 i = hvy2 i = hvz2 i = 13 hv 2 i, alors nous trouvons à l'aide de (65) et (66) 2 pV = U, 3 (67) en accord avec les équations d'état du gaz parfait. Il faudra alors trouver la fonction de distribution f0 (vx ). Considérant le cas où la distri- bution des vitesses ne dépendait pas de leurs directions, Maxwell proposait 2 f0 (vα ) = A e−Bvα , α = x, y, z. (68) r π =A . B (69) La normalisation (62) donne ∞ Z dvα e 1=A 2 −Bvα −∞ Identiant d'autre part le membre de droite de (66) avec l'expression du gaz parfait (43), c.-à-d. où kB = R/N0 Dm est la constante de E 3 v 2 = kB T, 2 2 Boltzmann et N0 le nombre (70) d'atomes par mole (nombre de Loschmidt), nous obtenons 3 3m kB T = A 2 2 Z ∞ −∞ 2 dvα vα2 e−Bvα 3m A = 2 2 r π . B3 (71) Les relations (69) et (71) donnent r A= m 2πkB T , Introduisons encore la fonction de distribution B= f0 (~v ) m . 2kB T (72) en dénissant f0 (~v )d3 v = f0 (vx )f0 (vy )f0 (vz ) dvx dvy dvz . (73) A l'aide de (68) et (72) nous obtenons alors la distribution de Maxwell f0 (~v ) = m 2πkB T 18 3/2 2 e mv − 2k T B . (74) 3 LES POTENTIELS THERMODYNAMIQUES Dans le dernier chapitre nous avons vu que les principes thermodynamiques (ou les ax- iomes enoncés dans le premier chapitre) sont en accord avec les expériences et avec la théorie cinétique. Dans ce chapitre nous déduirons quelques propriétés générales à partir des axiomes. Nous nous servirons en particulier des potentiels thermodynamiques qui dérivent des relations fondamentales U = U (S, X1 , . . . , Xr ) et S = S(U, X1 , . . . , Xr ). La transformation de Legendre est un outil puissant pour l'application des principes thermodynamiques à des situations concrètes. Un résumé des concepts et propositions essentiels de ce formalisme mathématique est donné dans l'appendice B. 3.1 Le principe du minimum d'énergie U , l'entropie V , les nombres de moles Ni , l'aimantation M , pour X1 , . . . , Xr . Ces variables ne sont pas indépendantes, Les variables extensives d'un système thermodynamique sont l'énergie interne S et d'autres quantités comme le volume lesquelles nous utiliserons la notation mais selon l'axiome 2 il existe une relation fondamentale S = S(U ; X1 , . . . , Xr ) . (75) L'axiome 3 exige que ∂S ∂U > 0. (76) X1 ,...,Xr Le théorème des fonctions implicites (voir l'appendice) nous permet d'écrire U = U (S, X1 , . . . , Xr ) . (77) L'analogue de l'équation (191) est ∂S ∂U ∂X = − ∂Si . ∂Xi ∂U Soient (α) Xi (78) des variables extensives d'un système composé dont quelques-unes ne sont pas xées à priori (par exemple les volumes de deux gaz séparés par une paroi mobile). Alors le deuxième axiome postule ∂S (α) ∂2S = 0, ∂Xi (α) <0 (β) dénie négative . (79) ∂Xi ∂Xj Généralisant les relations (75) à (78) pour le système composé, nous obtenons ∂U (α) ∂Xi ∂2U (α) (β) ∂Xi ∂Xj ∂S ∂S =0 , ∂U ∂S = − >0, (α) (β) ∂U ∂X ∂X = − (α) ∂Xi ∂2S i (où nous avons utilisé (80) pour établir (81)). trouvons le principe du minimum d'énergie : 19 (80) (81) j ∂2U (β) est donc déni positive, et nous ∂Xj (α) ∂Xi Les valeurs des paramètres internes non-restreints sont telles que l'énergie interne U est minimale Nous appliquons ce principe à deux gaz séparés par une paroi et décrits par les variables extensives SA , SB , VA , VB , NA , NB telles que SA + SB = S VA + VB = V NA + NB = N = = = constant constant constant , , , (82) Considérons une paroi diatherme, mobile et perméable. Nous utilisons le formalisme des multiplicateurs de Lagrange pour tenir compte des contraintes (82). Le principe du minimum d'énergie, à l'aide de l'équation (199) de l'appendice et des dénitions (28), donne les relations suivantes entre les variables intensives : ∂U ∂SA + λ1 = TA + λ1 = 0 ∂U ∂SB + λ1 = TB + λ1 = 0 ⇒ TA = TB , (83) ∂U ∂VA + λ2 = −pA + λ2 = 0 ∂U ∂VB + λ2 = −pB + λ2 = 0 ⇒ pA = pB , (84) ⇒ µA = µ B . (85) ∂U ∂NA + λ3 = −µA + λ3 = 0 ∂U ∂NB + λ3 = −µB + λ3 = 0 Pour une paroi diatherme, mais imperméable et immobile, seules les températures doivent êtres les mêmes, tandis que les pressions et les potentiels chimiques sont arbitraires. D'autre part, pour une paroi adiabatique et imperméable, seules les pressions doivent être les mêmes à l'équilibre. 3.2 Dénition des potentiels thermodynamiques Dans l'expérience il est souvent plus facile de contrôler les paramètres intensifs que de xer les grandeurs extensives. Pour certaines grandeurs, en particulier l'entropie S, il est même impossible de donner une recette simple comment les mesurer. Il est alors avantageux d'utiliser des représentations où certaines variables extensives sont remplacées par des variables intensives. Considérons le cas où les variables extensives sont de Legendre de particulier U, S, V, Ni , i = 1, . . . , n. Les transformées U (S, V, N1 , . . . , Nn ) sont appelées potentiels thermodynamiques. On dénit en l'énergie libre de Helmholtz F (T, V, N1 , . . . , Nn ) = U − S ∂U = U − T S, ∂S (86) H(S, p, N1 , . . . , Nn ) = U − V ∂U = U + pV, ∂V (87) ∂U ∂U −V = U − T S + pV. ∂S ∂V (88) l'enthalpie H et l'énergie libre de Gibbs G(T, p, N1 , . . . , Nn ) = U − S 20 U = U (S, V, N1 , . . . , Nn ) est F = F (T, V, N1 , . . . , Nn ), G = G(T, p, N1 , . . . , Nn ) ou H = Toute information contenue dans la relation fondamentale aussi contenue dans les relations H(S, p, N1 , . . . , Nn ). Les équations d'état s'obtiennent à l'aide des relations générales pour des transformées de Legendre (206) et (207), mais on peut aussi se servir des diérentielles : dU = T dS − p dV + µ dN dF = dU − T dS − SdT (89) = −S dT − p dV + µ dN (90) dG = dU − T dS − SdT + pdV + V dp = −S dT + V dp + µ dN (91) dH = dU + pdV + V dp = T dS + V dp + µ dN (92) Les relations qui en découlent sont résumées dans la table 3.1. Potentiel Thermodynamique Grandeurs dérivées U (S, V, N1 , . . . , Nn ) T = F (T, V, N1 , . . . , Nn ) S= G(T, p, N1 , . . . , Nn ) S= H(S, p, N1 , . . . , Nn ) T = ∂U ∂S , − ∂F ∂T , − ∂G ∂T , ∂H ∂S , ∂U p = − ∂V , µi = ∂F p = − ∂V , µi = V = V = ∂G ∂p ∂H ∂p , µi = , µi = ∂U ∂Ni ∂F ∂Ni ∂G ∂Ni ∂H ∂Ni Table 3.1 Potentiels thermodynamiques et leurs dérivées. A part de ces quatre potentiels thermodynamiques il existe d'autres fonctions, en particulier le grand potentiel qui joue en rôle important dans la mécanique statistique (surtout en mécanique statistique quantique). Il est déni par la transformée de Legendre n Ω(T, V, µ1 , . . . , µn ) = U − S ∂U X ∂U − Ni ∂S ∂Ni = U − TS − i=1 n X µi Ni . (93) i=1 Les variables indépendantes sont donc T, V, µ1 , . . . , µn , et les variables dépendantes s'obtien- nent à l'aide des relations S=− ∂Ω ∂T , p=− ∂Ω ∂V 21 , Ni = − ∂Ω . ∂µi (94) 3.3 L'énergie libre de Helmholtz Imaginons un système en équilibre thermique avec une source de chaleur à température T, sans qu'il y ait échange de particules ou de travail entre le système et la source. Le principe du minimum d'énergie pour l'ensemble du système et de la source de chaleur s'écrit d(U + Ur ) = 0, d2 (U + Ur ) > 0, (95) à entropie constante d(S + Sr ) = 0, où Ur et Sr (96) sont l'énergie interne et l'entropie du réservoir. Comme le système n'échange que de la chaleur avec le réservoir et que T est constant, on a dUr = T dSr = −T dS = −d(T S) , d2 Ur = −d2 (T S) , (97) et les relations (95) deviennent d(U − T S) = 0, d2 (U − T S) > 0. (98) On a donc le principe de minimum suivant : Les valeurs d'équilibre des paramètres noncontraints d'un système en équilibre thermique avec une source de chaleur à température T minimisent l'énergie libre de Helmholtz. Considérons un système en contact diatherme avec un réservoir de chaleur et en contact adiabatique avec une source de travail. Le travail fourni au système d'une façon réversible est donné par δW = dU + dUr = dU + T dSr = dU − T dS = dF . (99) Le changement d'énergie libre de Helmholtz correspond donc au travail fourni d'une manière réversible par une source de travail à température constante (d'où le nom énergie libre"). 3.4 L'enthalpie D'une façon analogue au cas de l'énergie libre de Helmholtz on montre qu'il existe un principe de minimum pour l'enthalpie. Les valeurs d'équilibre des paramètres non-contraints d'un système en équilibre mécanique avec un réservoir à pression constante minimisent l'enthalpie. Pour un système entouré de parois imperméables (dNi avec un réservoir à pression p = 0) et en équilibre mécanique le changement de l'enthalpie est donné par dH = T dS = δQ (100) et correspond donc à la chaleur ajoutée à pression constante. L'enthalpie joue un rôle essentiel dans le processus de Joule-Thompson, où deux pistons sont déplacés à pressions constantes pi , pf (pi > pf ) de sorte qu'un gaz est forcé de passer à travers une paroi perméable. L'énergie interne change de Uf − Ui = pi Vi − pf Vf , 22 (101) de sorte que l'enthalpie du gaz reste constante, Hi = Ui + pi Vi = Uf + pf Vf = Hf . (102) Le processus est utilisé pour refroidir des gaz (réels). On trouve pour des températures suisamment basses que, pour une enthalpie constante, la température décroît si la pression diminue. 3.5 L'énergie libre de Gibbs L'énergie libre de Gibbs est minimale par rapport aux variations de variables non-contraintes dans un système qui est en équilibre aussi bien avec une source de chaleur qu'avec une source de travail. Il est évident que ce potentiel est particulièrement utile pour toutes les expériences où un système est en contact avec l'atmosphère, donc à pression et température constantes. Il se prête aussi à discuter la coexistence de diérentes phases telles que liquide-solide ou liquide-vapeur. A l'aide de la relation d'Euler (35) le potentiel de Gibbs s'écrit G= X µi Ni . (103) i Pour un système avec une seule composante le potentiel de Gibbs par mole est simplement le potentiel chimique G/N = µ. Il n'est donc pas surprenant que le potentiel de Gibbs joue un rôle important dans la description des réactions chimiques. Une réaction chimique est décrite par une équation symbolique X νi Ai = 0, (104) i où les νi sont appelés coecients stoichiométriques. Par exemple la réaction 2H2 + O2 * ) 2H2 O (105) νH2 H2 + νO2 O2 + νH2 O H2 O = 0 (106) correspond à avec les coecients νH2 = 2, νO2 = 1, νH2 O = −2. Le minimum de l'énergie libre de Gibbs détermine l'équilibre chimique, donc nous écrivons (pour dG = X p et T constants). µi dNi = 0 . (107) i D'autre part la relation (104) limite sévèrement les variations des toutes les autres composantes Ni changent de νi , Ni ; si N1 change de ν1 , donc dN1 dN2 dNn = = .... = . ν1 ν2 νn (108) La condition d'équilibre chimique (107) s'écrit donc dG = n dN1 X µi νi = 0 . ν1 i=1 23 (109) Comme dN1 est arbitraire, la condition nécessaire pour l'équilibre chimique est X µi νi = 0 . (110) i Pour appliquer cette formule à une situation concrète, il faudra naturellement connaître les µi = µi (p, T, N1 , . . . , Nn ). équations d'états des diérentes composantes, 3.6 Les relations de Maxwell Il existe un nombre énorme de quantités de la forme Z1 , Z2 , . . . (∂X/∂Y )Z1 ,Z2 ,... , où les variables peuvent être extensives ou intensives. Plusieurs de ces quantités sont d'une grande importance. Mentionnons, pour le cas d'un gaz avec une seule composante, la compressibilité isotherme κT = − 1 V ∂V ∂p , (111) T,N le coecient d'expansion thermique 1 α= V ∂V ∂T ∂S ∂T (112) p,N et la chaleur spécique à pression constante Cp = T . (113) p,N Choisissons comme point de départ l'énergie interne U (S, V, N ) que nous supposons deux fois continument diérentiable ; alors les dérivées secondes ne dépendent pas de l'ordre. Pour les trois paires de dérivées mixtes il existe donc les trois relations ∂ ∂V ∂U ∂S = ∂ ∂S ∂U ∂V ∂ ∂N ∂U ∂V = ∂ ∂V ∂U ∂N , ∂ ∂S ∂U ∂N = ∂ ∂N ∂U ∂S . , (114) Mais à l'aide des dénitions (25-27) des variables intensives on a les relations de Maxwell ∂T ∂V S,N ∂p − ∂N S,V ∂µ ∂S V,N ∂p = − , ∂S V,N ∂µ = , ∂V S,N ∂T = . ∂N S,V (115) (116) (117) Il est clair qu'à partir des autres potentiels thermodynamiques et à l'aide de la table 3.1 on trouve d'autres relations de Maxwell. 24 G T -p F H V S U Fig. 7 Le carré thermodynamique Mentionnons d'abord que les relations de la table 3.1 peuvent être mémorisées facilement U, F, G, H à l'aide du carré thermodynamique" où les potentiels ables naturelles S, V, T, −p. l'énergie libre de Helmholtz L'énergie libre de Gibbs sont anqués par les vari- Les signes des dérivées sont déterminés par les èches. Partant de F (T, V, N ) nous trouvons ∂S ∂p = . ∂V T,N ∂T V,N G(T, p, N ) implique ∂V ∂S =− , ∂p T,N ∂T p,N (118) (119) tandis que la relation de Maxwell dérive de l'enthalpie H(S, p, N ). ∂T ∂p = S,N ∂V ∂S (120) p,N A l'aide des relations de Maxwell (et de la relation de Gibbs- Duhem (38) si la dérivée par rapport au potentiel chimique µ apparaît aussi), on peut exprimer une dérivée quelconque, impliquant des potentiels et des variables thermodynamiques, en termes de κT , α et Cp . Comme exemple nous démontrons la relation importante Cp − CV = T V où CV α2 , κT (121) . (122) est la chaleur spécique à volume constant, CV = T ∂S ∂T V,N Pour la preuve de (121) nous considérons l'entropie d'une part comme fonction de d'autre part comme fonction de T, V, N . T, p, N , Nous écrivons donc S(T, p, N ) = S(T, V, N ) 25 avec V = V (T, p, N ) . (123) A l'aide de (113), (118) et (122) cette relation implique Cp CV = + T T ∂p ∂T V,N ∂V ∂T . (124) p,N D'autre part, à l'aide de (191) nous avons ∂V ∂T p,N = − donc ∂p ∂T ∂p ∂V V,N , = − ∂V ∂p (125) T,N ∂V ∂T p,N V,N ∂p ∂T = α . κT (126) T,N La relation (121) s'obtient alors facilement à l'aide de (124) et (126). L'expérience montre que la compressibilité est positive pour toutes les substances connues. La relation (121) implique alors que CV ≤ Cp . ◦ Pour le cas spécial de l'eau à 4 C la densité est maximale et le coecient d'expansion thermique α passe par zéro ; donc on a Cp = CV . Une autre grandeur importante est la compressibilité adiabatique 1 κS = − V ∂V ∂p . (127) S,N Elle se mesure à l'aide d'expériences de propagation du son, tandis que la compressibilité isotherme κT est déterminée en appliquant des pressions statiques. Les deux compressibilités sont montrées comme fonctions de la température pour NaCl dans Fig. 8 (selon Zemansky, Dittmann). D'une manière complètement analogue à la démonstration de (121) on montre κT − κS = T V α2 . Cp (128) Combinant (121) et (128) nous trouvons la relation intéressante CV κS = . Cp κT 26 (129) Fig. 8 Compressibilités adiabatiques et isothermes pour NaCl. 4 TRANSITIONS DE PHASES Le phénomène des phases diérentes d'un matériau, telles que les formes gazeuses, liq- uides et solides de l'eau, a été connu déjà dans l'antiquité. Un autre exemple, le magnétisme, a été connu en Chine à l'onzième siècle et décrit par Gilbert dans son livre De Magnete" à la n du seizième siècle. Au début du dix-neuvième siècle, Cagniard de la Tour découvrait (pc = 218 atmosphères, Vc = 3.2 cm3 par gramme et ◦ 374 C) ; au-delà de ce point, les phases liquides et gazeuses ne sont plus discernables. que l'eau possède un point critique Tc = Les premières théories des transitions de phase ont été développées par van der Waals vers la n du dix-neuvième siècle pour la transition gaz-liquide et par Weiss en 1907 pour la transition d'une phase paramagnétique" à une phase ferromagnétique". Ces théories de champ moyen" décrivent qualitativement les transitions de phase, mais font des prédictions quantitativement fausses pour le comportement près du point critique. En fait, l'expérimentateur belge Verschaelt découvrait autour de 1900 que la diérence entre les densités du liquide et du gaz ng n` − ng = const pour T très proche de (mais inférieur à) Tc , Tc − T Tc β avec un exposant critique" la théorie de van der Waals donne un exposant β = ture. Il trouvait qu'il existait une température β ≈ 0.34, tandis que h et de la tempéra- (appelée plus tard température de Curie) T > Tc , où le magnétisme disparaît si h tend vers zéro (paramagnétisme), T < Tc , où l'aimantation persiste pour h → 0 (ferromagnétisme). Curie réalisait entre l'aimantation M comme fonction de température et champ magnétique et la de densité n` − ng comme fonction de température et pression. La prédiction de la séparant une région d'une région diérence Tc (130) 1 2 . En 1895 Pierre Curie présentait sa thèse de doctorat sur le magnétisme en fonction du champ magnétique l'analogie n` varie comme 27 Fig. 9 p−V théorie de Weiss (pour diagramme pour CO2 (selon Thomas Andrews, 1863). h → 0), M = const Tc − T Tc β (131) 1 2 , n'a pas été conrmée par l'expérience, exécutée avec beaucoup de précision autour 1 de Tc après 1960, qui donne de nouveau β ≈ . Cette contradiction entre les théories de van 3 avec β= der Waals et de Weiss d'une part et les expériences d'autre part a été résolue autour de 1970 quand L.P. Kadano, K.G. Wilson et M.E. Fisher (et d'autres) montraient que très près de Tc les uctuations du paramètre d'ordre (aimantation à une échelle très longue ξ M ou diérence de densité n` − ng ) (longueur de corrélation) rendaient les théories de champ moyen inapplicables. 4.1 Equilibre de phases Jusqu'à ce point nous avons toujours supposé que la pression ), la température T et le nombre de moles N p (ou le champ magnétique h dénissent d'une manière unique l'état thermody- namique (le volume ou l'aimantation, l'énergie interne, l'entropie,. . .) d'un système simple. Or, dans des cas spéciaux certaines grandeurs, par exemple le volume ou l'aimantation, peuvent avoir plusieurs valeurs, comme la gure 9 le montre pour le cas de CO2 . A haute température le système se comporte comme un gaz idéal. A basse température et basse pression, on a toujours un gaz, à haute pression un liquide. Pour toutes ces parties du diagramme le volume est bien déni pour région, où pour p et T p, T donnés. Mais à basse température il existe une constants le volume varie d'une manière continue entre le volume du gaz et celui du liquide. Dans cette région les phases liquides et gazeuses coexistent. Le système entier est donc hétérogène, mais il consiste de deux phases homogènes qui se touchent et sont 28 Fig. 10 p−T diagramme en équilibre entre elles. Nous pouvons donc représenter le système comme un ensemble de deux sous-systèmes en équilibre entre eux et avec un réservoir de température T et de pression p. Il y a échange de particules entre les sous-systèmes, alors les potentiels chimiques doivent être les mêmes. Soit µ1 (p, T ) le potentiel chimique de la phase 1 et µ2 (p, T ) celui de la phase 2, alors on a la condition d'équilibre µ1 (p, T ) = µ2 (p, T ) . (132) La solution de cette équation détermine une courbe dans le plan (p, T ). Un système avec une phase de vapeur, une phase liquide et une phase solide a donc trois lignes de coexistence, la ligne de sublimation (solide-vapeur), la ligne de vaporisation (liquide-vapeur) et la ligne de fusion (solide-liquide). Un diagramme typique est montré dans la gure 10. Le point critique correspond au point C dans la gure 9. Si trois phases sont en équilibre, la condition µ1 (p, T ) = µ2 (p, T ) = µ3 (p, T ) dénit un point dans le plan (p, T ), (133) le point triple". 4.2 Généralisation pour chimistes Considérons un cas plus compliqué de r composants avec la relation fondamentale U = U (S, V, N1 , . . . , Nr ). Introduisant les quantités molaires xi = Ni /N , où xr où N= Pr i=1 Ni , u = U/N, s = S/N, v = V /N (134) et les fractions molaires on a la relation a été éliminé à l'aide de la u = u(s, v, x1 , . . . , xr−1 ) , Pr condition i=1 xi = 1. Choisissons (135) d'abord le cas de deux composants, par exemple un mélange de sel et d'eau dans les phases liquides 29 (`) et solides (s) pour une température T et une pression p données. La condition d'équilibre pour le premier composant est (`) (`) (s) (s) µH2 O T, p, xH2 O = µH2 O T, p, xH2 O , (136) tandis que la deuxième relation s'écrit (`) (`) (s) (s) µNaCl T, p, xH2 O = µNaCl T, p, xH2 O . Ces deux équations déterminent les fractions (`) xH 2 O et (s) xH 2 O . (137) S'il y a une troisième phase coexistante, par exemple une phase de vapeur, on obtient deux nouvelles équations pour une seule nouvelle variable (v) xH 2 O . On n'est donc plus libre de choisir p et T quelquonque, mais seulement une des deux variables. De la même façon on montre que pour quatre phases coexistantes aussi bien p et T doivent avoir des valeurs spéciques. La coexistence de cinq phases dans un système à deux composants est impossible. Ces résultats peuvent être généralisés à chimique de la phase (ν) µi ν r composants et m phases. Dans ce cas le potentiel r + 1 variables du i-ème composant sera une fonction de (ν) (ν) (ν) (ν) = µi (T, p, x1 , x2 , . . . , xr−1 ), i = 1, . . . , r, ν = 1, . . . , m . (138) (ν) m − 1 équations entre les µi pour i donné, au total r(m − 1) équations pour 2 + m(r − 1) variables. Le nombre de variables que l'on peut xer de façon arbitraire, c.-à-d. le nombre f de degrés de libertés thermodynamiques, est donc Il y aura f = 2 + m(r − 1) − r(m − 1) = 2 + r − m . C'est la (139) règle de phases de Gibbs. Pour les cas spéciaux de r = 2 et m = 2, 3 on retrouve les résultats dérivés plus haut. 4.3 Transitions de phase du premier ordre Pour simplier la discussion nous nous limiterons dès lors à un seul composant. Une transition de phase du premier ordre est un changement abrupt des propriétés en fonction d'un paramètre thermodynamique, comme par exemple dans la fusion, où un solide fait une transition à l'état liquide en fonction de la température. Pour une transition du premier ordre les deux états correspondent donc à deux points diérents dans l'espace des congurations thermodynamiques (pour une transition du deuxième ordre les deux états sont voisins au voisinage chaleur latente. Quand on chaue de la glace, la température augmente continment jusqu'au point de la transition). Un indice caractéristique pour une transition du premier ordre est la de fusion, où elle reste constante jusqu'à ce que toute la glace a fondu. Il faudra donc fournir de la chaleur pour accomplir la transition. A pression constante, la chaleur fournie est égale au changement de l'enthalpie, dH = T dS = δQ . Pour T constant l'intégration de l'état solide juste avant la transition (entropie liquide juste après la transition (entropie S2 ) (140) S1 ) à l'état donne la chaleur latente ` = ∆H = T (S2 − S1 ) , (141) et de même pour toute transition du premier ordre à pression et température constantes. La chaleur latente est donc directement liée à la diérence entre les entropies des deux phases ; 30 selon la nature de la transition la chaleur latente est appelée chaleur de fusion, de vaporisation ou de sublimation. Les lignes de séparation entre deux phases diérentes sont déterminées par les propriétés thermodynamiques des deux phases. Considérons les états d'une autre phase pour des pressions p, p + dp A, B d'une phase et les états et pour des températures T, T + dT A0 , B 0 sur la ligne de séparation. Alors les potentiels chimiques doivent être égaux pour un point donné, µA = µA 0 , (142) µ B = µB 0 . (143) D'autre part, les diérences des potentiels chimiques pour deux points diérents (ou des énergies libres de Gibbs molaires) sont µB − µA = −s dT + v dp , µB 0 − µ A 0 où s, s0 et v, v 0 0 (144) 0 = −s dT + v dp , (145) sont les entropies et volumes molaires des deux phases. Alors nous avons s dT − v dp = s0 dT − v 0 dp , d'où, à l'aide de (141), on obtient l'équation de (146) Clausius - Clapeyron ∆s ` dp = = dT ∆v T ∆v (147) Considérons comme exemple la transition liquide-solide. En général le volume molaire de l'état solide est plus petit que celui de l'état liquide, donc on a ∆v > 0 et dp/dT > 0. Une exception très importante est l'eau, où (à une pression pas trop élevée) le volume molaire du liquide est plus petit que celui de la glace. Le diagramme de phase pour H2 O est présenté dans la gure 11. On note en eet qu'il existe une région (la ligne qui sépare la glace I du liquide) où dp/dT < 0. Une transition du premier ordre (à p, T constant) est donc caractérisée par des changements d'entropie et de volume, c.-à-d. par des discontinuités dans les dérivées de l'énergie libre de 31 Fig. 11 Le diagramme de phase pour l'eau. Gibbs (voir Fig. 12). D'autre part dans la région de coexistence entre les deux phases on a ∂S Cp = T =∞, ∂T p 1 ∂V α = =∞, V ∂T p 1 ∂V =∞. κT = − V ∂p T (148) (149) (150) 4.4 Le modèle de van der Waals L'équation d'état suggérée en 1873 par J.D. van der Waals peut s'écrire p= RT a − 2. v−b v Elle est conçue comme extension de l'équation d'état du gaz idéal La constante b (151) pv = RT à des gaz réels. peut alors être attribuée au volume ni des particules, le terme a/v 2 à la diminution de la pression par l'attraction entre les particules (proportionnelle au carré de la densité des particules). La mécanique statistique fournit une analyse plus quantitative de l'équation de van der Waals, mais en n de compte elle se justie par son applicabilité à la transition gaz-liquide. L'équation d'état (151) a été introduite d'une façon phénoménologique ; rien ne garantit donc qu'elle satisfasse aux conditions de stabilité. La relation (151) est illustrée dans la gure 13 pour plusieurs températures. Pour une température élevée on approche le comportement du gaz idéal ; mais à basse température il existe une région où en contradiction avec le critère de stabilité κT ≥ 0. 32 ∂p ∂v T > 0, Ces segments instables des isothermes Fig. 12 Energie libre de Gibbs et ses dérivées près d'une transition du premier ordre. Fig. 13 Isothermes du modèle de van der Waals. 33 Fig. 14 Isotherme particulière du modèle de van der Waals. Fig. 15 Potentiel chimique du modèle de van der Waals à température constante. ne peuvent donc pas être physiques". L'équation d'état (151) détermine à une fonction de la température près l'énergie de Gibbs molaire, c.-à-d. le potentiel chimique. En fait, à l'aide de la relation de Gibbs-Duhem (1.56) dµ = −s dT + v dp nous trouvons pour T (152) constant Z µ= où ϕ(T ) v dp + ϕ(T ) , (153) est une constante d'intégration". Une isotherme particulière est représentée dans la gure 14a. Interchangeant les axes L'intégration de v(p) p et v nous obtenons l'intégrand v(p) de la gure 14b. de la gure 14b donne le potentiel chimique de la gure 15. Les états stables sont ceux avec le plus petit potentiel de Gibbs. Une évolution quasi-statique (ou plutôt une suite dense d'états d'équilibre) suivra donc les congurations A, B, C, D, O, 34 Fig. 16 Isotherme physique et construction de Maxwell. Q, R, S et l'isotherme physique sera celle de la gure 16. Les points O et D sont déterminés par la relation µ D = µO ou par Z O v(p) dp = 0 . (154) D On voit facilement que cette condition peut être interprétée géométriquement comme égalité des surfaces I et II de la gure 16. Cette méthode de construire l'isotherme physique à partir d'une équation d'état produisant une région instable est appelée construction de Maxwell. Comparant les gures 16 et 9 nous constatons que la théorie de van der Waals combinée avec les critères de stabilité thermodynamiques reproduit bien la transition gaz-liquide. Sur la ligne de coexistence (OD dans la gure 16) les fractions molaires du liquide x` et du gaz xg sont données par où v` et vg v = x` v` + xg vg , (155) x` + xg = 1 , (156) sont les volumes molaires des deux phases homogènes à pression p et température T. 4.5 Transitions du deuxième ordre : universalité Dans la section 4.3, nous avons distingué deux types de transitions de phases. Pour une transition du premier ordre, les premières dérivées d'un potentiel thermodynamique approprié sont discontinues. Pour une transition du deuxième ordre, les premières dérivées sont continues, tandis que les deuxièmes dérivées sont discontinues ou divergentes à l'approche du point critique. Une transition liquide-gaz est en général du premier ordre, sauf au point critique où elle est du deuxième ordre. Dès lors, nous nous limiterons aux transitions du deuxième ordre, qui sont caractérisées par des singularités au point critique. Jusqu'à ce point, nous avons décrit les changements de phases d'une part d'un point de vue purement thermodynamique, d'autre part à l'aide d'une équation d'état phénoménologique (équation de van der Waals). Avec l'outil de la mécanique statistique, nous devrions être en mesure de traiter les transitions de phases en partant d'un Hamiltonien microscopique. Malheureusement, il est très dicile de traiter la région près du point critique à l'aide de la mécanique statistique, et, comme nous verrons plus tard, des approximations simples donnent 35 souvent des réponses erronnées. D'autre part, le comportement critique est en général très sim- universalité ple, ne dépendant guère des détails de l'Hamiltonien microscopique. Cet aspect d' des phénomènes critiques a été élucidé seulement récemment avec les travaux de Kadano, Fisher, Wilson et d'autres (pour plus de détails voir S.-K. Ma, Modern Theory of Critical Phenomena, Benjamin 1976, ou M. Le Bellac, Des Phénomènes Critiques aux Champs de Jauge, Inter Editions 1990). Une manifestation particulière des phénomènes critiques a été découverte déjà il y a un siècle. Il s'agit de l'opalescence critique, c.-à-d. d'une diusion de la lumière accrue près du point critique. Cette observation montre qu'il existe des uctuations prononcées de longues longueurs d'onde dans le système. Pour la transition liquide-gaz ces uctuations sont associées à l'apparition de régions étendues de densité plus élevée alternant avec des régions plus diluées. La longueur caractéristique de ces régions, la longueur de corrélation, joue un rôle primordial dans les théories modernes des phénomènes critiques. Elle diverge au point critique. Un concept très utile, qui a déjà été mentionné dans le chapitre 5, est celui du paramètre d'ordre qui distingue les deux phases. Il est facile de l'identier pour une transition ferromag- nétique où il s'agit simplement de l'aimantation spontanée : celle-ci est non-nulle au-dessous d'une température critique Tc et zéro au-delà de Tc . On connaît aujourd'hui une grande variété de phénomènes critiques. Les mieux étudiés sont sans doute les transitions de phase magnétiques. Mentionnons aussi les transitions structurales dans les solides qui sont associées à un changement de symétrie (par exemple d'une symétrie cubique à une symétrie tetragonale). Les alliages subissent des transitions ordre-désordre, la plupart des métaux fait une transition à une phase supraconductrice à basse température, l'hélium liquide devient superuide. Récemment, la transition métal-isolant qui peut avoir lieu en fonction de changements de température, pression ou composition d'un matériau, a suscité un intérêt particulier. Le concept de l'universalité implique que des modèles simples peuvent décrire les aspects essentiels d'une transition du deuxième ordre. Néanmoins certaines propriétés pertinentes doivent être représentées par ces modèles, en particulier la dimensionnalité spatiale (on peut réaliser, au moins approximativement, des matériaux en couches ou même unidimensionnels, d = 4, 5, . . . ∞ ou même des valeurs nond = 4−ε par exemple), de la nature du paramètre d'ordre (scalaire pour la transition théoriquement on peut considérer des dimensions intégrales, liquide-gaz, vecteur pour le ferroaimant isotrope), de la symétrie (du réseau cristallin) et de la portée des forces (courte portée pour des potentiels du type sphères dures ou Lennard-Jones ou échange, longue portée pour des forces dipolaires). C'est pourquoi des modèles représentés en termes de variables magnétiques" peuvent décrire parfaitement une transition qui n'a rien à voir avec le magnétisme, telle que la transition ordre-désordre dans un alliage. 36 Appendice A : Stabilité Le deuxième axiome postule que l'entropie est maximale dans l'espace des états compatibles avec les contraintes du système. Considérons un système divisé par une paroi diathermane, mais immobile et imperméable, en deux sous-systèmes identiques avec les mêmes volumes et les mêmes nombres de moles V N. Soit au début l'énergie interne égale à U pour les deux sous-systèmes. Permettons alors un ux d'énergie de sorte que les états naux correspondent à U − ∆U et U + ∆U . L'énergie totale est restée invariante, mais l'entropie a augmenté, puisque S(U + ∆U ) + S(U − ∆U ) > 2S(U ). (157) Le système répartira donc spontanément son énergie interne d'une façon inégale entre les deux sous-systèmes, et l'état original du système est instable. La condition de stabilité est donc la concavité de l'entropie, S(U + ∆U, V, N ) + S(U − ∆U, V, N ) ≤ 2S(U, V, N ) . Pour ∆U → 0 (158) cette relation devient ∂2S ∂U 2 ≤ 0. (159) V,N Les mêmes arguments s'appliquent à une paroi mobile, mais adiabatique et imperméable. Le critère de stabilité est la concavité de l'entropie par rapport à V, S(U, V + ∆V, N ) + S(U, V − ∆V, N ) ≤ 2S(U, V, N ), et pour (160) ∆V → 0 ∂2S ∂V 2 ≤ 0. (161) U,N Pour une paroi diathermane et mobile, mais imperméable, la condition de stabilité devient S(U + ∆U, V + ∆V, N ) + S(U − ∆U, V − ∆V, N ) ≤ 2S(U, V, N ) . Dans la limite ∆U → 0, ∆v → 0 (162) nous obtenons ∂2S ∂2S ∂2S 2 (dU ) + 2 dU dV + (dV )2 ≤ 0 , ∂U 2 ∂U ∂V ∂V 2 (163) d'où, à l'aide de (159), ∂2S ∂S dU + dV 2 ∂U ∂U ∂V 2 " ∂2S ∂2S + − ∂V 2 ∂U 2 ∂2S ∂U ∂V 2 # Cette inégalité doit être satisfaite pour des valeurs quelconques de donc le critère nécessaire ∂2S ∂2S − ∂V 2 ∂U 2 ∂2S ∂U ∂V 37 (dV )2 ≥ 0 . dU et dV (164) ; nous obtenons 2 ≥ 0. (165) Notons que les conditions de stabilité locale (159), (161) et (165) sont plus faibles que les critères de stabilité globale (158), (160) et (162). Ces derniers signient que la famille de plans S = S(U, V, N ) tangentiaux à la surface se trouve entièrement au-delà de cette surface. Les critères de stabilité peuvent évidemment aussi être formulés à partir de la relation fondamentale U = U (S, V, N ) et du principe de minimum de l'énergie interne. Le critère de stabilité globale est U (S + ∆S, V + ∆V, N ) + U (S − ∆S, V − ∆V, N ) ≥ 2U (S, V, N ), (166) et les critères locaux sont ∂2U ≥0 , ∂S 2 ∂2U ∂2U ∂2U ≥ 0 , − ∂V 2 ∂S 2 ∂V 2 ∂2U ∂S∂V 2 ≥ 0. (167) Il est intéressant de noter que, si ces expressions sont strictement positives, alors les critères locaux garantissent en même temps que les transformations de Legendre sont uniques. En eet, pour l'énergie libre de Helmholtz, B devient et pour l'enthalpie, F (T, V, N ) = U − S∂U/∂S , 2 ∂ U 6= 0 , ∂S 2 V,N la relation (204) de l'appendice (168) H(S, p, N ) = U − V ∂U/∂V , on a 2 ∂ U 6= 0, ∂V 2 S,N tandis que pour l'énergie libre de Gibbs, ∂U ∂U ∂S , ∂V ∂ ∂(S, V ) G = U − S∂U/∂S − V ∂U/∂V , ∂2U ∂2U − ∂S 2 ∂V 2 = (169) ∂2U ∂S∂V nous trouvons 2 6= 0 . (170) Des arguments analogues à ceux utilisés pour l'entropie et pour l'énergie interne montrent que ∂2F ∂V 2 ∂2H ∂S 2 ≥ 0, (171) ≥ 0, (172) T,N p,N en accord avec les principes de minimum pour ces deux potentiels. Les deuxièmes dérivées par rapport aux variables intensives s'obtiennent à l'aide de (167), (171), (172) et des relations de la table 3.1 : ∂2F ∂T 2 ∂2H ∂p2 =− V,N =− S,N ∂S ∂T ∂V ∂p =− V,N 1 ∂T ∂S V,N S,N = − 38 ∂p ∂V 1 = − = − S,N 1 ∂2U ∂S 2 ≤ 0, (173) V,N 1 ∂2U ∂V 2 ≤ 0, S,N (174) ∂2G ∂p2 ∂2G ∂T 2 =− T,N ∂V ∂p =− p,N T,N ∂S ∂T = − ∂p ∂V 1 = − T,N 1 =− ∂T ∂S p,N p,N = − 1 ∂2F ∂V 2 ≤ 0, T,N 1 ∂2H ∂S 2 (175) ≤ 0, (176) p,N Les potentiels thermodynamiques sont donc des fonctions convexes par rapport aux variables extensives et des fonctions concaves par rapport aux variables intensives. Les conditions de stabilité (167), (171) et (172) impliquent la positivité des compressibilités κT , κS Cp , CV . En eet, on a 2 ∂ U 1 T = ≥ 0, = ∂S 2 ∂S V,N CV ∂T et des chaleurs spéciques (177) V,N ∂2U ∂V 2 ∂2F ∂V 2 S,N T,N ∂2H ∂S 2 = − = − = p,N ∂V ∂p ∂V ∂p 1 = 1 ≥ 0, V κS (178) = 1 ≥ 0, V κT (179) = T ≥ 0. Cp S,N 1 T,N 1 ∂S ∂T p,N (180) A l'aide de (121) et de (128) on trouve alors les inégalités suivantes pour un système stable, Cp ≥ CV ≥ 0, (181) κT ≥ κS ≥ 0. (182) La notion de stabilité joue un rôle important dans la théorie des transitions de phases, comme nous verrons dans le chapitre 6. 39 Appendice B : La transformation de Legendre Les dérivées partielles de fonctions ∂fi ∂xj = lim ε→0 x1 ,...,xj−1 ,xj+1 ,...,xn fi (x1 , . . . , xn ), i = 1, . . . , m, sont dénies par fi (x1 , . . . , xj + ε, . . . xn ) − f (x1 , . . . , xj , . . . , xn ) . ε Cette notion souligne que ce sont les variables constantes dans cette variation. Pour n = m s1 , . . . , xj−1 , xj+1 , . . . , xn le Jacobien (183) qui sont considérées est le déterminant des dérivées partielles, ∂(f1 , . . . , fn ) = ∂(x1 , . . . , xn ) Pour une fonction ∂f1 ∂xn ··· . . . . . . ∂fn ∂x1 ∂fn ∂xn ··· . (184) f (x1 , . . . , xn ) on a ∂f ∂(f, x2 , . . . , xn ) = . ∂x1 x2 ,...,xn ∂(x1 , x2 , . . . , xn ) Pour des fonctions composées le Jacobien est Si la fonction ∂f1 ∂x1 gi (y1 , . . . , yn ), où les variables yj (185) sont des fonctions yj (x1 , . . . , xn ), ∂(g1 , . . . , gn ) ∂(g1 , . . . , gn ) ∂(y1 , . . . , yn ) = . ∂(x1 , . . . , xn ) ∂y1 , . . . , yn ) ∂(x1 , . . . , xn ) yi (x1 , . . . , xn ), i = 1, . . . , n, (186) a une inverse, on a ∂(x1 , . . . , xn ) = ∂(y1 , . . . , yn ) ∂(y1 , . . . , yn ) ∂(x1 , . . . , xn ) −1 . (187) En thermodynamique on a souvent un nombre de variables qui ne sont pas toutes indépendantes, mais satisfont à des relations du type fi (x1 , . . . , xn ) = 0 , i = 1, . . . , m, avec m < n. Selon le (188) théorème des fonctions implicites on peut résoudre les équations (188) de manière unique si m des variables x1 , . . . , x n , appelons-les x̃1 , . . . , x̃m , peuvent être choisies telles que ∂(f1 , . . . , fm ) 6= 0 . ∂(x̃1 , . . . , x̃m ) Les n−m autres variables, appelons-les x01 , . . . , x0n−m , (189) sont alors indépendantes, et on peut écrire x̃i = x̃i (x01 , . . . , x0n−m ) , i = 1, . . . , m. (190) On trouve la relation importante ∂ x̃i ∂x0j ! =− ∂(f1 ,...,fm ) ∂(x̃1 ,...,x̃i−1 ,x0j ,x̃i+1 ,...,x̃m ) x01 ,...,x0j−1 ,x0j+1 ,...,x0n−m Considérons comme exemple ∂(f1 ,...,fm ) ∂(x̃1 ,...,x̃m ) n = 3, x1 = x, x2 = y , x3 = z , f (x, y, z) = 0 . 40 etm = 1, . (191) c.-à-d. une relation (192) Soit x01 = ∂f ∂x y,z y, x02 = 6= 0, z x̃1 = x. ce qui correspond à (189) avec Les variables indépendantes sont et (191) devient ∂x ∂y ∂x ∂z = − z = − y ∂f ∂y x,z , (193) ∂f ∂x y,z ∂f ∂z x,y . (194) ∂f ∂x y,z Ces relations s'obtiennent aussi facilement à l'aide de la diérentielle de (192), Pour dz = 0 ∂f ∂X + y,z ∂f ∂y dy + x,z ∂f ∂z cette équation donne (193), tandis que pour f (x1 , . . . , xn ) (195) dy = 0 on établit (194). critères pour un point d'extrémum Il est aussi utile de rappeler les maximum). Soit dz = 0 . x,y deux fois continument diérentiable. Un point x◦1 , . . . , x◦n est ∂ 2 f /(∂xi ∂xj ) ∂f /∂xi = 0, i = 1, . . . , n et si la matrice n = 2 cette matrice est dénie positive (négative) un point de minimum (maximum) si est dénie positive (négative). Pour (minimum ou si et seulement si " et La méthode des ∂2f ∂2f − ∂x2 ∂y 2 ∂2f ∂x∂y 2 # (x0 , y0 ) > 0 (< 0) ∂2f > 0 (< 0). ∂x2 (196) multiplicateurs de Lagrange est souvent utilisée s'il existe des conditions supplémentaires gi (x1 , . . . , xn ) = 0, i = 1, . . . , m. (∂gi /∂xj ) soit m. ~ n . Si (x◦ , . . . , x◦ ) est un n − m dans l'espace R n 1 f (x1 , . . . , xn ) sur cette surface, alors on a : (197) Supposons que le rang de la matrice Jacobienne Alors (197) dénit une surface de dimension point d'extrémum de la fonction gi (x◦1 , . . . , x◦n ) = 0 , i = 1, . . . , m m X ∂gj ◦ ∂f + λj (x1 , . . . , x◦n ) = 0, i = 1, . . . , m, ∂xi ∂xi (198) (199) j=1 pour des nombres particuliers λ1 , . . . , λ m (les multiplicateurs de Lagrange). Considérons une fonction deux fois diérentiable y = f (x1 , . . . , xm ; u1 , . . . , un ) , (200) qui satisfait à la relation ∂ ∂f ∂f ∂x1 , . . . ∂xm ∂(x1 , . . . , xm ) 41 6= 0 . (201) Selon le théorème des fonctions implicites les équations zk = ∂f , k = 1, . . . , m, ∂xk (202) peuvent être résolues de manières unique, xi = gi (z1 , . . . , zm ; u1 , . . . , un ) . (203) La transformée de Legendre est alors dénie par Lf (z1 , . . . , zm ; u1 , . . . , un ) = m X xk k=1 où les xk ∂f −f, ∂xk (204) sont à remplacer par les équations (203), c.-à-d. Lf (z1 , . . . , zm ; u1 , . . . , un ) = m X gk (z1 , . . . , zm , u1 , . . . , un )zk k=1 − f (g1 (z1 , . . . , zm ; u1 , . . . , un ), . . . , gm (z1 , . . . , zm ; u1 , . . . , un ); u1 , . . . , un ) . (205) Alors on trouve ∂ Lf (z1 , . . . , zm ; u1 , . . . , un ) = gk (z1 , . . . , zm ; u1 , . . . , un ) ∂zk = xk , ∂ ∂f Lf (z1 , . . . , zm ; u1 , . . . , un ) = − . ∂uk ∂uk (206) (207) A l'aide de (201), (202) et (206) on a ∂ ∂Lf ∂Lf ∂z1 , . . . , ∂zm ∂(z1 , . . . , zm ) = ∂(x , . . . , xm ) 1 6= 0 . ∂f ∂f ∂ ∂x , . . . , ∂xm 1 Alors, en appliquant la transformation de Legendre à la fonction originale, L Lf = f . Lf , (208) on retrouve la fonction Il est important de noter que la transformée de Legendre d'une fonction contient la même information que la fonction originale. Pour une interprétation géometrique voir Callen, section 5-2. 42