L`Accompagnement des personnes âgées : Hier et

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L`Accompagnement des personnes âgées : Hier et
L'Accompagnement des personnes âgées : Hier et Aujourd'hui
Si les termes utilisés sont censés refléter la philosophie de l'action que l'on mène, lorsque l'on parle de
l'aide apportée par la société à l'un de ces membres qui en a besoin, on constate que les principes
fondant l'action ont évolués au fil de temps. (voir à ce propos l'article RP Williamson, et celui de C De
Robertis).
Au début du XXième siècle, la charité et la bienfaisance ont laissé place à l'assistance puis à la
protection. Par la suite le mot « suivi » fut également utilisé, indiquant le fait que l'on veille sur
quelqu'un, avec une notion de régularité. L'expression « prise en charge », toujours usitée, connote une
certaine passivité de la part du pris en charge qui semble alors être un poids, voir un fardeau, avec lequel
on avance coûte que coûte ... Le cas désigne une situation complexe, de part la multiplicité des
problèmes auxquels est confrontée une personne. (Ce terme a plus récemment été adopté dans le cadre
du plan Alzheimer et la gestion de cas.) Dans les années 70, le développement de l'analyse systémique a
permis l'apparition de la notion d'approche globale. Il s'agit alors de prendre en compte la personne sous
tous ses aspects : environnement et vie sociale, psychologie...
La notion d’accompagnement apparaît vers le milieu des années 80 dans le travail social. Cependant,
les politiques sociales ne spécifient pas qui accompagne, et elles prévoient un accompagnement
spécifique pour chaque problème. C'est ainsi que l'approche globale, qui était centrée sur la personne, se
trouve supplantée par une logique de spécialisation de l'intervention, avec une multitude
d'accompagnants, chacun cantonné dans sa spécialité, avec tout de même parfois des chevauchements et
au final une question récurante : qui fait quoi et comment coordonner l'ensemble ?
Si l'on se penche sur son étymologie, le terme accompagnement vient du latin "ad cum panis", "celui
qui mange le pain avec". Il comporte donc la notion de partage, d'échange, de parcours. Aussi, pour
réaliser réellement cet accompagnement, encore faut-il envisager l'autre comme son égal. Il s'agit de
l'écouter, savoir où il en est, définir les objectifs à atteindre et comment les atteindre. C'est en fait
cheminer avec la personne, l'appuyer, pour qu'elle s'épanouisse, se réalise.
Ainsi l’accompagnement implique nécessairement la participation active de l’intéressé : on
l’accompagne mais c'est lui, avec notre éclairage, qui décide où il va, et comme chaque situation est
unique, son chemin lui est propre ... et est loin d'être tout tracé. On voit bien là en quoi l'accompagnant
ne peut avoir qu'une obligation de moyen et non une obligation de résultat : il doit mettre tout en œuvre
pour aider la personne qu'il accompagne, faciliter son cheminement mais ne présage pas des décisions
prises. Pour cela il est important que les étapes soient progressives, que toutes soient bien respectées, et
que la mise en place d'une prestation de service ne soit pas considérée comme une fin en soi mais bien
comme un outil, un point d'étape du cheminement, et les objectifs périodiquement revus et validés.
Lorsqu'il s'agit des aidants familiaux, souvent cette place d’aidant n’a pas été discutée au sein de la
famille et vient plus ou moins naturellement. C’est, dans le cas d'un descendant, la notion d’ «enfant
désigné » décrite par des psychologues et gériatres. (cf Ch Heslon, J Gauchet). En découle toute la
difficulté et la subtilité du positionnement de l’aidant qui doit trouver sa place à côté de son père ou de
sa mère. Il y a là un risque d'inversion des rôles parent / enfant et on entend parfois « Maman ne veut
pas m’obéir » ... Selon les individus, au sein de la famille, le lien devient fusionnel avec l’aidé, ou bien
au contraire il se délite. Il peut aussi y avoir une alternance entre les deux. Aujourd’hui il est possible de
choisir avant de devoir être aidé, notamment en désignant la personne de confiance, et le professionnel
référent, dans le cadre de décisions concernant les actes médicaux. Il existe également le mandat de
protection future, s'agissant de la protection du patrimoine. Va-t-on aller vers une extension de ce
concept ? La question du choix est donc fondamentale, tous autant que nous sommes, ne craignons-nous
pas qu'un jour des décisions concernant notre propre vie soient prises à notre place ? On a intérêt à
formaliser le choix de l’avenir de la personne, on est dans cette conception du maintien de l’autonomie
et de la valorisation de la personne.
L’un des objectifs de l’intervention des professionnels doit finalement consister à aider les aidants à
trouver leur place autour de la personne aidée pour que chacun, la personne aidée comme son entourage
familial puisse vivre au mieux cette relation d'accompagnement et trouver leur équilibre. Qu'il s'agisse
du coordinateur, du gestionnaire de cas, de l'aide à domicile, de l'aidant familial, du soignant, la notion
d'accompagnement porte ces mêmes enjeux de respect et de dignité de la personne accompagnée. (voir à
ce propos W HESBEEN). Il est intéressant de comprendre que ce sont ces principes qui fondent les
droits des usagers tels que décrits dans la loi rénovant l’action sociale et médico-sociale du 2 janvier
2002.
Au-delà de l'affichage des chartes et dans le contexte du temps contraint, comment travailler sur
l'amélioration de l'accompagnement au quotidien ? Cela suppose notamment de :
- pouvoir s'autoriser à être réellement à l'écoute, laisser la personne dérouler son récit, ne pas trop
cadrer.
- Elaborer de vrais projets de vie collectivement, en équipe pluri-disciplimaire, à partir des histoires de
vie.
- Evaluer : se poser, réfléchir à ce qui se fait et comment, cela permet de donner de la valeur
- Avoir nécessairement des temps d'échanges sur les pratiques, en équipe, pour permettre la bonne
distance professionnelle, pour objectiver ce que l'on fait.
- Etre formé aux différentes approches de la communication et de l'accompagnement, notamment des
personnes âgées atteintes de démence (Validation de Naomie Feil notamment).
- Sans oublier la participation collective des usagers-citoyens, familles et personnes âgées ellesmêmes, pour permettre la prise en compte de leurs besoins, leur permettre de réinvestir des lieux de
projets qui leurs sont destinés, au-delà des obligations légales.
Abrégé, Amélie Cornilleau, ANCCLIC, Juin 2014
Bibliographie
- Ardoino Jacques, "De "l'accompagnement" en tant que paradigme", Pratiques de formation / Analyses (Université
Paris 8, Formation Permanente), décembre 2000
- Croff Brigitte, Mauduit Micheline, "Travailler auprès de personnes âgées", Gérontologie et société 1/2003 (n°104)
- De Robertis Christina, "L’accompagnement : une fonction du travail social ", la Revue française du travail social, déc.
2005
- Hesbeen Walter, La banalisation de l'humain dans le système de soins : De la pratique des soins à l'éthique du
quotidien, ouvrage collectif, Seli Arslan, mai 2011
- Heslon Christian, « Accompagner le grand-âge », Dunod, 2008
- Williamson Richard-Pierre, "Humanisons notre lexique", Actualités Sociales hebdomadaires, octobre 2011