Nouvelle maquette

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Nouvelle maquette
scènes
magazine
à la comédie de genève :
yvonne, princesse de bourgogne
photo © Isabelle Meister
ISSN 1016-9415
261 / avril 2014
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cine die / raymond scholer
cinémas du grütli / christian bernard
sous la loupe : nebraska / christian bernard
festival international du film oriental / david leroy
hommage : alain resnais / serge lachat
brèves : de toutes nos forces / serge lachat
entretien : luciano barisone / catherine graf
nyon : visions du réel / christian bernard
les films du mois / christian bernard, émilien gür, serge lachat
brèves : dans l’ombre de mary, diplomatie, un week-end à
paris / serge lachat
brèves : les sorties dvd / christian bernard
ciné-club universitaire : pierre clémenti / émilien gür
cinémathèque suisse en avril / raymond scholer
entretien : julie bertucelli / christian bernard
théâtre
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tournée : invisibles / rosine schautz
théâtre du loup : la puce à l’oreille / rosine schautz
casino-théâtre, genève : l’étourdi / laurence tièche
théâtre de carouge : la double inconstance
comédie : yvonne, princesse de bourgogne / romeo cini
opéra
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grand théâtre : un théâtre éphémère / pierre-rené serna
chronique lyonnaise / frank langlois
meyrin : le crocodile trompeur / pierre-rené serna
scala : lucia di lammermoor & il trovatore / frank fredenrich
madrid : brokeback mountain & curra vargas / p.-r. serna
zurich : aida / éric pousaz
strasbourg : le vaisseau fantôme / éric pousaz
toulouse : la favorite / françois lesueur
londres : la fille du régiment / frank fredenrich
nice : semele / françois jestin
monte-carlo : l’elisir d’amore / françois jestin
lyon : le comte ory / françois jestin
avignon : le dernier jour d’un condamné / françois jestin
marseille : colomba / françois jestin
mémento
en tournée : l’enlèvement au sérail / bernard halter
musique
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portrait : le trio zimmermann / pierre jaquet
portrait : leonidas kavakos / beata zakes
cully jazz : la modernité poétique / frank dayen
entretien : arie van beek / martine duruz
encarts : gli angeli / abdullah ibrahim new trio / andreas scholl
/ manfred honeck
agenda genevois / martina diaz
entretien : ching-lien wu /martine duruz
kléber-méleau : cédric pescia & guests / yves allaz
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agenda romand / yves allaz
lucerne : festival avant pâques / emmanuèle rüegger
casino de montbenon : le piano à l’honneur / yves allaz
portrait : murray perahia / serene regard
entretien : fabrizio chiovetta / christian bernard
lausanne : concert de la fondation résonnance / chr. bernard
spectacles
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spectacles onésiens / firouz-elisabeth pillet
théâtre am stram gram / firouz-elisabeth pillet
marionnettes de genève en avril
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tournée : ballett zurich / emmanuèle rüegger
annecy : drums and digging / bertrand tappolet
les printemps de sévelin : may b à pully / stéphanie nègre
livres
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expositions
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éditions art & fiction : pénurie / françoise-hélène brou
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ariana : terres d’islam / françoise-hélène brou
zurich : de matisse au cavalier bleu / emmanuèle rüegger
berne : la collection stefanini / régine kopp
fondation de l’hermitage : le goût de diderot / f.h. brou
mémento beaux-arts : france
yerres : caillebotte à yerres au temps de l’impressionnisme
mémento beaux-arts : ailleurs
florence : pontormo et rosso
mémento beaux-arts : suisse romande
berne : women par tom wood
mémento beaux-arts : suisse alémanique
zurich : 1900 - 1914, expédition bonheur
paris
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musée d’orsay : gustave doré / régine kopp
centre pompidou : henri cartier-bresson / christine pictet
grand palais : bill viola / régine kopp
opéra : zauberflöte de répertoire / pierre-rené serna
chronique des concerts / david verdier
comédie française : le songe d’une nuit d’été / d. verdier
au jeu de paume : robert adams / christine pictet
au jeu de paume : mathieu pernot / christine pictet
au châtelet : l.a. dance project / stéphanie nègre
sélection musicale d’avril / françois lesueur
opéra de paris : mademoiselle julie & fall river legend / s. nègre
mémento théâtre
odéon europe, ateliers berthier : tartuffe
mémento expositions
musée jacquemart-andré : de watteau à fragonard
90 les mémentos
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Julie Bauer, James Berclaz-Lewis,
Nancy Bruchez, Gabriele Bucchi,
Claudia Cerretelli, Romeo Cini,
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François Jestin, Régine Kopp,
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David Leroy, François Lesueur,
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Eric Pousaz, Stéphanie Nègre,
Christine Pictet, Christine Ramel,
Serene Regard, Nancy Rieben,
Christophe Rime, Julien Roche,
Emmanuèle Rüegger, Maya Schautz,
Rosine Schautz, Raymond Scholer,
Pierre-René Serna, Bertrand Tappolet,
Laurence Tièche Chavier,
Tuana Gökçim Toksöz, David Verdier,
Christian Wasselin, Beata Zakes,
François Zanetta, Valérie Zuchuat
maquette : Viviane Vuilleumier
imprimé sur les presses de
PETRUZZI - Città di Castello, Italie
“1984” trente ans après !
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tre un lanceur d’alerte à l’ère du numérique comporte des risques. Et le
monde entier le sait depuis que l’analyste militaire américain Bradley
Manningle et le fondateur de Wikileaks, Julian Assange, en 2010 ainsi
que l’ex-agent de la NSA, Edward Snowden, dernièrement, en ont fait les frais.
Depuis, dans notre mémoire collective, la liberté d’expression 2.0 rime avec
Wikileaks et la surveillance globale avec National Security Agency.
Julian Assange et Edward Snowden ont radicalement changé notre perception
d’Internet, nous propulsant dans une jungle bardée d’inconnues où deux extrêmes s’affrontent: liberté d’expression versus contrôle de l’information. Car, c’est
bien de cela qu’il s’agit à l’heure où la prise de parole démocratique est possible
et qu’elle n’est plus détenue par une minorité. Cette prise de parole s’accompagne
de craintes et principalement de celles des gouvernements, d’où leur volonté de
surveillance accrue et de contrôle de ce nouveau système horizontal. Et cette surveillance n’incrimine pas uniquement les États-Unis.
Aujourd’hui, notamment grâce à Edward Snowden, nous savons que
Facebook, Google, Yahoo!, Apple, Microsoft, Skype - pour ne citer que les plus
connus - emmagasinent toutes sortes de données sur tout un chacun. Et que ces
mêmes acteurs livrent d’office toutes ces informations rassemblées aux ÉtatsUnis ainsi qu’aux autres gouvernements qui en feraient la demande, faisant fi de
la protection de la vie privée. La formule officielle pour justifier la cybersurveillance étatique, est : la lutte contre la cybercriminalité (terrorisme, pédophilie,
piratage). Mais la réalité se révèle toute autre lorsque la liberté d’expression et la
vérité sont bafouées sur l’autel de la sécurité.
Partant d’un document secret divulgué par Snowden, le documentaire suédois
Snowden Documents and Sweden de Frederik Laurin, Sven Bergman et Joachim
Dyfvermark, amène à nous interroger sur la liberté d’expression, le droit à l’information et les moyens déployés par un État pour contrôler un individu.
Internet perturbe les entreprises, des contenus peuvent y être acquis gratuitement. Se posent alors les questions de copyright et de droit d’auteur. Mais Internet
perturbe aussi les gouvernements en permettant aux gens de créer une nouvelle
forme de société sans frontière, ni limite. Les autorités ne sont pas habituées à un
système où la prise de parole publique est aussi facile et libre. Cela remet parfois
en cause leur autorité. C’est pourquoi, les gouvernement et les grandes entreprises se regroupent pour essayer de restreindre Internet et lutter contre ces changements. Sous couverts d’interceptions légales, la pratique de la surveillance est
comme son nom l’indique : légale. Mais ce qui est légal, est-il moralement justifiable? D’autant que la cybersurveillance est un marché des plus lucratifs pour les
entreprises qui commercialisent les technologies de surveillance massive. Et là où
l’argent règne, bien souvent la morale s’efface.
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le cinéma au jour le jour
Cine Die
64e Berlinale
Compétition
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De belle tenue, la compétition offrait une dizaine d’œuvres fortes :
hélas, le jury, dans cet état second que les Allemands appellent « in geistiger Umnachtung », a donné l’Ours d’Or à un film chinois médiocre :
Black Coal, Thin Ice de Yinan Diao. En 1999, au nord de la Chine, des
morceaux de cadavre sont découverts dans des bennes de charbon à des
centaines de kilomètres de distance. L’enquête policière aboutit à une
fusillade qui, par sa rapidité, sa sécheresse, son décor et son issue (cinq
morts dont deux policiers) fit dresser les oreilles au plus blasé des spectateurs. Le policier survivant, Zhang, est suspendu et l’affaire classée. Cinq
ans plus tard, des crimes similaires se reproduisent et Zhang, décidé à
racheter son échec, se met à espionner une employée de nettoyage à sec
qui semble être au centre de moult trafics. C’est alors que le film, à force
de pérégrinations erratiques, d’actions inexpliquées, de messages politiques obscurs, de gestes illisibles, perd notre intérêt et se vit comme une
progression fatigante à travers la mélasse d’un récit indéchiffrable. Y a-til une corrélation entre la présence du joaillier TESIRO de Nanjing parmi
les sponsors du festival et le fait que le cinéma chinois ait remporté encore deux autres prix ?
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mener à guérir son petit frère de son autisme apparent : à l’âge de 4 ans, il
n’a pas encore prononcé un mot. Station 1 : « Jésus est condamné à
mort » : lorsque le jeune et gentil père Weber explique à ses jeunes ouailles
qui préparent leur confirmation qu’ils sont les soldats de Jésus, que la
vraie foi a été subvertie par le Concile Vatican 2 et qu’ils doivent constamment éviter de succomber ou de laisser succomber leurs prochains aux tentations, Maria a déjà choisi son destin : elle veut se rapprocher de Dieu par
la mortification. Elle est prête pour la station numéro deux : « Jésus porte
sa croix ». En l’occurrence, celle qu’incarne sa mère, une virago d’une
sévérité monstrueuse.
En trouvant pour chaque station une scène adéquate du quotidien de
Maria, scène qu’il filme le plus souvent frontalement sans bouger la caméra, Brüggemann souligne le dogmatisme qui contrôle le destin de Maria.
Et la passion avance, inexorable. Le sentiment religieux : une pathologie
de l’esprit ?
Die Geliebten Schwestern de Dominik Graf raconte en 3 heures le
ménage à trois que menait apparemment pendant 13 ans (à partir de 1787)
le poète Friedrich Schiller avec les deux sœurs Caroline von Beulwitz
(puis von Wolzogen) et Charlotte von Lengefeld (qu’il épousa en 1790).
Pour qu’une relation amoureuse nous tienne en haleine sur une durée aussi
épique, il faut d’abord que les acteurs soient à la hauteur ! Le rôle du fougueux, mais malingre et délicat dramaturge est tenu à la perfection par
Florian Stetter (le père Weber de Kreuzweg), celui de la douce Charlotte
par une jeune actrice de 22 ans venue de la télévision, Henriette Confurius
(qui fait oublier en deux secondes Adèle Exarchopoulos), alors que
Allemands
En ce qui nous concerne, le fait marquant de la Berlinale, c’est l’éclatante santé du cinéma allemand avec la révélation d’un cinéaste immense, Dietrich Brüggemann et la confirmation du talent de Dominik Graf,
objet d’une rétrospective au festival de Rotterdam l’année passée.
Kreuzweg de Brüggemann a eu le prix du meilleur scénario, mais
aurait mérité aussi l’Ours d’or et des prix d’interprétation. En 14 plansséquences, introduits par les textes décrivant les 14 stations du chemin de
croix du Christ, l’auteur illustre le calvaire d’une jeune fille de 14 ans,
Maria, élevée dans une famille d’intégristes catholiques où la moindre
entorse à la règle entraîne correction verbale ou châtiment : toute velléité
d’ouverture au monde, comme par exemple chanter du soul ou du gospel,
est signe de soumission au Mal et de fornication avec le Diable. En se
sacrifiant par un renoncement exemplaire aux plaisirs des sens (nourriture
y comprise), la pauvrette espère gagner les faveurs du Tout-Puissant et l’a-
Lea van Acken et Florian Stetter dans «Kreuzweg»
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Henriette Confurius, Florian Stetter et Hannah Herzsprung dans «Die Geliebten
Schwestern»
Hannah Herzsprung assume avec brio le personnage de la scandaleuse et
adultérine Caroline, que Schiller aida à rédiger le roman à succès Agnes
von Lilien (1796/7). Les acteurs secondaires sont de la même eau, depuis
Claudia Messner (Madame von Lengefeld, qui a recours, avec le naturel
typique de l’époque, au français pour faire passer des messages devant les
domestiques) à Michael Wittenborn (Knebel, son fidèle administrateur, au
franc-parler réjouissant) en passant par Ronald Zehrfeld (Wolzogen, l’ami
de Schiller qui lui rapporte les nouvelles catastrophiques de la Révolution
française et met une sourdine sur le Sturm und Drang). Ces personnages
interagissent dans une langue châtiée qui est très sensible aux chavirements du cœur sans pour autant négliger la logique de l’esprit. S’il y a un
film auquel fait penser le film de Graf, c’est bien Les deux Anglaises et le
Continent (1971), mais sans l’amidon pesant de la mise en scène truffaldienne.
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Américain
Ivo Pietzcker et Luise Heyer dans «Jack»
Jack de Edward Berger avance sur le terrain cher aux Dardenne et à
Ken Loach : Jack, 10 ans, s’occupe de son cadet de 6 ans lors des absences répétées et imprévisibles d’une mère irresponsable, mais aimante. On
ne sait rien du père. Lorsque le petit frère, Manuel, a un accident sous la
surveillance de Jack, les services sociaux mettent l’aîné dans un internat
et laissent le petit chez la maman. A la suite d’une brimade, Jack s’enfuit
du centre d’accueil, récupère Manuel chez une voisine et essaie de rentrer
à l’appartement. Mais il n’a pas de clé. Et la mère ne rentre pas. Pendant
des jours, les deux gamins errent dans Berlin, dormant dans une voiture
abandonnée, chipotant pour se nourrir, écumant les clubs où ils pourraient
rencontrer leur mère. Pour Jack, ce sera une leçon définitive. Le message
n’est pas le même que chez Loach.
Zwischen Welten de Feo Aladag rompt une lance pour la présence de
la Bundeswehr en Afghanistan : son héros contrevient aux ordres pour
sauver la sœur de son interprète afghan. Aladag accumule peut-être trop
de clichés de la vie militaire (lorsque les soldats font la fête en se déguisant en femmes, on se croit dans un film des années cinquante), mais au
moins elle a tourné dans le pays même, alors que les Américains ou les
Français tournent leurs fictions sur les Talibans au Maroc.
Anglais
Dans Boyhood, Richard Linklater rend tangible ce que grandir signifie.
Filmant pendant 39 jours répartis sur 12 ans, Linklater tient un journal de la
vie ordinaire, de la banalité du quotidien, de l’identité qui se forge peu à peu.
Tout a été vu et revu : le père divorcé qui essaie de garder le contact avec les
enfants qu’il voit sporadiquement, les ados qui se rebiffent, les parents qui
apprennent à lâcher du lest, mais rarement l’itinéraire de l’enfance à l’université a été plus cohérent et plus convaincant. Cela est d’autant plus admirable qu’il s’agit d’enfances « normales » (au sens du président français),
sans dysfonctions à épingler et dramatiser. Les rôles principaux sont tenus
par les mêmes acteurs : Patricia Arquette et Ethan Hawke pour les parents,
Lorelei Linklater, la fille du réalisateur, et Ellar Coltrane pour les gosses : ce
sont (exception faite de documentaires comme la série Up de Michael
Apted) les plus longs rôles de l’histoire du cinéma.
Comédie scandinave
2 comédies sur 23 films en compétition : notre société n’aime guère
le rire, déconsidéré parce que trop léger, une perte de temps futile en ces
temps sérieux de crise économique qui n’en finit pas et de massacres interreligieux qui reprennent de plus belle. Pourtant, quel baume pour l’esprit
que la douceur élégante et la bienveillance cosmopolite de The Grand
Budapest Hotel, point culminant des recherches poétiques de Wes
Anderson. Kraftidioten, satire suédo-dano-norvégienne de Hans Petter
Moland, n’en a bien sûr pas la richesse iconique et référentielle, mais
quand même de la suite dans les idées comme le suggère son titre « international » In Order of Disppearance. Stellan Skarsgard, ayant manifestement survécu à Nymph()maniac, joue un conducteur de chasse-neige dans
la petite ville norvégienne de Beitostolen. Ayant découvert que son fils
Ingvar a été « suicidé » par « overdose » par des trafiquants de drogue
Paul Greengrass a trouvé son successeur, il s’appelle Yann Demange.
Dans son film ’71 (dont le titre se réfère à la 3e année de la guerre menée
par la Provisional IRA pour libérer l’Ulster de la Grande-Bretagne), il suit
pendant une nuit l’odyssée d’une recrue britannique blessée et terrifiée,
abandonnée dans un quartier catholique labyrinthique de Belfast, qui essaie
de rejoindre sa caserne. L’IRA veut le tuer, parce qu’il a été témoin de l’assassinat d’un camarade par deux de ses tueurs, les paramilitaires protestants
veulent le faire taire, parce qu’il les a vus fabriquer des bombes et les deux
côtés sont prêts à s’arranger sur son dos : seul son lieutenant veut le retrouver sain et sauf. Haletant et sans concession aux ultras : les crétins des deux
bords en prennent pour leur grade. Quant à la crédibilité des détails (vêtements, coiffures, accents), on dirait que ‘71 a été tourné à l’époque.
Stellan Skarsgard (d) dans «Kraftidioten»
mécontents, il décide de le venger en remontant patiemment la filière.
Comme le caïd local ne se doute pas qu’un père de famille lambda puisse
décimer ses troupes, il suppute que les Serbes sont coupables et se laisse
entraîner à un acte irréfléchi. D’où l’entrée en scène d’un Bruno Ganz truculent en parrain serbe. La racaille internationale va savoureusement s’entretuer selon un rite vaguement tarantinien, mais l’humour noir est
impayable. La scène où un truand balkanique explique à ses acolytes les
avantages des prisons norvégiennes (« on te refait même les dents aux
frais de l’Etat ») vaut son pesant d’or.
Au mois prochain
Raymond Scholer
Ronald Zehrfeld et Mohsin Ahmady dans «Zwischen Welten»
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les cinémas du grütli
Mohammad Rasoulof,
films noirs
Un film de résistance iranien et des chefs-d’œuvre du film noir
sont à l’affiche en avril.
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«Les manuscrits ne brûlent pas» de Mohammad Rasoulof
En sélection officielle, dans la section Un
certain regard à Cannes l’année dernière, Les
Manuscrits ne brûlent pas de Mohammad
Rasoulof dénonce frontalement la répression des
intellectuels par le régime. Le film est basé sur
une histoire réelle, connue de tous les Iraniens:
dans les années 90 un bus transportant des écrivains iraniens vers l’Arménie a manqué basculer
dans le vide sur une route de montagne du nord
de l’Iran. L’échec de ce faux accident destiné à
éliminer d’un seul coup une partie de l’intelligentsia a transformé les passagers en témoins
d’autant plus gênants qu’ils pouvaient écrire le
récit de cette tentative d’élimination. Mohammad
Rasoulof raconte comment les Services iraniens
sont partis à la chasse aux manuscrits, recourant,
le cas échéant, à la torture et à l’assassinat.
Pendant les 50 premières minutes du film,
deux histoires sont racontées en parallèle : d’un
côté deux hommes en voiture avec un prisonnier
dans le coffre qu’ils doivent tuer en maquillant le
meurtre en suicide. On ne sait pas exactement qui
ils sont. L’un deux attend un versement pour que
son fils malade soit opéré. De l’autre des écrivains victimes de la censure, l’un deux subissant
des pressions pour qu’il remette son manuscrit
racontant l’histoire du car. Et soudain, un récit en
voix off relie les deux histoires : le tueur dont le
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fils est malade conduisait le car. Qu’il soit montré par Rasoulof comme un être humain, tout en
étant capable de torturer sans état d’âme, offre un
apercu troublant sur la banalité du mal qui n’est
pas le moindre intérêt du film.
Le film a pu être tourné en majeure partie en
Iran grâce au parti pris de discrétion adopté (scènes en voiture, dans des appartements, dans les
montagnes). Mais la clarté de la dénonciation du
régime le condamne à n’être vu qu’hors d’Iran.
En guise de générique de fin, un carton prévient
que, pour des raisons de sécurité, les noms des
participants au film resteront inconnus. Rasoulof,
privé de son passeport et vivant en Allemagne
précise : «Tous ceux qui apparaissent à l'écran
sont maintenant hors du pays».
Films noirs
Les 26 et 27 avril, week-end d’hommage à
François Guérif, créateur en 1986 de Rivages/
Noir, célèbre collection de romans noirs et de
romans policiers (plus de 900 titres à ce jour)
ayant publié tout James Ellroy, Jim Thompson,
David Goodis. Grand connaisseur du film noir, il
sera là pour présenter quatre adaptations pour le
cinéma de titres majeurs de la collection.
Une occasion rare de voir Out of the Past,
archétype du film noir tourné en 1947 par
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Jacques Tourneur, avec Robert Mitchum en privé
rattrapé par son passé, Jane Greer en tueuse au
visage d’ange, Kirk Douglas en méchant très
méchant, sans oublier Rhonda Fleming.
Conformément à la loi du genre, dès la deuxième
moitié du film on n’y comprend plus rien, mais
c’est superbe.
La loi du Milieu (Get Carter, 1971) est le
premier film de fiction du documentariste Mike
Hodges tourné au moment où la GrandeBretagne découvre l'IRA, les agressions racistes
et homophobes, la crise des villes du Nord de
l'Angleterre aux mains d'élus locaux corrompus.
D’où le climat délétère du film. Michael Caine,
star n’ayant jamais renié ses origines prolétaires,
accepte le rôle principal d’un personnage pourtant très antipathique. Il y voit, dit-il, “mon double distordu si j’avais mal tourné pendant mon
adolescence”.
Les Arnaqueurs (The Grifters) est un film
américain du Britannique Stephen Frears, peutêtre son meilleur, sorti en 1990, adapté du roman
homonyme de Jim Thompson. Récit d’une descente aux enfers, c’est plus une tragédie qu’un
polar. Tout le monde trompe tout le monde dans
ce trio infernal drogué à l’arnaque, formé d’un
petit malfrat (John Cusack), pris dans la toile de
deux prédatrices, son amante (Annette Bening) et
sa mère (Angelica Huston). Transferts, inceste,
domination, désir, répulsion: tout y passe dans un
étourdissant tourniquet de névroses. Egalement
un grand film sur le rêve américain ramené à
l’accumulation de billets verts.
Réalisé en Louisiane en 2009 par Bertrand
Tavernier, le méconnu Dans la brume électrique,
suit un anti-héros joué par Tommy Lee Jones qui
n’est pas sans rappeler le flic joué par Philippe
Noiret dans Coup de torchon, autre film de
Tavernier adapté du roman noir de Jim
Thompson 1 275 âmes. Ici comme là on retrouve
un justicier attaché à combattre le Mal. Et il y a
de quoi faire pour Dave Robicheaux, ancien lieutenant de police au service du shérif local pour
retrouver un psychopathe auteur de meurtres
sexuels. Chemin faisant, c’est le crime organisé,
la magouille politique, la perversion sexuelle, la
cupidité qu’il rencontrera. Face à lui, John
Goodman incarne un mafieux libidineux coupable de détourner les fonds d'Etat destinés aux
reconstructions des maisons détruites par le
cyclone Katrina. Actuel.
Christian Bernard
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sous la loupe
Nebraska
Film indépendant nommé 6 fois aux Oscars, 5 fois aux Golden Globes, avec
son acteur principal, Bruce Dern, 76 ans, sacré meilleur acteur à Cannes
en 2013, Nebraska est le type même du film susceptible de plaire à l’industrie comme au cinéphile. Bonne nouvelle : c’est pour d’excellentes raisons.
Dès le premier plan, le charme du grand
écran et du noir et blanc opère : sur fond de
grand ciel on est au bord d’une route fréquentée
à la lisière de Billings, Montana, où chemine un
homme âgé et échevelé. Un piéton étant comme
chacun sait une étrangeté au pays de l’automobile, une voiture de police s’arrête. A l’agent
qui l’interroge gentiment (on est dans le
Midwest) le vieil homme répond qu’il est en
route pour Lincoln, Nebraska. Sauf que Lincoln
est à plus de 1000 kilomètres. On fait ainsi
bien pendue. Le temps de constater également
qu’il n’a jamais fait grand chose pour ses fils,
que ce soit l’aîné Ross, un journaliste TV (Bob
Odenkirk, l’interprète de l'avocat véreux Saul
Goodman dans la série Breaking Bad) ou le
cadet David (Will Forte) intelligent mais un peu
perdu dans un emploi de vendeur en-dessous de
ses capacités. David, cédant à l’idée fixe de son
père d’aller chercher son gain, décide de l’accompagner pour un voyage de quelques jours,
direction le Nebraska, et le road movie peut
«Nebraska» avecDavid (Will Forte), Woody (Bruce Dern), Ed (Stacy Keach) © Ascot Elite
connaissance avec Woody Grant (Bruce Dern),
vieillard déboussolé mais visiblement têtu,
déterminé à aller chercher le gros lot d'un
million de dollars qu’il est persuadé d’avoir
gagné comme annoncé dans un courrier.
On reste un peu à Billings, le temps de
constater que Woody le taiseux n’est pas particulièrement sympathique, qu’il est prompt à
lever le coude (“tu boirais aussi si tu étais
marié à ta mère“, lance-t-il à son fils), qu’il
pèse de tout son poids sur les épaules de sa
femme, Kate, une femme décidée à la langue
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commencer. Ce sera la traversée du Wyoming,
du South Dakota (arrêt au memorial du Mont
Rushmore que Woody juge “pas fini”), régions
que les Américains ne connaissent en général
que pour les avoir survolées et qui leur font dire,
si d’aventure ils les traversent en voiture: “Mais
comme c’est plat !”.
Le sens profond de ce voyage se précise
lorsqu’ils s’arrêtent à Hawthorne, petite ville du
Nebraska où Woody n’est pas retourné depuis
des âges, bien qu’il y soit né, qu’il y ait tenu un
garage, qu’il y ait construit de ses mains une
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maison, aujourd’hui en ruines, et que ses frères
y vivent toujours avec leurs familles : ce voyage permet un retour vers le passé pour Woody
(et son fils) avec le dévoilement d’une histoire
personnelle et familiale avec ses secrets, qui
explique le ressentiment qui l’habite. Pour
Alexander Payne, c’est l’occasion de faire le
portrait, à travers les frères, tantes et cousins,
d’une Amérique pauvre et isolée, sans grand
avenir entre bière et télévision. Le portrait est
d’une infinie justesse, le regard de Payne n’étant ni sentimental, ni idéalisant, ni cruel, ni
cynique (contrairement à celui des frères Coen
dans Fargo). L’arrivée de Woody dans la petite
ville est un événement accueilli avec simplicité
et gentillesse (“Nous sommes heureux que tu
sois venu pour partager la grande nouvelle!”)
qui entraîne photos et interview pour le journal
local. Mais si chacun fête “le millionaire” qui
offre force tournées générales, bien vite apparaît
chez certains l’envie d’en profiter. Ce sera le cas
de son ancien associé (Stacy Keach) réclamant
le remboursement d’une dette peut-être imaginaire, ou des deux inénarrables cousins jumeaux
plus inquiétants de bêtise. Ce dévoilement de la
nature des uns et des autres va s’étendre à
Woody et surtout à son fils David qui trouvera
la voie de la réconciliation avec le père dans une
dernière partie dont on se gardera de dévoiler
les péripéties. Plus encore que celle de Bruce
Dern, la performance de Will Forte impressionne dans un rôle tout en retenue.
Si Nebraska est une comédie pleine de
répliques très drôles, de gags chaplinesques
(une influence revendiquée par Payne) et de
situations cocasses à la Buñuel (autre influence
reconnue), c’est aussi le portrait intime (Payne a
grandi dans le Nebraska) d’un monde vieillissant frappé par la pauvreté. “Je voulais montrer
les différents visages des pauvres. Ce n’est pas
le sujet du film, mais je voulais que ça soit présent, à l’arrière-plan”, dit-il, ajoutant : « Je fais
des films de fiction avec la sensibilité d’un
documentariste ». S’il peut être rapproché du
seul film sobre et apaisé de David Lynch Une
histoire vraie (The Straight Story, 1999), qui
raconte la traversée du territoire américain en
tondeuse à gazon par un vieil homme, Nebraska
peut l’être encore plus justement de La Dernière
séance (The Last Picture Show), le portrait
d’une Amérique en crise réalisé en 1971 par
Peter Bogdanovich. Connaîtra-t-il le même destin de film-culte ?
Christian Bernard
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aux cinémas du grütli
Festival International
du Film Oriental
La neuvième édition du FIFOG, le Festival International du Film Oriental,
se déroule à Genève, aux cinémas des Grütli, à Versoix, Lausanne et en
France-Voisine du 4 au 13 avril. La thématique du « corps dans tous ses
états » ambitionne de décliner le corps physique et le corps social,
malmenés, brimés, contraints, mais aussi libérés ou aspirant à l’être.
10
Lover » du vétéran Abdel Abdulhamid, des
films syriens, déprogrammés des festivals de
Dubaï et du Caire, en raison du soutien des
réalisateurs au régime de Bashar Al-Assad. A
noter que leur soutien a été fait au début 2011,
avant la tournure radicale des événements. On
regardera aussi avec grand intérêt « Round
Trip », financé par la France, de Meyar Al
Roumi, cinéaste syrien opposant. Cette programmation a le mérite de refléter ainsi les
contradictions du cinéma syrien qu’elle complète par le documentaire « Not Who We Are » de
Carol Mansour sur cinq femmes syriennes réfugiées au Liban.
Cette édition bénéficie de parrainage de
Tahar Ben Jelloun, Goncourt 1987 pour La Nuit
Sacrée. Une centaine de films, tous genres
confondus, fictions, documentaires et courts
métrages, exploreront les diversités et interrogeront les frontières entre l’Orient et l’Occident
à travers des œuvres inédites ou peu connues en
Suisse.
Une sélection large de films d’Algérie,
Irak, d’Iran, Tunisie, Liban, Maroc, Egypte,
Jordanie ; Bengladesh, Syrie, Afghanistan, une
intrigante coproduction Lybie-Syrie-Qatar mais
aussi Croatie, France et USA (avec « La Jarre
», un film d’animation).
On suivra notamment avec intérêt les films
syriens. A noter la présence de « Once Again »,
« Mon Dernier Ami » de Joud Saïd et « The
«Femme écrite» de Lahcen Zinoun
On évitera par contre « Behind Closed
Doors », film marocain sans saveur de
Mohammed Bensouda, qui traite du harcèlement sexuel dans les milieux d’affaire. Quant à
« Affreux, cupides et stupides », farce tunisienne, tendance Benny Hill, d'Ibrahim Letaief, il
rappelle que le cinéma oriental, comme ailleurs,
a vocation de divertissement, même si, ici, la
farce est forcée et l’agitation confondue avec le
rythme.
Sur cent films, il y aura sans doute de quoi
trouver son bonheur ou intérêt.
David Leroy
www.fifog.com
Aux Cinémas du Grütli du 4 au 13 avril 2014.
«Asfouri» de Fouad Alaywan
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hommage
Alain Resnais,
clap de fin
Alain Resnais, mort le 1er mars dernier, a fait l’objet de
très nombreux hommages qui tous ont essayé de définir sa
spécificité. Qu’on me permette de lui rendre à mon tour
hommage en évoquant ce qui restera dans ma mémoire de
ce grand cinéaste.
tés. Je crois pouvoir y distinguer aujourd’hui (mais cela changera peut-être
demain), trois grands mouvements : au départ, lié à la question de la
mémoire, un regard politique sur le monde. Après un documentaire sur les
camps qui fut l’un des premiers après la guerre (Nuit et Brouillard), des
films sur les traces indélébiles de cette guerre (Hiroshima mon amour,
L’Année dernière à Marienbad), ou de la guerre d’Algérie (Muriel), ou
encore de celle d’Espagne (La Guerre est finie).
Puis, sa réflexion porte sur la création artistique (avec le formidable
Providence) avant de se consacrer à l’observation de l’homme un peu à la
manière de l’éthologue Henri Laborit (Mon Oncle d’Amérique), avec ce
que cela suppose de désillusions pour un humaniste. Mais attention, regarder l’homme comme on regarde le rat ne débouche chez Resnais sur aucun
cynisme ni sur aucune amertume. Il prendra juste le parti de s’amuser et
de nous amuser devant le spectacle de notre cerveau reptilien en action
avec tout ce que cela suppose de travail de « camouflage » de notre
cortex !
Toute la dernière partie de son œuvre est donc consacrée à l’observation amusée de nos « faiblesses » qui sont comme « sublimées » par l’incessant travail formel (un véritable travail d’orfèvre dans le montage, souvent renforcé par un sens musical très sûr dans tous les genres) du cinéaste qui s’appuie par ailleurs sur une « famille » d’actrices et d’acteurs que
l’on retrouve de film en film et qui satisfont son goût du théâtre ou plutôt
d’une « théâtralité » qui donne souvent un aspect « distancié » à ses films.
Mais derrière l’amusement causé par nos vaines agitations plane toujours l’ombre de la mort, parfois franchement mise en scène comme dans
son avant-dernier film Vous n’avez encore rien vu. Un titre qui résume parfaitement la position de cet artiste tout au long de sa production. Et un film
qui contient juste ce qu’il faut d’autodérision pour indiquer que Resnais
savait bien ne pas pouvoir échapper à une mort qui a donc fini par vaincre ce cinéaste éternellement « jeune »…
Serge Lachat
DE TOUTES NOS FORCES
Alain Resnais
On l’a dit et redit, Resnais est inclassable. Non seulement il n’appartient à aucune école (ni à la Nouvelle Vague, ni au cinéma « moderne »),
mais il n’a pas de descendant ni d’héritier direct ! Inclassable, il l’est parce
qu’il faisait à chaque coup un film différent du précédent, même si l’on
retrouve, au gré de son parcours, des thèmes récurrents et des préoccupations constantes. Mais auteur, il ne l’était pas du tout dans la perspective
de ses collègues de la Nouvelle Vague : rien d’autobiographique dans son
cinéma, ni, plus surprenant, de scénarios dont il serait l’auteur (il a toujours préféré solliciter les écrivains ou les auteurs dramatiques). Et pourtant, indéniablement, on reconnaît immédiatement un film de Resnais…
Comme toujours après un décès, c’est-à-dire après le point final d’une
œuvre, on relira celle-ci avec un regard rétrospectif qui permettra peut-être
d’en discerner de mieux en mieux les grandes articulations et les subtili-
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de Nils Tavernier (France-Belgique, 2013) avec Jacques Gamblin,
Alexandra Lamy, Fabien Héraud…
Paul Amblard est un mécanicien sur les remontées mécaniques et les téléphériques de haute montagne. Pour cet ancien champion de triathlon, sa mise
au chômage est vécue comme une terrible déchéance. D’autant plus qu’à
domicile, il est confronté au handicap - qu’il n’a jamais vraiment accepté - de
Julien, son fils de presque 18 ans, plein de charme, de fougue et de désirs, mais
condamné se déplacer en chaise roulante. Voyant son père partir à la dérive,
Julien réussit non sans peine à le persuader de participer ensemble à
l’ « Ironman » de Nice, un triathlon particulièrement difficile. On l’aura compris, les immenses efforts de préparation, les limites à repousser souderont
définitivement la famille et rendront leur dignité au fils comme au père.
Sujet délicat que Nils Tavernier traite avec finesse et justesse dans la première partie du film (scènes à l’école des handicapés, conflits familiaux, passage difficile à l’âge adulte…), même si l’on ne peut pas ne pas penser à
« Intouchable ». Malheureusement la deuxième partie (surtout la course, interminable et sans vrai suspense) lorgne trop du côté de « Rocky » et du film de
« rédemption » à l’américaine. Dommage.
Serge Lachat
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nyon, visions du réel
Année “anniversaire
20/45“ exceptionnelle
Célébration d'un double anniversaire, 45 ans d'existence, 20 sous le nom
internationalement connu de Visions du Réel. Entretien avec Luciano
Barisone, son directeur.
Le public du festival n'a cessé d'augmenter depuis 2011, et pour ce double anniversaire vous réservez des surprises au
public et aux professionnels, dans l'accueil
d'abord...
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Ce double anniversaire est l'occasion de donner
de nouvelles impulsions au festival. Il y a désormais 6 espaces de projections avec le nouvel
espace de La Colombière. Par ailleurs, tout le
Village du Réel a été réaménagé, avec des
containers sur 2 étages, soit 200 mètres carrés,
avec des terrasses, pour se retrouver par tous les
«The Optimists»
temps. L'ambiance unique du festival permet les
rencontres et le networking. Les publics se
mélangent, aussi pendant les soirées, avec une
petite fête d'ouverture, un concert à la Salle
communale, une soirée RTS, la soirée officielle
d'anniversaire du 29 en présence de Ruth
Dreifuss, membre du comité d'honneur et
ancienne présidente de la Confédération, et une
fête de clôture en collaboration avec Paléo festival. Et encore, parmi d'autres, la projection de
courts métrages sur les murs du château.
Vous offrez une nouvelle section,
Grand Angle, le prix Maître du Réel, les
e
Sesterces
Il fallait ouvrir le festival également à un public
moins familier du documentaire. Avec Grand
Angle nous avons en préouverture, The
Optimists, l'épopée d'une équipe de volleyball de
femmes d'un certain âge - la doyenne a 90 ans en recherche d'une équipe adverse pour disputer
un vrai match... La soirée d'ouverture accueille
une comédie, Love and Engineering, un informaticien bulgare présente à ses collègues son système infaillible pour séduire les femmes... Signe
des temps ? Plusieurs films traitent de l'amour
cette année. Samedi
soir ce sera la première en Suisse de 20'000
Days on Earth, autour
de Nick Cave, dimanche As the Palaces
burn avec du hard
rock. Toujours dans le
domaine de la
musique, avec The
Punk Singer jeudi.
Mercredi un mélo sur
fond hollywoodien,
Farewell
to
Hollywood, une jeune
fille souffrant d'une
maladie incurable
aimerait faire du cinéma. Vendredi The Creator
of the Jungle, l'incroyable histoire d'un Catalan,
génie de l'architecture qui a détruit et reconstruit
3 fois une vraie ville en bois.
Pour la première fois, le festival décerne le prix
Maître du Réel. Être un cinéaste du réel signifie
s’engager à fond dans la représentation artistique
de la réalité (humaine, sociale, politique), tout en
ayant comme but idéal de contribuer à améliorer
cette même réalité.
Le prix ira cette première année au Suisse
Richard Dindo, l’un des plus célèbres réalisateurs de documentaires de Suisse et d’Europe.
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Son œuvre - 34 films - a déjà fait l'objet de nombreuses rétrospectives. On se souvient peut-être
de Arthur Rimbaud, une biographie (1991),
Ernesto « Che » Guevara, le journal de Bolivie
(1994). Dindo est une figure unique et indépendante dans le panorama du cinéma contemporain ; il sait parler à l’intelligence du spectateur
avec une vision à la fois originale et sensible de
la réalité. La masterclass que donnera le cinéaste
est une belle occasion de revisiter son approche.
Nyon renoue avec son passé romain en décernant
ses nouveaux trophées, les sesterces, œuvres de
l'artiste Bernard Bavaud, Le sesterce d'or sera
pour les meilleurs longs, moyens et courts métrages, celui d'argent pour les meilleurs films
(Suisse, Regards neufs, Prix du public).
Et les cadeaux d'anniversaire Traces
du futur...
Nous avons sélectionné 150 réalisateurs, leur
demandant de nous envoyer, en cadeau d'anniversaire, un film de maximum 3 minutes sur une
trace du futur qu'ils détectent dans leur réalité
quotidienne. Ces films seront projetés avant les
séances, et aussi sur les murs du Château.
On retrouve comme chaque année la
compétition des longs, moyens et courts, les
Ateliers et le Focus
Vous verrez énormément de films remarquables
dans les compétitions.
Les ateliers nous permettent de découvrir les
questionnements de l'Américain Ross McElwee,
qui enregistre depuis 35 ans sa vie et celle de ses
proches dans la Caroline du Nord d'aujourd'hui.
Pierre-Yves Vandeweerd quant à lui, oscille entre
l'ici et l'ailleurs, le proche et le plus lointain, sa
famille en Belgique, et les habitants de territoires
africains qu'il connaît de l'intérieur. Son dernier
film, Les tourmentes, est en compétition.
Depuis de nombreuses années le Focus, à l'interface et le marché, a donné une grande visibilité à
la Suisse. Dans les festivals, les partenaires nous
recherchent, ils connaissant l'importance de
Nyon pour les projets futurs. Le Focus est dédié
cette année à la Tunisie, un pays en transition qui,
depuis plusieurs années, avec des réalisateurs et
producteurs brillants et engagés, offre une production prometteuse. Nous découvrirons 16 de
leurs films.
Gageons que ce festival, l'un des plus importants au monde, fera à nouveau le plein de spectateurs enthousiastes et suscitera des projets
lumineux pour les années à venir.
Catherine Graf
Festival Visions du Réel, du 25 avril au 3 mai, Nyon.
Pour un suivi du festival dès le 27 avril, « http://catherineavucatherineecrit.blogspot.fr/ »
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grands festivals internationaux. Au total, une
dizaine de films récents seront projetés – en première suisse, européenne et même internationale
– dans le cadre de cette section non compétitive.
nyon, visions du réel
Double anniversaire
2014 marque un double anniversaire : la 20ème édition de Visions du Réel
et les 45 ans d'existence du Festival international de cinéma de Nyon.
L’occasion d’introduire quelques innovations. Richard Dindo sera à
l’honneur de cette édition qui se déroulera du 25 avril au 3 mai 2014.
Unique festival du cinéma documentaire en
Suisse, Visions du Réel jouit d’une renommée
internationale. Il est l’un des plus importants
festivals dans le domaine du documentaire de
création. Fondé en 1969 sous le nom de «
Festival international de cinéma documentaire
de Nyon », le Festival est rebaptisé « Visions du
Réel » en 1995 lors de sa reprise en main par
Jean Perret. Il réunit chaque printemps à Nyon,
pendant plus d’une semaine, un large public de
cinéphiles et de professionnels de la branche
(près de 30'000 personnes). Pour répondre à
l’augmentation croissante du public, le Festival
comptera cette année une nouvelle salle de projection d’une capacité de 160 places à la salle de
la Colombière, à 3 minutes du Village du Réel.
Prix Maître du Réel
à Richard Dindo
« Fêter un double anniversaire est l’occasion de donner de nouvelles impulsions au
Festival; le lancement du Prix Maître du Réel en
est l’exemple », souligne Luciano Barisone,
Directeur du Festival. Ce prix, attribué à un
cinéaste du réel de renommée mondiale, est
décerné cette année au grand réalisateur suisse
Richard Dindo qui aura 70 ans cette année. Cinq
de ses films documentaires (sur la vingtaine que
compte sa filmographie) seront projetés. En
parallèle, il donnera une leçon de cinéma ouverte au grand public le 30 avril. Le Sesterce d’or
Prix Maître du Réel – récompensant l’ensemble
de sa carrière – lui sera attribué le 29 avril 2014,
dans le cadre de la soirée d’anniversaire officielle du Festival. En prolongement du Festival,
signalons que La Cinémathèque suisse organise
une rétrospective Richard Dindo dans le courant
du mois de mai. Par ailleurs, les Ateliers,
moment traditionnellement fort de VdR, seront
consacrés à l’Américain Ross Mc Elwee et au
Belge Pierre-Yves Vandeweerd.
Cartes postales
Des cinéastes – sélectionnés à Visions du
Réel lors des vingt éditions précédentes – marqueront l’anniversaire du Festival avec la réalisation de courts métrages d’une durée d’environ
3 minutes – des “cartes postales” comme les
appelle Luciano Barisone – qui seront diffusés
avant les séances de projection des films longs
métrages et projetés en soirée sur les murs du
Château de la ville de Nyon.
Grand Angle : best of des
festivals du monde
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Retour aux sources pour les Grands Prix du
Festival: les meilleurs longs, moyens et courts
métrages recevront désormais le Sesterce d’or
et le Sesterce d’argent, dénominations déjà utilisées dans le passé par le Festival, rappelant les
origines romaines de Nyon.
Focus sur la Tunisie
La Tunisie sera au centre du FOCUS organisé pour la quatrième année consécutive par
Visions du Réel et son Marché du film avec le
soutien de la Direction du développement et de
la coopération DDC. L’objectif visé: explorer la
production de films documentaires du pays et
stimuler la collaboration internationale dans les
domaines de la co-production et de la distribution. Le Festival a sélectionné 5 projets de films
documentaires de création en provenance de la
Tunisie, le projet le plus prometteur recevant le
Prix visions sud est, doté d’un montant de
10'000.- francs.
Une soirée officielle d’anniversaire, au
Théâtre de Marens le 29 avril 2014, sera organisée sous le haut patronage de Ruth Dreifuss,
Ancienne Présidente de la Confédération et
actuelle membre du comité d’honneur du
Festival, soirée suivie d’une fête à laquelle tous
les festivaliers sont conviés.
Christian Bernard
Cette nouvelle section Grand Angle offrira
l’opportunité de découvrir des films documentaires de cinéastes renommés, à l’affiche d'autres
Richard Dindo «Ernesto « Che » Guevara, le journal de Bolivie». Suisse,
France // 1994 // 94’
Le Sesterce : nouveau trophée
pour les Grands Prix
Le programme complet du Festival sera annoncé le 7
avril 2014. Rens http: www.visionsdureel.ch
Richard Dindo «Genêt à Chatila». Suisse, France // 1999 // 99’
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Les films du mois
WATERMARKS
Trois lettres de Chine
de Luc Schaedler en collaboration avec Markus
Schiesser (Suisse, 2013)
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Sélectionné en 2013 à Locarno (Semaine de
la critique), ce film est une nouvelle preuve de la
vitalité et de la qualité du cinéma documentaire
d’Outre-Sarine. En 2011 Luc Schaedler a voyagé
plusieurs mois en en Chine, pays où il se rend
régulièrement depuis plus de 20 ans, en compagnie de Markus Schiesser, un sinologue vivant en Chine depuis 12
ans, marié à une Chinoise et parlant couramment la langue. Il en
résulte ce reportage, prenant l’eau
comme fil conducteur, sur les bouleversements passés et présents
affectant la société chinoise. Les
trois lettres du titre sont expédiées
successivement d’une région du
Nord de la Chine frappée de sécheresse où le paysan sans avenir n’a
que la perspective de travailler
dans les mines de charbon à ciel
ouvert ; d’une région apparemment idyllique du Sud humide de
la Chine, celle des rizières, séjour
de nombreux lettrés, mais où les
familles des propriétaires ont vu
passer la déferlante des Gardes
Rouges ; de la mégapole de
Chongqing, enfin, au bord du
Yangtse, dont les eaux polluées
font de la pêche, activité traditionnelle, une activité à haut risque.
Nous avons immédiatement
le sentiment d’être avec les gens,
dans leur environnement, partageant leur vie qu’ils évoquent face
à la caméra ou en voix off. Cette
proximité, pour ne pas dire cette
intimité partagée, est manifestement le résultat de la confiance
accordée à cet intervieweur parlant
Chinois et parfaitement au fait de
la patience requise pour la gagner.
Elle est également due à la qualité
des cadrages et à l’extrême attention portée aux détails de l’envi-
a
ronnement quotidien, y compris sonores.
La première lettre nous en apprend beaucoup sur les relations de famille dans ce milieu
rural hostile où il faut amener l’eau par camion
pour faire boire les quelques moutons survivants. Faut-il rester ou partir ? Les enfants n’ont
pas d’avenir autre que d’être travailleurs
migrants, autrement dit pas d’autre choix qu’entre le Charybde de la sécheresse et le Scylla des
mines de charbon. Pourtant le fils ne rêve que de
rester là avec ses parents pour s’occuper d’eux et
parce qu’il y est heureux, alors que la belle fille à
laquelle il est heureusement marié depuis 10 ans,
rêve d’un appartement dans la ville minière où ils
ont dû migrer, malgré les salaires de misère, la
pollution et la séparation d’avec leur enfant.
Comme elle le dit, elle choisit un rêve réaliste
pour ajouter aussitôt « je n’ai pas de rêve ». Dès
ce premier volet, comme dans les suivants, on est
frappé par la simplicité et la douceur des « personnages », leur faculté d’acceptation mais en
toute lucidité.
Ces mêmes qualités se retrouvent, dans la
2ème lettre intitulée Un passé inassimilé, chez ce
descendant d’une ancienne famille de lettrés qui
possédait la totalité des maisons vieilles de 300
ans du village, toujours là mais taguées à l’effigie
de Mao. Il faut l’entendre évoquer le passage de
la Révolution Culturelle, synonyme pour les siens de dépossession, d’autodafés, de morts.
Comme il faut entendre l’actuel
responsable du village, les réhabilitations de l’ère Den Xiaoping
étant intervenues entre temps,
valoriser le maintien des traditions tels les enterrements, pour
dépasser les haines et ressouder
la société.
Le 3e lettre intitulée Un
avenir chancelant nous transporte à la lisière d’une mégapole au
bord du Yangtse. Ici aussi, quel
avenir pour ce couple de
pêcheurs victimes de la pollution
du fleuve ? Portrait étonnant de
leur fille, marginale de 19 ans
vivant seule en ville, qui s’habille et se rêve en garçon.
Lorsque la mère raconte comment ils ont adopté ce bébé abandonné (en payant une amende…)
et que leur fille s’interroge sur le
pourquoi de cet abandon (« estce parce que j’étais l’enfant d’un
couple illégitime, ou alors une
fille, ou parce que mes parents
étaient trop pauvres ? »), on
admire ce qui apparaît être la
réussite de ce reportage plus
instructif que bien des fictions :
l’inscription des destins individuels dans les réalités socio-économiques de la Chine d’hier et
d’aujourd’hui (ou l’inverse).
Christian Bernard
«Watermarks» © Xenix films
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« ZZ ». La farce
policière s’accom- ThE MONUMENTS MEN
pagne donc d’un de George Clooney, avec George Clooney, Matt
double-fond poli- Damon, Bill Murray… (USA, 2013)
tique.
Voilà un film à l’affiche prometteuse:
Mais attention,
George
Clooney, Matt Damon, Bill Murray, John
l’univers de Wes
Goodman,
Jean Dujardin, Cate Blanchett.
Anderson
reste
rarement
une distribution d’un tel
Pourtant
ludique et enfantin.
niveau
n’aura
paru
aussi
sous-utilisée. Il faut dire
On se croirait dans
qu’on
a
affaire
ici,
malgré
un sujet apparemment
une aventure de
neuf
au
cinéma,
exception
faite du film de
Tintin et le côté carFrankenheimer
Le
Train,
à
un
film
de guerre holtoonesque imprèlywoodien
de
plus,
reprenant
sans
le moindre
gne tout le film :
«The Grand Budapest Hotel» avec Igor (Schlase), Zero (Revolori), Madame
D. (Swinton), M. Gustave (Fiennes) © Twentieth Century Fox Film Corp.
risque
la
formule
et
les
poncifs
du
genre.
maquettes, décors
Les « Monuments Men » étaient dans la
peints,
univers
ThE GRAND BUDAPEST rose-bonbon… Et bien sûr aussi personnages réalité un groupe d’approximativement 345 homhOTEL
extrêmement « simples » avec les bons et les mes et femmes de 13 nations, formant la
de Wes Anderson, avec Ralph Fiennes, Tilda méchants, même si le dialogue, à l’écouter atten- Monument, Fine Arts, and Archives section de
Swinton, Jeff Goldblum, Adrien Brody, Willem tivement, laisse passer quelques allusions à déco- l’US Army dont la mission était la protection
Dafoe,…
der. Mais le rythme effréné du récit laisse fort puis, à la fin de la guerre, la localisation et la
peu de temps pour décoder ces allusions ou les récupération des biens culturels volés par les
Merveille d’histoires emboîtées, le film de références artistiques (Gustave substitue au Nazis. Beaucoup d’entre eux étaient dans le civil
Wes Anderson réussit le tour de force de ne tableau de la Renaissance une œuvre d’Egon responsables de musées, historiens de l’art, archi(presque) jamais perdre son spectateur dans les Schiele que Dmitri détruit dès qu’il la voit!).
tectes etc. Pour les besoins de son film, Clooney
différents temps et dans les différents lieux évoA propos de références, on a fait remarquer choisit de suivre six d’entre eux dans ce qui se
qués. Mais c’est dire aussi qu’il est quasiment que le film s’inspire d’un texte de Stefan Zweig, révèle rapidement un parcours ultra balisé en
impossible de faire un résumé de ce film. Disons, que le film dégage un parfum lubitschien ou cha- terre connue : Maison-Blanche, Normandie,
pour faire simple, qu’en ouverture un écrivain plinien. C’est vrai, mais en même temps la portée Paris, Ardennes, Remagen, Château de
nous affirme que l’inspiration compte bien moins n’est pas la même : en décrivant un monde qui Neuschwanstein, pour finir dans une mine de sel
dans la création artistique qu’une oreille attentive s’effondre et la montée du nazisme, Chaplin, près d’un lac autrichien où Hitler avait fait cacher
aux propos des gens. Surtout lorsque Monsieur Lubitsch et Zweig sont des « lanceurs d’alerte » ce qu’il destinait au futur plus grand musée
Mustapha, le propriétaire du « Grand Budapest visionnaires. En affublant son personnage du d’Europe, « son » musée, à Linz la ville où il
Hotel » propose de raconter comment, de simple méchant d’attributs SS (adoucis en ZZ !), Wes avait grandi.
groom, il est devenu concierge, puis propriétaire Anderson ne fait que revenir sur un itinéraire
Ce commando aurait-il eu pour mission de
du lieu. Mais pour cela, il doit raconter l’histoire balisé, un peu comme Spielberg dans Indiana faire sauter un pont plutôt que de sauver des
de Monsieur Gustave, mythique concierge de l’é- Jones et la dernière Croisade.
chefs-d’œuvre de la peinture européenne, que
tablissement au début des années 30. Sans cesse
Mais peut-être ne faut-il pas trop demander l’histoire aurait été racontée de la même manière.
à l’écoute de ses clients qu’il cherche à satisfaire à un cinéaste fidèle avant tout à son univers, Rien ne manque à l’appel de formes usées jusau mieux, Monsieur Gustave incarne l’idéal du d’ailleurs revigorant dans son refus de tout natu- qu’à la corde : multiples saynètes pour rendre les
concierge. Jusqu’à prodiguer des « attentions » à ralisme. Peut-être
ses clientes les plus âgées, dont la richissime aris- faut-il déguster ses
tocrate Madame D.
films comme les
A la mort soudaine de celle-ci, il se décou- confiseries
de
vre héritier d’un tableau de la Renaissance que la Mendel’s dans ce
famille de la défunte, Dmitri D en tête, n’entend film, en apprécier
lui laisser sous aucun prétexte. A partir de là l’humour et s’amuser
s’engage une folle course poursuite dans les à reconnaître (ce n’est
alpes enneigées de la Zubrowka, pays imaginaire pas évident vu la
qu’on peut situer à l’extrême est de l’Autriche. vitesse du récit) la
Aidé de son groom, le tout jeune Zero pléiade d’acteurs célèMoustapha, que Monsieur Gustave initie au bres qui défilent, parmétier de concierge et à bien d’autres choses fois pour quelques
encore, l’heureux héritier réussit à cacher le secondes seulement,
fameux tableau et à échapper à ses poursuivants sous nos yeux.
«The Monuments Men» © Warner Bros-20th Century Fox
Serge Lachat
qui se révèlent aussi membres influents du parti
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personnages proches ; relance de l’intérêt par la
poursuite de l’objet toujours manquant, en l’occurrence une Vierge à l’enfant dont Clooney fait
son affaire personnelle ; suspense final lorsqu’il
s’agit de vider la mine de ses trésors alors que les
Russes arrivent… sans oublier la reprise des clichés les plus éculés (Anglais flegmatiques,
Français plutôt désagréables mais alliés quand
même, (et puis Paris, le vin, l’amour !), les
Américains héroïques et victorieux). Le problème est que tout cela donne un sentiment de déjàvu, et en moins bien. Car rien ne fonctionne vraiment dans ce film appliqué et languissant, surtout
pas les scènes destinées à nous convaincre de la
noblesse du combat mené ou à nous faire réfléchir sur le nœud « moral » formulé par Roosevelt
et repris en canon : une œuvre d’art vaut-elle le
sacrifice d’une vie humaine ?
Dommage car on aurait aimé en apprendre
davantage sur ce qui est advenu des œuvres
volées par les Nazis. En s’en tenant à laisser
entendre que les Russes gardaient tout, que les
Français ont tout récupéré, et que les Américains
ont restitué à leurs propriétaires cinq millions
d’objets volés, The Monuments Men donne surtout le sentiment que le film sur le sujet est encore à faire.
Christian Bernard
WEEK-ENDS
d’Anne Villacèque (France, 2013) avec Karin
Viard. Noémie Lvovsky, Jacques Gamblin…
A l’ouverture du film, une scène montre
qu’un rien peut faire fondre le vernis social : un
imbroglio pour une place de parking révèle que
la charmante Christine (Karin Viard) cache un
pitbull ! Christine que l‘on retrouve ensuite dans
une magnifique demeure de la campagne normande où elle passe ses week-ends depuis belle
lurette avec Jean (Jacques Gamblin), son mari et
leurs enfants. Dans la maison d’en-face, un couple d’amis, Sylvette (Noémie Lvovsky) et Ulrich
(Ulrich Tukur) et leurs enfants. Les deux filles
aînées ont le même prénom.
Un monde de paix et de confort dans une
Normandie au climat difficile, mais à la beauté
confondante. La tendresse a remplacé la passion,
mais les deux couples semblent devoir vieillir
ensemble. Sauf que Jean quitte sa famille pour
refaire sa vie ailleurs. A partir de là, tout se
déglingue; Christine se sent trahie et n’a qu’une
idée : pourrir la vie de Jean. Et le bel équilibre
amical se met lui aussi à boiter : comment se
comporter devant le couple détruit ? qui faut-il
« soutenir » ? comment intégrer la nouvelle amie
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«Week-Ends» © Agora films
de Jean lorsqu’il vient passer le week-end avec
elle ? comment ne pas avoir peur, pour Sylvette,
de vivre semblable trahison…
Le film, sans être un monument d’originalité, offre quelques notations psychologiques fines
(la difficulté pour la « nouvelle » à trouver ses
marques dans l’univers des amis) et dessine assez
bien un univers « bobo » qui, derrière son apparente décontraction, cache bien des peurs et bien
des mystères, et derrière son apparente générosité beaucoup d’égoïsme et de cruauté. Le cinéma
d’Anne Villacèque sent l’influence de Truffaut,
mais on le souhaiterait parfois plus inquiétant,
plus proche de Chabrol…
Serge Lachat
AIMER, BOIRE
ET ChANTER
d’Alain Resnais (France, 2014) avec Sabine
Azéma, André Dussolier, Hippolyte Girardot,
Sandrine Kiberlain, Michel Vuillermoz…
Pour son dernier film (cette fois on en est
sûr, malheureusement), Alain Resnais nous
entraîne, adaptant Life of Riley de son vieux complice Alan Ayckbourn, dans le Yorkshire pour un
de ces chassés-croisés qu’il prisait tant.
Enfin, dans le Yorkshire ou n’importe où,
puisque seuls quelques plans de campagnes et de
routes sinueuses renvoient à un réel anglais, le
reste se déroulant sur des scènes de théâtre,
devant des décors en cartons et des toiles peintes,
et avec des dessins de Blutch pour marquer les
changements de lieux. Théâtralité renforcée
encore par des cartons qui indiquent la progression du temps et des saisons vers l’inéluctable.
Car c’est bien de mort qu’il est encore une
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fois question ! Comme un pendant moins sombre et moins funèbre que Vous n’avez encore rien
vu (2012), le film nous donne à voir une danse
macabre sur fond de mort annoncée. En effet, au
début du film se répand la nouvelle qui devait
rester secrète (secret médical oblige) de la mort
dans les six mois d’un certain Georges que nous
ne verrons jamais dans le film (à l’instar du
vieillard acariâtre et injurieux joué par Claude
Rich dans Cœurs (2006), mais n’entendrons pas
non plus. Simplement, l’annonce de sa mort
imminente va déclencher une série de réactions
dans trois couples de ses amis, 6 personnages qui
se croisent déjà pour les répétitions d’une pièce
de théâtre et qui n’auront de cesse de vouloir
embellir la fin de vie de George.
En fait, l’annonce du prochain décès de
George, un vrai séducteur comme le révèlent les
dialogues, va surtout déclencher chez les personnages féminins, qui ont par ailleurs déjà eu une
liaison (ou un mariage) avec lui, un irrépressible
désir de « s’occuper » de lui. Désir renforcé par
l’intégration de Georges dans le casting de la
pièce répétée où il semble exceller ! Les 3 femmes vont donc être entraînées dans une rêverie
amoureuse (George semble leur avoir promis à
toutes 15 jours de vacances à Ténérife !) qui fait
le désespoir des maris ou amant en place.
Comédie vaudevillesque qui amuse au
contraire les spectateurs qui retrouvent le Resnais
qui se moque gentiment de ses personnages toujours prêts à se raconter des histoires (dans tous
les sens de l’expression) et à confondre leurs
rêves et la réalité ! Et qui les fait « surjouer »,
renforçant ainsi la théâtralité déjà soulignée par
le décor. Jusque et y compris dans la cérémonie
funèbre !
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Quant à la petite taupe (artificielle elle
aussi !) qui sort à quelques reprises la tête de son
trou pour regarder les humains s’agiter, même si
le cinéaste dit qu’ « il ne faut en aucun cas y voir
quelque symbole ou message que ce soit », je ne
peux m’empêcher d’y reconnaître le regard
« d’en-bas » d’un Resnais mi-amusé mi-détaché… Mais que dire de l’image en noir-et-blanc
d’un crâne ailé qui ferme le film ?
Serge Lachat
DERNIèRE VALSE
Impossible de ne pas ressentir Aimer, Boire
et Chanter comme le film avec lequel Alain
Resnais prend congé de nous tous (même si l’on
sait qu’il travaillait jusqu’à tout récemment à un
nouveau film). Lecture influencée par sa récente
disparition ? En partie seulement, tant il est manifeste que ce George n’ayant que quelques mois à
vivre, invisible mais vivant, marionnettiste
autour de qui tout s’organise, est un double de
lui-même délibérément choisi par Resnais.
Comme il a choisi de clore le film sur l’enterrement silencieux de George dont on est prêt à
parier qu’il n’est pas dans la pièce d’Alan
Ayckbourn. Et comment ne pas voir l’aspect
réflexif de la dernière image du film, celle d’une
tête de mort ailée déposée sur le cercueil (des
ailes qui disent sans doute cette façon bien à lui
de dire légèrement des choses graves, notamment
à propos du couple…)? Comment ne pas voir que
le mot FIN s’éloigne en point de fuite et qu’avec
le triomphant Sachons aimer, boire et chanter,
chanson qui éclate sur le générique de fin,
Resnais nous offre son dernier mot en forme de
mot d’ordre hédoniste. Bel adieu!
Le titre du film Aimer, Boire et Chanter
est celui d'une valse de Strauss Fils associée au
castelet habité par George, mais c’est aussi celui
de la chanson écrite par Boyer (sur une musique
de Strauss Fils) que l’on entend sur le générique
de fin: en un raccourci malicieux, Resnais nous
donne un ultime exemple de l'éclectisme de ses
goûts musicaux entre grande musique (ce que
sont à n’en pas douter les valses de Strauss) et
chanson populaire.
On sait que les musiques des films de
Resnais ont toujours témoigné de son immense
culture, allant, par exemple, des partitions relevant du sérialisme écrites pour Muriel ou
L’Amour à mort par Werner Henze à la chanson
de variété (On connaît la chanson). Elles témoignent surtout, là encore, de sa grande liberté dans
les fonctions qu’il leur assigne: ells servent tour
à tour de ponctuation, de mise à distance, de support d’un discours. Ainsi la partition de Hans
Eisler pour Nuit et brouillard, jamais redondante
ni illustrative, est un manifeste en faveur de l’écart et du contrepoint significatif (les fameux pizzicati sur les images des défilés SS ou la discrète
transposition du Deutschland über Alles sur les
images des déportés) sans s’interdire l’émotion
(le grand thème lyrique de la fin). Nuit et
brouillard ne serait pas ce qu’il est sans la partition de Hans Eisler, mais c’est bien le sens proprement musical avec lequel Resnais monte images et musique qui en fait le chef-d’œuvre qu’il
est. Cela vaut aussi bien sûr pour On connaît la
chanson, chef-d’œuvre de montage réalisant la
performance d’intégrer 36 extraits de chansons
des années 30 à nos jours dans un continuum
fluide. Et cela vaut pour Aimer, Boire et Chanter.
«Aimer, boire et chanter» avec Hippolyte Girardot, Sabine Azéma © Filmcoopi
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Regarder et écouter ce dernier film, c’est avoir la
preuve éclatante qu’Alain Resnais sera resté jusqu’à la fin le grand monteur qu'il a toujours été.
Christian Bernard
JE TE SURVIVRAI
de Sylvestre Sbille
Joe est un agent immobilier sans scrupules.
Le but de sa vie est de construire un terrain de
golfe sur son immense domaine. Le seul obstacle
à ce projet est le petit cabanon dans lequel vit sa
voisine dont l'âge est déjà bien avancé, qui forme
une enclave dans sa propriété. Rien ne peut
convaincre la vieille dame de quitter les lieux.
Résolu à faire partir celle-ci coûte que coûte, Joe
descend un dimanche matin dans le puits qui alimente en eau la cabane de sa voisine, dans le but
d'endommager le système de canalisation. Quand
il essaie de remonter, un des cordages de l'échelle se casse et Joe tombe au fond du puits. La
seule personne qui lui permettrait d'en sortir est
précisément sa voisine, qu'il déteste et qui le lui
rend bien. Celle-ci refuse d'abord de l'aider, puis,
au fil des jours, une certaine complicité se noue
entre ces deux êtres que tout oppose à première
vue. A la fin du film, la vielle femme aide Joe à
sortir du puits et celui-ci, qui s'est rendu compte
que l'argent n'est pas tout dans la vie, devient un
gentil voisin.
La question que je me suis posée en sortant
de la séance de projection est la suivante : qui,
aujourd'hui, peut et veut bien encore croire à ce
genre de gentilles fables où tout finit bien, où le
méchant se rend compte que ce qu'il fait est mal,
etc., etc. ? En ces temps d'infortunes économiques et politiques, il est difficile de se projeter
dans le monde faussement naïf que nous offre le
film de Sylvestre Sbille et de croire à sa résolution morale qu'on sentait venir dès le premier
plan. Je te survirai n'a rien à nous apprendre, ni
sur le monde, ni sur le cinéma. La seule question
que pose ce film est celle de son destinataire : à
qui s'adresse-t-il donc ? Sylvestre Sbille supposet-il que ses spectateurs seront plongés dans un
profond sommeil qui les empêchera de se rendre
compte de l'irritable fausseté de son film et de l'idéologie qu'il veut nous assener, à savoir que tout
va bien dans le meilleur des mondes ? Ce que
beaucoup de critiques, dont André Bazin et Serge
Daney sont les champions, ont demandé au cinéma, c'est d'enrichir notre vision de la réalité.
Sylvestre Sbille devrait y songer : cela éviterait à
son film de connaître le même destin que son
personnage et de toucher le fond du trou.
Emilien Gür
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DANS L’OMBRE DE MARY DIPLOMATIE
UN WEEK-EN A PARIS
de Volker Schloendorff, avec André Dussolier, de Roger Michell (G-B, 2013), sénario d’Hanif
(SAVING MR. BANKS)
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de John Lee Hancock (USA, 2013), avec Tom
Hanks, Emma Thompson, Paul Giamatti…
P.L. Travers, l’auteure anglaise de Mary
Poppins, vieillissante et désabusée, se débat dans
des difficultés financières de plus en plus menaçantes. Seule solution : accepter de vendre enfin
ses droits à Walt Disney qui rêve depuis une éternité de porter ce livre à l’écran. Elle finit donc par
céder et par s’envoler pour la Californie où
Disney lui prépare un accueil qu’il croit royal.
Mais c’est sans compter avec les préjugés
culturels de l’Anglaise qui va se battre pied à pied
et rendre la vie impossible aux scénaristes et aux
compositeurs de la partie musicale. En effet, elle
refuse absolument de voir son livre devenir une
comédie musicale, de même qu’elle refuse qu’y
soient glissés quelques passages en dessin animé.
Le film se fera-t-il ? Comme tout le monde sait
que Disney a fait de Mary Poppins un triomphe,
il n’y a pas vraiment de suspense. Aussi l’intérêt
de Saving Mr. Banks, au-delà de la découverte de
l’auteure anglaise, réside dans le portrait avantageux de Disney en amoureux fou du cinéma et en
homme intelligent plutôt qu’en simple ogre
financier. De quoi faire tomber quelques préjugés, à moins que Tom Hanks réussisse à nous
faire prendre les vessies pour des lanternes…
Nils Arestrup
Adaptation d’une pièce à succès de Cyril
Gely, ce film est bien du « théâtre filmé » (on est
dans un quasi huis-clos), mais le sujet est si fort
et les comédiens si exceptionnels et si finement
saisis par la caméra de Schloendorff qu’on oublie
cette dimension théâtrale.
Les troupes de Leclerc sont aux portes de
Paris, et les troupes américaines pas loin derrière.
Le général von Choltitz sait que la bataille est
perdue, mais avant de se retirer avec le reste de
ses hommes, il se prépare à détruire la ville sur
les ordres d’Hitler. Arrive le consul de Suède
Nordling qui veut le persuader de renoncer à ce
geste. Au gré d’un dialogue d’une subtilité exceptionnelle, nous voyons von Choltitz fléchir, puis
se raidir dans sa posture d’officier allemand
obéissant (il est le dernier d’une lignée de militaires), réfuter les arguments de Nordling pendant
que celui-ci met au point une stratégie argumentative qui joue sur la raison, les sentiments, le
regard futur de l’Histoire,… Au-delà de son sujet
historique et des professions de foi philosophiques, Schloendorff montre, appuyé sur deux
comédiens au sommet de leur art, que la diplomatie est bien une façon de poursuivre la guerre avec
d’autres moyens que les armes.
Kreishi, avec Jim Broadbent, Lindsay Duncan,
Jeff Goldblum…
Nick et Meg, un couple britannique sexagénaire, est à Paris pour fêter ses trente ans de mariage. Occasion de faire le point et de mesurer ce qui
les attend maintenant que les enfants ont quitté la
maison parentale. Mais avant le tête-à-tête amoureux, Nick avoue qu’il vient de se faire virer de son
université où il enseignait la littérature pour une
remarque jugée blessante à l’égard d’une étudiante. Meg ayant pris une retraite anticipée, voilà qui
annonce de futures difficultés financières.
Ils décident néanmoins de redécouvrir les
plaisirs culinaires de Paris et de voir si leur amour
a résisté au temps. Avec brio, Kureishi (on se rappelle sa collaboration avec Frears pour My
Beautiful Laundrette et Sammy and Rosie get laid)
montre ce vieux couple encore amoureux malgré le
vieillissement, l’usure des habitudes, les blessures
mal refermées, les frustrations, le sentiment d’avoir raté leur vie (renforcé au milieu du film par la
rencontre d’un ancien étudiant de Nick devenu
écrivain à succès)… Comme souvent dans le cinéma anglais, les dialogues sonnent vrai dans la bouche de comédiens exceptionnels et révèlent les
êtres dans toute leur complexité.
Les sorties DVD
sonnage qu’est le meurtrier (Leo McKern) pour
ne pas être découvert, à refuser in fine sa condamnation dès lors qu’elle reposera sur une manipulation des apparences. Un grand film sur la fragilité des preuves, proche de L’Invraisemblable
vérité de Fritz Lang réalisé une année auparavant.
ET ENCORE
TEMPS SANS PITIE (TIME
WIThOUT PITY ) DVD
de Joseph Losey (G.B., 1957)
La seconde moitié des années 50 a vu la
réalisation de films importants dénonçant la peine
de mort. L’angle d’attaque le plus fréquent était
l’erreur judiciaire condamnant à une peine irréversible un innocent. Immense succès à l’époque
de I Want to Live de Robert Wise avec Suzan
Hayward dans le rôle d’une prostituée exécutée
pour un meurtre qu’elle n’avait pas commis. Dès
lors, l’exécution de “vrais” coupables pouvait
paraître implicitement justifiée. Plus radical,
Losey dans Temps sans pitié dénonce la peine de
mort en toute circonstance. En racontant les 24
heures dont dispose un père ancien alcoolique
(Michael Redgrave) pour prouver l’innocence de
son fils avant sa pendaison pour le meurtre de sa
petite amie, Losey donne un tour de vis dialectique supplémentaire : il amène le spectateur,
pourtant témoin des manœuvres du sinistre per-
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Serge Lachat
NEBRASKA
BLU-RAY + DVD + COPIE NUMERIQUE
d’Alexander Payne (USA, 2013)
Voir critique p. 9j80
DALLAS BUYERS CLUB
GEANT (GIANT) BLU-RAY
BLU-RAY + DVD
de George Stevens (USA, 1957)
de Jean-Marc Vallée (USA, 2013)
Voir SM de mars 2014, p. 12
Troisième et dernier film de James Dean,
sorti un an après sa mort, devenu culte. En 3h21,
racontant l’histoire d’une famille sur plus de
vingt-cinq ans, George Stevens livre un grand
film critique et pessimiste sur les changements
socio-économiques affectant le Texas des années
50, entre ranch et pétrole. Un éclairage sans
concession sur le rêve américain, la course à la
réussite, les conflits de classes et de générations,
sans oublier le racisme ou la différence de sexe,
thèmes encore peu traités à l’époque. Avec
Elizabeth Taylor, Rock Hudson, Carrol Baker…
GRAVITY 3D
BLU-RAY + DVD + COPIE NUMERIQUE
d’Alfonso Cuaron (USA, 2013)
Voir SM de déc.2013-janv. 2014 p.13
LA VIE D'ADELE
(ChAPITRE 1 ET 2)
DVD ou BLU-RAY
d’Abdellatif Kechiche (France, 2012)
Voir SM de novembre 2013, p.15-16
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ciné-club universitaire, cycle
« Pierre Clémenti, la
liberté à tout prix »
Du 7 avril au 23 juin, le ciné-club universitaire de Genève met à l'honneur
Pierre Clémenti, acteur et réalisateur qui s'illustra entre autres chez Bertolucci,
Pasolini et Buñuel. Rencontre avec Marco Sabbatini, organisateur du cycle, et
Ana Luisa Castillo, membre du comité de programmation du ciné-club.
L'idée du cycle organisé par Marco
Sabbatini est de rendre hommage à Pierre
Clémenti sous toutes ses facettes, y compris
celle de réalisateur, dont les films « underground » commencent tout juste à être redécouverts. Mais qui est Pierre Clémenti ?
Si ce nom est aujourd'hui moins
connu que celui de Jean-Pierre Léaud
ou d'Alain Delon, acteurs issus de la
même génération auxquels Pierre
Clémenti a parfois été comparé, celui-ci
demeure un acteur mythique des années
60, une véritable icône dont « le visage
à lui seul résume une époque », comme
l'affirme Marco Sabbatini. « C'est un
acteur qui crève l'écran ! Sa présence
énigmatique et magnétique s'est révélée
très subversive. »
Pourquoi donc l'aura de ce nom
s'est-elle amoindrie au fil des ans ?
« C'est un acteur qui n'a jamais vraiment pensé en terme de carrière. Il
choisissait les films dans lesquels il
jouait pour ce qu'ils pouvaient lui
apporter dans ses propres recherches
intellectuelles, même s'il a joué dans
quelques films alimentaires. » Ainsi, il
s'est toujours refusé aux rôles de jeunes
premiers auxquels sa beauté extraordinaire semblait le destiner.
Son injuste emprisonnement à Rome au
début des années 70 a également bouleversé sa
carrière. Le 24 juillet 1971, l'acteur, accusé de
détenir des stupéfiants, est arrêté par les carabiniers italiens et condamné à deux ans de prison,
avant d'être relâché après 18 mois d'incarcération, faute de preuves. « Pierre Clémenti a vécu
cette expérience comme un traumatisme. Alors
qu'il était déjà fragile avant cet épisode, son
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incarcération l'a encore plus affaibli. Cela se
ressent dans son parcours d'acteur, dans lequel,
après cet événement, on n'arrive plus vraiment
à saisir de ligne claire. » « Ce qui est essentiel
chez lui, c'est qu'il a vécu comme il a pensé. Il a
Clémenti à l'Europe, Benjamin ou les mémoires
d'un puceau de Michel Deville, très belle comédie érotique dans laquelle Pierre Clémenti apparaît aux côtés de Michel Piccoli, Michèle
Morgan et Catherine Deneuve, Partner de
Bertolucci, le film le plus expérimental de son
réalisateur dans lequel Pierre Clémenti a le rôle
(doublement) principal, Porcherie de Pasolini,
dans lequel l'acteur apparaît plus énigmatique
que jamais, Les cannibales de Liliana Cavani,
Le pont du Nord de Jacques Rivette, La cicatrice intérieure de Philippe Garrel, film mythique
à la pureté incroyable, et Wheel of
Ashes de Peter Emanuel Goldman, sublime tableau de Paris en 1968, une rareté projeté pour la première fois en
Suisse.
Les trois dernières séances seront
consacrées aux réalisations de Pierre
Clémenti, qui procèdent pour la plupart
d'une démarche autobiographique et
révèlent le monde intérieur qu'abrite l'énigmatique visage de Pierre Clémenti.
« Ses films anticipent l'art vidéo. Il filmait son entourage avec une caméra
qu'il avait acquise. Le montage était
une opération primordiale, qui pouvait
parfois s'étaler sur plus de dix ans. Il
est d'ailleurs d'une complexité hallucinante, et reflète tout à fait la force de
vie de Pierre Clémenti. »
Son fils, Balthazar Clémenti, sera
présent lors de la dernière séance du
cycle, le 23 juin.
Pierre Clémenti
vécu jusqu'au bout son envie d'être libre »,
déclare Ana Luisa Castillo. Il faut donc absolument redécouvrir Pierre Clémenti, cet acteur qui
fut aussi réalisateur, poète, peintre et musicien
et qui voulut réconcilier l'art et la vie, sans
jamais se laisser étiqueter !
Propos recueillis par Emilien Gür
Cycle « Pierre Clémenti, la liberté à tout prix », du 7 avril
au 23 juin. Tous les lundi à 20h à l'Auditorium Arditi
Plus d'informations sur le site des activités culturelles de
l'université de Genève : http://a-c.ch/
A découvrir
Le programme du cycle s'annonce de haute
tenue. Ce sera l'occasion de visionner Belle de
jour de Buñuel, le film qui a révélé Pierre
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Kiarostami, dont le petit gamin misogyne et
phallocrate est peut-être devenu entretemps un
mari doux et amoureux : c’est en tout cas à souhaiter.
avril à la
Cinémathèque suisse
Marin Karmitz et MK2
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Le centre de gravité de la programmation
d’avril est l’hommage à Marin Karmitz, créateur des sociétés MK2 Production (110 films
depuis 1967) et MK2 Diffusion (dont on fête
justement les 40 ans et dont le catalogue comprend 300 titres selon IMDb, Le Voyage dans la
Lune (1902) de Georges Méliès étant le plus
ancien). A l’instar d’un éditeur de livres prestigieux, Karmitz s’est en effet attaché entre autres
à rendre accessibles des œuvres qui ont marqué
l’histoire du cinéma, depuis certains muets de
Chaplin à Dies Irae (1943) de Dreyer. Très souvent, il a produit des films qu’il distribue ensuite dans ses propres salles ou en DVD, reproduisant ainsi la chaîne de production verticale qui
avait été le gage de succès de Hollywood. Il permet ainsi l’éclosion d’œuvres de cinéastes exigeants, fussent-ils étrangers (Yilmaz Güney,
Ruy Guerra, Lucian Pintilie, Vitaly Kanevsky)
ou français. Les dix-sept films choisis par la
Cinémathèque essaient de refléter la grande
diversité du catalogue MK2. À commencer par
un documentaire de Karmitz lui-même, Coup
pour Coup (1971), où des ouvrières du textile,
lasses des brimades et du surmenage, séquestrent leur patron. Un petit regard en arrière sur
les conditions du travail en usine peu après mai
68. Le Mur (1983) est un cri de colère de
Yilmaz Güney contre les sévices subis par les
enfants dans les prisons turques. Equivalent de
The Beggar’s Opera de John Gay, Opera do
Malandro (Ruy Guerra, 1986) narre les amours
contrariées d’un gangster et de la fille d’un
patron de cabaret dans le Rio de la Seconde
Guerre mondiale. Taxi Blues (Pavel Lounguine,
1990), tourné à Moscou peu avant la fin de
l’Union Soviétique, plonge dans les bas-fonds
moscovites (où alcoolisme, marché noir et
débauche révèlent un délabrement de mœurs
symptomatique du déclin de la société communiste) pour nous raconter l’amitié trompée d’un
chauffeur de taxi solitaire pour un saxophoniste
sur la voie du succès. Lucian Pintilie adapte en
1991 le roman Balanta / Le Chêne de Ion
Baiescu avec un tantinet de lourdeur didactique : en route pour trouver une place aux cendres de son père, colonel de la Securitate, Nela
se heurte aux mille et une mésaventures d’un
pays ravagé par l’ordre et la répression selon
Ceausescu. Mon Oncle d’Amérique (1980) de
feu Alain Resnais éclaire le comportement de
trois personnages à la lumière des expériences
faites sur les rats par Henri Laborit, dans le but
de délimiter ce qui pourrait découler de pulsions
inconscientes. I Want to go Home (1989) sur la
réception des comics en France est un autre film
rare de Resnais, qui était un passionné de BD.
Scénarisé par Jules Feiffer (le dialogue intérieur
est inséré dans l’image sous forme de bulles
dessinées par lui), le film est un savoureux portrait des intellectuels parisiens qui se piquent de
culture populaire. D’autres cinéastes qui sont
(sur)représentés par deux films sont Claude
Chabrol, Krzysztof Kieslowski et Abbas
Kiarostami, avec des œuvres bien connues.
Karmitz sera présent
le 3 avril à la projection de Ten (2002) de
Un hommage tout au plus. Pourquoi ces
films-là plutôt que d’autres ? D’abord on se dit
qu’ils ont certainement une valeur iconique,
comme Raiders of the Lost Ark (S. Spielberg,
1981) avec le chapeau d’Indiana Jones. Mais de
quel chapeau se souvient-on dans C’era una
volta il West (Sergio Leone, 1968) ? Puis on se
rend vite compte que bien des titres ont été montrés par la Cinémathèque, il n’y a pas si longtemps. Les programmateurs se reposent un peu
sur leurs lauriers ! A quand donc: « Chemises et
cinéma », « Cafignons et 7e Art » ou « Lingerie
et Négligés » (pour les séances de minuit) ?
histoire Permanente du
cinéma : 1964 (suite)
Le thriller politique Seven Days in May de
John Frankenheimer sur un coup d’Etat militaire
contre le président des Etats-Unis passe régulièrement sur TCM, tout comme Man’s Favorite
Sport, la comédie désopilante de Howard Hawks
sur la supériorité éclatante des femmes. Mais les
deux films de l’Est méritent d’être redécouverts
par les nouvelles générations. L’Âge des
Illusions est le premier long métrage d’Istvan
Szabo: il évoque les rêves d’indépendance et les
pérégrinations amoureuses d’un jeune ingénieur
de télévision, en porte à faux avec la rigueur du
carcan communiste. La Passagère d’Andrzej
Munk traite de la culpabilité d’une ancienne kapo
d’Auschwitz dont la mémoire ruse par une sélectivité lacunaire. Tourné sur les lieux mêmes
d’Auschwitz-Birkenau et achevé par Witold
Lesiewicz, Munk étant décédé en plein tournage
dans un accident de voiture.
Raymond Scholer
Rock Hudson dans «Mans’Favorite Sport»
«La Passagère» d'Andrzej Munk
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Chapeaux et cinéma,
une rétrospective
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découvrant leur commune humanité par delà les
différences de langues, d’accents, de destins.
Qu’ils se découvrent plus forts d’être ensemble,
après tout ce qu’ils ont vécu, c’est une utopie
réalisée.
entretien
Julie Bertucelli
Qels sont vos projets ?
Révélée au grand public en 2002 par Depuis qu’Otar est parti (César de la
meilleure première œuvre et Grand Prix de la Semaine de la Critique à
Cannes), la réalisatrice du très beau La Cour de Babel récemment sorti (voir
Scènes Magazine, mars 2014) répond à nos questions.
Une fiction sur ma famille, et aussi un documentaire. Mais je m’occupe activement de la
défense des droits d’auteur dans l’audio-visuel
depuis que j’ai été élue à la tête de la Société
civile des auteurs multimédia (Scam) l’été dernier. En ce moment je fais la promotion de La
Cour de Babel qui sort dans 12 salles à Paris, ce
qui est plutôt exceptionnel pour un documentaire. Le soutien médiatique est là, les enfants
seront à la télévision. On verra si le film tient ou
s’effondre. Mais ce qui me tient le plus à cœur
est qu’il passe dans les circuits scolaires pour
trouver son public naturel, et qui représente l’avenir.
Propos recueillis par Christian Bernard
Jean-Louis Bertuccelli
«La Cour de Babel» © Agora films
L’effet de réel puissant du film, le
naturel évident des élèves, conduisent à s’interroger sur les conditions du tournage.
La Cour de Babel a impliqué un tournage au
long cours. Quand on vient deux fois par semaine en moyenne sur une année, comme je l’ai
fait, on parvient à se fondre dans la vie de la
classe. J’étais là pour certains moments particuliers comme le départ d’une élève mais je n’ai
jamais rien provoqué et j’ai sans doute manqué
de grands moments. J’ai dû tourner une centaine d’heures.
Il y avait 25 élèves dans la classe,
comment en êtes-vous venue à distinguer
certains d’entre eux, à les constituer en personnages à part entière ?
Tous les enfants ont été filmés, mais certains,
une dizaine, sont davantage suivis parce qu’ils
changent plus visiblement au contact du groupe,
à un âge où l’on peut beaucoup changer en une
année. Mais il faut bien sûr construire une dramaturgie, une tension, et ça se fait au montage,
travail considérable pour ramener plus de cent
heures d’images à une heure trente. Il est rapidement devenu évident que les élèves devaient
toujours être présents. Je n’ai rien gardé des
conseils de classe par exemple, car je ne voulais
pas de discours extérieur sur eux.
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Les élèves ne sont pas les seuls personnages du film
Bien sûr, les parents, les accompagnants, les
tuteurs, sont aussi des personnages, sans oublier
la prof qui est le personnage central même si on
la voit peu et plutôt à la fin. Elle est une pédagogue extraordinaire, incroyablement encourageante. Ainsi le film réalisé par les élèves est
exigeant et ils ont de quoi être fiers du résultat.
Une telle activité sera sans doute pour eux inoubliable.
Comment en êtes-vous venue à vouloir faire ce film ?
Le thème de l’exil, du deuil est déjà présent
dans mes précédents films. J’ai toujours été sensible à la richesse humaine des exilés. Il faut
entendre certaines phrases définitives des élèves, d’une incroyable maturité acquise à travers
les épreuves surmontées. Il faut constater aussi
leur volonté de s’intégrer. Je crois à la richesse
d’une société ouverte aux identités multiples.
J’ai moi-même des origines italienne, belge et
russe et ce n’est pas un hasard si j’ai été l’assistante d’Otar Iosseliani, Krzysztof Kieślowski
ou Ritty Panh, réalisateurs venus en France et
qui m’ont fait connaître leurs pays. Alors oui, je
ne pouvais pas ne pas vouloir filmer cette classe d’élèves venus de tous les continents et
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Le lendemain du jour où Julie Bertucelli
nous accordait cette interview, on apprenait le
décés brutal de son père, le 5 mars au soir, à
Paris, à l’âge de 71 ans. Formé d’abord comme
ingénieur du son, il réalise en 1969 son premier
long-métrage, Remparts d’argile qui obtient le
prix Jean-Vigo en 1970. Dans ce beau film tourné dans le sud de l’Algérie, contemplatif,
presque sans dialogue, rythmé de chants berbères, Bertucelli se place du côté des révoltés,
ouvriers exploités mais aussi de Rima, jeune
femme solidaire de leur combat.
Les années 70 verront ses plus grandes
réussites : Paulina 1880, film en costumes
adapté du roman de Pierre-Jean Jouve avec
Maximilian Schell, Michel Bouquet, Sami Frey,
On s'est trompé d'histoire d'amour, coécrit et
interprété par Coline Serreau, et son plus grand
succès public, Docteur Françoise Gailland,
avec Annie Girardot, François Perrier, JeanPierre Cassel et Isabelle Huppert. Le cœur résolument à gauche, il s’attaque violemment aux
multinationales (déjà) dans L’Imprécateur,
adapté d’un roman de René Victor Pilhes, prix
Femina en 1974, au casting somptueux: Jean
Yanne, Michel Piccoli, Jean-Pierre Marielle,
Jean-Claude Brialy, Michael Lonsdale, Marlène
Jobert, Christine Pascal… Par la suite sa carrière se tournera davantage vers la télévision.
Christian Bernard
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tres, le généreux déçu par son fils, le taciturne meurtri par la guerre
d'Algérie, l'ex-beau parti qui se souvient de l'avoir été... et Martin, jeune
homme inquiet - muni pour tout bagage d’un vague coffret et des quelques
derniers mots d’une mère qui cachait de lourds secrets… - que la piste du
père inconnu mène jusqu'à ces vieillards,
en tournée
Invisibles
Sur le plateau, cinq têtes blanchies, cinq hommes
‘rescapés’ des Trente Glorieuses, immigrés chibanis1
jamais rentrés au pays. Forcés de rester en France
pour avoir le droit de toucher leur retraite, ils se
souviennent, ils vivent en communauté de destin, ils
parlent, ils content la vie sur les chantiers, la vie sans
les femmes, leur vie en rien donnée. Ni donnée à voir, ni
donnée à entendre, ni même simplement considérée…
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Nasser Djemaï, dont le père a quitté l’Algérie dans les années soixante, met en mouvement et en mots l’histoire de ces travailleurs invisibles,
venus accomplir une seule et unique mission: travailler pour faire vivre
une famille qu’ils ne verront que de sept en quatorze. Abdelmalek Sayad,
le défunt compagnon d’enquêtes de Bourdieu, avait le premier mis en
exergue ces présences transitoires : « Le séjour qu’on autorise à l’immigré est entièrement assujetti au travail, seule raison d’être qu’on lui
reconnaisse ». Travailleurs, renchérit Nasser Djemaï, qui ont vécu une
double tragédie, une ‘double absence’ comme disait encore Sayad : plus
attendus nulle part, ils sont les apatrides de leur propre vie, elle-même
devenue continent à géographies variables, car faite d’allers et retours
impromptus et parfois improbables. « La première fois que mon père est
venu en France, son obsession était de payer une maison à son père… Je
suis né en France, j'ai un frère et une sœur nés au pays ; ma mère me
racontait que ma grande sœur, à force de pleurer, commençait à perdre la
vue. »
Porté essentiellement par cinq formidables acteurs, le spectacle tourne autour de cinq personnages : le sage qui gère les papiers pour les au-
Chœur antique
Souvent assis à la table en Formica pour une partie de dominos sans
enjeu véritable sauf celui de tuer le temps point par point, ou alignés face
public sur des chaises comme des fruits façon nature morte, ils parlent, se
confient, et d’un coup, c’est un un chœur antique qui martèle et déclame.
Une voix de l’intérieur, de l’intime surgit. Et émeut durablement.
La mise en scène simple et précise est dépouillée, à l'image de ces
oubliés de l'Histoire. Les dialogues dans une langue qui mêle l’arabe au
français - authentique poésie spontanée du quotidien - sont souvent teintés d'humour, même s’ils évoquent l'absence douloureuse de liens familiaux, l’atroce solitude (« Si tu veux vivre, il faut oublier la famille »), l'indépendance ‘en question’ de l'Algérie voire la lente disparition d’un autre
monde possible (« La santé, les papiers, la mosquée, c'est tout ce qu'il
reste ») dans un jour-après-jour qui se répète inlassablement, infatigablement. Et qui vieillit comme les hommes de cette histoire.
Nourrie des témoignages que Nasser Djemaï a recueillis dans les maisons de travailleurs et les cafés sociaux, aux portes des mosquées ou dans
les foyers Sonacotra de piètre réputation, la pièce oscille entre théâtre
documentaire et politique, mais très finement. Car Invisibles fait surtout
œuvre conservatoire, œuvre de mémoire au sens moins galvaudé, moins
habituel, et peut à la faveur de ce ‘sens’ nouveau, être vue par les trois
générations dites issues de l'immigration.... et bien entendu aussi par ceux
qui ne sont pas les descendants de cette histoire. Car, comme le dit
Djemaï : « Ce n'est pas qu'une histoire de Chibanis. Invisibles est une histoire universelle qui raconte la quête du fils à la recherche de son père,
évoque les travailleurs de l'ombre, l'Histoire de la France, traite de la
question de la vieillesse et de la pauvreté… »
Histoire, en dernière analyse, d’une recherche sur soi, sur les autres,
sur un passé qui n’en finit pas de se dépasser. Et de nous dépasser.
Rosine Schautz
1 Chibani signifie en arabe maghrébin « vieux, vieillard, vieil
homme » ou « cheveux blancs ». Ces termes désignent les travailleurs immigrés, généralement maghrébins, mais également
originaires d'Afrique sub-saharienne, devenus retraités immigrés. Ils sont également parfois appelés vieux migrants ou
immigrés âgés. Ayant fait l'objet d'un statut particulier, les
Chibanis se trouvent souvent, au moment de leur retraite, lésés
par rapport aux personnes de nationalité française ayant exercé le même emploi. On estime entre 800 000 et 850 000 les personnes relevant de ce « statut de précarité » avéré, dont 350 000
ont plus de soixante-cinq ans.
Tournée :
Invisibles de et m.e.s. Nasser Djemaï
- Salle CO2 – La Tour-de-Trême, 5 avril 2014
- Théâtre Benno Besson – Yverdon-les-Bains, 8 avril 2014
- Théâtre de Vevey –11 avril 2014
«Invisibles» © Philippe Delacroix
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Remettez le boîtier et retournez la montre : c’est
une pièce de Feydeau vue de la salle – les heures passent, naturelles, rapides, exquises… »
disait son ami Sacha Guitry.
théâtre du loup
La puce à l’oreille
Le ‘boîtier’ renversé ?
Vu le succès rencontré lors de la création du spectacle en 2012, L’Autre
Compagnie reprend sa Puce à l’oreille au Loup. Un vaudeville haut
en couleurs à ne pas manquer !
Feydeau : une vie, un genre
renouvelé
Georges Feydeau, fils présumé de l’écrivain Ernest Feydeau et de Léocadie Boguslawa
Zalewska ou, selon les dires de cette dernière,
‘quelques jours’ dans un palace tout proche de
la Gare Saint-Lazare, le Grand Hôtel Terminus.
Ce lieu devint finalement son domicile pour…
une dizaine d’années !
On apprendra en effet que
Chandebise, bourgeois notable du
boulevard Malesherbes, a des problèmes de puissance et que pour y
remédier, il porte des bretelles
spéciales ( !) qu’il n’ose montrer à
sa femme… Deuxième rebondissement: Chandebise a un parfait
sosie, le valet Poche. La ressemblance entre les deux sera ainsi le
principal ressort comique de la
pièce. De nombreux quiproquos1
s’ensuivent pour le plus grand
bonheur du spectateur qui sait
d’entrée de jeu qu’il s’agit de deux
personnages distincts, et qui par
là-même a toujours une avance de
compréhension par rapport aux
personnages figurés sur scène.
«La Puce à l’oreille» Photo Emmanuelle Bayart
fils de Napoléon III ou encore du duc de Morny
- mater semper certast ! - puisait son inspiration
dans sa vie nocturne dissipée qui le menait invariablement chez Maxim’s. Là, en compagnie de
quelques amis de hasard, il jouait à des jeux
d’argent, prenait de la cocaïne, trompait son
épouse avec des femmes et des hommes et…
écrivait.
En 1909, après une violente dispute avec sa
femme qui avait pris un amant (égalitarisme
quand tu nous tiens !), il quitta incontinent le
domicile conjugal et, prétextant les encombres
inhérents à un déménagement, s’installa pour
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C’est précisément à la suite de cette séparation qui se mua en divorce que Feydeau revivifia le genre du vaudeville. Il creusa les caractères des personnages de ses comédies de mœurs,
et peignit avec panache la médiocrité des existences bourgeoises, petites-bourgeoises diraiton peut-être aujourd’hui, existences qu’il sut
sans relâche tourner en ridicule, mais jamais en
ricanement.
« Faites sauter le boîtier d’une montre et
penchez-vous sur ses organes : roues dentelées,
petits ressorts et propulseurs… C’est une pièce
de Feydeau qu’on observe de la coulisse.
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Raymonde Chandebise, horriblement
jalouse de nature, croit que son mari VictorEmmanuel, directeur de la Boston Life
Company, la trompe. C’est son inactivité
sexuelle qui lui a mis « la puce à l’oreille ». Elle
a l’idée alors de lui adresser une fausse lettre
pour l’inviter à l’Hôtel du Grand Minet, à
Montretout (nom qui en dit long), où toute une
série de rendez-vous galants et de traquenards
laissent plusieurs couples dans de beaux bras et
de sales draps. Raymonde croit pouvoir confondre son mari en lui brandissant
sous le nez des bretelles oubliées
au fameux hôtel et livrées le matin
même par la poste. Premier malentendu !
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Comédie d’équivoques à consommer sans
modération tant il est bon de rire en se découvrant si ‘beaux’ en ces miroirs…
Rosine Schautz
Théâtre du Loup. La Puce à l’oreille
Georges Feydeau
Mise en scène Julien George
1er au 20 avril 2014
1 De quid pro quo, litt. ‘une chose à la place d’une autre’.
CQFD !
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naïve de son jeune maître, éternel adolescent.
Avec l’aide de mon équipe j’ai conçu l’espace
comme une machine à jouer, une sorte d’arène
avec des portes. La durée de la représentation
sera plus courte, une heure de moins que celle
de Molière, soit une heure trente.
casino-théâtre, genève
L’Étourdi
La Cie Marin et Confiture, la Cie qui étale la culture ont collaboré à cette
adaptation aussi décoiffante que virtuose de L’Étourdi de Molière, sa
première farce, en vers et en cinq actes. Très peu connue, cette pièce puise
au répertoire de la commedia dell’arte et présente une intrigue de
structure classique que l’on retrouvera plus tard dans les Fourberies de
Scapin. Elle offre surtout un rôle de choix à Philippe Cohen qui interprète
Mascarille, le valet ingénieux et inventif, fourbum imperator comme il
s’auto-proclame.
Vous avez pensé au Menteur de
Goldoni en montant la pièce ?
Il est vrai que le Menteur et Mascarille inventent – ou s’inventent – des mondes, qu’ils jouent
sur le secret. Mascarille menace d’abandonner
après chaque échec du stratagème mis en place
mais ce qu’il aime, c’est imaginer et être maître
du jeu. Il reproche à plusieurs reprises à son
Entretien avec François Marin, le metteur
en scène de cette création au théâtre de Valère
qui se jouera sur la scène du Casino Théâtre de
Genève du 1er au 13 avril 2014.
24
Après des mises en scène de textes
d’auteurs contemporains, vous vous
confrontez cette fois à une pièce de Molière à
la fois classique et très peu connue. Qu’est-ce
qui vous a séduit dans ce texte ?
Quand Philippe Cohen – que je connais depuis
trente ans et qui avait vu ma mise en scène du
Menteur de Goldoni à Kléber-Méleau - m’a proposé de mettre en scène L’Étourdi, j’ai commencé par lire attentivement la pièce qui m’a
fasciné par l’ingéniosité et l’obstination du personnage central face à la naïveté gaffeuse du fils
de famille dont il sert les intérêts amoureux. La
pièce présente également l’attrait de la nouveauté en ce sens qu’étant méconnue, elle
conserve sa fraîcheur, contrairement aux grandes pièces classiques dont on a toujours en tête
les mises en scène précédentes, ce qui peut être
inhibant. Sur les treize stratagèmes imaginés par
Mascarille, j’ai donc suggéré à Philippe Cohen
que nous en retenions onze. Il fallait ensuite
rendre accessible au public la complexité et la
recherche de la langue du 17e siècle afin de rendre l’intrigue limpide. C’est ce qu’a fait avec
brio Philippe Cohen. On se souvient de
son Toubib à l’insu de son plein gré, adaptation
brillante du Malade imaginaire, les deux versions se succédant. Cette fois, les scènes seront
jouées en français contemporain ou sous-titrées,
grâce à la présence de deux traducteurs. C’est
donc à la fois et simultanément un travail de
réécriture, de traduction, d’adaptation pédagogique. Nous sommes constamment sur plusieurs
niveaux : la présentation de l’objectif (rendre la
pièce compréhensible), le jeu lui-même, les
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«L’Étourdi» avec Julien Opoix (L'étourdi) et Philippe Cohen (Mascarille)
interruptions des traducteurs (par exemple pour
remplacer courroux par colère, etc.).
Faire rire n’est jamais tâche aisée.
Comment avez-vous conçu la mise en scène ?
Pour amuser, il faut une grande exigence dans le
travail et L’Étourdi adapté par Cohen est particulièrement difficile à jouer car il y a différents
niveaux de langage et des mises en abîme. En
effet, le texte original se double d’une fable sur
l’administration rêvée ou fantasmée qui déborde sur l’artistique. Les difficultés administratives sur scène font écho à celles rencontrées par
la compagnie Confiture, en déficit de reconnaissance officielle bien que plébiscitée par le
public. Les traducteurs y jouent plusieurs rôles.
C’est donc complexe et ce doit être enlevé,
léger, pétillant, à l’image de Mascarille, personnage brillant et jamais découragé, qui rebondit
après chaque échec provoqué par la balourdise
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maître son imaginative, voulant garder la main
sur les stratagèmes et vise plus l’échafaudage
du mensonge que sa réussite. En somme, il veut
briller avant de servir les amours de son maître.
Vos projets pour la suite… ?
La saison 2014-2015 sera très chargée, entre
reprises et création. La Cie Marin, qui existe
depuis quinze ans, se porte bien.
D’après les propos recueillis par
Laurence Tièche
« L’Étourdi (en traduction simultanée) » au Casino
Théâtre dans le cadre de l’abonnement Confiture, du 1er
au 13 avril 2014.
Réservation 022/793.54.45 ou [email protected]
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Théâtre de Carouge
« La double inconstance » de Marivaux - mise en scène de Philippe Mentha
Jusqu’au 6 avril 2014 ( location 022/343.43.43 - [email protected] )
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qu’il contient intrinsèquement et pas forcément
de lui appliquer MES propres visions ou interprétations et MA propre sensibilité. Et il faut
dire une chose très importante aussi : le théâtre
est un art collectif. Je me suis occupée de la
mise en scène mais tous les artistes ont vraiment
beaucoup apporté au spectacle, ils enrichissent
grandement mes décisions de par leurs expériences.
la comédie de genève
Yvonne, Princesse
de Bourgogne
Yvonne, Princesse de Bourgogne, qui s’est joué du 27 février au 8 mars
à la Grange de Dorigny, arrive en territoire genevois à La Comédie du
8 au 11 avril sous la direction de Geneviève Guhl, avant de prendre son
envol pour Sion puis Fully.
26
Witold Gombrowicz, auteur polonais du
début du siècle dernier, écrit en 1938 Yvonne,
Princesse de Bourgogne, une farce qui se veut
parodie des héros shakespeariens. La pièce qui
ne se jouera pour la première fois qu’en 1957 à
Varsovie, conte les mésaventures du prince
Philippe qui décide d’épouser Yvonne, fille de
basse naissance, pour la seule raison qu’elle ne
lui inspire rien, si ce n’est le dégoût le plus profond. Cette acte de révolte immature, le prince
voulant se libérer des attentes que la société et
la royauté lui impose, ne sera pas sans conséquences pour la vie de cour. Entre complot et
coup de sang, la présence d’Yvonne et son apathie sans issue fera plus que donner un grand
coup dans la fourmilière : le chaos généré par ce
mariage grotesque fera office de boîte de
Pandore qui ne laissera rien ni personne indemne au sein du château. Entretien.
Pourquoi avoir choisi ce texte ?
G.G. : Initialement je voulais faire la Princesse
au Petit Pois, et de fil en aiguille je suis tombée
sur cette celle-ci, tout à fait atypique. Ce n’est
pas que je tenais absolument à faire une histoire de princesse, mais dès la lecture de la pièce
j’ai été très intéressée à la mettre en scène. J’ai
d’emblée eu un pressenti positif par rapport à ce
qui se trouvait dans ce texte, son potentiel.
Avant de commencer le processus de mise en
scène d’une pièce, c’est tout un parcours qui se
met en branle et, guidé par son ressenti, des choses se révèlent au fur et à mesure que le travail
avance, car il est évident qu’au départ j’étais
loin de connaître la pièce dans ses moindres
recoins ! Les intuitions, les sensations qu’elle
m’évoquait à la première lecture se sont confirmées depuis. J’ai été attirée par l’étrangeté de la
pièce, qui est à la conjonction de beaucoup de
mondes et d’univers, et le fait qu’elle ne paie
pas de mine, avec sa trame assez simple mais
e
Yvonne, Princesse de Bourgogne, fable
philosophique sur l’esthétisme et le caractère prédéfini de la place sociale des acteurs.
Est-ce qu’une de ces dimensions vous a plus
intéressée que l’autre ?
qui se révèle très complexe et poétique. C’est
cette dualité qui m’a beaucoup plu chez
Yvonne,…
Le thème principal de la pièce est
celui de la révolte immature, de l’impulsivité
propre à la jeunesse. Avez-vous ressenti une
résonance particulière avec votre travail ?
J’ai découvert ce thème en commençant à travailler sur Gombrowicz, en effet c’est un sujet
récurrent de son œuvre, un matériel très intéressant sur lequel travailler, surtout d’après la
vision qu’en avait l’auteur. Il la revendiquait
comme une valeur et non comme une tare, ce
qui est une démarche intéressante pour son
époque comme pour la nôtre. Selon lui, l’immaturité est une denrée souple, qui ne s’est pas
encore vu rigidifiée par le passage de l’enfance
à l’âge adulte. Ainsi, il la considère comme une
fraîcheur et comme un trait de caractère à part
entière, non pas comme un manque de maturité.
Il passe outre le caractère purement négatif de la
définition de l’immaturité, « un manque de
maturité » pour en faire quelque chose d’entier
et de singulier. Pour moi cela à fait écho.
Comment avez-vous abordé le texte
afin de le mettre en scène ? Avez-vous apportez un plus à la pièce à travers votre sensibilité artistique ?
Je me suis focalisée sur la traduction de
Constantin Jelenski et Geneviève Serreau, plus
ancienne, plutôt que sur celle d’Yves
Beaunesne, qui m’intéressait moins car elle
avait l’air de signifier que l’ancienne était désuète. Or elle n’est aucunement désuète, la langue est très belle et me parlait beaucoup plus
que celle de Beaunesne.
Faire une œuvre tient au fait de créer une mise
en scène qui soit intéressante évidemment, mais
j’ai toujours le souci de révéler un texte et ce
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L’esthétisme est une façade intéressante que j’ai
développée. Gombrowicz parle beaucoup de
« l’anarchie de la forme » dans son œuvre. Il
compare l’esthétisme à quelque chose de protéiforme, et donc très éloigné de l’usage qu’on en
fait actuellement, qui voudrait que l’on tende à
ressembler à une seule forme de cet esthétisme
prédéfini par l’époque. La forme étant une des
grandes préoccupations de l’auteur, je me suis
beaucoup attardée sur cet aspect dans ma mise
en scène, notamment à travers les costumes.
Le social et le philosophique se recoupent selon
moi. Ainsi Yvonne,… est une dénonciation
sociale sous forme philosophique, à travers
cette problématique de l’esthétisme et des carcans de beauté, et poétique d’un problème
social. Mais le philosophique est une manière
de parler plus de l’humain que du social. A
mon avis, Gombrowicz se voyait plus comme
un philosophe, un humaniste qu’un engagé politique. C’est la vision que j’ai choisie de poursuivre dans mon spectacle.
Propos recueillis par Romeo Cini
Yvonne, Princesse de Bourgogne de Geneviève Guhl, d’après le texte de Witold Gombrowicz
- Du 8 au 11 avril. La Comédie de Genève, relâche lun,
mar-ven 20h, mer-jeu-sam 19h, dim 17h (loc. :
022/320.50.01 / [email protected])
- le 2 mai 2014 au Théâtre de Valère Sion
- les 9-10 mai 2014 à la Belle Usine Fully
page ci-contre :
«Yvonne, Princesse de Bourgogne»
photos © Isabelle Meister
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« Yvonne, Princesse de Bourgogne » de Gombrowicz - mise en scène de Geneviève Guhl
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salle provisoire pour le grand théâtre
Nouvel air lyrique
à Genève
Le Grand Théâtre de Genève doit fermer, pour travaux, de juillet 2015 à août
2017. Une salle de remplacement s’imposait donc, pour pouvoir accueillir deux
saisons de la maison lyrique genevoise. C’est chose faite et contrat signé ce
4 mars dernier, à Paris en présence de la presse, à la Comédie-Française. Car
c’est du Théâtre éphémère de la Comédie-Française qu’il s’agit.
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Cette présentation parisienne a été faite par les
soins de Muriel MayetteHoltz, administratrice de la
Comédie-Française, Tobias
Richter, directeur du Grand
Théâtre, Lorella Bertani,
présidente de la Fondation
du Grand Théâtre, Rémy
Pagani, conseiller de la Ville
de Genève, et Daniela
Liengme, architecte chargée
du projet. Résumons ce projet. La Comédie-Française
avait fait bâtir, sous la
colonnade qui donne accès
aux jardins du Palais-Royal,
derrière le bâtiment de son
historique théâtre, un
Théâtre éphémère destiné à
recevoir ses spectacles pendant la fermeture (pour travaux également) de sa salle
Richelieu durant toute l’année 2012. C’est ce théâtre, démonté et réaménagé, qui va voyager à Genève, pour devenir
durant deux saisons la salle de spectacles
lyriques de la ville.
Un théâtre en bois
Le Théâtre éphémère est un théâtre entièrement construit en bois. Son acoustique, adaptée
au théâtre parlé, se révèle tout autant judicieuse
pour la voix chantée comme pour les instruments. C’est entre autre, et entre autres choix et
possibilités, ce qui a décidé Tobias Richter et
son équipe à se porter acquéreurs du bâtiment.
Il sera entièrement réinstallé à Genève, mais
subira aussi quelques transformations : une
fosse sera créée (bien évidemment), la capacité
a
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pas trop cher ”. Le budget prévu (6’800’000
francs suisses) est ainsi financé par les mécènes,
dont le mécène principal et le plus important : le
Cercle du Grand Théâtre. Le Bâtiment des
Forces motrices restera quant à lui dans son
activité, mais ses 940 places n’auraient pu
accueillir un public suffisant, ni sa technique,
des productions élaborées. Tobias Richter s’est
plu aussi à évoquer quelques références : le
Théâtre de Carouge, ou la Grange de Verbier,
très proches dans leur aspect, ou alors, projet
beaucoup plus ancien, le théâtre en bois envisagé à Genève du temps de Rousseau, et encouragé par lui. C’est Muriel Mayette-Holtz qui trouve ce joli mot : “ c’est un lieu de vie et de fête,
Theatre ephemere © Christophe Raynaud de Lage / collection Comedie-Francaise
sera portée de 750 places actuellement à 1200
places. Le cadre de scène sera élargi. Il est
prévu également de mettre en place une climatisation (qui n’existe pas dans la salle actuelle
du Grand Théâtre). Six mois de démontage du
bâtiment, et un an de remontage, devraient
mener à juillet 2015, et à son inauguration genevoise. L’ouverture au public interviendra en
septembre 2015, pour le début de saison.
Un théâtre porte-bonheur
un théâtre qui a une âme, un théâtre porte-bonheur ”. Ce à quoi Richter ajoute : “ à nouvel
espace, nouvel esprit et nouvelles créations ”.
Emplacement ?
Reste une question qui taraude, on imagine, tous les Genevois : où ce théâtre sera-t-il
implanté ? Il semble, après plusieurs autres possibilités, que le choix soit entre la Place des
Nations ou la Caserne des Vernets. Le tout proche avenir nous dira ce qu’il en est…
L’origine de ce choix ne s’est toutefois pas
fait en un jour. Comme le souligne Tobias
Richter, il a fallu, après avoir envisagé plusieurs
hypothèses, “ minimiser les pertes et les coûts,
opter pour un lieu efficace et en même temps
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Pierre-René Serna
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IRRÉSISTIBLE
DE FABRICE ROGER-LACAN
MISE EN SCÈNE CLAUDE VUILLEMIN
ÉQUIPE ARTISTIQUE FRANÇOIS NADIN
MADELEINE PIGUET RAYKOV
ÉLÉONORE CASSAIGNEAU
DAVIDE CORNIL, CHARLOTTE FERNANDEZ
PIETRO MUSILLO, KATRINE ZINGG
PRODUCTION LE POCHE GENÈVE
THÉÂTRE LE POCHE
(Comédie sa rca sti q u e )
www.lepoche.ch / 022 310 37 59 / location Service culturel Migros
24 MARS > 13 AVRIL 2014
CRÉATION VISUELLE JEAN-MARC HUMM, LA FONDERIE / PHOTOGRAPHIE AUGUSTIN REBETEZ
LE POCHE GENÈVE EST SUBVENTIONNÉ PAR LA VILLE DE GENÈVE (DÉPARTEMENT DE LA CULTURE)
LA RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE. IL EST GÉRÉ PAR LA FONDATION D’ART DRAMATIQUE (FAD)
PARTENAIRES MEDIAS : LEPROGRAMME.CH & NOUVELLES
Madeleine Piguet Raykov, comédienne
François Nadin, comédien
o p é r a
second tour des élections municipales, le 30
mars, permettra d’y voir plus clair…
sur les scènes lyonnaises
Chronique lyonnaise
Steve V de Roland Auzet
et Fabrice Melquiot
Passons à l’encre fraîche, au Théâtre de la
Renaissance (les 14, 15, 17 et 18 mars), à
Oullins, et en collaboration avec l’Opéra de
Lyon et avec le remarquable festival biennal
Serge Dorny
et l’Opéra de Lyon
30
L’Opéra de Lyon vit en ce moment au rythme, troublé, de son patron : à la tête de cette
institution depuis 2003, Serge Dorny a, ces
deux dernières années, tenté trois fois d’en partir. S’il ne fut pas retenu pour diriger l’Opéra
national de Paris puis le Festival de Salzbourg,
il l’emporta, en septembre 2013, au poste d’intendant du Semperoper à Dresde et commença
aussitôt à y œuvrer. Ce théâtre, qui est un des
plus anciens d’Allemagne, comprend, en son
sein, un opéra, un ballet et un orchestre (la
fameuse Staatskapelle de Dresde). Son intendant doit s’entendre avec son General-musikdirector, Christian Thielemann, tant les contrats
de ces deux patrons ont de zones de recouvrement. Soudain, le 24 février dernier, dans un
Le rappeur Oxmo Puccino © Mondino
communiqué singulièrement
dur, la ministre de la culture de
Saxe annonça que le contrat de
Serge Dorny était rompu.
Comprendre les motifs de
ce divorce n’est pas aisé :
« Mésentente avec l’équipe
artistique et administrative », à
en croire la partie saxonne ; et
« Si j’avais eu une claire
connaissance de la nature et du
périmètre des pouvoirs de chacun, j’aurais décliné la proposition », affirme Serge Dorny.
Une certitude, ce dernier
reprend ses fonctions lyonnaises, dont il avait pris soin de ne
pas démissionner. Mais trois
tentatives de sortie n’ont-elles
pas trop manifesté, aux personnels de l’Opéra de Lyon et aux
membres de son conseil d’administration, que leur patron
leur avait déjà dit « au
revoir » ? Assurément, l’après
Fabrice Melquiot
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Musiques en scène : la création de l’opéra Steve
V (King Different). Prononcez « Steve five »
tant le livret, écrit par le virtuose Fabrice
Melquiot (l’actuel directeur du théâtre Am
Stram Gram, à Genève), entrelace deux souverains inventifs : Henry V selon Shakespeare ; et
Steve Jobs, le fondateur d’Apple.
Le compositeur Roland Auzet y exalte ses
deux singularités : des styles dissemblables, y
compris le multimédia, l’électronique et le rap
(avec le concours d’Oxmo Puccino) ; et, plus
important, son « écriture du plateau » (soit :
écrire directement le plateau et créer
depuis/sur/avec le plateau). Une vivifiante source de frictions et de vie.
Et, au-delà de Steve V, des regrets : parce
que les élus locaux lui ont été chiches en
moyens financiers et en confiance artistique,
Roland Auzet ne poursuit pas sa passionnante
mission dans ce Théâtre de la Renaissance où il
a réalisé trois riches saisons vouées au théâtre
musical.
Frank Langlois
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théâtre forum meyrin
Le Crocodile
trompeur
Après avoir été créé au Théâtre des Bouffes du Nord à
Paris en mars 2013, le spectacle le Crocodile trompeur
revient. Il s’agit d’un arrangement d’après Didon et Énée
de Purcell. Le “ Crocodile ” en question venant de mots
du livret, allusion aux fameuses “ larmes ” du reptile.
Didon et Énée se retrouve ainsi réécrit pour petite formation de jazz,
ou apparenté, avec l’appoint de solistes vocaux ; acteurs-chanteurs, d’un
bon niveau de choristes ou de solistes professionnels, dont Marion Sicre,
pour cette troupe d’occasion. Cette référence hautement culturelle s’insère dans une sorte de pièce parlée, dont les tirades, inventées pour la circonstance, tiennent du délire improvisé.
La mise en scène de Samuel Achache et Jeanne Candel s’accorde à
cette tonalité, amusante parfois et surprenante souvent, avec un aspect bricolo parmi un amoncellement d’objets hétéroclites. Les amateurs de
musique ou de théâtre peuvent se laisser surprendre, mais les grands
enfants, que nous sommes tous, sont ravis.
Pierre-René Serna
«Le Crocodile trompeur» © Victor Tonelli
Théâtre Forum Meyrin
Les 29 et 30 avril : Le Crocodile trompeur - Didon et Énée d'henry Purcell, mix entre
théâtre et musique, m.e.s. Samuel Achache & Jeanne Candel
Location : 022/989.34.34
«Le Crocodile trompeur» © Victor Tonelli
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milan
hauts et bas
à la Scala
Lucia di Lammermoor sur la scène milanaise, c'est une
longue histoire qu'il ne vaut guère la peine de rappeler, la
nostalgie pouvant être mauvaise conseillère.
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Mais si l'on a pu être tenté de consulter l'incontournable liste des
grandes voix ayant interprété le trio composé de Lucia, Enrico et Edgardo
à la Scala dans le passé, c'est que le choix de l'interprète du rôle-titre en ce
mois de février 2014 incitait à s'interroger sur les « casts » offerts actuellement. Cela se justifiait d'autant plus que le prétexte habituellement invoqué par la direction actuelle était l'envie de proposer des mises en scènes
novatrices et des choix de directeurs musicaux talentueux. Or, ni la production made in Metropolitan Opera de Mary Zimmerman – d'un classicisme tout à fait honorable par ailleurs, mais sans guère d'inventivité -, ni
la direction musicale sans grand éclat de Pier Giorgio Morandi ne pouvaient prétendre de rester dans les mémoires. De manière assez amusante,
tout mélomane ayant assisté aux reprises parisiennes de la spectaculaire et
originale Lucia di Lammermoor conçue par Andrei Serban pouvait se dire
qu'après tout, le directeur de l'Opéra de Paris Nicolas Joel que d'aucuns
considèrent comme étant plus traditionnel dans ces choix pouvait en l'occurrence en remontrer au « progressiste » Stéphane Lissner, d'autant que
la première distribution parisienne comprenait une Patrizia Ciofi sublimée
par le rôle et superbement entourée par Vittorio Grigolo et Ludovic Tézier.
On retrouvait tout de même Vittorio Grigolo à Milan pour quelques
instants de brio faisant oublier la banalité d'une représentation sans âme ni
passion, d'autant que Massimo Cavaletti incarnait un Enrico manquant d'épaisseur dramatique. Faisant sans doute partie de ces artistes ayant gagné
quelques concours grâce à une voix ne manquant pas d'un certain charme,
la soprano russe Albina Shagimuratova s'affirmerait certainement dans le
«Il Trovatore» © Brescia/Amisano – Teatro alla Scala
répertoire du 18e siècle, à l'exclusion de Gluck. Mais Lucia ? Certes, elle
sait faire apprécier des pianissimi séduisants, mais la voix manque de
souffle, de puissance et surtout, elle semble rester « hors » du personnage,
plus somnambule (sic) qu'amante trahie. Alors, sans remonter aux calendes grecques, on se prend à songer son seulement à « la » Ciofi, mais malgré tout à Natalie Dessay – qui avait triomphé à de nombreuses reprises au
Met précisément dans cette même mise en scène – ou encore à Annick
Massis, émouvante interprète du rôle. Mais peut-être est-ce désormais
ainsi – et au prix fort, 250 euros la place au parterre – que l'on distrait les
touristes (« once in a lifetime at the Scala »?) un dimanche après-midi à
Milan... ?
Il Trovatore
Mais de fait, on retrouvait deux jours plus tard une distribution plus
en rapport avec les habitudes du lieu avec un Trovatore plus homogène à
défaut d'être mémorable. Certes, on restait dans le genre « grand opéra »
avec une autre reprise (un choix ou une contrainte budgétaire ?), celle de
la production de Hugo de Ana créé en décembre 2000 proposant une succession de décors imposants, de la scène aux cintres dans des tonalités plutôt sombres. Menant avec vivacité et des variations de tempi appropriées
l'Orchestre et l'excellent Chœur de la Scala, Daniele Rustioni s'avérait un
maître d'œuvre musical convaincant, tandis que les interprètes étaient au
bénéfice d'une mise en place certes plutôt traditionnelle mais néanmoins
efficace dans le cadre imposant qui leur était offert. La Leonora de Maria
Agresta pouvait ainsi séduire tant par ses qualités vocales, la précision et
l'expressivité étant au rendez-vous, que par son jeu très crédible. Elle était
fort bien entourée par Marcelo Alvarez, dont la noblesse du chant et la stature adéquate s'imposaient sans peine avec toutefois une tendance à forcer
parfois les effets au détriment de l'émotion ; face à lui, le Conte di Luna
de Franco Vassallo offrait une prestation assez neutre, manquant parfois
de couleurs, tandis que l'Azucena d'Ekaterina Semenchuk faisait apprécier
un beau timbre mais son interprétation aurait été sans doute plus notable
avec un surcroît de dramatisation.
Frank Fredenrich
«Lucia di Lammermoor» © Brescia-Amisano / Teatro alla Scala
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à madrid
Brokeback Mountain
et Curros Vargas
Le hasard de la programmation lyrique à Madrid fait se coïncider deux
ouvrages a priori dissemblables, mais qui tout bien considéré recèlent
des affinités.
Le premier est une création mondiale qui
fait courir toute la presse internationale spécialisée, Brokeback Mountain, commande du
Teatro Real au compositeur Charles Wuorinen
(né en 1938). Le second, au Teatro de la
Zarzuela, est une autre forme de création, qui
elle aussi suscite toutes les attentes et convoque
les passions : une zarzuela, comme de juste,
mais ressortie du purgatoire, Curro Vargas de
Ruperto Chapí (1851-1909), et mise en scène
par les soins de Graham Vick.
«Brokeback Mountain» © Javier del Real
Fils du Far West
L’opéra de Wuorinen hérite d’un vieux projet, dans les temps brefs où Gerard Mortier
convoitait la direction du New York City Opera,
en 2007, avant de s’en démettre pour prendre en
main les destinées de l’Opéra de Madrid. Il s’agit
donc d’une commande à replacer dans son
contexte d’origine : celui d’un opéra devant
s’inscrire dans le pays qui l’accueillait. D’où un
compositeur et un sujet venus des États-Unis ;
d’après le célèbre roman d’Annie Proulx, qui a
donné lieu dix ans plus tard à une pellicule cinématographique tout aussi célèbre, sorte de western mais où les deux cow-boys et personnages
principaux sont des gays. Une réplique du
Puccini de La Fianciulla del West, revue par
notre époque. La musique dont Wuorinen sertit
son opéra ne se signale toutefois guère par son
originalité, dans un langage post-sériel et une
constante déclamation vocale héritière de
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Wozzeck ou de Pelléas déjà entendus par ailleurs.
Mais elle sait trouver, dans son atonalité, un ton
théâtral qui évoque au mieux le propos, voguant
de confidences, conflits, lamentations, paroxysmes ou introspections. Passé quelques rapides
moments de flottements, la conviction dramatico-musicale finit ainsi par tout emporter. Les
moyens mis en œuvre pour la servir au Teatro
Real y contribuent pour beaucoup. Le baryton
Daniel Okulitch porte le héros principal, Ennis
del Mar, tiraillé entre ses aspirations réelles et la
triste réalité de sa fin esseulée, avec une présence
irradiante, nourrie à un legato lisse : du belcanto
atonal ! Le ténor Tom Randle, son compagnon à
la scène Jack Twist, s’égare dans des faussetés
initiales, qu’explique une tessiture tendue, pour
ensuite mieux s’affirmer vocalement, en phase
avec son destin tragique. Parmi les seconds rôles,
Hannah Esther Minutillo et la toujours jeune Jane
Henschel livrent une juste participation.
L’orchestre maison et le chœur, réduit à quelques
interventions finales, distillent une partition méticuleusement écrite avec tout le soin qu’il se doit,
sous la direction attentive de Titus Engel. Quant à
la mise en scène d’Ivo van Hove, elle illustre une
action claire, entre projections d’un Ouest de
légende et fourre-tout domestique, apte à une
intelligence immédiate de ce livret en anglais
signé de la romancière elle-même. Bien visé !
D’amour et de mort
Au Teatro de la Zarzuela, le défi est autre,
mais aussi du même ordre. Puisque Curro
Vargas, qui n’avait plus été représenté depuis
1984 (en ce même théâtre), a nécessité tout un
travail de reconstitution à l’appui d’une récente
partition critique éditée pour l’occasion. S’ajoute
le désir louable de respecter intégralement la zarzuela de Chapí, telle qu’elle fut créée en 1898,
sans nulle coupure. Soit trois heures quarante de
représentation! Une belle ambition, qui allie
recherches, rigueur et innovation. Ce qui est tout
à l’honneur de Paolo Pinamonti, directeur du
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Théâtre de
la Zarzuela.
On lui sait
gré d’avoir
fait appel à
Graham
«Curro Vargas»
Vick, met© Fernando Marcos
teur
en
scène au renom international, et par là de montrer combien le répertoire de la zarzuela peut viser
à l’universel. Et Curro Vargas le corroborerait
d’abondance : par son sujet, éternel, d’amour tragique, dans une Andalousie immémoriale sur
fond d’intolérance sociale et religieuse; par sa
musique, d’une exigence savante, son orchestration pointilliste échafaudée comme du Stravinsky
avant l’heure, et une vocalité emportée oscillant
de chromatismes torrides en ensembles échevelés. Du grand Chapí ! compositeur qui égale les
plus grands, tous genres confondus. Vick choisit
à juste raison de planter l’action à notre époque
actuelle. Les costumes et les postures sont donc
ceux d’aujourd’hui, et les personnages rappellent
ceux que l’on peut croiser dans les rues de Paris,
de Londres ou de Madrid : bobos, babas, gendarmes, notables, secrétaires et hommes d’affaire,
ordinaires et de tous les jours. Le décor se résume à quelques éléments symboliques, un olivier,
un calvaire, un lit, un bureau, sur un plateau tournant se détachant d’une image de campagne
sereine. La vérité des sentiments et des situations, sans falbalas, dans une précision de jeu
d’acteurs de chaque instant. De ce drame ainsi
mis à nu, exsude toute la force de l’œuvre.
Andeka Gorrotxategi incarne le rôle-titre dans un
registre de ténor léger d’une belle régularité, qui
sait aussi trouver les accents déplorés ou exacerbés conformes à son fatal personnage. Saioa
Hernández possède quant à elle l’ampleur, qui
aurait mérité quelques nuances dans son douloureux aria d’entrée, mais trouve graduellement
l’impact d’une Soledad campée ardemment jusqu’à sa mort ultime (par les mains de Curro, luimême occis par Mariano – que de sang !).
Mariano revient à Joan Martín-Royo, avec une
tension de baryton frémissant, à laquelle la
mezzo Milagros Martín, vétérane du répertoire
zarzuelero, donne une vive réplique pour Doña
Angustias. Alors que le chœur préparé par
Antonio Fauró, qui a la part belle et complexe,
éclate de vigueur ou s’épanche en subtilités ; et
que l’orchestre fourmille de mille détails sous la
battue énergique de Guillermo García Calvo. Un
sans faute ! Et une splendide réparation d’un
ouvrage comme neuf.
Pierre-René Serna
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opéra de zurich
Une Aida
embourgeoisée
Aida est l'opéra le plus joué aux Arènes de Vérone, ... et peut-être aussi au
Théâtre d'Avenches. Longtemps, la scène du triomphe avec ses trompettes, son
ballet et ses incessants défilés de guerriers et d'animaux de tous ordres ont suffi
à attirer les foules.
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Moore est une Aida au chant soyeux, magnifiquement étale sur toute la tessiture et particulièrement brillant dans les moments où la puissance de l'émission le dispute au poli brillant du
son. Aleksandrs Antonenko, qui fut Samson à
Genève il y a deux saisons, brille en Radamès
grâce à son timbre infatigable mais toujours
capable de filer un son avec subtilité lorsque la
situation l'exige, comme dans le duo final par
exemple. L'Amneris d'Iano Tamar est parfois à
la peine dans le médium où la voix semble
devenir excessivement anguleuse, mais celle-ci
retrouve toute la vaillance nécessaire pour faire
un sort aux débordements rageurs de ses impré-
Aujourd'hui, cet opéra est
surtout admiré pour l'intimisme de ses dernières scènes;
aussi la tentation est-elle grande d'axer toute la production
sur la musique éthérée du
final. C'est ce qu'a tenté
Tatjana Gürbaca à Zurich : sa
mise en scène transplante
toute l'action dans un décor
unique représentant un salon
au mobilier moderne et impersonnel appartenant à quelque
apparatchik du pouvoir dans
une république bananière.
Aida fait bien sûr partie du
personnel de maison et passe
son temps à nettoyer la saleté
que les propriétaires de l'appartement s'amusent à étaler
partout pour l'humilier chaque «Aida» avec Iano Tamar (Amneris), Latonia Moore (Aida) et Aleksandrs Antonenko (Radamès) © Monika Rittershaus
jour un peu plus. La scène du
triomphe se déroule en coulisses, tandis que intentions du compositeur. Et 'on' ne nous épar- cations dans sa grande scène du IV. Andrzej
Radamès se vautre sur un canapé pour regarder gne ni la simulation de copulation plus ou Dobber, un Amonasro à l'émission musclée et
une série TV dont on ne voit que les pâles moins lascive, de mises à mort brutales et de retentissante, Rafal Siwek, un Ramfis aux surreflets sur les parois blanches de cette pièce libations qui se veulent joyeuses, car 'on' sait prenantes rodomontades caverneuses, et Pavel
d'apparat. Pendant le ballet, le guerrier victo- que, quand 'on' a le pouvoir, tout est permis. Au Daniluk, un Roi plein d'autorité vocale naturelle
rieux s'endort tout simplement car rien ne se bout de trente minutes au maximum, le specta- complètent cette distribution de grande classe.
passe sur le plateau... La dernière scène dans le teur moyen se demande s'il n'aurait pas mieux
Les chœurs et l'orchestre sont dirigés par
souterrain fatal se joue aussi dans ce même lieu fait de rester chez lui à écouter une version disun
Fabio
Luisi énergique, privilégiant un son
improbable qu'une pluie de gravats tombés du cographique de référence... En tous les cas, une
large
et
fougueux.
Sa battue permet pourtant à
plafond a transformé en champ de ruines. Aida chose est sûre : la lassitude s'installe vite dans
la
musique
de
se
développer
harmonieusement
et Radamès meurent tranquillement en esquis- l'auditoire, comme l'ont prouvé les huées qui
dans
l'auditorium
relativement
petit de l'Opéra
sant quelques pas de danse tandis qu'Amneris se ont accueilli le team de ce travail scénique inepzurichois
sans
que
les
effets
de
masse ne soient
tient debout à coté d'eux et les contemple sans te en fin de représentation.
systématiquement
gommés
:
l'auditeur
ne peut
sourciller...
que
rester
abasourdi
devant
un
art
aussi
Les regrets sont d'autant plus forts que la
consommé
d'équilibrisme
sonore...
(2
mars)
On le comprend : il s'agit là d'une de ces musique est magnifiquement servie. Les quatre
régie 'conceptuelles' dont on se demande à chanteurs principaux feraient honneur à une
Eric Pousaz
chaque instant quelle est la nature du rapport grande scène internationale et présentent de
qu'elle entretient avec le livret original ou les leurs personnages des portraits aboutis. Latonia
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ENFANCE
& SORTILÈGES
Du 5 avril au 18 mai 2014
laFERME
de laCHAPELLE
laFERME
de laCHAPELLE
SAISON
2013—2014
CORINNE DE BATTISTA
ALEXANDRA DUPREZ
KEIKO MACHIDA
AVRIL
JE 3 – GODOT EST ARRIVÉ
de Patrick Ruggirello Comédie
MA 8 – LA CONVERSATION
de Jean D’Ormesson
ME 16 – THE TEMPEST REPLICA
danse – à Monthey
MAI
VE 2 – YVONNE, PRINCESSE
DE BOURGOGNE
de Witold Gombrowicz
ME 14 & JE 15 – LE REVIZOR
sous chapiteau
GALERIE LA FERME DE LA CHAPELLE
39, ROUTE DE LA CHAPELLE | CH -1212 GRAND-LANCY
WWW.FERMEDELACHAPELLE.CH
Ville de Lancy
République et canton de Genève
Théâtre des Marionnettes de Genève
MIGROS
L-CLA
E
R
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L
U
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N
E
-POUR-C
014 au
Saison 2013/2
SSICS
Victoria Hall
Mardi 29 avril 2014 à 20 h
ORCHESTRE SYMPHONIQUE
DE LA BBC
Sakari Oramo (direction)
Leonidas Kavakos (violon)
Johannes Brahms
Concerto pour violon et orchestre, op. 77
NE M’APPELEZ PLUS
JAMAIS MON PETIT LAPIN
VOYAGE EN POLYGONIE
Dès 3 ans
Jusqu’au 13 avril 2014
Périple au pays des formes
pour une remise en forme.
Dès 4 ans
30 avril au 18 mai 2014
Un petit lapin aux grandes oreilles
se révolte pour mieux grandir.
tmg
nnett
mario
Dieter Ammann*
«Boost» pour orchestre
Edward Elgar
Variations pour orchestre «Enigma», op. 36
*Compositeur suisse
Billetterie: Service culturel Migros Genève, Rue du Prince 7, Tél. 022 319 61 11
Stand Info Balexert et Migros Nyon-La Combe.
www.culturel-migros-geneve.ch
es
Rue Rodo 3 – Genève
022 807 31 07
www.marionnettes.ch
Organisation: Service culturel Migros Genève
www.culturel-migros-geneve.ch www.migros-pour-cent-culturel-classics.ch
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opéra du rhin, strasbourg
Un Vaisseau fantôme
qui prend l'eau
Mettre en scène Wagner suscite de nos jours les
imaginations les plus folles. Nicolas Brieger à Strasbourg
a eu l'idée de replacer le sujet dans l'Allemagne du 20e
siècle et mélange arbitrairement les références à la Shoah
autant qu'à la partition du pays en deux blocs
antagonistes pendant les années de la guerre froide.
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Ainsi Senta meurt-elle dans une sorte de chambre à gaz au moment où
elle espère sauver le Hollandais alors que son équipage s'est auparavant transformé en rats (le dernier Lohengrin bayreuthien semble avoir fait des émules
en Alsace !) et que lui-même disparaît discrètement par une sortie dérobée.
Les fileuses ne sont que des mémères promenant béatement leur progéniture
dans des pousses-pousses surdimensionnés et les marins des employés de
bureau en goguette enclins à pincer les fesses de leurs congénères féminines.
Bref, on l'a compris : pour les ensorcèlements et la grandeur du mythe, il fallait changer de théâtre.
Du côté de la musique, cela n'allait pas franchement mieux. Dès le lever
du rideau, un pilote privé de tout aigu digne de ce nom donnait le ton : Wagner,
le musicien, ne serait pas à la fête non plus. Il a fallu ensuite supporter les
longs errements époumonés d'un Hollandais - Jason Howard - à la tessiture
mitée, franchement dépassé par les exigences du rôle dans le duo central de
l'ouvrage et les coassements d'une Mary que rien ne destinait à se présenter sur
un plateau d'opéra digne de ce nom.
Heureusement, l'honneur était sauvé par la Senta au soprano radieux de
Ricarda Merbeth : cette artiste a su faire sien cet emploi d'une difficulté d'exécution redoutable et semble en négocier les difficultés avec une aisance qui la
prédestine aux plus hauts honneurs dans ce répertoire. Sans atteindre de tels
sommets, Kristinn Sigmundsson campe un Daland solide au grave profond
mais parfaitement clair d'émission alors que Thomas Blondelle s'attire toutes
les sympathies avec son Erik bien chantant, peut-être un brin trop robuste
cependant pour brosser avec succès le portrait d'un amoureux passionné dont
les élans lyriques paraissent ici fort terre-à-terre.
A la tête d'un Philharmonique strasbourgeois de grande classe, Marko
Letonja propose de la partition une lecture trop scolaire; les scènes chorales
manquent de punch alors que l'accompagnement des solistes rend surtout sensibles les enchaînements musicaux parfois maladroits d'un compositeur qui
cherche encore à se forger un langage vraiment personnel.
Eric Pousaz
Mulhouse, 20 février
théâtre du capitole, toulouse
La Favorite
A Toulouse, retour en grâce de l'original français d'une
œuvre longtemps négligée, La Favorite de Donizetti,
défendue par une équipe artistique solide et inspirée.
Une reprise de ce spectacle s'impose.
«La Favorite» avec Kate Aldrich (Léonor de Guzman), Yijie Shi (Fernand)
© Patrice Nin
Maintenue au répertoire dans une traduction italienne non satisfaisante,
La Favorite semblait être passée de mode. La partition n’atteint certes pas les
sommets de la trilogie Tudor ou de Lucia di Lammermoor, mais Donizetti,
habile faiseur et mélodiste-né, sait tirer parti d'un livret aux évidentes faiblesses dramatiques signé Royer et Vaëz. Après le cuisant échec parisien de l'an
dernier (production de Valérie Nègre au TCE), le Capitole a eu la bonne idée
de confier l'ouvrage à Vincent Boussard et au chef Antonello Allemandi.
Après avoir ressuscité Hamlet à Marseille en 2010, le metteur en scène signe
un spectacle à l'esthétique très soignée qui souligne constamment les oppositions entre l’austérité de l'Eglise espagnole et l'exubérance de la cour de
Castille. Aux sols miroitants et aux espaces aux lignes épurées propres à la vie
monastique, répondent les couleurs flamboyantes et les étoffes inondées de
lumières du palais d'Alphonse XI, où se nouent et se dénouent les intrigues.
Tels des papillons piqués sur des cadres, les personnages de ce drame, victimes de la passion qui les unit et finira par les détruire, semblent placés dans
«Le Vaisseau fantôme» avec Ricarda Merbeth © Alain Kaiser / ONR
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des écrins pour être observés à la loupe. Si la
direction d'acteur peut paraître limitée en
dehors des scènes de foule élégamment maîtrisées, les éclairages magnifiques de Guido Levi
et les costumes éblouissants de Christian
Lacroix, travaillés comme les toiles impressionnistes de Joaquin Sorolla, sont un véritable
enchantement pour le spectateur.
La présence dans la fosse d'Antonello
Allemandi est un atout pour l'Orchestre du
Capitole qui répond avec précision aux
connaissances, au goût mais également aux
intuitions musicales du maestro pour cet opéra
composé en 1840, entre La fille du régiment et
Linda di Chamounix. Divinement habillée, la
mezzo américaine Kate Aldrich, aussi belle à
voir qu'à entendre, campe une formidable
Favorite, séduisante et passionnée, crédible
jusque dans les atermoiements de son cœur,
que rend plus perceptible encore la tessiture
«La Fille du Régiment» avec Patrizia Ciofi (Marie) et Juan Diego Florez (Tonio)
volcanique de son personnage. Eternel péni© Catherine Ashmore
tent, voyageur sans patrie contraint à errer
avec pour seul viatique une valise éclairée de l’intérieur (jolie idée), le dans cette version, mais elle avait déjà été la partenaire du ténor péruvien
Fernand du jeune ténor chinois Yijie Shi est une plaisante découverte, tant les dans une production signée par Emilio Sagi. Et de fait, s'il serait vain de
qualités de timbre, la souplesse de l’instrument et l’engagement sont promet- tenter une comparaison entre les deux cantatrices, il convient de relever
teurs. Comme au TCE, Ludovic Tézier interprète avec une aisance peu com- que « la » Ciofi confirmait qu'elle n'avait rien à envier sur la plan de l'aimune le beau rôle d'Alphonse XI, monarque tiraillé entre le cœur et la raison, sance en scène à la pétulante Natalie Dessay dont les qualités d'actrice ne
soumis malgré ses prétentions au poids de l'Eglise. Vocalement à la peine, sont plus à souligner. Prenant à bras le corps son incarnation de vivandièGiovanni Furlanetto n'est pas le mieux armé pour restituer la puissance de re sans gêne, elle s'insère avec une évidente facilité dans le dispositif scéBalthazar, Alain Gabriel (Don Gaspar), Marie-Bénédicte Souquet (Inès) et le nique inventif et drolatique imaginé par la décoratrice Chantal Thomas,
Choeur du Capitole venant compléter cette distribution que l'on espère vive- tandis que les intentions de jeu désirées par le metteur en scène Laurent
Pelly n'ont pas été trahies dans ce « revival » signé par Christian Räth.
ment retrouver.
François Lesueur
Avec son timbre plus corsé en comparaison avec celui de Natalie
Dessay, Patrizia Ciofi offre une interprétation riche en émotions, rivalisant
Représentation du 4 février 2014
d'aisance avec son partenaire, lequel triomphe à nouveau sur la scène londonienne quelques mois après un épisode rossinien (La Donna del Lago) très
apprécié. Toujours aussi à son affaire lorsqu'il s'agit caractériser un rôle
à londres
comique, Juan Diego Florez livrait une fois de plus une version d'anthologie du rôle de Tonio, faisant preuve d'une facilité déconcertante lorsqu'il se
lançait à l'assaut de cet Everest du registre des ténors, autrement dit ce « Ah !
mes amis » qu'il distille désormais avec un indéniable brio suscitant l'enthousiasme bien mérité du public. Partenaire habituel du duo, Pietro
Une cantatrice applaudie à son entrée en scène ? La chose
Spagnoli était décidément un Sulpice bien chantant et fort pittoresque
comme il se doit, Ewa Podles étant plus en demi-teinte dans le rôle de
n'est pas fréquente, mais compréhensible lorsqu'il s'agit
Marquise
de Birkenfeld. Les Chœurs et l'Orchestre placés sous la direction
d'un retour, celui de Dame Kiri Te Kanawa qui a régné
précise
d'Yves
Abel servaient parfaitement cette version que le public londurant plus de deux décennies jusqu'en 1997 sur la scène
donien
semble
particulièrement apprécier à en juger par les rires spontanés
de Covent Garden, dans un rôle lui convenant à merveille,
qui
soulignaient
ironiquement certains aspects franchouillards de cette Fille
celui de la duchesse de Crackentorp qu'elle interprète
du régiment dont le livret a été remanié avec pertinence par Agathe
avec l'élégance et la classe qui l'ont toujours caractérisée.
Mélinand, complice habituelle de Laurent Pelly. Et on ne saurait passer sous
Mais malgré l'aspect émouvant de ce come-back, l'intérêt de cette silence, car cela n'est pas si fréquent, la qualité de la diction française, qu'il
troisième reprise de la Fille du régiment à Londres dans la désormais clas- s'agisse de Juan Diego Florez ou de Patrizia Ciofi. Certes, le propos de l'œusique version Pelly / Thomas / Mélinand applaudie également au vre n'a rien de mémorable, mais les aspects comiques des situations ne peuMetropolitan à New York, à l'Opéra de Vienne et à l'Opéra Bastille à Paris, vent que bénéficier de cette qualité de prononciation... même outre-Manche.
résidait avant tout dans les retrouvailles du duo composé par Juan Diego
Frank Fredenrich
Florez et Patrizia Ciofi. Cette dernière prenait le relais de Natalie Dessay
Retour de la Fille
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à nice
Semele
L’Opéra de Nice propose un spectacle de qualité, tout à
fait crédible musicalement, même si la mise en scène peut
être diversement appréciée.
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Le premier maître d’œuvre de la réussite globale est le chef George
Petrou, qui parvient à produire un joli son baroque, plein de vivacité et de précision dans les attaques, sans s’aventurer toutefois jusqu’à l’urgence et la nervosité, terrains à risque pour garder la qualité technique. Certains tempi paraissent ainsi plutôt sages, mais on imagine les nombreuses séances de travail de
l’Orchestre Philharmonique de Nice, dont le cœur de répertoire est a priori
beaucoup plus Verdi et Gounod qu’Haendel et Rameau. Les choristes ne semblent pas avoir fait les mêmes efforts, plus concentrés sur la puissance et la
dynamique deleurs interventions, au détriment de la cohérence collective et du
raffinement de la ligne. La distribution vocale n’atteint pas à l’exceptionnel
mais sonne agréablement dans son ensemble, à commencer dans le rôle-titre
par Hélène Le Corre, très joli grain de voix fruitée, dotée d’une musicalité
impeccable, qui ravit les oreilles lors de son réveil élégiaque du début du II.
Dans le rôle limité d’Iris, Anne-Florence Marbot fait valoir puissance et assurance, alors que Mary-Ellen Nesi est simplement correcte en Ino et insuffisante en Juno où l’instrument s’assombrit et se détimbre dans le grave (elle
parle !), en contradiction avec ses intentions scéniques agressives. Le contreténor Xavier Sabata (Athamas) chante élégamment avec une voix bien assise,
dommage que son rôle soit si réduit, mais on se console en écoutant son air
brillamment exécuté « Despair no more will wound me » en fin d’opéra. La
basse Denis Sedov (Cadmus – Somnus) possède désormais un instrument bien
abimé, et il doit veiller avec précaution à la stabilité de son émission. Quant
au ténor Valerio Contaldo (Jupiter – Apollo), le timbre est peu séducteur ce qui
rend son « Where’er you walk » beaucoup moins inoubliable que ses airs plus
fleuris, où la cadence des vocalises est stimulante. La production très
Regietheater de Jakob Peters-Messer fonctionne, avec des idées plus amusantes que foncièrement originales ; on pense en particulier à la même ambiance
de la production de Robert Carsen imaginée il y a quelques années pour le festival d’Aix-en-Provence. En début de représentation, un cadre doré avec
rideau tiré laisse uniquement la possibilité d’une mise en espace à l’avantscène. Lorsque le cadre remonte dans les cintres, un espace en boîte jaune et
Hélène Le Corre (Semele) © Jaussein
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blanche qui part en fuite vers le fond de plateau est le lieu des tendres relations
entre Semele et Jupiter. Malheureusement ce n’est pas exactement la sensualité qui y est convoquée, mais quelques tics de mise en scène qui deviennent
un peu envahissants : un caméraman qui passe et repasse, des figurants qui
envoient quelques gros ballons, c’est charmant… surtout lorsque l’un d’entre
eux roule jusque dans la fosse d’orchestre, et se fait attaquer par certains
archets ! Au III, Jupiter (coupe de cheveux à la John Galliano) est un designer
qui fait défiler ses mannequins, puis Semele s’éveillant parmi ses nombreuses
boîtes à chaussures, essaie les paires les unes après les autres.
François Jestin
haendel : SEMELE – le 16 février 2014 à l’Opéra de Nice
à monte-carlo
L’Elisir d’Amore
Une représentation charmante pour l’œil, mais bien
tristounette pour l’oreille !
Adrian Sampetrean (Dulcamara) © Opéra de Monte-Carlo
Fréquentant plus régulièrement le répertoire baroque, notamment Vivaldi
et Bach qu’elle défend avec sa formation de chambre Orfeo 55, la contralto et
chef d’orchestre Nathalie Stutzmann est bien peu convaincante dans ce chefd’œuvre du buffo donizettien. Le discours musical manque souvent de nerf,
secoué par moments par des accélérations mal à propos qui mettent en difficulté les chœurs, d’ailleurs soucieux avant tout de se faire entendre ce soir plutôt que d’œuvrer à l’homogénéité et la joliesse du son. La direction musicale
des cantilènes est plus appréciable, mais cela ne rattrape pas l’ensemble. Une
bonne partie de la distribution vocale semble également égarée dans ce répertoire, à commencer par le Nemorino de Stefan Pop. Si sa stature peut évoquer
Pavarotti au premier coup d’œil, la voix se situe à des années-lumière du
timbre solaire de Big Luciano : le medium est nourri, mais les aigus sont resserrés, étriqués, le son est opaque, engorgé, et le volume insuffisant, même
dans la petite salle Garnier. La soprano Mariangela Sicilia (Adina) dispose
quant à elle d’une belle voix puissante, mais c’est la technique qui pèche :
quelques vocalises sont bien savonnées, et elle perd plusieurs fois la justesse
de l’intonation au cours de la soirée. La basse Adrian Sampetrean (Dulcamara)
chante de manière maîtrisée, mais on aimerait l’entendre dans un autre opéra,
tant son manque de vis comica est criant dans ce personnage. Le baryton
George Petean (Belcore) s’en sort mieux, avec une projection et des possibi-
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lités d’extension vers l’aigu assez spectaculaires, mais le bagage belcantiste
paraît tout de même limité, ne serait-ce que dans la gestion du souffle ou encore les passages de chant sillabato. Pour ce qui est de la réalisation visuelle, en
provenance de l’Opéra de Lausanne, l’enthousiasme arrive principalement des
décors plein de poésie de Christian Taraborrelli. Parmi les blés et coquelicots
qui prennent toute la hauteur du cadre de scène, à côté d’une roue de tracteur
géante, les villageois sont transformés en Lilliputiens, comme Belcore qui
débarque sur le plateau après avoir roulé dans une boîte de conserve. La mise
en scène confiée à Adriano Sinivia ne s’écarte pas du jeu d’acteurs d’un classique Elisir, sans parvenir malheureusement à déclencher le rire ou le sourire
dans l’auditoire, qui n’applaudit que très mollement.
François Jestin
Donizetti : L’ELISIR D’AMORE – le 28 février 2014 à Monte-Carlo – Salle Garnier
à lyon
Le Comte Ory
On attendait avec gourmandise la nouvelle production de
Laurent Pelly dans un ouvrage qui convient a priori
idéalement à ses talents, mais au final le résultat est
parfois inégal.
avec la sensation récurrente de déjà-vu (par exemple le salon du II semble un
copier-coller du 2ème acte de La Fille du régiment réglée par Pelly), c’est
généralement drôle et le metteur en scène sait se renouveler. Il faut signaler
toutefois quelques traits excessifs, comme la Comtesse qui, au cours de son
duo avec Ory, relève sa jupe et s’assoit sur la cuvette des WC pour faire un
petit pipi, ou plus tard certains gestes explicitement sexuels lors du torride trio
final. Pour ce qui est de la partie vocale, le ténor Dmitry Korchak (Ory) alterne entre points forts et faiblesses : la voix est projetée vaillamment, les traits
d’agilité passent la plupart du temps, mais quelques aigus sont à la limite, il
perd trop souvent la justesse (en particulier il chante vraiment faux plusieurs
passages en première partie de l’acte II), et la diction est perfectible. La soprano coloratura Désirée Rancatore (Adèle) garde une excellente maîtrise de la
virtuosité et du suraigu. Après son apparition marquante à l’Opéra de
Marseille l’année dernière dans Cléopâtre de Massenet, Antoinette Dennefeld
est la révélation de la soirée dans le rôle d’Isolier : impeccable élocution, puissance, agilité, aisance en scène… décidément une jeune chanteuse déjà au
sommet. Les « clés de fa » sont un peu moins marquantes : Patrick Bolleire (le
Gouverneur) est une basse sonore qui perd de ses moyens lorsque la partition
fleurit, sans doute meilleur dans des emplois plus monolithiques, et le baryton
Jean-Sébastien Bou (Raimbaud) fait valoir de superbes qualités de français et
de timbre, mais se montre en panne d’abattage dans son grand air du II. Doris
Lamprecht est une Dame Ragonde caricaturale aux graves caverneux, et les
chœurs sont sans reproche, dynamiques et compréhensibles. La direction
musicale de Stefano Montanari est intéressante et particulièrement vivante,
sinon toujours convaincante. Le chef apporte sa touche personnelle tant au
rythme qu’au volume orchestral ; on aime les cordes qui respirent amplement,
mais moins les passages répétés qui imitent une fanfare.
François Jestin
Rossini : LE COMTE ORY – le 1er mars 2014 à l’Opéra de Lyon
à avignon
Le dernier jour
d’un condamné
«Le Comte Ory» – Acte 1 © Stofleth
« Ah c’est moderne ! » s’esclaffent mes voisines au lever de rideau, et il
faut reconnaître que la transposition est assez osée. Dans une salle des fêtes –
ou salle omnisports, avec la présence d’un panier de basket-ball –, les villageois arrivent en portant sodas, gâteaux et Tupperware en guise de présents
pour le faux ermite (vrai Comte Ory), en l’occurrence un fakir indien, barbe
et chevelure jusqu’à la taille. L’auditoire écoute avec attention le discours du
vieux « sage » sur l’estrade, puis les femmes déroulent leur tapis de sol pour
pratiquer un peu de yoga (position du lotus uniquement !). On est un peu
moins emballé par le grand air d’entrée de la Comtesse Adèle, bourgeoise au
bord de la crise de nerfs dont les soubresauts répétés et forcés évoquent rapidement la poupée Olympia des Contes d’Hoffmann. A l’acte II, les traits de
génie de Pelly, qui signe aussi les décors et costumes, sont indéniables, comme
lorsque les appartements de la Comtesse glissent transversalement sur le plateau (cuisine, salon, chambre et salle de bain / cabinet de toilette), ou quand
Adèle et ses suivantes paraissent comme des clones bon chic bon genre, portant les mêmes habits (jupe marron stricte, gilet rose, collier de perles). Même
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Une soirée électrisante à Avignon, pour la première
française en version scénique de l’opéra conçu par les
trois frères Alagna, créé en concert en 2007 à Paris.
«Le dernier jour d’un condamné» © Studio Delestrade
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Au Théâtre des Champs-Elysées il y a 7 ans, le garde des Sceaux abolitionniste « historique » Robert Badinter prononçait un discours d’introduction,
mais c’est ce soir sur un accompagnement de violon seul que la comédienne
Catherine Alcover dit des extraits de textes de Victor Hugo (Les Châtiments,
l’Année terrible, …). Badinter rappelait alors que la peine de mort reste à
combattre dans de trop nombreux pays, en pointant du doigt les Etats-Unis,
« plus grande démocratie au monde », paradoxe bien mis en exergue par l’ouvrage. Le plateau est en effet divisé en deux parties : à jardin le personnage du
roman éponyme d’Hugo vit ses derniers instants en 1828 dans une cellule
grise, sombre et poussiéreuse, tandis qu’à cour c’est dans un environnement
de faïence blanche ornée de quelques tags qu’une femme attend la sentence
finale. Comme Indra Thomas en 2007 au concert, c’est une autre soprano
noire américaine, Adina Aaron, qui tient le rôle de la condamnée « de notre
époque », et la présence des USA sur une moitié de scène semble évidente. La
production de Nadine Duffaut, créée en 2009 à l’Opéra de Debrecen en
Hongrie, a le double mérite de la force et de la sobriété, avec un tout petit
bémol pour ce qui concerne le choix des séquences filmées pendant l’intermezzo en début de deuxième partie. A la toute fin de l’opéra, les deux condamnés franchissent ce mur invisible qui les enfermait, pour un échange des exécutions : guillotine pour Adina Aaron et injection létale pour Roberto Alagna.
Le ténor français remporte un très vif succès dans ce rôle écrit sur mesure par
son frère compositeur David : très investi scéniquement, Roberto est dans une
forme vocale éblouissante, avec une diction toujours aussi prodigieuse et un
volume assez considérable dans cette salle plus petite que les lieux qu’il fréquente habituellement (Met, Bastille, Théâtre antique d’Orange, …). Dans le
second rôle, Adina Aaron ne convainc pas d’emblée, avec une qualité de français juste correcte, la chanteuse étant peu sollicitée dans ses meilleurs notes.
C’est en deuxième partie que ses moyens de spinto verdien peuvent se
déployer plus largement, en particulier pendant son grand air chanté avec
émotion. Se détachent ensuite le très vigoureux baryton-basse Christian
Helmer (un friauche), doué d’une projection vocale insolente, ainsi que la
basse mordante Eric Martin-Bonnet (l’aumônier), mais l’ensemble de la distribution est à louer, jusqu’au rôle le plus modeste. Placée sous la baguette du
chef Balàzs Kocsàr, la musique composée par David Alagna est pleine d’ampleur, de souffle, illustre en permanence les états d’âme et les situations, souvent démonstrative et tirant vers un style vériste. Au bilan final, on se dit que
la partition, entendue et « vue » dans cette production avignonnaise, prend
soudain une dimension supplémentaire.
François Jestin
Alagna : LE DERNIER JOUR D’UN CONDAMNE – le 12 mars 2014 à l’Opéra Grand
Avignon
à marseille
Colomba
La création mondiale de l’opéra Colomba, d’après la
nouvelle de Prosper Mérimée, ne restera pas parmi les
spectacles les plus marquants vus ces dernières années à
Marseille.
Le livret de Benito Pelegrin, en un prologue, 4 actes et un épilogue, suit
assez fidèlement l’œuvre originale, en laissant toutefois de côté les premières
scènes des préparatifs de l’embarquement à Marseille. Le rideau se lève donc
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«Colomba» © Dresse
directement sur le pont du voilier qui vogue vers la Corse, rendu visuel très
réussi du metteur en scène Charles Roubaud par le biais des projections vidéo
(de Julien Ribes) de la Méditerranée en fond de plateau. La production est du
reste très jolie à regarder, qu’il s’agisse des décors sobres et efficaces conçus
par Emmanuelle Favre ou des somptueux costumes réalisés par Katia Duflot.
Mais ce qui manque surtout à la soirée, c’est de trouver un rythme qui maintienne l’intensité de l’action : les 6 scènes de la première partie sont en effet
entrelardées de 4 précipités, trop longs pour maintenir toute tension dramatique. Il est bien dommage à cet égard que le compositeur Jean-Claude Petit
n’ait pas écrit de musique de liaison entre les tableaux successifs, à la manière d’un Britten ou de Poulenc dans Dialogues des Carmélites. La partition s’écoute agréablement, l’orchestration est professionnelle et les mélodies sont
bien léchées, mais sans plus. C’est-à-dire que la musique n’est que trop rarement enivrante – on relève tout de même les très belles 20 premières mesures
de l’acte I, de bonnes impressions dans la 3ème scène de l’acte II, et les parties a capella du chœur et de Colomba –, mais elle ne parvient pas à étonner
l’auditeur, ni à le sortir d’un certain abattement qui gagne rapidement. La
pièce s’apparente d’ailleurs souvent à une conversation en musique, et une
oreille habituée aux partitions de Richard Strauss perd de son attention ce soir.
Dirigée par Claire Gibault, la distribution vocale est aussi inégale, avec une
nette domination de la partie féminine, à commencer par Marie-Ange
Todorovitch, sonore et bien-disante, plus corse que nature dans ses habits
noirs et en mission pour une mortelle vendetta. La soprano Pauline Courtin
(Lydia) dispose d’un joli timbre agile et piquant, mais reste parfois un peu
sourde en raison d’une écriture un brin trop grave pour ses moyens. Pas de
reproches en revanche à Lucie Roche (Miss Victoria) ni Cécile Galois (la servante), voix bien placée même lorsqu’elle parle. Côté hommes, le timbre
serré, peu puissant, ni spécialement agressif du ténor Jean-Noël Briend, n’est
pas le meilleur atout pour défendre le rôle d’Orso, frère vengeur de Colomba,
tandis que chez Jean-Philippe Lafont le style et la projection de plus en plus
« bruts de décoffrage » conviennent à peu près à l’emploi du colonel anglais
Nevil, joué certainement par le baryton français avec une plus grande bonhomie méridionale que ne l’avait imaginée Mérimée ! Mention Bien également
à l’expressif Francis Dudziak (le Préfet), à Cyril Rovery (Giocanto
Castriconi), Bruno Comparetti et Mikhael Piccone (les Barricini Fils). Quant
à Barricini Père, maire de Pietranera, le bien-nommé Jacques Lemaire, voix
acide et trop peu assurée… mais heureusement souvent inaudible !, n’est tout
simplement pas au niveau d’une scène comme l’Opéra de Marseille, et sa présence décrédibilise l’ensemble.
François Jestin
Petit : COLOMBA – le 11 mars 2014 à l’Opéra de Marseille
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genève
toulouse
Grand Théâtre (022/418.31.30)
s Götterdämmerung (MetzmacherDorn) – 23, 26, 29 avril
Théâtre du Capitole (05.61.63.13.13)
s Les Pigeons d’argile (CeccheriniClément) – 15, 18, 20, 22 avril
lausanne
monte-carlo
Opéra (021.315.40.20)
s Il Barbiere di Siviglia (Vieu-Sinivia) –
27, 30 avril
Opéra (00.377.98.06.28.28)
s Ernani (Callegari-Grinda) – 22, 25,
27, 29 avril
zurich
Opernhaus (044.268.66.66)
s Aida (Luisi-Gürbaca) – 1er avril
s Les Contes d’Hoffmann (LuisiAsagaroff) – 2 avril
s La Dame de pique (BelohlavekCarsen) – 6, 11, 13, 16, 27 avril
s Andea Chénier (Santi-Asagaroff) –
12, 15, 27 avril
s Salomé (Altinoglu-Bechtolf) – 19,
21, 26, 29 avril
paris
o p é r a
s Die Zauberflöte (Repusic-Krämer) –
bologne
Teatro Communale (39/051.617.42.99)
s Eugène Onéguine (Shokhakimov-
Trelinski) – 1er, 2, 3, 4, 5, 6, 8, 9 avril
milan
Teatro alla scala (39/02.720.03.744)
s Les Troyens (Pappano-McVicar) – 8,
12, 16, 22, 26, 30 avril
parme
a m s t e rd a m
Teatro Regio (39/05.21.20.39.93)
s Les Pêcheurs de perles (FournillierSparvoli) – 2, 4, 6 avril
Opera (31.20.62.55.456)
s Lucia di Lammermoor (RizziWagemakers) – 3, 6 avril
* Arabella (Albrecht-Loy) – 11, 13, 17,
20, 23, 25, 27 avril
ro m e
bruxelles
venise
La Monnaie (32/70.23.39.39)
s Au Monde (Davin-Pommerat) – 1er,
3, 4, 6, 8, 9, 11, 12 avril
Teatro dell’opera (39/06.48.16.02.55)
s Maometto II (R.Abbado-Pizzi) – 1er,
3, 5, 6, 8 avril
Teatro La Fenice (39/041.24.24)
s La Bohème (Bignamini-Micheli) –
19, 22, 24, 27, 29 avril
11 avril
s La Traviata (Korsten-Friedrich) – 19,
27 avril
s Parsifal (Kober-Stölzl) – 5, 18, 21
avril
s Carmen (Finzi-Schuhmacher) – 10,
13 avril
s Les Troyens (Daniel-Pountney) – 2,
6 avril
s Rigoletto (Rizzi Brignoli-Bosse) –
12, 20, 26 avril
s L’Elisir d’amore (Rizzi Brignoli-
Brook) – 25, 30 avril
Staatsoper (49/30.20.35.45.55)
s Tannhäuser (Barenboim-Waltz) –
12, 16, 20, 27 avril
s Simon Boccanegra (BarenboimTiezzi) – 13, 17 avril
s Le Vin herbé (Ollu-Mitchell) – 22,
24, 26 avril
s Le Nozze di Figaro (MouldsLanghoff) – 3, 6 avril
Champs-Elysées (01.49.52.50.50)
b a rc e l o n e
vienne
s Otello (Spinosi-Caurier/Leiser) – 7, Liceu (34.934.85.99.13)
Staatsoper (43/1514447880)
9, 11, 13, 15, 17 avril
s Kitège (Pons-Tcherniakov) – 13, 16, s Rigoletto (Lopez-Cobos-Sequi) –
s Oedipus Rex (Gatti) – 24 avril
22, 26, 30 avril
1er, 4, 8, 10 avril
Komische Oper (49/30.47.99.74.00)
s Il Barbiere di Siviglia (Malgoires Madama Butterfly (Darlingtons Serse (JunghänelSchiaretti) – 28, 29 avril
Herheim) – 4, 11 avril
Châtelet (01.40.28.28.40)
s Die Zauberflöte
s Into the woods (Abel(Poska-Kosky) – 3, 13, 17,
Blakeley) – 1er, 2, 4, 5, 6, 8,
21, 25 avril
10, 12 avril
s
Carmen (NanasiOpéra National
Baumgarten) – 9, 16, 19,
(08.92.90.90)
27 avril
Bastille :
s Iphigénie en Tauride
s Die Zauberflöte (Jordan(Junghänel-Kosky) – 1er,
Carsen) – 1er, 6, 10, 13, 15
6 avril
avril
s
Les
Contes
s La Bohème (Oren-Miller) –
d’Hoffmann
(Milton4, 7, 11 avril
Rheinhardt ) – 5, 12, 24,
s Tristan und Isolde (Jordan30 avril
Sellars) – 8, 12, 17, 21, 25, 29
avril
s I Capuletti e I Montecchi
new york
(Campa-nella-Carsen) – 24,
Metropolitan Opera
26, 30 avril
(00.1.212.362.60.00)
Garnier :
s
La Sonnambula
s L’Italiana in Algeri (FrizzaMeagan Miller sera Ariane lors des représentations d’ «Ariane auf Naxos» données en avril au
(Armiliato-Zimmermann)
Staatsoper
de
Vienne
Serban) – 2, 4, 7, 9, 12, 17,
– 1er avril
21, 23 avril
s
La
Bohème
(Ranzani-Zeffirelli) – 2,
madrid
Gielen) – 5, 9, 14 avril
5, 10, 14, 18 avril
avignon
Teatro Real (34/90.224.48.48)
s Lohengrin (de Billy-Homoki) – 12,
s Madama Butterfly (ArmiliatoOpéra-Théâtre (04.90.82.81.40)
s Lohengrin (Haenchen-Hemleb) – 3,
16, 20, 25, 28 avril
Minghella) – 4, 9, 12, 15, 19 avril
s Tancrède (Schneebeli-Tavernier) – 6, 7, 10, 11, 13, 15, 17, 19, 20, 22, 24,
s Ariadne auf Naxos (Boder-Bechtolf)
s
Andrea Chénier (Noseda-Joel) – 5,
11, 13 avril
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– 15, 19, 22 avril
8, 12 avril
lyon
s Der Rosenkavalier (Welser-Mösts Arabella (Auguin-Schenk) – 3, 7, 11,
Opéra National (08.26.30.53.25)
l o n d re s
Schenk) – 23, 27, 30 avril
16, 19, 24 avril
s Peter Grimes (Ono-Oida) – 10, 13, ROH (0044/207.304.4000)
s L’Elisir d’amore (Garcia Calvos
I Puritani (Mariotti-Sequi) – 17, 22,
15, 19, 22, 24, 26 avril
s Die Frau ohne Schatten (BychkovSchenk) – 29 avril
26, 29 avril
s The Turn of the screw (Ono- Guth) – 2 avril
Theater an der Wien (43/15.88.85)
Carrasco) – 11, 16, 18, 23, 27, 29 avril s Faust (Benini-McVicar) – 4, 7, 11, s Messiah (Rousset-Guth) – 14, 17, s La Cenerentola (Luisi-Lievi) – 21,
25, 28 avril
mulhouse
14, 17, 22, 25 avril
19, 22, 24, 26 avril
s
Cosi fan tutte (Levine-Koenig) – 23,
Opéra National du Rhin
s La Traviata (Ettinger-Eyre) – 19, 21,
26, 30 avril
(03.89.36.28.28)
24, 26, 30 avril
berlin
s Le Roi Artus (Lacombe-Warner) –
Deutsche Oper (49/30.343.84.343)
11, 13 avril
s Don Giovanni (Layer-Schwab) – 4
avril
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en tournée
Qu'est-ce qui distingue à vos yeux l'exercice consistant à diriger un Singspiel plutôt qu’un opéra sans dialogues parlés ?
L’Enlèvement
au Sérail
Le chef d’orchestre Benjamin Pionnier dirigera
l’Enlèvement au Sérail que propose le Théâtre de
Bienne Soleure ce printemps. Plus de vingt
représentations de cette nouvelle production du
Singspiel de Mozart sont à l’agenda de diverses villes
de Suisse du 11 avril au 4 juin.
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La biographie musicale du chef invité par l’institution lyrique de
Bienne Soleure atteste d’une polyvalence rare : Benjamin Pionnier étudie le
piano, le chant, la clarinette, la contrebasse, l'écriture et la direction de
chœur. Il se perfectionne en piano auprès de Brigitte Engerer. En direction
d'orchestre, il étudie d’abord en France puis en Grande-Bretagne auprès de
George Hurst. Au bénéfice de diverses distinctions, Benjamin Pionnier
devient l’assistant de nombreux chefs de renom, notamment James Levine
à New York, au MET et au Carnegie Hall. Il prend part à de nombreux festivals comme pianiste ou chef d’orchestre. Conseiller artistique pour l’Opéra
de Nice de 2006 à 2010, il occupe le poste de directeur artistique et directeur général de la musique à l’Opéra National de Slovénie à Maribor jusqu'en 2013. Entretien.
Le Singspiel imbrique totalement les dialogues parlés et les numéros chantés, il est donc nécessaire de prendre cela en compte pour une cohérence
de l'œuvre et de la représentation. Encore plus que dans un autre type d'ouvrage, je recherche la théâtralité, tant pour les lignes vocales que pour les
parties instrumentales. Par exemple, dans les choix des tempi, des dynamiques ou de l'articulation, il m'apparaît indispensable de considérer l'air,
le duo ou l'ensemble, non seulement pour son écriture musicale mais surtout dans la globalité de la scène, de la situation ou même de l'état d'esprit
du personnage. Cette union entre texte et musique, loin d'être réductrice,
nous offre une palette très vaste de couleurs et de possibilités d'expressions qui est particulière au genre du Singspiel et qui en accentue la proximité entre l'interprète et l'auditeur.
Pour ce qui a trait à L'Enlèvement au Sérail, quels aspects de
la musique vous apparaissent comme les plus intéressants, comme les
plus difficiles à rendre ?
Il y a dans cet ouvrage une fraîcheur toute particulière associée à une maîtrise de l'outil dramatique. La difficulté, autre que celle de rester le plus
fidèle possible à une écriture très précise, évidemment, est peut-être dans
la gestion de ces deux aspects. Tout comme le drame se nourrit de la
comédie qui le précède, la musique ne doit pas aller caricaturer une situation ou donner dans un pathos extrême. Dans cet ouvrage, trouver le juste
équilibre des intentions et des dynamiques est un travail passionnant et
délicat. Heureusement que le Singspiel nous en donne les clés !
Vous avez une activité lyrique très soutenue, notamment pour
l'année en cours. Souhaitez-vous donner une tournure presque exclusivement lyrique à votre carrière ?
Il s'agit, pour cette saison, d'un hasard de calendrier, mes saisons passées
ont été très fournies tant en lyrique qu'en symphonique. Cette saison est
presque exclusivement lyrique, la prochaine s'annonce davantage symphonique. J'aime garder cette possibilité de m'exprimer artistiquement dans le
lyrique comme dans le symphonique. La démarche artistique est la même
quel que soit l'ouvrage.
Propos recueillis par Bernard Halter
L’enlèvement au Sérail par le Théâtre de Bienne Soleure, du 11 avril au 4 juin 2014.
Direction musicale Benjamin Pionnier. Mise en scène : Georg Rootering
Avec Rosa Elvira Sierra, Anna Gössi, Christian Baumgärtel, Konstantin Nazlamov,
Martin Weidmann, Thomas Mathys.
Réservation et renseignements : www.tobs.ch/fr/theatre-lyrique
La tournée fera escale :
- Samedi 26 avril 2014 à 20h + dimanche 26 avril à 15h, à la Salle des Fêtes du Lignon,
Vernier
- le 18 mai au Théâtre de Vevey
Benjamin Pionnier
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L’ENLÈVEMENT
AU SÉRAIL
SINGSPIEL EN TROIS ACTES DE MOZART
PAR LE THÉÂTRE ORCHESTRE
BIENNE SOLEURE TOBS
SAMEDI 26 AVRIL — 20h
DIMANCHE 27 AVRIL — 15h
SALLE DES FÊTES DU LIGNON
Place du Lignon 16 — Vernier
Service de la culture — 022 306 07 80
www.vernier.ch/billetterie
NOUVELLE PRODUCTION
3 ÈME J O U R N É E D U F E S T I VA L S C É N I Q U E
DER RING DES NIBELUNGEN EN 3 ACTES
E T U N P R O LO G U E
GÖTTERDÄMMERUNG
R I C H A R D WA G N E R
DIRECTION MUSICALE
INGO METZMACHER
MISE EN SCÈNE
DIETER DORN
DÉCORS & COSTUMES
JÜRGEN ROSE
GUNTHER
SIEGFRIED JOHN DASZAK
JOHANNES MARTIN KRÄNZLE
BRÜNNHILDE PETRA LANG
HAGEN JEREMY MILNER
ALBERICH JOHN LUNDGREN
GUTRUNE EDITH HALLER
W A LT R A U T E M I C H E L L E B R E E D T
CHOEUR DU GRAND THÉÂTRE
DIRECTION CHING-LIEN WU
ORCHESTRE DE
LA SUISSE ROMANDE
23.04>02.05.2014
WWW.OPERA-LAUSANNE.CH
T 021 315 40 20
SAISON1314
WWW.GENEVEOPERA.CH
+41(0)22 322 5050
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le trio zimmermann dans la cité du bout du lac
Des individualités
idéalement associées
Fondé en 2007, par son violoniste, le Trio Zimmermann s'est spécialisé
dans le répertoire méconnu pour cordes. Un univers à (re)découvrir bientôt au Conservatoire de Genève.
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Trois Stradivarius pour un trio ! Excusez
du peu. Mais la qualité de l'ensemble ne s'arrête
pas à ces caractéristiques instrumentales.
A l'origine, il y a Frank Peter
Zimmermann. Ce violoniste allemand, né en
1965, est considéré à juste titre comme un des
plus grands du moment. Sa discographie est pléthorique et la critique a salué son enregistrement récent, paru chez BIS, des concertos de
Hindemith et Brett Dean. Son immense expérience lui permet de mettre en valeur le jeu très
sûr de ses deux associés.
A ses côtés figure Antoine Tamestit, un
altiste français né en 1979 qui a étudié au
Conservatoire de Paris dans la classe d'alto de
Jean Sulem. Il a ensuite été l'élève de Jesse
Levine et du Quatuor de Tokyo à l'Université
Yale, puis de Tabea Zimmermann à Berlin. C'est
en remportant, en 2000, le premier prix du
«Concours international d'alto Maurice Vieux»,
qu'il a lancé sa carrière, une carrière qui l'amène, au gré des concerts, à jouer en chambriste. Il
enseigne aussi au conservatoire de Paris.
Sur la troisième chaise joue Christian
Poltéra. Ce violoncelliste - qui a vu le jour à
Zurich en 1977 - a étudié auprès de Heinrich
Schiff à Vienne, et a collaboré avec de nombreux orchestres symphoniques. Ses collaborations en musique de chambre sont nombreuses
elles aussi. Visiblement, c'est un boulimique du
contact humain ! Ce musicien a acquis une visibilité dans le monde musical en remportant c'était en 2004 - le prix Borletti-Buitoni Award
et en recevant le prix de la BBC «New
Generation Artist».
Une autodiscipline !
Tous ont des carrières spécifiques, mais ils
s'attachent à inscrire sur leur agenda annuel plusieurs mois de collaborations mutuelles. Pour
préparer leurs concerts, ils organisent des ses-
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cordes implique forcément une complicité particulièrement forte : la musicalité ne peut que
rimer avec amitié. Et sans nul doute cette
dimension très humaine compte dans son attachement à ces partitions. Mais leur travail n'est
jamais dilettante : Malgré - ou à cause - de leurs
conditions de travail particulières, les interprètent s'imposent de jouer longuement un opus
avant de le graver sur CD.
Par quels mots les caractériser ? Souffle ?
Virtuosité ? Individualités ? et aussi et surtout
Trio Zimmermann © Mats Backer
sions de préparation, planifiées très à l'avance,
qu'ils intensifient avant de partir en tournée, une
ou deux fois par année. Les artistes insistent sur
l'extrême nécessité d'une bonne planification
pour pouvoir poursuivre ce qui représente pour
eux une aventure esthétique et personnelle.
Pourquoi le trio et pas le quatuor à cordes,
au répertoire plus fourni encore ? Antoine
Tamestit qui avait a croisé des interprètes jouant
en trio déjà au Conservatoire, est devenu sans
nul doute le centre de gravité du groupe. Mais
surtout le quatuor demande une disponibilité
exclusive, tandis que le trio, au répertoire plus
limité, autorise plus de liberté, plus de collaborations externes, qui ne peuvent qu'enrichir les
artistes quand ils se retrouvent pour jouer. Plus
solistique, le trio offre, pour les musiciens,
davantage de place à l'imagination et à la personnalité de l'interprète. Pour Frank Peter
Zimmermann, une telle façon de conjuguer les
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une capacité à se produire ensemble, sans faire
disparaître les personnalités respectives. En
somme, ils jouent comme une magnifique formation en miniature... alors que - paradoxe - les
interprètes disent apprécier la place laissée à
l'individu dans un tel répertoire ! A vérifier
bientôt à Genève !
Pierre Jaquet
Disques parus chez BIS
Conservatoire de musique de Genève le 16 avril 2014 à
20h. Frank Peter Zimmermann, violon - Antoine
Tamestit, alto - Christian Poltéra, violoncelle
Ludwig van Beethoven: Trio à cordes n° 1 en mi bémol
majeur op. 3 (le groupe a enregistré récemment des trios
chez Bis) - Anton Webern: Triosatz op. posth. - Wolfgang
Amadeus Mozart: Divertimento en mi bémol majeur KV
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maisons de disques — et les mélomanes contemporains aux oreilles bien tempérées — auraient
certainement banni une telle expérimentation en
la jugeant de mauvaise qualité.
leonidas kavakos aux concerts migros
A la recherche de
l’authenticité
Modeste et… revendicateur
Fin avril 2014, le soliste natif d’Athènes se produira en Suisse, avec le
prestigieux orchestre de la BBC, sous la baguette du violoniste et chef
finlandais Sakari Oramo (Philharmonique Royal de Stockholm),
spécialiste de Mahler, Bruckner et Elgar.
Les origines cross-over
Leonidas Kavakos est ce qu’on pourrait
appeler «un violoniste de la troisième génération». Son grand-père jouait déjà dans un groupe folklorique, du violon et du luth. Son père
faisait partie du même ensemble, mais avait été
envoyé au conservatoire pour apprendre les
principes de la musique classique. De cette
période Leonidas rapporte une anecdote amusante : en voyant son fils répéter ses gammes et
arpèges avec l’instrument placé sur l’épaule —
alors que dans la musique traditionnelle on l’appui contre la poitrine —, le
doyen des Kavakos aurait arrêté
de pratiquer, «afin de ne pas
perturber» son fiston, désormais
«plus instruit». Mais cela n’a
pas empêché le père Kavakos
d’évoluer dans le monde du
cross-over et de pratiquer aussi
de la musique de chambre avec
sa femme, pianiste de formation. Dans cet environnement
propice pour le petit Leonidas,
le violon a été tout d’abord un
jouet avant de devenir une passion et un gagne-pain. Avec le
temps, son père est devenu son
premier professeur, plutôt strict et exigeant. Les
deux personnalités se sont parfois affrontées, au
point de devoir dissocier famille et formation,
un peu au détriment de la musique folklorique,
ce que Leonidas regrette parfois encore. Il a
pourtant gardé de cette première période formatrice un goût pour l’improvisation et une certaine spontanéité qui le guident vers la recherche
d’une authenticité.
Le profil
Depuis le milieu des années 80, le nom de
Leonidas Kavakos commence à conquérir les
scènes internationales et le public. C’est à cette
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époque qu’il se fait remarquer en remportant
deux compétitions prestigieuses : les Concours
Sibelius (en 1985), et Paganini, trois ans plus
tard. A partir de ce double fait marquant, il n’est
pas difficile de saisir le profil du jeune musicien:
si ses origines méditerranéennes — et les grandes écoles — le rapprocheraient plutôt de la chaleur et de la vivacité — voire d'une certaine folie
— du compositeur (et violoniste !) italien, il semble également pencher vers le lyrisme, vers une
certaine mélancolie propres à l’univers nordique
— que l’on retrouve aussi dans le folklore popu-
Leonidas Kavakos
laire de sa Grèce natale. Si la tentation de cataloguer les musiciens en deux catégories, les techniciens et les lyriques, est parfois encore de mise,
le violoniste y trouve «son parfait milieu». Les
classiques révisés par un Kavakos fidèle à ses
racines surprennent justement par une approche
qui s’échappe des classements stéréotypés. « Un
musicien traditionnel n’a pas besoin de se rendre mélancolique pour jouer un morceau triste »,
prétend-il. Il irait même jusque vouloir reproduire « la justesse approximative » de la musique
folklorique dans des œuvres inspirées par la
musique populaire, comme la Troisième Sonate
de Enescu; idée à laquelle il doit renoncer, car les
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Soliste réputé, il accorde une place privilégiée à la musique de chambre, qu’il pratique en
excellente compagnie, surtout dans les festivals.
C’est un habitué, entre autres, de Salzbourg et de
Verbier. De par son activité de violoniste, il exerce également la fonction de chef d’orchestre, en
dirigeant notamment l’Accademia Nazionale di
Santa Cecilia de Roma et le Symphonique de
Vienne (là encore, deux phalanges aux profils
nationaux bien marqués, pour ne pas dire
contrastés). Touche-à-tout, l'homme ne semble
pas avoir de répertoire privilégié: son objectif est
d’honorer toujours la partition et son concepteur.
S’il admet volontiers que sans les interprètes, la
musique n’aurait pas pu exister, il tire sa révérence aux auteurs des notes, « car nul musicien n’est
plus grand que le compositeur ».
Dans l’interprétation, le concertiste attache
une extrême importance au choix de l’instrument, qu’il traite avec le plus grand respect:
«pour moi, un violon a toujours été un mystère». Il
attribue d’ailleurs à son
Stradivarius « des qualités
magiques ». A ce propos, il
lance une revendication
presque d’ordre social : alors
que des instruments de qualité extraordinaire reposent
encore dans des vitrines, pire
encore, dans les coffres de
collectionneurs millionnaires, de nombreux artistes
talentueux n’y ont pas d’accès… « La personne la
mieux qualifiée pour posséder un Stradivarius, c’est un violoniste !»
conclut le musicien.
Beata Zakes
Tournée de Leonidas Kavakos dans le cadre des Concerts
Migros «Pourcent Culturel»: 29 avril au Victoria hall,
Genève; mais aussi à Zurich Saint-Gall et Berne
Programme à Genève: Johannes Brahms (1833-1897)
Concerto pour violon et orchestre en ré majeur, op. 77 Dieter Ammann (1962*) «Boost» pour orchestre (20002001) - Edward Elgar (1857-1934) Variations pour
orchestre sur un thème original «Enigma», op. 36
Billets en ligne: www.migroslabilletterie.ch
Tél. +41 22 319 61 11
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cully jazz festival du 4 au 12 avril
Cully : la modernité
poétique
David Murray, Thomas Dutronc, Emily Loizeau, Marc Ribot, Emile
Parisien, Medeski, Martin & Wood… Cully, dans le Lavaux, ce n'est pas
seulement l'air du lac qui remonte à travers les feuilles de vignes.
Ni ce festival de jazz pointu qui nargue son grand frère de Montreux d'à
peine quelques encablures. C'est aussi une expérience de correspondances
sur le mode poétique baudelairien : "les parfums, les couleurs et les sons
se répondent".
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Dans son application à définir le voyant,
Rimbaud l'écrivait aussi : « il faut arriver à l'inconnu à travers le dérèglement de tous les
sens ». C'est un peu l'expérience que promet l'affiche du 32e Cully Jazz Festival : on y hume et
entonne, on écoute avec un semblable discernement et on finit inévitablement par être touché.
Cette envie d'exploration poétique se retrouve chez Avishai Cohen, lorsque, se remémorant les airs que sa maman lui chantait, il
gratte sa contrebasse en exhalant l'air d'Israël
tout en prenant de plus en plus goût à la chanson (“Kumi Venetse Hasadeh“). Avec son dernier album, Almah, il observe la polysémie de la
mère vierge (“A Child is born“, “Southern
Lullaby“) et explore toutes les pistes, musicales,
d'une possible réconciliation entre classique
(“Kefel“) et jazz contemporain (“Shlosre“).
Youssef prolonge la magie du vent d'une voix et
d'un oud.
Le luth arabe, et pourquoi pas le ngoni ?
Cette guitare malienne a désormais valeur de
symbole d'unité nationale. Bassekou Kouyaté
est un des meilleurs interprètes de cet instrument traditionnel. La preuve en famille, puisqu'il est accompagné sur scène de sa femme
(chanteuse) et de deux de ses fils (eux aussi
joueurs de ngoni).
A Mali, malin et demi. Pour un autre
concert, Kouyaté accompagne son compatriote
chanteur et guitariste Salif Keita pour une soirée de concert intitulée “Mali, on t'aime“. En
tendant l'oreille, on pourra y percevoir Samba
Diabaté, un griot de Bamako, aux côtés du jembiste suisse Vincent Zanetti.
Cette inspiration se trouve également chez
le pianiste Randy Weston, ici en duo avec un
compagnon de longue date, le saxe
Billy harper. Généreux et militants,
ils remontent aux racines du blues, en
Afrique. Comme eux, jadis, l'homme
aux semelles de vent avait été appelé
par le Harar, l'éthiopienne oasis, tout
aussi une escale que le Lavaux.
Le trompettiste français Ibrahim
Maalouf accompagne aussi Rimbaud
dans ses errements. Ses deux derniers
albums, le vent (Wind) et les illusions
(Illusions), inscrivent littérairement
cette puissance du souffle musical.
Celui-ci est si grand que, à Cully,
Maalouf a demandé à trois autres
trompettistes de rejoindre sa formation. Dans sa continuité, Dhafer
Et s'il n'y avait pas besoin d'aller jusqu'en
Afrique pour trouver les derniers poètes ? Le
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Et les poètes suisses ?
Olivia Pedroli © Yann Mingard
Cully Jazz a tôt découvert des artistes talentueux dans nos montagnes. Les Zurichois de
Rusconi, par exemple, qui ont même cherché la
liberté du côté de la réinterprétation de Sonic
Youth ; “The assault of holy music“. Ou alors le
Genevois Leo Tardin, qui se défait pour le
coup de son Grand Pianoramax et revient, plus
intime, aux seules touches de son piano : “Que
voudrais-tu de moi, doux Chant badin ?“
(Verlaine). Ou encore la chanteuse neuchâteloise Olivia Pedroli, qui, dans le silence religieux
du Temple, offrira sa voix en offrande. “La
Nature est un temple où de vivants piliers /
Laissent parfois sortir de confuses paroles“
(Baudelaire). Alors que le Fribourgeois Stefan
Aeby réconciliera le hiatus de son nom en touchant les noires et les blanches. “A noir, E
blanc, I rouge, U vert, O bleu : voyelles…“
Il n'est donc pas que le slameur
(et licencié philosophe) Saul
Williams à pouvoir s'autoproclamer barde dans cette cuvée très poétique du Cully Jazz. Ayons donc
toujours à nos oreilles les fondateurs de la poésie moderne en écoutant ceux “… Qui chantent les
transports de l'esprit et des sens“
(Rimbaud).
Frank Dayen
Cully Jazz Festival, du 4 au 12 avril :
www.cullyjazz.ch.
Ibrahim Maalouf © Denis Rouvre
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prochains concerts à la tête de l’ocg
Arie van Beek
Arie van Beek donne quelques précisions sur la suite de la saison de
l’Orchestre de Chambre de Genève. Il s’arrête d’abord un premier
point fort : Golgotha, oratorio de Frank Martin qui aura lieu le
2 avril à la Cathédrale de Lausanne et le 3 avril à la Cathédrale
de Genève.
L’un des ingrédients de chaque saison de
l’OCG est en effet la présence d’un compositeur
suisse. Oratorio de la Passion, Golgotha est une
alternative aux Passions de J.-S Bach pour cette
période de l’année. Arie van Beek apprécie particulièrement le style de Frank Martin, « étalé »
dans cette œuvre mais jamais ennuyeux, et tout
à fait adapté aux voix, celles des solistes comme
celles du chœur. La distribution comprendra les
chanteurs suivants : Joëlle-Aurélie Masson,
soprano ; Nora Sourouzian, alto ; Raphaël
Favre, ténor ; Benoît Capt, baryton et Alexandre
Diakoff, basse. Ils seront entourés par les
chœurs Laudate Deum, et Pro Arte de
Lausanne.
lequel sept instrumentistes ont un rôle de
soliste, le concerto de Frank Martin
pour 7 instruments à vent, timbales, batterie et orchestre, et la symphonie No 8
en fa majeur de Beethoven. Ainsi Frank
Martin se trouve encadré par ses deux
maîtres. Mais ce n’est pas tout. Comme
chaque saison, L’OCG crée une pièce
commandée. Il s’agit cette année de Tombeau,
une sinfonia d’une durée de cinq minutes ( !)
pour orchestre de chambre du compositeur et
saxophoniste suisse Kevin Juillerat (né en
1987). La commande dépend de la programmation et non de contingences financières, comme
on pourrait le croire au vu de la brièveté de
l’œu-vre.
Second point fort, le concert du 6 mai au
Bâtiment des Forces Motrices, qui réunira un
concerto brandebourgeois de J.-S Bach dans
Le troisième événement auquel Arie van
Beek prendra part est une rencontre
public/orchestre qu’il présentera et dirigera le 3 mai à 17h au Studio Ansermet.
Au cours d’une première rencontre il
avait raconté l’histoire de la direction
d’orchestre de Monteverdi à aujourd’hui. A l’origine de l’exercice, les compositeurs dirigeaient eux-mêmes leur
musique. Ce n’est qu’au début du XIXe
siècle que la séparation se fit et que les
chefs d’orchestre proprement dits apparurent. Il avait aussi expliqué la façon de
manier les diverses baguettes ou bâtons
et commenté la position debout des
chefs au début du XIXe, qui succéda à la
position assise adoptée jusque là, généralement au clavecin. Deux spectateurs,
une dame et un jeune garçon, ont même
pu se mettre au pupitre à la place du chef
pendant quelques instants !
La deuxième rencontre sera dédiée
à la danse et plus exactement à la danse
Nora Sourouzian participera aux représentations de l’oratorio «Golgotha» à Lausanne et Genève
à trois temps, menuet et valse. Arie van
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Arie van Beek © Gregory Batardon
Beek, avec l’aide d’un petit groupe de danseurs,
organisera le spectacle sur des musiques de
Jean-Sébastien et Jean-Chrétien Bach, Mozart
et Sibelius.
Saison 2014-2015
Il faudra attendre la conférence de presse le
30 avril pour avoir des informations complètes.
Une création importante est prévue, un opéra de
Michael Levinas, Le Petit Prince, que le public
entendra pour la première fois à Lausanne, puis
à Lille, au BFM à Genève (janvier), à Paris et
peut-être à Liège.
Au moment où nous écrivons ces lignes,
Arie van Beek se trouve à Rotterdam où il
accompagne des danseurs avec l’Ensemble de
Doelen, dont il est le chef permanent, un
concert de musique contemporaine, avec au
programme Gavin Bryars, Ian Wilson et Steve
Martland. Des noms peu connus de la majorité,
qui a priori ne sont pas susceptibles d’attirer les
foules, même s’il s’agit de partitions tout à fait
« écoutables » par tout un chacun.
Heureusement, les Néerlandais sont intelligents : dans l’une des séries d’abonnements
possibles, UN concert est offert. Et, je vous le
donne en mille, lequel ? –Justement celui-ci !
D’après des propos recueillis par
Martine Duruz
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Genève et Monthey
Victoria hall, Genève
Gli Angeli
Abdullah Ibrahim
«La Passion selon Saint Mathieu» est l’un des plus grands chefs-d’œuvre de l’histoire de la musique. Pièce la plus célèbre de Bach, elle est le
témoignage le plus éclatant de son génie, de sa capacité à émouvoir et à
interpeller en même temps.
On ne présente plus le célèbre pianiste de jazz et compositeur sudafricain Abdullah Ibrahim, qui s’est fait connaître autant pour son incroyable talent que pour son engagement contre l’apartheid.
Sa musique est d’ailleurs intimement liée à la lutte pour la défense des
peuples sud-africains contre l'apartheid, à l'histoire de la musique noire.
L’ensemble Gli Angeli et son chef Stephan MacLeod proposent cette
œuvre idéale pour la période pascale, avec, parmi les solistes, le ténor
Werner Güra et les sopranos Aleksandra Lewandowska et Maria Christina
Kiehr.
Cette «Passion
selon Saint Mathieu»
fascine
toujours
autant public et musiciens, en raison de sa
beauté, de son message religieux, mais
aussi de la densité de
son propos et de ses
dimensions inhabituelles, soit deux
Werner Güra © Monika Rittershaus
chœurs et deux
orchestres ainsi qu’un chœur d’enfants, qui tous permettent et obligent une
spatialisation de la musique et du propos.
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C’est sa rencontre avec
Duke Ellington, un jour de 1965 à
Zurich, qui a décidé de son destin. En effet, le jazzman remarque
le pianiste et sa femme chanteuse
lors d’un concert et les invite à
jouer au sein du Ellington
Orchestra. Ce coup de pouce permettra à Abdullah Ibrahim de
signer avec une grande marque
de disques, et de débuter une carrière auréolée de succès.
A Genève, Abdullah Ibrahim
et son New Trio offriront une
prestation mélangeant les
musiques traditionnelles de son
pays, l’esprit du blues et des
ambiances oscillant entre Monk
et… Ellington !
Abdullah Ibrahim
© Manfred Rinderspacher
. samedi 5 avril à 19h30 au Victoria Hall de Genève
Billetterie Ville de Genève
. dimanche 6 avril à 17h au Théâtre du Crochetan, Monthey
. Mardi 15 avril à 20h30
Billetterie / lun.-vend. 14h-18h / +41 (0)24 475 79 09
Location : Fnac, TicketCorner, La Poste, Service culturel Migros
Bâtiment des Forces motrices, Genève
Victoria hall, Genève
Andreas Scholl
Manfred Honeck
Le Concert Prestige no.4 du Geneva Camera est intitulé «La voix d’un
ange». Et pour cause : le soliste en sera le célèbre contre-ténor Andreas
Scholl.
Très connu pour ses incursions dans le monde baroque, une musique
particulièrement adaptée à sa voix, il chante sous la direction de chefs
renommés comme René Jacobs, Philippe Herreweghe, William Christie,
John Eliot Gardiner...
Le chef d’orchestre australien Manfred Honeck a débuté sa carrière
comme altiste; après sa formation à l’Académie de Musique de Vienne, il a
été membre du Vienna Philharmonic et du Staatsoper de Vienne pendant plus
de dix ans.
C’est cette expérience qui influence grandement sa manière de diriger
et qui contribue à forger
son style particulier.
Manfred Honeck a de
nombreuses charges au
titre de chef d’orchestre
invité; il travaille en effet
avec des orchestres
majeurs tels que le
Gewandhausorchester de
Leipzig, la Staatskapelle
de Dresden, le Royal
Concertgebouw
Orchestra, le London philharmonic Orchestra, ou
Manfred Honeck © Felix Broede
l’Orchestre de Paris.
Andreas Scholl © Decca / James McMillan
A Genève, il
participera à la création mondiale d’une
pièce pour contreténor et ensemble
commandée par le
Geneva Camerata au
jeune compositeur
Matan Porat, avant
de conclure en chantant des extraits
d’opéras de George
Friedrich Händel.
Nul doute que la
soirée se révèlera
céleste !
. Le 10 avril 2014 : 20h00
Lors des concerts des 2 et 3 avril, Manfred Honeck assurera la direction de l’Orchestre de la Suisse Romande dans un programme dédié à la
Symphonie no 9 en ré majeur de Gustav Mahler.
Billetterie : [email protected] - +41 22 310 05 45
www.fnac.ch& 1heure avant le début de la représentation au guichet du BFM
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. Mercredi 2 et jeudi 3 avril à 20h00
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scènes de mars
Agenda genevois
La tétralogie s’achève au
mois d’avril, sur la scène du
Grand Théâtre, avec la représentation de sa troisième journée et dernier volet, Le
Crépuscule des Dieux, du 23
avril au 2 mai. L’Orchestre de
la Suisse Romande, toujours
dirigé pour cette épopée par
Ingo Metzmacher, accompagnera le Siegfried de John
Daszak, le Gunther de
Johannes Martin Kränzle et la
Brünnhilde de Petra Lang –
tandis que Dieter Dorn signe
Antoinette Dennefeld © Stephane Kindler
la mise en scène. Toujours
pour honorer Wagner, le
chœur du Grand Théâtre chantera des extraits des Musique de Genève proposeront la Passion selon
grands opéras du maître au Victoria Hall le 27 St.Mathieu de JS Bach au Victoria Hall, avec les
avril prochain, accompagné à l’orgue par Diego solistes Werner Güra et Maria Cristina Kiehr,
Innocenzi, et sous la battue de Ching-Lien Wu.
entre autres.
En outre, dans le cadre des célébrations du
La Geneva Camerata, avec David
bicentenaire de l’entrée de Genève dans la Greilsammer à la baguette, sera au BFM le 10
Confédération organisées par le Festival
Steps, le ballet du Grand Théâtre se réunira
avec le Béjart Ballet Lausanne, le Ballet
Zürich et le Ballet Basel, chaque troupe proposant une chorégraphie propre. Le florilège
est à ne pas manquer au Bâtiment des Forces
Motrices, du 25 au 30 avril.
L’Orchestre de la Suisse Romande propose deux concerts remarquables les 2 et 3
avril, puisque Manfred Honeck jouera la
Symphonie No 9 de Mahler. Ne manquons
pas aussi la venue le 29 avril au Victoria
Hall de l’Orchestre Symphonique de la
BBC, avec le violoniste Leonidas Kavakos,
qui interprétera le Concerto pour violon de
Brahms ; la soirée, dirigée par Sakari
Oramo, se poursuivra avec les Variations
pour orchestre sur un thème original
«Enigma» d’Elgar. L’Orchestre de Chambre
de Genève propose pour sa part, le 3 avril,
une soirée Pâques à la Cathédrale SaintPierre ; Arie van Beek y dirigera Golgotha et
Oratorio de la Passion de Frank Martin.
Le 29 avril, Sakari Oramo sera à la tête de l’Orchestre Symphonique
Le 5 avril, Gli Angeli Genève ainsi que
de la BBC © Adrian Burrows
la Maîtrise du Conservatoire Populaire de
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avril avec la « voix d’un ange » : celle du contreténor Andreas Scholl, qui chantera notamment
des extraits d’opéras de Haendel et une nouvelle
pièce pour contreténor et ensemble, créée pour
l’occasion. On retrouvera ces musiciens à la
Comédie de Genève le 14 avril pour un concert
prestige autour du “Minotaure“, ainsi qu’à l’ouverture du Festival Électron au Palladium, le
jeudi 17 avril, où le Concerto
pour deux pianos en do mineur
de Bach côtoiera la création
mondiale Électro et orchestre
de Tristano.
Les amateurs de musique
contemporaine pourront aussi
retrouver la soprano Salomé
Kammer et l’Ensemble
Contrechamps le dimanche 6
avril au Musée d’Art et
d’Histoire, dans l’exploration
du chant musical. Le 15 avril,
au Studio Ernest-Ansermet,
l’ensemble rendra hommage à
Emmanuel Nunes, récemment
décédé.
Côté récital, remarquons la venue de
Murray Perahia au Victoria Hall dans le cadre
des concerts Caecilia, le 11 avril. Au programme : Suite française No 4 de Bach, Sonate pour
piano No 23 de Beethoven, Papillons de
Schumann et des œuvres de Chopin.
Dans la série Jazz Classics, l’Abdullah
Ibrahim New Trio sera le 15 avril au Victoria
Hall, pour que les musiques du Cap s’entremêlent aux ambiances de Duke Ellington.
En musique de chambre enfin, le Trio
Zimmermann sera le 16 avril
au
Conservatoire de la Place Neuve pour interpréter des œuvres de Beethoven, Webern et
Mozart, tandis que l’Ensemble de musique
de l’OSR vous réveillera le dimanche 13
avril au BFM avec des œuvres de Leclair,
Fasch, Couperin et Zelenka.
Rappelons également les concerts agendés par le Festival Vernier Classique, dont
celui du Quatuor de Genève avec le pianiste
Didier Puntos le 13 avril.
Et, dans le cadre de la Tribune des
Jeunes Musiciens d’Espace 2, signalons le
récital de la mezzo-soprano Antoinette
Dennefeld et du pianiste Lucas Buclin, le 27
avril au Studio Ernest Ansermet.
Martina Díaz
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au c(h)œur de la cité
Ching-Lien Wu
Depuis 2001, Ching-Lien Wu occupe avec enthousiasme et compétence le
poste de chef des chœurs du Grand Théâtre de Genève. Vous avez eu
peut-être la chance d’entendre les superbes résultats qu’elle a obtenus de
ses chanteurs dans le Nabucco du mois de mars. Jusqu’en 2012, elle a aussi
été, pendant dix ans, à la tête du Motet de Genève. Entretien.
50
Diplômée de l’École Normale de Taïwan,
elle a poursuivi ses études au Conservatoire
Supérieur de Musique de Lyon et reçu en 1987
le premier prix de direction de chœur. Dès 1989
les engagements se succèdent. Elle est d’abord
chef de chant à l’Opéra de Nantes, puis chef des
chœurs assistante au Théâtre du Capitole de
Toulouse, puis chef des chœurs à l’Opéra
National du Rhin à Strasbourg. Elle est également invitée durant cette période aux opéras de
Montpellier, Rouen et Shanghai tout comme à
Radio France pour préparer oratorios et ouvrages lyriques. Elle a suivi des cours de direction
d’orchestre avec J.-S
Béreau,
Helmut
Rilling, M. Gielen et
P. Boulez.
Mais pourquoi la
frêle et volontaire
dame de Taïwan s’estelle retrouvée un jour
à … Lyon, alors que
son intention était de
mettre le cap sur les
Etats-Unis ? Eh bien
tout simplement parce
qu’elle a appris que le
gouvernement franChing-Lien Wu
çais offrait une bourse
pour aller étudier la direction de chœur et d’orchestre dans cette ville. Elle connaissait la
France à travers sa musique, ses peintres, sa
mode, son cinéma, mais n’avait que peu de
notions de la langue. Après un cours de français
intensif de six mois elle débarqua dans ce pays,
où elle fut surprise surtout par la mentalité, différente de ce dont elle avait l’habitude. En particulier, elle fut frappée par l’attitude des
enfants vis-à-vis de leurs parents, des élèves par
rapport à leurs professeurs, des jeunes envers
les personnes âgées. A Taïwan, la tradition du
respect des parents et de la hiérarchie est enco-
e
re vivante. En France, ce n’est pas vraiment le
cas. D’autre part l’intérêt individuel et non celui
du groupe passe en premier. Il y a pourtant un
avantage dans la société française : le regard des
autres semble moins pesant, la liberté plus grande : c’est ce qui lui a plu.
Un travail dans le détail
Combien de temps faut-il pour préparer
une œuvre d’envergure ? Cela dépend, répond
Ching-Lien Wu. Pour les Meistersinger par
exemple, ou pour le contemporain on peut avoir
besoin de six mois, et même plus pour Peter
Grimes ! Les choristes professionnels commencent bien sûr par un déchiffrage. Ils ne sont pas
censés travailler leurs partitions à la maison.
Ensuite on laisse mûrir, et puis on reprend le travail. Si l’œuvre n’est pas trop ardue il n’est pas
nécessaire de séparer les voix, comme pour
Nabucco, où le plaisir de chanter en italien est
immédiat. Les 41 choristes de 10 nationalités se
plient volontiers à ses exigences, reconnaissent
l’utilité d’une oreille extérieure et les bénéfices
de son expérience. Elle les aide à trouver leur
place dans un ensemble, sans renoncer à leur
personnalité. Avec les complémentaires, il faut
travailler d’une autre façon puisqu’ils ne maîtrisent pas toujours la technique. Mais ils connaissent la partition à la première répétition, ce qui
permet de se concentrer sur l’effet vocal proprement dit.
La disposition des choristes sur scène a son
importance et l’un des principes de base est de
ne jamais mettre deux voix puissantes côte à
côte. Pour obtenir un équilibre il faut aussi tenir
compte du décor, qui joue un rôle acoustique
non négligeable. Tout cela se discute avec le
chef et le metteur en scène.
La langue peut aussi être un problème ;
Ching-Lien Wu reçoit alors l’aide d’un coach,
tchèque pour Rusalka par exemple, et transmet
au chœur ce qu’elle a appris et exercé avec lui.
Pour le russe il y a heureusement des choristes
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dont c’est la langue maternelle. Finalement le
plus dur c’est… l’anglais !!
Et que se passe-t-il lorsque le chef d’orchestre découvre le résultat de la préparation du
chœur ? Evidemment ce n’est pas toujours
pareil. Parfois le chef change tout dans l’interprétation. Il faut accepter, même si cela n’est
pas cohérent. Ensuite on en discute. D’autres
chefs changent tout à la première répétition,
pour revenir à ce qui était fait au début. Pas
grave, mais deux semaines de perdues ! Cela
arrive rarement : la plupart du temps il y a collaboration des parties concernées.
Mise en scène et direction d’orchestre
Ching-Lien Wu se dit fort attirée par la
mise en scène. Elle a fait ses premiers pas en
1999, remplaçant, sans aucune expérience préalable, le metteur en scène pressenti pour le
Barbier de Séville à Taïpei. Elle s’est aperçue
que son point de vue n’était plus le même : les
reprises par exemple sont un problème pour le
metteur en scène alors qu’elles ne le sont pas
pour le coach musical. Quant à la direction d’orchestre elle a eu régulièrement l’occasion de s’y
adonner avec les formations accompagnant le
Motet, l’Orchestre de la Suisse Romande,
l’Orchestre de Chambre de Genève ou
l’Orchestratus Genevensis (orchestre composé
selon les besoins du concert). Elle aime particulièrement les grands oratorios qui offrent tant de
possibilités à l’instrument qu’elle préfère : la
voix.
Mais le dimanche 27 avril 2014 à 17h au
Victoria Hall, c’est l’orgue de Diego Innocenzi
qui soutiendra le Chœur du Grand Théâtre,
dans des extraits des Meistersinger, Lohengrin,
Götterdämmerung, Tannhäuser et Parsifal. Au
milieu de cet hommage à Wagner, une surprise :
Drei Gesänge zu Tristan und Isolde de Clytus
Gottwald, spécialiste des arrangements pour
chœur d’œuvres célèbres des XIXe et XXe siècles. Cette œuvre difficile requiert 16 voix a
cappella, dont des soprani à l’aise sur les contre-ut dièse et autres contre-ré !
On rappellera ici que Ching-Lien Wu a été
en 1996 l’assistante de Norbert Balatsch au
Festival de Bayreuth ; Wagner, elle connaît.
Ching-Lien Wu garde toujours à l’esprit un
conseil qui lui a été donné il y a de nombreuses
années : Ecoute d’abord avant de vouloir imposer ton point de vue. Parfois ce qui est proposé
est meilleur que ce à quoi tu avais pensé !
D’après des propos recueillis par
Martine Duruz
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théâtre kléber-méleau, à renens
Cédric Pescia et ses
invités
La 8e édition des Rencontres Musicales de l’Ensemble enScène avec Cédric
Pescia aura lieu du 29 avril au 4 mai, dans le cadre accueillant du théâtre
de Philippe Mentha, situé dans l’ancienne usine à gaz de Renens-Malley.
Six concerts centrés sur le piano, chacun consacré à un compositeur différent, de Beethoven à Stockhausen, confiés à des musiciens proches de
Cédric Pescia, qui interviendra lui-même dans quatre programmes, en solo
ou en formation de chambre.
Le concert inaugural, le mardi 29 avril à
20h, verra Cédric Pescia associé à quatre mains
à Philippe Cassard. Deux artistes qui se
connaissent bien, qui ont l’habitude de jouer
ensemble et qui ne manqueront pas de ravir le
public de Kléber-Méleau dans un programme
alléchant, entièrement consacré à Franz
Schubert.
pour violon et piano, l’autre pour violoncelle et
piano – et le célèbre Trio op. 97 « à
l’Archiduc ». Les interprètes en seront les membres du Trio Stark, constitué de Nuri Stark au
violon, Monika Leskovar au violoncelle et
Cédric Pescia au piano. Un trio aux affinités
musicales reconnues.
La soirée du vendredi 2 mai devrait rallier
Le lendemain, mercredi 30 avril à 19h, tous les suffrages des amateurs de musique
Alexander Melnikov présentera les 24 moderne. Elle mettra les pianistes Severin von
Préludes et Fugues op. 87 de Dmitry Eckardstein et Cédric Pescia, plus un techniChostakovitch. Une somme pianistique, écrite cien de l’IRCAM, aux prises avec l’une des pardans les 24 tonalités majeures et mineures, titions emblématiques de la seconde moitié du
conçue dans l’esprit de Bach, et qui apparaît XXe siècle : Mantra pour deux pianos de
bien comme le pendant moderne du Clavier Karlheinz Stockhausen, une œuvre inspirée de
bien tempéré. Ce vaste cycle dont la durée la mystique orientale, basée sur une formule
d’exécution avoisine les 2h 30 promet d’être mélodique unique de treize notes réparties en
défendu de main de maître par le pianiste russe, quatre sections, dilatée ou contractée de toutes
digne émule du grand Sviatoslav Richter dont il les façons possibles, avec une aide informatisée.
fut le protégé à ses
Une assistance qui repodébuts. Son enregistresait à l’origine, en 1970,
ment de ces 24 Préludes
sur des jeux de cymbales
et
Fugues,
chez
antiques, deux woodHarmonia mundi en
blocks et deux modula2010, fut même considéteurs en anneaux.
ré par le BBC Music
Magazine comme faiContraste saisissant
sant partie des « 50 enrele lendemain, samedi 3
gistrements les plus
mai, avec le récital que le
importants de tous les
pianiste henri Barda
temps. »
consacrera à quelquesLes trois concerts
unes des plus belles
suivants auront lieu à
inspirations poétiques de
nouveau à 20h. Celui du
Maurice Ravel : la
jeudi 1er mai sera consaSonatine, les Valses
cré à Beethoven, avec
nobles et sentimentales,
Severin von Eckardstein
deux sonates - l’une
Jeux d’eau, Gaspard de
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Cuarteto Casals © Felix Broede
la nuit, la Pavane pour une infante défunte et le
Tombeau de Couperin. « Mais qui est donc
Henri Barda ? » se demanderont certains. Un
pianiste et pédagogue français né au Caire il y a
73 ans, devenu professeur au Conservatoire,
puis à l’Ecole Normale de Paris, qui enseignait
à ses élèves « juste que la musique est dans la
distance entre une note et une autre » et confiait
en septembre 2012 au quotidien Libération : «
Je n’ai jamais vu la musique comme un chemin
vers la gloire, mais comme un voyage à l’intérieur de moi » Belle leçon d’humilité de la part
d’un artiste tenu en haute estime par ses pairs.
Le concert de clôture de ces Rencontres
Musicales 2014 aura lieu le dimanche 4 mai à
17h 30. Reconnu comme l’un des meilleurs
quatuors en activité, le Cuarteto Casals, de
Barcelone, jouera deux grandes œuvres de
Robert Schumann, le Quatuor à cordes No 1
op.41/1 et, avec le concours de Cédric Pescia, le
Quintette pour piano et cordes op.44. Ces deux
partitions seront précédées de l’interprétation,
par Cédric Pescia, des « treize petits trucs »,
selon les propres termes de Schumann, que
constituent les délicates miniatures des
Kinderszenen.
Yves Allaz
Location : Théâtre Kléber-Méleau - 021 625 84 29
www.kleber-meleau.ch
[email protected]
Renseignements : www.ensemble-enscene.ch
[email protected]
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Au Théâtre de Beaulieu, le 11, est programmé un grand gala
Tchaïkovski par la troupe du Théâtre académique municipal de Kiev.
A Morges, le 6 au Théâtre de Beausobre, Le Goût du Sel, comédie
musicale de Guy-Franc̈ois Leuenberger sera créée par le Conservatoire de
Lausanne, sous la conduite de Maxime Pitois. A Nyon, le 6, à la Salle
Cortot de la Villa Thomas, Marie-Claire Bettens et Laura Mendy, viole de
Période pascale oblige : les deux Passions de Bach sont
gambe et clavecin, proposent une « escapade musicale en Italie et en
de retour, la Saint-Jean et la Saint-Matthieu, à côté
Angleterre au 17e siècle. »
d’autres grandes œuvres, tout aussi de circonstance,
A Pully, le 1er avril à l’Octogone, le Quatuor Sine Nomine est l’hômais plus rares, de Martin, Gounod, Biber et
te de Pour l’Art. Haydn, Bartok et Beethoven sont au programme.
Charpentier. A Lausanne, à Romainmôtier, mais aussi
A Lutry, le dimanche des Rameaux, les Concerts Bach accueillent
à Vevey, Monthey ou St-Ursanne.
l’Ensemble Vocal de St- Maurice, l’Ensemble Fratres et des solistes, avec
à leur tête Pascal Crittin, pour la Messe en Si mineur de J.S. Bach.
A Vevey, les deux derniers concerts d’Arts et Lettres de la saison sont
A Lausanne, l’Opéra met à l’affiche Il Barbiere di Siviglia de confiés, le 12, à Mira Glodeanu, violon baroque, et l’Ensemble Ausonia,
Gioacchino Rossini du 27 mars au 7 avril, dans la mise en scène d’Adriano qui joueront des Sonates du Rosaire et les Mystères douloureux de la
Sinivia, avec Annalisa Stroppa (Rosina), Giorgio
Passion de Biber, ainsi que le 29, au Hindemith
Caoduro (Fiagaro), Edgardo Rocha (Almaviva),
String Trio, qui interprétera des œu-vres de
avec l’OCL, sous la direction musicale de Carlos
Schubert, Hindemith et Mozart (le sublime
Vieu. Le 6 avril, il accueille dans ses murs le
Divertimento K.563).
concert-spectacle que l’Ensemble Art-en-Ciel
A Montreux, le 6, au Château du Chätelard,
d’Isabelle Meyer consacre à Antonio Vivaldi (Les
Vivian Berg, hautbois baroque, et Brian Franklin,
Quatre Saisons) et à Astor Piazzolla (Las Cuatro
viole de gambe, joueront des pages de Haendel et
Estaciones Portenas), avec les danseurs Patricia
de Heinichen. A l’Auditorium Stravinski, le 24, au
Carrazco et Pablo Linares.
concert de gala clôturant la 50e édition (24 au 26
Les 7 et 8 avril, l’Orchestre de Chambre de
avril) du Montreux Choral Festival, Luc
Lausanne, conduit par Kazuki Yamada, donnera
Baghdassarian conduira solistes, chœurs et orchesson 8e concert d’abonnement, avec le concours du
tre dans le Requiem de Mozart.
jeune violoniste Fumiaki Miura, soliste de
A Romainmôtier, le 6, Michel Corboz et son
l‘Introduction et Rondo capriccioso, puis du 3e
Ensemble Vocal de Lausanne ont mis à leur proConcerto de Saint-Saëns. Au mëme programme, la
gramme le Motet sur des thèmes grégoriens de
Symphonie No 5 « Réformation » de Mendelssohn.
Maurice Duruflé, ainsi que Les sept paroles du
Le 2 avril à la Salle Métropole, le concert
Christ sur la croix et la Messe de Requiem de
Fumiaki Miura © Koichi Miura
Découvertes de l’OCL, avec Debora Waldman à sa
Charles Gounod. Le Vendredi-Saint, l’Ensemble
tête et en partenariat avec La Manufacture (Haute Ecole de Théâtre de Vocal Bis et des solistes, dont Simon Jordan en évangéliste, avec à leur
Suisse Romande), verra la création mondiale du Jeu des Sept Clefs de tête Olivier Piguet, interpréteront la Passion selon Saint- Jean BWV 245
Richard Dubugnon. Un conte musical pour enfants.
de J.S. Bach.
Le 8 avril, toujours au Métropole, le 8e Entracte du Mardi des musiEn Valais, à Monthey, au Théâtre du Crochetan, le 6 avril, ce sont les
ciens de l’OCL sera consacré au Trio à cordes D.471 de Schubert et au forces jumelées de l’Ensemble Gli Angeli de Genève (direction Stephan
Quintette pour hautbois et cordes d’après le quaMacLeod) et du Chœur Chante la Vie (direction
tuor K.423 de Mozart.
Karine Barman) qui présenteront, avec le ténor
A la Cathédrale, Golgotha de Frank Martin
Werner Gu
̈ra en évangéliste et des solistes réputés,
sera interprété le 2 avril par l’Orchestre de
la Passion selon Saint Matthieu de J.S. Bach.
Chambre de Genève, les chœurs Laudate Deum et
A Sierre, le 6, à l’Ho
̈tel de Ville, le Quatuor
Pro Arte et des solistes, sous la conduite d’Arie
Carmina interprétera des quatuors de Haydn, de
van Beek. Les 16 et 17, la Passion selon SaintDebussy et de Schumann.
Matthieu de Bach aura pour interprètes un groupe
A Neuchâtel, le 3 avril au Temple du Bas, le
de solistes, dont Michael Nowak en évangéliste, le
Schweizer Klaviertrio jouera deux chefs-d’œuvre
Chœur Vivace, l’Ensemble Vocal de la Côte, la
du répertoire : le Trio op.97 « à l’Archiduc » de
Maîtrise du CVPMDT de Genève et l’Ensemble
Beethoven, et le Trio op. 66 de Mendelssohn.
Fratres, sous la conduite de Christophe Gesseney.
A La Chaux-de-Fonds, le 4, au Théâtre, Il
Concerts d’orgue le Vendredi- Saint et le jour de
Giardino Armonico et Giovanni Antonini, à l’enseiPâques. A la Salle Paderewski, les Concerts de
gne de « La Morte della ragione » ont inscrit 14
Montbenon annoncent deux récitals de piano :
compositeurs à leur programme, de Heinrich Isaac
celui de Jean-Franc̈ois Antonioli le 11, celui de
et Josquin Desprez à Henry Purcell, en passant par
Mira Glodeanu © Jérémie Kerling
Paul Coker le 15 avril.
Clément Janequin et Samuel Scheidt. Le 29, au
scènes d’avril
Agenda romand
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Temple Allemand, I Madrigali Notturni associera des compositions de la
Renaissance à des œuvres de la compositrice Katharins Rosenberger, sous
les éclairages de Christa Wenger, la lumière étant un élément essentiel du
spectacle de ce groupe de chanteuses.
A Bienne, le 30 avril, titré Cellissimo, le 8e concert de l’Orchestre
symphonique Bienne-Soleure, sous la direction de Kaspar Zehner, sera
bien sûr dédié au violoncelle, avec notamment la Bachiana brasileira No1
pour 8 violoncelles de Heitor Villa-Lobos et Dialogues cellestes pour 2
violoncelles et orchestre de Fabian Müller, avec Antonio Meneses et PiChin Chien en solistes.
Au Stadttheater, le 11, première de Die Entführung aus dem Serail de
Mozart, suivie de représentations le 13, le 16 et le 21, et nouvelles représentations, le 15 et le 25, de Figaro, une création de Christian Henking.
Dans le Jura, le Vendredi-Saint à la Collégiale de St-Ursanne, les
Grands Motets pour la Semaine Sainte de Marc-Antoine Charpentier
seront donnés, sous la direction de Sébastien Daucé, par l’Ensemble
Correspondances, magnifique formation de chanteurs et instrumentistes
formée à Lyon en 2008, spécialisée dans l’interprétation du répertoire
sacré du Grand Siècle.
Julian Rachlin
A Fribourg, le 4 avril au Théâtre de l’Equilibre, les Hollandais du
Trio Storioni donneront la 3e soirée de leur intégrale des trios avec piano
de Beethoven, dont le fameux Trio op.97 « à l’Archiduc ». Au mëme
endroit, le 11, l’Orchestre de Chambre fribourgeois, avec Chiara Banchini
à la direction et au violon, interprétera des pages des fils de Bach et des
frères Haydn, dont un Concerto pour violon de Michael, le cadet, et la
Symphonie No 15 de l’aîné, Joseph.
Le 16, l’Orchestre de Chambre de Lausanne sera à l’Equilibre avec
Julian Rachlin, au violon et à la direction, pour l’Ouverture des Noces de
Figaro de Mozart, le Concerto en mi mineur et la Symphonie en la majeur
« Italienne » de Mendelssohn.
A La Tour-de-Trême le 6, et à Romont le 26 avril, l’Orchestre de
Chambre fribourgeois, cette fois-ci sous la direction de son fondateur
Laurent Gendre, accompagnera dans les deux villes un trompettiste, dans
l’une Jean-Franc̈ois Michel dans le Concerto de Haydn, dans l’autre
Didier Conus dans celui de Hummel, la 4e Symphonie de Beethoven ou la
Symphonie No 38 « Prague » de Mozart complétant le programme.
Yves Allaz
lucerne festival
L’après Abbado
Le Festival avant Pâques qui se déroulera du 5 au 13 avril,
rendra hommage à Claudio Abbado le dimanche 6 avril,
avec un concert du Lucerne Festival Orchestra, la
phalange fondée par le très regretté chef italien.
Au programme de ce concert exceptionnel la symphonie inachevée de
Schubert, jouée sans chef d’orchestre, le concerto pour violon et orchestre À
la mémoire d’un ange, d’Alban Berg, avec Isabelle Faust, et le final de la
symphonie no 3 de Gustav Mahler dirigé par Andris Nelsons. Le chef letton
dirigera également Parsifal de Richard Wagner, le samedi 12 avril. Cette
version concertante sera interprétée par l’orchestre et le chœur de la Radio
bavaroise. C’est Bernard Haitink qui ouvrira le festival le 5 avril, avec le
Chamber Orchestra of Europe. Ils joueront deux symphonies de Schumann,
la 1ière et la 4ème, et Gautier Capuçon se joindra à eux pour interpréter le
Concerto pour violoncelle du même compositeur. Le 6 avril en matinée aura
lieu un concert d’orgue et trompette. Martin Lücker et Reinhold Friedrich
donneront vie à des partions de divers compositeurs, de Tomaso Albinoni à
Paul Hindemith en passant par Johann Sebastian Bach et Franz Liszt.
Gustavo Dudamel est un invité régulier du Festival avant Pâques. Cette
année il dirigera l’orchestre de la Radio bavaroise dans la 6ème symphonie
de Beethoven, la Pastorale, et Le
Sacre du printemps de Stravinsky.
Le festival avant Pâques propose toujours également des
concerts de musique sacrée. Le
mardi 8 avril le chœur britannique
“Stile Antico“ interpétera de la
musique vocale de la Renaissance
provenant de toute l’Europe sur le
thème de la passion et de la résurrection du Christ. Le mercredi 6
avril, András Schiff dirigera son
orchestre la Cappella Andrea Barca
et le chœur Balthasar Neumann qui
donneront la Missa Solemnis de
Beethoven. Le lendemain, la Jeune
Philharmonie de la Suisse centrale
et le Chœur Académique de
Lucerne interpréteront l’oratorio
Belshazzar de Händel. À la baguetAndris Nelsons © Marco Borggreve
te, Marcus Creed. Et le chœur de la
Radio bavaroise clôturera le festival
le dimanche 13 avril avec la Petite Messe solennelle de Gioachino Rossini.
Au piano, Yaara Tal et Andreas Groethuysen, à l’harmonium, Max Hanft.
Du vendredi 11 au dimanche 13, on aura la possibilité d’assister au
Master class de direction d’orchestre données par Bernard Haitink. Le
Lucerne Festival a par ailleurs commandé une œuvre au jeune compositeur
italien Riccardo Panfili qui sera créée par l’ensemble Human Rights
Orchestra et les élèves du Lycée Reussbühl le samedi 12 avril.
Emmanuèle Rüegger
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casino de montbenon, lausanne
Le piano à l’honneur
A l’enseigne de Fortepianissimo, les Concerts de Montbenon proposent un
cycle printanier de cinq récitals de piano pour clore leur 33e saison à la
Salle Paderewski. La deuxième soirée de la série verra le retour sur scène
du pianiste Paul Coker, tenu longtemps absent des salles de concert.
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Jean-François Antonioli ouvrira les feux
le vendredi 11 avril avec un programme de musique française comportant,
entre autres, l’unique Sonate de
Dutilleux, dont le pianiste lausannois
est de longue date l’interprète privilégié.
Le mardi 15 avril, Paul Coker, à
une et deux mains, jouera des pages de
Bach, Scriabine, Mersson, Wagner et
Brahms, reprenant à cette occasion
une partie du contenu d’un magnifique
CD paru en 2012 chez Doron Music.
En mai, Brigitte Meyer mettra
son talent au service de Haydn et de
Mendelssohn, alors qu’en juin, le
jeune Louis Schwizgebel et Sergei
Babayan, illustre tiulaire d’une classe
de piano au Cleveland Institut of
Music, mettront un terme aux festivités.
Music, sacré « meilleur musicien de l’année
ble de cette situation, sans renoncer pour autant
à reprendre un jour son activité de soliste, il
entre-prend alors la transcription pour la main
gauche de grandes partitions comme celle de la
Mort d’Isolde de Richard Wagner, à partir de la
propre transcription de Liszt pour les deux
mains, ou celle de l’imposante Fantaisie chromatique et Fugue BWV 903 de J.S.Bach. Paul
Coker transcrit aussi, à partir de la version pour
piano à deux mains de Busoni, le très beau choral de Bach Nun komm der Heiden Heiland,
ainsi que, retravaillant l’adaptation qu’en avait
faite Brahms au piano, la fameuse Chaconne de
la Partita en ré mineur pour violon seul, de
Bach également.
Louis Schwizgebel
Le retour de Paul Coker
Le récital de Paul Coker mérite de retenir
tout particulièrement l’attention des mélomanes
lausannois, tant pour l’originalité des œuvres
programmées que pour la personnalité de leur
interprète, tenu très longtemps éloigné des salles de concert en raison de graves ennuis de
santé qui l’ont empêché pendant de longues
années de poursuivre son activité de pianiste
concertiste.
La carrière de Paul Coker avait pourtant
débuté sous les meilleurs auspices. Né à
Londres en 1959, il n’avait que 20 ans quand
Yehudi Menuhin le choisit pour remplacer sa
sœur Hephzibah, malade, dans ses tournées à
travers le monde. Une collaboration qui dura
une dizaine d’années, marquée par plus de deux
cents concerts, en duo ou avec orchestre.
Entré à 9 ans à la Yehudi Menuhin School
de sa ville natale, diplômé du Royal College of
a
1978 » en Angleterre, Paul Coker compta
notamment, parmi ses nombreux partenaires,
des violonistes comme Pierre Amoyal et Joshua
Bell, et des violoncellistes comme les frères
Demenga et Steven Isserlis. Il forma en 1990 le
Trio Coker-Stuller-Brown et enregistra de nombreux disques, dont de très belles sonates de
Schubert et celles pour violoncelle et piano de
Beethoven.
Les vingt dernières années
Professeur à la Yehudi Menuhin School de
Londres durant plusieurs années, Paul Coker
enseigne depuis 1995 à la Haute Ecole de
Musique de Genève, sur le site de Neuchâtel, où
il réside. Il y a une vingtaine d’années, Paul
Coker a connu des problèmes de santé qui l’ont
contraint à mettre provisoirement un terme à sa
carrière de soliste. Tirant le meilleur parti possi-
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Ces chefs-d’œuvre, dans les arrangements
de sa main, figurent en bonne place dans le programme que Paul Coker présentera le 15 avril à
Montbenon, à côté de pièces écrites spécialement pour la main gauche, de Scriabine et de
Boris Mersson, le compositeur et chef d’orchestre suisse d’origine russe disparu en novembre
dernier. Un concert qui compte beaucoup pour
cet artiste qui donnera ce jour-là un premier
récital public attendu depuis des années.
Yves Allaz
Lausanne Casino de Montbenon
Salle Paderewski
e-mail : [email protected]
SMS : 076 570 40 72
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victoria hall, genève
Murray Perahia
Dans la série Les grands interprètes de l’agence Caecilia, Murray Perahia
sera en récital au Victoria hall de Genève le 11 avril 2014. L’occasion
d’entendre le pianiste new-yorkais dans la musique de Bach, Beethoven,
Schumann et Chopin.
Blessé au pouce il y a quelques années et
contraint à une longue période d’inactivité
musicale, Murray Perahia en a profité pour se
plonger corps et âme dans la musique de Jean
Sébastien Bach. Comme il le dit lui-même, cette
étude a influencé essentiellement sa vision et
son interprétation de Chopin - ce « classiqueromantique » dont la musique lui est chère. Par
ailleurs, cette curiosité musicale apparaît chez
Perahia dans son désir constant de retrouver
l’esprit des œuvres à travers les liens qui les
unissent.
Murray Perahia joue depuis plus de trente
ans sur les scènes du monde entier et il est deve-
nu un des pianistes les plus reconnus de notre
temps. Celui qui a travaillé notamment avec
Mieczyslaw Horszowski et Vladimir Horowitz
a également étendu sa collaboration artistique
avec Rudolf Serkin, Pablo Casals, et les membres du quatuor à cordes de Budapest. Son affinité avec la musique de Bach est manifeste dans
ses enregistrements des concertos pour clavier
de Bach et le Concerto brandebourgeois n ° 5
avec l'Academy of St. Martin in the Fields. Son
enregistrement des Variations Goldberg de
Bach a également reçu deux nominations
Grammy et remporté en 2001 le prix
Grammophone du meilleur enregistrement
instrumental ; de même, son enregistrement des
Suites anglaises de Bach a remporté également
un Grammy ainsi que plusieurs prix décernés
par le magazine Grammophone pour son interprétations des ballades de Chopin. Du maître
polonais il a également enregistré l’intégrale
des Etudes de l’op. 10 et op. 25 – intégrale pour
laquelle il a reçu le prix du Meilleur Soliste
Instrumental Performance 2003. Son rayonnement artistique lui vaut enfin le titre de
Chevalier Commandeur Honoraire de l'Ordre de
l'Empire britannique, remis par Sa Majesté la
Reine d'Angleterre, en reconnaissance de ses
services exceptionnels rendus à la musique.
Le récital du 11 avril au Victoria Hall permet donc à Murray Perahia d’interpréter des
œuvres majeures des grands compositeurs de
l’histoire. Sa prédilection pour la musique de
Bach et de Beethoven est à l’origine d’un programme conséquent avec les partitions de la
Suite française n° 4 BWV 815 et de la Sonate n°
23 « Appassionata ». La seconde partie du récital met à l’honneur la musique romantique avec
Robert Schumann et ses Papillons ainsi que
trois Etudes, le premier Nocturne, op. 62 et le
Scherzo n° 2, op. 31 de Chopin. Un récital prometteur pour ouvrir ce printemps musical genevois.
Serene Regard
11 avril : Les Grands Interprètes. Murray Perahia, piano
(Bach, Beethoven, Schumann, Chopin). Victoria hall à
20h (Service culturel Migros, 022/319.61.11, Stand Info
Balexert, Migros Nyon-La Combe)
Murray Perahia
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avons choisi le Liederkreis op.39 qui contient
parmi les plus grandes réussites en la matière,
ainsi qu'une sélection de mélodies isolées. Il y a
tant de joyaux dans les recueils de Lieder de
Schumann qu'il est très difficile d'en choisir certains et de renoncer à d'autres.
festival vernier classique
Fabrizio Chiovetta
Programmé pour trois concerts dans le cadre du Festival Vernier
Classique, le pianiste genevois, dont un enregistrement d’œuvres de
Schubert sorti en 2013 a été très remarqué, répond aux questions
de Scènes Magazine.
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Né à Genève, Fabrizio
Chiovetta
étudie
avec
Dominique Weber, Paul BaduraSkoda et John Perry. Ses enregistrements comprennent des œuvres de Schumann et Schubert. Il
donne de nombreux concerts en
Europe, Amérique du Nord, Asie
et Moyen-Orient, aussi bien en
récital qu’en musique de chambre. Egalement improvisateur, il
collabore avec des musiciens de
divers horizons (Piano Seven,
Anna Prucnal, Masako Hayashi,
Levon et Grégoire Maret). Fabrizio Chiovetta
enseigne le piano à la Haute Ecole de Musique de
Genève.
Dans le cadre du Festival, outre un
récital, vous allez donner deux concerts avec
comme partenaires le violoncelliste henri
Demarquette pour l’un, la soprano
Charlotte Müller-Perrier pour l’autre.
Comment avez-vous été amené à ces choix ?
Les organisateurs du Festival Vernier classique
m'ont donné carte blanche pour trois concerts.
J'ai donc naturellement proposé un récital solo,
mais j'affectionne également la musique de
chambre et le Lied. J'ai entendu à plusieurs
reprises Henri Demarquette, un des violoncellistes actuels qui me plaît le plus. Son jeu sobre,
intelligent et sensible m'attire énormément et je
suis enchanté de me produire avec lui à Vernier.
Ce sera notre première collaboration. J'ai joué il
y a trois ans avec la soprano Charlotte MüllerPerrier dans le cadre des Concerts de Musique
de Chambre de l'Orchestre de Chambre de
Lausanne. Avec des membres de cet ensemble,
nous avons interprété des oeuvres de
Schostakovich et Chausson. Nous nous sommes
entendus à merveille et avons tout de suite évoqué l'idée de travailler un programme en duo,
mais l'occasion ne s'est pas présentée. L'an dernier, nous avons partagé l'affiche lors d'un
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Vous avez bien sûr des projets
Fabrizio Chiovetta
concert Mozart au Victoria Hall: je jouais un
Concerto pour piano alors qu'elle était soliste
dans la Messe en Ut mineur. Elle a été bouleversante, et nous avons à cette occasion à nouveau
exprimé le désir de travailler ensemble.
J'ai enregistré un disque Haydn (Sonates et
Variations) qui paraîtra dans quelques mois chez
Claves Records et prévois d'enregistrer prochainement un disque Bach.
Pour ce qui est des concerts, je
jouerai à Venise début mai, en
récital, ainsi qu'avec la violoncelliste Cecilia Tsan. Le lendemain
j'accompagnerai la soprano
Céline Laly au Festival Les
Athénéennes. Un peu plus tard, ce
sera un récital nocturne (concert à
22h30 éclairé à la bougie) au
Festival Cully Classique le 27
juin, avec notamment la Sonate
D960 de Schubert. A la rentrée
nous nous retrouverons avec les
violonistes Sarah et Deborah
Nemtanu, dans un programme
Haydn, Shostakovich, Dvorak pour un concert où
je me produirai au piano ainsi qu’à l'accordéon,
instrument que je pratique également.
Propos recueillis par Christian Bernard
Parlez-nous des choix du programme
Pour mon récital solo, j'ai choisi des oeuvres tardives de Beethoven (Bagatelles op.126) et
Brahms (Intermezzi op.117). Ce sont des pages
très concentrées, intimes, méditatives. Après
cette première partie au contenu dense et spirituel, j'interpréterai l'Ouverture Française en si
mineur de J.S.Bach. C'est une suite de danses de
grande envergure, un immense chef-d'œuvre
moins fréquenté par les pianistes que les Partitas.
Brahms et Beethoven seront également présents
dans le récital avec violoncelle, avec deux sonates incontournables du répertoire pour violoncelle et piano. Il y a quelques mois j'ai assisté à un
concert de Henri Demarquette et Boris
Berezovsky au Théâtre des Champs-Elysés. Ils
ont entre autre admirablement joué la Sonate de
Britten, pour laquelle j'ai eu un véritable coup de
coeur, et j'ai dès lors eu très envie de jouer cette
oeuvre avec Henri.
La musique de Schumann me touche profondément. J'ai d'ailleurs choisi ce compositeur pour
mon premier enregistrement solo. Schumann
était très attaché à la poésie, et sa fibre littéraire
s'épanouit à merveille dans ses Lieder. Nous
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Festival Vernier classique – Salle des fêtes du Lignon
Programme
TRIO GUARNERI DE PRAGUE le 4 avril 2014 à 20h00
Haydn: Trio avec piano n° 39 en sol majeur op. 88 n°2 Hob.
XV.25, dans le style tzigane
Chostakovitch: Trio avec piano n° 2 en mi mineur op. 67,
Dvorák: Trio avec piano n° 4 op. 90, B 166, Dumky
FABRIZIO ChIOVETTA le 6 avril 2014 à 16h00
Bach, Ouverture française BWV 831
Brahms, Intermezzi op.117
Beethoven, 6 Bagatelles op.126
FABRIZIO ChIOVETTA & hENRI DEMARQUETTE (violoncelle) le 11 avril 2014 à 20h00
Beethoven, Sonate n.3 en la majeur op. 69
Brahms, Sonate n.1 en mi mineur op.38
Britten, Sonate en do majeur op.65
FABRIZIO ChIOVETTA & ChARLOTTE MüLLER-PERRIER
(soprano) le 12 avril 2014 à 20h00
Schumann, Liederkreis op.39 | sélection de Lieder
QUATUOR DE GENèVE le 13 avril 2014 à 16h00
De Vienne à Prague: horizons d’Europe centrale
Haydn: Quatuor opus 76 n°5,
Janecek: Quatuor n°1 (« Sonate a Kreutzer »),
Dvorák: Quintette avec piano opus 81.
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à la salle paderewski lausanne
Concert de la
Fondation Résonnance
Mardi 24 juin à la salle Paderewski du casino de Montbenon, un concert
organisé par Elizabeth Sombart offrira à la pianiste l’occasion de présenter
le travail réalisé en Roumanie par la Fondation qu’elle préside.
La première partie du concert est dédiée en
effet à de jeunes prodiges roumains suivis par la
filiale Résonnance de Roumanie depuis sa création en 2012. Agés de 8 à 12 ans, ils sont actuellement huit à bénéficier gratuitement de la
pédagogie mise au point par Elizabeth Sombart.
Trois d’entre eux feront le voyage de Lausanne.
“Il faut à tout prix leur éviter d’entrer dans le
système qui transforme les enfants prodiges en
bêtes de cirque” s’enflamme la pianiste dont on
sait le refus qu’elle a très tôt opposé à l’esprit de
compétition, pour suivre un chemin de liberté.
Le concert permettra en outre d’entendre
deux interprètes proches d’Elizabeth Sombart et
du chef d’orchestre Jordi Mora. Il s’agit de la
pianiste Pilar Guarné, responsable de
Résonnance Espagne, dont on se souvient peutêtre de la venue au Théâtre de Beaulieu à
Lausanne ou au Bâtiment des Forces Motrices
de Genève, et du pianiste Jean-Claude
Dénervaud, directeur du Centre International de
la Pédagogie Résonnance et professeur des
Masterclass de piano et de musique de chambre. Ils seront rejoints par une élève du contreténor français Vincent Aguettant, professeur des
Masterclass de chant du CIEPR.
Elizabeth Sombart clôturera le concert
dans un programme naturellement consacré à
Chopin, puisqu’elle prépare actuellement les
deux Concertos du compositeur qu’elle enregistrera fin mai à Londres avec le Royal
Philarmonic Orchestra, le disque devant être
disponible dès le mois de septem-bre.
Concerts des Masterclass
Fidèle à son idéal d’offrir des concerts
Résonnance dans les lieux où la musique n’est
pas, la Fondation propose, d’ici à l’été, plusieurs concerts donnés par les participants aux
Masterclass. Pour les Masterclass de piano avec
Elizabeth Sombart, le 7 avril à 14h30 au Home
Salem à St-Légier; pour le chant avec Vincent
Aguettant, le 5 mai à 16h30 au Domaine de la
Gottaz à Morges; pour la musique de chamber
avec Jordi Mora, le 20 juin à 15h. à la Fondation
Clémence à Lausanne.
Christian Bernard
Elizabeth Sombart
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spectacles onésiens
Bassekou Kouyaté
Comme la saison a été dense et intense, le mois d’avril ne proposera qu’un seul
spectacle mais quel spectacle ! Le 11 avril, place à Bassekou, un musicien
malien au talent incroyable, et le plus connu des maîtres de Ngoni – le luth des
griots, l’ancêtre du banjo.
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Sa musique balance entre rock et tradition,
imprégnée de la culture mandingue, mais bien
ancrée dans le monde contemporain. Ce virtuose
est accompagné de son épouse, merveilleuse
chanteuse, de ses fils, joueurs de ngoni, et soutenu par d’excellents percussionnistes.
Bassekou Kouyaté est né en 1966 à Garana
et son groupe est connu sous le nom de Ngoni ba.
Fervent militant pour la paix, Bassekou enrage de
ce qui se passe dans son pays : « Le Mali est une
terre de musique, pas une terre de guerre et d’islamisme » rappelle-t-il avec véhémence.
Bassekou Kouyaté a commencé à l'âge de
douze ans à jouer le Ngoni. A la fin des années
80, il s'installe à Bamako, la capitale. Son premier album, Segu Blue, a été publié à l'échelle
internationale en 2007 par Out Here dossiers et
distribué au Royaume-Uni par Music bonne distribution. L'album a été produit par Lucy Duran.
Il est également apparu sur un certain nombre
d'albums par Toumani Diabaté [2] et a joué dans
plusieurs pays européens. En 2010, Kouyaté a été
Bassekou Kouyaté en famille
a
en tournée avec Béla Fleck. La femme de
Kouyaté, Amy Sacko, est également une artiste
solo réussie et chante dans son groupe. Son père,
Mustapha Kouyaté, était un joueur de ngoni et sa
mère Yagaré Damba était une chanteuse de
louanges. La tradition musicale est donc bien
ancrée dans la famille de l’artiste qui l’a transmis
à ses enfants.
Ses dernières compositions sont marquées
du sceau de la colère contre la guerre qui a éclaté au Mali pendant l’enregistrement de son dernier album. Intense et pourtant joyeuse, sa
musique lance des messages forts et pacifiques à
l’attention de ses compatriotes qui veulent l’entendre. Ce sont des compositions ou des morceaux traditionnels, dont l’histoire prend une
dimension plus poignante dans le contexte de
crise confessionnelle qui sévit dans le pays : par
exemple, Sinaly est un chant d’hommage à
Sinaly Diarra, un roi de Ségou au XIXe siècle,
résistant à l’islamisation, dont le courage donna
lieu à de nombreuses louanges. Segu Jajiri rappelle l’histoire d’un
guerrier de Ségou,
musulman et buveur
occasionnel de bière
traditionnelle
de
millet. Dans Kele
Magni, Amy Sacko
lance un appel à la
paix en duo avec la
diva de Tombouctou
Khaïra Arby et dans
Jama Ko, il est question d’unité entre
chrétiens, musulmans, animistes, plus
largement “un Mali
un et indivisible“,
leitmotiv du répertoire de Bassekou
Kouyaté. Sur la plupart des morceaux, le
ngoni est branché sur
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une pédale wah-wah et le son presque distordu,
frisant quelques fois la saturation : «c’est moi qui
en ai eu l’idée, car les enfants d’aujourd’hui
aiment la guitare électrique». Malgré les coupures d’électricité, l’inquiétude croissante, le
manque d’informations, Bassekou Kouyaté poursuit ses enregistrements entre le studio Bogolan
et sa maison, livrant des morceaux imprégnés de
la grande tradition griotique dont il est l’un des
fiers représentants, mais surtout des messages de
paix, de fraternité et réconciliation à l’attention
des Maliens comme des autres auditeurs. Des
messages à découvrir et réentendre à Onex le 11
avril 2014 !
Firouz-Elisabeth Pillet
www.spectaclesonesiens.ch
Théâtre Am Stram Gram
ASG proposera deux spectacles au mois
d’avril : Ventrosoleil, du 1er au 5 avril, une
création d’ASG avec Contrechamps. Néla, c’est
la fille de Mo le Boucher, un boucher dans tous
les sens du terme, y compris les pires. Un jour,
Néla se réveille avec un pied en moins. Pas pratique quand on veut voyager. Ajoutez au tableau
un vieux chat aux yeux de fée, Ventrosoleil, qui
est toujours là où l’on espère qu’il sera. Voici
une fable douce-amère sur les héritages difficiles et le désir d’ailleurs, la nécessité de rêver et
de poursuivre ses rêves sans s’arrêter en chemin. Cousine de l’Alice de Lewis Carroll, Néla,
la protagoniste de la pièce, affronte le monde
avec l’aplomb, ténacité et force.
Du 8 au 15 avril, ASG reçoit PAN ! (La
Compagnie) avec La petite fille aux allumettes;
la compagnie souhaite demander à des groupes
d’enfants de 5 à 12 ans, dont les voix si vivantes viennent soulever des forces de vie, s’il est
raisonnable de laisser à un adulte le soin de
choisir la fin de l’histoire...
Pour déjouer le désarroi et la tristesse que
ressentent les jeunes lecteurs quand ils comprennent la fin du conte d’Andersen, PAN ! propose un questionnement autour de cette œuvre.
Et le résultat, c’est Andersen, la fatalité en
moins, les questions en plus ; rien n’est édulcoré du conte original, car le XXIe siècle n’est pas
moins dur que le XIXe, mais l’humour bouscule, la tendresse renverse.
Firouz-Elisabeth Pillet
www.amstramgram.ch
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Théâtre des Marionnettes de Genève
Location : 022 / 807.31.07
Jusqu’au 13 avril : « Voyage en Polygonie » (© Phil Journe)
Du 30 avril au 18 mai : «Ne m’appelez plus jamais mon petit lapin» (© Cédric Vincensini)
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tournée
Le Ballett Zurich en
Suisse romande
Pour la première fois, la plus grande compagnie alémanique vient en Suisse
romande, dans le cadre du Festival Steps du Pour-cent culturel de la Migros.
On pourra voir le triptyque Notations le 26 avril 2014 au Grand Théâtre de
Genève, le 3 mai au Théâtre du Jorat à Mézères et le 10 mai au Théâtre
du passage à Neuchâtel. À Genève, cet événement s’insère dans la manifestation
helveticdanse, un minifestival des grandes compagnies suisses.
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La compagnie alémanique a joui d’une
réputation internationale avec son directeur et
chorégraphe Heinz Spoerli (de 1996 à 2012).
Son successeur, l’Allemand Christian Spuck,
ancien chorégraphe du Ballet de Stuttgart, a
relevé brillamment le défi. Sa version très inspirée de Roméo et Juliette se joue à guichets fermés depuis l’automne 2012. Ses adaptations des
pièces de Büchner Léonce et Lena ainsi que
Woyzeck on fait un triomphe.
Le Ballett Zurich compte une cinquantaine
de danseurs si l’on ajoute le Junior Ballett à la
compagnie principale. Cela lui permet de proposer des grands ballets du répertoire comme Le
Lac des cygnes (dans la version de Heinz
Spoerli). Le niveau technique de ses danseurs
e
Max Richter, est prometteur. La pièce médiane
consistera en une chorégraphie de Marco
Goecke sur la très belle partition d’Arnold
Schönberg La Nuit transfigurée. Il sera intéressant de voir comment le chorégraphe allemand
réputé pour son style fait de mouvements menus
et répétitifs a réagi à cette musique lente. Une
autre création, celle de Christian Spuck, complète la soirée. Il dit s’être inspiré des poèmes
de Shakespeare, dont il veut rendre l’atmosphè-
est très élevé, comparable aux meilleures compagnies européennes. Parmi les premiers solistes, on compte Katja Wünsche et William
Moore, des danseurs étoiles du Ballet de
Stuttgart venus avec Christian Spuck. Les
anciens solistes, tels Yen Han, Arman
Grigoryan ou Filipe Portugal n’ont pas à craindre la comparaison.
La soirée proposée par le Ballett Zurich se
compose de trois pièces, trois créations, très différentes. Il y aura en ouverture de ce triptyque
une pièce de Wayne McGregor, un chorégraphe
anglais attaché entre autre au London Royal
Ballet, dont le style se caractérise par la rapidité et la virtuosité. Son choix musical, en l’occurrence Vivaldi Recomposed du compositeur
Christian Spuck
© Judith Schlosser
re sur le 1er mouvement de la 8e symphonie de
Philip Glass.
En échange, les Zurichois pourront apprécier le Ballet du Grand Théâtre de Genève, toujours dans le cadre du Festival Steps, dans leur
maison d’opéra, l’Opernhaus, le 9 mai 2014.
Emmanuèle Rüegger
26 avril : Festival Steps. Notations, 3 pièces de Wayne Mc
Gregor, Christian Spuck & Marco Goecke, dir. Christian
Spuck, Ballett Zurich. BFM à 19h30
Location : 022/322.50.50 et www.geneveopera.com/
«Notations», Ballett Zurich © Bettina Stoess
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bonlieu : au cœur silencieux des rêves et cauchemars
Drums and Digging
Evoquant les restes du Palais de Mobutu incarnant ses rêves meurtriers de toute
puissance et de retour à une forme de « pure africanité », le chorégraphe et
danseur congolais Faustin Linyekula imagine pour Drums and Digging une
plongée intime et historique en mêlant danse et théâtre pour susciter, comme il le
relève, « des espaces d’apaisement, de suspension face au poids du quotidien ».
« C’est encore moi… Je suis un raconteur
d’histoires. Cela fait plus de dix ans que je promène mes histoires sur le routes de la danse
contemporaine… je ne veux plus raconter des
misères… Pour qui veut raconter l’histoire du
Congo d’hier et d’aujourd’hui, que trouve-t-on si
ce n’est des histoires de ruines ? », entend-on de
la bouche de Linyekula à l’orée de la pièce.
L’opus est fondé sur l’impossibilité de ramener
au jour des histoires de guerre, de violences faites aux corps, tout en ne pouvant s’en émanciper
face à la globalisation de l’indifférence et le
silence assourdissant de l’immense majorité de la
communauté internationale. « Tout malheur est
supportable si l’on en fait un conte ou si on le
raconte », écrit la philosophe Hannah Arendt.
Mêlant histoire tragique et présent de ce qui
est la République Démocratique du Congo
(RDC), Drums and Digging est scandée de tambours accompagnant les corps dansant sur fond
de creusement physique et mémoriel. Dans une
perspective chère au philosophe allemand Walter
Benjamin, d’un passé exploré, arpenté comme la
terre que l’on ne cesse de retourner, le spectacle
a été créé suite à des périples et séjours sur les
ruines d’une histoire qui travaille encore les
temps présents et dans le village d’enfance de
Linyekula, Obilo. « En 2011, il y eut un voyage
vers lieu originel, où j’ai vécu jusqu’en 1982
avec mon père instituteur. Emprunter les danses
rituelles devient un moyen de chercher, en passant par des chemins ancestraux, comment les
Anciens, en des temps difficiles, esquissent par
leurs danses et musiques des espaces de respiration hors de l’urgence quotidienne. »
Au fil de Drums…, Linyekula, seul d’abord,
puis aidé de deux danseurs, et rejoint enfin par
toute la troupe, construit, comme un mobile rappelant les complexités d’une entreprise suédoise
de mobilier. une architecture éphémère en bois
conçue par Bärbel Müller. A la racine de cette
démarche d’installation mémorielle et plasticienne, il y a l’idée d’intérieur domestique comme
construction identitaire propre à son créateur et,
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partant, son habitant. Il serait en constante évolution, voire en quelque sorte « dressé » par le fait
de vivre et évoluer dans cet espace.
Ce lieu ou non lieu est peut-être le squelette
du palais du Maréchal Président Mobutu à
Gbadolite, site éloigné de la capitale, dont le dictateur se méfiait, pour faire le choix d’une Cour
en exil dans « le pays réel ». L’une des interprètes, la comédienne Véronique Aka Kwadba, est
la petite nièce de Mobutu. Elle se remémore la
munificence d’utopie passée de l’édifice. Soit
l’étoffe d’un rêve et la racine d’un régime autoritaire absolu, ubuesque de terreur et soutenu par
les puissances occidentales. L’idéologie politique
de l’authenticité et de l’africanité prônée par
Mobutu s'est noyée dans le sang de la dictature
tropicale. On en retrouve un possible écho dans
ce déploiement de danseurs en « costumes traditionnels » devant, hier, les réminiscences d’un
squelette de Palais sanctuaire pillé dans la jungle
ou aujourd’hui un laboratoire d’échanges chorégraphiques, Les Studios Kabako, mêlant les gestes artistiques que Linyekula anime à Kisangani.
Flâner parmi les ruines
Les marches sur le plateau, les stations et
stases successives des interprètes, les tentatives
successives de la communauté dansante à tracer
la figure du cercle, les sinuosités aussi d’une
colonne vertébrale humaine progressant telle une
chaîne d’ADN spiralée, marquent le vivant de
l’histoire, mais aussi l’oubli. L’atmosphère peut
rappeler, de loin en loin, Baudelaire qui a utilisé
le mot flâneur pour caractériser l'artiste dont
l'esprit est indépendant, passionné, impartial,
« que la langue ne peut que maladroitement définir ». Pour le parfait flâneur, pour l'observateur
passionné, c'est une immense jouissance que d'élire domicile dans le nombre, dans l'ondoyant,
dans le mouvement, dans le fugitif et l'infini.
Sous l'influence de Georg Simmel, le philosophe allemand Walter Benjamin a développé
cette notion et, après lui, beaucoup d'autres penseurs ont aussi travaillé le concept de « flâneur »
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«Drums and Digging» © A. Poupeney
que semble prolonger Linyekula. Ce qui n’empêche nullement de se souvenir, en creux, que la
RDC connait depuis les années 90, le conflit le
plus meurtrier depuis la fin de la Seconde Guerre
Mondiale avec peut-être 10 millions de morts,
tout en provoquant le moins d’indignation et
d’interrogations possibles. Le travail de création
s’est ainsi déroulé dans une région ayant traversé
jusqu’à aujourd’hui massacres et crimes contre
l’humanité. L’artiste explique en entretien pour la
création de Drums… au dernier Festival
d’Avignon « qu’après le génocide de 1994 au
Rwanda, plus de deux millions de Hutus se sont
réfugiés en RDC. Lors de la marche triomphale
de Kabila pour prendre le pouvoir à Kinshasa en
1997 avec l’aide de l’armée rwandaise, celle-ci
s’est par endroits attaquée aux réfugiés ».
Avec cette pièce de groupe, une question
reste d’une grande acuité pour l’artiste :
«Comment marcher vers moi-même, vers mon
peuple, avec mon sang en feu et mon histoire en
ruine?» Extraits de Mémoire du vent, les mots du
poète syro-libanais Adonis ouvrent le solo,
Cargo ciselant les lignes de corps effilées de son
interprète et créateur. Faustin Linyekula y abordait, par sursauts incantatoires, le thème d’une
identité poétique et humaine.
Bertrand Tappolet
Drums and Digging. Bonlieu Annecy. 17 et 18 avril 2014.
Rens. www.bonlieu-annecy.com
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Créé en 1981, May B s’inscrit dans l’esprit
du théâtre dansé et nous montre un groupe d’humains. Voyageurs rescapés d’une apocalypse,
vêtus de haillons ou fardés de poudre, où poseront-ils leurs valises ? Aucune recherche de
beauté dans les attitudes ou d’harmonie dans les
mouvements, leurs gestes sont ceux de la
vieillesse, de la jalousie, de la déchéance.
l’octogone, pully
May B
May B est l’une des toutes premières œuvres de Maguy Marin. Si ces
dernières créations – Salves, Faces - ont été assez controversées, May B
est une pièce incontournable, à voir ou revoir le vendredi 4 avril 2014.
Les traits de la médiocrité humaine n’échappent
pas à l’œil de la chorégraphe
qui nous en offre même un
florilège. Pitié et répulsion,
c’est ce que peuvent nous
inspirer ces pauvres hères.
May B est une pièce fascinante qui annonce la nondanse. On pense à Samuel
Beckett. On est dans l’absurde. Dans un lieu où l’enfer
c’est les autres.
Stéphanie Nègre
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Vendredi 4 avril à 20h30
à l’Octogone de Pully
Informations et réservations :
www.theatre-octogone.ch
«May B». Photo Bricagea
Les Printemps de Sévelin, programmés du
13 mars au 5 avril, offriront encore en avril
quelques spectacles qui méritent le déplacement.
Coup d’œil sur la programmation :
- Les mardi 1er et mercredi 2 avril à 19h, une
sélection de courts spectacles est proposée sous
le label “Les Quarts d’Heure“ ; on pourra y
découvrir
- Flashdanse de Rébecca Balestra
- Itmar de Géraldine Chollet
- One Man Show Danse et Marionnettes de
Jean-Nicolas Dafflon
- Last Plays#1 de Lucie Eidenbenz
- Les Deux de Guillaume Guilherme
- Pièce pour une surface de Violetta Perra
- What If. Part I de Sundora & Dgendu (soit
dorotea Lecka et Gerald Durand)
Comme l’intitulé le laisse supposer, chaque
pièce a une durée de 15 minutes.
a
- le jeudi 3 avril à 20h30, Clément Layes présente un solo primé et merveilleusement drôle,
Allege, dans lequel il associe la philosophie au
comique chaplinesque pour parler de liberté,
d’entraves et de l’absurdité de la vie. Sans cesser de maintenir un verre d’eau en équilibre sur
la tête. Durée : 45 minutes.
A l'issue du spectacle, à 21h30, Jasna Layes
Vinovrski discutera avec le public. Un moment
libre, d'échange et de partage autour de la création.
- le vendredi 4 avril : place à May B à
L’Octogone (voir ci-dessus). A 21h45, rencontre avec Maguy Marin.
A noter également le samedi 5 avril, de 14h30 à
17h30, une masterclass autour de May B, animée par Jeanne Vallauri interprète de la
Compagnie Maguy Marin
- le samedi 5 avril à 19h : retour de Clément
Layes avec Things that surround us, en compagnie de Ante Pavic et Vincent Weber
Rés. : 021/620.00.11, [email protected]
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«Le récital des postures» présenté par la
chorégraphe Yasmine Hugonnet lors de la
première semaine du festival
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éditions art & fiction
Pénurie
Après une première collaboration très remarquée en 2010 *, l’écrivain Jérôme
Meizoz et le peintre Zivo, réitèrent cette belle expérience du dialogue entre
littérature et arts visuels avec la publication de Pénurie, un texte illustré paru
récemment aux éditions art & fiction.
Dans ce deuxième opus, l’écrivain a choisi
la forme épistolaire, en témoigne l’incipit : « Si
cette lettre par chance parvient jusqu’à toi ». Le
texte remis à Zivo a été retranscrit intégralement
à la plume et rehaussé de dessins ; encre noire
pour le texte, encres colorées pour les espaces
imagés. Le récit évoque un climat de catastrophe
naturelle ou de guerre : « Tu sais que les frontières sont fermées depuis quinze jours. Le gouvernement s’est doté des pleins pouvoirs, il a mobilisé l’armée et le couvre-feu étouffe les villes »,
amenant abruptement le thème de la pénurie
« Dans la foulée on a rationné les carburants et
l’électricité ». En quinze lignes, le décor est dressé. La sobriété des signes noirs et l’absence de
couleurs caractérise cette ouverture, contrastant
avec un lexique puissamment suggestif : « couvre-feu, soupe populaire, première nécessité,
armée ». La temporalité du récit situe l’action en
hiver, mais l’auteur insère en contrepoint des
séquences du passé dont le lyrisme bucolique
donne relief à l’épaisseur dramatique du présent
de la narration : « L’automne dernier nous avons
eu droit encore à toutes les splendeurs. Les
vignes filtraient une lumière de vitrail. Une saison de figues charnues, énormes, d’abricotier
surchargés. »
Art & Fiction
Créée en 2000 à Lausanne, art&fiction est
une association composée principalement d’artistes-plasticiens animés par le désir de se lancer
dans une aventure éditoriale. Au fil du temps et
des succès rencontrés auprès du public et des professionnels de l’édition, la démarche considérée
d’abord comme une sorte de jeu ou de défi s’est
transformée en une activité professionnelle à part
entière. Aujourd’hui art & fiction produit et diffuse des publications conçues par des artistes ou
des écrivains et sont destinées à mettre en évidence quelques articulations originales entre texte et
image Cherchant à s’affranchir des règles établies, les publications se distinguent par leur petit
format, le soin apporté à leur fabrication et dans
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Le chromatisme devient plus vigoureux à
l’évocation des personnages évoluant dans un
anonymat collectif de bon petit peuple brechtien,
pas de noms pro-pres ou d’individuations mais
des fonctions: paysans, bûcherons, artisans, cantonnier, élus du peuple, soldatesque, malades,
parents et enfants. L’unique personnage du récit
doté d’un nom, ou plutôt d’un surnom, est le
« Baron rouge », une allusion au fameux pilote
de l’aviation allemande lors de la première
Guerre mondiale, Manfred von Richthofen. Cette
figure héroïque surgit sous la forme d’un tableau
qui tel une relique énigmatique « orne le bureau
électoral depuis des décennies … Le Baron rouge
trône en protecteur muet, comme si son aura
seule préservait l’harmonie du lieu. » Cet épisode baigne par ailleurs dans des tonalités rouge
sang.
Par la suite, les relations sociales se tendent,
les villageois pointent du doigt des boucs émissaires : gitans, étrangers, travailleurs agricoles
africains : « C’en est assez … de la cohabitation
avec tous ces étrangers qui peu à peu imposent
leurs habitudes et les signes de leur religion », le
récit résonne alors de relents fascistes et xénophobes, résultante incontournable de l’économie
le choix des matériaux. Art & fiction participe ou
organise une quinzaine d'événements par année:
expositions, lectures, vernissages, performances,
librairies éphémères, rencontres et participe à des
salons généralistes ou spécialisés
en Suisse et à l'étranger. Installé
depuis 2006 dans les locaux de
l’avenue de France à Lausanne,
le collectif a établi en 2007 un
deuxième siège à Genève. Avec
plus de 120 titres : livres d'artistes auto-édités (collection Varia),
collections de li-vres d'artistes
(Pacific, ShushLarry, Sonar,
Document, Re: Pacific.), livres
d'artistes collectifs (Mode de vie),
tous entièrement conçus, impri-
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Une page de «Pénurie» illustrée par Zivo
de crise. De là on bascule dans le registre de la
méfiance, de la dénonciation, de la censure, du
grand nettoyage. Le propos pour être essentiellement poétique se double d’une authentique
dimension socio-politique, voilà comment un
petit livre illustré de dessins approximatifs et fragiles peut se profiler comme une parabole en
mots et en images, révélatrice de peurs et d’angoisses aussi ancestrales qu’actuelles.
Françoise-Hélène Brou
* Jérôme Meizoz & Zivo, Fantômes, Editions d’en-bas,
2010
Jérôme Meizoz et Zivo, Pénurie, Editions Art & Fiction
coll. RE-PACIFIC, 2013, Lausanne.
més et reliés en Suisse, Art & fiction explore,
revisite et redéfinit la tradition du livre d’artiste.
Mêlant intimement littérature et arts visuels,
chaque publication est un événement esthétique
qui interpelle la production industrielle du livre autant qu’il appelle
un public élargi à s’approprier une
démarche hors de toute logique
élitaire.
Membres du comité: Christian Pellet,
Stéphane Fretz, Laurent Delaloye,
Sofi Eicher, Pascale Favre, Philippe
Fretz, Alexandre Loye, Céline
Masson, Jérôme Stettler, Claudius
Weber, Noëlle Corboz, Julia Sorensen,
Marie-Claire Grossen.
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e x p o s i t i o n s
musée ariana, genève
Terres d’Islam
Dépositaire d’une collection de plus de 700 pièces de céramique islamique
du IXe au XXe siècle provenant d’achats et de dons successifs, le Musée
Ariana n’avait jusqu’alors pas encore fait d’étude approfondie sur cette
collection conséquente. La présente exposition propose de combler
cette lacune.
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Le fonds couvre une période de douze siècles d’histoire s’étendant dans une large aire
géographique, de la Transoxiane, l’Iran, la
Turquie, la Syrie, l’Égypte jusqu’à l’Espagne.
La base de la collection a été rassemblée par le
fondateur du Musée Ariana, Gustave Revilliod.
En 1934, suite à la décision de regrouper à
l’Ariana toute la céramique contenue dans les
collections publiques de la Ville de Genève au
Musée Ariana (à l’exception de la céramique
antique), la céramique orientale du Musée d’art
et d’histoire a également rejoint la collection
qui s’est continuellement enrichie jusqu’à
aujourd’hui.
L’histoire, plusieurs fois millénaire, de la
céramique reste cependant peu connue du grand
public. Les pièces les plus anciennes, datant du
paléolithique, étaient constituées de terre séchée
au soleil et donc extrêmement fragiles, puis la
maîtrise du feu et de la cuisson ont permis la
fabrication de pièces plus résistantes, d’abord
«Plaque de revêtement»
Kâshân (Iran), fin du XIIIe – début du XIVe siècle. Pâte siliceuse, décor moulé et peint en
bleu et au lustre métallique. H. 29.2cm
Collection Musée Ariana, Ville de Genève
Photo Mauro Magliani & Barbara Piovan
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façonnées à la main puis au tour. Si la céramique chinoise est universellement connue
pour la porcelaine, inventée sous la dynas«Coupe»
tie des Han de l'est (entre l’an 25 et 220 Iran oriental ou Transoxiane, fin du Xe ou XIe siècle
Terre cuite, décor peint et sgraffite sous glaçure
après J.-C.), beaucoup ignorent que la preD 31,5 cm. Collection Musée Ariana, Ville de
mière porcelaine européenne n’a été proGenève. Photo Mauro Magliani & Barbara Piovan
duite qu’en 1709. Suite à la découverte
d’un gisement de kaolin (une argile blanche, aiguière, coupe, plat, vases, etc… à quoi s’ajoufriable et réfractaire, indispensable dans le pro- te une seconde catégorie d’éléments liés à l’arcessus de vitrification), un alchimiste du nom de chitecture islamique comme les carreaux de
Johann Friedrich Böttger, actif à la manufactu- revêtement ornant les murs des palais et mosre de Meissen en Saxe, met au point une authen- quées. L’originalité de l’iconographie islamique
tique porcelaine. Puis il faudra attendre 1768 triomphe dans les décors géométriques, symépour que la porcelaine soit produite en France, triques ou rayonnants, reflétant le goût du peudans les ateliers de la manufacture de Sèvres. ple arabe pour la rigueur mathématique, mais
Tout aussi méconnue est la longue guerre indus- aussi dans les motifs calligraphiés. Notons au
trielle que se livrèrent les nations afin de percer passage que le principe selon lequel l’Islam
les secrets de fabrication de la porcelaine dont n’autorise pas la représentation de la figure
la commercialisation se développait, depuis la humaine est tout relatif ; en effet maints décors
Chine et le Japon, à une échelle mondiale. Une laissent une large place aux cavaliers, soldats,
manne qui obsédait les empereurs, rois et prin- animaux et oiseaux de toutes sortes, associés
ces de l’Occident et du Moyen Orient, lesquels souvent à de luxuriants décors végétaux. A cet
organisèrent fréquemment de vastes manœuvres égard la richesse ornementale, en lien avec la
d’espionnage industriel pour s’approprier cette diversité de la nature, caractérise les productions orientales par leur polychromie chatoyantechnologie.
te, un éclat subtil des lustres métalliques brun,
La porcelaine chinoise arrive dans la sphè- rouge ou ocre, une brillance exceptionnelle des
re d’influence de l’islam autour des années 618- glaçures turquoise, vertes ou bleues.
907, grâce à des commerçants arabes qui comLa présentation de la collection qui met en
mencent à naviguer et à s'installer dans les ports
chinois. Dès le IXe siècle, la porcelaine devient évidence autant de pièces phares et chefs-d’œuun produit recherché dans tout le Moyen Orient, vre que de spécimens plus courants est compléincitant alors les potiers locaux, incapables de tée par une section chronologique et didactique
reproduire la blanche porcelaine, à mettre au ainsi que par la publication d’un beau catalogue
point des produits de substitution comme la dont chaque chapitre est rédigé par un spéciafaïence, une simple terre cuite recouverte d’une liste du domaine « Terres d’Islam. Les collecglaçure opaque, mise au point au IXe siècle en tions de céramique moyen-orientale du Musée
Mésopotamie. Les techniques se développeront Ariana à Genève, 5 Continents, Milan, 2014 ».
Françoise-Hélène Brou
au cours des siècles en Iran, dans la Turquie
ottomane, en Egypte et en Espagne, conservant
cependant l’influence des prototypes venant de Terres d’islam, l’Ariana sort de ses réserves II. Musée
Chine. Les objets céramique se divisent en deux Ariana, 10 Avenue de la Paix Genève, jusqu’au 31 août
groupes : d’abord les ustensiles de type bol, 2014
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expos ition
kunsthaus zurich
De Matisse
au Cavalier bleu
Le début du vingtième siècle était caractérisé par une effervescence
artistique aussi bien en France qu’en Allemagne. Nombreux furent les
échanges entre les deux pays. Le Kunsthaus de Zurich présente jusqu’au
11 mai une exposition très riche sur les peintures qui ont provoqué cette
émulation ou qui en furent le fruit.
la forme est à sa plénitude ». En cela la
palette de Fauves se dénote radicalement
des tons mélangés des impressionnistes,
pointillistes et des divisionnistes. Le chef
de file, Matisse, dira quant à lui : « Le
fauvisme est venu du fait que nous nous
Kees van Dongen «Modjesko, chanteur
placions tout à fait loin des couleurs d’isoprano», 1908
mitation et qu’avec
Huile sur toile, 100 x 81,3 cm
les couleurs pures The Museum of Modern Art, New York, don de M. et
Mme Peter A. Rübel, 1955 © Kees van Dongen
nous obtenions des
Estate / 2013 ProLitteris Zurich
réactions plus fortes. » Les qua-tre
règles des Fauves reprises mer des émotions, et ceci à travers des couleurs
par les peintres allemands vives. D’où leur nom d’expressionnistes. Ils
sont : utiliser les couleurs proposent à Matisse de se joindre à eux, mais le
pures, simplifier les for- peintre français refuse poliment.
À Munich, Wassily Kandinsky, Alexej
mes, abolir la perspective
Jawlensky
et Marianne Werefkin fondent cinq
et supprimer les ombres.
ans plus tard le Cavalier bleu qui se situe dans
la même mouvance. August Macke et Franz
Évolution
L’année 1905 est Marc se joignent bientôt à eux. En plus des
importante des deux côtés Fauves, ils seront aussi influencés par le cubisdu Rhin : à Paris, au Salon me naissant. Malheureusement, la première
d’Automne, l’exposition guerre mondiale mettra fin à ces échanges et à
de toiles d’Henri Matisse cette effervescence artistique. Franz Marc et
et de Kees van Dongen August Macke mourront au combat.
aux couleurs pures et violentes posées en aplat font
L’exposition du Kunsthaus de Zurich illusscandale. Le critique tre toute cette évolution, de Van Gogh à August
Louis Vauxcelles parle Macke, dans un chassé-croisé entre la France et
pour la première fois de l’Allemagne. On peut y admirer des toiles qui
Fauves. La même année à viennent de loin (par exemple du Museum of
Dresde, en Allemagne, Modern Art de New York) ou des peintures
quatre étudiants en archi- rares de collections privées. Cette exposition ira
tecture dont Ernst Ludwig ensuite à Los Angeles puis à Montréal.
Kirchner et Karl SchmidtEmmanuèle Rüegger
Rottluff fondent le grouMarianne Werefkin «L’arbre rouge», 1910
pe Die Brücke. Ils ne veuTempera auf Papier auf Karton, 75,5 x 56,5 cm
Ascona, Fondazione Marianne Werefkin,
lent plus peindre des
Museo Comunale d’Arte Moderna
impressions mais expri-
Ce qui caractérise aussi bien les Fauves que
les peintres de l’Expressionnisme allemand est
l’utilisation des couleurs. Cela remonte à Van
Gogh et à son enthousiasme pour les joies dynamiques des tons les plus crus. De Gauguin, ils
ont pris la technique des grands aplats. Pour
Cézanne « quand la couleur est à sa puissance,
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expos ition
musée des beaux-arts de berne : la collection stefanini
Sésame, ouvre-toi
La nouvelle exposition du Musée des Beaux-Arts de Berne, consacrée aux chefsd’œuvre de la Fondation pour l’art, la culture et l’histoire met l’art suisse à
l’honneur et rend en même temps hommage à un collectionneur, qui s’apprête
à fêter ses quatre-vingt-dix ans. Jusqu’à présent, il n’avait jamais accepté de
montrer ses trésors. Exception faite d’une première présentation de quelques
œuvres en 2007/08 au Musée Oskar Reinhart à Winthertour.
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Créée en 1980, cette fondation, qui réunit
8000 œuvres d’art, parmi lesquelles on trouve
aussi bien des peintures, des aquarelles, des dessins, des sculptures que du mobilier, des costumes, des armes, des objets d’arts décoratifs, des
cristaux voire même des édifices historiques, est
la volonté d’un homme, Bruno Stefanini, dont
la fortune s’est faite dans l’immobilier.
Directeurs de musée ou commissaires d’exposition, tous connaissent le nom de ce collectionneur, sans lequel aucune des grandes expositions monographiques d’artistes suisses, que ce
soit Ferdinand Hodler, Giovanni Segantini,
Augusto Giacometti, Cuno Amiet, Arnold
Böcklin, Johann Heinrich Füssli ou Félix
Vallotton, n’aurait pu se réaliser. « Du point de
vue quantitatif, rappelle le directeur Matthias
Frehner, la Fondation est la plus grande collec-
tion, qui ait jamais été réunie en Suisse par une
seule et même personne ». Contrairement à certains autres collectionneurs d’art suisse, chez
qui l’intérêt de collectionner de l’art suisse
caresse leur fibre patriotique, Bruno Stefanini,
qui a commencé à collectionner modestement
– un premier tableau de Robert Zünd est acquis
au début des années 1950 - puis plus frénétiquement, poursuit d’autre buts. Il se sent investi
d’une mission de salut public puisqu’il acquiert
des œuvres que la plupart des musées, faute de
moyens, ne pouvaient plus faire entrer dans
leurs collections, empêchant de ce fait que ces
œuvres ne soient vendues à l’étranger, où le
virus pour l’art suisse a entre-temps contaminé
de riches amateurs européens ou américains
toujours en quête de pépites artistiques.
L’idée d’une telle exposition titillait le
Giovanni Giacometti «Soleil d’hiver à Maloja», 1926
Huile sur toile, 90 x 120 cm. Stiftung fur Kunst, Kultur und Geschichte, Winterthur
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directeur depuis cinq ans mais ses diverses
requêtes s’étaient soldées par un refus. Son obstination a fini par payer et c’est à un événement
de grande envergure qu’il nous convie, repris à
la fin de l’été à la Fondation Gianadda. Dans
cette entreprise, à laquelle ont également collaboré deux autres commissaires, Isabelle
Messerli, conservatrice de la Fondation
Stefanini et Valentina Locatelli, attachée au
Musée des Beaux-Arts de Berne, il importait
avant tout de montrer et de décortiquer sa passion pour l’art.
Processus de création
Stefanini n’est pas un collectionneur qui
guette le chef-d’œuvre absolu, capable d’attendre des années pour l’acquérir, une stratégie
d’acquisition caractérisant cet autre grand collectionneur de Winthertour, Oskar Reinhart. Ce
qui l’intéresse bien plus, c’est le processus de
création. Comprendre les mécanismes et les
évolutions artistiques, comment les peintures
arrivent à leur point d’orgue, en passant par des
esquisses et des études, comment ces peintures
peuvent être retravaillées par l’artiste. Aussi la
collection compte-t-elle beaucoup de carnets
d’esquisses, de dessins, de lettres, de peintures
inachevées. C’est aussi ce qui a servi de fil
conducteur à l’exposition. Mais dans cette
caverne d’Ali Baba, aux 8000 trésors, il a fallu
faire des choix, puis ordonner et montrer un
sens. Un défi brillamment relevé par les commissaires, qui ont opté pour un parcours thématique, où la quarantaine d’artistes sélectionnés
interviennent dans les différentes sections : paysage, nature morte, histoire, portrait, scènes de
genre, nus. Un exercice d’autant plus difficile
qu’il a fallu intégrer des objets de collection, qui
ne sont pas des œuvres d’art.
Dans le hall d’entrée, le visiteur est
accueilli par les peintures de paysages. Les unes
familières comme ces vues sur le lac Léman
signées Hodler qui occupent tout un mur, ou
celles que Félix Vallotton consacre à la représentation de l’eau Plage, ciel mauve (1903),
Marée montante le soir (1915), La Risle près
Berville (1924) ou ce Soleil d’hiver à Maloja de
Giovanni Giacometti (1926) de veine impressionniste, ou encore Le Verger (1906) de Cuno
Amiet. D’autres moins connues mais non moins
intéressantes comme La Tonnelle (1908)
d’Edouard Vallet, La Gelée blanche (1925)
d’Adolph Dietrich. Mais le regard du visiteur
est avant tout happé par une somptueuse pièce
d’orfèvrerie, milieu de table surdimensionné
ayant appartenu aux Romanov et que Stefanini
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expos ition
acquit en 1984 dans une vente aux
enchères de la galerie Koller à Zurich.
Là aussi, Stefanini se distingue des collectionneurs d’aujourd’hui entourés
pour la plupart de cohortes de
conseillers, puisqu’il ne déléguait à personne et assistait lui-même aux ventes.
Autoportraits
Dans la première salle consacrée
aux autoportraits, et pour symboliser ce
genre, les commissaires ont habilement
intégré un autre magnifique objet de la
collection, un miroir doré ayant appartenu à la reine Hortense de Beauharnais.
Dans cette galerie figurent plusieurs
autoportraits de Ferdinand Hodler, celui
de 1873 dans lequel il se réfère à la peinture hollandaise, celui dit à Néris
(1915), au regard pénétrant, un autre
(1914) impressionnant par son caractère
d’esquisse mais aussi L’Historien
(1886) qui fait partie d’un cycle de peintures d’histoire et auquel Hodler prête
ses traits. Tout aussi intéressant
l’Autoritratto (1909) de Giovanni
Gicometti dans lequel il expérimente la
décomposition impressionniste de la
lumière, tandis que celui de son cousin au
deuxième degré Augusto Giacometti décompose, telle une mosaïque, sa surface peinte en particules isolées de couleurs. A travers le prisme
de la Nouvelle Objectivité, des artistes comme
les frères Aurèle et Aimé Barrault. Alice Bailly
ou l’autodidacte Adolf Dietrich ne cherchent
plus la subjectivité mais figent leurs portraits
dans la vérité. Des artistes qui se sont peints
eux-mêmes mais qui ont aussi peint des portraits de leur entourage.
A ce titre, l’éventail de portraits s’étend du
milieu du 18° siècle jusqu’au début du 20° siècle. En témoignent le très beau pastel de JeanEtienne Liotard de Marie-Thérèse (1762), ou le
tableau très mélancolique d’Arnold Böcklin,
Angela Böcklin avec un voile noir (1854), ou
encore dans la tradition du portrait de la
Renaissance, Rittratto maschile (1880/82) de
Giovanni Segantini, auxquels s’ajoutent ceux
peints par Ferdinand Hodler et Albert Anker.
Dans l’art suisse, l’enfant devient un
thème pictural au début du 19° siècle, auquel le
collectionneur n’a pas été insensible. Quelques
très belles œuvres, chargées d’un fort potentiel
émotionnel, ont pu être réunies dans une autre
section du parcours. Plusieurs toiles d’Albert
Anker dont la Jeune Fille se coiffant (1887) qui
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scandale. Poursuivant son parcours, le
visiteur ne manquera pas de s’intéresser aux positions majeures du symbolisme suisse représentées dans une
autre section, depuis les précurseurs
Johann Heinrich Füssli et Arnold
Böcklin jusqu’aux créations d’Ernest
Biéler, d’Augusto Giacometti, de
Cuno Amiet, qui ouvrent sur l’Art
nouveau. Sans oublier Ferdinand
Hodler et Giovanni Segantini dont le
célèbre triptyque des Alpes La vita, La
natura, La morte (1898/99) en dépôt
musée Segantini de Saint-Moritz, a été
exceptionnellement prêté.
Le genre de la nature morte
auquel Jean-Baptiste Siméon Chardin
a rendu ses lettres de noblesse a également entraîné les artistes suisses à
réévaluer ce genre. Albert Anker l’a
pratiqué à titre privé, puisant son
inspiration dans les milieux paysans
ou bourgeois. Section plaisante, d’où
se détache les Trois pommes sur une
nappe blanche (1907/08) de Giovanni
Cuno Amiet «Enfant dans la verdure», 1900
Huile sur toile, 46 x 32 cm
Giacometti, qui s’est approprié la touStiftung fur Kunst, Kultur und Geschichte, Winterthur
che de pinceau de Van Gogh. Dans la
© M. u. D. Thalmann, Herzogenbuchsee, Kanton Bern
peinture de genre, où les artistes dépeia une valeur d’icône, complétée par des œuvres gnent la vie quotidienne, les peintres suisses ont
de Cuno Amiet, Enfant dans la verdure été très féconds. Que ce soit Albert Anker avec
(1900/02), d’Alice Bailly, Petite Fille aux La Sieste (1879), ou Ferdinand Hodler, avec En
mains jointes (1911). Comment ne pas songer barque pour l’église (1879/80), Ernest Biéler
au Douanier Rousseau, lorsqu’on voit les pein- avec Saviésannes le dimanche (1904), Frank
tures d’Adolf Dietrich. Son Ideli avec une peti- Buchser avec son étonnant et ironique Art
te tresse devant le jardinet (1926), ou son Student ; or, Rising Taste (1869). Comment ne
Garçonnet au chaton (1927) peuvent être rap- pas interpréter, au centre de la section consacrée
prochés des œuvres d’un autre peintre suisse, le à la représentation des animaux et placé dans
Bâlois Niklaus Stoecklin, très présent dans la une vitrine, le costume d’amazone de l’impéracollection, qui appartient lui aussi à ce courant trice Elisabeth d’Autriche, comme un clin d’œil
surréaliste de la part des commissaires ? Quant
du nouveau réalisme.
aux amateurs d’histoire, ils trouveront en fin de
parcours de quoi satisfaire leur imaginaire, en
Symbolisme suisse
Contrairement au rôle que le nu joue dans contemplant Les Bourbakis (1871) d’Albert
les académies à l’étranger, le thème ne sera Anker, Napoléon III à la frontière suisse de Karl
abordé en Suisse qu’avec Ferdinand Hodler et Girardet, General Sherman’s Party (1867) de
Félix Vallotton. Leur prédécesseur Arnold Frank Buchser.
Que la peinture suisse ne soit pas du goût
Böcklin n’ayant peint des nus que dans le cadre
idéalisé de l’Arcadie. Avec Nuddo femminile de tous, soit ! Mais telle que la sélection a été
(1884/86) de Giovanni Segantini, où le corps est faite pour cette première grande présentation
exhibé sans pudeur, Demi-nu féminin assis d’œuvres provenant de cette Fondation pour
(1883) de Karl Stauffer-Bern, d’où émane un l’art, la culture et l’histoire, elle a de quoi
puissant érotisme, mais aussi plusieurs nus de convertir même les plus réfractaires.
Régine Kopp
Hodler peints de manière naturaliste, des
www.kunstmuseumbern.ch
Baigneuses peintes avec un réalisme cru par
Félix Vallotton, le nu devient pour les artistes un jusqu’au 24 août 2014
champ d’expérimentation, à fort parfum de
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expos ition
fondation de l’hermitage, lausanne
Le goût de Diderot
Dans le cadre des célébrations du tricentenaire de la naissance de Denis Diderot
(1713-1784), la Fondation de l’hermitage consacre une exposition au célèbre
philosophe français et, en particulier, à sa relation à l’art. Une sélection d’œuvres de l’époque permet de découvrir l’évolution de son goût, de son regard et de
son esthétique.
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De 1759 à 1781, Denis Diderot a écrit au
total neuf Salons et deux traités théoriques,
cependant son goût pour les arts remonte bien
avant la rédaction du premier Salon. Dans la
phase préparatoire du projet de la grande
Encyclopédie, Diderot s’intéresse, dès les
années 1740, aussi bien à l’esthétique d’art et
aux arts plastiques qu’aux procédés techniques
utilisés par les différents artistes. Les connaissances acquises lui permettent de formuler le
fameux article « Beau » de l’Encyclopédie, en
1750. Quelques années plus tard, son ami
Frédéric Melchior Grimm, directeur de la revue
Correspondance littéraire, lui commande la
rédaction des Salons, des comptes rendus critiques des expositions officielles de l’Académie
des Beaux-Arts qui avaient lieu tous les deux
ans dans le Salon Carré du Louvre à Paris.
Diderot prend cette tâche très au sérieux et se
consacre pleinement à cette nouvelle carrière de
salonnier. Sa pratique dans le domaine qu’il fait
sien sort rapidement du cadre traditionnel, en
effet parallèlement à ses nombreuses lectures
sur l’art, il continue de se familiariser avec le
savoir-faire et le lexique des peintres et des
sculpteurs, il fréquente assidûment leurs ateliers, les observe travailler et converse avec eux.
Outre ce rapport de proximité avec les artistes,
l’écrivain se pose en adversaire de l’enseignement académique, qu’il juge mécanique et
maniéré, il préconise une observation « plus sincère et scrupuleuse de la nature » (Diderot,
Essais sur la peinture, Salons de 1759, 1761,
1763, Hermann, 1984). Sur le plan littéraire,
Diderot utilise une situation d’énonciation originale qui le distingue des autres critiques : la
structure dialogique. Ainsi, face au narrateur
qui expose sa vision subjective, ses textes s’adressent-ils à de multiples destinataires, en premier lieu à Frédéric Grimm, le commanditaire
Jacques Philippe de Loutherbourg «Marine avec naufrage», 1769, huile sur toile, 97 x 131 cm.
Château-Musée, Dieppe © Ville de Dieppe - Château-Musée / B. Legros
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des Salons, ou encore aux artistes et aux critiques eux-mêmes. Enfin Diderot insiste sur la
nécessité d’établir des rapports entre les diverses activités intellectuelles et artistiques pour
« envisager l’artiste dans ses rapports ambigus
mais souvent déterminants avec la société en
général et les institutions politiques en particulier » (Diderot, Essais sur la peinture, Salons de
1759, 1761, 17, op.cit.). Cette forme de critique
d’art radicalement nouvelle suscite l’intérêt de
l’opinion publique, notamment en Allemagne
où Goethe et Schiller saluent l’originalité de
Diderot, non sans y apporter quelques réserves.
Structure
Articulé autour d’ensembles thématiques,
le parcours développe trois idées qui structurent
le goût et l’esthétique du philosophe : la question de la vérité, la poésie en peinture et la
magie de l’art. Tout en retraçant la grande aventure des Salons, l’exposition déploie une section
dédiée à la culture visuelle de Diderot qui met à
l’honneur certains des plus grands artistes français du XVIIIe siècle : Chardin, Boucher,
Vernet, Falconet, Greuze, Robert, Houdon,
David. La modernité de Diderot se révèle dans
sa confrontation avec la célèbre comparaison
d’Horace « ut pictura poesis » (la peinture est
comme la poésie, Art poétique, v. 361) principe
qui, depuis la Renaissance, définit la peinture en
fonction de critères qui sont ceux des arts poétiques, affirmant de ce fait la supériorité du
poète sur le peintre. Convaincu dans un premier
temps par la formule, Diderot va progressivement changer d’opinion. Ce sont les natures mortes de Chardin, les paysages de
Vernet ou de Loutherbourg qui vont ébranler
sa foi en la suprématie poétique ; car face à
ces chefs-d’œuvre, l’écrivain prend conscience que la littérature n’a pas affaire au
visible de la même manière que la peinture
et admet qu’elle a ses limites lorsqu’elle
tente de « faire voir ». Ainsi de Salon en
Salon, la critique de Diderot creuse-t-elle un
espace autonome où l’art pictural ne concurrence plus le poème mais bien le réel et où il
n’est pas un art d’imitation mais de création,
effaçant les frontières entre l’art et la vie : «
Ô Chardin! Ce n’est pas du blanc, du rouge,
du noir que tu broies sur ta palette : c’est la
substance même des objets, c’est l’air et la
lumière que tu prends à la pointe de ton pinceau et que tu attaches sur la toile. » (Salon
de 1763).
Cette intuition géniale, partagée avec
G.E. Lessing qui formule la même distinc-
l
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t
é
expos ition
Dmitri-Grigorievitch Levitski «Portrait de Denis Diderot, philosophe et
littérateur français», 1773, huile sur toile, 58 x 83 cm.
Musées d’art et d’histoire, Genève
© Musées d’art et d’histoire, Ville de Genève / Yves Siza
fectionné le langage de
la critique d’art, le faisant accéder à un genre
littéraire élevé, mais
accessible à tous. Non
sans pertinence, Jean
Starobinski a relevé
chez Diderot un trait
spécifique, et donc
absolument novateur,
de sa méthode d’analyse : une approche qui
n’est pas seulement
visuelle mais aussi tactile et acoustique : la
peinture,
observe
Starobinski, devient
d’une certaine manière
pour Diderot un « spectacle total », quelque
chose qui établit une
« résonance imaginaire » entre tous les sens
et les facultés sensibles
et intellectuelles. (Jean
Starobinski, « Diderot
descripteur: Diderot
rêve et raconte la passion de Corésus », in
Cahiers du Musée National d’Art Moderne,
Paris, 1988).
Regrets
En écho à cette idée de « spectacle total »,
on relèvera que l’exposition ne joue pas assez
avec l’étonnante polyvalence de Diderot, ni
avec sa prescience sur l’évolution des arts.
Alors que ses textes signent la rupture avec la
tradition académique baroque-rococo et anticipent sur les nouvelles sensibilités naturalistes,
néo-classique et romantiques, sans parler de ses
visions matiéristes ou oniriques préfigurant
l’impressionnisme, le symbolisme et même
l’abstraction, on regrette que de tels parallèles
n’aient pas été mieux exploités, par exemple en
intégrant quelques œuvres choisies de ces périodes. Mises à part quelques salles du premier
étage (Chardin, Hubert Robert, Loutherbourg,
Vernet), la présentation générale offre un académisme de bon aloi, sinon une distance froide (la
partie des sculptures), loin de la sensibilité
flamboyante de l’écrivain-philosophe.
Françoise-Hélène Brou
Le goût de Diderot, Greuze, Chardin, Falconet, David.
Fondation de l’hermitage, 2 route du Signal, Lausanne.
Jusqu’au 1er juin 2014.
tion entre arts plastique et poésie
dans son Laokoon (1766), met fin à
la confusion formelle art/poésie
héritée de l’Antiquité. Diderot, pour
autant, est-il le précurseur ou l’initiateur de la critique d’art au sens
moderne ? Certains le contestent
arguant que ce ne fut jamais par pur
intérêt esthétique, ni pour construire une critique d’art autonome et
spécialisée que le philosophe se
dédia à cette activité, on invoque
aussi le motif que sa méthode n’est
qu’une attitude typiquement encyclopédique : soit celle de renouveler la façon commune de penser, et
enfin que la critique diderotienne
s’inscrit dans un plus vaste mouvement comptant de nombreux critiques d’art, plus ou moins talentueux que Diderot, qui écrivent sur
des expositions publiques.
Pourtant, grâce à ses connaissances et à son érudition « encyclopédique », Diderot a enrichi et per-
Jean-Baptiste Siméon Chardin «Le panier de pêches, raisin blanc et noir, avec rafraîchissoir et verre à pied»,
1759. Huile sur toile, 38,5 x 47 cm. Musée des Beaux-Arts, Rennes
© RMN-Grand Palais (musée des Beaux-Arts de Rennes) / Patrick Merret
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69
expos itions
FRANCE
Bordeaux
Musée des Arts Décoratifs : De l’inl
time ou l’art de vivre au quotidien aux
XVIIIe et XIXe siècle. Jusqu’au 19 mai
Baux-de-Provence
Carrières de lumières : Klimt et
l
Vienne. Un siècle d’or et de couleurs.
Jusqu’au 4 janvier 2015
Biot
Musée
en
franc e
contemporain : Ericka Beckman
Works 1978-2013 / Philippe
Decrauzat - «Notes, Tones, Stone» /
Blair Thurman. Jusqu’au 4 mai.
l Musée de Grenoble : La pointe
et l’ombre. Dessins nordiques du
Musée de Grenoble. Jusqu’au 9 juin
cœur et d’épée en Europe. 18021850. Du 19 avril au 21 juillet.
Giverny
Musée des impressionnismes :
L’Impressionnisme
et
les
Américains. Jusqu’au 29 juin.
l
Le
Havre
Musée d’Art moderne André
l
l
national Fernand
Léger : Fernand Léger, reconstruire
le réel. 1924-1946. Jusqu’au 2 juin
Malraux : Le siècle d’or de la
peinture danoise - une collection
française. Jusqu’au 11 mai.
Lens
Carcassone
Le Louvre : Voir le Sacré.
Musée des Beaux-Arts de
l
l
Carcassonne : Corot dans la lumière
du Nord. Jusqu’au 21 mai.
Evian
Palais Lumière : Joseph Vitta.
l
70
Passion de collection. Jusqu’au 1er
juin.
Grenoble
Magasin-Centre national d’art
l
Jusqu’au 21 avril.
Lille
Musée d’Art moderne : Meret
l
Oppenheim.
Rétrospective.
Jusqu’au 1er juin.
Lyon
Musée des
beaux-arts :
L'Invention du Passé - Histoires de
l
Marseille
Centre de la Vieille Charité :
l
Visages, Picasso, Magritte, Warhol.
Jusqu’au 22 juin.
l MuCEM : Splendeurs de Volubilis
- Bronzes antiques du Maroc et de
Méditerranée. Jusqu’au 25 août.
Des artistes dans la cité. Jusqu’au 8
septembre. Le Monde à l’envers Carnavals et mascarades d’Europe
et de Méditerranée. Jusqu’au 25
août.
Metz
Centre Pompidou-Metz
:
Paparazzi ! Photographes, stars et
artistes. Jusqu’au 9 juin.
l
Montpellier
Musée Fabre : François-André
Strasbourg
Musée d’Art Moderne et
l
Contemporain : Doré & Friends.
Jusqu’au 25 mai.
Thonon
Musée du Chablais (Château
l
de Sonnaz) Le Léman en question.
Jusqu’au 9 novembre.
Toulon
Hôtel des Arts : Domus Mare
l
Nostrum - Habiter le mythe méditerranéen. Jusqu’au 11 mai.
Yerres
Propriété Caillebotte
:
Caillebotte à Yerres, au temps de l’impressionnisme. Du 5 avril au 30 juillet.
l
l
AILLEURS
Vincent, 1746-1816, un peintre entre
Fragonard et David. Jusqu’au 11 mai.
Bologne
Sèvres
Palazzo Fava : «La Jeune fille à la
Musée de la Céramique :
l
l
Picasso céramiste et la Méditerranée.
Jusqu’au 19 mai
perle». L’Age d’or de la peinture hollandaise. Jusqu’au 25 mai.
Yerres
Caillebotte à Yerres au temps de l'impressionnisme
Pour la première fois, près de 40 chefs-d’œuvre de Gustave Caillebotte
vont être présentés dans sa propriété yerroise, où ils ont été peints. Ce grand
rendez-vous de l’impressionnisme est d’autant plus exceptionnel que ces œuvres n’ont, pour la plupart, jamais ou très peu été exposées au public.
Les plus grands musées du monde se sont associés à cet événement culturel majeur de l’année 2014. Ainsi, près de 40 tableaux issus des collections de
la National Gallery de Washington, du Art Museum de Milwaukee, de l’Indiana
University Art Museum de Bloomington, du Musée des Beaux-Arts de Rennes et
des Musées d’Orsay et Marmottan Monet à Paris seront présentés aux côtés des
œuvres prêtées par la famille même de l’artiste et par des collectionneurs privés.
Gustave Caillebotte a 12 ans lorsque ses parents s’installent dans la propriété yerroise qui sera leur résidence d’été. De 1875 à 1879, il peindra
quelques-uns des tableaux les plus importants dans cette propriété familiale.
Ce lieu a été fondamental dans l’inspiration de l’artiste, lui offrant aussi
bien des motifs à peindre avec le parc, la rivière, le potager que des sujets de
composition avec l’activité des canotiers et les loisirs de la rivière. C’est à ce
moment que se définit le style de Caillebotte, fait de sujets modernes représentés d’une façon nouvelle et qui l’ont fait devenir l’un des peintres impressionnistes les plus originaux.
Les tableaux qu’il a réalisés dans la propriété familiale d’Yerres constituent une partie essentielle de la révolution artistique apportée par les impressionnistes. Ce sont ces œuvres qui seront montrées, à Yerres, sur les lieux mêmes
qui les ont inspirés et où ils ont été peints.
Gustave Caillebotte «Pêche à la ligne», 1878
Huile sur toile, 157x113 cm. Collection particulière.
Courtesy Comité Caillebotte, Paris
a
. A voir du 5 avril au 20 juillet 2014
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d
a
expos itions
en
europe
Palazzo Strozzi, Florence
Pontormo et Rosso
Le Palazzo Strozzi présente une importante exposition entièrement dédiée à deux maîtres du Maniérisme, à savoir Jacopo da Pontormo et Rosso Fiorentino, deux peintres qui
étaient sans nul doute les plus originaux et les plus anticonventionnels adeptes d’une nouvelle façon d’interpréter l’art dans le XVIe siècle italien, que Giorgio Vasari appelait la
“manière moderne“.
Ils sont tous deux nés en 1494, au
début d’une période troublée par des
heurts religieux et politiques qui
devaient mener à un changement fondamental des équilibres entre les
états et à la perte de l'harmonie dans
l'art qui avait été une caractéristique
de la transition du 15ème aux 16ème
siècles.
En explorant le travail de ces
deux représentants florentins du
«Maniérisme» - baptisé ainsi par les
critiques du 20ème siècle -, cette
exposition de référence, forte d’une
sélection d’environ 80 œuvres réunies pour la première fois - peintures, fresques, dessins et
tapisseries, représentant 70% de la production des artistes -, a pour but de suivre à la trace
le développement chronologique que Giorgio Vasari a identifié comme le début de la
«manière moderne» et qui trouve ses racines, autant pour Pontormo que pour Rosso, dans
leur relation avec Andrea del Sarto.
Jacopo Carrucci, dit Pontormo (1494-1557)
«Double portrait d’amis», 1523-1524
Huile sur panneau; 88.2 x 68 cm.
Venise, Fondation Giorgio Cini, Galerie du Palais Cini
. A voir jusqu’au 20 juillet 2014
A noter que la Fondation Mapfre, Madrid, présente des dessins de Pontormo jusqu’au 11 mai.
Londres
Bruxelles
British Museum : Vikings. Jusqu’au
Palais des Beaux-Arts : Zurbarán.
l
l
Maître de l’âge d’or espagnol.
Jusqu’au 25 mai. Michaël
Borremans. Jusqu’au 3 août
Ferrare
Palazzo dei Diamanti : Matisse. La
l
silhouette. La force de la ligne, l’émotion des couleurs. Jusqu’au 15 juin
Florence
CCC Strozzina : Contexte familial.
l
Portaits et expériences de familles
d’aujourd'hui. Jusqu’au 20 juillet
l Galleria del Costume : Le chapeau
entre art et extravagance. Jusqu’au
18 mai.
l Palazzo Strozzi : Pontormo et
Rosso. Des chemins divergents du
Maniérisme. Jusqu’au 20 juillet.
Forli
Musée San Domenico : Liberty.
l
Un style pour l’Italie moderne.
Jusqu’au 15 juin.
22 juin. Hommes sages de l'est. Les
traditions zoroastriennes en Perse et
au-delà. Jusqu’au 27 avril.
l Courtauld Gallery : Paysages
romantiques de Grande-Bretagne et
d’Allemagne. Jusqu’au 27 avril.
l Estorick Collection of Modern
Italian Art : Giorgio de Chirico Mythe and Mystère. Jusqu’au 11 mai
l National Gallery : Véronèse Magnificience de la Renaissance à
Venise. Jusqu’au 15 juin. Etrange
beauté - maîtres de la Renaissance
allemande. Jusqu’au 11 mai
l Royal Academy of Art :
Renaissance Impressions - Gravures
sur bois en clair-obscur - Coll. Georg
Baselitz & Albertina. Jusqu’au 8 juin.
l Tate Modern : Henri Matisse - les
papiers découpés. Du 17 avril au 7
septembre
l Victoria & Albert Museum : L’art
perdu de l’écriture. Jusqu’au 30
juin.
Madrid
Francfort
Fondation Mapfre : Pontormo,
Städelmuseum : Emil Nolde,
l
l
rétrospective. Jusqu’au 15 juin
a
g
dessins & Picasso Jusqu’au 11 mai.
l Musée du Prado : Les Furies. De
e
n
71
Giovan Battista di Jacopo, dit Rosso Fiorentino (14941540), «Portrait d’un homme», vers 1524
Huile sur panneau; 88.7 x 67.9 cm. Washington, D.C.,
National Gallery of Art, Samuel H. Kress Collection
Titien à Ribera. Jusqu’au 4 mai.
Rubens - Le Triomphe de
l'Eucharistie. Jusqu’au 29 juin
l Musée Thyssen-Bornemisza :
Cézanne. Jusqu’au 18 avril. Darío
de Regoyos (1857-1913). Jusqu’au
1er juin
Nuoro
Musée Man : Robert Capa - Une vie
l
finement en dehors du feu. Jusqu’au
18 mai.
Ravenne
Musée d’art de la Ville : Le charme
l
de la fresque. Chefs-d’œuvres détachés de Pompeï à Giotto et de
Corrège à Tiepolo. Jusqu’au 15 juin.
Rome
Galerie d’art contemporain : À tral
vers Rodin. La sculpture italienne
au XXe siècle. Jusqu’au 18 mai.
l Museo Fondazione Roma :
Hogarth, Reynolds, Turner. La peinture anglaise à l’aube de la modernité. Du 15 avril au 20 juillet
l Palazzo Cipolla : Modigliani,
Soutine et les artistes maudits. La collection Netter. Jusqu’au 6 avril.
l Scuderie del Quirinal : Frida
Kahlo. Jusqu’au 13 juillet.
d
a
Rovigo
Palazzo Roverella : L’obsession norl
dique. Böcklin, Klimt, Munch et la peinture italienne. Jusqu’au 21 juin.
Turin
l La Veneria Reale : Splendeurs des
cours italiennes : les Este. Jusqu’au 6
juillet.
Venise
Fondation Querini Stampalia :
l
Haris Epaminonda. Jusqu’au 18 mai
l Palazzo Fortuny : Les amazones de
la photographie. De la collection de
Mario Trevisan. Jusqu’au 14 juillet.
l Palazzo Grassi : Irving Penn &
L’illusion des lumières. Du 13 avril au
31 décembre.
l Peggy Guggenheim Collection:
Themes & Variations. The Empire of
Light. Jusqu’au 14 avril.
Vienne
Albertina Museum (Albertinapl.)
l
Naissance d’une collection. De
Dürer à Napoléon. Jusqu’au 29 juin.
l Belvedere : Vienna - Berlin. L’Art
de deux villes. Jusqu’au 15 juin.
Rita Vitorelli. Jusqu’au 6 avril
expos itions
en
Genève
Lausanne
Art & Public (Bains 37) Franz
Collection de l’Art brut (Bergières
72
l
l
West. Jusqu’au 11 avril.
l Bibliothèque d’art et d’archéologie (Promenade du Pin) Les livres de
photographes - Un musée de papier
pour l’image. Jusqu’au 31 mai.
l Blancpain Art Contemporain
(Maraîchers 63) Sarah Burger /
Pascal Danz. Jusqu’au 2 mai.
l Blondeau & Cie (Muse 5) Adel
Abdessemed. Jusqu’au 3 mai
l Cabinet d’Arts graphiques
(Promenade du Pin 5) Not Vital.
Jusqu’au 13 avril.
l Centre d'Art Contemporain
(Vieux-Grenadiers 10) Robert
Overby & Nicole Miller. Jusqu’au
27 avril.
l Centre de la Photographie (Bains
28) Clemens Klopfenstein &
Christiane Grimm. Du 3 avril au 25
mai.
l Fondation Bodmer (Cologny)
Alexandrie la Divine. Du 5 avril au
31 août.
l Galerie Foëx (Évêché 1)
Philippe Deléglise & Vincent
Fournier. Du 15 avril au 14 juin.
l Galerie Bärtschi (rte des Jeunes
43) Fabian Marti. Jusqu’au 16 mai.
l Galerie S. Bertrand (Simplon 16)
Sam Kaprielov. Jusqu’au 5 avril.
l Galerie Patrick Cramer (VieuxBillard 2) Antonio Saura. Jusqu’au
17 mai.
l Galerie Anton Meier (Athénée 2)
Roger Chappellu. Jusqu’au 26 avril
l Galerie Skopia (Vieux-Grenadiers
9) Thomas Huber. Jusqu’au 10 mai.
l Galerie Turetsky (Grand-Rue 25)
Alexandre Joly. Jusqu’au 3 mai.
l Mamco (Vieux-Granadiers 10)
Cycle Des Histoires sans fin, séquence printemps 2014. Jusqu’au 18 mai.
l Milkshake Agency (24, Montbrillant) Sabrina Biro. Du 8 avril au
11 mai.
l Musée Ariana (Av. Paix 10) Terres
d’Islam - L’Ariana sort de ses réverves II. Jusqu’au 31 août
l Musée d’art et d’histoire (Ch.Galland 2) Corps et Esprits.
Regards croisés sur la Méditerranée antique. Jusqu’au 27 avril.
l Musée Barbier-Mueller (J.-Calvin
10) Découvrez les Baga. Jusqu’au
4 mai.
l Musée Rath (pl. Neuve)
Humaniser la guerre? CICR - 150 ans
d'action humanitaire. Du 29 avril au
20 juillet.
l Xippas Art Contemporain (Sablons 6) Michael Scott. Du 2 avril au
17 mai.
11) Véhicules. Jusqu’au 27 avril
l Fondation de l’Hermitage (2, rte
Signal) Le goût de Diderot. Greuze,
Chardin, Falconet, David.... Jusqu’au
1er juin
l Mudac (pl. Cathédrale 6) Le verre
vivant. Acquisitions récentes de la
collection d'art verrier. Jusqu’au 16
novembre.
l Musée cantonal des beaux-arts (pl.
Riponne) Giacometti, Marini, Richier.
La figure tourmentée. Jusqu’au 27
avril.
l Musée de l’Elysée (Elysée 18)
Philippe Halsman, Etonnez-moi !
Jusqu’au 11 mai.
Chaux/Fonds
Musée des beaux-arts : L’art
l
belge entre rêves et réalités.
Chefs-d’œuvre du Musée d’Ixelles.
Jusqu’au 1er juin
s uis s e
Enjeux. Jusqu’au 31 août.
Fribourg
Espace Jean Tinguely-Niki de Prangins
Saint Phalle : Corps en jeu / la colMusée national suisse : «Papiers
l
l
lection du MAHF. Jusqu’au 24 août.
Lens
/ Crans
Fondation Pierre Arnaud
l
:
Divisionnisme. Jusqu’au 22 avril.
Martigny
Fondation Pierre Gianadda : La
l
Beauté du corps dans l'Antiquité
grecque. Jusqu’au 9 juin.
l Fondation Louis Moret (Barrières
33) Parole d’objet. Jusqu’au 13 avril
l Le Manoir de la Ville : Show
Showed Shown. Jusqu’au 13 avril
Neuchâtel
l Centre Dürrenmatt (Pertuis du Saut
74) Le labyrinthe poétique d'Armand
Schulthess. Jusqu’au 3 août.
l Musée d'art et d'histoire (espl.
Léopold-Robert 1) Argent - Jeux -
découpés.
Scherenschnitte.
Silhouette. Paper cuts». Du 11 avril
au 28 septembre.
Romont
VitroMusée : Le monde sous
l
verre de Fride WirtlWalser.
Jusqu’au 20 avril.
Vevey
Alimentarium : Délices d’artisl
tes. L’Imaginaire dévoilé des natures mortes. Jusqu’au 30 avril.
l Musée Jenisch : Manon Bellet /
L’onde d’une ombre. Jusqu’au 1er
juin
l Musée suisse de l’Appareil photographique (Grand Place) Bernard
Dubuis, Tant et temps de passages. Jusqu’au 30 août.
Galerie Th 13, Berne
Women par Tom Wood
La Fondation d’entreprise Hermès organise à la Galerie TH13 une exposition des photographies de
Tom Wood, un figure marquante de la photographie anglaise des années 70, aux côtés de Chris Killip,
Martin Parr ou Paul Graham.
Cet artiste a arpenté Liverpool pendant de longues années, l’appareil rivé à l’œil, comme pour ne rien
perdre du temps qui passe, comme si l’envie le tenaillait d’enfermer la vie dans cette petite boîte noire. Son
attitude face à l’agitation de cette cité, son attention de tous les instants aux passants et passantes lui ont
valu d’être surnommé «photie man» par les habitants de Liverpool.
Tom Wood s’attache au quotidien de sa cité
d’adoption, se révélant un promeneur attentif à
ses semblables et suscitant leur attention, mais
en conservant toujours, lorsqu’il capte l’intimité
de ses contemporains, une réserve de “gentleman“. Le photographe ne joue pas le rôle d’un
simple observateur du monde qu’il parcourt,
mais en fait partie, intégrant une part de luimême dans chacun de ses clichés.
Le travail de Tom Wood se rattache, par
certains aspects, à la “Street Photography“ telle
que pratiquée aux Etats-Unis à la même période; pour autant, le photographe ne se reconnaît
pas dans la tradition de la photographie documentaire. Selon lui, la photographie ne peut se
réduire à sa fonction informative.
«Seacombe ferry», 1985 © Tom Wood
moyen format, de la pose à l’instantané.
Les portraits de femmes qui sont présentés à
la galerie TH13 sous le titre «Women» représentent un condensé de l’écriture photographique
développée par Tom Wood depuis trente ans; le
photographie y pratique allègrement les mélanges, passant d’une décennie à une autre, de la
couleur au noir et blanc, du format 24x36 au
. A découvrir jusqu’au 14 juin 2014
a
g
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n
d
a
expos itions
OUTRE SARINE
Aarau
Aargauer Kunsthaus : Veronika
l
Spierenburg - Prix Culturel Manor
2013 & Matthias Wyss. Jusqu’au 21
avril
Bâle
Cartoon Museum (St. Albanl
Vorstadt 28) Le monde selon Plonk
& Replonk. Jusqu’au 22 juin.
l Fondation Beyeler (Riehen)
Odilon Redon. Jusqu’au 18 mai.
l Kunsthalle : Vivian Suter. Du 6
avril au 1er juin. Georgia Sagri. Du
13 avril au 8 juin.
l Kunstmuseum (St. Alban-Graben
16) Les masques intriguées - James
Ensor. Du musée royal d'Anvers et
dans les collections suisses.
Jusqu’au 25 mai. Kasimir
Malewitsch - Le monde comme nonfiguration. Jusqu’au 22 juin
l Museum für Gegenwartskunst
(St. Alban-Rheinweg 60) Le
Corbeau et le Renard. Révolte de la
langue avec Marcel Broodthaers.
Jusqu’au 17 août.
l Cartoonmuseum (St. AlbanVorstadt 28) Le monde selon Plonk
& Replonk. Jusqu’au 22 juin.
l HMB - Museum für Musik / Im
Lohnhof (Im Lohnhof 9) pop@bâle.
La musique pop et rock depuis les
années 1950. Jusqu’au 29 juin.
l Musée Tinguely (Paul SacherAnlage 1) Objets ludiques. L'Art
des possibilités. Jusqu’au 11 mai.
l Schaulager (Ruchfeldstr. 19,
Münchenstein) Paul Chan - Selected
Works. Du 12 avril au 19 octobre.
l Spielzeug Welten Museum :
Marilyn privée: l'être humain derrière le concept Monroe. Jusqu’au
6 avril.
Bienne
CentrePasqu’Art (fbg Lac 71-75)
l
Barbara Probst & Telling Tales.
Jusqu’au 6 avril.
l PhotoforumPasqu’Art : Beat
Schweizer & Thomas Kneubühler.
Jusqu’au 20 avril.
Riggisberg
Abegg-Stiftung : L’enveloppe et
l
la parure / Les tissus du Moyen
Âge dans le culte des reliques. Du
27 avril au 9 novembre.
Warth
Kunstmuseum Thurgau : Joseph
l
Kosuth. L’existence et le monde.
Jusqu’au 24 août.
Surfaces. Nouvelle photographie
de la Suisse. Jusqu’au 24 août.
Deposit, projet de Yann Mingard.
Jusqu’au 25 mai.
l Fotostiftung Schweiz (Grüzenstr. 45) Iren Stehli - Si près, si loin.
Jusqu’au 25 mai.
l Kunstmuseum (Museumstr. 52)
Gerhard Richter - Lignes et verre.
Jusqu’au 20 avril. Gerhard Richter Travaux sur papier de la collection.
Jusqu’au 27 juillet.
l Museum Oskar Reinhart
(Stadthausstr. 6) Les peintres de
Winterthur à travers les siècles.
Jusqu’au 1er juin.
l Villa Flora (Tösstalstr. 44) Chefsd’œuvre de la collection Hahnloser
/ Jaeggli : Bonnard, Van Gogh,
Vallotton.... Jusqu’au 27 avril.
Weil
/ Rhein Zurich
Vitra Design Museum : Konstantin
Haus Konstruktiv
l
Grcic - Panorama. Jusqu’au 14 septembre.
Winterthur
Fotomuseum (Grüzenstr. 44)
l
l
: Victor
Vasarely – La redécouverte du
peintre. Jusqu’au 18 mai.
l Kunsthalle : Ed Atkins - Slaves et
Tatares. Jusqu’au 11 mai.
g
Kunsthaus (Heimpl.1) De Matisse
au Cavalier bleu - l’expressionnisme en Allemagne et en France.
Jusqu’au 11 mai. Alberto
Giacometti. Jusqu’au 25 mai.
l Landesmuseum : 1900-1914.
Expédition Bonheur. Jusqu’au 13
juillet. Contes, magie et Trudi
Gerster. Jusqu’au 11 mai.
l Museum Bellerive (Augustinergasse 9) Henry van de Velde –
Intérieurs. Jusqu’au 1er juin.
l
Museum für Gestaltung
(Austellungsstr. 60) Galerie : Vintage
– Design with a History. Jusqu’au 6
avril. Halle : Affiches d'artistes
japonais - Fleurs de cerisier et
ascétisme. Jusqu’au 25 mai.
l Museum Rietberg (Gablerstr. 15)
Art de la Côte d’Ivoire. Jusqu’au
1er juin. Baldaquins pour la déesse.
Art textile en Inde. Jusqu’au 13
avril. Un jardin secret - Peinture
indienne de la collection Porret.
Jusqu’au 29 juin.
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1900 - 1914. Expédition Bonheur
Jusqu’au début de la Première Guerre
mondiale, rares sont les personnes qui se
doutent qu’une catastrophe va s’abattre sur
l’Europe et le monde entier. On croit vivre
«l’âge d’or de la sécurité», selon la formule de l’écrivain Stefan Zweig. Cette époque
est marquée par les avant-gardes artistiques, le dépassement des rôles traditionnels attribués aux sexes, les inventions révolutionnaires, une prospérité croissante, l’exploration de l’inconscient et la certitude
illusoire que la paix va durer. Tout semble
possible. La nouveauté déclenche un sentiment d’euphorie. Mais au-delà des apparences, la peur et l’incertitude dominent
aussi les esprits.
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Musée National, Zurich
Berne
Centre Paul Klee (Monument im
Fruchtland 3) Le Voyage en Tunisie.
Klee, Macke, Moilliet. Jusqu’au 22
juin.
l Musée des Beaux-Arts (Hodlerstr.
8-12) Anker, Hodler, Vallotton...
Chefs-d’œuvre de la Fondation pour
l’art, la culture, l’histoire. Jusqu’au
24 août. Rétrospective Germaine
Richier. Jusqu’au 6 avril. Hieronymus
Grimm (1733-1794), illustrateur et
caricaturiste. Jusqu’au 21 avril.
Markus Raetz. Estampes et sculptures. Jusqu’au 18 mai.
en
Egon Schiele «Die Jungfrau», 1913. Crayon et couleurs opaques sur
papier, Graphische Sammlung der ETH Zurich
© Graphische Sammlung der ETH Zurich.
L’exposition montre cette alternance
entre enthousiasme et difficulté à faire face
aux événements, ce qui n’est pas sans rappeler l’époque actuelle. Elle réunit des
objets d’intérêt culturel et historique appartenant aux collections du Musée national
suisse ainsi que des œuvres provenant de
musées et de collections particulières de
premier plan. On peut ainsi y admirer des
tableaux de Vassily Kandinsky, Pablo
Picasso, Egon Schiele ou encore Ferdinand
Hodler provenant du Centre Pompidou à
Paris, de la Fondation Beyeler à Riehen ou
du Aargauer Kunsthaus d’Aarau.
. A voir jusqu’au 13 juillet 2014
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musée d’orsay
Gustave Doré
La programmation de cette rétrospective très complète,
consacrée à Gustave Doré (1832-1883) ne fait que rendre
justice à artiste surdoué, protéiforme : dessinateur,
caricaturiste, illustrateur, aquarelliste, peintre, sculpteur.
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S’il a produit plus de dix mille planches de dessins, devenant ainsi « le
plus illustre des illustrateurs », et de ce fait pionnier de la bande dessinée,
son emprise sur la mémoire collective est indiscutable et connu. Ce qui l’est
moins, c’est son œuvre de peintre et de sculpteur et c’est aussi là le mérite
de cette exposition d’introduire le visiteur, connaisseur des dessins et caricatures de Doré, dans son univers pictural, pittoresque et sublime, méditatif
et dramatique. Les commissaires de l’exposition Paul Lang, directeur
adjoint et conservateur en chef au musée des Beaux-Arts du Canada et
Edouard Papet, conservateur en chef au musée d’Orsay, ont
fait sur le plan scientifique ce qu’il y a de mieux. Par contre, nous partagerons peut-être moins leur conception du parcours, coupé en deux : au rez-de-chaussée dans deux salles,
les tableaux monumentaux et les lourdes sculptures, disons
qu’il s’agirait d’une mise en bouche, au cinquième étage,
l’exposition à proprement parler, les plats de résistance.
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Registre différent pour ces deux œuvres religieuses que sont dans La Maison
de Caïphe (1875) mais aussi L’Ange de Tobie (1865), traitées dans le goût
orientaliste.
La deuxième partie de l’exposition, allant de la caricature au paysage,
ravira plus d’un visiteur, à condition de se montrer patient, car, dans toutes
les vitrines qui réunissent des merveilles de dessins, d’aquarelles, de xylographies, de lavis, le diable est caché dans le détail. A l’heure où les journaux commencent à être bon marché, les illustrations se multiplient pour
refléter les mutations politiques et sociales. Déjà enfant, Gustave Doré montrait une forte inclination au pastiche, dont témoigne son Album de dessins
(1840/1842), Le danger de patiner. Un talent, qui convaincra rapidement le
grand patron de la presse illustrée parisienne, Charles Philipon. Qu’il caricature les artistes, Trois artistes incompris et mécontents (1851) ou Une
pépinière de rapins, de croutons et d’apprentis Raphaël (1850), les bourgeois amoureux de hauts lieux balnéaires, Les Bains de mer (1850/1855), ou
plus savoureux pour les visiteurs suisses, Enfin je pénètre dans ce bienheureux Oberland Bernois, qu’il croque les gourmands, sa plume est toujours
incisive. A l’heure où la Crimée fait aujourd’hui la une de la presse, on se
rend compte qu’il n’y a rien de bien nouveau sous le soleil puisqu’en pleine
Renouveau
Dans cette première partie s’intitulant “Gustave Doré
intime et spectaculaire“, une première surprise attend le
visiteur : Entre Ciel et Terre (1862), une œuvre énigmatique, de petite taille, où l’on voit un batracien attaché à un
cerf volant sur le point d’être rattrapé par une cigogne avec
la cathédrale de Strasbourg en arrière-plan (Doré est né à
Strasbourg). Symboliserait-il une image cruelle des aléas de
l’existence ? De format plus imposant, ses toiles représentant des saltimbanques, aux couleurs symbolistes, marquent
son amitié et son intérêt pour le monde forain. Lui-même
endossant volontiers l’habit de clown. Un talent qui se lit
aussi dans son Pierrot grimaçant. Doré vint tard à la sculpture et les critiques ne furent pas très tendres avec lui. Alors
que La Parque et l’Amour (1877) de tradition classique par
le sujet, montre une grande maîtrise du sculpteur autodidacte, la violence épique de La Gloire étouffant le Génie
(1878), exprime les tourments créateurs de l’artiste. En
catholique pratiquant, Doré entreprit nombre d’œuvres religieuses. En 1866, il s’adonne à l’illustration de la Sainte
Bible, qui va marquer le renouveau de l’art religieux.
Jamais on n’avait tant « imaginé » la Bible et ses gravures
de la Passion du Christ ne sont pas sans rappeler les effets
de clair-obscur des eaux-fortes de Rembrandt. Dans l’œuvre monumentale et spectaculaire du Christ quittant le prétoire (1874/1880), c’est un tour de force par le format de
l’œuvre et le foisonnement des personnages, d’une puissance théâtrale et dramatique, qui n’a pas échappé à ses
contemporains, comme Emile Zola ou Théophile Gautier.
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Gustave Dore «Pauvresse à Londres», 1869
Lavis, plume et rehauts de gouache blanche, 46,3 x 30,6 cm Strasbourg, Musee d’Art Moderne et
Contemporain de Strasbourg © Photo musees de Strasbourg
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Gustave Dore «Pierrot grimaçant», sans date
Aquarelle et rehauts de gouache blanche sur traits de crayon, 64,2 x 50,5 cm
Strasbourg, Musee d’Art Moderne et Contemporain de Strasbourg
© Photo musees de Strasbourg
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Paris (1870), Le Rhin allemand (1870/1871), Episode du siège de Paris
(1871) baignent dans des tonalités sombres ou de grisailles.
Amoureux de paysages en tant que voyageur infatigable, passionné
d’alpinisme, parcourant la France, la Suisse, le Tyrol et l’Ecosse, Doré est
tout aussi amoureux de paysages en tant que peintre. Dès les années 1860,
il aborde ce genre avec succès. Rien dans la nature ne semble échapper à cet
œil curieux et le spectacle de la nature, un torrent tumultueux, un ciel menaçant, la lumière suivant l’orage, des paysages crépusculaires inspirent des
constructions harmoniques qui évoquent celles d’un Caspar David
Friedrich. Son Ascension du Mont Cervin de 1865 correspond à la même
époque à la disparition tragique d’alpinistes dans la descente du ce sommet,
un événement qui a développé l’imagination des illustrateurs. Que ce soit
Torrent dans les collines (1881), Loch Lochmond (1875), Collines d’Ecosse
(1875), il est fasciné par l’Ecosse « d’une grandeur sauvage et d’une solitude désolée ». En guise de conclusion au parcours, les commissaires ont
voulu montrer combien cet artiste était visionnaire et que ses illustrations
furent une source d’imagination pour péplums et films d’aventures. De Vie
et Passion de Jésus Christ de Ferdinand Zeccha produit par Pathé en 1902
à King Kong ou au Seigneur des anneaux jusqu’à Harry Potter, la dette visà-vis de Doré est immense. Il suffit de visionner quelques-unes des projections de ces films pour s’en convaincre. Un prodigieux artiste du XIX° siècle dont on a peut-être oublié un peu vite qu’il a embrassé en virtuose tous
les domaines de la création et que le visiteur pourra redécouvrir, pour son
plus grand plaisir !
Régine Kopp
Jusqu’au 11 mai 2014, www.musee-orsay.fr
guerre de Crimée, qui scellait l’alliance de la France et de la GrandeBretagne, face à la Russie, Doré lançait un pamphlet très féroce, riche de
cinq cent dessins satiriques, intitulée Histoire dramatique et caricaturale de
la Sainte Russie. Une relation à l’actualité, qui anticipe une forme de démocratisation de la culture, qui caractérise aussi le rapport aux classiques,
puisque Doré s’est mesuré aux plus grands textes : Dante, Rabelais, La
Fontaine, Perrault, Balzac mais aussi Cervantès, Milton, Shakespeare dont
plusieurs éditions sont présentées, agrémentées de nombreuses illustrations
et aquarelles. Beaucoup de visiteurs se remémoreront avec émotion des
visions inoubliables, souvent violentes des Contes de Perrault, qui ont par la
suite marqué le monde cinématographique.
Misère à Londres
Mais son talent, il le met aussi au service de son activité de reporter,
rendant compte par la plume et le crayon de la réalité de la Londres victorienne, de sa misère urbaine. Il représente aussi bien l’ombre des bas-fonds
londoniens comme dans Scène de la rue à Londres (1870), Pauvresse à
Londres (1869), que la lumière des champs de course, Le Grand Derby
(1870). Pour exposer ses œuvres à Londres, il n’hésite d’ailleurs pas à y
cofonder une galerie. De la même façon, il se rend à plusieurs reprises en
Espagne, terre sauvage et pittoresque, en vue de l’illustration du Don
Quichotte qui doit le distinguer de celle de ses prédécesseurs. Son Guitariste
(1870) et ses Mendiants de Burgos (1875) montre non seulement une grande empathie, séduit par la noblesse naturelle des mendiants et « la splendeur
des guenilles castillanes ».
Toute une section est consacrée à la guerre de 1870 et au siège de Paris,
qui inspire à Doré un ensemble d’œuvres au caractère réaliste. Il peint des
ambiances nocturnes et embrasées pour raconter les drames de la guerre et
de la défaite, qui le touchent personnellement : Scène de bombardement de
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Gustave Dore «Joyeuseté», dit aussi «À saute-mouton», vers 1881.
Bronze, 36,5 x 27 x 17 cm. Paris, musee d’Orsay
© Musee d’Orsay, Dist.RMN-Grand Palais / Patrice Schmidt
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centre pompidou
henri CartierBresson
« Laissons les photos parler d’elles-mêmes et pour l’amour
de Nadar, ne laissons pas des gens assis derrière des bureaux
rajouter ce qu’ils n’ont pas vu. » (h.C-B)
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Comment appréhender une œuvre aussi magistrale et surtout déjà universellement décrite en long en large et en travers que celle du photographe Henri Cartier-Bresson (1908-2004) ? Deux générations de photographes et photojournalistes ont été appelés à le prendre comme exemple
avec la formule de « moment décisif », sans compter l'absence totale de
pose, de recadrage, de retouche, la construction géométrique de l’image à
travers les taches d’ombre et de lumière… et l’usage du Leica.
C’était un artiste qui se lança dans la photographie en 1930. En effet
le dessin et la peinture qu’il pratiquait depuis son plus jeune âge et qu’il
avait travaillés chez le peintre André Lhôte, lui donnèrent à jamais le sens
de la construction des images, une approche très graphique de la composition, une mise en place très précise des événements (c’est-à-dire des
sujets mobiles) dans l’espace. Cette construction visuelle instantanée crée
des rapports humains intemporels. Ce sont ces qualités qui font de lui un
photographe outrepassant le simple travail d’illustrateur, chez qui le propos seul est le fil conducteur, contrairement à l’artiste pour qui la photo
est le résultat d’une expérience visuelle
fugace.
Une œuvre forte
« Le sujet ne consiste pas à collecter
des faits car les faits en eux-mêmes n’offrent guère d’intérêt. L’important est de
choisir parmi eux, de saisir le fait vrai par
rapport à la réalité profonde ».(H C-B)
Etonnamment, c’est en visionnant
avec attention la vidéo de son film, réalisé pendant la guerre d’Espagne, Victoire
de la Vie, décrivant la prise en charge des
blessés dans des hôpitaux de campagne,
que l’on comprend la force de l’ensemble
de l’œuvre de Cartier-Bresson : c’est à
travers les visages et les expressions des
protagonistes, infirmières et blessés,
leurs postures et attitudes, que se dévoilent souffrances et détermination. Face à
la force qui se dégage des séquences, les
mots prononcés par le commentateur
deviennent réducteurs, insignifiants,
désuets, et surtout inutiles. De même,
pour H.C-B, les légendes des photos
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aussi sont réductrices et il les rejetait à la fin de ses albums sous forme de
notations de circonstances et non de commentaires pour ne pas gêner la
contemplation immédiate de la seule image. « La photographie est pour
moi la reconnaissance simultanée dans une fraction de seconde, d’une
part de la signification d’un fait, et de l’autre d’une organisation rigoureuse des formes perçues visuellement qui expriment ce fait ». Ainsi naît
le fameux « moment décisif ». Celui-ci implique énormément de patience dans l'attente de la rencontre de toutes les conditions qui, pour l’artiste,
incitent la photo. De plus, c’est par sa grande discrétion, voire une complète fonte dans l’environnement immédiat, que HCB parvenait à saisir
frontalement ses sujets tout en étant ignoré d’eux. Ceci à tel point que
jamais il ne figurait sur une photo prise par d’autres et ne se montrait que
derrière son Leica : autant le public connaissait ses photos publiées partout, autant il ignorait à quoi pouvait bien ressembler le photographe…
Trajectoire
Clément Chéroux, commissaire de l’exposition, décrit le parti qu’il a
pris de montrer la trajectoire de l’artiste sous forme chronologique, en en
fragmentant les étapes au gré des différents stades de sa trajectoire professionnelle et de l’histoire du monde qu’il a traversée depuis 1930. Les tirages noir et blanc sont tous d’époque. En effet, il avait un total mépris pour
la couleur qui disait-il se contente d’identifier les choses, alors que le noir
et blanc les sublime.
C’est entre 1930 et 1934 qu’il fait ses premiers voyages, en Afrique,
en Europe de l’Est, en Italie et en Espagne. On retrouve les photos de cette
période, magnifiques et mondialement connues… Il est encore sous l’influence de son expérience de peintre ayant côtoyé les surréalistes, surtout
par leur attitude : esprit subversif, engagement politique, croyance dans la
nécessité de « changer la vie ». Ses reportages d'alors portent sur le Front
populaire, les premiers congés payés ; dans le couronnement de Georges
V, ce sont les spectateurs et leurs attitudes qui sont photographiés, et non
le carrosse du souverain : c’est cette prise
de position que l’on retrouvera par la suite
dans la majorité de ses reportages où l’événement est présenté tel que vu et vécu
par ceux qui y assistent, à nous de comprendre à travers leurs physionomies ce
qui se passe hors-champs.
Entre 1935 et 45, il se tourne vers le
cinéma : en 1935 aux Etats-Unis, puis
avec Jean Renoir à Paris en 1936 jusqu'à la
guerre où, prisonnier pendant trois ans, il
s’évade pour rejoindre un groupe de résistants communistes. Il documente et photographie Oradour-sur-Glane, la libération
de Paris et le retour des prisonniers
d’Allemagne.
1957 est une année cruciale : Son
exposition au MOMA de New York qui le
consacre comme photographe universellement reconnu, et surtout la création de l’agence coopérative Magnum Photos avec
Robert Capa, David Seymour, ce qui
George Hoyningen-Huene : Henri Cartier-Bresson, New York, 1935
The Museum of Modern Art, Thomas Walther. Collection, Purchase,
oriente alors sa démarche vers le reportage
New York © George Hoyningen-Huene : © Horst / Courtesy-Staley /
et le travail pour les magazines alors aviWise Gallery / NYC. Credit photographique : © 2013. Digital image,
des de photographies.
The Museum of Modern Art, New York / Scala, Florence
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entre autres. Ces photographies
sont devenues des références.
A partir des années 1970,
HC-B. abandonne Magnum et
les commandes de reportages
pour ne se consacrer qu’au dessin. L’exposition nous en montre une série, des autoportraits
dessinés à la façon de son ami
Giacometti. Bien entendu il
continue à photographier, mais
libéré des contraintes narratives,
il retourne à ses premières
approches, purement plastiques.
Il s’occupe de valoriser ses
archives, à gérer ses expositions, publier des livres sur son
travail, et surtout, en 2003, crée
avec son épouse Martine
Franck, la Fondation Henri
«Premiers congés payés, bords de Seine, France, 1936»
Cartier-Bresson, bel espace où
Épreuve gélatino-argentique, tirage réalisé en 1946. Collection Fondation Henri Cartier-Bresson, Paris
sont gardées ses archives et
© Henri Cartier-Bresson / Magnum Photos, courtesy Fondation Henri Cartier-Bresson
organisées de nombreuses
A partir de ce moment, il couvre les principaux événements mar- expositions de photographes contemporains du monde entier.
quants de l’époque : assassinat et funérailles de Gandhi, les derniers jours
« En photographie la création est la courte affaire d’un instant, (…)
du Kuomingtang (d’ où une photo bien connue de Chinois se bousculant On fait de la peinture tandis que l’on prend une photo »
devant une banque pour échanger leurs billets contre quelques grammes
Christine Pictet
d’or), la Russie après la mort de Staline, Cuba en 1963, la France de mai
68. Toutes les photos de ces reportages accrochées et bien séparées les
unes des autres dans la chronologie des faits, nous font revivre les épiso- Centre Pompidou. Jusqu’au 9 juin 2014
des qui ont marqué l'environnement d’alors. De la même façon que de
retour d’Afrique, tout jeune, il
se défendait d’avoir eu un œil
d’anthropologue ou en quête de
folklore, dans ses reportages des
années 50-60, il se refusait d’être reporter de l’Histoire et de
l’actualité. « La vie n’est pas
une suite d’histoires que l’on
découpe en quartiers comme
une tarte aux pommes. » Pour
lui, il n’existe pas une seule
manière de raconter l’histoire,
mais rendre compte de la vie en
posant des questions. Les personnages inclus dans le cadre se
présentent souvent comme si
l’objet de la photo était horschamps, leurs regards souvent
dirigés dans la même direction,
questionnant tout en montrant
explicitement une même préoc«Foule attendant devant une banque pour acheter de l’or pendant les derniers jours du Kuomintang,
cupation.
Shanghai, Chine, decembre 1948»
Très marquants aussi ses
Épreuve gélatino-argentique, tirage réalisé dans les annees 1960
Collection Fondation Henri Cartier-Bresson, Paris
portraits d’artistes et d’écri© Henri Cartier-Bresson / Magnum Photos, courtesy Fondation Henri Cartier-Bresson
vains : Matisse, Giacometti
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grand palais : bill viola
La magie des images
Célébré à travers le monde comme le pionnier de cet art qu’est devenue la
vidéo, Bill Viola peut enfin se réjouir d’une rétrospective en France. Un
Grand Palais qui s’enflamme sous la puissance des images vidéo, diffusées par
plus de trente écrans et des heures d’images. Ce sont quatre décennies de
l’œuvre de Viola qui sont représentées dans l’exposition et tous les genres de
son œuvre font partie du parcours. Il vous faudra donc beaucoup de temps si
vous décidez de voir les vingt pièces in extenso.
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Mais cela importe peu à l’artiste, car pour
lui, le temps n’est pas de l’argent. Il voit son
exposition comme un voyage, chacun emportant ce qu’il veut. Le voyage que nous propose
l’artiste, et qu’il a conçu en étroite collaboration
avec sa femme Kira Perov, est un itinéraire
organisé autour des trois questions métaphysiques, les plus fondamentales et auxquelles
chaque époque tente de trouver une réponse :
qui suis-je, où suis-je, où vais-je ? Dans ses
vidéos, il interroge les grandes questions de la
métaphysique et ses images n’ont d’autre ambition que de donner à voir une autre perception
de ces questions, car de réponse, à la vie et à la
mort, il n’y en point. Lors de la conférence de
presse, c’est un Bill Viola d’humeur métaphysique que beaucoup ont découvert. « Il y a deux
choses éternelles, dit-il, ceux qui ne sont pas
encore nés ou qui viennent après nous et les
morts, au milieu il y a ceux qui vivent en ce
moment. Et la chose la plus importante est de
laisser quelque chose derrière soi, car nous
vivons de ce que les anciens ont laissé. Et la
créativité existe dans chaque être vivant ».
Mais ce qui distingue Bill Viola de beaucoup
d’autres vidéastes et qui fait de lui un authentique artiste, c’est son talent de peintre, une
palette qui inscrit ses images dans l’histoire de
l’art, où il croise les plus grands maîtres, de
Goya à Jérôme Bosch en passant par Giotto.
Structure du “voyage“
Trois sections rythment le parcours, scénographié par Bobby Jablonski et Gaëlle Seltzer,
sur deux niveaux du Grand Palais : « Je suis né
en même temps que la vidéo », « Le paysage est
le lien entre notre moi extérieur et notre moi intérieur » et « Si les portes de la perception étaient
ouvertes, alors tout apparaîtrait tel quel-infini »
William Blake.
C’est une vidéo couleurs de ses débuts,
1977/79, qui accueille le visiteur, The Reflecting
pool (Le bassin miroir). Les fondamentaux de
l’artiste y sont déjà présents, et l’on voit un
homme qui sort d’une forêt, puis saute dans un
bassin rempli d’eau. Le temps semble s’arrêter et
l’on assiste à une scène presque immobile, où les
seuls changements se limitent aux reflets et aux
ondes de la surface de l’eau. La vidéo lui sert à
sculpter le temps, elle ne l’arrête pas mais le
déroule. Poursuivant le voyage, le visiteur entre
dans une salle obscure, remplie de voiles sur lesquelles sont projetées des images d’un homme et
d’une femme qui s’approchent et s’éloignent de
la caméra sur fond de paysages nocturnes : The
Veiling / Les Voiles (1995).
Le polyptique vidéo en noir et blanc projeté sur quatre petits écrans, Four Hands / Quatre
mains (2001) qui présentent quatre paires de
main, appartenant à quatre âges différents et
effectuant des gestes prédéfinis, est très bouleversant. Des gestes familiers et étranges qui
décrivent à la fois une chronologie correspondant
aux actes accomplis à un moment donné et aux
grands cycles de la vie humaine.
L’écoulement du temps se lit dans le très
caravagesque polyptique en couleur sur cinq
écrans, Catherine’s Room (2001) qui nous fait
assister aux rituels quotidiens d’une femme seule
dans sa chambre, où seule une petite fenêtre dans
le mur ouvre sur l’extérieur. Une œuvre qui peut
faire penser à Fin de Partie de Samuel Beckett,
car là aussi le sujet est l’inéluctable fuite du
temps et la seule ouverture sur l’extérieur est une
petite fenêtre dans un mur. L’action se déroule le
plus souvent ralentie à l’extrême. C’est aussi le
cas dans The Quintet of the Astonished (2000), où
l’on assiste à une lente montée de l’énergie émotionnelle de cinq personnes debout, serrées les
unes contre les autres. Le son n’est jamais illustratif dans l’œuvre de Bill Viola mais toujours
actif. Comme dans l’installation The Sleep of
reason (1988), qui occupe une salle. On regarde
l’écran du moniteur montrant en gros plan un
homme endormi, quand tout à coup de grandes
images colorées recouvrent les murs et l’espace
se remplit d’un bruit fort et inquiétant de gémissements et de hurlements. Puis tout s’arrête pour
recommencer quelques instants plus tard.
Choc émotionnel
Bill Viola «Going Forth By Day» (detail), 2002 « First Light » (panneau 5)
installation video sonore, cycle de cinq projections 36 minutes, performeurs : Weba Garretson, John Hay
Collection Pinault. Photo Kira Perov
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Avec l’installation Going Forth by Day
(2002), le visiteur retient son souffle et le choc
émotionnel est garanti. Le titre reprend la traduction du titre original du Livre des Morts des
anciens Egyptiens : Livre pour sortir au jour, et
l’artiste explore les thèmes de l’individualité, la
société, la mort, la renaissance. Se retrouvant au
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Bill Viola «Four Hands» (detail), 2001
polyptique video noir et blanc sur quatre ecrans plats LCD poses sur une planche horizontale,
23 minutes, performeurs : Blake Viola, Kira Perov, Bill Viola, Lois Stark Bill Viola Studio, Long Beach, EtatsUnis. Photo Mike Bruce, courtesy Anthony d’Offay, Londres
centre d’un univers sonore et visuel avec des projections sur tous les murs, le spectateur est libre
de s’y déplacer pour regarder les projections
individuellement ou prendre du recul et voir
l’œuvre dans sa totalité. Une installation qui
s’apparente à une véritable superproduction avec
plus de cent vingt techniciens pour le tournage,
cascadeurs et spécialistes d’effets spéciaux et pas
moins de deux cents acteurs et figurants. Bill
Viola recourt donc à une technologie sophistiquée, utilisant tous les types de caméras, caméras
de vidéosurveillance, vieille caméra de surveillance militaire ou caméra à haute définition
numérique. Il s’enthousiasme quand de nouvelles
techniques apparaissent car elles lui ouvrent de
nouvelles voies de création. C’est aussi dans ce
sens qu’il dit que lui et la vidéo ont grandi
ensemble. Il entre en 1969 à l’université, alors
que les premières vidéos portables venaient de
sortir sur le marché deux ans auparavant. Et crée
dès 1972 ses premières vidéos, devient l’assistant
d’exposition pour Nam Jum Paik. Mais plus que
du côté de la technologie, c’est l’expérience du
désert, puis ses voyages en Asie, au Ladakh et
surtout à Florence, où il retient la leçon des maîtres du Quattrocento, qui forgeront son œuvre.
S’ajoute l’appropriation des textes de grands philosophes et mystiques de toutes obédiences,
chrétiens, bouddhistes, soufis, hindouistes.
Dans cette magistrale installation immersive
qu’est Going Forth by Day (2002), composé en
cinq parties (Fire Birth, The Path, The Deluge,
The Voyage, First Light), le visiteur doit entrer
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physiquement dans la lumière de la première
image. Les cinq séquences visuelles, de trentecinq minutes chacune, sont projetées en boucle,
directement sur les murs, à la façon de fresques
italiennes. Un style esthétique, qui pousse le
spectateur à une pratique de la méditation, qui
consiste à concentrer son regard pour aller plus
loin dans la perception d’un sujet.
En 2004, Bill Viola entreprend une collaboration avec le metteur en scène Peter Sellars pour
un nouveau Tristan et Isolde de Richard Wagner,
repris pour la circonstance en avril à l’Opéra
Bastille. Tristan’s Ascension (2005), projetée sur
un grand écran vertical, est également une des
étapes de ce voyage, qui décrit l’ascension de
l’âme dans l’espace après la mort, au moment où
elle se réveille et se trouve emportée par une
chute d’eau. Sur une dalle en pierre repose le
corps d’un homme, une petite pluie tombe qui
devient déluge, le corps se soulève, entraîné par
l’eau puis disparaît en haut de l’écran et peu à
peu la pluie cesse, le calme revient.
Le voyage métaphysique prend tout son sens
dans la troisième et dernière étape. Man Searching
for Immortality/Woman Searching for Eternity
(2013) est un diptyque poignant, dans lequel un
homme et une femme nus semblent avancer vers
nous, une petite lampe à la main, à la recherche de
signes de dégradation sur leur corps, constatant
qu’ils sont toujours en vie, ils éteignent leur lampe
et disparaissent progressivement.
En 2013, Bill Viola crée la série des Water
Portraits, The Dreamers, immergeant des acteurs
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dans un réservoir en plexiglas rempli d’eau. Le
son de l’eau envahit l’espace tandis que la pièce
se remplit progressivement de rêves. Les éléments naturels, le feu et surtout l’eau sont constitutifs de son imaginaire. Mais l’eau a été pour
Bill Viola une expérience particulièrement douloureuse, puisqu’à l’âge de six ans, il faillit se
noyer dans un lac, d’où son oncle l’a tiré in extremis. Il raconte que cette noyade manquée lui a
ouvert la vision d’un monde féerique, qui ne
cesse de le hanter depuis.
Que la vidéo ait acquis ses lettres de noblesse artistiques, la chose est entendue. Et Bill Viola
en est son représentant universel, le plus noble. A
ceux qui doutent de la haute puissance artistique
de ce médium, il leur suffit de faire un tour au
Grand Palais ! Sinon, à partir du 11 avril 2014, le
Musée des Beaux-Arts de Berne a eu l’ingénieuse idée de programmer une exposition de neuf
œuvres de Bill Viola, des années 1977 à 2008,
dans les salles du musée mais aussi à la
Cathédrale de Berne. Les amateurs d’art n’échapperont donc pas ce printemps à la magie des
images de Bill Viola.
Régine Kopp
Grand Palais : Jusqu’au 21 juillet 2014
www.grandpalais.fr
Musée des Beaux-Arts de Berne : du 12 avril au 20 juillet
2014, www.kunstmuseumbern.ch
Bill Viola «The Dreamers» (detail) 2013
installation video sonore, sept ecrans plasma verticaux, quatre canaux stereo, en continu; performeuse :
Madison Corn. Collection Pinault. Photo Kira Perov
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opéra
Zauberflöte de répertoire
La nouvelle production de la Flûte enchantée à la Bastille suscite
l’enthousiasme du public. Il est vrai qu’elle peut séduire, quand bien même, et
pour cela peut-être, elle ne bouleverse rien.
d’unité. Mais la disposition en rang d’oignon étalée sur la vaste largeur de la scène, si elle ne
manque pas d’allure visuellement, ne facilite
guère la cohésion musicale d’un ensemble qui
alors ne saurait constituer un bloc étanche.
Saluons, enfin, le beau geste de Nicolas Joel,
directeur de l’Opéra de Paris, qui prend la parole
en début de soirée pour dédier le spectacle à
Gerard Mortier, son prédécesseur dans la fonction, tristement disparu peu de jours avant.
Pelléas et Butterfly
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Opéra Bastille : «La Flûte enchantée» avec Pavol Breslik (Tamino) et Julia Kleiter (Pamina)
Crédit : Opéra national de Paris / Agathe Poupeney
La mise en scène de Robert Carsen, créée
l’an passé à Baden-Baden, se révèle bien sage.
L’accent est mis sur le message initiatique, faisant défiler des projections de forêts passant par
les quatre saisons, des costumes virant peu à peu
du noir d’ébène au blanc immaculé (bien entendu !), et des situations que le singspiel de Mozart
appelle. La surprise n’est donc pas au rendezvous. Admettons. Ne serait-ce que pour la beauté des images et des éclairages, les plans largement conçus en adéquation avec l’espace de la
Bastille (et du Festspielhaus de Baden).
Musicalement, l’effet serait un peu du même
ordre. Philippe Jordan prend des tempos lents,
dans une sonorité précise mais étale. On est loin
de la vivacité et des couleurs acérées auxquelles
les restitutions baroqueuses nous ont habituées –
et qu’un orchestre conventionnel dans une grande salle n’est pas exactement à même de toujours
assumer. Question d’oreille aussi, pour un auditeur d’aujourd’hui, plus coutumier d’une autre
lecture, plus fraîche peut-être.
Le plateau vocal est quant à lui sans tache,
parfaitement choisi jusqu’au moindre rôle.
Retenons Pavol Breslik, Tamino de beau legato ;
Daniel Schmutzhard, Papageno pétulant et bien
a
placé ; Julia Kleiter, Pamina joliment belcantiste ; et Sabine Devieilhe, Reine de la Nuit qui
s’acquitte sans faillir de sa dangereuse coloratoure. Le seul véritable accroc viendrait du chœur,
que l’on a connu dans de meilleurs jours (surtout
ces derniers temps), manquant ici singulièrement
Pelléas et Mélisande fait son retour à
l’Opéra-Comique, sur les lieux de son baptême,
dans la mise en scène de Stéphane Braunschweig
vue en 2010. Peu de changements côté scénique,
avec ce plateau nu illustré d’un phare, modèle
réduit puis géant, dans une pénombre de circonstance. On note toutefois quelques incongruités,
dont nous n’avions pas souvenir, comme Arkel
sur sa chaise roulante, de laquelle il s’échappe
régulièrement pour vaquer aux quatre coins du
plateau. Musicalement, la grande variante vient
de la direction et de l’orchestre, confiés à Louis
Langrée et à l’Orchestre des Champs-Élysées.
Les timbres, moins nets qu’il y a quatre ans avec
Gardiner et son Orchestre révolutionnaire et
romantique, dispensent néanmoins un joli velouté. Autres changements, dans la distribution
vocale cette fois : Laurent Alvaro triomphe véritablement en Golaud, incarnation pathétique
comme il est peu ; alors que Jérôme Varnier
donne sa dimension caverneuse à Arkel. Phillip
Addis, Karen Vourc’h et Dima Bawab reviennent, ayant encore approfondi leur Pelléas,
Mélisande et (petit) Yniold. Surtout le premier,
Opéra-Comique : «Pelléas et Mélisande» © Opéra-Comique / Elisabeth Carecchio
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Opéra Bastille : «Madama Butterfly», vue d'ensemble © Elisa Haberer / Opéra national de Paris
dont on ne voit guère actuellement de concurrent
pour ce rôle dont l’intensité réside dans sa tessiture ambiguë. Excellente, comme toujours,
Sylvie Brunet, pour Geneviève. En ce lieu consacré entre tous, l’opéra de Debussy se rattache
ainsi plus que jamais à son époque : celle du
vérisme.
Parlant de vérisme, justement, Madama
Butterfly, presque exact contemporain de
Pelléas, n’y verse précisément pas. Par son sujet,
bien plus audacieux que larmoyant, avec le combat (féministe et libertaire) de l’héroïne contre les
conventions ; comme par son traitement, où les
sentiments sont tus, restent intérieurs (sans aucun
des sanglots d’un Golaud !), suggérés par une
musique diaphane mais toujours mélodique. Et
quelle inspiration musicale ! La reprise de la production de Robert Wilson à la Bastille répond à
ces attentes. Sublime ! n’hésitons pas, tout
comme l’œuvre. Un plateau vocal idéal, dominé
par Svetla Vassileva dans un rôle-titre irradiant,
bien secondée par un Teodor Inlicai, Pinkerton de
classe. Et une direction d’orchestre hautement
inspirée, par les mânes du génie de Puccini transmises par un Daniele Callegari investi comme
peu. Quant à la mise en scène, elle constitue, à
l’instar du reste, un des plus beaux moments d’opéra qui soient.
Craintes fondées
Le compositeur Hèctor Parra semble avoir
le vent en poupe. Tout du moins si l’on en juge
par Te craindre en ton absence, sa dernière œuvre
scénique, qui fait courir toute l’intelligentsia
parisienne aux Bouffes du Nord. Mais au compositeur espagnol né en 1976 et établi à Paris, viennent se joindre d’autres noms qui lui disputent la
vedette : la romancière Marie NDiaye, Prix
Goncourt en 2009, Georges Lavaudant, metteur
en scène qu’il n’est plus besoin de présenter,
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ainsi que l’Ensemble Intercontemporain et
l’Ircam. Une espèce de réunion au sommet pour
ce monodrame, ou plutôt “mélologue”, pour
reprendre la terminologie (melólogo) de Tomás
de Iriarte, autre Espagnol, inventeur à la fin du
XVIIIe siècle de cette forme théâtrale qui mêle
musique et texte déclamé par un récitant. La
musique de Parra ne mérite que des éloges, dans
son écriture à la fois complexe, savante et séduisante, sans nulle agression pour les oreilles. Sauf
que la sauce avec la partie déclamée ne prend
pas. En raison essentiellement du texte, prétendument poétique mais bien plutôt incompréhensible. D’un côté, la musique, qui se suffit à ellemême, excellemment transmise par les douze
instrumentistes d’un Intercontemporain scintillant et l’écho vaporeux de la technique électroacoustique (réalisée par Thomas Goepfer), sous
la direction ferme de Julien Leroy ; et de l’autre,
un récit monocorde, assez bien dit par Astrid Bas
mais plaqué. Le plateau de scène se résume pour
sa part à quelques lumières, des citations du texte
projetées et un sol jonché de
plumes. Bien peu, pour un
spectacle qui ne l’est pas exactement.
le du Grand Opéra ne convient pas à Félicien
David (1810-1876), une tentative qu’il ne renouvellera d’ailleurs pas. Mais le quatrième et dernier acte vient (presque) tout racheter, dans une
ardeur véritable, un entremêlement de passions,
de voix et d’orchestre assez saisissant. Cette histoire tarabiscotée de conflit entre chrétiens et
païens dans la Rome antique (avec Satan en personne !), prend alors son sel, dans le prétexte de
la catastrophe annoncée, cette destruction par les
laves de la cité impie. On ne peut, également, que
saluer la peine que se donnent les interprètes :
une Véronique Gens parfaite, comme toujours,
d’une projection nerveuse et intense ; un Edgaras
Montvidas très en voix, ténor qui s’annonce pour
une belle carrière ; un Nicolas Courjal ardent,
tout comme Julien Véronèse ; une Philharmonie
de Bruxelles (dite “ Brussels Philharmonic ”) et
un Chœur de la Radio Flamande de bon aloi. Le
tout sous la battue énergique dont Hervé Niquet
est coutumier. Il n’en reste pas moins, si l’on peut
louer le travail de restauration de la partition par
les soins de l’équipe du Palazzetto Bru Zane, que
l’on se demande s’il valait vraiment la peine de
ressortir de l’oubli un opéra aussi bancal.
Le Villi ou le génie déjà fait
Devant le tout premier opéra de Puccini, on
ne peut qu’être ébahi par la maîtrise, la richesse,
l’invention, la maturité musicale et dramaturgique de ce musicien de 26 ans. On comprend le
flair des puissantes éditions Ricordi, qui n’ont
pas hésité à éditer aussitôt la partition à la création de l’opéra (en 1884), comme la réaction
immédiate de Verdi, dans une lettre célèbre au
jeune compositeur. Mais il est vrai que Le Villi a
tout pour dérouter : son sujet, campé dans une
Allemagne fantastique, avec ses fantômes, ces
Travaux d’hercule
On ne sait, pour cette
résurrection d’Herculanum à
l’Opéra royal de Versailles,
s’il faut admirer ou se lamenter. Car tout commence assez
mal : une musique flonflon
mais tonitruante, un livret
plan-plan qui aligne ses poncifs, pour cet opéra créé en
1859 sur la scène lyrique
impériale et officielle parisienne. À croire que la formu-
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Bouffes du Nord : «Te craindre en ton absence» © Luc Hossepied
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“ Villi ” qui reviennent la nuit châtier les humains
fautifs ; sa découpe, en deux actes brefs (ou un
seul dans la version originale) ; sa musique,
enfin, avec ses échos de Mendelssohn dansants
comme les elfes, la place importante dévolue à
l’orchestre et au chœur, son lyrisme prenant. Au
Théâtre des Champs-Élysées, réparation est
vigoureusement rendue. Le Chœur de Radio
France, puissant et juste, prouve une fois encore
combien il est actuellement au mieux de sa forme
vocale. L’Orchestre national de France lui répond
d’un même élan, rutilant et incisif, sous la
baguette innervée de Luciano Acocella. Les trois
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chanteurs s’acquittent avec brio des trois seuls
rôles : Ermonela Jaho allie sûreté de la projection
à une ligne ductile et à un jeu d’estrade irrésistible (qui imite à la perfection les tics, expression
ravageuse et longues mains croisées sur la poitrine comprises, de la Callas); Àngel Òdena, bien
connu dans le répertoire de la zarzuela, possède
un timbre de baryton aguerri ; et Thiago
Arancam dispense une franchise de ténor clair et
de circonstance.
Chostakovitch lyrique
Pierre-René Serna
Vibrante et vive comme aux jours de cataclys-
chronique des concerts
Festival Présences
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Après une incartade du côté d'Aix-en-Provence et des métissages avec les
musiques méditerranéennes, le festival Présences-Radio France reprend ses
quartiers dans les salles parisiennes.
Cette année, le thème Paris-Berlin célèbre
le cinquantième anniversaire du Traité de l’Élysée. On trouve parmi les compositeurs allemands
des noms aussi divers que Bauckholt, Borowski,
Dohmen, Eggert, Henze, Koch, Lachenmann,
Mainka, Maintz, Mundry, Platz, Poppe, Rihm,
Schneller, Schöllhorn, Schreier, Stahnke,
Thomalla, Weill, Widmann, Zapf et
Zimmermann. Côté français, la représentation ne
faiblit pas avec en première ligne André, Boulez,
Cavanna, Cendo, Combier, Drouin, Hervé, Lévy,
Manoury et Pécou. Rendez-vous phare de la
création contemporaine, il permet de prendre le
pouls musical, à la fois des têtes d'affiche et des
jeunes pousses prometteuses. L'impression générale incline à la confirmation des premiers et un
bilan mitigé du côté des seconds. La musique de
Fabien Lévy (né en 1968) peine à imposer un
style et une pensée. On demeure en deçà du simplement correct, quand il ne s'agit pas tout bonnement d'inculquer au public une leçon lénifiante d'histoire et de morale (Après tout, pour 6
chanteurs et 6 instrumentistes et électronique).
De la même manière, Oliver Schneller (né en
1966) ne se distingue guère d'une modernité déjà
entendue chez Ligeti ou Messiaen. Dans
WuXing/Water, l'influence de Gérard Grisey nous
vaut les meilleurs moments tandis que le clarinettiste et compositeur Jörg Widmann (né en 1973)
trouve dans Elegie (2006) les moyens d'une
musique ardente et dynamique, dans laquelle
a
me guerrier qui l’ont vu naître, telle surgit à
Pleyel la Septième Symphonie dite
“ Leningrad ” (du nom de la bataille), par Valery
Gergiev et son Orchestre du Mariinski. Le
Concerto pour violon n°2 du même
Chostakovitch, forme une première partie de
concert méditative sous l’archet d’Alena Baeva,
propre à préparer la puissance qui va suivre. Ou
quand le lyrisme peut être aussi affaire de voix
des instruments.
Philippe Manoury
l'instrument soliste attire à lui le reste de l'orchestre dans une extraordinaire spirale vertueuse. On
retiendra le concert donné à Pleyel avec un
Philharmonique de Radio-France porté à incandescence par la battue précise et acérée du chef
allemand Peter Hirsch. Au programme, la création française deux mouvements de sa symphonie Nähe fern, hommage explicite à l'art symphonique de Brahms et Richard Strauss. Le flux
orchestral est toujours fermement canalisé et met
à l’œuvre une science de l’orchestration et un
contrepoint de couleurs qui forcent l’admiration.
Le concerto pour deux piano Zones de turbulences de Philippe Manoury est transcendé par l'interprétation
impeccable
du
duo
GrauSchumacher. L'écriture très virtuose contrôle la moindre parcelle de son, composant un portrait sonore d'une rare intensité. La très rare version de chambre de l'opéra Die Soldaten de
Bernd Aloïs Zimmermann est ensuite donnée par
une équipe de chanteurs, tous issus des dernières
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productions majeures de l'ouvrage et déjà entendus à Salzbourg et Zurich. Cette version de
concert, très fragmentaire, a le mérite de rendre
copte de l'extraordinaire tension d'une œuvre
majeure du XXe siècle.
Un tout autre univers nous attend à
Versailles pour l'ouverture de l'année Rameau.
Pour son 250e anniversaire, les programmateurs
ont mis à l'honneur l'œuvre pour clavier du compositeur français. Le clavecin retrouve in loco les
couleurs qui ont fait son succès dans les salons
du Grand Siècle. La virtuosité et l'expressivité de
Kenneth Weiss éclate de mille feux dans un choix
de transcriptions de danses tirées d’opéras célèbres de Rameau (transcriptions dont certaines sont
l'œuvre du claveciniste). On goûte le jeu précis et
les envolées lyriques du musicien américain,
enchaînant les suites des Indes Galantes, Castor
et Pollux, Dardanus et Pygmalion. Le lendemain,
c'est à Blandine Rannou d'enchanter le public
dans la prestigieuse galerie des Cotelle du Grand
Trianon. Les Nouvelles Suites de 1728 expriment
sous ses doigts le génie du style français, baigné
par la rigueur des partitions contemporaines de
Jean-Sébastien Bach. La journée se termine avec
l'ensemble Amarillis, constitué d'interprètes
féminins parmi lesquelles Héloïse Gaillard au
hautbois, Alice Piérot au violon, Marianne
Muller à la viole de gambe et Violaine
Cochard au clavecin. Deux rares cantates, Le
Berger fidèle et Orphée, sont interprétées avec
une fougue élégiaque par le jeune ténor Mathias
Vidal. On oublie rapidement les atours convenus
de ces sujets artificiellement bucoliques. Ces
petits opéras de salon s'accommodent fort bien
d'accents tragiques et cette musique décoche une
série de flèches ardentes à travers des airs
brillants qui laissent s'épancher les passions si
chères au baroque.
David Verdier
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comédie française
Le Songe
d'une nuit d'été
Athènes est en émoi. Rendez vous compte : hermia,
promise à Démétrius par son père Egée refuse cet amour
arrangé et se jette dans les bras de Lysandre. La belle
héléna pendant ce temps soupire d'amour pour
Démétrius et la situation semble dans l'impasse…
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C'est sans compter l'intervention facétieuse des êtres imaginaires qui
rôdent dans les bois enchantés qui environnent la scène. Obéron, le roi des
elfes, ordonne à Puck de cueillir une pensée d'amour, fleur magique dont le
suc répandu sur les yeux d'un personnage pendant son sommeil a la propriété de le faire succomber d'amour pour celui ou celle qu'il aperçoit en ouvrant
les yeux. Malheureusement, le lutin est gaffeur et se trompe de victime,
entraînant une série de confusions, plus hilarantes les unes que les autres.
C'est ce contexte improbable et éminemment réjouissant que la mise en
scène de Muriel Mayette-Holtz souligne avec brio. Le burlesque cède pour
un temps à la réflexion philosophique autour de ces histoires de pollens
aphrodisiaques. Au-delà de la métaphore éclate une vision vivifiante et bon
enfant des rapports amoureux et du jeu de la séduction. Fées et elfes grimacent et se contorsionnent, tandis que Bottom (excellent Jérémy Lopez) est
transformé en âne ithyphallique. Le premier degré du sentiment n'est pas à
confondre avec la vulgarité mais côtoie de manière explicite le fantasme,
donné à voir avec une liberté qui ne distingue pas entre le ludique et
lubrique.
Une faim de théâtre
Les acteurs prennent un plaisir évident à montrer ce qu'il y a de sérieux et de dérisoire dans ses
inclinations dictées par le hasard et les changements
de situations. Cette faim de théâtre dévore littéralement une troupe investie et bien décidée à emporter
le public dans une spirale de bonne humeur.
Mention spéciale au cortège de joyeux drilles dans
l'interlude comique de Pyrame et Thisbé.
L'absurdité du second degré et la parodie baroque
font rire aux larmes. Malgré un décor plutôt froid,
jouant la carte de l'abstraction (la forêt !) et du symbolisme, l'intrigue garde un rythme soutenu.
L'administratrice générale n'hésite pas pour cela à
introduire dans sa mise en scène une bonne dose de
caf'conc, histoire d'entraîner le public dans un
humour parfois potache mais jamais déplacé (les
tics nerveux d'Obéron…). La traduction de
François-Victor Hugo s'accommode parfois de passages improvisés, dans lesquels les acteurs donnent
libre cours à leur imagination du moment.
L'humour pince sans rire de Laurent Lafitte
place son Démétrius au premier rang des amoureux
versatiles, suivi de près par la jolie et zézayante
Adeline d'Hermy (Héléna) qui redéfinit très explicitement ce que le verbe lutiner signifie. Sébastien
Pouderoux (Lysandre) et Suliane Brahim (Hermia)
expriment l'essence d'un badinage avec gestes et
regards obligés, sous l'œil de l'impayable Christian
Hecq en Obéron à la masculinité quasi néandertalienne… Martine Chevallier est une Titania grand
style, parfait contrepoids au Puck intenable et farceur de Louis Arene. Selon la formule consacrée : à
voir et revoir (sans retenue) de 9 à 99 ans.
David Verdier
Comédie Française, Salle Richelieu
Location 01.44.58.15.15
Le Songe d’une nuit d’été jusqu’au 15 juin
«Le Songe d’une nuit d’été» © Christophe Raynaud de Lage
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musée du jeu de paume
Robert Adams
« Le paysage est pour nous l’endroit où nous vivons. De
sorte que si nous en avons fait mauvais usage, nous ne
pouvons pas le rejeter sans nous rejeter nous-mêmes »
Robert Adams
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Né à Orange (New Jersey) en 1937, Robert Adams grandit dans le
Wisconsin, puis dans le Colorado où il réside plus de trois décennies avant
de s’installer en Oregon. Depuis ses débuts en photographie, au milieu des
années 1960, Adams est considéré par beaucoup comme l’un des chroniqueurs les plus importants et les plus influents de l’Ouest américain.
L’exposition « Robert Adams : l’endroit où nous vivons » reflète l’intérêt
ancien d’Adams pour la relation souvent tragique entre l’homme et la
nature ainsi que sa quête d’une lumière et d’une beauté rédemptrices au
sein de paysages dégradés. Ses images se distinguent par leur sobriété et
leur lucidité, mais aussi par un mélange de déploration et d’espoir. Avec
plus de deux cent cinquante tirages choisis parmi vingt et une séries distinctes, cette rétrospective réunit pour la première fois les diverses facettes d’un corpus considérable. Composée et articulée en concertation avec
le photographe lui-même, cette exposition offre un récit intime et cohérent
de l’évolution de l’Ouest des États-Unis à la fin du XXe siècle et au début
du XXIe siècle, mais aussi un regard stimulant sur la complexité et les
contradictions de notre société contemporaine mondialisée. Au cours des
ans, Adams se livre à un plaidoyer saisissant en faveur d’une approche
humaniste de la photographie : Nous faire voir la richesse esthétique de
notre environnement naturel et nous rappeler à notre obligation citoyenne
de le protéger. Banales ou éclatantes, ses images font une juste part à la
complexité et aux contradictions de la vie moderne.
Formé dans les années 60, Robert Adams suit la tradition des beaux
paysages en noir et blanc, surtout de l’Ouest américain, le plus souvent de
petit formats (beaucoup n’excèdent pas 15 x 15 cm), tirages précis réalisés par lui-même. Son travail s’apparente au registre documentaire. Il se
consacre peu à peu à montrer la transformation de l’environnement par
l’activité humaine, en particulier par ses photographies austères et nuancées de l’aménagement suburbain dans le Colorado de la fin des années
1960 et du début des années 1970.
A travers l’exposition, l’on passe d’un lieu à l’autre, de régions pratiquement désertes (les Plaines) et de croisements d’autoroutes, des proliférations commerciales et résidentielles (Summer nights, Colorado) à un
paradis naguère verdoyant, aujourd’hui noyé sous la pollution urbaine
(Printemps de Los Angeles). Ainsi nous sont montrées les relations de plus
en plus dégradées entre l’homme et la nature.
Une vision plus lyrique apparaît dans ses paysages de forêts, de vues
de l’Oregon et de l’Etat de Washington (the Pacific). Néanmoins notre
regard est porté vers le problème de la déforestation du Nord-Ouest
Pacifique (Turning Back, retour en arrière, 1999-2003) puissant cri d’alarme, au plus fort de son œuvre : « Y a-t-il des jours ou des lieux auxquels
on puisse se raccrocher dans notre monde qui se dégrade ? Y a-t-il, en cet
instant, des scènes de la vie dont on n’ait pas à se plaindre ? Y a-t-il matière à éprouver de la joie ou de la sérénité, ne serait-ce qu’occasionnellement ? A-t-on des raisons d’arborer de temps en temps un sourire sans
ironie ? » Robert Adams.
Christine Pictet
Musée du Jeu de Paume. Jusqu’au 18 mai 2014
musée du jeu de paume : la traversée
Mathieu Pernot
Dans une exposition, l’accrochage, lorsque le spectateur
en est inconscient, est déjà important, mais lorsque
celui-ci en tient compte dans son évaluation critique du
travail, il est primordial. C’est cela qui fonctionne à
merveille au jeu de Paume dans l’exposition du travail
de Mathieu Pernot.
En effet, chacune de ses séries est montrée sous forme d’installations.
Chacune complètement différente des autres selon l’option visuelle choisie par l’artiste pour faire passer son message. D’une multiplicité de tout
petits formats taille photomaton à des images géantes, chaque série est sur
le plan scénographique différente voire opposée, mais l’ensemble n’en a
que plus de force.
Le propos général de Mathieu Pernot dans ce qu’il nomme « la traversée » est la vulnérabilité de certaines populations (entre autres les tziganes) à travers des personnages qu’il suit au cours des quelque 20 années
de cette « traversée ». Au départ, une série de photomatons, réalisée entre
1995 et 1997 avec des enfants gitans dans la commune d’Arles, pour s’achever sur leurs portraits pris en 2013 dix-sept ans plus tard. Ces mêmes
Robert Adams
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au théâtre du châtelet
L.A. Dance Project
Le L. A. Dance Project de Benjamin Millepied était de retour
à Paris et sur la scène du Châtelet du 5 au 8 mars 2014.
Installé à Los Angeles, ce collectif artistique associe des
compositeurs, des plasticiens et des danseurs issus de grandes
compagnies américaines ou canadiennes. La première édition
proposait des classiques de la danse contemporaine –
Cunningham, Forsythe -, le programme de cette année
comporte trois pièces récentes dont une création mondiale.
Mathieu Pernot
personnages se retrouvent dans la série Les Hurleurs : une grande installation où les sujets ont l’air de s’interpeller d’un cadre à l’autre. Dans tous
les cas, ce nomadisme d’images et de sujets souligne un souhait d’éviter
un récit de l’histoire à sens unique.
Toute l’exposition nous parle des problèmes de la société contemporaine :
Des migrations et de l’exil: Les Migrants, simples formes étendues
sur le sol tels des gisants, doublé des Cahiers afghans, pages de cahiers de
récits d’un réfugié exilé en France.
De l’urbanisme incluant Implosions : suivi de la démolitions de
grands ensembles de banlieues s’écroulant dans des nuages de poussière,
magnifiques tirages exprimant une volonté de faire table rase de tout un
pan de notre mémoire. Le Meilleur des mondes : cartes postales agrandies
des grands ensembles dont les trente glorieuses étaient si fières; les
Fenêtres : sur fond de ruines modernes, les paysages presque romantiques
apparaissent tels des trompe-l’œil.
De l’enfermement, dans Panoptique : espaces vides de prisons désaffectées. Et surtout dans Un camp pour les bohémiens où à partir de documents du Centre d’Histoire de la Résistance et de la Déportation à Lyon,
et des Archives départementales des Bouches-du-Rhône, l’auteur retrace
l’origine et le fonctionnement du camp pour les bohémiens (1930-1942) :
il retrouve quelques internés et confronte leurs souvenirs avec les archives
produites par l’administration de l’époque.
Et finalement, dans la série Le Feu, produite spécialement pour l’exposition, Mathieu Pernot remet en scène un rituel pratiqué chez les Roms
qui consiste à faire brûler la caravane d’un défunt.
Christine Pictet
Musée du Jeu de Paume. Jusqu’au 18 mai 2014
Mathieu Pernot, né en 1970 à Fréjus, vit et travaille à Paris. Après des
études d’histoire de l’art à la faculté de Grenoble, il entre à l’École nationale de la photographie d’Arles, d’où il sort diplômé en 1996.
Son œuvre s’inscrit dans la démarche de la photographie documentaire mais en détourne les protocoles. Il écrit : « Il y a une question spécifiquement photographique dans le fait de montrer des populations vivant à
la marge. Comment photographier les “invisibles”, comment faire une
image de ceux qui revendiquent une forme d’opacité ? Comment inscrire
ces images à la fois dans l’histoire de la photographie et dans celle de ces
communautés invisibles ». Mathieu Pernot, Les Prisons photographiques.
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La soirée démarre par Morgan’s last chug d’Emanuel Gat. Les danseurs
courent, sautent, virevoltent. Chacun joue sa partie avec virtuosité mais sans
que quelque chose se passe vraiment sur scène. Une pièce sans grande surprise où tous les codes du chorégraphe israélien sont présents. Ceux qui
l’apprécient, apprécieront sans doute. Changement d’ambiance avec
Peripheral stream, première mondiale d’Hiroaki Umeda. Artiste venu à la
danse après des études de photographie, Hiroaki Umeda propose une œuvre
conceptuelle originale. Vêtus de noir, les danseurs évoluent sur scène au
milieu d’une projection vidéo qui enveloppe le sol et le fond de la scène. Les
ronds concentriques et les lignes droites projetées, noirs et blancs forcément,
sculptent l’espace et jouent avec notre rétine. Dans cet espace géométrique
obsédant, les danseurs se livrent à un bel exercice de style néoclassique.
Peripheral stream est une œuvre d’art
vivante qui aurait toute sa place dans
un musée. D’ailleurs, l’un des projets
de Benjamin Millepied est de sortir le
ballet des salles et de le présenter dans
des environnements inhabituels.
Troisième œuvre présentée,
Closer est un classique de Benjamin
Millepied. Sur Mad Rush, solo pour
piano de Philip Glass, un couple nous
emporte pour vingt minutes de passion
amoureuse. Avec ses portés d’une
grande harmonie, ce pas de deux est
une variation sur l’attirance. La
musique répétitive souligne la force de
l’amour de ces deux êtres qui se retrouvent immuablement après la séparation. Benjamin Millepied montre son
talent de chorégraphe avec des enchaînements impeccablement fluides. La
«Peripheral stream».
Photo MN Robert
soirée s’achève avec Murder ballades
de Justin Peck, créé, tout comme
Morgan’s last chug, en septembre dernier à la Maison de la danse de Lyon.
Justin Peck est actuellement soliste au New York City Ballet. Ce ballet pour
six danseurs est plein d’énergie et de couleurs, avec pour toile de fond les
écrans du plasticien Sterling Ruby. Les scènes de groupe où références classiques et gestuelle contemporaine se mêlent sont bien enlevées. La relève de
George Balanchine et de Jérôme Robbins semble assurée.
Stéphanie Nègre
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Chronique musicale d’avril 2014
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Malgoire et réglé par Christian Schiaretti avec
L'Opéra Bastille reprend une nouvelle fois,
Juan-Antonio Sanabria (Almaviva), Sergio
et nous ne nous en plaindrons pas, la merveilleuGallardo (Bartolo), Joan Martín-Royo (Figaro),
se production de Tristan und Isolde réalisée en
Ruth Rosique (Rosine), Marie-Camille Vaquié
2005 par Peter Sellars et le vidéaste Bill Viola du
(Berta), La Grande Ecurie et la Chambre du Roy,
8 avril au 4 mai : à cette occasion, Philippe
l'Ensemble Vocal de l’Atelier Lyrique de
Jordan sera dans la fosse et dirigera Robert Dean
Tourcoing.
Smith (Tristan) et Violeta Urmana (Isolde), qui
Les 2 et 3 avril l’Orchestre de Paris dirigé
aura du mal à faire oublier Waltraud Meier,
par Paavo Järvi jouera Salle Pleyel, Webern,
légendaire Isolde en 2005 et en 2008, entourés
Beethoven et Mahler avec Radu Lupu au piano
par Franz Josef Selig (Marke), Jochen
et la soprano Katija Dragojevic. Le 11, place à
Schmeckenbecher (Kurwenal) et Janina Baechle
l’Orchestre Philharmonique de Radio France et à
(Brangäne), orchestre et chœur de l'Opéra natioson chef Myung-Whun Chung qui dirigera la
nal.
Symphonie n° 2 «Résurrection» de Mahler avec
Du 24 avril au 23 mai, reprise de l'inusable
les voix de Christina Landshamer (soprano) et
production des Capulets et des Montaigus de
de Marie-Nicole Lemieux (contralto). Le 15
Bellini conçue par Robert Carsen, avec au pupiplace à l’Amsterdam Baroque Orchestra & Choir
tre Bruno Campanella et une distribution renouet à Ton Koopman qui conduira Hana Blažíková,
velée : Paul Gay (Capellio), Ekatrina Siurina
Maarten Engeltjes, Tilman Lichdi, Jörg
Katija Dragojevic © Emelie Joenniemi
(Giulietta), Karine Deshayes (Romeo) et Charles
Dürmüller, Klaus Mertens et Falko Hönisch dans
Castronovo (Tebaldo).
La Passion selon saint Matthieu de Bach. Le Chœur et l’ensemble
Le cycle Convergence se poursuivra le 3 avril avec Die Schöne orchestral les Arts Florissants placés sous la direction de Paul Agnew
Müllerin de Schubert chantée par le ténor Pavol Breslik accompagné par interpréteront le 19 un plein programme Purcell. A ne pas manquer le 27,
le pianiste Ami Katz (Amphithéâtre). Puis la mezzo Janina Baechle Leylâ et Majnûn ou l'Amour mystique, Oratorio mundi de Armand Amar,
accompagnée par Markus Hadulla (piano) exploreront le domaine de la avec Nacer Khemir (conteur), le chef Didier Benetti et les chanteurs
nuit, en suivant un parcours inédit à travers le lied (Schubert, Schumann, Gombodorj Byambajargal, Enkhajargal Dandarvaanchig, Salar Aghili, et
Mendelssohn, Wolf, Berg, Pfitzner…), la mélodie française (Gounod, Ariana Vafadari, une curiosité.
Hahn, Debussy, Ravel, …) et russe (Moussorgski, Silvestrov) le 14 avril.
Les 5, 6 et 7 avril le public pourra découvrir à l’Opéra-Comique le
Enfin le 23, Nicolas Stavy (Piano), Andrea Soare (Soprano), Julie nouveau spectacle de Jacques Osinski dirigé par Marc Minkowski à la tête
Pasturaud (Mezzo-soprano) et le Chœur de
des Musiciens du Louvre-Grenoble et chol’Opéra national de Paris sous la baguette de
régraphié par Jean-Claude Gallotta, dipPatrick Marie Aubert interpréteront Les
tyque composé de L’Histoire du Soldat de
Chansons normandes et Les Heures dolenStravinsky avec le récitant Johan Leysen,
tes de Gabriel Dupont et La Damoiselle
Alexandre Steiger (Le Soldat), Arnaud
élue de Debussy.
Simon (Le Diable), suivi de L’amour sorSur la scène du TCE le 6 avril, retour
cier de De Falla, avec Olivia Ruiz dans le
du ténor Rolando Villazón accompagné par
rôle de Candelas.
le Kammerorchesterbasel dirigé par Florian
Récital Brahms à l’Auditorium du
Donderer dans un programme d'airs de
Musée d’Orsay le 10 avril avec une exécuconcert de Mozart (Cycle Les Grandes
tion de Die schöne Magelone, par le baryton
Voix). Opéra à partir du 7, avec l'Otello de
Edwin Crossley-Mercer et le récitant Luc
Rossini qui inaugurera le Festival Rossini :
Schiltz, avec au piano Eric Schneider.
Jean-Christophe Spinosi dirigera l'Ensemble
Sur la scène du Châtelet, 4ème producEdwin Crossley-Mercer © Julien Benhamou
Matheus, Moshe Leiser et Patrice Caurier
tion d’une œuvre de Stephen Sonheim du
assureront la reprise de leur mise en scène, tandis que la distribution sera 1er au 12 avril, avec Into the woods comédie musicale tirée de Cendrillon,
tenue par John Osborn (Otello), Cecilia Bartoli (Desdemona), Edgardo dirigée par David Charles Abell, mise en scène par Lee Blakeley avec
Rocha (Rodrigo), Barry Banks (Iago), Peter Kalman (Elmiro) et Liliana dans le rôles principaux Kimy Mc Laren (Cendrillon), Leslie Clack (Le
Nikiteanu (Emilia) ; dernière le 17 avril. Le 8, Jonas Kaufmann passera narrateur) et Nicholas Garrett (Le boulanger) et les musiciens de
par Paris pour chanter Die Winterreise de Schubert avec Helmut Deutsch, l’Orchestre de Paris. Le 9 avril, récital de la soprano June Anderson
un récital Les Grandes voix. Le 24, le 80ème anniversaire de l'Orchestre accompagnée par Jeff Cohen : au programme une sélection d’airs et de
National de France permettra d'enten-dre Daniele Gatti diriger Oedipus mélodies de Fauré, Debussy, Poulenc, Gershwin, Kern et Weill.
Rex de Stravinsky avec Nikolaï Andrei Schukoff (Œdipus), Sonia Ganassi
A l’Opéra Royal du Château de Versailles le 5 avril, exécution
(Jocaste), Georg Zeppenfeld (Tirésias), Benjamin Bernheim (Le Berger), concertante de Tamerlano de Haendel par Xavier Sabata (Tamerlano),
John Relyea (Créon, Le Messager) et Pierre Arditi (récitant), précédé par Max Emanuel Cencic (Andronico), John Mark Ainsley (Bajazet), Sophie
Métaboles de Dutilleux. Puis enfin les 28 et 29 avril, suite du Festival Karthäuser (Asteria), Ruxandra Donose (Irene), Pavel Kudinov (Leone),
Rossini avec Le Barbier de Séville placé sous la direction de Jean-Claude l’ensemble Il Pomo d’Oro dirigé par Maxim Emelyanychev.
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à l’opéra de paris
hommage
Birgit Cullberg et Agnes De Mille sont deux pionnières de la danse
du 20ème siècle. L’Opéra de Paris leur rendait hommage du 21
février au 13 mars avec deux tragédies, Mademoiselle Julie de la
première qui fait son entrée au répertoire, et Fall river legend de la
seconde.
«Pelléas et Mélisande» à l'Opéra Comique en juin 2010
© Elisabeth Carecchio
La Salle Gaveau recevra le 29 avril la soprano Sabine
Devieilhe et les musiciens de l’ensemble Les Ambassadeurs
dirigé par Alexis Kossenko pour un programme Rameau et
Vivaldi.
Ailleurs en France : Tours redonne sa chance à Bérénice
de Magnard dans une mise en scène d'Alain Garichot avec
Jean-Yves Ossonce à la baguette (4 au 8 avril).
Vu et entendu : somptueuse reprise de la production de
Pelléas et Mélisande signée Stéphane Braunschweig à l'Opéra
Comique le 17 février, avec le couple originel Phillip Addis et
Karen Vourc'h rejoint par Laurent Alvaro, spectaculaire
Golaud couvés par un Louis Langrée exceptionnel.
Agnes De Mille a grandi à Hollywood entre un père dramaturge et un oncle, Cecil
B. De Mille, réalisateur. Chorégraphe de formation académique, elle va créer aussi bien
des comédies musicales pour Broadway que des pièces classiques pour l’American
Ballet Theatre. Œuvre Créée en 1948, Fall River Legend raconte l’histoire d’une jeune
fille de bonne famille accusée du meurtre à la hache de son père et de sa belle-mère. Le
ballet utilise le principe du retour en arrière avec une première scène montrant l’accusée devant la potence. Le déroulé du drame qui la conduira à commettre l’irréparable
s’enchaîne ensuite. Au milieu de ce huis clos dramatique, quelques scènes de fêtes
populaires reprennent les codes du cabaret et sont des bouffées d’oxygène. L’intérêt du
ballet repose pour beaucoup sur l’interprétation de l’héroïne. Laëtitia Pujol est remarquable. Elle réussit à faire passer la souffrance de la petite fille persécutée mais aussi la
fascination pour la violence, d’abord intériorisée puis libérée.
Créé en 1950, Mademoiselle Julie s’inspire directement de la pièce d’August
Strindberg. Son auteur, Birgit Cullberg est une grande dame de la danse européenne,
formée chez Kurt Joos et mère de Mats Ek. Mademoiselle Julie est son premier grand
succès. Elle joue sur
les codes de la danse
classique pour ce
ballet où la psychologie est très présente.
Aurélie Dupont est
une Julie de grande
classe, jeune héritière
fière et provocante
puis femme humiliée. Nicolas Le
Riche qui incarne
Jean, le domestique
Aurelie Dupont et Nicolas Le Riche dans «Mademoiselle Julie»
séducteur, n’est pas
© Anne Deniau / Opéra national de Paris
en reste et livre une
performance exceptionnelle à quelques mois de la retraite. Besogneux avec ses maîtres,
il se libère parmi les paysans. Leurs jeux de séduction dans la cuisine est plein de
suspens. Tour à tour victimes et bourreaux, ils donnent vie à ce fait divers d’une société figée dans ces codes.
François Lesueur
Stéphanie Nègre
La danse en avril
L’Opéra de Paris propose, du 18 au 22 avril, les soirées Jeunes danseurs qui permettent de découvrir les membres du corps de ballet dans des extraits de répertoire
habituellement dévolus aux premiers danseurs ou aux étoiles.
Au Théâtre de la ville, trois affiches retiennent l’attention : D’après une histoire vraie de Christian Rizzo du 9 au 11 avril, Booty lootin de Wim Vandekeybus du
14 au 25 avril et Vortex temporarum de Anne-Teresa de Keersmaeker avec l’ensemble musicale Ictus.
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Au Théâtre de Chaillot, le mois débute avec, du 3 au 5 avril, Penthésilées…, de
Catherine Diverres, et se poursuit avec, du 9 au 18 avril, Cendrillon de Thierry
Malandain par le Ballet Biarritz (voir Scènes magazine n°255).
Le Théâtre des Gémeaux, à Sceaux, invite le CCN La Rochelle avec The Roots
de son directeur Kader Attou le 29 et 30 avril.
Stéphanie Nègre
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ANTOINE (01.43.38.74.62)
Le Bossu de Notre-Dame de et
m.e.s. Olivier Solivérès - jusqu’au 25
avril
ARTISTIC ATHÉVAINS
(rés. 01.43.56.38.32)
u Chat en poche de Feydeau - m.e.s.
Anne-Marie Lazarini - jusqu’au 27 avril
u L'homme Atlantique de Marguerite
Duras - m.e.s. et jeu Viviane
Théophilidès - du 14 avril au 11 mai
ATELIER (loc. 01.46.06.49.24)
u Femme non-rééducable de Stefano
Massini - Mémorandum théâtral sur
Anna Politkovskaïa - m.e.s. Arnaud
Meunier - jusqu’au 28 mai
ATHÉNÉE - LOUIS-JOUVET
(loc. 01.53.05.19.19)
u Le Faiseur de théâtre de Thomas
Bernhard - m.e.s. Julia Vidit - jusqu’au 12 avril
BOUFFES DU NORD
(loc. 01.46.07.34.50)
u The Valley of Astonishment - m.e.s.
Peter Brook et Marie-Hélène
Estienne - du 29 avril au 31 mai
CARTOUCHERIE - THÉÂTRE DE
L’ÉPÉE DE BOIS
(loc. 01.43.28.36.36)
u Lear, Conte à rebours de Philippe
Dormoy - m.e.s. Hassane Kassi
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Kouyaté - du 1er au 13 avril
COLLINE (rés. 01.44.62.52.52)
u Liliom de Ferenc Molnár - m.e.s.
Galin Stoev - jusqu’au 4 avril
u Une femme de Philippe Minyana m.e.s. Marcial Di Fonzo Bo - jusqu’au
17 avril
COMÉDIE DES CHAMPS-ÉLYSÉES
(01.53.23.99.19)
u Ensemble et séparément de
Françoise Dorin - m.e.s. Stéphane
Hillel - avec Jean Piat et Marthe
Villalonga - jusqu’au 13 avril
COMÉDIE FRANÇAISE
SALLE RICHELIEU (01.44.58.15.15)
u Un chapeau de paille d’Italie
d’Eugène Labiche - m.e.s. Giorgio
Barberio Corsetti - jusqu’au 13 avril
u Andromaque de Jean Racine m.e.s. Muriel Mayette-Holtz - jusqu’au 31 mai
u Le Songe d’une nuit d’été de
Shakespeare - m.e.s. Muriel MayetteHoltz - jusqu’au 15 juin
u Le Misanthrope de Molière - m.e.s.
Clément Hervieu-Léger - du 12 avril
au 17 juillet
STUDIO-THÉÂTRE (01.44.58.98.98)
u L’île des esclaves de Marivaux m.e.s. Benjamin Jungers - jusqu’au
13 avril
VIEUX-COLOMBIER (01.44.39.87.00)
Othello de Shakespeare - m.e.s.
Léonie Simaga - du 23 avril au 1er
juin
GUICHET MONTPARNASSE
(01.43.27.88.61)
u Lettre d'une inconnue de Stefan
Zweig - m.e.s. William Malatrat - jusqu’au 5 avril
LA REINE BLANCHE
(http://www.theatreonline.com)
u Le bal des crapules de Luc
Chaumar - m.e.s. Corinne Boijols jusqu’au 14 juin
LE CENTQUATRE (01.42.33.09.92)
u L'Art de la fugue de et m.e.s.
Yoann Bourgeois - du 8 au 12 avril
NOUVEAUTÉS (01.47.70.52.76)
u Le Placard de et m.e.s. Francis
Veber - avec Elie Semoun et Laurent
Gamelon - jusqu’au 29 juin
ODÉON EUROPE (01.44.85.40.40)
ATELIERS BERTIER
u Tartuffe de Molière - m.e.s. Luc
Bondy - jusqu’au 6 juin
PÉPINIÈRE THÉÂTRE
(01.42.61.44.16)
u Le cercle des illusionnistes de et
m.e.s. Alexis Michalik - jusqu’au 3
mai
u
POCHE-MONTPARNASSE
(01.45.48.92.97)
u État de siège de Albert Camus m.e.s. Charlotte Rondelez - jusqu’au
27 avril
u Histoires d'hommes de Xavier
Durringer - m.e.s. Christophe
Luthringer - jusqu’au 27 avril
ROND-POINT (0.892.701.603)
u Paroles gelées d’après Rabelais m.e.s. Jean Bellorini - jusqu’au 4 avril
u Occident de Rémi De Vos - m.e.s.
Dag Jeanneret - jusqu’au 6 avril
u Love and Money - de Dennis Kelly m.e.s. Blandine Savetier - jusqu’au 6
avril
u Golgota - spectacle de Bartabas du 14 avril au 11 mai
THÉÂTRE LABORATOIRE
(01.43.40.79.53)
u L’Adieu à l’Automne de Jon Fosse
- m.e.s. Elizabeth Czerczuk - jusqu’au 12 avril
TRISTAN BERNARD
(01.45.22.08.40)
u Mangez-le si vous voulez de Jean
Teulé - m.e.s.
Jean-Christophe
Dollé, Clotilde Morgiève - jusqu’au
30 avril
Odéon - Théâtre de l’Europe / Berthier 17e
Tartuffe
Après avoir signé il y a peu une adaptation de «Tartuffe» en version allemande qui a rencontré beaucoup de succès au printemps 2013 à Vienne, Luc Bondy
revient aujourd'hui à l'original pour explorer les mécanismes intimes, familiaux et sociaux qui rendent possible le succès de l'imposture, tout en nous mettant sous
les yeux, entre farce et terreur, le portrait génial d'un
incroyable aveuglement.
Quelle mouche a piqué ce bon monsieur Orgon ?
Et qu'est-ce donc qui irrite à ce point madame Pernelle,
sa vénérable mère ? Car elle est furieuse et le fait savoir.
D'Elmire, sa nouvelle belle-fille, jusqu'à ses petitsenfants et à la fidèle servante Dorine, tout le monde en
prend pour son grade. Tous, à en croire la mégère, tous
sans exception sont pourris de vices bien peu chrétiens.
Pire encore, ils se refusent à reconnaître les vertus du
bon Tartuffe et à profiter des conseils du saint homme...
Mais au fait, qui est-il, ce monsieur Tartuffe ? Que
veut-il, que vaut-il ?
Nul doute que Luc Bondy saura rendre toute la
saveur du verbe de Molière pour le plus grand plaisir
des spectateurs.
. A voir jusqu’au 6 juin 2014
«Tartuffe», photo de répétition © Thierry Depagne
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Location 01.44.85.40.40 ou sur le site du théâtre
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Musée Jacquemart-André
De Watteau à Fragonard, les « Fêtes galantes »
La peinture française du XVIIIe siècle et ses maîtres sont à l’honneur au Musée Jacquemart-André. Le temps de l’insouciance y est célébré grâce à la réunion d’une soixantaine d’œuvres, essentiellement des peintures provenant d’importantes collections, le plus souvent publiques, françaises, allemandes, anglaises ou encore américaines.
Le terme de « fête galante » désigne un genre pictural qui éclôt au début du XVIIIe siècle, pendant la Régence (1715-1723), autour de la figure emblématique de Jean-Antoine Watteau (1684-1721). Dans des décors champêtres à la végétation luxuriante, Watteau met en scène le sentiment amoureux : danseurs,
belles dames ou bergers s’adonnent à des divertissements ou à des confidences.
À la suite du maître, Nicolas Lancret (1690-1743) et Jean-Baptiste
Pater (1695-1736) s’approprient les codes de la fête galante, qu’ils font
évoluer. Ils ancrent ces scènes imaginaires dans la réalité en y reproduisant des lieux, des œuvres d’art ou des détails aisément reconnaissables par leurs contemporains. Les artistes les plus créatifs, comme
François Boucher (1703-1770) et Jean-Honoré Fragonard (17321806), donneront à leur tour une vision très personnelle des plaisirs de
la fête galante. La poésie et la légèreté qui se dégagent de leurs œuvres
s’accompagnent d’une recherche d’élégance et de raffinement propres
à l’esprit rococo qui s’épanouit au siècle des Lumières, maniant avec
brio les lignes courbes et les couleurs claires.
Nicolas Lancret (1690-1743) «Baigneuses et spectateurs dans un paysage (Les Plaisirs du bain)»
Avant 1725, huile sur toile, 97 x 145 cm. Paris, Musee du Louvre, Departement des peintures,
collection du baron Edmond de Rothschild (1926-1997); dation en paiement de droits de mutation, 1990 © RMN-Grand Palais (musee du Louvre) / Jean-Gilles Berizzi
Bibliothèque Nationale
l DESSINS FRANÇAIS DU XVIIE SIÈCLE.
Collections du département des
Estampes et de la photographie
– jusqu’au 15 juin
Centre Pompidou
l HENRI CARTIER-BRESSON – jusqu’au
9 juin
l BERNARD TSCHUMI, RÉTROSPECTIVE –
du 30 avril au 28 juillet
Cité du cinéma, St.Denis
l STAR WARS IDENTITIES – jusqu’au
30 juin
Ecole sup. des beaux-arts
l LE PAYSAGE À ROME ENTRE 1600 ET
1650 – jusqu’au 2 mai
Fondation Cartier pour l’art
contemporain
l AMÉRICA LATINA 1960-2013, photographies – jusqu’au 6 avril
Fondation Custodia
l DE BOSCH À BLOEMAERT : Dessins
néerlandais des XVe et XVIe s. du
Museum Boijmans Van Beuningen
de Rotterdam – jusqu’au 22 juin
Grand Palais
l BILL VIOLA – jusqu’au 21 juillet
l MOI, AUGUSTE, EMPEREUR DE ROME
– jusqu’au 13 juillet
l ROBERT MAPPLETHORPE – jusqu’au
13 juillet
a
g
Hôtel de Ville
l XX – jusqu’au
Institut du Monde arabe
l « VOUÉS À ISHTAR. SYRIE, JANVIER
1934, ANDRÉ PARROT DÉCOUVRE
MARI » – jusqu’au 4 mai
Jeu de Paume
l ROBERT ADAM - L’endroit où nous
vivons – jusqu’au 18 mai
l MATHIEU PERNOT - La Traversée –
jusqu’au 18 mai
La Maison Rouge
l IL ME FAUT TOUT OUBLIER - Berlinde
de Bruyckere et Philippe
Vandenberg – jusqu’au 11 mai
l L’ASILE DES PHOTOGRAPHIES Mathieu Pernot et Philippe
Artières – jusqu’au 11 mai
Maison de l'Amérique latine
l GEGO. POÉTIQUE DE LA LIGNE, coll.
Mercantil, Venezuela – jusqu’au
14 mai
Maison de Victor Hugo
l L’ÂME A-T-ELLE UN VISAGE ?
L’Homme qui rit, de Gwynplaine
au Joker – du 17 avril au 31 août
Musée des arts décoratifs
l SECRETS DE LA LAQUE FRANÇAISE : LE
VERNIS MARTIN – jusqu’au 8 juin
l DE LA CHINE AUX ARTS DÉCORATIFS
– jusqu’au 29 juin
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Le thème de la fête galante a tout naturellement trouvé sa place au
Musée Jacquemart-André, dont la collection de peintures françaises du
XVIIIe siècle, réunies par Nélie Jacquemart et Édouard André, est l’un
des joyaux.
. Jusqu’au 21 juillet 2014
Musée Cernuschi
l OBJECTIF VIETNAM - Photos de
l’Ecole française d’ExtrêmeOrient – jusqu’au 29 juin
Musée Cognacq-Jay
l LE TRAIT EN LIBERTÉ : FRANÇOISANDRÉ VINCENT, DESSINS (1746 1816) – jusqu’au 29 juin
Musée Dapper
l INITIÉS, BASSIN DU CONGO &
MASQUES DE ROMUALD HAZOUMÈ –
jusqu’au 6 juillet
Musée Jacquemart-André
l DE WATTEAU À FRAGONARD, LES
FÊTES GALANTES – jusqu’au 21 juillet
Musée du Louvre
l NEW FRONTIER III - Portraits
anglo-américains à l’heure de la
Révolution – jusqu’au 28 avril
l LE CIEL EST PAR-DESSOUS LE TOIT…
Dessins pour les plafonds parisiens du Grand Siècle – jusqu’au
19 mai
l LE TRÉSOR DE L’ABBAYE DE SAINTMAURICE D’AGAUNE – jusqu’au 16
juin
Musée du Luxembourg
l JOSÉPHINE – jusqu’au 29 juin
Musée Maillol
l LE TRÉSOR DE SAN GENNARO – jusqu’au 20 juillet
d
a
Musée Marmottan-Monet
l LES IMPRESSIONNISTES EN PRIVE. 100
chefs-d’œuvre de collectionneurs
– jusqu’au 6 juillet
Musée de l’Orangerie
l LES ARCHIVES DU RÊVE, DESSINS DU
MUSÉE D'ORSAY : CARTE BLANCHE À
WERNER SPIES – jusqu’au 30 juin
Musée d’Orsay
l GUSTAVE DORÉ (1832-1883) – jusqu’au 11 mai
l VINCENT VAN GOGH / ANTONIN
ARTAUD. LE SUICIDÉ DE LA SOCIÉTÉ –
jusqu’au 6 juillet
Musée Rodin
l MAPPLETHORPE / RODIN – du 8
avril au 21 septembre
Musée Zadkine
l VOYAGE DANS L'ANCIENNE RUSSIE –
jusqu’au 13 avril
Petit Palais
l CARL LARSSON - L’imagier de la
Suède – jusqu’au 7 juin
l PARIS 1900, LA VILLE SPECTACLE –
Du 2 avril au 17 août
Petit de Tokyo
l L’ÉTAT DU CIEL [partie 1] – jusqu’au
7 septembre.
Pinacothèque
l LE MYTHE CLÉOPÂTRE – dès le 10
avril
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m é m e n t o
GENEVE
concerts
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u 2.4. : Série Répertoire. OSR, dir.
Manfred Honeck (Mahler). Victoria
Hall à 20h (Tél. 022/807.00.00 /
[email protected])
u 3.4. : Concert de soirée No. 5.
PÂQUES. L’OCG, dir. Arie Van Beek,
Joëlle-Aurélie Masson, soprano,
Nora Sourouzian, alto, Benoît Capt,
baryton, Jérémie Brocard, basse,
Chœur Laudate Deum (Martin).
Cathédrale de Genève à 20h (loc.
022/807.17.90 / [email protected]
ou www.ticketportal.com)
u 3.4. : Série Grands Classiques.
OSR, dir. Manfred Honeck (Mahler).
Victoria Hall à 20h (Tél.
022/807.00.00 / [email protected])
u 5.4. : GLI ANGELI GENÈVE & MAÎTRISE
DU CONSERVATOIRE POPULAIRE DE
MUSIQUE DE GENÈVE, dir. Stephan
MacLeod. Avec Werner Güra, ténor,
Tobias Berndt, basse, Aleksandra
Lewandowska et Maria Cristina
Kiehr sopranos, Meg Bragle et
Pascal Bertin altos, Emiliano
Gonzalez Toro et Valerio Contaldo
ténors, Stephan MacLeod et
Matthew Brook basses (JS Bach,
Passion selon saint Matthieu BWV
244. Victoria Hall à 19h30 (loc.
Espace Ville de Genève, Grütli,
Genève Tourisme, Cité Seniors,
Centrale Billetterie T 0800 418 418)
u 6.4. : CANTABILE MA NON TROPPO.
Salomé Kammer, soprano & Solistes
de l’Ensemble Contrechamps (Rihm,
Lachenmann, Ferneyhough). Musée
d’art et d’histoire de Genève à 11h
(billetterie ouverte 45 min. avant le
concert / ou rés. sur : www.contrechamps.ch/)
u 9.4. : Hors-Série. L'OCO-MOTION
POP & PLUG. L’OCG, dir. Philippe
Béran (Chansons françaises et anglosaxonnes). Victoria Hall à 19h (loc.
022/807.17.90 / [email protected]
ou www.ticketportal.com)
u 10.4. : Concert Prestige n°4. LA
VOIX D'UN ANGE. Geneva Camerata,
dir. David Greilsammer, Andreas
Scholl, contreténor (Mendelssohn,
Boccherini, Johann Christian Bach,
Porat, Haendel). BFM à 20h (loc.
www.genevacamerata.com
ou
FNAC)
u 11.4. : Les Grands Interprètes.
MURRAY PERAHIA, piano (Bach,
Beethoven, Schumann, Chopin).
Victoria Hall à 20h (Service culturel
Migros, 022/319.61.11, Stand Info
Balexert, Migros Nyon-La Combe)
u 13.4. : Festival Vernier Classique.
QUATUOR DE GENÈVE & DIDIER PUNTOS,
piano (Haydn - Quatuor à cordes
opus 76 n°5 / Janacek - Quatuor no.
1 «Sonate à Kreuzer» / Dvorak Quintette avec piano opus 81). Salle
des Fêtes du Lignon à 16h
u Dimanche 13.4. : Amarcordes.
MICHEL KIENER, clavecin ( JS Bach,
Intégrale des Partitas pour clavecin
II). Château de Dardagny 18h (réservation sur : www.amarcordes.ch/)
u 13.4. : Musique sur Rhône.
ENSEMBLE DE MUSIQUE DE CHAMBRE DE
L’OSR (Leclair, Fasch, Couperin,
Zelenka). BFM, salle Théodore
Turettini à 11h (Tél. 022/807.00.00 /
[email protected])
u 14.4. : Concert Prestige n°4. LE
MINOTAURE, Michel Derville, récitant
(Kapsberger, Sciarrino, Gesualdo,
Vivaldi, Couperin, Comas ). Comédie
de Genève à 19h30 (loc. www.genevacamerata.com ou FNAC)
u 15.4. : HOMMAGE À EMMANUEL
NUNES. Ensemble Contrechamps, dir.
Clement Power. Isabelle Magnenat,
violon (Nunes, Amaral). Studio
Ernest-Ansermet à 20h / 19h : préconcert (billetterie ouverte 45 min.
avant le concert / ou rés. sur :
www.contrechamps.ch)
u mardi 15.4. : Jazz Classics.
ABDULLAH IBRAHIM NEW TRIO. Victoria
Hall à 20h30 (loc. 0900.800.800 /
Ticketcorner)
u 16.4. : Les Grands Interprètes.
TRIO ZIMMERMANN. Conservatoire de
Musique à 20h (loc. Service culturel
Migros Genève, Stand Info Balexert,
Migros Nyon-La Combe)
u 17.4. : K&K PHILHARMONIKER, K&K
OPERNCHOR, dir. Georg Kugi (les plus
beaux chœurs d’opéra). Victoria Hall
à 20h (loc. Ticketcorner, T 0900 800
800, La Poste, Manor, CFF, Globus)
u 17.4. : Concert d’ouverture du
festival Electron. GENEVA CAMERATA,
dir. David Greilsammer, FRANCESCO
TRISTANO, piano & DJ (JS Bach,
Tristano - création mondiale). TBA à
20h
u 26.4. : ORCHESTRA SINFONICA
AMADEUS & CORO SINFONICO
AMADEUS, dir. Marco Raimondi.
BARBARA POST soprano (Rossini,
Verdi). Victoria Hall à 20h (spectacle
gratuit)
u 27.4. : CHŒUR DU GRAND THÉÂTRE,
dir. Ching-Lien Wu, DIEGO INNOCENZI,
orgues (Bicentenaire Richard
Wagner). Victoria Hall à 11h (loc.
Espace Ville de Genève - Pont de la
Machine, Grütli, Genève Tourisme,
Cité Seniors)
u dimanche 27.4. : Tribune des
Jeunes Musiciens d’Espace 2. DUO
a
g
ALMAGE / Antoinette Dennefeld,
soprano Lucas Buclin, piano
(Melodies de Debussy, Faure,
Honegger, Duparc, Hahn, Bizet,
Ravel, Grieg, Liszt, Schubert...).
Studio Ernest Ansermet, Radio
Television Suisse, à 17h (Concert
gratuit. Entrée libre dans la limite
des places disponibles.)
u 29.4. : Migros-pour-cent-culturelclassics. ORCHESTRE SYMPHONIQUE DE
LA BBC, dir. SAKARI ORAMO, LEONIDAS
KAVAKOS, violon (Brahms, Ammann,
Elgar). Victoria Hall à 20h (loc. SCM
022/319.61.11)
théâtre
u Jusqu’au 6.4. : BIENTÔT VIENDRA LE
TEMPS de Line Knutzon, m.e.s. Sophie
Kandaouroff. Le Grütli, Petite Salle
(2ème étage), à 20h, dim à 18h.
Relâche lun (billetterie : [email protected] / 022/888.44.88)
u Jusqu’au 6.4. : LA DOUBLE INCONSTANCE de Marivaux, m.e.s. Philippe
Mentha. Théâtre de Carouge, Salle
François-Simon, mar, mer, jeu et sam
à 19h / ven à 20h / dim à 17h (billetterie : 022/343.43.43 - [email protected])
u Jusqu’au 6.4. : CABARET LEVIN #3
de Hanokh Lein, m.e.s. Hervé
Loichemol et Nalini Menamkat. La
Comédie de Genève, relâche lun,
mar-ven 20h, mer-jeu-sam 19h, dim
17h (loc. : 022/320.50.01 / [email protected])
u Jusqu’au 13.4. : FAISONS UN RÊVE de
S. Guitry, m.e.s. Anthéa Sogno.
Théâtre du Crève-Cœur, Cologny
(rés. 022/786.86.00)
u Jusqu’au 13.4. : VOYAGE EN
POLYGONIE de et m.e.s. François
Parmentier, dès 3 ans. Théâtre des
Marionnettes, mer à 15h, sam à 17h,
dim à 11h et 17h (réservations
022/807.31.07)
u Jusqu’au 13.4. : IRRÉSISTIBLE de
Fabrice Roger-Lacan, m.e.s. Claude
Vuillemin. Le Poche-Genève, lun et
ven à 20h30, mer-jeu-sam à 19h, dim
à 17h, mardi relâche (rens./rés. /loc.
022/310.37.59)
u Jusqu’au 16.4. : L’ANNIVERSAIRE de
Harold Pinter, m.e.s. Jean-Gabriel
Chobaz. Théâtre Alchimic, mar et
ven à 20h30; mer, jeu, sam et dim à
19h (rés. 022/301.68.38 / www.alchimic.ch - loc. Service culturel Migros)
u 1, 2, 4, 5.4. : VENTROSOLEIL de
Douna Loup, m.e.s. Joan Monpart,
La Comédie de Genève
Cabaret Levin
La Comédie de Genève poursuit son exploration des écrits d’une figure
majeure du théâtre israélien contemporain, à savoir Hanokh Levin, dont
l’œuvre est indissociable d’une critique acerbe de la réalité politique,
sociale et culturelle de l’État d’Israël.
Après la présentation de
«Shitz» en février, un nouveau
Cabaret Levin prend place entre
mars et avril, dans la mise en scène
de Nalini Menamkat.
À la Comédie, on entre par la
grande porte, on grimpe les marches
et on se retrouve au Cabaret...
quelques tables de bistrot, un piano
et de quoi boire un verre. C’est l’occasion de rire, chanter… et de se
dire joyeusement ses quatre vérités.
Les plus touchantes et les plus
inavouables. C’est que l'humour
d'Hanokh Levin est féroce. Il a l’art
de mettre le doigt sur nos points les
Nalini Menamkat
plus « sensibles »… De l’intime au
politique, il dévoile notre humanité dans toute sa noirceur, mais aussi sa
fragilité, son entêtement, son aspiration à la grandeur.
L’accompagnement musical est servi par Lee Maddeford et Daniel
Perrin, sous les lumières de Laurent Junod; quant à la scénographie et aux
costumes, ils ont été imaginés par Roland Deville.
. Jusqu’au 6 avril
Billetterie : T. + 41 22 320 50 01, ou en ligne
e
n
d
a
m
dès 7 ans. Théâtre Am Stram Gram,
mar + ven à 19h, mer à 15h, sam à
17h (Loc. 022/735.79.24 et Service
Culturel Migros)
u Du 1er au 13.4. : L'ETOURDI EN TRADUCTION SIMULTANÉE de Molière,
m.e.s. François Marin. Au CasinoThéâtre, mar-ven à 20h, mer-jeu-sam
à 19h, dim à 17h, relâche lun (rés.
022/793.54.45 ou [email protected])
u Du 1er au 18.4. : C'EST UNE AFFAIRE
ENTRE LE CIEL ET MOI par L’agence
Louis-François Pinagot et Christian
Geffroy Schlittler. Théâtre SaintGervais, Salle Marieluise Fleisser,
2ème sous-sol - grande salle, marjeu-sam à 19h, mer-ven à 20h30, dim
6.4. à 18h (loc. 022/908.20.20 ou
www.saint-gervais.ch)
u Du 1er au 20.4. : LA PUCE À L'OREILLE de Georges Feydeau, par
L'Autre compagnie, m.e.s. Julien
George. Théâtre du Loup,
mar+jeu+sam à 19h, mer+ven à
20h, dim à 17h (rés. 022/301.31.00)
u Du 3 au 16.4. : MISTERIOSO 119 de
Koffi Kwahulé, m.e.s. Cédric Dorier.
Le Grütli, Grande salle (sous-sol),
mar-jeu-sam à 19h, mer-ven à 20h,
dim à 18h. Relâche lun ([email protected] / 022/888.44.88)
u 4.4. : 10 ANS DE MARIAGE, de Alil
Vardar. Théâtre du Léman à 20h30
(loc. www.theatreduleman.com)
u Du 7 au 13.4. : 100'000 TIROIRS ET
DES POUSSIÈRES!... de et par Philippe
Vauchel. Théâtre en appartement
(hors abonnement) - Création. (infos:
022/343.43.43 - [email protected])
u Du 8 au 10.4. : HAMLET BABYLONE,
création pluridisciplinaire inspirée
par les textes de Shakespeare et H.
Müller. Concept, m.e.s. Dmytro
Kostiumynskyi. Le Galpon, du mar
au jeu à 20h (rés. au 022/321.21.76
au plus tard 2 heures avant le début
de l’événement - mail : [email protected])
u Du 8 au 11.4. : YVONNE, PRINCESSE
BOURGOGNE de Witold
DE
Gombrowicz, m.e.s. Geneviève
Guhl. La Comédie de Genève, relâche lun, mar-ven 20h, mer-jeu-sam
19h, dim 17h (loc. : 022/320.50.01 /
[email protected])
u 8, 9, 12, 13, 15.4. : LA PETITE FILLE
AUX ALLUMETTES d'après Hans
Christian Andersen, m.e.s. Julie
Annen, dès 6 ans. Théâtre Am Stram
Gram, mar à 19h, mer à 15h, sam +
dim à 17h (Loc. 022/735.79.24 et
Service Culturel Migros)
u 9.4. : Midi Théâtre! - PUPPET TRAP,
conception David Depierraz et
Laurence Iseli. Espaces "bar" de la
Petite et de la Grande salle à 12h
a
g
é
m
e
Théâtre du Grütli
Misterioso-119
Le metteur en scène Cédric Dorier présente ainsi « Misterioso-119 » de
Koffi Kwahulé : « Inspirée du célèbre morceau de jazz signé Thelonius
Monk, cette pièce est une énigme théâtrale. L’auteur nous offre une partition
composée de 16 tableaux et d’un nombre d’interprètes féminines à détermin-
n
t
o
alpins. UN PEU DEDANS, UN PEU PLUS BAS
d’après Samuel Beckett. Opéra pour
deux voix et orchestre de chambre.
Musique Bruno De Franceschi. Avec
Clara Brancorsini et Andrea de Luca
& Orchestre Frequenze Nomadi
Chamber orchestra of Umbria. Le
Galpon, ven et sam à 20h (rés. au
022/321.21.76 au plus tard 2 heures
avant le début de l’événement - mail
: [email protected])
danse
«Misterioso-119» © Mario Del Curto
er. Que raconte-t-il ? Qui raconte quoi ? Dans quels méandres de la psyché
humaine l’auteur veut-il nous conduire ? Plonger dans cet univers qui est
aussi un condensé d’humanité, c’est à la fois tenter de percer les ressorts
secrets de l’écriture et construire sa propre orchestration. Douze femmes
incarcérées doivent créer un spectacle de danse. Émerge alors, sur un mode
alternativement drôlatique et dramatique, un réseau inextricable de complexes, de fantasmes et de frustrations. Une passionnante aventure
s’amorce… »
. Du 3 au 16 avril 2014
Réservation : 022 / 888.44.88 ou reservation©grutli.ch
(rés. sur www.grutli.ch)
u dimanche 15.4. : Les Théâtrales.
THÉ À LA MENTHE OU T’ES CITRON ? de
Danielle Navarro-Haudecœur et
Patrick Haudecœur, m.e.s. Patrick
Haudecœur. Avec Marie Lenoir,
Urbain Cancelier, Eliza Maillot,
Bernard Fructus, Guillaume Laffly,
Michel Lagueyrie, Marina Valleix.
BFM à 20h30 (Rés. 022/364.30.30 ou
points de vente Fnac)
u Du 29.4. au 1.5. : TROIS HOMMES
DANS UN BATEAU, SANS OUBLIER LE CHIEN,
d’après Jerome K. Jerome, m.e.s.
Nathalie Sandoz, création théâtrale.
Le Galpon, ven et sam à 20h, dim à
18h (rés. au 022/321.21.76 au plus
tard 2 h avant le début de l’événement - mail : [email protected])
u Du 29.4. au 4.5. : LES 39 MARCHES
de John Buchan et Alfred Hitchcock,
m.e.s. Philippe Cohen. Au CasinoThéâtre, mar-ven à 20h, mer-jeu-sam
à 19h, dim à 17h, relâche lun (rés.
022/793.54.45 ou [email protected])
u 29.4. au 11.5. : DÉSIR SOUS LES
ORMES de Eugene O’Neill, m.e.s. Guy
Pierre Couleau. La Comédie de
Genève, relâche lun, mar-ven 20h,
e
n
mer-jeu-sam 19h, dim 17h (loc. :
022/320.50.01 / [email protected])
u Du 30.4. au 17.5. : MERCEDES-BENZ
W 123 par la Compagnie ad-apte et
Marie Fourquet. Théâtre SaintGervais, Salle Isidore Isou, 7ème
étage - L’Atelier, mar-jeu-sam à
20h30, mer-ven à 19h
(loc.
022/908.20.20 ou www.saint-gervais.ch)
u Du 30.4. au 18.5. : NE M'APPELEZ
PLUS JAMAIS MON PETIT LAPIN! d'après
Grégoire Solotareff, m.e.s. LaureIsabelle Blanchet, dès 4 ans. Théâtre
des Marionnettesmer à 15h, sam à
17h, dim à 11h et 17h (réservations
022/807.31.07)
opéra
u 23, 26, 29.4. et 2.5. :
GÖTTERDÄMMERUNG de Richard
Wagner, OSR, dir. Ingo Metzmacher,
m.e.s. Dieter Dorn. Grand Théâtre
de Genève à 19h30, dim à 15h
(billetterie : 022/322.50.50 et
www.geneveopera.com/)
u Les 24 et 26.4. : Carrefours trans-
d
a
u Du 1er au 6.4. : Carrefours transalpins. LUMIÈRE, création chorégraphique de Pascal Gravat,
Compagnie Quivala. Le Galpon, du
mar au sam à 20h, dim à 18h (rés. au
022/321.21.76 au plus tard 2 avant
le début de l’événement - mail :
[email protected])
u 5.4. : GALA TCHAIKOVSKI, avec Le
Lac des Cygnes, Casse-noisette, La
Belle au bois domant.... Théâtre académique municipal de Kiev. Théâtre
du Léman à 20h (loc. www.theatreduleman.com)
u Du 8 au 13.4. : SWAN LAKE
RELOADED, de Fredrik Rydman.
Théâtre du Léman à 20h30, le 13
avril à 15h (loc. www.theatreduleman.com)
u 9.4. : ADC. EEEXEECUUUTIOOOONS
!!!, chor. La Ribot / OBJETS RE-TROUVÉS
chor. Mathilde Monnier. Par le Ballet
de Lorraine. BFM à 20h30 (Billets :
www.adc-geneve.ch & 1h avant le
début au guichet du BDFM)
u 25.4. : Helveticdanse. GLORY de
Haendel, chor. Andonis Foniadakis,
dir. Philippe Cohen, BALLET DU GRAND
THÉÂTRE. BFM à 19h30 (loc. :
022/322.50.50 et www.geneveopera.com/)
u 26.4. : Festival Steps. NOTATIONS,
3 pièces de Wayne Mc Gregor,
Christian Spuck & Marco Goecke,
dir. Christian Spuck, BALLETT ZURICH.
BFM à 19h30 (loc. : 022/322.50.50 et
www.geneveopera.com/)
u 28 et 29.4. : Helveticdanse. BÉJART
BALLET LAUSANNE, direction Gil
Roman. CANTATE 51 – SYNCOPE –
BHAKTI III – BOLÉRO. BFM à 19h30
(loc. : 022/322.50.50 et www.geneveopera.com/)
u 30.4. : Helveticdanse. ABSOLUT
DANSA de JS Bach, chor. Johan Inger,
dir. Richard Wherlock, BALLET BASEL.
BFM à 19h30 (loc. : 022/322.50.50 et
www.geneveopera.com/)
91
m
é
m
divers
u Du 3 au 13.4. : INTRODUCING
SHAFFTER & STAUFFER, par Marius
Schaffter et Gregory Stauffer.
Théâtre
de
l’Usine
(rés.
022/328.08.18 ou www.theatredelusine.ch)
u 6.4. : Laboratoire spontané. LA
BRIOCHE DES MIOCHES de Sandra
Korol, m.e.s. Jean Liermier, dès 5
ans. Théâtre Am Stram Gram à 10h
(Loc. 022/735.79.24 et Service
Culturel Migros)
u Du 24 au 27.4. : Stimul-Us 2 Week-end de performances. RIDEAU!
création-performance par Yann
Marussich / OPUS QUARANTE
CENTIMÈTRES par Brice Catherin. /
NOIR APPARENT par Adaline Anobile &
Rudy Decelière. / SÉRENDIPITÉ par
Pauline Simon / YOU ARE NOT ALONE
par Kim Noble. Théâtre de l’Usine
(rés. 022/328.08.18 ou www.theatredelusine.ch)
92
LAUSANNE
concerts
u 2.4. : LE JEU DES 7 CLEFS, OCL, dir.
Debora Waldman, Comédien de La
Manufacture, Richard Dubugnon,
musique. Salle Métropole à 17h
(Billetterie de l’OCL: Tél.
021/345.00.25)
u 6.4. : VIVALDI & PIAZZOLLA - LES HUIT
SAISONS, dir. et violon Isabelle Meyer
Ensemble Art-en-Ciel (Vivaldi,
Piazzolla). Opéra de Lausanne (loc.
021/315.40.20, lun-ven de 12h à 18h
/ en ligne : www.opera-lausanne.ch)
u 7 et 8.4. : O.C.L., dir. Kazuki
Yamada, FUMIAKI MIURA, violon
(Saint-Saëns,
Mendelssohn
Bartholdy). Salle Métropole à 20h
(Billetterie : 021/345.00.25)
u 8.4. : Les Entractes du mardi. BEAT
ANDERWERT, hautbois, CATHERINE
SUTER GERHARD, violon, ELI
KARANFILOVA ET NADA ANDERWERT,
alto, JOËL MAROSI, violoncelle
(Schubert, Mozart). Salle Métropole
à 12h30 (Billetterie de l’OCL: Tél.
021/345.00.25)
u 13.4. : Les Concerts J.S. Bach de
Lutry. MESSE EN SI MINEUR DE J.S.
BACH. Ensemble vocal de St-Maurice
& Ensemble Fratres, dir. Pascal
Crittin. Solistes : BRIGITTE FOURNIER,
BARBARA ERNI, MICHAEL FEYFAR,
STEFAN IMBODEN. Temple de Lutry à
17h (Billets : Hug Musique, GrandPont 4, ou à l'entrée dès 16h le
e
n
t
jour du concert / rés. Point I, Quai
G. Doret, 1095 Lutry, Tél. 021 791
47 65)
u du 29.4. au 4.5. : RENCONTRES MUSICALES AVEC CÉDRIC PESCIA. Théâtre
Kléber-Méleau (rés. 021/625.84.29).
Avec :
- Mardi 29 à 20h : PHILIPPE CASSARD,
piano, CÉDRIC PESCIA, piano
(Schubert)
- Mercredi 30 à 19h : ALEXANDER
MELNIKOV, piano (Chostakovitch –
Intégrale des Préludes et Fugues)
- jeudi 1er à 20h : TRIO STARK
(Beethoven)
- vendredi 2 à 20h : SEVERIN VON
ECKARDSTEIN, piano, CÉDRIC PESCIA,
piano (Stockhausen)
- samedi 3 à 20h : HENRI BARDA, piano
(Ravel)
- dimanche 4 à 17h30 : CUARTETO
CASALS & CÉDRIC PESCIA, piano
(Schumann).
théâtre
u Jusqu’au 6.4. : OCCUPÉ-BESETZT de
Catherine Favre. Pulloff théâtres,
mer + ven à 20h, mar, jeu + sam à
19h, dim à 18h (réservations
021/311.44.22 ou www.pulloff.ch)
u Du 2 au 13.4. : LE RÊVE PENCHÉ de
Myriam Boucris, m.e.s. Myriam
Boucris, Denis Correvon, dès 3 ans.
Le petit théâtre, me à 15h / sa et di
à 11h, 15h et 17h (rés. www.lepetittheatre.ch)
o
u 3, 4 et 6.4. : LES PÈRES de Julie
Annen. Espace culturel des
Terreaux, jeu à 19h, ven à 20h, dim à
17h (loc. http://www.terreaux.org/)
u Du 3 au 11.4. : DE NOS JOURS
[NOTES ON THE CIRCUS] d’Ivan
Mosjoukine. Vidy-Lausanne, salle
Charles Apothéloz, mar-jeu-sam à
19h, ven à 20h30, dim à 17h30 (rés.
021/619.45.45 - www.billetterievidy.ch)
u Du 4 au 13.4. : TRANSMISSION de
Christophe Jaquet - The National
Institute (CH), création. L’Arsenic,
ma, je 21h / me, sa 19h / ve 20h30 /
di 18h ([email protected] /
021/625.11.36)
u 5.4. : 10 ANS DE MARIAGE, de Alil
Vardar. Théâtre de Beaulieu à 20h30
(loc. 0901 566 500, www.ticketcorner.ch / www.fnac.ch)
u Du 8 au 10.4. : RAVISSEMENT de et
m.e.s. Mélanie Rullier et Estelle
Rullier. L’Arsenic, ma, je, 19h / me
20h30 ([email protected] /
021/625.11.36)
u 9.4. : SACRILÈGES ou TEMPÊTE DANS
UN BÉNITIER, m.e.s. Steve Riccard.
Théâtre de Beaulieu à 20h30 (loc.
079 814 83 35 (me au ve de 13h à
17h), www.monbillet.ch)
u Du 29.4. au 18.5. : LES DEMEURÉES
de Jeanne Benameur, m.e.s. Didier
Carrier.
Vidy-Lausanne,
La
Passerelle, à 20h, dim à 18h, relâche
lun (loc. 021/619.45.45)
u Du 29.4. au 18.5. : HEDDA GABLER
d’Henrik Ibsen. Pulloff théâtres, mer
Vidy-Lausanne
De nos
jours
Ivan Mosjoukine et
ses comédiens proposent
un spectacle né du désir
enflammé de faire parler
le cirque.
Il en résulte un spectacle presque divertissant,
d’environ quatre vingts
notes sur le cirque. Un
spectacle sur l’envers des
choses, sur la hauteur, sur
n’importe quoi, sur le
karaoké, sur la chute des
choses, sur ‘il est encore
temps de réagir!’, sur
l’oubli, sur le mariage...
«De nos jours» © Ivan Mosjoukine - BD
. Du 3 au 11 avril 2014. Salle Charles Apothéloz
Réservation : 021 / 619.45.45, www.billetterie-vidy.ch
a
g
e
n
+ ven à 20h, mar, jeu + sam à 19h,
dim à 18h (rés. 021/311.44.22 ou sur
www.pulloff.ch)
u Du 30.4. au 18.5. : PETITE SŒUR d'après Pierre Gripari, m.e.s.
Geneviève Pasquier, création, dès 5
ans. Le petit théâtre, me à 17h / sa
et di à 14h et 17h (rés. www.lepetittheatre.ch)
divers
u Du 28.4. au 10.5. : FÉCULE, Festival
des cultures universitaires. La
Grange de Dorigny
(rés.
021/692.21.24)
danse
u 11.4. : GALA TCHAIKOVSKI, avec Le
Lac des Cygnes, Casse-noisette, La
Belle au bois domant.... Théâtre académique municipal de Kiev. Théâtre
de Beaulieu à 20h (loc. 0900 800 800
, www.ticketcorner.ch, www.fnac.ch)
opéra
u 15.4. : Conférence Forum Opéra.
IL BARBIERE DI SIVIGLIA, Conférencier:
Sandro Cometta. Salon Bailly de
l’Opéra de Lausanne à 18h45 (billets
en vente à l'entrée de la conférence)
u 17.4. : Conférence Université. IL
BARBIERE DI SIVIGLIA. Conférencier:
Luca Zoppelli. Grange de Dorigny à
17h15 (www.unil.ch/lettres)
u 25.4. : Midi-récitals - Artistes de
LUISA MILLER. Salle de l'Opéra de
Lausanne à 12h15 (billets sur place).
u 27 et 30.4. et 2, 4, 7.5. : IL BARBIERE
DI SIVIGLIA de Beaumarchais, dir.
Carlos Vieu, Orchestre de Chambre
de Lausanne, m.e.s. Adriano Sinivia.
Opéra de Lausanne (Billetterie :
021/315.40.20, lun-ven de 12h à 18h
/ en ligne et infos : www.opera-lausanne.ch)
u 29.4. : Midi-récitals - Artistes du
BARBIERE DI SIVIGLIA. Salle de l'Opéra
de Lausanne à 12h15 (billets sur
place).
AILLEURS
annecy
BONLIEU SCÈNE NATIONALE aux Haras
d’Annecy, sauf mention contraire
(rens./rés. 04.50.33.44.11 / [email protected])
u Jusqu’au 13.4. : MONSTRATION de
Johann Le Guillerm, installation,
d
a
m
u Jusqu’au 25.5. : ESCARGOPOLIS par
la Compagnie 2 rien merci, Cirque,
Installation
u 3 et 4.4. Place des Arts / CranGevrier : AU PLUS PRÈS DU MONDE,
chor. François Veyrunes, danse
u Du 8 au 11.4. : L'INSOMNANTE de et
avec Claire Ruffin, m.e.s. Camille
Boitel
u 17 et 18.4. : DRUMS AND DIGGING,
chor. Faustin Linyekula, danse
u 23 et 24.4. : PAROLES GELÉES d'après Rabelais, m.e.s. Jean Bellorini
et Camille de La Guillonnière
annemasse
RELAIS CHÂTEAU-ROUGE à 20h30
sauf mention contraire (loc.
+33/450.43.24.24)
u 1er et 2.4. : LES ENCOMBRANTS FONT
LEUR CIRQUE de et m.e.s. Claire
Dancoisne
u 4.4. : CHRISTINE SALEM et DAVY
SICARD, Musique du monde
u Du 8 au 10.4. : TROIS RUPTURES de
Rémi De Vos, m.e.s. Othello Vilgard
u 12.4. : OTTO, AUTOBIOGRAPHIE D’UN
OURS EN PELUCHE d'après Tomi
Ungerer, m.e.s. Alban Coulaud
u 15 et 16.4. : L’ÂGE DES POISSONS de
et m.e.s. Charlotte Lagrange
u 16.4. : MLF - MAX ET LES FILLES
u 18.4. : ENFANTILLAGES 2 par
ALDEBERT, Chansons
u 23 et 24.4. : LA SECONDE SURPRISE DE
L’AMOUR de Marivaux, m.e.s.
Alexandra Tobelaim
u Du 24 au 26.4. : LES ORANGES d’Aziz
Chouaki, m.e.s. Laurent Hatat
u 26.4. : MAXI MONSTER MUSIC SHOW,
m.e.s. Juliette, freak musical show
fribourg
THÉÂTRE EQUILIBRE à 20h (billetterie :
Fribourg Tourisme 026/350.11.00 /
[email protected])
u 8.4. : COMMENT VOUS RACONTEZ LA
PARTIE de et m.e.s. Yasmina Reza
u 11.4. : ORCHESTRE DE CHAMBRE
FRIBOURGEOIS, Concert 4, dir. Laurent
Gendre, CHIARA BANCHINI, violon
(C.P.E. Bach, J.C. Bach, M. Haydn, J.
Haydn)
la chaux-fds
ARC EN SCÈNES. CENTRE NEUCHÂTELOIS
DES ARTS VIVANTS sauf mention
contraire (loc. 032/967.60.50 ou
www.arcenscenes.ch/)
u Du 1er au 4.4. TPR : REQUIEM DE
SALON de et m.e.s. Andrea Novicov
u 3.4. : JE SUIS VIEUX (PAS BEAUCOUP
MAIS DÉJÀ) de Frédéric Recrosio
a
g
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Théâtre Forum Meyrin
Sfumato
Le théâtre Forum Meyrin accueille le chorégraphe Rachid
Ouramdane avec une pièce pour sept danseurs pleine de pluie
et de brume. Avec cet opus qui se déroule dans un univers dont
les repères sont brouillés, le chorégraphe explore le drame des
réfugiés climatiques.
Oeuvrant en une série de tableaux floutés, où les frontières
des corps se diluent, Rachid Ouramdane confronte littéralement
ses danseurs au potentiel destructeur de l’eau.
Sur des écrans géants, des visages filmés en très gros plan,
comme autant de paysages ravagés, racontent la catastrophe
d’où ils viennent. Tandis que l’eau qui gicle et ruisselle tout
autour des danseurs, on croit deviner la topographie des lieux
disparus, effacés.
Ici, Ouramdane travaille l’exil et l’humain comme matériaux premiers, avec, toujours, la même question en filigrane :
comment se reconstruire après la désolation?
. Mardi 8 et mercredi 9 avril à 20h30
«Sfumato» © Jacques Hoepffner
Billetterie : 022 / 989.34.34 ou en ligne
u 4.4. : IL GIARDINO ARMONICO, dir.
Giovanni Antonini (Isaac, Desprez,
Janequin, Farina,…). Théâtre à
20h15
u 26.4. TPR : TIM ET LES ZINVISIBLES de
Sandra Korol, m.e.s. Michel Toman
u 29.4. : SEULE LA MER d'Albert
Danon, m.e.s. Denis Maillefer
u 29.4. Série Parallèles, : Série
Parallèles. MADRIGALI NOTTURNI, dir.
Katharina Rosenberger, SVEA
SCHILDKNECHT
et
AGNIESZKA
KOWALCZYK, soprano léger, SYLVIA
NOPPER, soprano, LESLIE LEON,
mezzo-soprano (Willaert, Rore,
Rosenberger). Temple allemand à
20h15
martigny
u Du 10 au 12.4. : MERCI POUR TOUT
de et avec Claude-Inga Barbey,
m.e.s. Doris Ittig. Théâtre Alambic,
Hôtel-de-Ville 4, à 19h30, sa à 19h
(rés./loc. 027/722.94.22)
meyrin
THÉÂTRE FORUM MEYRIN à 20h30 sauf
mention contraire
(loc. 022/989.34.34)
u 1.4. : A L’ENVERS, une expérience
de magie mentale par Scopène
u 8 et 9.4. : SFUMATO, chor. Rachid
Ouramdane, L'A
u 15 et 16.4. : LE SIGNAL DU PROMENEUR par Raoul Collectif
u 29 et 30.4. : LE CROCODILE TROMPEUR - DIDON ET ÉNÉE d'Henry Purcell,
mix entre théâtre et musique, m.e.s.
Samuel Achache & Jeanne Candel
e
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mézières
THÉÂTRE DU JORAT à 20h, dim à 17h,
sauf mention contraire
(rés. : www.theatredujorat.ch/)
u Les 23, 24, 25.4. : LE MALADE IMAGINAIRE de Molière, m.e.s. Jean
Liermier. Théâtre de Carouge
u 30.4. : SYNTHESIS, création par la
Compagnie Lumen
monthey
THÉÂTRE DU CROCHETAN à 20h
(loc. 024/471.62.67)
u Du 1er au 3.4. : LIVING-ROOM
DANCERS, chor. Nicole Seiler, Danse
u 3.4. : J'AVAIS UN BEAU BALLON ROUGE
d'Angela Dematté, m.e.s. Michel
Didym
u 6.4. : LA PASSION SELON SAINT
MATHIEU, dir. Stephan MacLeod, Gli
Angeli Genève
u 11.4. : LA GALERIE DES HALLUCINATIONS d'après des textes du Grand
Guignol, m.e.s. Omar Porras
u 16.4. : THE TEMPEST REPLICA, chor.
Crystal Pite, Kidd Pivot Frankfurt
RM, Danse
u 30.4. : MISTERIOSO 119 de Koffi
Kwahulé, m.e.s. Cédric Dorier
morges
THÉÂTRE DE BEAUSOBRE à 20h
(loc. 024/471.62.67)
u 2.4. : LA GALERIE DES HALLUCINATIONS
d'après des textes du GrandGuignol, m.e.s. Omar Porras, Teatro
Malandro
d
a
u 8.4. : J'AVAIS UN BEAU BALLON ROUGE
d'Angela Dematté, m.e.s. Michel
Didym
u 9.4. : 3 LITS POUR 8 d'Alan
Ayckbourn, m.e.s. Jean-Luc Moreau
u 29.4. : LA PUCE À L'OREILLE de
Feydeau, m.e.s. Julien George
neuchâtel
THÉÂTRE DU PASSAGE. A 20h, di à 17h
(loc. 032/717.79.07)
u Du 1er au 5.4. : ANDRÉ de Marie
Rémond
u 3.4. : MADE IN CHINA de Thierry
Debroux, m.e.s. Didier Kerckaert
u Du 22 au 27.4. : COMMENT SE DÉBARRASSER D’UN ADO D’APPARTEMENT ? d’après Anne de Rancourt, m.e.s. Jean
Chollet
u 24 et 25.4. : DOM JUAN de Molière,
m.e.s. Gilles Bouillon
THÉÂTRE DU POMMIER
(tél. 032/725.05.05)
u Du 2 au 4.4. : LE MENTALISTE de et
m.e.s. Gabriel Tornay. Horaire : meje 20h, ve 20h30
u Du 22 au 27.4. : TROIS HOMMES DANS
UN BATEAU, SANS OUBLIER LE CHIEN, d’après Jerome K. Jerome, Cie De
Facto, avec le groupe de rock neuchâtelois The Rambling Wheels.
Horaire : ma-me-je 20h, ve-sa 20h30,
di 17h
nyon
USINE À GAZ sauf mention contraire
(loc. 022/361.44.04)
u Du 3 au 5.4. : 120 SECONDES PRÉSEN-
93
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: LA SUISSE de et avec Vincent
Kucholl et Vincent Veillon, spectacle
n
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TE
En tournée
J’avais un beau ballon rouge
onex
Voir Richard Bohringer pour la première fois sur scène avec sa fille Romane
représente un événement en soi. Pour
Michel Didym, qui adapte une pièce inédite
en français, ce choix s’est imposé comme
une évidence. Une distribution idéale qui
transcende la vérité historique de «Avevo un
bel pallone rosso» de la dramaturge italienne Angela Dematté, qui présente la trajectoire fulgurante de la vie de Margherita
Cagol, alias Mara, membre des Brigades
Rouges. Sous l’angle de l’intime et de la
relation Père-Fille, cette pièce traite des
points de contact entre histoire familiale et
«grande Histoire».
SPECTACLES ONÉSIENS, salle communale à 20h30 (loc. 022/879.59.99
ou SCM 022/319.61.11)
u 6 et 9.4. : Récrés-spectacle. LE
PETIT BONHOMME CARRÉ, Théâtre sans
paroles, dès 4 ans
u 11.4. : BASSEKOU KOUYATÉ & NGONI
BA, Musique du monde
plan/ouates
ESPACE VÉLODROME, sauf avis
contraire (loc. 022/888.64.60)
u 4 et 5.4. La Julienne : HARIETTE ET
CHAHUT par Entre 2 Caisses et
Monique Brun, Concert
u 12 et 13.4. La Julienne : YONN par
Philippe Campiche, Théâtre
«J’avais un beau ballon rouge»
Le dialogue entre le père et la fille fait écho à deux visions du monde qui s’entrechoquent. Dans le double espace
d’une cuisine et d’une chambre, on assiste à la transformation d’une relation filiale qui plie sous le poids de la radicalisation idéologique, jusqu’à la rupture.
pully
94
L’OCTOGONE, à 20h30 sauf mention
contraire (loc. 021/721.36.20)
u 1.4. Pour l'Art et le Lutrin : CYCLE
2 – QUATUOR SINE NOMINE (Haydn,
Bartok, Beethoven)
u 4.4. : MAY B, chor. Maguy Marin
u 9.4. : LA CONVERSATION de Jean
d'Ormesson, m.e.s. Jean Laurent
Silvi, Théâtre
u 10.4. hors saison : Amdathtra
musiques du monde – ESPAGNE,
Flamenco
sierre
LES HALLES à 19h30
(rés./loc. 027/722.94.22)
u Du 2 au 4.4. : RHIZIKON, conception
/ interprétation : Chloé Moglia /
OPUS CORPUS, de et par: Chloé
Moglia. Horaires : Rhizikon, 2 avril à
19h30 // 3 avril à 19h30 (Opus
Corpus) // 4 avril à 19h30 (Opus
Corpus)
u Du 9 au 19.4. : ON A PROMIS DE NE
PAS VOUS TOUCHER, conception
Aurélien Patouillard
sion
THÉÂTRE DE VALÈRE à 20h15, sauf mention contraire (loc. 027/323.45.61)
u 3.4. : GODOT EST ARRIVÉ de Patrick
Ruggirello, m.e.s. Charles Ribard
u 8.4. : LA CONVERSATION de Jean
d'Ormesson, m.e.s. Jean-Laurent
Silvi
u 16.4. Théâtre du Crochetan : THE
TEMPEST REPLICA par Kidd Pivot, chor.
Chrystal Pite
. mardi 1er avril au Théâtre de Vevey
. jeudi 3 avril au Théâtre du Crochetan, Monthey
. mardi 8 avril au Théâtre de Beausobre, Morges
thonon-évian
MAISON DES ARTS, ESPACE MAURICE
NOVARINA à 20h30, sauf mention
contraire (loc. 04.50.71.39.47 ou en
ligne : billetterie.mal-thonon.org)
u 1.4. / Espace Tully à 20h : RITES de
et chor. Denis Plassard, Compagnie
Propos
u Du 3 au 5.4. / Théâtre du Casino,
Evian : LE VAILLANT SOLDAT DE PLOMB
d'après Andersen, m.e.s. Tristan
Vogt. Horaire : jeu 3 à 9h30 et 14h30
/ ven 4 à 14h30 / sam à 10h
u 8 et 9.4. / Théâtre du Casino,
Evian : GRETEL ET HANSEL de Suzanne
Lebeau, m.e.s. Gervais Gaudreault.
Horaire : mar 8 à 9h30 et 14h30 /
mer 9 à 10h
u 11.4. / Théâtre du Casino à 20h,
Evian : LA CONVERSATION de Jean
d'Ormesson, m.e.s. Jean-Laurent
Silvi
u 12.4. / Grange au Lac, Evian :
SYLVAIN LUC ET STEFANO DI BATISTA
QUARTET, Jazz
u Du 16 au 18.4. / Port de Rives à
20h, ven à 20h30 : AMORTALE de et
m.e.s. Danny Ronaldo, Cirque
u 24 et 25.4. / Théâtre du Casino à
20h, Evian : NOUS AUTRES d'Eugène
Zamiatine, m.e.s. Patrick Ponce et
Dominique Sicilia
u 26 et 27.4. / Port de Rives :
MOULIN CABOT par la Compagnie 2
rien merci, Cirque. Horaire : sam 26
à 10h et 19h / dim 27 à 15h et 18h
a
g
u Du 28 au 30.4. / Espace des
Ursules : C'EST PAS PAREIL de et m.e.s.
Ester Bichucher et Denis Fayollat.
Horaire : lun 28 à 15h / mar 29 à
9h30 et 15h / mer 30 à 10h
vevey
THÉÂTRE. À 19h30, dim à 17h
sauf mention contraire (rés.
021/925.94.94 ou L@billetterie)
u 1.4. : J'AVAIS UN BEAU BALLON ROUGE
d'Angela Dematté, m.e.s. Michel
Didym, dès 14 ans
u 5.4. : Midi, Théâtre! / PUPPET TRAP
par la Compagnie Dahlia Production
u 11.4. : INVISIBLES de et m.e.s.
Nasser Djemaï, dès 14 ans
u 12.4. : Arts & Lettres. MIRA
GLODEANU, violon baroque, RAQUEL
ANDUEZA, soprano. ENSEMBLE AUSONIA
(Biber, Sonates du Rosaire Mystères douloureux de la Passion)
u 29.4. : Arts & Lettres. HINDEMITH
STRING TRIO (Schubert - Hindemith Mozart)
villars s/glâne
ESPACE NUITHONIE, Salle Mummenschanz à 20h (loc. Fribourg Tourisme
026/350.11.00 / [email protected])
Nuithonie: 026 407 51 51
u 4.4. : LOU par la Compagnie
Ovale, m.e.s. Lorenzo Malaguerra,
musique
e
n
u 5 et 6.4. : PRIMO TEMPO par La compagnie du Porte-Voix
yverdon
THÉÂTRE BENNO BESSON sauf mention
contraire (loc. 024/423.65.84)
u 2.4. : LES LARMES DES HOMMES de
Mia Couto, m.e.s. Patrick Mohr
u 4.4. : JE SUIS VIEUX (PAS BEAUCOUP
MAIS DÉJÀ) par Frédéric Recrosio,
m.e.s. Jean-Luc Barbezat
u 8.4. : INVISIBLES de et m.e.s. Nasser
Djemaï
u 26.4. Temple : LE MESSIE de
Haendel par le Chœur Novantica de
Sion, dir. Bernard Héritier, Brigitte
Fournier, soprano, Valérie Bonnard,
mezzo-soprano (NN)
THÉÂTRE DE L’ECHANDOLE
(loc. 024/423.65.84 ou 024/423.65.89
une heure avant le spectacle)
u 4.4. : KLEZMIC ZIRKUS, musique
u 9 et 10.4. : LE POIDS DU PAPILLON par
la Compagnie Mezza-Luna, m.e.s.
Hassane Kassi Kouyaté
u 23 et 24.4. : OCCUPÉ-BESETZT de
Catherine Favre et Yasmine
Saegesser, m.e.s. Catherine Favre
u 25.4. : JEREM ET EDMÉE FLEURY,
chanson
u 26 et 27.4. : H2OMMES, théâtre
d'objet et ciné concert
d
a
Swan Lake ® John Hogg
Danse
Théâtre
Danse
Sfumato
Le Crocodile trompeur
Didon et Énée
Swan Lake
Rachid Ouramdane – L’A
8 et 9 avr. à 20h30
Théâtre
Le Signal du promeneur
Henry Purcell
Samuel Achache & Jeanne Candel
29 et 30 avr. à 20h30
Raoul Collectif
15 et 16 avr. à 20h30
forum-meyrin.ch / Théâtre Forum Meyrin, Place des Cinq-Continents 1, 1217 Meyrin
Billetterie + 41 22 989 34 34 du lu au ve de 14h à 18h
Service culturel Migros Genève / Stand Info Balexert / Migros Nyon-La Combe
Le Lac des cygnes
Dada Masilo
7 et 8 mai à 20h30