La pointe du Bec Leu à Pléneuf val André

Transcription

La pointe du Bec Leu à Pléneuf val André
2009
La pointe du Bec Leu à
Pléneuf-Val-André
Dossier environLa pointe du Bec Leu
à Pléneuf-Val-André
La lutte entre le « pot de terre » de l’intérêt général
et le « pot de fer » de la propriété privée
par Michel GUILLAUME
Avant 2007 :
1- La pointe était dans un état presque naturel et accessible à tous.
2- Seuls 2 points noirs : des cyprès ont été plantés par endroits et ont pris une grande extension, et surtout deux
bâtiments délabrés, véritables « ruines », construits en béton pour l’un (situé en contrebas) et en parpaings pour
l’autre (situé sur le point haut) étaient devenus depuis quelques années des points de rendez-vous pour drogués
(des seringues, des canettes de bière et des débris divers y traînant souvent un peu partout !).
L’association Vivarmor Nature s’intéresse alors à ce site parce qu’il est situé en Zone Natura 2000 et parce qu’il
est d’un grand intérêt sur le plan géologique surtout (terrains pentévriens et formations quaternaires) mais aussi
de façon plus générale sur le plan botanique et paysager.
Intérêt sur le plan botanique et surtout géologique :
Cette avancée à l’ouest de l’entrée du port de Dahouet constitue un remarquable observatoire. Sa végétation
(mises à part les plantations de cyprès et autres conifères) constitue un bon exemple de pelouse maritime et de
végétation pionnière sur rochers avancés en mer.
Mais c’est surtout sur le plan géologique qu’un accès facile à cette pointe méritait d’être conservé. Les roches qui
la constituent sont très anciennes puisque datées pour l’essentiel du Pentévrien (entre 756 et 645 millions d’années) : des formations parmi les plus anciennes du Massif Armoricain et même de France ! Elles sont traversées
de filons qui probablement ont alimenté la mise en place des amphibolites d’Erquy, il y a plus de 600 millions
d’années (voir article dans RDV-Penthièvre).
De part et d’autre de la pointe se situent également des formations récentes qui sont des « stratotypes majeurs
pour l’étude du Quaternaire » et que chaque année des étudiants rennais viennent visiter.
Pendant les années précédant 2008 :
Le propriétaire (Mr CONTENAY) se voit refuser :
- un certificat d’urbanisme demandé le 4 février 2003 (jugement définitif du Tribunal Administratif du 8 février
2007) et les locataires (Mr FIXOT – Mme GISCARD D’ESTAING) se voient refuser à leur tour,
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Dossier environnement
- le droit de poser des baies vitrées sur les bâtiments existants (décision municipale signée Alain
COUDOL du 6 juillet 2007).
La mairie de Pléneuf Val-André indique alors clairement (voir Télégramme du 31 décembre 2007) son
intention de préempter si ces terrains sont mis en vente et d’en confier la gestion au Conservatoire du
Littoral. Bien sûr notre association soutient un tel projet de préservation d’un patrimoine naturel d’intérêt général avec libre accès à tous.
Fin 2007 et en 2008 intervient un « locataire » :
Entre les deux dates ci-dessus le destin de la pointe change car intervient alors Mr Bernard FIXOT
époux de Valérie Anne GISCARD d’ESTAING, éditeur et ami de Nicolas SARKOZY.
- Il connaît le coin car ses parents ont passé leur retraite non loin de là (à La Cotentin)
- Il a signé avec le propriétaire un bail emphytéotique (comme cela pas de vente des terrains !)
- Il ferme entièrement la pointe par une clôture
- Il pose des canalisations depuis l’entrée jusqu’aux bâtiments en ruine
- Il restaure entièrement les deux « ruines » pour les rendre habitables.
S’ensuit alors un imbroglio juridique. Mr Bernard FIXOT lui-même s’adresse au Tribunal Administratif
(cela fait gagner du temps et lui permet de terminer les travaux !). Son but est d’accaparer cette pointe
à son seul profit… et il y réussit puisque aujourd’hui les travaux sont pratiquement terminés !
Ce que l’on peut conclure (provisoirement peut-être)
En ce qui concerne les bâtiments :
.
Le jugement du 8 février 2007 précise bien « que le bâtiment en cause est dans un état de délabrement
intérieur, qu’il n’est pas raccordé aux réseaux et n’a jamais fait l’objet d’un permis de construire ; que,
par suite, le Maire était tenu de délivrer un certificat d’urbanisme négatif, alors qu’au surplus, le bâtiment
se situe dans la bande littorale de 100 mètres au sens des dispositions du paragraphe III de l’article
L.146-4 du code de l’urbanisme et ne pouvait faire l’objet d’un permis de construire de régularisation ».
Certes les bâtiments ont été restaurés en gardant les volumes d’origine. Cependant leur couleur blanche
(ou en tous cas très claire) les fait maintenant repérer de loin et ils ne passent donc plus inaperçus
(comme c’était le cas auparavant).
Il était nécessaire de sécuriser l’endroit mais pour cela la destruction de ces bâtiments en ruines et la
remise du site dans son état naturel satisfaisaient l’intérêt général alors que nous assistons maintenant à
une privatisation intégrale des lieux.
En ce qui concerne les clôtures :
Il n’est pas normal que des personnes (des scientifiques par exemple) se voient refuser un accès direct
à la partie est de la pointe et à la petite anse qui lui fait suite en venant vers Dahouet : la loi ( n° 76-1285
de 1976) impose un passage de 3 mètres pour les piétons sur « les propriétés privées riveraines du
domaine maritime ».
Certes le sentier de randonnée a été sécurisé et donne satisfaction à ceux qui pratiquent ce sport mais le
public et les scientifiques qui veulent un accès au littoral se heurtent à une fermeture presque totale de
la pointe et de l’anse qui lui fait suite vers l’est, c’est à dire vers l’entrée du port de Dahouet . Cela constitue une privatisation de fait d’une partie du littoral.
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Quelques précisions pour terminer :
A Vivarmor Nature, nous avons mis un certain temps à réagir car nous étions fort occupés de l’autre
côté de la Baie (à Binic – à St-Quay). Notre ancien Président, Yannick GEFFRAY qui suivait toutes ces
affaires (sur le plan juridique surtout) est décédé et il m’a fallu personnellement (comme vice-Président)
m’impliquer pour les faire aboutir sur le plan juridique notamment, ce qui m’a beaucoup coûté car je ne
suis pas du tout juriste.
Ce n’est donc qu’à partir de novembre 2007 que Michel BLAIN (adhérent de Vivarmor et délégué
régional de Paysages de France) me sollicite pour rencontrer avec lui, sur le site, un journaliste d’OuestFrance et que je réalise pleinement l’enjeu de ce qui se passe ici : la fermeture de la pointe au détriment
de l’intérêt général.
Je tiens à préciser qu’avant cela je ne connaissais pratiquement rien de Mr Bernard FIXOT que je n’ai rien contre lui personnellement - que de nombreux amis de la région (de La Cotentin
notamment) me décrivent comme fort sympathique (ce dont je ne doute pas !) – que mon attitude serait exactement la même envers Durand, Dupont ou Tartempion si ceux-ci s’étaient
comportés de la même façon en ce qui concerne ces lieux !
Dernières nouvelles :
Le texte précédant a été écrit lorsque j’ai appris que l’émission Thalassa s’intéressait à notre combat
en faveur de la pointe du Becleu. Effectivement en février 2009, une équipe de tournage est venue et
il en a été question dans l’émission du 10 avril mais d’autres sujets comme le mazout et surtout les
algues vertes ont fait que le passage concernant la pointe du Becleu a été mis un peu au second plan.
Récemment (fin novembre 2009) l’affaire est venue devant le Tribunal Administratif de Rennes. Ceci
fait suite à la contestation par les époux FIXOT de la décision municipale signée Alain COUDOL du
6 juillet 2007 dont je parle dans le troisième paragraphe. Le « Rapporteur Public » (c’est le nom actuel
de l’ex « Commissaire du Gouvernement ») demande au Tribunal de rejeter ce recours et nous attendons le jugement… Malheureusement, les travaux étant terminés, il est bien improbable que l’on
revienne là-dessus. Reste la question de la clôture. Affaire à suivre donc !
Pointe du Bécleu vue du sentier littoral
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