Discours Nicolas Hulot – Ushuaia Nature

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Discours Nicolas Hulot – Ushuaia Nature
Discours Nicolas Hulot – Ushuaia Nature
Voix: Il est possible qu’il soit déjà trop tard.
Hulot:
Ça c’est quand même magnifique. C’est vrai que quand on voit l’apparente tranquillité des
animaux ici à Okabango, on a du mal à s’imaginer que le 21e siècle puisse sonner le glas de
la grande faune africaine. Mais les images sont trompeuses et beaucoup de spécialistes
malheureusement pensent que le compte-à-rebours a probablement déjà commencé; et
[vous] voyez par exemple ces deux éléphants,ils ont été sauvés de justesse de l’abattage par
Sandy et Doug Crowth, parce que le paradoxe c’est que dans les Etats africains qui font la
meilleure conservation, la conséquence, c’est qu’ils ont des problèmes de surpopulation
avec un territoire pour les animaux trop petit. Et beaucoup d’Etats procèdent chaque année
à de pathétiques abattages collectifs; et ces animaux ont échappé de très peu à ce triste
destin.
Bonsoir. Il y a une chose qui est certaine, c’est que si la disparition des dinosaures il y a 60
million d’années donne lieu encore aujourd’hui à des controverses scientifiques,
l’hypothétique disparition de la grande faune africaine, elle, ne donnera lieu à aucune
énigme scientifique car la cause en est d’ores et déjà connue: la cause, c’est l’homme. Et
Dieu sait que les problèmes sont complexes, que nous les Français sommes particulièrement
mal placés pour donner des leçons de préservation à quiconque quand on voit la lamentable
manière avec laquelle on a été incapables de gérer la cohabitation en France avec une
poignée d’ours ou de loups. Alors, à fortiori avec des animaux beaucoup plus embarassants
d’autant qu’ici en Afrique, le problème est économique et non pas un problème d’éthique.
Quoi qu’il en soit, malheureusement, en Afrique, où que l’on aille, les grands animaux sont
menacés comme si leur grande taille les empêchait définitivement d’être tranquilles. La
compétition de territoires entre les hommes et les animaux semble sans issue. Même ici, en
Okavengo, qui ressemble en tout cas non pas au paradis mais tout au moins à une de ses
annexes les plus prestigieuses, les menaces et les convoitises se font chaque année un peu
plus pressantes.
Pour l’heure, en tout cas, ce que l’on va faire, c’est que, en compagnie de quelques-uns qui
consacrent leur existence à l’étude et à la compréhension des grands animaux, on va
s’immiscer pendant près de 90 minutes dans quelques-uns des plus beaux sanctuaires de la
vie sauvage, en Afrique australe et en Afrique de l’Est, pour que jamais dans notre esprit ils
n’apparaissent comme de simples éléments mobiles dans un décor immuable, qui pourtant
nourrit et comble nos songes depuis notre tendre enfance, mais bien pour ce qu’ils sont,
c’est-à-dire des êtres vivants, exceptionnels, dotés de facultés magnifiques. Comme ces
éléphants que ces spécialistes et les scientifiques qui les étudient considèrent comme les
animaux les plus intelligents.
Voilà!