Pour une allocation-loyer aux Bruxellois les plus défavorisés

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Pour une allocation-loyer aux Bruxellois les plus défavorisés
Pour une allocation-loyer aux Bruxellois les plus défavorisés
Texte de la carte blanche RBDH - PS – Ecolo - CDH
A Bruxelles, un nombre croissant d'habitants ne peut exercer de manière effective le droit à un
logement décent consacré à l’article 23 de la Constitution. L'offre de logements de qualité et
financièrement abordables est insuffisante. Parmi les propositions de solution, celle visant à l’octroi
d’une allocation-loyer fait l’objet d’un débat public intense et déjà ancien. Attractive par sa
simplicité, l’ introduction d’une allocation-loyer n’est pas sans danger sur le niveau général des
loyers, en hausse continue depuis plusieurs années. Loin de toute démagogie, il nous a semblé utile
de réfléchir ensemble aux conditions concrètes d’application de cette mesure à Bruxelles. Le
produit de cette réflexion est exposé ici dans ses grandes lignes ; le texte complet peut être obtenu
auprès du RBDH.
Face à la crise, la priorité est d’augmenter l’offre publique de logement
Aujourd'hui, 25.000 ménages sont inscrits sur les listes d’attente du logement social. Il est
impératif de résorber cet arriéré afin que les demandeurs de logement social ne soient plus obligés
de louer un logement qui ne corresponde pas à leur besoin et dont le loyer pèse d’un poids excessif
dans leur budget. La seule solution durable est d'augmenter le parc locatif public à caractère social,
à la fois pour répondre à la demande existante et pour endiguer la hausse continue du marche locatif
privé. Il s'agit d'une politique structurelle à laquelle doivent être réservés des moyens financiers
importants dans un budget régional qui, lui, n'est pas extensible à l'infini. L'allocation-loyer devra
donc être une mesure transitoire, répondant à l'urgence sociale.
Le droit à un logement décent n’implique probablement pas que les pouvoirs publics soient tenus
d’offrir un logement social immédiatement à toute personne qui en fait la demande, mais le déficit
actuel de logements sociaux provoque une attente de 5 à 6 ans en moyenne, voire plus pour les
grandes familles. Il nous incombe de tenter d’en atténuer les conséquences sociales dramatiques
pour les personnes les plus défavorisées sans mettre pour autant en péril les moyens financiers
nécessaires aux investissements à moyen et long terme dans la construction/rénovation de
logements publics.
Le loyer devrait jamais dépasser 33% des revenus
Nous concevons l'allocation-loyer comme une aide financière temporaire permettant de diminuer
l’impact du loyer sur le budget du ménage. L’allocation-loyer serait versée au ménage inscrit
depuis un certain temps comme demandeur d’un logement social ou assimilé et qui dispose de
revenus inférieurs aux plafonds actuels de l’aide au déménagement (soit 15.235 € annuels pour un
ménage).
Le montant de l’aide sera déterminé à partir de deux paramètres. On prendra en compte un loyer de
référence plutôt que le loyer réel. On évite ainsi de devoir vérifier le loyer antérieur pour s’assurer
que le bailleur n’augmente pas le loyer à cause de l’allocation. On évite aussi que le budget public
nécessaire à l’allocation-loyer soit déterminé par les hausses du marché locatif. Ce loyer de
référence pourrait être la rémunération maximum des Agences immobilières sociales aux bailleurs.
L’allocation-loyer devra couvrir la différence entre le tiers de l'ensemble des revenus du ménage et
ce loyer de référence. Selon nos estimations, l’allocation-loyer se montera en moyenne à 100€ par
ménage et par mois.
L’allocation-loyer prendra bien sûr fin dès qu’un logement social sera attribué au ménage
bénéficiaire mais, dans la situation actuelle, le nombre de candidats à un logement social continuera
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à croître plus vite que les attributions, gonflant les moyens budgétaires nécessaires à l’allocationloyer . C’est une des raisons pour lesquels un délai d’inscription nécessaire.
Si la mesure avait été d’application en 2004, le paiement d’une allocation-loyer aux 22.000
ménages inscrits depuis un an au moins sur les listes d’attente du logement social aurait coûté 26,4
millions au budget régional, soit 35% du budget régional actuel affecté au logement. Les autres
aspects de cette politique en auraient immanquablement été affectés. En portant à trois ans le délai
d’attente, ce sont 7.000 ménages qui auraient bénéficiés d’une allocation-loyer, pour un coût total
de 8,4 millions, soit 12% du budget actuel du logement. La première proposition nous semble
souhaitable, l’autre raisonnable tant que le budget « Logement » n’aura pas été substantiellement
revalorisé.
Des mesures d’accompagnement devront être prises. Ainsi, dans le droit fil de l’adoption récente
des critères minimaux de salubrité et d’habitabilité de tous les logements en Région bruxelloise, le
respect de ces normes sera vérifié avant l’octroi de l’allocation. Il nous semblerait inacceptable de
subsidier avec l’argent du contribuable les profits de bailleurs indélicats qui louent des logements
insalubres. L’allocation-loyer complétera ainsi le dispositif des aides au logement, à côté de celles
visant à permettre au locataire de quitter un logement insalubre (Fonds de solidarité du Code du
logement) ou inadapté (ADIL). Les procédures et les organes de gestion de ces trois types d’aide
devront être harmonisés. Les demandes d'allocation-loyer seront examinées par une administration
ou un service social existants, ce qui permettra de limiter les dépenses liées à la gestion des dossiers
et de conserver au mécanisme proposé son caractère temporaire.
Eviter d’alimenter la hausse des loyers
Enfin, il faut rencontrer la crainte principale qu’inspire l’instauration d’une allocation-loyer.
Comme l’a montré une étude de l’ULB analysant les effets de l'allocation-loyer dans plusieurs pays,
mettre en place un tel système sans encadrement provoquerait à terme une augmentation des loyers
sur l'ensemble du marché. Il serait particulièrement inique d’aggraver la situation des locataires qui
ne toucheront pas l’allocation-loyer au nom de l’aide apportée aux ménages bénéficiaires. Même
pour ceux-ci, l'augmentation des loyers absorberait progressivement l'allocation-loyer, qui
tomberait au final dans la poche du bailleur. Il est donc indispensable de mettre en place un système
d’encadrement des loyers. Il permettra, d'une part, de mettre en adéquation prix et qualité des
logements et, d'autre part, il découragera les bailleurs d'augmenter les loyers de manière
intempestive. Si certaines mesures sont de compétence fédérale, d’autres peuvent être prises à
Bruxelles sans attendre, comme la mise en place de loyers de référence et la modulation de la base
imposable du précompte immobilier pour favoriser les bailleurs qui demandent des loyers modérés,
qui mettent en location soit des grands logements, soit des logements adaptés aux personnes
handicapées. Nous solliciterons en parallèle les autorités fédérales pour qu’ils introduisent une
fiscalité immobilière qui encourage les bailleurs à louer des logements décents à un prix abordable,
qu’ils installent des commissions locataires/bailleurs (elles vérifieraient que le loyer demandé
correspond à la qualité offerte) et qu’ils généralisent et rendent gratuit l'enregistrement des baux.
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