Discours de remerciements de René van der Linden en réponse à
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Discours de remerciements de René van der Linden en réponse à
Discours de remerciements de René van der Linden en réponse à S.E.M. Jean-Michel Gaussot, Ambassadeur de France aux Pays-Bas, à l’occasion de la remise des insignes de Commandeur de la Légion d'Honneur La Haye, le 20 novembre 2007 -1- Monsieur l'ambassadeur, Chers amis, Mesdames, Messieurs, Au cours de ma longue carrière politique, je me plais à penser que les 2 fonctions les plus passionnantes que j’ai pu exercer ont été des fonctions purement honorifiques. Comme membre de la Convention européenne et comme Président de l’Assemblée Parlementaire du Conseil de l’Europe, j'ai connu les plus beaux moments de ma vie professionnelle. Je suis donc profondément honoré et touché de recevoir au nom du Président de la République cette distinction exceptionnelle en hommage à mon dévouement à la cause européenne et au renforcement des liens d’amitié entre nos deux pays. Je suis profondément touché par cette haute distinction car la France pour moi n’est pas un pays comme les autres. Ici l’idée européenne est née, a cheminé, a grandi, portée par tant de noms illustres… -2- Victor Hugo ne disait il pas en 1849 : "Un jour viendra où vous France, vous Russie, vous Italie, vous Angleterre, vous Allemagne, vous toutes, nations du continent, sans perdre vos qualités distinctes et votre glorieuse individualité, vous vous fondrez étroitement dans une unité supérieure, et vous constituerez la fraternité européenne". Voilà quelqu'un à qui j'aurais volontiers cédé ma place de Président de l'Assemblée Parlementaire! A Victor Hugo, j'ajouterais Robert Schuman, Jean Monnet, Jacques Delors… Et la liste continue de s'allonger, à chaque génération. Pour eux, l’Europe était très concrète. Ils avaient compris qu’il était fou de vouloir tourner le dos à son voisin. Fou de l’ignorer. De le caricaturer. De le juger avec notre regard. De ne pas chercher à mieux le connaître. Le rôle du Conseil de l'Europe et l'idéal européen -3- Tendre la main au delà les frontières. Combien de fois j’ai eu cette pensée à l’esprit après presque trois années à parcourir la « Grande Europe »: de l'Estonie à l'Espagne, de la Turquie à la Russie. Mieux se connaître. Apprendre à se respecter. Se retrouver autour de valeurs communes et intangibles. Se battre pour que ces valeurs soient respectées. Avec ténacité. Parfois aussi avec patience, compte tenu des contextes historiques. Ce travail, c’est le travail du Conseil de l’Europe. Un travail sous-estimé. Un travail centré sur l'humain. Un travail que l’Union européenne devrait apprendre à mieux apprécier. Car il s'agit d'une contribution essentielle à la construction et la consolidation d’une Europe démocratique, respectueuse des droits humains. C'est pourquoi je suis heureux que le Président Sarkozy ait rendu hommage la semaine dernière à Strasbourg au parlementaires travail de européennes toutes en citant les l'un assemblées de mes prédécesseurs à la tête de l'Assemblée Parlementaire du Conseil de l'Europe, Paul Henri Spaak. Le travail du Conseil de l'Europe n’a jamais été autant nécessaire pour lutter contre la menace croissante du racisme, de l’antisémitisme et de la xénophobie. Alors que -4- nos démocraties sont parfois tentées par une dérive sécuritaire. Alors que les conflits du passé sont source de nouvelles tensions. Pensez au génocide arménien ou à l’occupation russe des anciens Pays de l’Est. Face à ces menaces, le Conseil de l’Europe nous offre une maison commune. Il nous offre un forum pour développer un dialogue interculturel et interreligieux. Pour mieux nous aider à prévenir de nouvelles divisions. Car l’Europe ne doit pas être mise au service d’une quelconque revanche. L’Europe ne doit pas être instrumentalisée ou mise au service d’intérêts électoralistes. L’Europe reste une aventure formidable car elle a mis fin à la fatalité des conflits séculaires entre ses peuples. Parcourez le monde, vous retrouverez de tels conflits : en Palestine comme en Irak. Forte de son expérience, l’Europe a été et doit continuer à être au service de la paix, de la réconciliation et de la démocratie. En son sein et par delà ses frontières. Mais n’oublions jamais que notre autorité morale ne repose que sur l’exemple que nous donnons aux autres. Oui, l’Europe est un idéal exigeant. Un idéal qui réclame des femmes et des hommes de conviction, d'ambition et d'imagination. Capables de convaincre nos citoyens, et en -5- priorité, les jeunes générations. Il faut aussi apprendre à mieux parler de l’Europe. Toucher le cœur et l'intelligence de nos concitoyens. Je pense à l’excellente série « In Europa » inspiré du livre de Geert Mak actuellement visible sur la télévision néerlandaise. Non, l'Europe ne s'arrête pas à l’Union Européenne. En 1949, les fondateurs du Conseil de L'Europe, comme plus tard ceux de l’Union Européenne, voulaient par leur action que plus jamais Depuis 1989, la la guerre situation n’embrase géopolitique le de continent. l’Europe a radicalement changé. Notre nouvelle mission est d’éviter que de nouveaux clivages apparaissent sur notre continent. Le Conseil de l’Europe a un grand rôle à jouer. Notamment parce qu’il intègre la Russie et la Turquie, deux pays essentiels pour l’avenir de l’Europe. La Turquie Au sujet des relations entre la Turquie et l'Union européenne, je voudrais rappeler que les négociations d'accession reposent sur des obligations réciproques. Il faudra 10, 15 ans pour remplir les conditions d’accession. Et d'ici 15 ans, le monde aura beaucoup changé. D'ici là, l’intérêt des deux parties est de travailler -6- dans une atmosphère de confiance, de respect et de compréhension mutuelle. La relance de la construction européenne Le Président Sarkozy a déclaré à Strasbourg la semaine dernière : je me suis fixé comme priorité de remettre la France au cœur de la construction européenne. Même si l’Europe est devenu plus complexe depuis l’élargissement, une bonne coopération Franco - Allemande reste essentielle pour permettre à l'Europe d'avancer. Les plus grands progrès ont été accomplis quand les deux pays ont su travailler ensemble. Je pense à l’action du Chancelier Kohl et du Président Mitterrand, auxquels je rends hommage ce soir. C’est pourquoi je me réjouis de voir le Président Sarkozy et la Chancelière Merkel désireux de travailler main dans la main à la relance de la construction européenne. En particulier, j’espère que les années qui viennent verront la naissance d’une véritable défense européenne. Sans le résultat du travail de la Convention, le traité simplifié n’aurait pas été possible. Nous avons maintenant -7- un cadre pour recourir plus facilement à la coopération renforcée. Ceci est nécessaire car pour progresser dans certains domaines stratégiques, nous n'éviterons pas une Europe à deux vitesses. Mais cela existe déjà. Sans Europe à deux vitesses, nous n'aurions pas Schengen, nous n'aurions pas l’euro. Assez parlé de la dimension institutionnelle, concentrons nous à présent sur le contenu des futures politiques européennes. Le Benelux lui aussi a longtemps joué un rôle moteur dans la construction de l'Europe. Malheureusement depuis quelques années, les Pays Bas se sont repliés sur eux-mêmes. La coopération instrument européenne au service n'est de plus l'intérêt perçue comme national. Après un le référendum, les regards ont eu tendance à se tourner vers le Royaume Uni. A mon avis, c'est une erreur. L'intérêt bien compris des citoyens néerlandais devrait être de jouer un rôle actif dans la relance de la construction européenne. Pour cela nous devons renforcer la coopération au sein du Benelux et travailler étroitement avec l'Allemagne et la France, sans négliger les autres. Notre gouvernement a exprimé le désir que les Pays Bas retrouvent leur place naturelle à l'avant-garde de l'Europe. Je m'en réjouis. -8- Quant à la coopération franco-néerlandaise, celle-ci fonctionne, car nous sommes deux peuples éminemment rationnels. En France, parce que vous avez hérité des grecs et des romains l'amour des sciences appliquées. Aux Pays Bas, car nous avons du maîtriser la nature avec toute notre intelligence. Vous êtes le pays de Descartes. Nous sommes son pays d'adoption. Les ingénieurs de nos deux pays font mon admiration. Je pense à votre Thalys ou au Viaduc de Millau, je pense à notre aide aux pays menacés par la montée des océans. Enfin, la réussite d'Air France-KLM est un bon exemple de coopération couronnée de succès ! Pour conclure, Monsieur l'Ambassadeur, cette distinction me touche car la France pour moi n’est pas un pays comme les autres, et ce, aussi pour des raisons très personnelles. Depuis ma jeunesse et comme beaucoup de néerlandais, je me suis attaché à ce pays. A ce qu’on appelle la France « profonde ». Son art de vivre, sa joie de vivre. La Savoie en particulier. Les vacances à Thonon, puis à la Côte d'Arboz. Les routes des Alpes à vélo. La nature sauvage. La restauration d’une vieille grange, avec mes fils, tous les étés, pendant 10 ans ! Les habitants de notre -9- village, dont certain sont venus visiter les Pays Bas ! Mes nombreux amis français et, parmi eux en particulier, Bernard Bosson, ancien collègue aux affaires européennes. Les savoyards, comme les limbourgeois, vivent au carrefour de trois pays. Ils sont des européens par naissance. Ils aiment leurs traditions, ils sont attachés a leur famille. C’est pourquoi je m’y sens comme chez moi. Et depuis cet été, je suis devenu pour la première fois grand-père, avec la naissance de mon petit fils Diederick. Comme son nom ne l’indique pas, il est à moitié français car ma fille a choisi d'épouser un français !!! Comme vous pouvez le constater, ma famille travaille très concrètement à l'approfondissement des relations franco-néerlandaises ! Cela nous vaut beaucoup de joie et beaucoup de bonheur, chaque jour. Cela vaut tous les discours. Permettez-moi à présent de néerlandais […] - 10 - dire quelques mots en Pour conclure, je voudrais remercier Monsieur le Président Sarkozy. Cette distinction exceptionnelle est pour moi un grand honneur. Je voudrais aussi remercier Monsieur l’Ambassadeur Gaussot pour sa généreuse hospitalité. Enfin, à femme, aux membres de ma famille et à tous mes amis ici présent, je voudrais dire toute mon affection. Nombre de mots: 1565 - 11 -