Lauriers roses
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Lauriers roses
La Gazette des Jardins – N° 26 - juillet 1999 Lauriers roses : L’auriez pas pensé si compliqué le laurier, l’auriez vu tout facile à cultiver, à laisser pousser, sans rien dessus mais l’auriez très tord. Laurier rose, beaucoup de maladie et d’insectes ravageurs. Sans compter qu’il a horreur de l’ombre, c’est un p’tit gars du sud, des sols superficiels et de la mauvaise circulation d’air. Ce qu’il n’aime pas du tout non plus, c’est l’arrosage par aspersion. C’est le meilleur moyen de transport et de dissémination des spores de champignons aériens et les champignons, i’ connaît bien le bougre. Vous avez tout d’abord les grands classiques : Phytophtora et Pourridié. Ce sont deux champignons racinaires que l’on retrouve sur de nombreuses espèces végétales. Nous vous en reparlerons dès que nous aurons réussi à faire de belles photos. Ils attaquent lorsque les sols sont trop arrosés ou mal drainés... A la lettre A , nous avons l’ Ascochyta heteromorpha qui cause chancre et taches sur les feuilles. C’est le roi de l’aspersion puisque c’est l’eau et le vent qui dissémine ses spores. Le champignon se transmet aussi par les boutures. Les symptômes apparaissent souvent à l’automne ou pendant les périodes pluvieuses. Des taches nécrotiques, rondes, de couleur brun clair entourées par un anneau pourpre apparaissent sur les feuilles contaminées. Un autre champignon : Septoria sp. lui ressemble assez, mais les taches bien qu’à centre clair, cernées d’une auréole brune, sont plus anguleuses. Pour en revenir à Ascochyta, ce n’est que plus tard que les fructifications se forment et se développent. Ce sont de petits points noirs assez semblables à ceux que nous avons sur le nez. D’ailleurs à maturité, ils libèrent un mucus rosâtre qui renferme les nouvelles spores. Au niveau des tiges et des rameaux, vous verrez apparaître des chancres plus ou moins prononcés en forme d’écusson. Les rameaux se fragilisent et peuvent même se rompre. Le champignon ne tue pas la plante mais l’affaiblit considérablement. La meilleure solution pour limiter les contaminations est de supprimer l’arrosage par aspersion et de couper les parties malades tout en désinfectant les outils entre deux sujets. Les traitements, il n’en n’existe pas. A la lettre B, nous trouvons la bactérie Pseudomonas syringae pv savastanoï. Dans notre région elle sévit également sur les oliviers. Elle pénètre dans le laurier par des plaies qui peuvent être dues à des chocs, au gel et aux tailles. Si vous taillez à l’automne ou en hiver, des bactéries et des champignons vont pénétrer plus facilement à cause de la fragilisation par le froid. Si vous taillez au printemps, vous n’aurez pas de fleurs en été. Conclusion : un laurier n’est pas fait pour être tailler. Toutefois, si vous n’avez qu’un tout petit balcon et un énorme laurier rose, ne soyez pas trop inquiet, la galle bactérienne n’est pas grave si elle ne généralise pas. Autre facteur favorisant le développement du monstre, les carences en bore. Pour le symptôme, il est facile à repérer, des galles se développent sur la nervure principale des feuilles provoquant déformations et crispations. Sur les tiges, on observe également des tumeurs brunes et rugueuses. Deux méthodes de lutte sont possibles. La méthode bourrin : Je supprime l’arrosage par aspersion, coupe les parties malades en désinfectant les outils entre deux sujets. Ou bien la méthode subtile : Je corrige une carence éventuelle en bore. Je diminue les doses d’azote et j’augmente celles en potasse pour renforcer les tissus. La méthode traitement n’existe pas, vous pouvez toutefois, après la taille, faire un traitement à base de cuivre afin de limiter l’entrée des bactéries ou tout autre champignon. Au rayon bébêtes, le laurier rose accueille quelques beaux spécimens. A la lettre A, Aphis nerii. Il s’agit d’un puceron jaune citron vif parfois teinté de vert qui possède bien entendu de fortes corn(icules) noires, relativement longues. Il est assez gros puisque sa forme aptère (sans ailes) mesure environ 2,2 mm de long. On peut également le rencontrer sur certains agrumes et sur les asclépias. Il attaque généralement les jeunes pousses tendres et développe très rapidement des colonies très populeuses. Comme bon nombre de pucerons, ce n’est pas la quantité de sève qu’il ponctionne qui pose problème mais le miellat qu’il sécrète. La fumagine se développe dessus et perturbe la photosynthèse des feuilles. Les facteurs favorisant tout particulièrement son implantation sont les tailles et une forte fertilisation en azote. Dans notre région, vous en verrez énormément au mois de mai. Si vous êtes un acharné du traitement et de la taille, bon courage. Il vous faudra recourir à des insecticides de plus en plus puissants pour calmer vos angoisses. Mais si vous êtes plutôt du genre jardinier Gazette, levez-vous quelques heures de votre chaise longue, marchez nonchalamment vers votre jardinerie préférée et commandez quelques larves de coccinelles. Rentrez chez vous, replongez-vous dans votre sieste jusqu’à l’arrivée du facteur avec les larves. Après, ouvrez un œil, puis deux, prenez votre pinceau et déposez délicatement les petites voraces sur les foyers. Re-sieste. Outre les coccinelles naturelles qui vont commencer à circuler dans votre jardin, d’autres insectes prédateurs tels que les syrphes et les chrysopes complèteront l’action des coccinelles que vous aurez lâchées. A partir de la fin mai, vous verrez apparaître de drôles de pucerons. Un croisement entre un américain moyen obèse et un lingot d’or. Il s’agit en réalité d’un Aphis nerii parasité par une micro-guêpe Aphidius colemani. Comme Encarsia sur les aleurodes (voir numéro de la gazette), la guêpe pond son œuf dans le puceron, la larve se La Gazette des Jardins – N° 26 - juillet 1999 développe et le puceron gonfle tout en servant de garde manger vivant. Les pucerons morts présentent un trou de sortie arrondi au niveau de l’abdomen. La guêpe nouvellement éclose ira piquer d’autres pucerons et ainsi de suite. Cet auxiliaire existe à l’état naturel dans les jardins non traités. Certaines biofabriques les commercialisent pour faire des lâchers complémentaires en début de saison. Par la suite, la pluie et le vent feront tomber au sol les enveloppes vides et nettoieront vos lauriers. Toujours du même genre et présents également sur laurier : Aphis fabae. C’est un puceron noir plus petit que le précédent, de 1,5 mm jusqu’à parfois mais plus rarement 2,9 mm de long. Il arrive généralement plus tard dans la saison. Au rayon des insectes piqueurs suceurs, il vous faudra compter également sur la cochenille de l’olivier : Saissetia oleae que vous connaissez déjà très bien si vous êtes un fidèle lecteur de la gazette. Enfin, encore et toujours à la lettre A, un acarien : Tetranychus urticae que vous connaissez sous le nom d’araignée rouge. L’acarien n’est pas un insecte puisqu’il a 4 paires de pattes au lieu des trois réglementaires. Le corps des adultes est de forme globuleuse et en période sèche, en été, les femelles prennent une teinte rouge-orangée, d’où leur surnom. Par la suite, vous pourrez observer deux taches noires sur son dos qui disparaissent en période hivernale. Mais ça c’est vachement dur à repérer parce que c’est tout petit. Lorsque l’air est sec et chaud elles commencent à pondre jusqu’à 10 œufs par jour. Les larves qui en éclosent n’ont que trois paires de pattes. La face inférieure de vos lauriers roses se couvrira progressivement d’une toile très fine proche de celle des araignées. Elle les protège des intempéries et aussi des traitements. A la face supérieure, les cellules végétales qui ont été piquées par les acariens se décolorent et se dessèchent. Le laurier prend une teinte plombée argentée caractéristique. Pour éviter ce ravageur, une première solution est de bassiner le pied de vos lauriers en évitant de les asperger. Cela maintiendra une humidité ambiante qui n’est pas favorable à sa pullulation mais qu’adore un de ces prédateurs naturels, un autre acarien Phytoseiulus persimilis. Il est plus gros que lui et est également commercialisé par certaines biofabriques. Un traitement à l’huile blanche peut être efficace Le laurier rose appartient à la famille des Apocynacea et au genre des Nerium. Ce qui est assez surprenant, puisque je suis sûre que les plus malins d’entre vous qui sont certainement passionnés de botanique et qui ont certainement fait du latin l’auraient plutôt classé dans les Laurus. Or il n’y a qu’un seul vrai laurier Laurus et c’est le laurier sauce. Le laurier cerise est un Prunus et le laurier tin (et pas thym même s’il pousse bien dans notre région. En plus, il pu alors... ) un Viburnum. Ce détail a son importance car les plantes du genre Nerium contiennent un glucoside (un espèce de sucre) proche de la digitaline. On raconte d’ailleurs que de simples grillades faites sur un feu de laurier rose ont suffit à disséminer une bonne partie des troupes napoléoniennes pendant la guerre d’Espagne. Pour une ou deux personnes, une simple décoction suffit... L’origine de ce végétal est assez obscure, nous en voulons pour preuve les contradictions que nous avons pu repérer dans la bibliographie que nous avons consultée. Toujours est-il qu’on les retrouve représentés sur les peintures de Pompéi et qu’ils ont été décrits il y a 2000 ans par certains auteurs latins. En cherchant dans de vieux grimoires de botanique, son introduction chez nous, daterait du XVIème siècle. Actuellement, il est réparti sur l’ensemble des zones sub-tropicales, les régions d’altitudes tropicales et en méditerranée. Principaux ravageurs du laurier rose : Aphis nerii (attaques possibles d’autres espèces) et Tetranychus urticae plus Saissetia oleae et quelques autres cochenilles de moindre importance. Ecrit par Edith MÜHLBERGER et Pascal MAIGNET