Mémoire de l`ACEF de Québec

Transcription

Mémoire de l`ACEF de Québec
ACEF de Québec
570, rue du Roi
Québec G1K 2X2
Tél : (418) 522-1568
Fax : 522-7023
Association coopérative
d’économie familiale de Québec
Québec le 10/06/99
Me Véronique Dubois,
Secrétaire, Régie de l’énergie
Tour de la Bourse, C.P. 001
800, place Victoria, 2e étage, bureau 255,
Montréal, H4Z 1A2
Objet : Plaidoirie écrite de l’ACEF de Québec dans l’audience sur les principes
réglementaires en matière de tarif de transport.
Voici le mémoire, en 15 copies, de l’intervenante ACEF de Québec concernant l’audience
sur les principes réglementaires en matière de tarif de transport (R-3405-98).
Nous vous avons aussi fait parvenir, par courrier électronique, copie du document en
format Word 6, pour Macintosh. En cas de problème faites nous le savoir.
Nous vous annonçons aussi par la présente que nous demanderons le remboursement
des frais rattachés à notre participation à cette présente audience.
Vous remerciant de votre attention,
Richard Dagenais, recherchiste ACEF de Québec
________________________________
_______________
ACEF de Québec
570, rue du Roi
Québec G1K 2X2
Tél : (418) 522-1568
Fax : 522-7023
Association coopérative
d’économie familiale de Québec
Plaidoirie finale écrite de
l’ACEF de Québec :
Audience sur les principes réglementaires en
matière de tarif de transport d’électricité
(R-3405-98)
9/06//99
2
1) Maintien de la position et des recommandations de l’ACEF de Québec présentées lors
de sa preuve écrite et de sa preuve verbale :
L’ACEF réitère sa conviction que sa position et ses recommandations clairement énoncées
dans sa preuve écrite ou verbale, défendent le mieux les intérêts des consommateurs
résidentiels d’électricité au Québec.
Donc l’ACEF de Québec recommande grosso modo pour les principes réglementaires en
matière de tarifs de transport :
1) L’utilisation de l’année témoin historique (année financière complétée) afin de fonder
l’établissement des tarifs d’électricité sur la base des coûts réels, vérifiés et validés.
L’augmentation des revenus requis autorisés correspond à l’augmentation de revenu requis
entre l’année historique la plus récente et celle précédente, avec ajustement possible sur
justification spéciale seulement (dont un facteur de gains de productivité).
2) Pour demeurer consistant avec notre recommandation concernant l’année témoin, la base
tarifaire considérée sera aussi historique et associée à l’année témoin historique.
La méthode de calcul de la base tarifaire sera à préciser : il s’agit soit de la moyenne de début
ou fin d’année soit de la moyenne de treize soldes mensuels : il faut choisir la méthode qui se
rapproche le plus de la valeur effective considérant les facteurs qui font varier à l’intérieur d’une
année l’évaluation de la base tarifaire et considérant aussi la disponibilité de données
mensuelles fiables permettant de juger du bien fondé du calcul de la base tarifaire.
Un test pour choisir la meilleure méthode de calcul possible serait d’appliquer
rétrospectivement à la base de tarification les taux de financement et d’amortissement et de
comparer le résultat avec le coût réel (historique) du capital d’H.Q.
Le SPSI-CERQ suggérait d’ailleurs de comparer la base de tarification calculée sur 13 soldes
mensuels avec les données historiques.
4) Nous proposons que l’année tarifaire soit décalée de l’année financière et témoin :
idéalement l’année tarifaire devrait débuter le 1er juillet, pour permettre de disposer d’assez de
temps pour analyser la proposition tarifaire d’H.Q. et de décider des tarifs à partir des données
financières annuelles complètes, vérifiées et consolidées.
Le début de l’année financière au 1er mai pourrait être maintenu si H.Q. peut soumettre pour la
mi-février ses résultats financiers vérifiés et que la cause tarifaire puisse se tenir de février à
3
avril pour décision début mai par la Régie, autrement l’ajustement tarifaire au 1er juillet nous
apparaît préférable. Le témoin expert du RNCREQ. M. Bradford, soutenait (Volume 3, page 18)
que les causes tarifaires aux USA duraient plus longtemps que ce qu’Hydro-Québec prévoyait.
Il faudra prévoir au moins pour les 2 ou 3 premières causes une durée entre 6 à 10 mois.
5) Le activités associées à la fourniture d’électricité (de la production à la vente au détail)
devront rester réglementées. H.Q. devra restreindre le plus possible ses activités à son mandat
premier ( fournir l’électricité aux clientèles québécoises au plus bas coût possible).
Les activités non réglementées tolérées devraient être en lien direct avec le mandat premier;
elles ne seront autorisées que si H.Q. prouve que leur réalisation est dans le meilleur intérêt de
la population du Québec (critère d’analyse bénéfice-coût pour la population) et pas juste pour la
clientèle d’H.Q..
Le principe d’asymétrie (l’utilité vend au prix maximum possible à ses affiliées et inversement
achète au prix minimum possible de ses affiliées) utilisé aux États-Unis devra être appliqué en
regard du transfert d’actif entre H.Q. et ses affiliés, en tenant compte des difficultés liées à
l’absence possible de prix de marché et à l’existence d’une valeur patrimoniale associée aux
actifs d’H.Q. (voir preuve de l’expert Jacques Bellemare pour le ROEE).
La comptabilisation au coût complet devra être appliquée pour les activités non réglementées
réalisées au sein d’H.Q., mais prioritairement celles-ci devraient se faire par des entités
juridiquement autonomes d’H.Q. Il faudra évaluer la pertinence et les avantages d’utiliser les
prix de transfert (prix de cession, soit "transfer pricing" en anglais) pour évaluer certaines
activités non réglementées. De même que des codes de conduite clairs devront être élaborés
pour régir les échanges entre H.Q. et ses affiliés.
Enfin il faudra juger au cas par cas des demandes faites pour déterminer les activités non
réglementées, une fois un ensemble de critères et de principes adéquatement élaborés, afin de
bien classifier et séparer les activités réglementées et non réglementées pour éviter toute
possibilité d’interfinancement au détriment de la clientèle réglementée et toute concurrence
déloyale.
Pour le détail de notre position et de nos recommandations, que nous maintenons dans leur
intégralité, nous vous renvoyons à notre preuve écrite ou orale.
Argumentation en défense des propositions de l’ACEF de Québec :
L’ACEF de Québec considère que les règles, principes et critères retenus par la Régie de
l’énergie doivent tenir compte des caractéristiques économiques et sociales propres au
4
Québec. Il faut définir les règles du jeu dans le but premier de maximiser le bien-être collectif de
la population québécoise, sans copier automatiquement ce qui se fait ailleurs.
Nous aimerions faire ici une mise au point qui touche les principes 1 et 4 : certains intervenants
appuient leur position sur le principe qui veut que les revenus requis couvrent exactement les
coûts dans l’année témoin.
D’une part il faut se rappeler que la Régie peut définir et appliquer des mécanismes incitatifs
pour amener l’entreprise à améliorer sa productivité ou performance et mieux répondre aux
besoins de la population. Ne pas couvrir l’ensemble des frais prévus par l’entreprise dans
l’année projetée est un bon moyen de la forcer à améliorer sa productivité. Si l’on garantit à
l’entreprise des revenus qui couvrent les coûts estimés par l’entreprise cela ne l’incite pas à
améliorer sa performance.
Secundo il faut rester conscient que nous parlons ici de coûts propres à une entreprise opérant
en monopole et nous considérons que ces coûts sont plus élevés que si l’entreprise opérait
sous concurrence. Nous pensons qu’un objectif fondamental de la réglementation économique
des utilités publiques est de rapprocher le plus possible les coûts d’un monopole des coûts
inférieurs que devrait amener une réelle concurrence.
C’est ainsi que nous considérons qu’un délai entre l’année témoin et l’année financière est un
moyen valable de limiter la hausse des coûts et d’encourager les utilités publiques à être plus
productives et à réduire leurs coûts. Cela permet ainsi de rapprocher un peu plus les coûts du
monopole des coûts “vraiment concurrentiels” ce qui respecte selon nous un des mandats de la
Régie présenté à l’A. 5 de la LRE qui indique “que la Régie tient compte de l’équité au plan
individuel et collectif et assure la conciliation entre l’intérêt public, la protection des
consommateurs et le traitement équitable des distributeurs”.
Pour nous tant que les coûts et les profits d’une utilité publique, donc ses revenus requis,
seront supraconcurrentiels on ne peut dire que l’on ait atteint l’équité ni que l’intérêt des
consommateurs soit bien protégé.
Principe 1 :
Nous ne disons pas que l’année témoin historique est une solution supérieure en tout point,
contrairement à ce que laisse supposer H.Q. à l’endroit de l’année témoin projetée.
Mais nous soutenons que l’année témoin historique protégera mieux la clientèle d’H.Q. et
évitera certains biais qui incitent à accroître les prévisions de dépenses et revenus du
monopole d’utilité publique (tel que discuté dans notre preuve écrite aux pages .
5
H.Q. et son témoin Jaccard (Notes sténo, Vol. 1, p. 33) reconnaissent qu’il n’y a pas de preuve
empirique ou théorique prouvant la supériorité de l’année témoin projetée. Selon Jaccard
l’étude serait très complexe à réaliser. Le choix de l’année témoin relève plus des préférences
des régisseurs, en fonction du confort et de ce qui doit être fait. Face à ce choix, il se déclare
plutôt indifférent, ne voyant pas le choix en terme de supériorité d’une méthode relativement à
l’autre. Selon M. Jaccard la distinction entre l’année historique et l’année projetée est souvent
faussée et exagérée, et dans tous les cas il faut regarder les données historiques.
Il serait toutefois possible selon nous d’effectuer une étude historique comparative des
juridictions aux États-Unis, selon le type d’année témoin utilisée.
John Todd, témoin expert d’ARC- Options Consommateurs, en lien avec les 3 conditions
minimales à respecter pour pouvoir utiliser l’année témoin projetée (Vol. 3, page 37), indique
(Vol. 3, page 40) qu’il sera préférable d’utiliser l’année témoin historique si l’on ne dispose pas
de données historiques suffisantes pour valider les données projetées. Aussi pour vérifier les
tendances (trends) il faut selon Todd au moins de 3 à 5 années historiques présentées dans
une forme consistante et comparable.
Selon le témoin expert du RNCREQ, M. Bradford (Volume 3, page 17) l’année témoin
historique a bien fonctionné dans huit des neuf décades de réglementation des utilités
publiques aux États-Unis.
Les conditions des années 70, en créant un déséquilibre revenus-dépenses chez les utilités,
ont remis en cause l’année historique (forte inflation, besoins importants de capitaux pour
construire des générateurs nucléaires et réduire la dépendance à l’endroit du pétrole); mais ces
conditions ayant disparu, les Commissions qui ont conservé l’année témoin historique, après
l’avoir adapté dans les années 70 et 80, n’ont pas de raisons de la remettre en question, de
sorte que Bradford doute de l’affirmation du Edison Electric Institute à l’effet que 6 Commissions d’État aux États-Unis viseraient sérieusement à instaurer l’année témoin projetée : les
Commissions ont d’autres problèmes plus importants à régler (comme au Massachussets).
M. Bradford (Volume 3, page 18) considère que le consensus en faveur de l’année témoin
historique est toujours présent aux USA considérant les défauts importants de l’année projetée
tels que décrits dans le texte de Kahn de 1978 et d’Harrison de 1979 1.
Selon Bradford il est plus long et fastidieux d’analyser les données projetées et les
méthodologies de normalisation/prévision, que d’utiliser l’année historique.
1
Plus grande complexité administrative, perte de l’incitatif à une plus grande productivité en enlevant le délai
régle-mentaire, protection contre l’inflation des actionnaires des utilités publiques aux dépens de la clientèle (alors
que les investisseurs et citoyens ordinaires n’ont pas cette protection), tendance d’ajustement tarifaire
contracyclique.
6
Selon Bradford (Vol. 3, page 23) en théorie l’année projetée et l’année historique ajustée
devraient apporter le même résultat si tout est appliqué parfaitement. Mais dans les faits la
méthode de l’année projetée est plus complexe à administrer pour arriver au même résultat, elle
implique des étapes additionnelles et laisse place à plus de risque de manipulation et d’erreur.
Bradford y voit aussi une différence conceptuelle importante : l’année projetée protège plus les
actionnaires que les clientèles réglementées de l’inflation, ce qui a eu des conséquences
infortunées en facilitant le financement des centrales nucléaires : on en a alors trop construit
(des coûts échus importants doivent maintenant être supportés), puis leur coût s’est avéré plus
élevé que les centrales au gaz. Il faudrait selon Bradford y penser deux fois avant d’avantager
les actionnaires aux dépens des clientèles, d’autant pour une Régie qui débute à neuf.
Philippe Raphals (Volume 3, page 24) ajoute aussi qu’en pratique le fardeau de la preuve est
inversé avec l’année projetée : les projections étant formulées en un ensemble intégré qui reste
sous le contrôle de l’utilité, les intervenants doivent y trouver et prouver les failles au niveau
des hypothèses ou des méthodologies de normalisation et prévision. Par contre pour l’année
témoin historique, l’utilité doit prouver le bien fondé des ajustements qu’elle propose
spécifiquement (de même selon nous les techniques de normalisation peuvent être validées
plus aisément en comparant les données historiques réelles correspondantes).
Enfin de l’opinion de M. Bradford (Volume 3, page 24) M. Kahn et Harrison devraient avoir la
même opinion que celle qu’ils ont donné avant les année 80, mais Harrisson ne devrait pas
proposer que la Commission de l’État de New-York reviennent à l’année historique considérant
l’inertie et les coûts que cela impliquerait. L’économiste Kahn pourrait aussi, selon Bradford
recommander d’utiliser l’année historique considérant que les conditions économiques sont
revenues à la normale.
Nous considérons donc quant à nous que la Régie de l’énergie devrait requérir l’utilisation de
l’année témoin historique pour mieux protéger les consommateurs d’électricité et mieux
contrôler les coûts d’H.Q.. Nous maintenons donc notre argumentaire soumis dans notre preuve
écrite et résumé dans notre preuve verbale.
Il a été dit que les progrès dans le domaine informatique ont permis de réduire les coûts pour
effectuer les projections et les valider; cet argument tient aussi pour la correction, la
normalisation et l’ajustement à partir de l’année témoin historique; en sorte que les délais et les
complications que l’on associe au processus tarifaire de Gaz Métropolitain, d’avant 1981,
seraient aussi quant à nous, amoindris significativement maintenant.
Enfin nous aimerions faire une dernière mise au point concernant les petites entreprises et les
coûts liés aux projections et à leur validation. Il est vrai que les PME disposent maintenant
d’outils informatiques leur permettant de faire plus facilement des prévisions comptables,
d’ailleurs les organismes communautaires font couramment cet exercice maintenant.
D’une part il est reconnu que le fardeau relatif de la réglementation (soit le % des dépenses de
7
l’utilité publique servant à défendre la cause de l’utilité et à rembourser les frais réglementaires)
est plus important pour les PME et les petites juridictions que pour les grandes entreprises et
plus importantes juridictions.
D’autre part lorsque nous parlons des coûts pour effectuer les prévisions nous pensons
d’abord aux prévisions de l’économie et de la demande spécifiques au marché de l’utilité en
cause, à partir d’enquêtes et de modèles économétriques parfois très complexes, ce que peu
d’entreprises ont les moyens de réaliser efficacement par elles-mêmes.
Si l’on permet d’utiliser les prévisions économiques réalisées par des organismes de prévision
reconnus cela permet effectivement de faciliter les choses et de réduire les coûts; mais cela
laisse place à une plus grande marge d’erreur si on utilise des données agrégées plutôt que
des données spécifiques au marché de l’utilité publique. Il y a donc là un “trade-off” à prendre
en compte.
Principe 2 :
À priori on peut penser qu’une moyenne de 13 soldes mensuels (fin de mois) est préférable à la
valeur de milieu d’année ou à une moyenne de début et fin d’année, mais il y a diverses
considérations à prendre en compte avant de trancher la question.
Nommément pour juger de la validité du calcul de la base de tarification il faudrait (selon
l’expert du ROEE Jacques Bellemare) disposer de données mensuelles historiques, courantes
et projetées, concernant les divers éléments de coûts et de capitalisation.
Secundo les taux d’intérêt et de change variant dans l’année, de même le patron des mises en
opération et des retraits d’actifs variant selon les saisons, il faut selon nous prouver (comme le
suggère à titre de vérification le SPSI-CERQ) que le calcul de la base de tarification demeure
bien en lien avec les vrais coûts de capital supportés par H.Q..
Cette preuve reste quant à nous à faire avant que nous nous prononcions définitivement quant
à la méthode idéale soit qu’on l’applique aux données historiques comme on le suggère, soit
aux données projetées comme le propose H.Q..
Nous rappelons que l’utilisation de l’année historique permet d’utiliser les vrais coût réalisés de
financement et d’amortissement (associés aux actifs reconnus prudemment acquis et utiles)
pour établir les revenus requis, et qu’il ne reste qu’à appliquer un taux de rendement autorisé
aux actifs propres d’H.Q. pour fixer les profits. Nous considérons que le coût de financement est
plus variable et difficilement prévisible, ce qui milite selon nous en faveur de l’année témoin
historique et d’une base de tarification historique plutôt que projetée.
8
Principe 4 :
L’expert Jaccard (Vol. 1, p. 55) a déclaré avoir mal perçu en premier lieu la proposition d’ajuster
les tarifs au 1er mai, mais comme les gens peuvent confondre l’augmentation de leur facture qui
est due à la température et l’augmentation qui est due à la hausse tarifaire, alors il considère
qu’ajuster les tarifs le 1er mai pourrait réduire la confusion.
Quant à nous, nous maintenons notre proposition d’ajuster les tarifs préférablement au premier
juillet (ou au 1er mai si l’on dispose de suffisamment de temps pour bien traiter les causes
tarifaires) et de récupérer le changement de revenu requis dans l’année tarifaire complète.
H.Q. a proposé lors de la dernière journée d’audience une solution de rechange 2 pour pallier
2
Cette dernière proposition d’H.Q. diffère de la proposition initiale du cavalier sur 12 mois de John Todd ; ce
dernier reconnaissait que son cavalier sur 12 mois amènerait une violation du principe qui veut que l’on équilibre
dans l’année témoin les revenus requis et les dépenses, car pour John Todd les revenus du cavalier de janvier à
avril de l’année suivante n’étaient pas comptabilisés dans l’année témoin. J’ai d’ailleurs présenté des simulations
de ce modèle initialement proposé par M. Todd dans le deuxième tableau de notre preuve soumise sous la cote
ACEF-2.
9
aux difficultés de son mécanisme d’ajustement tarifaire : soit un cavalier qui s’applique sur 12
mois, de mai à avril suivant, mais dont les revenus sont comptabilisés dans l’année témoin
(année financière finissant en décembre). En terme de revenu requis cela équivaut à appliquer
un cavalier sur 8 mois, mais en terme tarifaire cela équivaut à un cavalier sur 12 mois.
Par exemple si pour une année donnée les revenus requis doivent augmenter de 5%, et bien
l’application d’un cavalier sur 12 mois, à partir de mai, implique une augmentation tarifaire de
7%. Comme les revenus du cavalier de janvier à avril de l’année suivante sont comptabilisés
dans l’année témoin, alors s’il y a augmentation ou réduction du revenu requis l’année suivante
il faudra à nouveau appliquer un cavalier pour compenser pour l’excédent ou le manque de
revenu de janvier à avril de l’année suivante. C’est en ce sens que l’application risque de
devenir une pratique permanente, du fait que l’on veut par ce mécanisme récupérer la variation
du revenu requis dans l’année témoin, du point de vue comptable. De plus nous appréhendons
le fait qu’H.Q. demande une compensation (équivalente à son taux de rendement souhaité) sur
les sommes tirées du cavalier de janvier à avril de l’année suivante.
Enfin nous croyons que l’application d’un cavalier peut être générateur d’une croissance
supérieure des coûts et des tarifs : une fois appliquée un cavalier, cela peut inciter H.Q. à
augmenter les dépenses pour maintenir dans le futur la surcharge spécifique au cavalier.
Nous présentons en annexe des cas de simulation du modèle de cavalier proposé par H.Q., ce
qui montre bien que le cavalier risque de devenir une réalité permanente selon nous, tout en
impliquant des hausses tarifaires plus fortes en période de hausse soutenue des coûts d’H.Q.
Pour nous l’application d’un cavalier sur 12 mois n’est pas aussi simple administrativement que
ce que laisse entendre John Todd (Volume 3, page 44) : d’une part il faudra qu’H.Q. soumette
des prévisions de demande adéquates pour les quatre premiers mois de l’année qui suit l’année
témoin, d’autre part cela retardera le processus de fermeture réglementaire, qui selon John
Todd (Volume 3, page 43) peut être acceptable considérant le manque d’historique et les
difficultés d’évaluer les prévisions dans les 1eres années de réglementation.
H.Q. avait aussi proposé d’utiliser un compte de frais reporté pour solutionner les problèmes
soulevés par son mécanisme d’ajustement tarifaire : par exemple si une augmentation de
revenus requis de 5% implique une augmentation tarifaire de 8%, et bien les revenus du 3%
d’augmentation tarifaire excédentaire seraient plutôt comptabilisés dans un compte de frais
reportés, portant intérêt à un taux équivalent au taux de rendement d’H.Q., pour être l’année
suivante compensés par une augmentation tarifaire. C’est en ce sens que nous disons que le
compte de frais reportés ne fait que déplacer le problème dans le temps.
10
Il a aussi été proposé, pour modérer les ajustements tarifaires (proposition de M. Bellemare,
témoin expert du ROEE), de modifier certaines dépenses flexibles comme les dépenses
d’amortissement : certes cela pourrait permettre de décaler dans le temps, mais seulement à
court terme, une hausse (ou baisse, ce qui est selon nous peu probable) tarifaire importante.
Mais d’une part il y a des règles comptables précises concernant les dépenses d’amortissement
(afin de baser ces dépenses sur la dépréciation réelle du capital) pour éviter que l’on joue de
manière arbitraire avec ce type de dépense; d’autre part cela revient quant à nous à appliquer
un compte de frais reportés, car tôt ou tard les dépenses d’amortissement devront être
réajustées.
Enfin nous revenons rapidement sur le mécanisme d’ajustement tarifaire traditionnel d’H.Q..
Si on regarde par exemple la proposition tarifaire d’H.Q. pour 1996 on voit très bien que
l’entreprise évaluait l’augmentation en % de ses charges entre 1995 et 1996 (année projetée),
soit 1,7%, et aussi visait un certain niveau de rendement, mais en faisant ouvertement des
compromis pour ne pas hausser trop rapidement les tarifs et pour ne pas détériorer sa situation
concurrentielle. L’entreprise déterminait donc un taux d’augmentation acceptable des revenus
puis des tarifs, soit 2,2% (avec la hausse de certains frais connexes), qui étaient ajustés au
premier mai pour une année complète.
Ainsi en 1995 H.Q. prévoyait une augmentation des charges de 5,5% et demandait une hausse
tarifaire de 1,4% (avec la hausse de certains frais connexes).
En conclusion on peut dire qu’H.Q. exigeait rarement une hausse tarifaire pour atteindre la
totalité de ses revenus requis dans l’année témoin, elle évaluait un taux d’augmentation
acceptable de ses revenus, considérant la concurrence etc., et de là s’en suivait la hausse
tarifaire appliquée sur une année entière à partir du mois de mai.
Donc lorsqu’H.Q. dit que le mécanisme d’ajustement tarifaire qu’elle propose ici est équivalent à
son mécanisme d’ajustement tarifaire traditionnel, il nous faut nuancer et corriger cette
affirmation.
De plus il faut bien voir que la procédure d’analyse et d’évalution appliquée par le
gouvernement du Québec, bien que non clairement définie, diffère de celle d’H.Q., car en 10
ans, de 1987 à 1996 inclusivement, H.Q. n’a obtenue la hausse qu’elle souhaitait que deux fois,
ce même si H.Q. déclarait déjà faire des compromis, par rapport aux revenus requis ou cibles,
dans ses demandes tarifaires.
Principe 5 :
Nous considérons qu’H.Q. a tout intérêt à présenter un ensemble de critères d’identification et
de séparation minimaliste et incomplet pour mieux pouvoir passer à travers les mailles du filet
réglementaire.
11
Lorsqu’H.Q. invoque la défense des intérêts de sa clientèle pour défendre cette proposition,
pour nous c’est du marketing; c’est le mandat de la Régie de défendre les consommateurs et
d’assurer que les activités d’H.Q. ne laissent pas place à des subsides croisés ni à de la
concurrence déloyale.
Nous pensons que les véritables objectifs que poursuit H.Q. à ce chapitre sont :
- d’une part obtenir le plus de marge de manoeuvre dans le cadre légal et réglementaire actuel
pour diversifier ses activités et déréglementer le plus d’activités possibles afin de maximiser ses
profits;
- d’autre part établir les bases des modifications réglementaires et légales futures pour pouvoir
réduire le panier de services réglementés et s’affranchir de contraintes qui limitent sa
profitablité et l’expansion de ses revenus.
Conscients de cet agenda nous pensons qu’il faille apporter tout de suite des correctifs et
pallier aux manques du modèle d’encadrement proposé par H.Q..
Nous pensons comme la majorité des intervenants que la définition de marché concurrentiel
proposé par H.Q. et son témoin, M. Baladi, est inadéquate : un marché concurrentiel en est un
où la concurrence est réelle, donc comprenant effectivement plusieurs joueurs significatifs, et
basée sur des règles du jeu claires et équitables.
Autrement si l’on se limite à la définition d’H.Q. à l’effet qu’un marché concurrentiel en est un
qui est contestable, ce lorsque un ou plusieurs joueurs peuvent venir concurrencer le
monopole, sans le concurrencer actuellement, nous sommes convaincus que cela ira à
l’encontre des intérêts des consommateurs, qui dans les faits n’auront pas de véritable choix et
seront dépendants de l’entreprise monopolistique.
Un monopole non réglementé est toujours pire qu’un monopole réglementé comme le déclare
M. El Ramly, et entre deux solutions imparfaites il faut au moins choisir la moins pire.
Enfin nous considérons que la réglementation économique est complémentaire à la législation
anti-trust, et contrairement à ce que laisse entendre M. Jaccard la loi canadienne sur la
concurrence ne permet pas de pallier à tous les problèmes liés à l’existence de monopoles :
dans la mesure où les sociétés d’état n’y sont pas assujetties au même titre que les entreprises
privées et qu’au Canada cette loi ne possède pas les mêmes pouvoirs que la loi anti-trust
américaine.
Ainsi une fois un monopole implanté de fait, sans manoeuvres anticoncurrentielles, la loi
canadienne sur la concurrence est à peu près inapplicable; il faut alors recourir à la
réglementation économique pour contrôler les monopoles et protéger les consommateurs.
Quant au reste nous maintenons ce que nous avons soumis dans notre preuve écrite ou orale.
12
Conclusion
Nous avons dans ce document cherché à compléter notre preuve écrite ou orale, en revenant
sur les opinions et idées émises lors de l’audience tenue au mois de mai 1999, au lieu de
reprendre l’ensemble de notre argumentaire.
Même si la position que défend l’ACEF de Québec peut paraître à certains “dépassée, voire
rétrograde” nous pensons qu’une analyse approfondie des enjeux et des comportements d’une
entreprise monopolistique nous conduit à juste titre aux propositions que nous avons défendues
sur les mécanismes d’ajustement tarifaire et le modèle d’encadrement des activités
réglementées et non réglementées, tout cela afin d’assurer un meilleur contrôle des coûts, des
profits et des risques, liés aux activités d’H.Q. ou de ses filiales, ainsi qu’une meilleure
protection des droits et intérêts des consommateurs.
Nous avons formulé des propositions qui sont consistantes et relativement simples
d’application; ce ne sont pas des solutions parfaites mais elle demeurent préférables selon
nous à ce que propose H.Q. mais dans son propre intérêt.
La Régie pourra toujours décider “en fonction du nombre” mais nous pensons que nous avons
présenté des arguments crédibles et sérieux qui viennent appuyer la preuve de d’autres
intervenants; par exemple, en regard du principe 1, nous avons présenté des arguments qui
complètent ceux défendus par le RNCREQ.
Nous rappelons à la Régie que si elle tranchait en faveur de l’année témoin projetée
comme base d’examen des ajustements tarifaires :
a) nous nous objectons formellement à ce que cela se fasse sans l’implantation préalable
de comptes stabilisateurs et des mécanismes incitatifs pour encourager H.Q. à améliorer ses
prévisions, rationaliser ses plans de dépenses et à accroître sa productivité. Pour nous il ne
s’agit pas de se limiter à constater les erreurs de prévision, il faut aussi les corriger considérant
que le monopole est en position de force relativement aux consommateurs;
b) il faudra contre-vérifier les données prévisionnelles avec les données historiques,
normalisées et corrigées au besoin, exiger des justifications et des corrections au besoin lors
des audiences tarifaires;
c) les prévisions de dépenses et d’investissements d’H.Q. devront être justifiées et les
réalisations effectives contrôlées et justifiées; la décision de la Régie sur les tarifs ne doit
constituer en aucun cas un chèque en blanc sur les dépenses et investissements dont la
pertinence et les coûts devront être monitorés et vérifiés en continue.
Nous considérons qu’H.Q. se montre toujours suffisante (comme si elle détenait la pure vérité)
et peu ouverte face aux dossiers réglementaires qu’elle présente. Dans cette audience-ci elle a
toutefois fait 2 ouvertures mineures, en s’engageant toutefois formellement que sur un point, en
13
regard de l’année témoin projetée, soit fournir en supplément, par rapport à sa proposition
initiale, des données pour une année historique.
Quant au principe 4 : H.Q. le maintient intégralement, mais elle propose indirectement à la
Régie, pour pallier “aux failles de sa proposition initiale” et ainsi la sauver, “un moyen pour
assurer un contrôle rigoureux de son mécanisme d’ajustement tarifaire”, soit l’application d’un
cavalier sur 12 mois, en regroupant les revenus tirés du cavalier dans l’année témoin.
Pour nous la solution du cavalier n’est pas acceptable, car cela implique des hausses tarifaires
plus importantes et cela complique le processus réglementaire.
À ce compte là, plutôt que d’utiliser un tel mécanisme palliatif de façon récurrente, nous
considérons (à moins que l’on nous prouve que ce ne soit trop coûteux de déplacer l’année
financière d’H.Q., contrairement à Gaz Métro qui a effectué ce changement en 1986) qu’il serait
préférable selon nous, si la Régie ne retenait pas nos propositions qui sont pourtant les plus
conformes à un processus réglementaire simple et efficace, d’uniformiser en conjonction avec
l’année projetée, les trois années (tarifaire, financière et témoin) au 1er mai.
Quant au principe 5 : il nous apparaît incomplet et trop imprécis pour permettre actuellement
une application pratique rigoureuse. Une audience générique sur la question serait préférable
pour le compléter et permettre une meilleure opérationalisation des divers critères, parfois
incompatibles. Il faudra aussi que la Régie précise clairement la portée des critères et leur
champ d’application pour éviter de laisser croire que l’on veut dans le futur déréglementer ce
qui actuellement l’est, à moins que cela ne soit un objectif que partage la Régie, lequel cas il
faudra être transparent et le dire clairement.
Nous rappelons en terminant que l’ACEF de Québec présentera une demande de
remboursement de frais relatifs à sa participation à cette “longue audience”.
Vous remerciant de votre attention.
Richard Dagenais et Vital Barbeau, pour l’ACEF de Québec, 9/06/99.
14
Annexe : Modélisation de l’utilisation d’un cavalier appliqué du 1er mai au 30 avril, mais dont
les revenus sont comptabilisés dans l’année témoin finissant en décembre.
Année
1
2
3
4
5
6
Cas 1
Hausse du coût
5,0%
5,0%
5,0%
5,0%
5,0%
5,0%
Cas 2
Hausse du coût
5,0%
4,0%
3,0%
2,0%
1,0%
0,0%
Cas 3
Hausse du coût
5,0%
6,0%
7,0%
8,0%
9,0%
10,0%
Cas 4
Hausse du coût
5,0%
3,0%
1,0%
0,0%
3,0%
5,0%
Cas 5
Hausse du coût
5,0%
0,0%
0,0%
0,0%
0,0%
0,0%
Année
1
2
3
4
5
6
Hausse totale tarif
7,0%
5,0%
5,0%
5,0%
5,0%
5,0%
Hausse totale tarif
7,0%
3,6%
2,6%
1,6%
0,6%
-0,4%
Hausse totale tarif
7,0%
6,4%
7,4%
8,4%
9,4%
10,4%
Hausse totale tarif
7,0%
2,3%
0,2%
-0,4%
4,2%
5,8%
Hausse totale tarif
7,0%
-1,9%
0,0%
0,0%
0,0%
0,0%
Année
1
2
3
4
5
6
Cavalier en %
2,0%
1,9%
1,9%
1,9%
1,9%
1,9%
Cavalier en %
2,0%
1,6%
1,2%
0,8%
0,4%
0,0%
Cavalier en %
2,0%
2,3%
2,7%
3,1%
3,5%
3,8%
Cavalier en %
2,0%
1,2%
0,4%
0,0%
1,2%
2,0%
Cavalier en %
2,0%
0,0%
0,0%
0,0%
0,0%
0,0%
Année
1
2
3
4
5
6
Cas 6
Hausse du coût
-5,0%
-5,0%
-5,0%
-5,0%
-5,0%
-5,0%
Cas 7
Hausse du coût
-5,0%
-4,0%
-3,0%
-2,0%
-1,0%
0,0%
Cas 8
Hausse du coût
2,0%
1,0%
0,0%
1,0%
2,0%
1,0%
Cas 9
Hausse du coût
3,0%
1,0%
3,0%
1,0%
3,0%
1,0%
Cas 10
Hausse du coût
5,0%
0,0%
5,0%
0,0%
5,0%
0,0%
Année
1
2
3
4
5
6
Hausse totale tarif
-7,0%
-5,0%
-5,0%
-5,0%
-5,0%
-5,0%
Hausse totale tarif
-7,0%
-3,6%
-2,6%
-1,6%
-0,6%
0,4%
Hausse totale tarif
2,8%
0,6%
-0,4%
1,4%
2,4%
0,6%
Hausse totale tarif
4,2%
0,2%
3,8%
0,2%
3,8%
0,2%
Hausse totale tarif
7,0%
-1,9%
7,0%
-1,9%
7,0%
-1,9%
Année
1
2
3
4
5
6
Cavalier en %
-2,0%
-2,0%
-2,0%
-2,0%
-2,0%
-2,0%
Cavalier en %
-2,0%
-1,6%
-1,2%
-0,8%
-0,4%
0,0%
Cavalier en %
0,8%
0,4%
0,0%
0,4%
0,8%
0,4%
Cavalier en %
1,2%
0,4%
1,2%
0,4%
1,2%
0,4%
Cavalier en %
2,0%
0,0%
2,0%
0,0%
2,0%
0,0%
Hausse Coût an 0
1
0,0%
40,0%
a=
Ratio en 0 : Coût sur Tarif =
15
Voir réponses de ACEF aux questions
Taux croissance demande =
2,0%
16

Documents pareils