les confreries mystiques musulmanes dans les balkans

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les confreries mystiques musulmanes dans les balkans
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Alexandre Popovic, École des Hautes Études en Sciences Sociales, Paris
LES CONFRERIES MYSTIQUES MUSULMANES DANS LES BALKANS
Communication présentée au Colloque international Le rôle su Soufisme et des
confréries musulmanes dans l’islam contemporain. Une alternative à l’islam
politique? Turin, 20-21-22 novembre 2002
1. Le rôle historique du soufisme et des confréries mystiques
musulmanes dans le Sud-Est européen
1.1. Période pré-ottomane. – L'implantation des confréries mystiques
musulmanes dans les Balkans ne commence véritablement qu'avec la conquête
ottomane de la Péninsule. Avant l'arrivée des Ottomans en Europe on ne peut
guère signaler que la présence, au XIIIe s., d'un saint guerrier turc, plus ou moins
mythique, nommé Sari Saltuk Dede1, qui s'installa en Dobroudja avec des tribus
turques venues de Sinop – puis, bien après sa mort – devint le symbole de la
conquête (ghazâ) et de l'islamisation des populations balkaniques, symbole qui fut
utilisé notamment par la confrérie des Bektachis. Pour cette période pré-ottomane
il faut également signaler la présence, depuis le XIIIe s., de communautés bâbâ'îs
en Dobroudja et dans le Deli Orman2.
1.2. Période ottomane. – Si l'on considère de façon globale la diffusion des
réseaux confrériques dans l'espace balkanique et le rôle de leurs membres dans la
société rouméliote, il convient de diviser l'époque ottomane en trois grandes
périodes : celle des premières conquêtes (XIVe-XVe s.) au cours de laquelle on
voit se développer des réseaux de derviches colonisateurs hétérodoxes3; puis (à
partir du XVe s.), celle des conquêtes plus lointaines, qui coïncident avec la mise
en œuvre d'une politique de « sunnitisation »4; et enfin, la période de recul
territorial (à partir de la fin du XVIIe s.), qui est aussi celui du renforcement de
l'élément musulman dans les territoires restés ottomans5.
1.2.1. – La période des premières conquêtes (XIVe-XVe s.), qui est aussi
celle de l'installation des « derviches colonisateurs » : des derviches pour la
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Leiser, 1995 ; Popovic, 1996, p. 98 ; Ocak, 2002.
de Jong, 1993.
3 Barkan, 1942.
4 Beldiceanu-Steinherr, 1975.
5 Clayer-Popovic, 1998.
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plupart hétérodoxes, Kalenderis6, Bektachis7 ou autres, qui émigrèrent vers les
terres nouvellement conquises et s'installèrent dans des régions désertées par les
populations chrétiennes ou en des points stratégiques, le long des voies de
communication ; des derviches qui cultivaient eux-mêmes la terre, œuvraient pour
la diffusion de la religion et de la culture musulmane, participaient aux campagnes
militaires ou y envoyaient leurs fidèles. Dans la partie orientale des Balkans,
territoires alors sous contrôle ottoman (Thrace, Deli Orman, Dobroudja), les deux
figures les plus emblématiques de ce soufisme à très haute coloration hétérodoxe
furent Cheikh Bedreddin, mis à mort à Serrès en 14168 et Othman Baba (m. en
1478/79). Tous deux laissèrent une empreinte durable au sein des populations
appelées aujourd'hui alevi-kizilbash, de la Dobroudja, du Deli Orman, du
Rhodope oriental et de l'Est de la Thrace9. Au XVe s., d'autres confréries
commencèrent à étendre leurs réseaux jusque dans les Balkans, comme la
Bayrâmiyya (deuxième quart du XVe s.)10, la Naqshbandiyya11 et la Khalwatiyya
(seconde moitié du XVe siècle)12.
1.2.2. – À partir du début du XVIe s. commence une autre période
caractérisée notamment par une politique de « sunnitisation » de l'Empire ottoman,
face à la menace extérieure des Safawides et à l'hétérodoxie de divers groupes de
populations au sein même de l'Empire. Ce changement de politique aura pour
principales conséquences une structuration et une reprise en main de certains
groupes hétérodoxes au sein d'une Bektâshiyya réorganisée (c'est à cette époque
qu'on situe actuellement les débuts du Bektachisme en Albanie, avec notamment
l'apparition du culte de Sari Saltuk à Kruja)13, et surtout la diffusion de confréries
politiquement et religieusement plus orthodoxes. Parmi celles-ci il faut citer en
premier lieu certaines branches de la Khalwatiyya, comme : la Djamâliyya14, la
Sunbuliyya15 et la Djalwatiyya16, dont les principaux cheikhs dénoncèrent auprès
des plus hautes autorités de l'Empire, entre autres, l'hétérodoxie des
Bedreddinistes et des Kizilbash du Deli Orman. Ainsi, de nouveaux réseaux
confrériques, essentiellement urbains, se développèrent, la plupart du temps grâce
aux fondations de grands personnages, et cela jusque dans les nouvelles régions
frontalières. Dans ces dernières, il faut souligner le soutien, voire la participation
des cheikhs aux nombreuses entreprises de guerres saintes contre les « infidèles ».
Aux cotés des différents réseaux khalwatis qui devinrent à cette époque
extrêmement denses dans la Péninsule balkanique, d'autres confréries essaimèrent
6
Yazici, 1974 ; Ocak 1992.
Tschudi, 1959 ; Popovic-Veinstein, 1995 ; Clayer, 1996b ; Clayer, 2002a.
8 Kissling, 1958 ; Filipović, 1971.
9 Zarcone, 1992.
10 Gölpınarlı, 1931 ; Lewis, 1959 ; Clayer-Popovic-Zarcone, 1998.
11 Algar, 1972 ; Ćehajić, 1990 ; Gaborieau-Popovic-Zarcone, 1990 ; Algar-Nizami, 1993.
12 de Jong, 1977 ; Clayer 1994.
13 Kiel, 1995 ; Clayer 1996b.
14 Clayer, 1994, p. 166-169 et 268-269.
15 Clayer, 1994, p. 164-166 et 267 ; Clayer, 1997.
16 Gölpinarli, 1957 ; Beldiceanu-Steinherr, 1961 ; Yılmaz, 1982 ; Tezeren, 1984.
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dans ces régions : la Djalwatiyya déjà mentionnée, et la Shamsiyya-Sîwâsiyya17 –
alors que les autres réseaux khalwatis, d'ailleurs plus hétérodoxes, comme la
Gulshaniyya18, la Sinâniyya, depuis Skopje19, la Ushshâkiyya20, la Uwaysiyya21,
ou la Misriyya22 eurent, semble-t-il, un développement plus limité – ; enfin, la
Kâdiriyya, à partir du début du XVIIe s.23, la Mawlawiyya24, et probablement
aussi la Rifâ‘iyya25. Le Seyâhatnâme d'Evliya Çelebi témoigne de cette présence
confrérique dans pratiquement tous les centres urbains balkaniques au milieu du
XVIIe s.26. Mais, malgrè la volonté des autorités ottomanes, le soufisme
hétérodoxe fut cependant loin d'être éradiqué dans la Péninsule ; il y eut même
l'expansion d'un nouveau mouvement hétérodoxe au XVIe s., venu d'Anatolie :
celui des Melâmis-Bayrâmis (plus tard des Hamzevis)27, qui eut des adeptes
notamment en Thrace, en Bosnie-Herzégovine, dans la région de Belgrade et peutêtre jusqu'en Hongrie.
1.2.3. – L'échec des armées ottomanes devant Vienne en 1683, suivi de la
« reconquista » autrichienne, hongroise et vénitienne, entraîna de profonds
bouleversements pour la Turquie d'Europe : une perte de territoires qui en
annonçait d'autres, plus importantes encore ; et une crainte permanente des
soulèvements de populations chrétiennes. Ce sont là probablement les raisons
pour lesquelles les autorités ottomanes entreprirent dans les Balkans, à partir du
milieu du XVIIIe s., une politique de renforcement de l'élément musulman, soit
par une colonisation plus poussée, soit en favorisant l'islamisation des populations
locales. Même si les sources ne font que rarement apparaître explicitement le rôle
des confréries dans ce processus, c'est un fait que celui-ci fut accompagné de
l'expansion de nouveaux réseaux confrériques, qui contribuèrent à renforcer la
cohésion des populations musulmanes fraîchement islamisées ou installées dans
ces régions. Ces nouveaux réseaux supplantèrent en partie les plus anciens dans
les villes, mais connurent également une expansion sans précédent en zone rurale,
notamment dans les régions que recouvrent aujourd'hui l'Albanie, la Macédoine le
Kosovo, la Grèce du Nord et la Bulgarie. De nouvelles confréries, ou de nouvelles
branches de celles-ci, essaimèrent dans les territoires rouméliotes à cette époque,
parfois même très tardivement, à la fin du XIXe - début du XXe s. : la Sa‘diyya28,
à partir du début du XVIIIe s., dans la partie occidentale de la Péninsule ; la
Malâmiyya-Nûriyya29, fondée en Macédoine par Muhammad Nûr al-‘Arabî (m. en
17
Clayer, 1994, p. 169-170 et 268-269 ; Clayer, 1996a.
Yazıcı, 1965 ; Yazıcı, 1982 ; Clayer, 1994, p. 170-171 et 263.
19 Popovic, 1991 ; Popovic, 1994 ; Clayer 1994, p. 172-174 et 265-266.
20 Clayer, 1994, p. 174-175 et 264-265 ; Clayer, 2002.
21 Ocak, 1982 ; Clayer, 1994, p. 171-172 et 268-269.
22 Clayer, 1994, p. 177-178 et 267-268.
23 Margoliouth, 1974 ; Popovic, 2000 ; Clayer, 2000.
24 Yazıcı-Margoliouth-de Jong, 1989 ; Popovic, 1994, p. 265-271 ; Mevleviyye, 1994.
25 Popovic, 1989-1990 ; Bosworth, 1994.
26 Popovic, 1988.
27 Imber, 1987 ; Algar, 1997.
28 Popovic, 1978 ; von Schlegel, 1994.
29 Gölpınarlı, 1931 p. 229-357 ; Popovic, 1998 ; Tanasković, 1998.
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4
1888) ; la Shâdhiliyya30, dont quelques rares tekke furent fondés au Kosovo et en
territoire bulgare ; la Tidjâniyya31 qui essaima vers 1900 en Albanie du Nord, ainsi
que plusieurs branches de la Khalwatiyya, telles : la Misriyya32, la Ramâzaniyya33,
et la Sha‘bâniyya34 ; alors que d'autres branches de la Khalwatiyya naquirent dans
les Balkans, notamment : la Djarrâhiyya35, dont les membres eurent un rôle actif
dans la reconquête et la recolonisation de la Morée après 1715 ; la GulshaniyyaSezâ’iyya36 qui vit le jour à Edirne au début du XVIIIe s., et la Hayâtiyya37 fondée
à Ohrid dans la seconde moitié du XVIIIe s. ; ainsi que deux nouvelles branches
nakshbandies (la Mudjaddidiyya, et surtout la Khâlidiyya au XIXe s.).
D'anciennes confréries renforcèrent également leur implantation, comme la
Rifâ‘iyya38 à partir du début du XIXe s., la Kâdiriyya (à travers les branches
Zindjiriyya et Razzâkiyya), où la Bektâshiyya qui connut, à partir de la seconde
moitié du XIXe s., une expansion très importante dans les territoires albanais, du
Sud et du centre, où elle joua un rôle de premier plan dans l'éveil national
albanais39.
Comme dans le reste de l'Empire ottoman, les confréries mystiques
musulmanes furent extrêmement présentes dans les territoires balkaniques sous
domination ottomane. Elles y jouèrent un rôle dans la vie religieuse, représentant
des courants plus ou moins orthodoxes (ou plus ou moins hétérodoxes), mais aussi
sur le plan économique et social (par le biais des waqf, « biens de main-morte »),
ainsi que dans les domaines culturel, artistique et politique.
1.3. Période post-ottomane (jusqu'à 1990). – Parmi la quinzaine de
confréries mystiques musulmanes (et à peu près autant de leurs nombreuses
branches et sous branches) qui se sont implantées pendant la période ottomane
dans les Balkans et dans le Sud-Est européen en général, onze auraient survécu (de
façon relativement organisée et structurée, autour de leurs établissements, c'est-àdire de leurs tekke et de leurs zâwayâ40), plus ou moins longtemps après le départ
des troupes ottomanes. Il s'agit de la Bektâshiyya, de la Kâdiriyya, de la
Khalwatiyya, de la Malâmiyya-Nûriyya, de la Mawlawiyya, de la Naqshbandiyya,
de la Rifâ‘iyya, de la Sa‘diyya, de la Shâdhiliyya, de la Sinâniyya (une branche de
la Khalwatiyya qui est considérée dans les Balkans comme une confrérie à part) et
de la Tidjâniyya. Il n'y en aurait eu ensuite, plus que dix existantes, car la
Mawlawiyya a disparu à son tour au lendemain de la Seconde Guerre mondiale,
30
Popovic, 1991a ; Lory, 1996.
Clayer, 1989 ; Abun-Nasr, 2000.
32 Babinger, 1993 ; Kara, 1994.
33 Clayer, 1994, p. 253-256.
34 Clayer, 1994, p. 176 et 260-262 ; Clayer, 1996.
35 Clayer, 1994, p. 256-259.
36 Clayer, 1994, p. 263.
37 Clayer, 1994, p. 259-260.
38 Mašulović-Marsol, 1992.
39 Clayer, 1990 ; Clayer, 1995 ; Clayer 2002a.
40 Le mot tekke désigne dans les Balkans un établissement de derviches situé dans un bâtiment à
part (ou dans un ensemble de bâtiments), alors que le mot zavija (zâwiya) désigne un établissement
constitué uniquement d'une pièce située dans une maison (ou dans un appartement) privée.
31
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alors que la Malâmiyya-Nûriyya, la Shâdhiliyya et la Sinâniyya s'éteignaient peu à
peu41.
Pour diverses raisons, dictées avant tout par la force numérique des
populations musulmanes restées sur place, leur survie ne s'est pas faite de façon
uniforme dans l'ensemble des différents pays du Sud-Est européen, car ces onze
confréries n'ont pas eu partout la même résistance. Sans oublier de souligner ici un
autre phénomène important dont il faut absolument tenir compte, à savoir que les
débuts de la période « post-ottomane » se situent dans les Balkans, suivant les
diverses régions, entre 1699 et ... 1912. Globalement parlant, les confréries ont
survécu (ou se sont même parfois développées) surtout dans la partie occidentale
de la Péninsule (Albanie et ex-Yougoslavie), dans une moindre mesure dans la
partie orientale et méridionale (Roumanie, Bulgarie, Grèce), et pas du tout dans la
partie septentrionale (Hongrie, Croatie). Cette survie ne devait d'ailleurs son
existence qu'à la faveur d'une double lutte : d'une part contre, ou tout au moins en
marge des États nouvellement créés ou reconstruits, dont ces confréries faisaient
dorénavant partie (notamment pendant la période communiste), d'autre part,
contre, ou au mieux en marge des autorités officielles des communautés
musulmanes locales, souvent hostiles à ces confréries42. Dans ce dernier cas, il
faut noter plusieurs tentatives de celles-ci de s'émanciper de la tutelle des autorités
musulmanes officielles en créant des structures plus ou moins indépendantes, ou
au contraire la formation de structures du même type, mais mises en place par la
Communauté musulmane officielle, destinées à contrôler les confréries (en exYougoslavie, création de la ZIDRA au Kosovo, dans les années 1970, et du
Tarikatski Centar de Sarajevo43 ; en Albanie où l'on note la formation de deux
organisations de ce genre dans les années 1930 (Drita Hyjnore et Kryesija e
Sekteve Alevijan), et surtout, cas extrême dans ce domaine, la reconnaissance
officielle d'une Communauté bektachie, devenue une communauté religieuse
indépendante, au même titre que celle des musulmans sunnites44.
On trouvera les principaux renseignements sur l'historique de cette survie, sur
l'organisation et le fonctionnement de ces onze confréries au cours de la période
considérée, ainsi que des bibliographies développées, dans les ouvrages et articles
citées, mais la situation pourrait être présentée également selon trois groupes de
confréries, qui ont fonctionné plus ou moins activement suivant les régions et les
périodes données. Tout d'abord le groupe des deux « grandes » confréries,
composé par la Bektâshiyya (présente surtout en Albanie, au Kosovo et en
Macédoine ; et aussi, mais pendant peu de temps, en Grèce : en Thessalie et en
Thrace occidentale) et la Khalwatiyya (un peu partout, mais surtout en Albanie, au
Kosovo, en Macédoine et en Bosnie-Herzégovine) ; ensuite le groupe des six
confréries « moyennes » : celles de la Kâdiriyya (surtout en Albanie, au Kosovo,
en Macédoine et en Bosnie-Herzégovine, ainsi que, dans une faible mesure, dans
le Deli Orman en Bulgarie), de la Malâmiyya-Nûriyya (surtout au Kosovo et en
Macédoine et un peu, peut-être, dans le Deli Orman), de la Mawlawiyya (qui a
41
Popovic, 1986 ; Tanasković, 1986 ; Popovic, 1991b ; Popovic, 1996a.
Popovic, 1985 ; Popovic, 1987-1988 ; Clayer-Popovic, 1999.
43 Clayer-Popovic, 1999, p. 654-659.
44 Popovic, 1986a, p. 14-36 ; Clayer, 1990, p. 185-202.
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subsisté pendant quelque temps en Bosnie-Herzégovine, au Kosovo et en
Macédoine, et semble-t-il aussi un peu en Bulgarie), de la Naqshbandiyya (surtout
en Bosnie-Herzégovine, et un peu au Kosovo, en Macédoine, dans le Deli Orman
et dans la Dobroudja bulgare et roumaine), de la Rifâ‘iyya (surtout au Kosovo, en
Macédoine et en Albanie, et aussi un peu en Bulgarie, ainsi qu'en BosnieHerzégovine où il s'agit cependant avant tout des Albanais du Kosovo installés
dans la ville de Sarajevo), et de la Sa‘diyya (surtout au Kosovo, en Macédoine et
en Albanie) ; enfin le groupe des trois « petites » confréries : celles de la
Shâdhiliyya (en Bulgarie et au Kosovo), de la Sinâniyya (en Macédoine et au
Kosovo), et de la Tidjâniyya (dont la présence n'est signalée qu'en Albanie). Il est
à noter que les réseaux de ces confréries étaient en général divisés en sous-réseaux
régionaux et même ethniques, c'est-à-dire, qu'il pouvait y avoir, au sein d'une
même confrérie, des « filières » turques, albanaises, slaves, voire même, depuis
quelques décennies, tziganes (en Macédoine surtout). Ajoutons enfin, en ce qui
concerne le culte des saints, qui constitue souvent le seul témoignage de la
présence passée des confréries, qu'il réunit fréquemment les populations
musulmanes et les populations chrétiennes.
1.4. Deux dernières remarques concernant l'ensemble des périodes
précédentes. – Avant d'essayer d'examiner la situation actuelle des confréries
mystiques musulmanes dans les Balkans (tâche qui s'avère être extrêmement
difficile, sinon impossible à réaliser pour l'instant, au moins dans certaines régions
de la Péninsule), il me semble nécessaire de rappeler, ne serait-ce qu'en quelques
lignes, deux faits majeurs que l'on doit avoir présents à l'esprit, si l'on cherche à
comprendre où nous sommes réellement aujourd'hui, dans l'étude de l'histoire du
« phénomène confrérique » dans le Sud-Est européen. Le premier concerne les
sources qui sont à notre disposition, et le second les travaux qui ont été réalisés
jusqu'à présent.
Il est clair je pense, pour tous ceux qui travaillent sur ce sujet, que nos
sources ne sont en fait qu'une masse disparate d'informations embrouillées et plus
ou moins sûres, qui ont été reprises maintes et maintes fois par des auteurs et des
publicistes en tous genres, dont la plupart n'était d'ailleurs nullement préparé pour
s'atteler à une telle tâche, mais chez lesquels cependant il peut y avoir parfois, ici
et là, des renseignements importants, ou au moins intéressants, qu'il faut donc
absolument prendre en considération. De plus, ces sources (toujours ponctuelles et
très éparpillées) se composent en fait des données éclatées et très largement
insuffisantes en nombre, pour pouvoir nous permettre – tout du moins à l'heure
actuelle – de présenter quelque chose de cohérent et de suivi. De plus, on doit
retenir aussi un autre fait indéniable, à savoir qu'un certain nombre d'éléments qui
nous intéresseraient au plus haut point aujourd'hui, n'ayant pas été notés à leur
époque, il sera très certainement impossible à tout jamais, de reconstituer l'histoire
des différentes confréries mystiques musulmanes balkaniques dans toute leur
complexité.
Quant aux travaux publiés jusqu'à présent, ils souffrent tous d'une carence
bien connue, à savoir que nous manquons déplorablement de monographies
fiables, soit sur les principaux centres (tekke) et leurs cheikhs et derviches, soit sur
les principaux « réseaux » de ces centres, soit encore (mais alors toutes confréries
7
confondues) sur les principales régions du Sud-Est européen ; monographies qui
devraient être faites obligatoirement, d'une part d'après l'ensemble de la
documentation existante, d'autre part sur la base de longs séjours de travail et
d'observation sur place. Car il est évident, bien entendu, que seule une longue
fréquentation de ces milieux, et des séjours prolongés, peuvent permettre une
bonne appréciation de la situation qui est, partout dans ces régions, d'une rare
complexité. Cette extrême complexité des différents problèmes locaux, aggravée
par la nécessité d'utiliser des langues peu connues, a pu rebuter les spécialistes
étrangers qui voudraient éventuellement s'aventurer dans ce domaine. Les
spécialistes (et à plus forte raison les non spécialistes) locaux, de leur côté, sont
très souvent dans l'impossibilité de situer les ordres mystiques musulmans de leur
région dans un contexte historique plus vaste (du fait de leurs insuffisances dans
les domaines historique, islamologique, anthropologique ou autres). Quant à nos
propres supputations, fruit de trop brefs passages dans ces régions, elles reposent
beaucoup plus sur des impressions un peu trop rapides, que sur une présentation
des faits longuement observés et analysés « sur le terrain », ce qui donc, dans un
cas comme dans l'autre, pose problème.
2. La situation actuelle des confréries mystiques musulmanes
dans les régions balkaniques
2.1. La situation globale au moment de la chute du mur de Berlin
(novembre 1989). – Selon la documentation dont je dispose à l'heure actuelle,
plus d'un milliers de tekke et de zâwiya auraient existé dans les différentes régions
des Balkans au cours de la période ottomane et post-ottomane. D'après mes
estimations personnelles, le nombre de ceux qui fonctionnaient encore (plus ou
moins régulièrement), en novembre 1989, était d'environ une soixantaine, situés
tous en ex-Yougoslavie – dont un peu plus de la motié se trouvait – dans les villes
et les agglomérations urbaines, et le reste dans les villages et dans les
campagnes45.
Sur le plan de la distribution géographique, ces établissements étaient situés
comme suit : sept en Bosnie-Herzégovine46, une quarantaine au Kosovo47, une
quinzaine en Macédoine48, et deux ou trois en Serbie et au Monténégro.
Comme principaux centres (une trentaine en tout), on pouvait mentionner à
ce moment-là les suivants : – chez les Bektachis : ceux de Kanatlarci, Tetovo et
Kičevo (en Macédoine), ainsi que celui de Djakovica (au Kosovo) ; – chez les
Halvetis : ceux de Prizren, Orahovac et Djakovica (au Kosovo), ainsi que ceux de
Kičevo, Struga et Ohrid (en Macédoine) ; – chez les Kadiris : ceux de Sarajevo
(en Bosnie), et ceux de Prizren, Orahovac, Kosovska Mitrovica, Peć et Djakovica
(au Kosovo) ; – chez les Melamis : ceux de Štip et de Pagaruša (en Macédoine),
45
Concernant l'implantation des tekke dans les Balkans, voir Clayer-Popovic, 1993.
Pour les chiffres concernant cette région, voir : F.Hadžibajrić, « Mevlud u tekiji na vrelu Bune »
["La cérémonie de mawlid dans le tekke situé près de la source de la Buna"], Preporod, 259,
Sarajevo, 1er juin 1981, p. 21 ; Anonyme, « Četrdeset tekija » ["Quarante tekke"], Preporod, 410,
Sarajevo, 15 septembre 1987, p. 14.
47 Voir par exemple : Rexhepagiqi, 1999.
48 Voir : Clayer-Popovic, 1992.
46
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ainsi que ceux de Orahovac, Prizren et Suvi Do (au Kosovo) ; – chez les
Naqshbandis : ceux de Sarajevo, Visoko, Oglavak et Vukelići-Živčići (en Bosnie),
et ceux de Djakovica et de Planeja (au Kosovo) ; – chez les Rifa‘is : ceux de
Prizren, Djakovica et Orahovac (au Kosovo), ainsi que celui de Skopje (en
Macédoine) ; – chez les Sa‘dis : plusieurs tekke de Djakovica (Kosovo), ainsi que
celui (ou ceux ?) de Sutka, près de Skopje (en Macédoine) ; – chez les Sinanis : le
(ou les ?) tekke de Prizren (au Kosovo) ; alors que – chez les Shadhilis, le dernier
tekke de cette confrérie, celui de Djakovica (au Kosovo), venait de s'éteindre
depuis quelque temps déjà. Cependant, il ne faut surtout pas perdre de vue le fait
qu'un tekke où, par manque de cheikh et de derviches, le rituel ne se fait plus,
celui-ci continue néanmoins "à fonctionner", comme l'objet de vénération, de
dévotion et de piété populaire, grâce à ses türbe (c'est à dire des mausolées dans
lesquels reposent le fondateur du tekke en question et ses successeurs).
Le nombre des cheikhs et de leurs affiliés avait évidemment beaucoup
diminué lui-aussi. Toujours selon mes estimations personnelles, il devait se situer
à cette époque entre dix et vingt mille personnes en tout, mais tout dépend de ce
que l'on entend sous le terme d' « affilié ». La plus grande partie se composait,
comme on le remarque facilement d'après l'implantation régionale des tekke,
d'Albanais et des "Turco-Albanais"49, ensuite de musulmans slaves de BosnieHerzégovine (qui à l'époque se disaient "Musulmans", avec un "m" majuscule),
nom qu'ils ont abandonné depuis (en septembre 1993 plus précisément) pour celui
de "Bochniaques"50 ; de musulmans slaves de Macédoine ("Torbech"-s, "Gorani"s etc.) ; de quelques Turcs qui n'avaient pas (encore) émigré en Turquie ; et enfin,
d'un relativement grand nombre de Gitans (Tziganes ou "Rom"-s) qui, surtout en
Macédoine, mais également au Kosovo, cherchaient par ce biais à se faire passer
pour des "Turcs"51, afin d'essayer de s'élever ainsi dans la hierarchie des "nations"
et des "nationalités", qui avait existé dans l'ex-Yougoslavie à l'époque titiste52.
L'ensemble de ces tekke et zâwiya était "coiffé" (plutôt de façon "théorique", bien
49 Sur cette catégorie de population, qui occupe une position particulière dans la société, voir :
N.Clayer, "L'islam, facteur des recompositions internes en Macédoine et au Kosovo", (dans
Bougarel-Clayer 2001, p. 177-240), où, à la p. 181, elle écrit notamment : « En réalité, il existe
également une catégorie qui ne peut apparaître dans les recensements, de musulmans citadins, la
plupart d'origine mixte turco-albanaise et de culture turque (voire turque et albanaise), parlant et le
turc et l'albanais. Selon un stéréotype très répandu, qui leur permet de fonder leur double identité,
ils se disent la plupart du temps de mère turque et de père albanais » ; puis, dans la note 9 de la
même page, elle ajoute : « Sur ces citadins "turco-albanais", voir Eran Fraenkel, "Urban Muslim
Identity in Macedonia : The Interplay of Ottomanism and Multilingual Nationalism", in :
E.Fraenkel et Ch.Kramer (eds.), Language Contact-Language Conflict, New York, Peter Lang,
1993, p. 27-41. Je n'emploie pas ici l'expression "Turco-Albanais" dans le sens d'Albanais
musulmans (usage existant par exemple en Grèce), mais bien dans le sens, plus restreint, de
musulmans citadins à la fois de culture albanaise et de culture turque ou "ottomane" ».
50 Voir à ce sujet, Bougarel-Clayer, 2001, ("Introduction", p. 39) ; puis aussi, dans ce même
volume, X.Bougarel, "L'islam bosniaque, entre identité culturelle et l'idéologie politique", p. 79132 (cf. p. 112-113) ; ainsi que son article (actuellement sous presse), "Comment peut-on être
Bochniaque", à paraître dans Alain Dieckhoff et Riva Kastoriano (éds.), Nationalismes et
mutations en Méditerrannée orientale, Paris, Éditions du CNRS.
51 Clayer-Popovic, 1992, p. 59-60.
52 Il n'y a pas eu encore de travaux poussés sur ce sujet, qui a été signalé pourtant (mais
uniquement "au passage") par plusieurs auteurs.
9
entendu, que de façon effective) par deux institutions dont il a été déjà question cidessus, à savoir le « Tarikatski Centar » de Sarajevo53, pour les centres de BosnieHerzégovine, et la « ZIDRA » de Prizren, pour ceux des autres régions du pays.
Ajoutons aussi que le niveau d'instruction et de connaissances des cheikhs avait
beaucoup baissé par rapport à ceux des périodes antérieures, comme on peut le
constater facilement, en lisant leurs revues et autres publications54.
2.2. Années 1990-2002. Une vue d'ensemble. – La période des douze
dernières années qui ont suivi l'effondrement des régimes communistes en Europe
de l'Est, a été marquée pour les populations balkaniques, aussi bien musulmanes
que non musulmanes, par toute une série de bouleversements profonds, ponctués
par des événements tragiques que très peu de gens pouvaient prévoir : la
dissolution de la fédération yougoslave (juin 1991) ; les affrontements armés entre
Serbes et Croates en Croatie, se transformant très rapidement en guerre ouverte
(août-septembre 1991-décembre 1995) ; l'éclatement du conflit bosniaque (avril
1992), puis la guerre civile "à trois", entre Musulmans, Serbes et Croates en
Bosnie-Herzégovine (1992-1995) ; la quasi guerre civile albanaise (mars-avril
1997) ; l'éclatement d'un conflit armé au Kosovo (mars 1998) ; l'intervention
militaire de l'OTAN et l'exode massif des Albanais du Kosovo (mars-juin 1999) ;
le passage du Kosovo sous tutelle internationale (juin 1999) ; la série d'attaques
contre la police serbe en Serbie du Sud, revendiquée par une "Armée de libération
de Preševo, Medvedja et Bujanovac" (février 2000) ; et en dernier lieu, les
affrontements armés entre Albanais et Macédoniens, en Macédoine (à partir de
juin 2000)...
On comprendra facilement que tous ces bouleversements et ces tragédies ont
dû se répercuter inévitablement à plus d'un endroit, d'une part sur la situation des
diverses confréries mystiques musulmanes de ces pays et régions, et que, d'autre
part, il a été très difficile (pour ne pas dire impossible) de se rendre « sur le terrain
» pour effectuer des recherches dans le domaine qui nous intéresse55. Et comme,
par ailleurs, les publications concernant l'état précis de l'évolution de ces
confréries, et de leurs principaux centres, se comptent sur les doigts d'une seule
main, je ne peux guère qu'essayer de brosser ici un tableau très général sur la
situation actuelle, en y ajoutant par-ci, par-là (dans les notes des bas de pages), des
rares renseignements ponctuels dont j'ai pu avoir parfois, quelques échos. C'est
pour cette raison d'ailleurs que je joins à la fin de ce petit texte quelques Annexes,
tirées de plusieurs publications récentes de Nathalie Clayer, qui est actuellement à
53
Voir à ce sujet, Sead Halilagić, « Istine o tarikatu kod nas » ("Les vérités sur les tarîqat chez
nous"), Islamska Misao, 144, Sarajevo, décembre 1990, p. 72-74.
54 Popovic, 1986b ; et dans un tout autre contexte, Clayer, 1991.
55 Ainsi, par exemple, si au cours des douze années précédentes (à savoir dans la période avril
1979-avril 1991) j'ai pu effectuer une quinzaine de séjours au Kosovo, en Macédoine, en Serbie, en
Bosnie-Herzégovine et au Monténégro (correspondant, au total, à une centaine de jours effectifs
passés dans les divers milieux confrériques de ces régions), depuis 1992 je n'ai pu travailler sur le
terrain, qu'une seule fois en Macédoine (un très bref séjour en octobre 1997) et à deux reprises en
Albanie (juin 1996 et août-septembre 2001).
10
mon avis, le principal spécialiste des ordres mystiques musulmans dans les
Balkans. Voici donc les points essentiels de cette "vue d'ensemble"56 :
La nouvelle situation politique a eu plusieurs conséquences "positives" pour
les musulmans balkaniques : liberté d'expression et de circulation, intensification
des contacts avec le monde musulman extérieur, possibilité pour les missionnaires
musulmans étrangers de venir faire du prosélytisme etc. Mais, d'autre part, les
musulmans balkaniques (de même évidemment que leurs concitoyens non
musulmans) ont été confrontés aussi, àvec une situation économique et sociale
extrêmement préoccupante (si ce n'est désastreuse), sans parler des conséquences
des conflits armés, du "nettoyage ethnique", de la perte des habitations et des
biens, et de l'obligation de fuir ou de s'exiler au loin...
En ce qui concerne les pratiques religieuses, et plus particulièrement les
rituels soufis, ils ont été naturellement tributaires des transformations qui se sont
opérées dans leurs communautés et confréries respectives au cours des différentes
périodes de leur histoire, puis du contexte politique et social actuel, suivant les
pays et les régions. Mais il y a lieu de rappeler avant tout un fait certain, à savoir
que dans les Balkans d'aujourd'hui (et d'hier), l'importance numérique des
confréries mystiques musulmanes (donc celles des cheikhs et des derviches) est
extrêmement limitée, par rapport à l'importance numérique des communautés
musulmanes locales non-soufies.
On ne sait pas exactement quelle est l'évolution que connaissent (et que
connaîtront) les confréries balkaniques, ni quel peut-être le rapport de force entre
les deux dynamiques existantes – celle du renouveau des réseaux anciens, et –
celle de la diffusion de nouveaux réseaux, venant notamment de Turquie, pays
avec lequel les musulmans du Sud-Est européen sont en train de resserer leurs
liens, mais arrivant aussi des nombreux autres pays musulmans, ainsi que de leurs
propres diasporas d'Europe occidentale, des États Unis, ou d'ailleurs.
Par rapport aux différentes régions des Balkans, la situation actuelle peut être
résumée comme suit : dans la partie orientale (en Bulgarie, en Roumanie et en
Grèce, c'est-à-dire en Thrace occidentale) tous les anciens réseaux confrériques
ont complétement disparu au cours du vingtième siècle, excepté dans un cas très
particulier, celui des communautés alevi-kizilbash (qui professent en fait leur
propre religion, à savoir un islam hétérodoxe et syncrétique) ; ce qui implique ipso
facto que les seuls réseaux confrériques encore actifs, ne se trouvent plus que dans
la partie occidentale de la Péninsule, donc dans les territoires de l'ex-Yougoslavie
et de l'Albanie.
Dans la partie musulmane la plus occidentale des Balkans, en BosnieHerzégovine, les confréries mystiques avaient beaucoup baissé (depuis la fin de la
période ottomane déjà, puis surtout à la suite de la fermeture officielle de leurs
56
Clayer, 1997a ; Clayer, 1998, p. 157-158 ; Clayer-Popovic, 1999a ; Clayer, 2000, p. 238-240 ;
Clayer, 2001 ; Clayer, (sous presse, 39 p.) ; Clayer (sous presse/a, 13p.).
11
centres [tekke], imposée par les autorités communistes locales en 1952), mais y
ont survécu tout de même, grâce d'abord aux cérémonies de récitation du
Mathnawî de Djalâl al-Dîn Rûmî, et aux très nombreuses séances de mevlud
(mawlid), collectives57 ou familiales ; et enfin, naturellement, depuis l'autorisation
officielle de réouverture de leurs tekke, grâce aux deux principales confréries de
ces régions (la Naqshbandiyya et la Kâdiriyya), sous la houlette de leur dernier
grand cheikh Fejzulah Hadžibajrić (1913-1990) qui a su manœuvrer à merveille
(au cours de la décennie 1980-1990 notamment) les autorités communistes locales
à la dérive, et utiliser les possibilités offertes par la création du « Tarikatski Centar
» de Sarajevo. Cela dit, sa disparition (en avril 1990), puis celle de son plus
proche collaborateur, cheikh Abdulah Fočak (décédé en mars 1991), ainsi que la
terrible guerre civile qui a suivi (1992-199558) ont certainement beaucoup affaibli
le renouveau opéré au cours de la décennie précédente. L'héritage confrérique dans
cette région repose donc aujourd'hui, avant tout, sur les épaules d'un cheikh
naqshbandi, de la célèbre famille des Hadžimejlić, du tekke de Vukelići-Živčići59,
près de Fojnica en Bosnie. Mais, le moins que l'on puisse dire à ce sujet, est que
l'on ne possède pas beaucoup d'informations précises, ni sur la situation générale
actuelle des réseaux soufis en Bosnie-Herzégovine, ni sur une éventuelle
instrumentalisation de ces réseaux, pour des buts politiques ou idéologiques, par
les autorités musulmanes locales de cet "État".
Dans les autres régions de l'ex-Yougoslavie, c'est-à-dire avant tout au Kosovo
et en Macédoine, où la plupart de la population musulmane parle l'albanais (et non
pas une langue slave, comme en Bosnie-Herzégovine), les confréries mystiques
musulmanes étaient – dans une certaine mesure – moins persécutées par les
autorités communistes locales, que celles de Bosnie-Herzégovine. Et cela
notamment à partir de 1975, lorsque le cheikh rifa‘i de Prizren (cheikh Djemali) a
eu la possibilité d'assurer un nouvel essor aux confréries de Kosovo, de
Macédoine, de Serbie et de Monténégro, en leurs offrant la possibilité de se
regrouper dans une organisation, nommée d'abord SIDRA ("Union des ordres de
derviches..."), puis ZIDRA ("Communauté des ordres de derviches..."), créant
ainsi, de facto, une nouvelle communauté officielle musulmane yougoslave,
pratiquement indépendante, et même "parallèle", par rapport à la très officielle
"Communauté musulmane de Yougoslavie". Cette institution fonctionnait grâce
aux dons bénévoles et aux cotisations, provenant des milieux de derviches de ces
57 On peut citer à titre d'exemple, une cérémonie de ce genre qui a eu lieu le 24 août 1991, à
laquelle avait participé un très grand nombre de gens, ainsi que le Président de BosnieHerzégovine Alija Izetbegović (voir Preporod, 504, Sarajevo, 1.9.1991, p. 7).
58 Selon Amina Šiljak-Jesenković (1996, p. 84-85), au cours de cette période ont été détruits en
Bosnie-Herzégovine les centres suivants : le tekke naqshbandi de Foča (mai-juin 1992), le tekke de
Divič, près de Zvornik (mai-juin 1992), [voir aussi à ce sujet, H.Algar, "Bayramiyye", The Oxford
Encyclopædia of the Modern Islamic World, New York, Oxford Univ. Press, 1995, t. I, p. 206207], la zavija de Carevo Polje, près de Jajce (octobre 1992), le tekke de Mostar (à la même date
[?]), et l'illustre tekke naqshbandi d'Oglavak (octobre [?] 1993) ; alors qu'ont été endommagés : le
tekke de Blagaj, et deux autres de Sarajevo (celui de "Nad Mlini" et le Haniqah de Gazi Husrevbeg).
59 J'ai appris récemment qu'un grand zikr (dhikr) annuel, particulièrement solennel et émouvant, a
eu lieu dans ce tekke en présence d'un très nombreux public, le 24 août 2002.
12
régions travaillant souvent comme Gastarbeiter dans les pays occidentaux. Par
ailleurs, un autre phénomène s'est généralisé dans ces régions, le développement
des réseaux confrériques gitans (comme celui de Šutka, quartier gitan situé non
loin de Skopje) dont il a déjà été question ci-dessus à plusieurs reprises, réseaux
où la promotion accélérée de nouveaux cheikhs (et "cheikhs") était assurée par le
biais de la ZIDRA et de son Président. Bien que ces réseaux se composent de
plusieurs différentes confréries (telles les : Khalwatiyya, Kâdiriyya, Rifa‘iyya,
Sa‘diyya etc.), les pratiques de leurs rituels respectifs tendent à se simplifier et à
s'homogénéiser, avec une très nette prédominance (notamment dans le cas des
trois dernières confréries citées) de l'idjrâh (le très spectaculaire rituel de
mortification du corps), qui est devenu le point central du zikr, sur lequel il existe
maintenant un relativement grand nombre de films documentaires60.
Le cas de l'Albanie diffère beaucoup de celui de l'ex-Yougoslavie, pour deux
raisons. La première est que les réseaux confrériques y ont continué de fleurir,
même après la fin de la domination ottomane, puis ont été totalement étouffés
ensuite, pendant la période communiste, à partir de 1967, tout comme d'ailleurs,
l'ensemble des autres organisations (et manifestations) religieuses. La seconde
raison est que dans ce pays, une de ces confréries soufies, la très hétérodoxe et la
très syncrétique Bektashiyya, est devenue, au lendemain de la Première Guerre
mondiale, une Communauté religieuse musulmane à part, au même titre que la
Communauté musulmane sunnite et les deux Églises chrétiennes d'Albanie,
Église orthodoxe et Église catholique. Et, lorsque vers la fin de l'année 1990 la
pratique de la religion a été de nouveau autorisée par le Gouvernement albanais, la
Communauté bektachie, à l'instar des autres confréries mystiques musulmanes du
pays, a cherché à se rétablir. Les descendants des cheikhs qui avaient survécu à la
terreur anti-religieuse du gouvernement d'Enver Hodja, ont d'abord rebâti les türbe
(mausolées), afin de regagner la légitimité par la baraka ("bénédiction" ou "faveur
divine"61) des saints, et pour retrouver par ce biais les moyens nécéssaires, grâce
aux offrandes des fidèles. Ensuite, quelques uns parmi eux ont essayé de créer des
petits groupes, pour se réunir et commencer à pratiquer le rituel propre à leur
confrérie.
Certains de ces nouveaux « cheikhs » ont été aidés aussi par des cheikhs
albanais du Kosovo (comme ce fut le cas plus particulièrement de ceux
appartenant à la Rifa‘iyya), voire par des cheiks d'autres régions et pays du monde
musulman. On a pu remarquer donc depuis, ici et là, un lent réapprentissage des
pratiques (et des doctrines), que signale par exemple N.Clayer concernant un dhikr
observé en 1993 dans le tekke kâdiri de Tirana, auquel participaient – dans le
même cercle – les hommes et les femmes (non voilées), alors que deux ans plus
tard, on observait déjà une nette séparation au cours des prières rituelles, entre
60
Voir l'analyse des touts premiers de ces films, par D.Tanaskovic (Tanaskovic, 1986). Depuis
cette date, plusieurs autres films sur ce sujet ont été réalisés, notamment par le cinéaste Dan Alex
de Bruxelles.
61 Ou encore, comme l'a très joliment écrit G.S.Colin, "la force bénéfique d'origine divine, qui
provoque la surabondance dans le domaine physique, la prospérité et la félicité dans l'ordre
psychique", EI2, t. I, p. 1063 (de l'éd. fr.).
13
hommes et femmes (ces dernières portant d'ailleurs à cette occasion un voile
blanc). Quant aux ilahi (hymnes religieuses) elles étaient déjà beaucoup mieux
apprises et chantées que précédemment.
De plus, outre le rétablissement ou la consolidation des anciens réseaux
confrériques, trois autres évolutions majeures ont apparu dans le paysage soufi
balkanique, qui doivent absolument être signalées ici :
– Premièrement, l'arrivée de quelques nouveaux réseaux confrériques, soit
par l'intermédiaire de « missionnaires » musulmans venant prêcher en Albanie,
soit par des jeunes musulmans des Balkans ayant fait des études dans les différents
pays musulmans, où certains d'entre eux avaient établis des contacts avec des
confréries soufies locales.
– Deuxièmement, l'arrivée et le développement dans ces régions, de
mouvements que l'on peut considérer globalement comme des « néo-confréries »,
tels que les Süleymandjis62 et les Nurdjus-Fethullahdjis63, originaires tous deux de
la Turquie, et issus de la Naqshbandiyya Les Süleymandjis par exemple, se sont
implantés en Albanie en ouvrant des cours de religion, ainsi qu'un "Centre
religieux turco-albanais". Pour ce qui est des adeptes de Fethullah Gülen, ils ont
étendu leur réseau et leurs activités dans les différents pays du Sud-Est européen
(Roumanie, Bulgarie, Albanie et Macédoine), où ils publient notamment des
éditions locales de leur journal Zaman, et ont ouvert des écoles secondaires
privées, ainsi que (dans certains endroits seulement, pour l'instant) des écoles
religieuses64.
– Le troisième élément important de cette évolution est le prosélytisme chiite,
qui est particulièrement présent dans les milieux soufis de la partie occidentale de
la Péninsule. En effet, de la même façon que les Chiites essayent d'introduire leur
doctrine en Turquie (à travers les groupes alévis locaux), ils essayent également de
diffuser le chiisme dans les Balkans, et plus spécialement par l'intermédiaire de la
réémergence des réseaux soufis locaux. En Albanie par exemple, ils ont approché
les représentants des Bektachis, des Khalvetis, des Rifa‘is et de quelques autres
confréries (dont la connaissance de la mystique musulmane, du reste, est aussi
pauvre que leurs moyens financiers). Ils les aident également à publier des
traductions en albanais d'ouvrages d'orientation chiite, et leur offrent des bourses,
afin que les jeunes Albanais puissent aller faire des études en Iran. Au Kosovo et
en Macédoine, les groupes chiites de l'Iran ou de l'Europe occidentale établissent
également des contacts avec des musulmans de ces régions, dont certains sont
maintenant convaincus de voir dans le chiisme le « vrai islam » de la « troisième
phase », qui doit succéder à l'islam soufi, lui-même considéré comme la « seconde
62
Voir A. Ak, Zarûri Bir Açıklama. "Süleymancilik" ile Yaftalanan Federasyon ve Dernekler.
İthamlara Cevaplar, Istanbul, 1987, 187 p. ; et avant tout : Gökalp, 1990.
63 Voir N.Clayer, dans Bougarel-Clayer, 2001, p. 204-206 ; et dans le même volume, Ferhat
Kentel, « Les Balkans et la crise de l'identité nationale turque », p. 357-395 [cf. p. 386-394].
64 On est moins bien informé cependant, sur quelques autres contacts pris avec des groupes venant
de l'extérieur, comme par exemple avec celui de Cheikh Nazim de Chypre, ou sur une visite faite à
Skopje par un groupe phantomatique s'intitulant les "Mevlevis d'Athènes".
14
phase », après l'islam sunnite de la « première phase ». Une association chiite, qui
s'intitule "Ehli Beyt" a été "fondée", à un moment donné, à Prizren au Kosovo65
Il est difficile d'imaginer comment les divers courants confrériques (qui,
rappelons-le, demeurent très largement marginaux en nombre – sauf évidemment
dans le cas des Bektachis en Albanie –, par rapport au principal courant de l'islam
dans la Péninsule balkanique) se développeront dans les années à venir, mais il est
cependant certain qu'ils sont déjà entrés dans une nouvelle ère. Les Communautés
musulmanes (soufies et non-soufies) de ces régions sont maintenant plus proches
du reste de l'Umma que précédemment. Des nouvelles tendances ont été
introduites chez eux, venant non seulement de l'Est (comme auparavant), mais
aussi des diasporas musulmanes d'Europe occidentale et d'ailleurs. Ces réseaux
soufies des Balkans vont certainement subir des transformations analogues à
celles qui ont eu lieu dans d'autres régions du monde musulman, concernant par
exemple, les adaptations de leur rôle social dans la société moderne. Mais, sur la
scène intérieure, à cause des très importants changements politiques qui ont eu
lieu, ces réseaux confrériques auront nécessairement besoin de chercher à se
repositionner eux-mêmes, face aux nouvelles autorités musulmanes, politiques et
religieuses (non soufis), des pays balkaniques.
2.3. L'organisation et le rôle joué aujourd'hui, sur le plan social,
politique et religieux. – Avant d'examiner la situation actuelle sur chacun des
trois plans énoncés, il y a lieu de rappeler que le repositionnement des confréries
et des milieux soufis des Balkans dont on vient de parler – et sur lequel, comme
on va le voir nous avons relativement peu de renseignements précis pour l'instant
– se manifeste (ou se manifestera) forcément de façon différente, dans chacune
des quatre principales régions concernées (Bosnie-Herzégovine, Kosovo,
Macédoine, Albanie) : suivant la composition "ethnique" des groupes en présence,
leur importance sociale et culturelle au sein de ces régions ou de ces États, puis
aussi suivant la situation politique du moment de chacun de ces quatre "pays", sur
le plan international. Il est évidemment impossible d'essayer de décrire tout cela
en détail ici, ce qui m'oblige donc de nouveau, à présenter un panorama global :
En ce qui concerne le regroupement des confréries mystiques balkaniques,
dans des organismes plus larges, ou dans des associations de ce type, je dois dire
que je ne dispose malheureusement pour l'instant d'aucune information précise sur
le fonctionnement (ou sur des transformations qui auraient éventuellement eu lieu
au cours de la dernière décennie), ni sur le "Tarikatski Centar" de Sarajevo, ni sur
la "ZIDRA" de Prizren. La situation semble être très complexe en Macédoine, où
l'on compterait à l'heure actuelle trois institutions de ce genre, qui sont visiblement
toutes, plus ou moins fantomatiques66 : à savoir, une "Communauté religieuse des
65
Voir : Clayer, dans Bougarel-Clayer, 2001, p. 227, ainsi que les différentes Annexes qui suivent.
Vor CEDIME-SE, August 2000, Muslims of Macedonia, p. 2, 3, 18-20, 25, 35-36, 38-39, 41,
44.
66
15
ordres de derviches musulmans" fondée en 199267 ; un "Conseil des Cheikhs"
(Meshihat na Tarikatite), faisant partie de l'officielle Communautés musulmanes
(sunnite) de Macédoine, "Conseil" qui ne forme donc pas une "Communauté" à
part, mais un "Groupe"68, intitulé "Section de derviches" de la Communauté en
question ; et enfin une "Communauté bektachie" qui n'arrive toujours pas à se
constituer officiellement, faute de pouvoir obtenir une autorisation de la part des
autorités gouvernementales, celles-ci ne voulant pas avoir des problèmes avec la
direction de l'officielle Communauté musulmane sunnite ... Quant à la situation en
Albanie, tout ce que l'on peut dire est qu'il y a eu plusieurs tentatives de
regroupement, mais que celles-ci n'ont pas pu aboutir jusqu'à présent, comme
l'essai de création d'une "Kryesia e sekteve aleviane të Shqipërisë" ("Direction des
sectes alévies en Albanie")69 de Tirana.
Pour ce qui est du rôle joué aujourd'hui par les confréries soufies balkaniques
sur le plan social, ce rôle consistait dans ces régions, avant 1990 (comme j'ai
essayé de le décrire à plusieurs reprises70), dans toute une série de "services" et de
"prestations", dont la première était – et est évidemment encore aujourd'hui –,
l'enseignement des bases (et de "l'histoire sainte") de la mystique musulmane. Il
s'agit également de fournir un cadre propice pour l'élévation spirituelle et
religieuse, ainsi que pour la "cure des âmes", en offrant soutien moral et
"thérapie", selon la croyance en la possibilité de guérison miraculeuse de toutes les
maladies, y compris celle de la stérilité chez les femmes, grâce à l'intercession
bienveillante des saints, et au recours aux thaumaturges vivants et morts ou aux
"traitements médico-magiques". Il peut s'agir même – dans le cas particulier des
populations albanaises – de contribuer à la "reconciliation des sangs", c'est-à-dire
au réglement pacifique de vendetta71. Mais leur rôle est également d'offrir un "lieu
de sociabilité", un foyer populaire d'accueuil, d'information et d'entraide, ou tout
simplement un "club". Du point de vue des adeptes, sur le plan individuel, il s'agit
de pouvoir marquer ainsi son appartenance à une communauté précise, librement
choisie. Dans le cadre d'un dhikr violent (accompagné de mortifications
corporelles extrêmement spectaculaires), il s'agit aussi d'une aventure, d'un
"dépassement de soi", au sein d'une communauté virile "d'hommes entre eux", qui,
bravant le fer et le feu se confirment et se réalisent à leur manière... Y a-t-il eu,
depuis 1990, apparition de tendances nouvelles, ou d'adaptations/transformations
notables, qui seraient liées d'une façon ou d'une autre aux bouleversements
politiques et sociaux qui ont eu lieu depuis, dans ces quatre régions ? Cela est fort
possible bien entendu, mais je dois avouer que je n'en ai pas eu d'échos, en dehors
de ce qu'on peut lire dans quelques textes récents de N. Clayer, que l'on trouvera
dans les Annexes ci-jointes.
67 Il s'agirait ici, presque exclusivement, d'un réseau constitué de tekke dirigés par des cheikhs
gitans qui, avant la dissolution de la Yougoslavie, étaient affiliés à la ZIDRA de Prizren.
68 Il s'agirait-là aussi d'un réseau constitué de tekke dont les cheikhs (ici non gitans) étaient affiliés
auparavant à la ZIDRA de Prizren, mais qui ne veulent pas faire partie de l'association dont il a été
question dans la note précédente.
69 Voir à ce sujet : Clayer, 2000, p. 240, ainsi que les différentes Annexes qui suivent.
70 Voir par exemple Popovic, 1993, p. 139-143.
71 Voir Clayer, 2000, p. 239, note 104.
16
Le rôle politique des confréries mystiques musulmanes balkaniques a été très
réduit dans la période post-ottomane (sauf dans le cas des Bektachis d'Albanie, cas
qui reste évidemment tout-à-fait exceptionnel), mis à part les relations (plutôt
mauvaises ou carrément conflictuelles) de ces confréries avec les dirigeants de la
Communauté musulmane officielle (non-soufie). D'autre part, on a vu plus haut
aussi comment les autorités (non musulmanes) des États en question pouvaient
chercher parfois à utiliser ces mêmes confréries, lorsqu'elles en ressentaient le
besoin, comme dans le cas de la ZIDRA ou du Tarikatski Centar, par exemple. Il
semblerait que cette situation ait peu changé depuis 199072 (sauf peut-être en
Bosnie-Herzégovine), ne serait-ce que du fait que le rôle politique des populations
musulmanes balkaniques d'aujourd'hui est devenu avant-tout l'apanage des partis
politiques musulmans de chacun des États et régions balkaniques73, dont aucun
n'est naturellement un "parti politique soufi").
Quant au rôle religieux du soufisme et des confréries, je pense qu'il faut
d'abord préciser un certain nombre de choses. On voit ainsi par exemple qu'un très
grand spécialiste, Michel Chodkiewicz, considère très clairement que « le rôle des
confréries est de fabriquer la sainteté et de transmettre cette sainteté », assertion
que l'on pourrait compléter utilement à mon avis, par l'opinion de Ziba MirHosseini qui, en parlant de la religion des Ahl-i Haqq74, rappelle qu'il faut surtout
se pencher sur la question : «...how the popularisation of certain mystical aspects
of Islam has taken the form of a religious system negating many of Islam's
fundamentals in terms of belief ritual and symbolism ». Car, on observe
aujourd'hui, tout comme hier, une dichotomie flagrante entre – d'une part, les
autorités de "l'islam de la mosquée" (qui prônent ce qu'ils estiment être un islam
rationnel et "scientifique"), et – d'autre part, un islam "déviationniste" (ou pas),
mais en tout cas très différent du premier, à savoir "l'islam du tekke", prôné
également depuis des siècles par ses propres représentants. Celui-ci contiendrait –
suivant l'optique des observateurs extérieurs (spécialistes ou non ) – soit des
"grains de sagesse infuse", soit des "grains de folie pure", mais en tout état de
72 La seule mention que j'ai pu trouver sur cette question est celle concernant l'Albanie, notée par
N. Clayer (Clayer, 1997a, p. 132) qui écrit : « Unlike the Sunni Community, the Bektashi
Community appears so far not to have played an important political role except perhaps in the
context of Greek-Albanian relations and the problem of Northern Epirus ».
73 Voir à ce sujet, dans Bougarel-Clayer, 2001 (Xavier Bougarel, « L'islam bosniaque entre
identité culturelle et idéologie politique », p. 79-132 ; Rajwantee Lakshman-Lepain, « Albanie : les
enjeux de la réislamisation », p. 133-176 [voir p. 136-138 et 147-150] ; Nathalie Clayer, « L'islam
facteur des recompositions internes en Macédoine et au Kosovo », p. 177-240 [voir p. 204-206 et
227] ; Nadège Ragaru, « Islam et coexistence intercommunautaire en Bulgarie post-communiste »,
p. 241-288) ; et dans Gaborieau-Popovic, 2001 (Nadège Ragaru, « Quel islam en Bulgarie postcommuniste ? », p. 125-159 ; Nathalie Clayer, « Islam et identité nationale dans l'espace albanais
[Albanie, Macédoine, Kosovo] », p. 161-181 ; Xavier Bougarel, « Trois définitions de l'islam en
Bosnie-Herzégovine », p. 183-201) ; ainsi que la thèse inédite de Xavier Bogarel, Islam et
politique en Bosnie-Herzégovine : le Parti de l'action démocratique, Paris, Institut d'Études
politiques, 1999, 2 vols., 585 p.
74 Colloque de CERI (Centre d'Études et de Recherches Internationales, Fondation Nationale des
Sciences Politiques), Paris, juin 1993.
17
cause beaucoup plus qu'un "grain de mysticisme", à savoir : une vision totalement
mystique de l'islam, de la religion et de la spiritualité en général. Cependant, le
soufisme est une affaire strictement individuelle, alors que le "confrérisme" est,
par la nature des choses, une affaire collective, ce qui implique évidemment toute
une série de devoirs et de contraintes.Il s'agit donc de deux choses à ne pas
confondre comme on le fait trop souvent chez les "demi-savants" et dans les
media. Mais pour revenir à notre sujet, il est, me semble-t-il, extrêmement difficile
de savoir si les événements survenus depuis 1990 ont influé (ou non) de manière
significative sur le rôle religieux du "soufisme", par exemple pour des raisons de
désanchantements qui auraient pu avoir eu lieu dans les milieux musulmans
"confrériques" et "non confrériques" des Balkans75.
3. Le rapport des confréries actuelles avec le soufisme classique.
(Dans quelle mesure les confréries utilisent les textes classiques du
soufisme dans la prière, dans la vie spirituelle, etc. ; quels sont les textes
classiques et les auteurs soufis utilisés)
Selon ce que j'ai pu observer personnellement "sur le terrain", il n'y a
pratiquement aucun rapport entre les confréries mystiques musulmanes
balkaniques actuelles et le "soufisme classique", sauf peut-être, dans quelques
rarissimes cas, et encore ! Cela, d'une part – parce que le niveau théologique (et
parfois le niveau intellectuel) de l'immense majorité de cheikhs et de "cheikhs",
était et reste extrêmement modeste, du fait qu'il s'agit de gens qui ont très rarement
pu fréquenter des établissements scolaires ou des maitres spirituels ayant de
solides connaissances théologiques ; d'autre part – parce qu'il y a eu pendant plus
d'un demi-siècle, une coupure plus ou moins totale, avec les milieux confrériques
de Turquie (eux-mêmes d'ailleurs très fortement ébranlés, ou carrément anéantis
depuis 1925, par les réformes de Mustafa Kemal). Ainsi, il n'y a pratiquement plus
de cheikhs capables de lire l'arabe ou le turc ottoman (et encore moins le persan,
bien entendu), alors que les principaux tekke possèdent de petites bibliothèques,
contenant en plus de leur silsile ou de leur tomâr-name quelques ouvrages, voire
quelques manuscrits anciens76. Il s'agit donc ici d'une "mystique (ou plutôt d'une
dévotion) populaire", très éloignée (sauf à des rares exceptions près) de la grande
75
Un des cas extrêmement intéressants est évidemment celui de la "Sainte Éléonora" en Albanie,
qui prétendait dans les débuts de sa "mission", faire partie des hautes sphères du Bektachisme
albanais, aux grand dam évidemment de ces dernières. Voir à ce sujet, un long passage dans
(Clayer, sous presse), qui cite notamment : Misioni Shenjtëror Eleonorë. Zonja e shpirtit në
veprimtarinë Misionare, [The Holy Mission Eleonora. The Lady of Soul in her missionary
activity], Tiranë, s.d., p.28-29, au sujet duquel N.C. écrit : "She claims to be since 1987 regularly
in spiritual contact with the soul of a Bektashi saint, Abdyl Baba Qesaraka who lived around 1800,
and to be the transmission channel for his messages and powers. Thus, at the beginning of the
1990s, she was acting as a kind of Bektashi mediator, healing a lot of people coming to her.
However, since she could not (and maybe also because she did not want to) integrate into the
Bektashi network, she has progressively formed a particular group with a special doctrine and a
special ritual, inspired by energy, meditation and cosmos theories, which ressembles more a
Western sect, than a Muslim mystical Brotherhood".
76 Pour illustrer ce faible niveau, on peut signaler par exemple le fait que la halvet (retraite) ne se
pratique plus nulle part, tandis que le rituel se limite très souvent à un dhikr réduit et simplifié.
18
littérature mystique musulmane médiévale, au sujet de laquelle d'ailleurs les
protagonistes balkaniques n'ont que vague idée77. Nous risquons d'ailleurs de ne
rien comprendre à ce qui se passe dans ces milieux, en cherchant obstinément à les
comparer aux cercles classiques de la grande mystique musulmane, telle qu'elle a
été élaborée par les noms célèbres. En effet, ce avec quoi nous avons à faire
aujourd'hui dans les milieux mystiques musulmans des Balkans est une toute autre
chose : ce sont des groupes d'hommes et de femmes issus la plupart du temps de
milieux modestes et même très modestes, qui spontanément et de leur plein gré
(parfois depuis plusieurs générations), encadrés par des personnes auxquelles elles
reconnaissent certaines qualités, vertus et pouvoirs (souvent "surnaturels") vivent
une "expérience" commune, dans laquelle une forme de spiritualité, même si
celle-ci peut paraître "naïve", voire "primitive", n'est nullement absente.
Quant à l'utilisation éventuelle des textes classiques du soufisme dans la
prière, dans la vie spirituelle etc., il est évidemment très difficile de se prononcer
de façon catégorique, du fait que je n'ai pas eu l'occasion de le vérifier partout.
Mon opinion personnelle, d'après ce que j'ai pu constater sur place, est que l'on
utilise bien entendu : les formules du rituel de chaque confrérie ; on récite les
prières et les wird (hymnes et litanies, qu'on récite ou on chante) ; on chante les
ilahi (poèmes religieux) qu'on a appris par cœur, mais que la plupart de derviches
(et souvent aussi des cheikhs) ne comprennent pas, ne sachant pas ni le turc (sauf
évidemment dans les dans les milieux turcophones), ni l'arabe. Cela se résume
donc, en gros (et encore dans le meilleur des cas), à l'utilisation des ouvrages
populaires turcs plus ou moins récents, ou à quelques traductions faites de seconde
ou de troisième main. Nathalie Clayer remarque d'ailleurs très justemment à ce
sujet que l'une des œuvres les plus lues et les plus récitées dans les milieux
bektachis albanais (tout comme dans ceux du Kosovo et de la Macédoine, ainsi
que chez les Sa‘dis de ces deux régions) est la Hadikat üs-suada du poète ottoman
d'origine persane, Fuzuli (m. en 1556)78. Pour terminer, il y a lieu de signaler
aussi, que quatre autres traductions récentes (dont deux font partie d'ouvrages bien
particuliers du soufisme classique), sont peut-être "utilisés" dans les milieux
confrériques balkaniques, bien que, logiquement parlant, tous les quatre devraient
être totalement hermétiques à ces milieux. Il s'agit du Mathnawî de Djalâl al-Dîn
Rûmî79 ; d'une anthologie de discours, de missives, de recommandations et de
propos sentencieux, intitulée Nahdj al-Balâgha, attribuée à ‘Alî b. Abî Tâlib (m.
77 Voire les publications diverses des milieux confrériques balkaniques par exemple, et notamment
les résultats d'une enquête menée récemment chez les Bektachis de Macédoine (cheikhs et
derviches), par Metin Izeti, Tarikati Bektashian, Tetovë, Çabej, 2001, 184 p.
78 Son ouvrage ["Le jardin des bienheureux"] est dédié aux martyrs de Kerbela. On en récite des
extraits dans certains tekke, tout au long des cérémonies du mâtem, les dix premières nuits du mois
de muharrem. La Hadika, comme on l'appele en Albanie (et chez les Albanais du Kosovo et de
Macédoine) fut traduite, entièrement ou en partie, plusieurs fois en albanais, parfois même avec
une adaptation. La toute dernière traduction semblerait être celle publiée il y a cinq ans : Hadikai
Suada, Lulishte e Shenjtorëve, Fushë-Kruje, korrik 1997, 368 p.
79 Xhelaluddin Rumiu, Hazreti Mevlanaja, Mesnevia, Pjesa e parë, Gjakovë, 1997, 480 p. Il s'agit
là d'une traduction en albanais, par le Shejh Jahja, du "Grand" tekke sa‘di de Djakovica ("Teqja e
Madhe"), (du premier tome, publié à Sarajevo en 1985), d'une traduction faite du persan en
serbocroate, par le cheikh Fejzulah Hadzibajric de Sarajevo, dont il a déjà été question plus haut.
19
en 661)80 ; du prétendu "Dîwân de ‘Alî"81 ; et enfin, du Vilâyet-nâme de Hadjdji
Bektash (XIII-XIVs.)82.
80
Nahjul Balagha, thënie të zgjedhurra të Imam Aliut, s.l. (Tiranë), Komunitetit Bektashian
Shqiptar, s.d. (avant 1999 ?), (= Biblioteka e Bektashizmës), 319 p.
81 Divani Ali, (Libri Ali), Tiranë, Koha, 1999, 303 p.
82 Shenjti mbi gur (Vilajetname), Mistika dhe Urtësia, Tiranë, Urtësia, (Biblioteka e
Bektashizmës), 2000, 270 p.
20
ANNEXE I : [Albanie]
"The Bektashi Community" et "The dervish brotherhoods"
(extrait tiré de : N. Clayer, « Islam, State and Society in Post-Communist
Albania », dans Hugh Poulton and Suha Taji-Farouki, (Eds.), Muslim Identity and
the Balkan State, London, Hurst and Co, 1997, p. 115-138 [ici p. 125-130]).
« The Bektashi Community. Albanian Bektashis encounter more difficulties
than the Sunnis in their efforts to reorganize themselves. Unlike the latter, they do
not enjoy the benefits of material and spiritual support from abroad, largely
because of the situation of Bektashism globally. A few Bektashi groups survive
among the Albanians in Kosovo, Macedonia, the United States and Turkey where
they form a small section of the larger Turkish Bektashi community together with
an important community of Alevis who share many beliefs and practices with
them. However, since the end of the nineteenth century Albanian Bektashism has
pursued its own path, which is quite different from that of Bektashism in Turkey
(1). Hence, the leaders of the Community in Albania can rely only on the
contributions of private individuals or collectivities among Albanian Bektashis at
home, in Kosovo, Macedonia and Turkey, and in the Albanian diaspora in
America or Australia (2).
However, assistance has been offered by Iran. While it would be unthinkable
for the Arab countries or Turkey (which does not favour its Alevi minority) to
provide aid to as unorthodox an expression of Islam as Bektashism, Iran's attempt
to win over Bektashis and members of other dervish orders is unsurprising. At the
end of 1993 and early in 1994, the representative of Albania's communities were
invited to visit Iran. During their short stay Dede Reshat Bardhi (the new head of
the Bektashis) and Baba Bajram (another Bektashi baba residing in Tirana)
obtained grants for students and probably some financial aid for their Community
as a whole from the Iranian authorities (3). Nevertheless this aid appears to have
been limited, since no significant change is observable in the Community's
situation. Its leaders continue to demand the long-awaited restitution of the
Community's confiscated properties, which in the past were its main source of
income (4).
As a consequence of this lack of material and spiritual resources, few
Bektashi tekkes are functioning; of some sixty which existed in the past, only five
or six have reopened. The first of these was the main tekke (or Kryegjyshata) in
Tirana, the opening of which was celebrated on 22 March 1991 (four months after
the inauguration of the first mosque in Shkodër). The few surviving babas (who,
along with dedes, are the leaders and instructoors of dervishes) and dervishes were
assigned to other tekkes – in Fushë-Krujë, Elbasan, Korçë, Koshtan (in the
Mallakastra region) Gjirokastër, and later also in Krujë Kulmak (Mount Tomor),
Martanesh and Nepravishtë. However, the requirement for religious personnel
continues to be a grave problem. The remaining 'clergy' are not highly qualified.
Baba Rexhebi, the most learned of the babas and Honorary Head of the
Community, died in the summer of 1995 in his tekke near Detroit. To complicate
matters, the initiation and training of new dervishes require a minimum of three
years. Aspirants, who to date have been few, must serve in a tekke for years before
they may become dervishes, celibate dervishes (myxheret) and then babas (5).
21
Such difficulties notwithstanding, the Albanian Bektashi Community took an
important step towards reorganisation by convening the 'Sixth World Bektashi
Congress' in Tirana on 19-20 July 1993 (6). Albanian delegates from all regions of
the country, as well as from Kosovo, Macedonia, Turkey and the United States
confirmed the revival of Albanian Bektashism. New statutes were elaborated (7),
but the main subject of discussion was the definition of Bektashism: should it be
considered a Community ('komunitet' in Albanian), i.e. an organisation
independent of the Sunni Muslim Community, or simply a dervish order ('sekte')
within the Sunni Muslim Community? In line with historical tradition, the first
option was adopted by the vast majority of the assembly. This outcome certainly
has important implications for the future of Islam in Albania.
Estimates of how many of the Bektashi population throughout the country
have been re-mobilised are difficult to obtain. In many places, türbes (tombs of
saints) are being restored or rebuilt (8) and commitees of lay members have been
formed to assume responsibility for future activities of this nature. However, it is
notable that Bektashi activities are more intense in the north of the country, and
there is a slight predominance of northerners among the leaders; the Community's
two main figures are Dede Reshat Bardhi (the overall head or Kryegjysh) and
Baba Selim (the baba of Fushë-Krujë), both of whom are from the north. This is
significant because in the past Bektashism was always dominated by the southern
Tosks.
As for relations between the Bektashi Community and the other dervish
orders, the new statutes contain an article stipulating that the Bektashi Communty
can accept in its bosom other dervish orders, like the Halvetis, Rifa'is and Kadiris.
However, this clearly does not hinder these orders from attempting to reorganise
themselves separately.
The dervish brotherhoods. In the past the dervish orders or dervish
brotherhoods were much in evidence and enjoyed a widespread presence in the
daily life of many Albanian Muslims. Today these orders, and especially the
Halvetiyya, Kadiriyya, Rifa'iyya, Sa'diyya and Tijaniyya, face a difficult situation.
Like other religious Communities, the orders experience economic problems in
their endeavours to restore and rebuild their places of worship (tekkes and türbes)
(9). They also confront a grave problem over the creation of future leaders, i.e.
new shaikhs. Transmission of the mystical tradition was almost universally broken
in the Communist period (10), and as a result the descendants of former shaikhs
have had no opportunity to acquire the necessary knowledge and experience.
Furthermore the Sufi orders, much more than the Sunni and Bektashi
communities, have suffered and continue to suffer from the upheavals experienced
by Albanian society as a whole. Wherever they settled, the dervish brotherhoods
assumed an important role not only in the religious life of the people but also in
their social, economic and at times even political life. The emergence of new
powers and social forces makes it unlikely that they will soon regain the social
position they occupied in the past.
Even though numerous türbes are being at least partly rebuilt throughout
Albania by the families of shaikhs, and some descendants of former shaikhs have
declared themselves shaikhs, are producing amulets and have sent one of their
22
children to study in a medrese at home or abroad, the activity of the dervish
brotherhoods remains limited. The Halvetiyya, which in the past was the most
widespread among the Albanian dervish orders with about 150 tekkes in the northeast, central region and south, is virtually without any establishment where the
ritual (zikr) can be performed. The head of this order in Tirana attempted to reestablish an organisation such as existed in the past to assemble all the dervish
orders, but the attempt failed because of a clash of interests. The Rifa'iyya is much
more active. This order expanded relatively late – in the 1920s – in the west of
Albania from Shkodër to Vlorë. Its current revival is due largely to the efforts of
the enterprising Sheh Xhemali, the Albanian Rifa'i shaikh of Prizren (in Kosovo)
and head of the ZIDRA (Community of the Dervish Orders of Yugoslavia), who
has appointed shaikhs in Tirana, Shkodër and elsewhere. The Kadiriyya, which
had about twenty-five tekkes in central Albania, notably in Tirana and the
Peshkopi-Zerqan region, is barely active. The Sa'diyya, which had only a few
tekkes in the southern region of Tepelen and in the extreme northern Tropojë
region, has succeeded in re-establishing some representatives in the latter area;
these are connected with the Sa'dis of Djakovica in Kosovo. The Tijaniyya, the
order closest to the ulema before the Second World War, is represented today by
the mufti of Shkodër, Faik Hoxha, son of the former head of the Tijaniyya order,
Qazim Hoxha.
As the case of the Rifa'iyya demonstrates, the only real chance for the dervish
brotherhoods to reconstitute their networks comes from outside the country. The
impetus may come not only from the Albanian milieux of Kosovo and Macedonia
but also from other Sufi networks in Turkey and elsewhere, especially through the
medium of young Albanian students in Istanbul, Cairo and other Muslim centres.
It cannot be predicted exactly which of the Sufi orders will be 're-imported' or
newly imported in this way in the coming years (11) ».
Notes :
(1) At the end of the nineteenth century the Albanian Bektashis integrated a
nationalist component into their doctrine while the Turkish Bektashis were close
to the Young Turk movement. On this subject see Nathalie Clayer, 'Bektachisme
et nationalisme albanais' in A.Popovic and G.Veinstein (eds.), Bektachiyya,
Istanbul: Isis, 1995, pp. 277-307. The new leaders of the Albanian Bektashi
Community have made contact with Bedri Noyan, head of the Bektashis in Turkey
and even visited him there to receive a hilafet (diploma of investiture) and to go
on pilgrimage to the tekke of Haci Bektaş. The question of where the order's centre
is located – Haci Bektaş or Tirana – still remains a point of disagreement between
them (cf. Cemal Şener, Yaşanan Alevilik, Istanbul: ANT, 1993, pp. 37-38).
(2) It seems that Albanians in the United States no longer contribute as much
as they did in the past, as for example after the First World War, when it was also
necessary to rebuild a large part of the Bektashi tekke.
(3) Cf. Urtësia, Tirana, n°. 2, February 1994, p. 2.
(4) Evidence of the poor material means of the Bektashi Community lies in
the fact that the Bektashi journal Urtësia (The Wisdom), which was launched in
December 1993, had to stop after its third issue (April 1994).
23
(5) These are 3 of the successive degrees of the Bektashi hierarchy (see
N.Clayer, 'L'Albanie' [1990], p. 47 ff.).
(6) The 5th congress was held in Tirana in 1950.
(7) These have been published under the title Statuti i Komunitetit
Bektashian, Tirana: Shtyp. 'Gjergj Fishta', 1993, 28 pp. Internal regulations were
also published at the same time (Rregulore e brendeshme e Komunitetit
Bektashian), Tirana: Shtyp. 'Gjergj Fishta', 1993, 28 pp.).
(8) The restoration of the two main Bektashi pilgrimages sites, Sari Saltik on
the top of the Kruja Mountain and that of Abbas Ali on the top of the Tomor
(south of Berat) constitutes a significant action aiming at the re-mobilisation of the
Bektashis around the two symbolically most important sites for their community.
(9) A reference was made above to the visit to Iran of several members of
various dervish orders, along with the Bektashi representatives. Although it is
probable that they did receive some financial help, it seems that as for the
Bektashis, it was not large.
(10) Certain of the most prominent shaikh were killed at the beginning of the
Communist period, sometimes simultaneously with their eldest sons and potential
successors.
(11) Two clues have come to light to date concerning the possible
introduction of new Turkish Sufi networks into Albania. First is the circulation in
Albania of a Nakshbandi opuscule, published in Istanbul by the Waqf Ikhlas
(Mevlânâ Halid-i Bagdâdî, Besimi dhe Islâmi, Istanbul, 1992). Second is the
affiliation of an Albanian student to a Kadiri shaikh in Istanbul.
*
24
ANNEXE II : [Albanie]
" Die Erneuerung des Bektaschismus nach 1990 "
(extrait tiré de : N.Clayer, « Der Bektaschi-Orden in Albanien », dans Werner
Daum (éd.), Albanien zwischen Kreuz und Halbmond, München, Staatliches
Museum für Volkerkunde, 1998, p. 152-158 [ici p. 157-158]).
« Seit dem Fall des Kommunismus sind die Religionen in Albanien wieder
frei. Wie die übrigen Religionsgemeinschaften auch, müssen die Bektaschis ihre
Kultgebäude aufbauen. Geistliche ausbilden und das Volk wiedergewinnen. Für
die Bektaschis ist dies schwieriger als für die sunnitische Gemeinschaftt, die von
außen her unterstützt wird. Es ist undenkbar, daß die arabischen Länder oder gar
die Türkei, die nicht einmal ihre eigene alavitische Minderheit fördert,
Unterstützung für einen als wenig orthodox geltenden Islam in Albanien leisten
könnten. Die albanischen Bektaschis können sich also nur auf sich selber
verlassen, und das ist sehr wenig, da sie den Grundbesitz, der einstmals ihre
wirtschaftliche Unabhängigkeit sicherte, nicht zurückerhalten haben. Die Spenden
Einzelner, auch aus der Diaspora in Amerika, Australien, der Türkei, Mazedonien
und Kosovo bleiben bescheiden, wie man an der geringen Anzahl der jetzt wieder
arbeitenden Tekken und dem beklagenswerten baulichen Zustand der übrigen
sehen kann. Das wichtigste Zentrum des Ordens heute liegt in Tirana. Es wurde
am 22. März 1991, vier Monate nach der ersten Moschee, wiedereröffnet. Nur ein
Zehntel der früheren Tekken, insgesamt sechs, sind wieder in Funktion. Dort wo
es noch keine Tekke gibt, bemühen sich die Gläubigen, wenigstens die Türben –
Grabstätten von Babas – wieder zu restaurieren.
Was den Wiederaufbau der Gemeinschaft selber anlangt, so versammelten
sich beim sechsten Kongreß der Bektaschis (Tirana, Juli 1993) rund fünfhundert
Personen aus den verschiedenen Regionen des Landes: Kruja, Tirana, Elbasan,
Korça, Gjirokastër, Mallakastra und Vlora, aber auch aus dem Kosovo und aus
Mazedonien. Die Gemeinschaft beginnt wieder, sich zu konsolidieren. Sie hat sich
neue Statuten gegeben. Seit Dezember 1993 erscheint eine Zweimonatszeitschrift
mit dem Titel Urtësia (Weisheit). Das Hauptproblem ist aber die Reorganisation
der Hierarchie: Heute gibt es, nach dem Tod des Baba von Elbasan 1992, nur vier
Baba hohen Alters und zwei Derwische. Hilfe aus dem Ausland kann es schon
deswegen nicht geben, weil die Gemeinschäft in der Türkei seit 1925 offiziell
verboten ist, und ihre wenigen dennoch praktizierenden Vertreter verheiratet sind,
während die albanischen Bektaschis zum Zölibatszweig gehören. Die kleinen
Gemeinschaften in Mazedonien und im Kosovo haben selber nur noch einen oder
zwei Babas. Und auch wenn Baba Redjebi in Detroit heute als das geistige
Oberhaupt auch der albanischen Bektaschis gilt, gibt es auch von dort keinen
Nachwuchs. Hinzu kommt die Schwierigkeit, daß die Bektaschiya zusätzlich zum
Bekenntnis auch noch die Initiation ihrer Mitglieder verlangt. Der Kandidat muß
wenigstens drei Jahre an einer Tekke dienen – mit der Hand – und sich dabei
unterweisen lassen. Nur fünf junge Männer leben derzeit im Zentrum in Tirana
und zwei in Elbasan. Doch wurden in jüngster Zeit einige junge Leute im Iran
fortgebildet.
Die Remissionierung der Gläubigen macht gewisse Fortschritte. Gruppen von
initiierten Laien (muhib) haben sich hier und da gebildet. In Gjirokastra sind es
25
etwa 150 und in Elbasan etwa 30. In der Tekke von Tirana, der aktivsten seit dem
Wiederbeginn, finden häufig Initiationszeremonien statt. Man sieht hier auch
immer wieder Paare oder junge Frauen mit ihren Kindern. Insgesamt aber ist die
geringe Zahl der Geistlichen ein beträchtliches Hindernis für die
Wiedergewinnung der Bevölkerung. Hinzu kommt, daß die junge Generation im
Lande ganz ohne Religion aufgewachsen ist, und manchmal nicht einmal weiß,
was « an Got glauben » bedeuten könnte.
Heute kann man deshalb noch kaum Voraussagen darüber machen, welche
Stellung die Bektashiya in Albanien im nächsten Jahrhundert einnehmen wird,
und ob sie vielleicht wieder das werden kann, für was man sie – zu Recht oder zu
Unrecht – in den dreißiger Jahren hielt – nämlich eine Brücke zwischen Islam und
Christentum, zwischen Halbmond und Kreuz ».
*
26
ANNEXE III : [Albanie]
" La Kadiriye albanaise depuis 1990"
(extrait tiré de : « La Kadiriye en Albanie », Journal of the History of Sufism,
1-2, (Special Issue, The Qâdiriyya Order), Istanbul, Simurg, 2000, p. 213-244 [ici
: p. 238-240]).
« Comment les membres de la Kadiriye ou leurs descendants abordent-ils,
après ce long silence, la période qui a débutée en 1990-91, avec la réhabilitation
des cultes, la libéralisation du système, la crise politique, sociale et économique,
l'ouverture du pays, l'arrivée massive de missionnaires religieux "de tous poils",
etc.?
Comme la plupart des familles de cheikhs, les familles de cheikh kadiris non
seulement s'intéressent à leur passé, mais tentent de faire revivre la tradition, ne
serait-ce que partiellement. Par là, elles essaient aussi de retrouver un certain
statut dans la société, voire dans certain cas de tirer quelque avantage économique.
On a ainsi assisté petit à petit à la reconstruction de türbe, centres de dévotion
populaire et sources de gains (plus ou moins lucratives) pour leurs gardiens. Dans
la région de Peshkopi, la réorganisation des türbe et des tekke aurait été menée par
Mensur Shehu de Peshkopi (1). En octobre 1992, la reconstruction du tekke (i.e.
du türbe) de Zerqan fut entamée par Fadil Shehu, le fils du cheikh Hajredin. Deux
ans plus tard eut lieu l'inauguration officielle, en présence du chef de la confrérie
des Bektachis. La cérémonie comprenait une "partie scientifique" (c'est-à-dire une
communication sur l'histoire du tekke), puis une cérémonie religieuse, avec un zikr
mené par Mensur Shehu et des prières, pour finir par un dîner. À Tirana, le 26
octobre 1992, le tekke (en réalité türbe) de Dervishe Hatixhe/Hatice fut lui aussi
inauguré, en présence de personnalités politiques et civiles, du cheikh halveti
Muamer et du chef de la Communauté musulmane (2). Néanmoins, la volonté
dans certains milieux de présenter Dervishe Hatixhe comme une sainte
guérisseuse et protectrice de la capitale (en la comparant parfois à la Mère
Thérésa), ne tarda pas à déclencher une réaction de la rédaction du journal de la
Communauté musulmane. On y précisait que dans l'islam il n'y avait jamais eu de
création d'un symbole, d'un saint ou d'un protecteur de ville, que tout ceci n'avait
rien à voir avec la religion musulmane, et que les musulmans étaient uniquement
les serviteurs de Dieu (3). Cette réaction illustre la position du courant aujourd'hui
dominant au sein des cercles dirigeants de la Communauté musulmane, très
opposé aux confréries et au culte des saints (4). Le türbe, gardé par une femme, est
néanmoins très fréquenté, notamment par les mères qui viennent prier pour leurs
fils travailleurs clandestins en Italie ou en Grèce.
Au delà du culte des saints, les anciens centres de la Kadiriye ne sont guère
actifs, faute de cheikhs. Si à Tirana, au tekke de Sheh Dyrri Horasani se déroulent
des zikr, ils sont la plupart du temps menés par un derviche rifa‘i (5). Conscients
de leur manque de formation, de connaissances religieuses et mystiques dû à la
coupure plus ou moins nette dans la chaîne de transmission, les familles de
cheikhs sont les premières à vouloir qu'au moins l'un des jeunes membres fasse
des études religieuses dans les medrese nouvellement ouvertes dans le pays (6), ou
mieux encore à l'étranger, parmi les contingents de boursiers des pays arabes et
musulmans. Qu'en résultera-t-il ? Ces jeunes recevront-ils seulement un vernis de
27
culture religieuse, deviendront-ils des oulémas, ou essaieront-ils ensuite de
s'initier auprès d'un cheikh de la Kadiriye ou d'une autre confrérie ? On ne peut le
savoir, bien sûr, mais on peut déjà citer l'exemple d'un jeune homme de la famille
des cheikhs de Peshkopi, Ali Shehu, qui a été envoyé à Istanbul, où il a été
rapidement attiré par une yurd de Kadiris (lié au tekke de Tillo, près de Siirt),
installés dans le quartier de Fatih (7). Lorsque je l'ai rencontré en juin 1995, il
semblait en bonne voie pour diffuser un peu plus tard une nouvelle branche de la
Kadiriye dans sa région natale.
En attendant, les descendants des anciens représentants de la Kadiriye ont
participé avec les fils des cheikhs des autres confréries à une première tentative de
réorganisation des tarîkat albanaises renaissantes, en dehors de la Communauté
bektachie. Mensur Shehu de Peshkopi a assisté à la réunion organisée à cet effet,
en avril 1994, par le cheikh halveti de Tirana, Sheh Muamer, qui tente de faire
revivre l'organisation des "Sectes alévies" que dirigeaient ses aïeux, en y
englobant les confréries qui avaient opté autrefois pour l'organisation concurrente
Drita Hyjnore (8). D'après le compte rendu publié grâce à une firme à financement
iranien (IRALB) (9), Mensur Shehu a été élu membre de la "Direction des Sectes
alévies" (Kryesia e sekteve aleviane) et membre de la commission chargée
d'organiser le Quatrième congrès des tarîkat albanaises (10). En réalité, à la suite
de dissensions internes et des problèmes économiques et politiques qu'a connu
l'Albanie depuis, aucun congrès de ce type n'a eu lieu à ma connaissance ».
Notes :
(1) Cf. Sheh Ismail Aga, Vendet e shenjta shqiptare. Tariikatet, s.l., 1995, p.
17-18. Mensur Shehu, fils du cheikh Besim Selimi, est né en 1931 à Peshkopi. Il a
d'abord étudié à l'école primaire locale, puis à la medrese de Tirana (entre 1949 et
1954). De 1956 à 1963, il a exercé la fonction de müfti à Kruja, et de 1963 à 1967
dans la région de Gjirokastër. Avec l'interdiction des pratiques religieuses, il est
devenu ouvrier (1967-1991). Depuis 1991, il est à nouveau imam de Peshkopi et,
détail intéressant, il a été nommé président de la Commission de réconciliation des
sangs de la préfecture de Dibra (couvrant les régions de Peshkopi, Bulqizë et
Mat). Cf. Mynir Shehu, Gjenealogjia..., p. 87.
(2) Cf. Drita Islame, 21, octobre 1992, p. 4.
(3) Cf. Drita Islame, 23, novembre 1992, p. 3.
(4) À ce sujet, cf. N. Clayer, « Islam, State ...[1997a] », op. cit., p. 124-125.
(5) Les descendants de la famille Horasani y participent cependant. Il est à
noter qu'au début (en 1993 par exemple), hommes et femmes participaient de
façon indifférencié au zikr. Deux ou trois ans plus tard, la séparation des sexes est
plus nette : les femmes se voilent pour la cérémonie, elles s'assoient sur l'un des
côtés, etc.
(6) Par exemple, un enfant de la famille des cheikhs de Zerqan étudiait en
1995 dans un centre islamique créé à Bulqizë par des missionnaires arabes.
(7) Cette yurd est dirigée par le cheikh el-Seyyid el-Şeyh Ali Efendi, auteur
d'un opuscule intitulé Irşad' ül-Muridîn, Istanbul, Fatih, s.d.
(8) Cf. supra.
(9) La République islamique d'Iran est assez présente en Albanie. Ses
"missionnaires" utilisent beaucoup la "filière" des anciens milieux confrériques
28
pour pénétrer dans la société (à propos des Bektachis notamment, cf. N.Clayer, «
Islam, State... [1997a] », op. cit., p. 126).
(10) Konferenca kombëtare aleviane. 11 prill 1994, Tiranë, [IRALB, 1994],
brochure de 40 p. (cf. p. 36 et 39) ; et Sheh Ismail Aga, Vendet e shenjta
shqiptare. Tarikatet, s.l., 1995, p. 58-62. Pour ce qui est de l'organisation propre
de la Kadiriye albanaise, en 1994 également, Mensur Shehu a été choisi président
de la Direction de la confrérie, Bujar Horasani (de Tirana) vice-président, Fadil
Shehu (de Zerqan) secrétaire, Ali Dervishi (de Krajka) membre de la Direction, de
même que Mehmet Kostenja (de Strkçan) et Zyber Shehu Dushaj de Bulqizë (cf.
Mynir Shehu, Gjenealogjia..., p. 88).
*
29
ANNEXE IV : [Albanie]
" Bektashism, the other 'Muslim' or 'Albanian' religious alternative "
(extrait tiré de : N.Clayer « God in the "Land of the Mercedes", the religious
communities in Albania since 1990 », à paraître dans Österreichische Osthefte,
Sonderband : Albanien, Vienne, 2002.
« Bektashism acquired a specific place on the Albanian religious and political
scene since the end of the nineteenth century. It became de facto an independent
religious Community within the framework of the Albanian state, as already
mentioned. The consequence of this singularity was the weakening of the (Sunni)
Islamic Community in the country. That is why a polemic broke out already in
1929-1930 about the organic relation the Bektashi Community must have with the
Albanian Islamic Community (1). Since 1990, the same issue reappeared, not
without a political dimension. The independence of a Bektashi Community
reduces the power of the Islamic community on a numerical as well as on a
political level. It can also be a means of promoting "another Islam", a "religion"
interpreted as a "bridge between Islam and Christianity", or even as an "Albanian
religion". Since 1990, the two trends – for or against an organic tie between the
two Muslim Communities – are coexisting and are instrumentalized by the
political authorities.
During Sali Berisha's time (1992-1997), unlike the Islamic Community, the
Bektashi Community had no privileged links with the highest political authorities.
The group around Baba Reshat Bardhi (the Kryegjysh or head of the Community),
which was in favour of an independent status, won the leadership of the Bektashi
Community. On the occasion of the 6th Bektashi Congress held in Tirana in July
1993, Baba Selim, the head of the tekke of Fushë-Krujë, expressed the opinion of
the other trend, more in accordance with the will of the Democratic party, but
representing only a minority within the Bektashi community (2). Berisha's party
could only rely on small groups of Bektashis (like in Lazarat, a Democrat
stronghold near Gjirokastër), because members of the brotherhood are often
natives of Southern areas which were communist strongholds. It is striking that,
although Berisha's government was not visibly unfavourable to Bektashism, it is
only with the return of the Socialist to power that is experienced a significant
evolution (3).
Indeed, since 1997, the Bektashi Community has been trying to transform
itself, on a national as well as on international level. As a consequence of these
changes, the conflict between Baba Reshat Bardhi's entourage and Baba Selim
(probably backed by right wing circles) (4) intensified. This conflict, more than a
doctrinal dispute, is a fight for power within the Community with an external
political dimension. In 1999, both sides published books to expose their positions
(5). Baba Selim charges the leading group of the Community of wanting to
transform Bektashism into a "semi-religious" brotherhood, a "politico-moral
organization" or a "charitable organization, anti-orientalist, pro-Orthodox, or more
exactly half Christian and half Muslim" (6). On the other hand, probably
supported by some socialist circles (the Prime Minister Ilir Meta is himself of
Bektashi origin, from Skrapar), the leading group of the Bektashi Community
began to promote Bektashism as a "non-fundamentalist" and "non-political"
30
version of Islam, that is to say as the opposite of Sunni Islam which is sometimes
suspected of having a fundamentalist dimension and which was politically used by
Sali Berisha. There is also a clear trend to make of Bektashism a "progressive
thought", a symbol of spiritual service with nobility of soul turned to people, for
the spiritual quietness, for peace among people, for fraternity and kindness" (7), a
"bridge between Islam and Christianity", a national product or simply a channel of
Albanianism.
At the same time, the leading group of the Community wants to promote
Bektashism as a World wide phenomenon with its centre in Albania. To this end,
it has strengthened its bonds with foreign groups and networks : the Haji Bektash
Research Institute of the Ankara University, or Shiite oriented groups, like the
Saadi Shirazi foundation created in Tirana by Iranians or the World Ahlul Bayt
Assembly with its ramifications in Turkey, in the Balkans and in Europe (8). In
order to have a common central reference with these groups (Shiites, Alevis, etc.),
along with the notion of "Bektashi", that of adherents of the "Ehl-i beyt" ("People
of the House [of the Profet]") is promoted (9). The fact that the same phenomenon
can be observed for other mystical brotherhoods in Albania, which also have
contacts with Shiite oriented groups, seems to prove that is partly the result of the
politics of the successful penetration of these Shiite networks (10).
The new form of Bektashism, which results from these transformations, has
been expressed through the new Statutes set up during the 7th Bektashi Congress
held in Tirana in September 2000 (11), and through a new doctrinal corpus which
is being elaborated. In order to attract a younger and more urban public and to
have an audience among intellectuals, the priority is given to the organization of
scientific, historical and cultural sessions or to add a scientific component to
traditional ceremonies during which a "human, precise and scientific
argumentation" is developed (12). An effort is also made to present the "scientific
progressive Bektashi thought" through the media and publications. In other
respects, in the newly elaborated corpus, the proportion of pieces from the Shiite
literature is not negligible. In the journal of the Community (Urtësia, The
Wisdom) for example, texts of various Iranian thinkers are edited. Some of them
are translated from the journal of the World Ahlul Bayt Assembly, entitled
Risalat-u-Thaqalayn. The Shiite inspired iconography especially concerning the
Qerbela [the battle during which Hüseyin, the grand-son of the Prophet, perished
as a martyr] and the Family of the Prophet, is even more widespread. One can find
it in every tekke and türbe.
Besides this Shiite influence, the new Bektashi corpus has in inner dynamics,
related to the need for a social and politico-religious positioning and for a local
legitimization. This is mainly made through the sanctification of the poet Naim
Frashëri, died in 1901, in order to crystallize the new intellectual, national and
scientific trend of Bektashism. Naim Frashëri was a Bektashi layman working as
official in the Ottoman administration. At the end of the nineteenth century, he
wrote, among other things, a booklet on Bektashism and an epic on Qerbela. In
these texts he introduced nationalist themes, in order to develop nationalist
feelings among the Albanian Bektashi people. Recently, Naim Frashëri was
elevated to the rank of "honorary baba" (Baba nderi) of the Kryegjyshata, the
main Bektashi centre in Albania, situated in Tirana's suburb. In March 1999, his
31
bust was inaugurated in the courtyard of this tekke, during the feast of Sultan
Nevruz. In the growing literature celebrating this figure and his work, he even
appears as the founder of an "Albanian Bektashism" : "Naim Frashëri understood
what benefit our nationality could draw from Bektashism... He deserves to be
considered as one of the founders of the albanian Bektashism" (13). Some
formula, such as "the message of the Naimian light for the blossoming, the dignity
and the identity of the Albanian nation" (14), even make of him a kind of saint or
prophet.
Furthermore, in the spring of 2001, a book dedicated to Naim Frashëri and
Bektashism appeared under the title "The third eye" (Syri i tretë). Written by an
intellectual, Moikom Zeqo, the director of the National Museum (15), it seems to
have an important impact in Albania, even on the non Bektashi public. In
September of the same year, the book was reviewed by a daily newspaper, where
the author's thesis was summed up as follows : "Naim Frashëri, as an apostle of
Bektashism, searched what is called the Third Way ; it means a faith which could
unite the two great faiths of the Albanians, and could accept Christianity and
Islam, so that, as a synchronized ideology, it strengthens Albanianism" (16). Thus
the new central figure is as much the symbol of a religious group (the Bektashis),
as the symbol of an ideology, a special Albanianism, which try to put the
personality of the Albanian people forward, combining Eastern and Western
influences, without rejecting the one or the other, as the Neo-shqiptars did in the
inter-war period. "The Third Eye is Naim Frashëri himself, between the eye of the
times gone by and the eye of the times to come. The Third Eye is Bektashism
between the eye of Christianity and the eye of Islam. The Third Eye is Albania
between the eye of the East and the eye of the West", writes Moikom Zeqo (17) ».
*
Notes :
(1) See, for example, Goliku, "Bektashisma", in : Demokratia, n° 241,
8.2.1930, p. 1. In the Regulations of the Community published in 1930, the
Bektashis were officially recognized only as a "sekte", that is to say as a
brotherhood within the Islamic Community. See Rregulore e Bektashijvet
Shqiptarë [Rules of the Albanian Bektashis], Tiranë, 1930.
(2) In order to stress on his stance, Baba Selim built a mosque next to his
tekke.
(3) It is also true that Bektashism had difficulties to recover, since it could not
have a strong help from abroad, as the other "traditional religious Communities".
(4) For example, he has published a book in the publishing house Koha,
which is of the right wing.
(5) Baba Selim published in 1999 a book entitled History e Bektashizmit si
sekt mistik islam [History of Bektashism as an Islamic mystical path]. The
Bektashi authorities quickly replied to Baba Selim through a book written by
Sokrat Ahmataj, Bektashizmi në smogun e një libri [Bektashism under the smoke
of a book], Tiranë, without date.
(6) Baba Selim Rexhep Kaliçani, Testamenti Bektashian, Tiranë, 2000, p. 6
and 59. According to Baba Selim, the existence of a reformist group inside the
Bektashi Community already existed at the beginning of Enver Hoxha's era. The
progressives (përparimtarët) were close to the political authorities. They were in
32
favour of the abolition of Celibacy. They wanted to approach Bektashism to
Christianity. They were "anti-orientalist", diminishing for example the importance
of Arabic, the language of the Koran. They were in favour of the statute of
Community for Bektashism. And they thought that the fatherland was more
important than religion (Baba Selim Rexhep Kaliçani, Dede Ahmeti i gjallë mes
nesh [Dede Ahmet alive among us], Fushë Krujë, 2000, p. 35-36.
(7) Nuri Çuni, Tomor, o mal i bekuar [Tomor, o blessed mountain !], Tiranë,
1999, p. 18.
(8) All these groups were represented at the "7th International Bektashi
Congress", held in Tirana on the 23-24 September 2000.
(9) During the Congress mentioned in the previous footnote, the
representative of the World Ahlul Bayt Assembly stressed that there were 350
millions of disciples of the Ehl-i Beyt in the World. See, Kongresi 7 Botëror
bektashian. 23-24 shtator 2000, Tiranë, Tiranë, Komuniteti Bektashian, 2001, p.
47.
(10) For example the Kadiris of Tirana are distributing a series of books of
the Ayatollah Es-Seyyid Muhammad Shirazi, translated by a young Albanian in
Lebanon and published by the Freemuslim Organization. In September 2001, they
were also distributing advertisements for the newly opened Iranian college in
Tirana.
(11) The Statutes of 1993 were practically the same as those of 1950 (only the
references to the popular power were left out).
(12) In 1999 for example, two ceremonies called "Dritë Bektashiane"
(Bektashi Light) were organized in Kruja and Elbasan, which maybe were
elaborated on the model of the "Ehl-i-beyt ışığı" of the Ehl-i-Beyt Vakfi from
Turkey. See Urtësia [The Wisdom], n° 18, mars 1999 ; and n° 20, july 1999.
(13) Nuri Çuni, Tomor, o mal i bekuar, Tiranë, 1999.
(14) Kujtim Ahmataj, in : Kongresi 7 Botëror Bektashian, p. 28.
(15) Moikom Zeqo, from a family of Libohovë (near Gjirokastër), is a
member of the former communist élite. His grand-father was a Bektashi.
(16) "Bektashizmi e Naim Frashëri në Syrin e Tretë" [Bektashism and Naim
Frashëri in "The third eye"], in : Gazeta Shqiptare, 6 September 2001, p. 12-13.
(17) Moikom Zeqo, Syri i Tretë. Naim Frashëri dhe Bektashizmi [The third
eye. Naim Frashëri and Bektashism], Tiranë, 2001, p. 262.
*
33
ANNEXE V : [Albanie]
" Saints and Sufis in the Albanian Society "
(extrait tiré de : N. Clayer, « Saints and Sufis in the Albanian Society », à
paraître dans les Actes du Colloque : "Islamic Area Studies. International
Conference 'Session on Sufis and saints among the People in Muslim Societies',
5-8 October 2001, Tokyo").
«... Everywhere in the country (but especially in the countryside), a very
quick rebuilding of türbe occured. For example, the mausoleum of a local Baba;
next to the tekke of Melan, not far from the Greek border, was rebuilt between
January and April 1991, whereas the türbe in Tirana – the capital – were rebuilt
only two years latter. The young men working illegally in Greece began to bring
gifts to türbe and tekke. During the opening ceremony, laments for Bektashi Babas
were sung by young women from Libohova and Lazarat, two small localities
which are strongholds of Bektashism in the area of Gjirokastra. The songs, which
prove the transmission of tradition in private during the communist period, were
recorded on tapes, and thereafter diffused among Bektashi circles; In the same
manner, in Kruja, a Bektashi stronghold in Northern Albania, near all the türbe
where rebuilt by the local population in 1991, especially the famous sanctuary of
Sari Saltik, on the top of the mountain above the town. Before of the opening of
the main Bektashi center in the Albanian capital, Baba Selim, who had been baba
in the tekke of Martanesh before the abolition of religion, went to Zerqan, a rural
zone where the türbe of a certain Baba Hysen from Martanesh had been. There, he
wore the traditional bektashi costume, gathered a group of disciples and
performed the first ritual.
When I visited the country for the first time in 1993, in almost every places I
went looking for the traces of a tekke's the former presence, a türbe had been
rebuilt, or a tomb (kubur) had been re-improvised. There were all around candles
and gifts. In Tirana, in the türbe of Dervishe Hatixhe, frequented mainly by
women with children, there were also photographs of "refugjat" – these Albanians
who had fled to Italy or Greece. Visitors were lighting candles, kissing the
headdress disposed on the tombs, and leaving gifts and money in a box. A few
days later, when I visited the Baba in the tekke which lays in the plain, near FushëKrujë, he was making amulets for a man, copying formulas and magic squares
from a kind of mecmua. When on a trip in North-Eastern Albania, I went to the
village of Kolesjan (Luma), where two new local religious leaders whose
ancestors were shaykhs, were competing for the making of amulets (nuska). In the
same area, the vice-director of the medrese of Kukës, a young man and turuq
opponent, explained to me that people went to tekke because shaykhs resolved
problems, while one went to a mosque only to pray. On another occasion, when
going up from Fushë-Krujë to Kruja in a mini-bus, I remember that among the
dozen of persons in the vehicle was a young woman, crying out from time to time.
When the mini-bus was approaching the famous türbe containing the footprint of
the saint Sari Saltik, she began to calm down. The car stopped and she got down
there with a man to ask the saint's aid.
Thus, a strong impulse came from below to recreate holy places and to restore
the cult of saints, in order to ask for help and remedy. This phenomenon was
34
accompanied by the (re)emergence from the society of holy men or women, seen
as intermediaries between God and the people : former shaykhs, babas and
dervishes, descendant or disciples of former shaykhs who possess the baraka of
their ancestors, and new saints, whose first function – like that of dead saints –
seems to be that of healers.
Compared with this dynamics, the formation of Sufi networks was much
slower, despite the fact that these networks tried to control this search for
sainthood. The huge economical, political and social changes, the limited number
of spiritual leaders, the time necessary to establish networks and the competition
with other religious groups (for or against the practice of healing) are probably the
main explanations for that. The turuq, which can also be used by political and
social actors, have to adapt themselves to the society, to its various segments and
to their demand. This process of adaptation, between tradition and innovation, can
be seen, for example, in the elaboration of saints' images.
Saints and national heroes. When the Sufi networks develop, as for example
the more important of them – the Bektashi network –, they try to structure and to
control this strong search for sainthood and mediation between God and the
people. But at the same time, they try to impose from above (sometimes using also
dynamics from abroad) new trends and new practices around new figures and new
saints. Here, I shall show how the weight of this two movements varies, by
analysing on one hand a kind of classical menakıbnâme, published in 1997 by a
Bektashi dervish from a rural area of Northern Albania. On the other hand, I shall
analyse the literature produced by the leaders of the Bektashi Community, who are
elaborating, for more urban and intellectual circles, a new corpus, influenced by
the Shiite literature, and in which the figure of the Albanian Bektashi poet of the
Second half of the nineteenth century, Naim Frashëri, tends to be sanctified.
Dervish Hysni Shehu is a young man born in 1997 – ten years after the
abolition of religion –, in the village of Kostenje (Eastern Albania). According to
his name, one of his ancestors was a shaykh (sheh in Albanian). In 1998, he
published a first book of poetry, entitled "Fllad nga kopeshti i Ehli Bejtit" (The
breeze from the garden of Ehl-i Beyt). A year later, another book of his came out
under the title "Shenjtorë të Ehli-Bejtit" (The saints of the Ehl-i beyt). In the
introduction, he qualifies his work as spiritual, historical, ethnographic, etc. He
adresses the book mainly to "the Albanians and the Albanian nation", which is
"autochtonous" and which he considers as a "fundamental part of the existence of
Europe". For him, the Albanian nation is saintly (like the other nations), and "its
sainthood shines with the light of all the saints that [this nation] has given or
welcomed, especially the saints of the Ehl-i beyt, such as Abaz Aliu, Sari Saltik
and Balim Sultan. Their sainthood given by God [sic] always gave to the Albanian
nation equilibrium, vitality, humanism and sanctity". He adds that the Bektashi
tarikat had always had a special mission in the transmission of this sainthood (1).
In a kind of second introduction, Dervish Hysni explains first how
traditionally the relationship was between the shaykh and the disciples within the
tekke and when the shaykh came to the villages to visit his followers. Then, the
author proceeds as if it was a traditional menakıbnâme, relating the life and
miracles (keramet) of various saints. The first chapter, as the introduction and
35
some other passages, assumes on a national, non traditional, dimension. Indeed, it
is dedicated to what he calls "the three pillars of Bektashism in Albania", the three
main saints revered in the country (Abaz Aliu, Sari Saltik and Balim Sultan). The
two other chapters are devoted to the saints of Kruja, the town where the author is
serving as dervish, and to the saints of his native area. Despite the national colour
which appeared from time to time, the model of sainthood which emerges from
the book is a rather traditional one : the saints show supernatural powers and
knowledge, they have also initiation powers, they perform blessings (healing,
protection against attacks) and they punish in particular those who do not respect
them. A particular aspect is the power exerted by the saints after their death to
protect their türbe, at least for some time, against the attacks of the Communists in
1967, or their ability to indicate the place where they were buried, so that people
could now rebuilt their türbe. The saints operate in a rural environment, where
cattle is omnipresent.
The literature produced by the group leading the Bektashiyye in the Albanian
capital is quite different. As the years go by, a new corpus is being elaborated, on
one hand, according to a desire to adapt Bektashism to the present situation: that is
to say to try to attract a younger and more urban public, to have an audience
among intellectuals and to fit in the inner political situation. On the other hand,
the new doctrinal elaboration results from external influences, coming from
groups and networks with which the Bektashi authorities have now bonds, in this
case the Haji Bektash Research Institute of the Ankara University, or Shiite
oriented groups, like the Saadi Shirazi Foundation created in Tirana by Iranians or
the World Ehli Beyt Assembly and its ramifications in Turkey, in the Balkans and
in Europe (2).
The result is that a priority is given to organize scientific, historical and
cultural sessions or to add a scientific part to traditional ceremonies, during which
a "human, precise and scientific argumentation" is developed (3). An effort is also
made to present the "scientific progressive Bektashi thought" through the media
and publications. In the newly elaborated doctrine, the proportion of pieces from
the Shiite literature is not negligible. In the journal of the Community for example,
texts of various Iranian thinkers are edited. Some of them are translated from the
journal of the World Ahlul Bayt Assembly, entitled Risalatuth Thaqalayn (4).
The Shiite inspired iconography, especially concerning the Qerbela and the Family
of the Prophet, is even more widespread. One can find it in every tekke and türbe.
Besides this Shiite Influence, the new Bektashi corpus has an inner dynamics,
related to the need for a social and politico-religious positioning and for a local
legitimization.
Since the return of the Socialists to power (in 1997), there is a clear trend
which makes of Bektashism a version of Islam "far from fundamentalism and
political manipulations", a "progressive thought", "a symbol of spiritual service
with nobility of soul towards people, for the spiritual quietness, for peace among
people, for fraternity and kindness" (5), a "bridge between Islam and Chistianity"
– the two main religions which divide the Albanians –, a national product, but at
the same time a World wide phenomenon which has his centre in Albania. The
process of legitimization is made through the sanctification of some figures. On a
personal level, the new leaders, according to a somewhat classical process, draw
36
their legitimacy from the figure of Ahmed Myftar Dede, who had been the head of
the Bektashiyye during the Communist regime, between 1948 and 1957. The new
head of the Order, Dede Reshat Bardhi, had been his servitor, and he is considered
to be the one who inherited all his amanet and recommendation. His main rival,
baba Selim, had been made baba by him, and wrote a book about him.
But on a more general level and in a more original way, the figure which is
now sanctified to crystallize the new intellectual, national and scientific trend of
Bektashism is that of the poet Naim Frashëri, died in 1901 ...». [Sur celui-ci, voir
l'Annexe IV].
Notes :
(1) Dervish Hysni Shehu, Shenjtorë të Ehli-Bejtit, Tirana, Flesh, 1999, p. 3-4.
(2) All these groups were represented at the « 7th International Bektashi
Congress », held in Tirana on the 23-24 September 2000.
(3) In 1999 for example, two ceremonies called « Dritë Bektashiane »
(Bektashi Light) were oganized in Kruja and Elbasan, which maybe were
elaborated on the model of the "Ehl-i Beyt Işığı", (Urtësia, n° 18, March 1999,
and n° 20, July 1999).
(4) See, Urtësia, n° 4, March 1996.
(5) Nuri Çuni, Tomor, o mal i bekuar, Tiranë, 1999, p.18.
37
Références des textes cités (ouvrages et articles) et bibliographie
ABUN-NASR (Jamil M.), 2000 : « Tidjâniyya », EI2, t. X, p. 497-499 (de l'éd. fr.).
ALGAR (Hamid), 1972 : « Some notes on the Naqshbandî tarîqat in Bosnia », Die Welt
des Islams, 13, p. 168-203 (rééd. dans Studies in comparative religion, 9, Bedfont
(Middlesex), 1975, p. 69-96).
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