Actualité Juive - Consistoire de Paris
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Actualité Juive - Consistoire de Paris
HOMMAGE 39 N° 1186 - JEUDI 24 NOVEMBRE 2011 DERNIER ÉCRIT Comme chacun sait, David Messas avait une rubrique régulière dans Actualité Juive. Il se conformait avec beaucoup de grâce aux contraintes éditoriales relatives à la longueur des articles. Mais sa dernière contribution qui devait paraître dans le prochain numéro d’Actualité Juive était plus longue que prévue. Nous savons qu’il n’avait pas le cœur à couper cet article. Nous le publions donc ici dans son intégralité, ultime hommage du journal à son auteur. DR. Ne pas rester sur le bord de la route de l’Histoire e grands hommes ont mis leur vie en péril pour défendre leurs convictions bravant tous les dangers, et assumant ainsi pleinement leur responsabilité. D’autres se sont dérobés à leur devoir, invoquant leur grande humilité, alibi cachant leur manque de courage. Lorsque le Patriarche Abraham, s’appelant encore Abram, apprend que son parent Loth a été capturé, lui l’homme de la paix, n’ayant jamais combattu, n’hésite pas un seul instant. Il constitue une armée et part en guerre pour le libérer : « Abram, ayant D appris que son parent était prisonnier, arma ses fidèles, enfants de sa maison, trois cent dix-huit, et suivit la trace des ennemis jusqu'à Dan » (Gn 14, 14). Dix générations plus tôt, en un temps où l’humanité était dévoyée, où l’idolâtrie régnait, D.ieu s’adressa à Noé et lui demande de créer une Tevah. En hébreu le mot Tevah signifie : une arche, un bâtiment fermé sur luimême permettant d’affronter les intempéries et n’ayant qu’une lucarne ouverte sur le monde extérieur. Il signifie aussi : parole. D.ieu connaissait la qualité de Noé : « Et Noé trouva grâce aux yeux de D.ieu ». Il lui demanda de parler à l’humanité afin de la sauver, afin de lui faire retrouver le chemin de la vérité, de l’amour du prochain. Par manque de confiance en lui, Noé comprit que D.ieu lui demandait de construire une arche, afin de se protéger de l’influence négative de son entourage, de sauver sa vie, sans se soucier de celles des autres. C’est pourquoi Noé n’est pas perçu par les textes comme le fondateur de l’avenir de l’humanité. Certains midrashim vont même jusqu’à lui imputer la responsabilité de la destruction du monde, car il aurait peut-être pu l’éviter par une action énergique et courageuse. Le roi Shaoul avait été chargé par l’Eternel de faire en sorte que les Amalécites ne puissent plus nuire au peuple d’Israël. Le roi Saül a failli. Il a eu peur du peuple. Il n’a pas combattu comme il le devait. Ce faisant, il a perdu sa royauté. Le midrach enseigne que le roi David commit deux fautes et fut pardonné, alors que Saül n’en fit qu’une et qu’elle lui fut fatale. Les maîtres expliquent que la faute de Saül était inhérente à sa fonction, qu’il a failli dans la mission qui lui a été confiée. Samuel, la haute autorité spirituelle de son temps l’interpelle et lui explique qu’il ne peut invoquer son humilité pour expliquer son comportement : « Et Samuel dit : Quoi ! Si tu es petit à tes propres yeux, n'es-tu pas le chef des tribus d'Israël ? Et le Seigneur ne t'a-t-il pas sacré roi d'Israël ? » (Sam I 15, 17). Adopter des positions fermes et claires, même lorsque la tâche à accomplir paraît inaccessible et irréalisable de la révélation du buisson ardent, D.ieu le désigne comme sauveur de son peuple, Moïse refuse, il dit même à D.ieu : « De grâce, Seigneur! donne cette mission à quelque autre!" » (Exode 4, 13) Cette attitude ne reste pas sans conséquence : « Le courroux de l'Éternel s'alluma contre Moïse et il dit : "Eh bien ! c'est Aaron ton frère, le Lévite, que je désigne! ». Rachi explique que Moïse perdit la prêtrise pour lui et sa descendance en raison de ce refus. Certes, la Torah fait l’éloge de l’humilité de Moïse : « Or, cet homme, Moïse, était fort humble, plus qu'aucun homme qui fut sur la terre ». (Nombres 12, 3) mais elle attend cependant de lui, comme d’ailleurs il sut très bien le faire, qu’il affronte les difficultés, les révoltes, les conflits, qu’il sache recevoir et porter la parole de D.ieu pour sa génération et les générations à venir. Tout cela nous rappelle à nous, rabbins, responsables communautaires, et tout simplement êtres humains, qu’il ne faut pas rester sur le bord de la route de l’Histoire, qu’il nous faut adopter des positions fermes et claires, même lorsque la tâche à accomplir parait inaccessible et irréalisable. ● Enfin prenons l’exemple de Moché rabbénou, de Moïse notre maître. Lorsqu’au cours DAVID MESSAS PERSONNALITÉS POLITIQUES ET RELIGIEUSES DR. François Hollande : « C'est un homme de grande culture et de convictions François Fillon : « artisan du dialogue entre les religions » DR. Réactions à la disparition du grand rabbin de Paris Les réactions suite à la disparition du grand rabbin de Paris, David Messas ont été extrêmement nombreuses. Nous nous faisons ici l’écho de quelquesunes d’entre elles émanant de personnalités diverses. e ministre de l'Intérieur, chargé des Cultes, Claude Guéant, a tenu dans un communiqué à «saluer la mémoire de cette figure de la communauté juive de France, homme de foi et de culture» et a «rendu hommage à son travail inlassable au service de la communauté juive de Paris». Le maire de Paris, Bertrand Delanoë, a exprimé son « émotion » et sa « tristesse ». « Son envergure spirituelle et son sens du dialogue manqueront à l'identité de notre ville. Et je regretterai les liens de confiance que nous avions noués au fil des années", a-t-il déclaré dans un communiqué. Le Premier ministre, François Fillon, a, lui, salué un « artisan du dialogue entre les religions et les communautés, qui a su tout au long de sa vie et à travers son enseignement, oeuvrer à la préservation de la tradition et à la construction de l'avenir du judaïsme à Paris et au-delà ». Dans un communiqué, François Hollande, candidat socialiste à l’élection présidentielle, a L déclaré : « C'est un homme de grande culture et de convictions qui s'en va, qui savait être un lien entre la République et les valeurs du judaïsme qu'il portait avec passion ». « Par son charisme et ses connaissances, David Messas était la conscience de la communauté juive de Paris" poursuit-il. La première secrétaire du PS, Martine Aubry, a rendu hommage à un "grand lettré, homme de religion et de réflexion, homme de tradition et de dialogue entre les fois". « Il était profondément apprécié par les fidèles à Paris et réputé bien au-delà", souligne Martine Aubry dans un communiqué, qui ajoute: "Il laisse un vide considérable". Jean-François Lamour, président du groupe UMP au Conseil de Paris, et Philippe Goujon, président de la fédération UMP de Paris, ont tenu à « saluer la mémoire d'un homme de foi et de culture qui a accompagné et soutenu la communauté juive tout au long de sa vie ». Le Conseil Français du Culte Musulman (CFCM) a fait part dans un communiqué de son «immense tristesse et d’une grande émotion» après le décès de ce «grand ami des musulmans de France». Le président du Rassemblement des Musulmans de France, Anouar Kbibech, a également salué la mémoire du grand rabbin qui «a oeuvré sans relâche pour le rapprochement entre Juifs et musulmans en France». «Son action et son rayonnement, qui ont largement dépassé les frontières de la France, ont été récompensés par de nombreuses décorations, et notamment par l'une des plus hautes distinctions du Royaume du Maroc» (Grand Officier du Ouissam Alaouite, décerné par le roi du Maroc), a ajouté Anouar Kbibech. ● CLAUDE MEYER