MARTIN FUCHS, AVEC SA NOUVELLE STAR

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MARTIN FUCHS, AVEC SA NOUVELLE STAR
26 · LE CAVALIER ROMAND · NATIONAL
CHAMPIONNAT DE SUISSE DE SAUT ÉLITE À SION
Martin Fuchs, avec sa nouvelle star
Après Clooney (what else ?), Chaplin : Martin Fuchs sort tous les deux ans une nouvelle star à
Sion et il est le roi de la fête. Champion de Suisse ici en 2014 avec son futur cheval olympique,
de retour au sommet cette fois-ci avec son nouvel étalon KWPN de 9 ans Chaplin II ! Niklaus
Rutschi en argent (comme en 2014, décidément !), Fabio Crotta en bronze et Christina Liebherr
« chocolat » pour une seule barre de tout le championnat : un sacré niveau !
P
© Geneviève de Sépibus (2)
our Martin Fuchs, Sion et le championnat de Suisse sont
synonymes de grand départ avec un nouveau crack. En
2014, il s’agissait de sa toute première finale élite – après
trois titres nationaux consécutifs chez les jeunes cavaliers (ières) ! – et le Zurichois avait triomphé avec le gris Clooney,
alors âgé de 8 ans seulement et qui allait devenir son compagnon
aux Européens 2015 (bronze) et aux JO. L’an passé, il n’avait pas
pu seller de crack (Clooney et Cynar étaient réservés pour Barcelone) et il s’était contenté d’un modeste 33e rang avec Uzo. Même
les plus doués ne sont rien sans un vrai bon cheval, et en forme,
évidemment.
Cette fois-ci à Sion, du 14 au 18 septembre dernier, Martin Fuchs
pouvait à nouveau compter sur un vrai crack, Chaplin II, promis
au plus bel avenir, mais encore un peu neuf pour supplanter
Clooney la semaine suivante à la Finale des Nations de Barcelone.
N’était-ce pas leur quatrième concours ensemble seulement (lire
interview en p. 26) ? Ce Chapin II, KWPN de 9 ans (par Verdi et par
Concorde) est en tout cas aussi bon que beau, et ce n’est pas peu
dire. Il a survolé cette finale élite 2016, comme Clooney avant lui, et
c’est sans doute le début d’une nouvelle aventure exceptionnelle.
Ces deux-là ont aligné quatre tours sans bavure depuis le jeudi. Il
fallait ça pour battre Niklaus Rutschi. Déjà médaillé d’argent ici
en 2014 avec ce même Windsor XV, le Lucernois n’a pas fait une
barre du championnat et ses 0,59 pts n’étaient dus qu’à la seconde
concédée sur la chasse. Une paille ! « On a essayé de leur mettre la
pression, on a fait tout ce qu’on a pu, mais les jeunes poussent et
Martin est fort », a dit avec humour Rutschi (50 ans).
Troisième, Fabio Crotta (37 ans) pourra bien sûr regretter longtemps sa petite faute dans la chasse, le jeudi, car celle-ci lui coûte
son premier titre national, lui qui fut lauréat de la Coupe de Suisse
(Top 10) ou encore champion d’Europe par équipe chez les juniors
(1994) et les jeunes cavaliers (1998). Avec sa SF de 9 ans Tess de
Jalesnes (par Baloubet du Rouet), le Tessinois de Giubiasco dispose
d’un vrai atout pour l’avenir et les conseils de Lesley McNaught
semblent porter leurs fruits. La double championne de Suisse
(1991 avec Pirol et 2005 avec Riot Gun) coache également tout le
Team Lutta.
QUATRE ROMANDS DANS LE TOP 8
La médaille en chocolat est cette fois pour Christina Liebherr, qui a
fait de beaux tours, mais perdu deux rangs en concédant une faute
le dimanche, sur un oxer isolé, avec un LB Eagle Eye impressionnant de puissance. À ce niveau-là, la moindre barre coûte cher ! La
Martin Fuchs est monté pour la seconde fois sur la plus haute marche
du podium du championnat de Suisse élite. Il est entouré de Niklaus
Rutschi, en argent comme en 2014, et de Fabio Crotta, en bronze.
Avec le superbe Chaplin II, un étalon KWPN aux qualités exceptionnelles, Martin Fuchs a survolé la finale 2016, pour finir avec le score
idéal de zéro point. Et un cinquième titre national (trois JC, deux élite).
remarque vaut aussi pour Edwin Smits, 2e l’an passé et bon 5e cette
fois-ci avec le plaisant Dandiego B Z, vainqueur du GP de Verbier.
Comme la Fribourgeoise et le Néo-Jurassien feront partie de la
sélection officielle à Palexpo, le chef de l’équipe de Suisse Andy
Kistler l’a confirmé à Sion, la wild-card pour le CHI de Genève
était pour le Fribourgeois de Genève Pierre Kolly, élégant 7e avec
Corvall, qui n’a raté que sa première manche dominicale (12 pts),
abordée en léger sous-régime.
Cette wild-card aurait tout aussi bien pu récompenser Vincent
Deller, convaincant 8e avec Worissa’s Whinny. Là encore, ça s’est
joué à un rien, une demi-faute… « Ma jument a eu envie de faire
un crottin en début de première manche, ça nous coûte deux
barres, largement plus que la wild-card, c’est frustrant ! », a confié
le Vaudois établi en terres genevoises.
La plus grosse surprise était la 6e place de Daniela Krebs avec
© Geneviève de Sépibus (2)
Fabio Crotta a décroché la médaille de bronze avec sa prometteuse
jument française Tess de Jalesnes (par Baloubet du Rouet) et, sans sa
faute dans la chasse, le Tessinois aurait même triomphé.
Christina Liebherr a dû se contenter de la difficile 4e place, de la
médaille en chocolat, au terme d'un excellent championnat, durant
lequel le puissant LB Eagle Eye n'aura touché qu'une barre.
Zidane XV. Hormis un sursis – une georgette ! – dans la dernière
manche, la Bernoise a épaté avec ce cheval de Willi Melliger. Et,
pendant ce temps-là, sa sœur Nicole remportait une des finales
Super Promotion CH à Avenches.
a gagné une 135 cm avec Ramalia et une 130 cm avec Sauvignon,
Martin Fuchs (Fugo) a enlevé une 125 cm, Pierre Kolly (Une de
Chignan CH) une 120 cm, tout comme Daniela Krebs.
DES HAUTS ET DES BAS
Suivaient la surprenante Fribourgeoise Florence Seydoux, 9e avec
Starlette de Maillet et qui pouvait être fière de devancer notamment Romain Duguet, 10e avec Sherazade de Gévaudan. Le cavalier
olympique avait laissé au repos ses deux juments de tête, Quorida
de Treho et Twentytwo des Biches, en vue de la Finale des Nations.
Du côté romand, on trouvait ensuite Céline Stauffer, 12e et au
niveau du début à la fin avec Acanthus B, vainqueur de deux GP
cette saison, Fanny Queloz, 14e avec Tipsy du Terral, qui n’a déçu
que le vendredi, Philippe Putallaz, 15e avec Vancouver IV, impressionnant les premiers jours, plus désuni à la fin - mais la nouvelle
paire promet -, Alain Jufer, 16e avec Dubrovnik, Olivier Bourqui,
17e avec Uriaco de l’Ancre, à la peine le dimanche. Pierre Brunschwig avait retiré sa Pinup de Puymalier avant la finale.
Frédérique Fabre Delbos n’avait pas passé le cut du second jour,
pourtant intelligemment élargi à 18 cavaliers (contre 12 ces deux
dernières années), tout comme treize autres concurrents, dont
sept Romands, décidément nombreux, que ce soit en tête ou en
queue de classement.
On relèvera encore les victoires « hors championnat » de Steve
Guerdat (Dioleen) sur 145 cm, de Niklaus Rutschi (Pipilotta II CH)
dans la Progressive de 145 cm dotée par la Banque Migros, tout
comme dans la 135 cm parrainée par Mike et Anouk Hornung, et
de Bryan Balsiger (Ornett de Galeste) sur 140 cm. Mathilde Cruchet
UN SACRÉ DÉFI ET DE NOUVEAUX PROJETS
Gérard Lachat et son team ont à nouveau fait un excellent job,
même si on aurait aimé une seconde vraie option, en plus de l’oxer
polonais, dans la chasse et une ultime manche un zeste plus technique (dix sans-faute sur dix-sept).
Hormis le paddock d’entraînement, où le mélange de sables n’a
pas convaincu, et des horaires un peu dilués, notamment le vendredi (l’élaboration des parcours des différents championnats nécessite plus de temps), les cavaliers ont apprécié ces cinq journées
passées à Sion, l’organisation et l’accueil.
Michel Darioly a organisé cinq finales de saut à Sion trois années
de suite et on ne peut que lui tirer un grand coup de chapeau. Pour
les jeunes, c’est très stimulant que de pouvoir disputer des championnats parallèlement à l’élite (lire notre édito). Ce ne sera hélas
plus le cas ces trois prochaines années, Humlikon ne prenant plus
que la finale élite dans le cadre de son CSI. Retour des championnats à Sion en 2020 ? Michel Darioly ne l’exclut pas. Il va déjà
mettre sur pied les deux prochains championnats romands de saut
(élite, JC, J et poneys) et rêve d'un autre défi : les Européens de la
Alban Poudret
relève !
Belle marque d’estime vis-à-vis de l’organisateur de ces finales, Michel
Darioly, et de respect vis-à-vis de leur chef d’équipe, Andy Kistler, qui
avait fait du « lobbying » pour Sion, les meilleurs cavaliers du pays
étaient presque tous présents. Hormis Janika Sprunger (elle habite la
Hollande et Bonne Chance s’étant blessée, son écurie est plus réduite),
l’équipe de Rio était là au complet, même si Paul Estermann est rentré
dès le jeudi (mauvais départ en championnat) et Steve Guerdat le
samedi (Kavalier II était touché à un glome). En France ou en Allemagne, l’élite ne joue plus le jeu du national, en Suisse si.
Si le tenant du titre, Werner Muff, n’était pas là pour défendre son
titre, c’est paraît-il parce qu’il souffrait du dos. Les seuls à avoir
sécher le championnat étaient en définitive Jane Richard-Philips et
Pius Schwizer, qui préféraient l’étape fort dotée du Global Tour à
Vienne. Ce n'est pas nouveau.
A. P.
© Geneviève de Sépibus
PEU D’ABSENTS EN VALAIS ! Vincent Deller a signé des parcours magnifiques avec Worissa's
Whinny, 8e au final, à 2 pts de la wild-card pour le CHI de Genève.
28 · LE CAVALIER ROMAND · NATIONAL
• Martin Fuchs, que représente ce deuxième titre de champion de Suisse élite à
vos yeux ?
• Il a beaucoup de valeur. Je suis vraiment très heureux ce d’autant qu’il vient
s’ajouter à mes victoires cette année dans la Coupe de Suisse et dans le Grand
Prix d’Uster, à côté de chez nous, or ces trois compétitions sont pour moi les
plus importantes sur le plan national. Je suis surtout très content de Chaplin
qui a été incroyable durant ce championnat. Il ne s’agit que de notre quatrième
concours ensemble. Nous nous sommes vraiment trouvés rapidement.
• Ce titre a-t-il une saveur différente de celui que vous aviez décroché en 2014
ici même avec Clooney ?
• En 2014 et aujourd’hui, le sentiment a été incroyable. Cette année, dès le jeudi,
j’ai senti qu’il était possible de gagner. Il y a deux ans, c’était un peu différent,
car Clooney n’avait que 8 ans. Malgré cela, le 2e jour, j’avais pris conscience que
nous pouvions également prétendre au titre.
© Michel Sorg
•Comment Chaplin est-il arrivé dans vos écuries ?
• Nous l’avons vu sauter au CSIO
de Rotterdam, fin juin, avec Jelmer Hoekstra, le cavalier de Leon
Thijssen, et il nous a tout de suite
plu. Mon père l’a acheté avant le
barrage d’une épreuve à 155 cm. Je
ne l’avais même pas essayé ! J’étais
très impatient de le monter et nous
avons pris part à notre premier
concours au CSI d’Ascona fin juillet. Il a immédiatement confirmé
les espoirs que nous avions en lui,
je dirais même qu’il a été au-delà.
Il a ensuite participé aux CSI de
Saint-Moritz et d’Humlikon, où il
s’est classé à chaque parcours. C’est
à ce moment-là que j’ai décidé que
ce serait avec lui que je participerai
au championnat de Suisse. C’est un
cheval avec énormément de qualités et il est très agréable à monter en piste
et à la maison, même si c’est un étalon et qu’il faut toujours être attentif. Il est
aujourd’hui propriété de mon sponsor, Luigi Baleri, qui est comme un second
père pour moi et qui était là aujourd’hui, tout comme mon père, Thomas.
• Chaplin est bien différent de Clooney…
• C’est vrai. Les deux chevaux ont énormément de qualités, mais ne sont pas
pareils. Chaplin est plus rapide. Il me fait un peu penser à PSG Future (ndlr : avec
lequel Martin a réalisé d’excellentes performances dont un titre européen chez
les jeunes cavaliers et une victoire en GP5* à Paris). J’ai énormément de chance
d’avoir deux chevaux de la qualité de Clooney et Chaplin, qui me permettent de
régater au plus haut niveau et de voir l’avenir avec enthousiasme, car ils sont
encore jeunes (10 et 9 ans). Le prochain grand objectif, ce sera la prochaine finale
de la Coupe du monde.
• Un mot pour terminer sur vos écuries puisque vous êtes basé à Wängi/TG
depuis février, à votre propre compte. Comment se passe cette « nouvelle vie » ?
• C’est un grand changement, mais ça se passe très bien et je suis très heureux. Il
y a plus de travail, mais moins de stress en fait. Je fais les choses comme je
l’entends, car je suis chez moi et plus chez mes parents. Mon père vient une fois
par semaine, mais il me laisse gérer mes écuries. J’ai moins de pression paternelle et c’est agréable (il rit).
Propos recueillis par Michel Sorg
3 QUESTIONS À
MORGANE DASSIO
• Morgane, on imagine combien votre joie est grande
après cette médaille d’or ?
• Elle est immense ! Ce qui m’arrive est magique et
Horst est tout simplement fabuleux. J’ai rarement eu
une telle complicité avec un cheval. Il se bat pour
moi, donne tout et sent quand l’enjeu est important.
Au CSI de Lausanne, nous avons remporté le Grand
Prix U25 et ça m’a donné confiance pour ce championnat. Mais ça n’a pas été facile, car mes poursuivants m’ont mis la pression du début à la fin. Après
mon sans-faute lors du premier tour de la finale de ce
samedi, je me suis un peu détendue, mais lorsqu’Anthony (Bourquard) a fait son sans-faute, j’ai réalisé
qu’en fait tout restait encore à faire !
• Parlez-nous de Horst qui a été très impressionnant!
• Il est arrivé en mai dans nos écuries et est propriété de Quinoa Stables. Nous l’avons trouvé chez
Koen Vereecke, en Belgique. Dès que je me suis
mise dessus, j’ai eu un sentiment incroyable. Il s’est
passé quelque chose. Je me suis tout de suite dit
que c’était lui, même si nous cherchions au départ
un cheval avec un peu plus d’expérience. J’en ai
d’ailleurs essayé un autre avec plus de métier, mais
ce n’était pas pareil. Je suis retournée monter Horst
et ça a confirmé ce que j’avais ressenti…
• Vous vous entraînez avec Hansueli Sprunger depuis
le mois d’avril. Que vous apporte-t-il ?
• C’est un excellent entraîneur. Il est toujours très
calme et me met en confiance. Il n’a pas cherché à
changer ce que j’avais appris et mis en place avant
son arrivée et c’est cela que j’ai aussi apprécié. Il
travaille sur les petits détails qui font la différence.
Je vais régulièrement chez lui pour m’entraîner
lorsqu’il y a une pause entre deux concours. Il vient
avec moi sur les compétitions et regarde aussi
toutes mes vidéos. Mon entourage occupe également une place très importante et cette médaille est
aussi la leur. Ma mère, mon père et ma sœur sont
toujours là pour m’encourager et m’aider. J’ai énormément de chance. Un grand merci aussi à mes
propriétaires et à ma groom, Marie-Julie, qui est
merveilleuse et qui donne tout pour nous !
Propos recueillis par Michel Sorg
© Roland J. Keller
MARTIN FUCHS
UN VAINQUEUR
HEUREUX