Sénégal - Revue de Médecine Vétérinaire

Résidus d’antibactériens dans le foie et le
gésier de poulets de chair dans les régions de
Dakar et de Thiès (Sénégal)
F.A. ABIOLA1*, M.M. DIOP1, A. TEKO-AGBO1, B. DELEPINE2, F.C. BIAOU1, B. ROUDAUT2, V. GAUDIN2
et P. SANDERS2
1
2
Laboratoire de Contrôle des Médicaments Vétérinaires de l’EISMV BP 5 077 DAKAR, Sénégal.
Laboratoire d’Etudes et de Recherches sur les Médicaments Vétérinaires et les Désinfectants AFSSA BP 90 203 35 302 FOUGERES, France.
* auteur chargé de la correspondance : [email protected]
RÉSUMÉ
SUMMARY
Dans le but de contribuer à la sécurité chimique des aliments, une étude
préliminaire a été réalisée sur les résidus d’anti-infectieux dans le foie et le
gésier de poulets de chair dans les régions de Dakar et de Thiès (Sénégal).
Trente-sept échantillons de foie ou de gésier ont été prélevés dont 23 dans
les marchés et 14 dans les exploitations avicoles. Ils ont été analysés par des
méthodes microbiologiques et physico-chimiques au Laboratoire d’Etudes
et de Recherches sur les Médicaments Vétérinaires et les Désinfectants de
l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Aliments (AFSSA). Soixantecinq pour cent et 36% des produits analysés, respectivement dans les marchés et dans les exploitations, contenaient des résidus d’antibactériens. Il
ressort de cette analyse que 14% des échantillons contenaient des résidus de
tétracyclines, 8% des résidus de sulfamides, 41% des résidus de nitrofuranes et 5% du chloramphénicol (gésiers uniquement). Sur les 37 échantillons analysés, 20 échantillons (soit 54%) avaient des teneurs en résidus
très largement supérieures aux limites maximales de résidus (LMR). Cette
étude montre ainsi la présence de résidus de substances interdites (chloramphénicol et nitrofuranes) dans les denrées d’origine animale destinées à la
consommation humaine.
Antimicrobial agents residues in liver and gizzard of broilers in the
areas of Dakar and Thiès (Sénégal). By F.A. ABIOLA, M.M. DIOP, A.
TEKO-AGBO, B. DELEPINE, F.C. BIAOU, B. ROUDAUT, V. GAUDIN and P. SANDERS.
Mots-clés : Sénégal - résidus - anti-infectieux - foie gésier.
Introduction
Au Sénégal, les statistiques sur la consommation des
médicaments vétérinaires ne sont pas précises. En outre, peu
d’investigations sur la présence des résidus des médicaments
vétérinaires dans les denrées animales ont été menées, rarement publiées et ne sont pas intégrées dans un véritable programme de surveillance. BIAGUI [11] a mis en évidence
dans son étude sur des produits aviaires destinés à la
consommation, la présence d’inhibiteurs de croissance bactérienne dans 9,6% des fermes suivies dans la région de
Dakar qui produit annuellement 6 millions de poulets de
chairs [25]. Dans une autre étude menée par la Direction de
l’élevage du Sénégal et l’Institut Pasteur de Dakar en 2003,
27,4% d’échantillons de viandes contenaient des résidus
d’anti-infectieux [32]. CARDINALE et al. [14] avaient mis
en évidence 25% de Salmonella et 77% de Campylobacter
sur des fientes de poulets de chair à Dakar. Les efforts actuellement perceptibles sur la sécurité sanitaire des aliments ne
concernent que les produits exportés vers les pays du nord
A preliminary study was realised to check antimicrobial agents residues
in the broilers in the areas of Dakar and Thiès (Senegal). Thirty seven
samples of liver or gizzard were collected, 23 in the markets and 14 in the
poultry farms. They were analysed by microbiological and physico-chemistry methods at the Laboratory of Control and Researchs on Veterinary Drugs
and Disinfectants of the French Food Security and Sanitary Agency
(AFSSA). Antibiotic-residue positive samples were identified in the products collected respectively in the markets (65 %) and in the poultry farms
(36 %). The results showed that 14% of the samples were contaminated by
tetracyclins, 8% by sulfamids, 41% by nitrofuran residues and 5% by chloramphenicol residues (gizzard samples only). Within the 37 analysed
samples, 20 samples (54%) contained residues at concentrations exceeding
the permissible maximum residue limit (MRL). The results showed that the
animal products for human consumption contained banned residues (chloramphenicol and nitrofurans).
Keywords : Senegal - residues - antimicrobial - liver - gizzard.
(les produits halieutiques et horticoles essentiellement), le
consommateur local étant laissé pour compte. Or les résidus
de médicaments vétérinaires peuvent compromettre la sécurité sanitaire des denrées et mettre en danger la santé du
consommateur [5]. Leur présence met en évidence une mauvaise utilisation des médicaments vétérinaires notamment le
non-respect du temps d’attente.
L’Ecole Inter - Etats des Sciences et Médecine
Vétérinaires (EISMV) de Dakar avait opté d’aborder la problématique de la pharmacocinétique [1, 2, 3] et des résidus
de médicaments vétérinaires [8] dans le but d’assurer une
bonne couverture sanitaire des animaux et de contribuer à
l’amélioration de la sécurité chimique des aliments.
La présente étude a été menée en collaboration avec le
Laboratoire d’Etudes et de Recherches sur les Médicaments
Vétérinaires et les Désinfectants de l’Agence Française de
Sécurité Sanitaire des Aliments (AFSSA) en France et le
Laboratoire de Contrôle des Médicaments Vétérinaires
(LACOMEV) de l’EISMV de Dakar. Le but de cette étude
est de permettre un transfert de compétences et de technoloRevue Méd. Vét., 2005, 156, 5, 264-268
RÉSIDUS D’ANTIBACTÉRIENS DANS LE FOIE ET LE GÉSIER DE POULETS DE CHAIR
gies d’un laboratoire de référence expérimenté au Nord vers
un laboratoire du Sud.
Les résidus de 4 groupes de molécules médicamenteuses
ont été ciblés (nitrofuranes, sulfamides, tétracyclines et chloramphénicol) en raison de leur utilisation importante et non
contrôlée dans les élevages avicoles au Sénégal [10, 11, 32]
et de la méconnaissance par les utilisateurs, de la pharmacocinétique de ces composés. Plusieurs de ces substances
(chloramphénicol et nitrofuranes) ne sont pas autorisées, au
niveau international, pour un usage chez les animaux dont
les denrées sont destinées à la consommation humaine [19,
21, 30] ce qui justifie leur recherche. Diverses méthodes de
dépistage, de quantification et d’identification ont été utilisées pour la recherche de ces résidus dans les muscles du
gésier et dans le foie de poulets de chair.
265
les désinfectants de l’AFSSA en France, laboratoire communautaire de référence pour les résidus d’antibiotiques. Les
méthodes sont validées et utilisées en routine.
MATÉRIELS D’ANALYSE MICROBIOLOGIQUE
Les matériels sont constitués des souches bactériennes
tests ensemencées sur des géloses appropriées, coulées en
boîtes de Pétri : Bacillus cereus ATCC 11778 sur gélose pH
6 (Bc 6), Bacillus stearothermophilus ATCC 10149 sur
gélose pH 7 (Bst 7), Escherichia coli ATCC 11303 sur gélose
pH 8 (Ec 8), Bacillus subtilis B.G.A. sur gélose pH 7,2 (Bs
7,2) et Kocuria varians ATCC 9341 sur gélose pH 8 (Kv 8).
MATÉRIELS D’ANALYSES PHYSICO-CHIMIQUES
Méthodes de dépistage
Matériel et méthodes
Deux méthodes de dépistage ont été utilisées pour la
recherche de tétracyclines et de sulfamides :
SITES ET PÉRIODE DE PRÉLÈVEMENT
- la méthode microbiologique « Screening Test for
Antibiotic Residues (STAR) » [20]. Cette méthode mise au
point pour le muscle et le lait a été adaptée et appliquée aux
16 échantillons de foie et aux 21 échantillons de gésier ;
L’ étude a été réalisée dans les régions de Dakar (Dakar
ville, Pikine, Rufisque et Malika) et de Thiès (ville de Thiès)
(Sénégal). Les prélèvements ont été faits de février à mai
2003 sur 16 sites (4 marchés et 12 exploitations). Dans chacun des marchés, les prélèvements ont été réalisés à 3
reprises et ont concerné des vendeurs différents.
Au total 37 échantillons ont été prélevés, 23 sur les marchés et 14 dans les exploitations : 21 gésiers (11 issus des
marchés et 10 des exploitations) et 16 foies (12 issus des
marchés et 4 des exploitations. Le foie et le gésier n’ont
jamais été prélevés sur le même animal.
ECHANTILLONNAGE
Les tissus prélevés sont le gésier ou le foie. Dans les
exploitations et marchés choisis au hasard (tirage au sort
parmi 115 exploitations et 8 marchés), les responsables
d’abattage ont été préalablement informés de l’étude et leur
accord a été obtenu pour réaliser les prélèvements pendant la
phase d’éviscération.
Les échantillons ont été prélevés à l’aide de ciseaux et de
pinces à dents de souris. Ils ont été directement enveloppés
dans du papier aluminium, mis dans des sachets de congélation en plastique puis compactés et identifiés. Les échantillons ont été conservés dans une glacière avec des conservateurs de glace pour le transport jusqu’au LACOMEV où
ils ont été conservés à une température inférieure à -20°C. Ils
ont été ensuite acheminés au laboratoire d’essai de l’AFSSA
(France) par avion dans des caisses isothermes en polyester
avec des conservateurs de froid. Lors du débarquement, il a
été vérifié que les échantillons n’avaient pas été décongelés
avant d’être transférés de nouveau dans les congélateurs du
laboratoire.
ANALYSE DE LABORATOIRE
Les analyses ont été réalisées au laboratoire de référence
d’études et de recherches sur les médicaments vétérinaires et
Revue Méd. Vét., 2005, 156, 5, 264-268
- la méthode de détection des résidus de sulfamides dans le
muscle d’animaux de boucherie par chromatographie sur
couche mince (CCM) [7] a été appliquée aux 21 échantillons
de gésier.
Méthodes d’identification et de dosage
Une méthode de quantification des sulfamides dans le
muscle par CLHP [35] a été utilisée pour analyser les échantillons suspectés contenir des sulfamides lors du dépistage.
La méthode de détection et d’identification des résidus d’antibiotiques dans les denrées basée sur la chromatographie
liquide couplée à la spectrométrie de masse en tandem
(CL/SM-SM) [16], [17] a été appliquée aux échantillons suspectés contenir des tétracyclines et des sulfamides. La
méthode de recherche et de confirmation de la présence de
résidus de chloramphénicol dans les matrices d’origine biologique basée sur la chromatographie gazeuse couplée à la
spectrométrie de masse (CG/SM) [13] a été appliquée aux 21
échantillons de gésier. La méthode de détermination de résidus de 4 nitrofuranes (furazolidone, furaltadone, nitrofurazone, nitrofurantoïne) dans les tissus est basée sur la
recherche des métabolites liés par CL/SM-SM [28]. Cette
méthode a été appliquée aux 16 échantillons de foie et 21
échantillons de gésier.
Résultats
TESTS DE DÉPISTAGE
Sur 37 échantillons analysés par dépistage microbiologique selon la méthode STAR, 6 ont été suspectés contenir
des résidus de tétracyclines (soit 16%), 2 des résidus de sulfamides (soit 5%), 7 des résidus de macrolides et/ou de bêta
- lactamines (soit 19%) et 3 des résidus d’aminocyclitols
266
ABIOLA (F.A.) ET COLLABORATEURS
TABLEAU I — Résultats de l’analyse microbiologique des échantillons de foie (n=16) ou de gésiers (n=21) prélevés dans
des marchés ou des exploitations avicoles des régions de Thiès et de Dakar (Sénégal)
* : FAO/OMS [19].
** : Molécules interdites dans les denrées animales destinées à la consommation humaine [19, 20, 30].
*** : Molécules non ciblées par cette étude et n’ont pas fait l’objet d’une analyse de confirmation.
(soit 8%). Deux échantillons de gésier sur 21 ont été suspectés contenir des résidus de sulfamides (soit 9%) à partir d’un
dépistage de résidus de sulfamides par CCM. Ces deux
échantillons sont différents des deux autres révélés par la
méthode STAR. Les tests de dépistage ont donc permis de
suspecter la présence de résidus de sulfamides dans 4 échantillons, de tétracyclines dans 6 échantillons, de résidus de
macrolides et ou bêta - lactamines dans 7 échantillons et
d’aminocyclitols dans 3 échantillons (Tableau I).
La présence de résidus de sulfamides a été confirmée par
CLHP dans 3 échantillons sur les 4 suspectés. Les molécules
identifiées sont la sulfadimérazine à une teneur de 63 µg/kg
et la sulfadiazine dont la teneur a varié de 114 à 188 µg/kg
selon les échantillons. La présence de résidus de tétracyclines a été confirmée par CL/SM-SM dans 5 échantillons
parmi les 6 échantillons suspectés contenir des résidus de
tétracyclines et les molécules identifiées ont été l’oxytétracycline dont les teneurs ont varié de 77 à 294 µg/kg et la
tétracycline à une teneur de 376 µg/kg. Cette méthode a également permis de confirmer la présence de résidus de sulfamides (sulfadiazine et sulfadimérazine) dans 3 échantillons
sur les 4 suspectés contenir ces résidus, et celle de traces de
résidus de chloramphénicol a été mise en évidence dans un
échantillon de gésier sur 21 (soit 5%).
La méthode CL/SM-SM a révélé la présence de résidus de
nitrofuranes dans 4 échantillons de gésiers sur 21 (soit 19%),
11 échantillons de foie sur 16 (69%). Les résidus de nitrofuranes ont été retrouvés sous la forme de 3-amino-5 morpholinomethyl-1,3-oxazolidin-2-one (AMOZ), métabolite lié de
la furaltadone. Les teneurs ont varié de 2 à 77 µg/kg dans les
gésiers et de 0,7 à 243 µg/kg dans les foies. Les échantillons
suspectés contenir des macrolides, bêta - lactamines et aminocyclitols n’ont pas été analysés pour confirmation.
Les différentes méthodes d’analyse ont montré la présence
de résidus d’antibactériens dans 11 gésiers sur 21 (soit 52%)
et 13 foies sur 16 (soit 81%). Ces échantillons proviennent
aussi bien des marchés que des exploitations. Ainsi, 65%
(15 sur 23) des échantillons provenant des marchés et 36% (5
sur 14) des échantillons provenant des exploitations étaient
contaminés par des résidus d’antibactériens. Les échan-
tillons sont soit monocontaminés (16 sur 37) avec une prédominance en résidus de nitrofuranes (10 sur 37, soit 27%)
ou polycontaminés (8 sur 37) associant les résidus de nitrofuranes, de tétracyclines, de chloramphénicol, avec des résidus suspects de macrolides et/ou bêta - lactamines et d’aminocyclitols (Tableau II). Certains de ces échantillons avaient
des teneurs de résidus dépassant les LMR (Limites
Maximales de Résidus) ou contenaient des résidus de molécules interdites dans l’Union Européenne pour une utilisation chez les animaux producteurs de denrées alimentaires.
(Tableau I).
TABLEAU II — Nature de la contamination des échantillons de foie (n=16) ou
de gésiers (n=21) prélevés dans des marchés ou des exploitations avicoles
des régions de Thiès et de Dakar (Sénégal) ; N= nombre d’échantillons.
Discussion
Ce travail a concerné un sondage des résidus des médicaments vétérinaires dans les produits aviaires dans les régions
de Dakar et de Thiès. Le choix de ces régions pour ce sondage a été motivé par le fait qu’elles représentent la principale zone d’aviculture du Pays [29]. Les prélèvements ont
été effectués de février à mai 2003, période des fêtes religieuses (Tamkharite, Magal de Touba, Pâques et Maouloud)
où la demande et la production de produits aviaires sont
importantes.
Revue Méd. Vét., 2005, 156, 5, 264-268
RÉSIDUS D’ANTIBACTÉRIENS DANS LE FOIE ET LE GÉSIER DE POULETS DE CHAIR
LA NATURE RELATIVEMENT IMPORTANTE D’ÉCHANTILLONS POSITIFS
Après analyse, un nombre important d’échantillons contenaient des résidus de médicaments vétérinaires, avec 11
gésiers contaminés sur 21 (soit 52%), 13 foies contaminés
sur 16 (soit 81%). Toutes les molécules ciblées ont été identifiées et quantifiées aussi bien dans le foie que dans le
gésier.
Quarante et un pour cent des échantillons analysés contenaient des résidus de furaltadone sous forme d’AMOZ à des
teneurs variant de 0,7 à 243 µg/kg. L’utilisation des molécules de la famille des nitrofuranes est interdite chez les animaux producteurs de denrées alimentaires dans l’Union
Européenne du fait de leur profil toxicologique ne permettant pas de fixer une dose journalière admissible. Ces observations se rapprochent du cas du Maroc où KRIBEL [24] a
obtenu 92% des échantillons d’œufs et de chairs de poulet
contenant des résidus de nitrofuranes avec des teneurs plus
basses allant de 0,6 à 31,6 µg/kg. De même des traces de
chloramphénicol ont été retrouvées dans 5% des échantillons
de gésiers analysés bien qu’il s’agisse également d’un produit interdit au niveau international. Ce résultat est comparable à celui observé en France où des traces de chloramphénicol (0,3 µg/kg) ont été mises en évidence dans les abattoirs
de poulets de chair [34]. Huit pour cent (8%) des échantillons analysés contenaient des résidus de sulfamides dont
les teneurs ont été comprises entre 63 et 188 µg/kg. Les sulfamides détectés ont été la sulfadimérazine et la sulfadiazine.
Pour les sulfamides, les concentrations observées (188
µg/kg) dépassaient la LMR fixée par la FAO/OMS [19] qui
est de 100 µg/kg. Quant aux tétracyclines, 14% des échantillons analysés étaient positifs, les teneurs obtenues allaient
de 77 à 376 µg/kg, donc avec des concentrations parfois
supérieures à la LMR qui est de 100 µg/kg [19]. Certains
échantillons ont été suspectés contenir des macrolides et/ou
des bêta- lactamines (19%) ou des aminocyclitols (8%) mais
n’ont pas fait l’objet de confirmation au cours de l’étude. Ces
résultats démontrent une diversité d’usage en terme de molécules et le recours à des associations d’antibiotiques. La présence de résidus a été relevée aussi bien dans les marchés
que dans les exploitations avicoles. En effet, sur les marchés,
15 échantillons sur 23 prélevés (soit 65%) contenaient des
résidus d’antibactériens contre 5 échantillons sur 14 (soit
36%) dans les exploitations.
Des études similaires ont été réalisées en France par VALDEBOUZE et al., [37] qui avaient trouvé dans les viandes de
poulets vendus dans le commerce un taux de 10% de résidus
d’antibiotiques à activité antibactérienne. HUBERT et al.,
[22] aux Etats-Unis avaient obtenu un taux de 25% de résidus d’antibactériens dans les fientes de poulets avant abattage. Plus récemment, AL-GHAMDI et al., [9], en recherchant des résidus de tétracyclines dans les produits aviaires
dans la province orientale en Arabie Saoudite avaient trouvé
69,7% de résidus d’antibiotiques dans les poulets de chair, ce
qui se rapproche de la proportion rencontrée dans notre étude
(65%).
POURQUOI Y A-T-IL DES CAS POSITIFS ?
La présence de ces résidus d’antibactériens est probableRevue Méd. Vét., 2005, 156, 5, 264-268
267
ment liée à un traitement des animaux suivi d’un délai d’attente insuffisant [12, 15]. Le délai d’attente est défini comme
le délai à observer entre la dernière administration d’un
médicament et la commercialisation des denrées produites
par l’animal traité. Le respect de ce délai garantit que la
teneur des résidus de médicaments dans les aliments sera
conforme à la LMR pour ce médicament vétérinaire [19]. Le
délai d’attente est donc déterminé pour chaque formulation
de médicaments vétérinaires et dépend du produit, de la
posologie et de la voie d’administration. Le respect de ce
temps d’attente suppose donc un enregistrement de la prescription du médicament, un suivi de son utilisation et un arrêt
des traitements avant l’abattage. Une enquête réalisée en
2002 par BIAGUI [11] a révélé l’utilisation anarchique des
produits même interdits dans les exploitations avicoles dans
la zone des Niayes par un personnel non qualifié.
Dans le cas des substances interdites, la recherche analytique ne se focalise pas sur la quantification mais sur la capacité de détecter et de confirmer ces substances ou leurs métabolites. Les méthodes utilisées dans cette étude sont extrêmement sensibles avec des limites de détection inférieures
ou égales à 1 µg/kg permettant de détecter la présence de ces
résidus dès que ces produits sont utilisés et plusieurs jours ou
semaines après la dernière utilisation. Ces molécules interdites dans de nombreux pays se retrouvent sur le marché des
pays en développement du fait du manque de contrôle ou de
surveillance des pratiques d’utilisation des médicaments
vétérinaires par les services officiels.
Tous ces constats mettent en relief l’intérêt du vœu émis
par ABIOLA [6] en 1986 pour une mise en place d’un cadre
réglementaire et législatif sur les médicaments vétérinaires
en Afrique en général et le problème des résidus en particulier.
RISQUES LIÉS À LA CONSOMMATION DE CES DENRÉES
La consommation de ces denrées contaminées par ces
molécules est source potentielle de risques toxicologique [5,
31], allergique [23, 26] et microbiologique [4, 18, 27, 36].
Leur mise en évidence reflète un mauvais usage des antibiotiques, substances indispensables à la médecine. Outre ces
risques sanitaires, la présence des résidus de médicaments
vétérinaires dans les denrées d’origine animale est une
entrave économique importante dans les échanges internationaux avec les nouvelles règles sanitaires et phytosanitaires de l’OMC [33].
Conclusion
En conclusion, ce travail a d’abord permis l’acquisition
d’un savoir faire en matière de résidus de médicaments vétérinaires à l’EISMV. Il a également révélé que les produits
aviaires issus de la zone des Niayes (Dakar et Thiès) au
moment de l’étude, présentaient des résidus de divers antiinfectieux dans 52% des gésiers et 81% des foies dépassant
parfois les limites maximales de résidus. Ces résultats non
représentatifs de la situation générale sont cependant alarmants et reflètent une mauvaise utilisation des antibiotiques
en élevage. Cette mauvaise utilisation a pour conséquence,
268
un risque accru de sélection de bactéries zoonotiques résistantes aux antibiotiques telles que Salmonella et
Campylobacter, pouvant causer des infections graves chez
l’homme. Cette situation nécessite une étude plus poussée au
plan national avec un échantillonnage plus large tant en
nombre d’échantillons qu’en variétés de matrices et la mise
en place d’une communication vers les utilisateurs destinés à
améliorer l’usage de ces médicaments en élevage.
Remerciements
Nous remercions Dr DIENG (Sangalkam), Dr P. A.
DIALLO (Thiès), S.GAUTIER (AFSSA), Y. BLOT
(AFSSA), Dr K.AKODA (LACOMEV) et Mr ELH. M.
NIANG (LACOMEV) pour leur participation généreuse et
très précieuse à cette étude.
Nous tenons également à remercier le Dr Abdoulaye
Bouna NIANG, Directeur de l’élevage du Sénégal et le Dr
Pierre DESNOYERS, Directeur de l’Ecole Nationale
Vétérinaire de Toulouse pour leur soutien de tous ordres.
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