Paul Bert

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Paul Bert
Paul Bert
1833 - 1886
Pour beaucoup de gens, le nom de Paul
Bert n’évoque pas grand’chose, tout au
plus sait-on que des écoles et des rues
s’appellent ainsi. Pour nous plongeurs, P.
Bert est inévitablement lié à ses recherches
menées sur les effets de l’oxygène sur le
corps humain. Mais ce grand Monsieur ne
s’est pas seulement arrêté à ses études
scientifiques, il a aussi mené une carrière
politique au cours de laquelle il se battra
bec et ongles pour détacher le clergé de
l’éducation… Un mec bien quoi ! (NDLR)
Le scientifique et les travaux sur la
pression barométrique.
Dans les années 1870, P. Bert étudie dans
les moindres détails les rapports et données
sur les sujets travaillant ou vivant en
altitude, grimpeurs, montagnards mais
aussi sur des plongeurs. Il réunit
l’ensemble de ses travaux dans son
ouvrage « La Pression Barométrique » où
il expose avec précision ses expériences
sur les animaux. Grâce à un système de
cloches de verre dans lesquelles il place les
bestioles, il peut à l’aide de pompes,
diminuer ou augmenter la pression à
l’intérieur desdites cloches. L’air étant
formé par 79% d’azote et 21% d’oxygène,
il met en évidence que c’est bien la
Pression Partielle d’Oxygène (PpO2) qui
diminue avec l’altitude et la pression
barométrique et non la quantité d’O2 qui
elle, reste invariablement à 21%.
Inversement, plus la pression ambiante
augmente, plus la PpO2 augmente en
rapport. Paul Bert travaille alors sur les
troubles liés à l’effet de l’O2 sur
l’organisme. Au cours de ses travaux, il
émet les premières hypothèses sur les
accidents de décompressions dus à la
formation de bulles d’azote bloquant les
capillaires. Ces hypothèses seront plus tard
démontrées et confirmées.
Afin de démontrer l’avancée de ses travaux
sur les troubles cérébraux dus à la variation
de la PpO2 sur les petits bêtes, P.Bert
décide de mener ses recherches sur luimême ( les volontaires ne font pas la
queue !). Il conçoit des caissons
hermétiques en tôle où il prend place, un
collègue (volontaire) fait varier la pression
intérieure grâce à une pompe et le tour est
joué. P.Bert établit alors des tracés précis
sur les limites hautes et basses de la PpO2
( hypoxie et hyperoxie) ainsi que sur
l’intoxication par le dioxyde de carbone
(hypercapnie)
Paul Bert dans son caisson prêt à mesurer les
limites de la vie.
Nous sommes dans les années 1870. Fabriquer
un caisson étanche avec les moyens disponibles
relève de la magie. Notez la quantité de rivets !
Afin de rendre hermétique l’appareil, il n’y avait
pas beaucoup de solutions. J’opte pour une
couche épaisse de bitume à l’intérieur de
l’engin…les idées sont les bienvenues !
A noter : le shadok volontaire prêt à
pomper..pomper !
Mécanisme de l'hyperoxie
Notre organisme tolère quelques variations
dans la pression partielle d'oxygène
respiré. Cette PpO2 doit être comprise entre
0,17 bar et 0,5 bar. Ce sont les conditions
"normoxiques".
L'hyperoxie
(trop
d'oxygène) apparaît quand PpO2 > 0,5 bar.
Les effets nocifs de l'oxygène proviennent
des propriétés chimiques des ions O- (on
les appelle "radicaux libres"). Ces ions sont
très réactifs et peuvent altérer nos cellules
s'ils deviennent trop nombreux. Les
mécanismes de régulation du taux de
radicaux libres sont complètement
dépassés si on respire un air trop riche en
oxygène.
En fonction du temps d'exposition à
l'oxygène et de sa pression partielle, les
radicaux libres provoqueront une altération
fonctionnelle des cellules nerveuses
(accident neurotoxique), voire une
altération morphologique au niveau des
alvéoles pulmonaires si l'exposition est très
longue.
Comme on va le voir, nous autres
plongeurs exploitons la connaissance de ce
risque pour nous fixer une profondeur
maximale en fonction du mélange gazeux
respiré.
L'effet Paul Bert
La toxicité neurologique de l'oxygène
survient à partir d'une PpO2 > 1,6 bar.
Cette toxicité se manifeste par une crise
convulsive avec perte de connaissance
appelée "effet Paul Bert". On distingue 3
phases dans la crise hyperoxique : une
phase tonique (contractions musculaires),
une phase clonique (ramollissement) et une
phase finale dépressive. La crise
hyperoxique s'interrompt d'elle même
quand on cesse l'inhalation d'oxygène.
Cette crise à caractère épileptique est
parfois précédée de signes avant-coureurs :
accélération
du
rythme
cardiaque
(tachycardie),
secousses
musculaires,
nausées, anxiété ou confusion, troubles de
la vue.
Ce seuil est atteint en plongée à l'air à une
profondeur de -66 m.
Soit 1,6 PpO2/21% = 7,62 bar Pabs – 1
bar Patm = 6,62 bar en Prelative : donc
bien 66 m
Lors de plongées au nitrox ?
Il faut recalculer la profondeur limite en
fonction du taux d'oxygène dans le
mélange, car ici, la profondeur limite sera
plus facilement atteinte. Par exemple, si on
respire du nitrox contenant 40% d'O2, il ne
faudra pas dépasser -30 m. L'apparition de
cette crise est aussi fonction de la durée de
l'exposition (le temps de latence est
variable pour une même personne), de
l'activité musculaire, et bien entendu, de la
PpO2 respirée.
Mais encore….les autres recherches
de P.Bert
Il développe avec Auguste Denayrouze
pour les plongeurs un nouveau scaphandre
qui porte le nom de….Aérophore ! Il est
muni d’un régulateur de pression grâce
auquel Les scaphandriers pourront
désormais travailler plus longtemps sans
refaire surface. En 1870, il travaille sur les
anesthésiques que l’on utilise encore de
nos jours.
Paul Bert ne s’arrête pas là. En 1875, une
année après avoir envoyé un ballon à 7300
m, il prépare un nouveau voyage pour
battre cette altitude. Dans la Nacelle du
« Zénith » prennent place les aéronautes
Croce-Spinelli, Sivel et Tissandier. Ils
quittent Paris au moment même ou Paul
Bert leur envoit un message leur indiquant
que les réserves d’oxygène embarquées ne
sont pas suffisantes, trop tard, victimes des
symptômes de l’Hypoxie, deux des trois
aéronautes trouveront la mort avant de
s’écraser dans le Cher. Seul, Tissandier
s’en sortira…
Paul Bert et la politique
Professeur de physiologie à la Sorbonne,
membre de l'Académie des sciences, il a
été député Républicain, Ministre de
l'Instruction Publique et des Cultes du
Gouvernement Gambetta de novembre
1881 à janvier 1882, et résident général au
Tonkin et en Annam. Les actions
politiques
de
Paul
Bert
portent
essentiellement sur trois sujets :
l'Instruction publique, son domaine de
prédilection, les cultes et les colonies. Il a
été avec Jules Ferry le père fondateur de
l'école gratuite, laïque et obligatoire. Il
existe ainsi une certaine 'rivalité' entre
Ferry et Bert. Il crée le certificat d’étude
primaire pour que tous les Français aient le
même niveau scolaire. On lui doit
l’accession des jeunes filles à l’éducation
supérieure. Il a été membre de plusieurs
sociétés de libres penseurs dont la plupart
sont créées au début des années 1880
comme l'Union de propagande anticléricale
qui regroupe des athées tel Victor
Schoelcher. Les funérailles nationales
civiles de Paul Bert provoqueront un
scandale
chez
les
cléricaux.
Tous les jours, professeurs, ingénieurs,
aviateurs, politiciens, plongeurs, médecins, ou
encore scientifiques, le sachant ou non se
réfèrent à l’œuvre de Paul Bert.
Pour clore mon petit article, je lui laisse la parole…
« Avec la science, il n’y aura plus de superstitions ni de croyances
aux miracles, plus de coups d’Etat et de révolutions. »
[ Paul Bert ]

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