Le dépistage de l`infection à VIH
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Le dépistage de l`infection à VIH
Le dépistage de l'infection à VIH Dossier de synthèse documentaire et bibliographique novembre 2007 M ars ei ll e : 18 , r u e S t an is l as tor r e nts 1 3 00 6 M ar s ei l l e – T é l . : 04 91 5 9 8 3 8 3 – F ax : 0 4 91 59 8 3 9 9 Ni ce : 6 , r u e de S u is s e 0 6 00 0 N ic e – T él . : 04 9 2 1 4 4 1 20 – F ax : 0 4 9 2 14 4 1 2 2 Code APE : 913 E – N° SIRET : 391 262 508 00032 – Association Loi 1901 Sommaire Le dépistage en France....................................................................................................................... Le contexte................................................................................................................................... Le dispositif des CDAG ................................................................................................................ La consultation de dépistage........................................................................................................ Le recours au dépistage ............................................................................................................... L’activité de dépistage.................................................................................................................. 2 2 2 3 3 3 Les problématiques actuelles............................................................................................................. Le dépistage tardif........................................................................................................................ Les home-tests............................................................................................................................. Le sérotriage ................................................................................................................................ 4 4 5 6 Le rôle du dépistage dans la prévention ........................................................................................... 6 Le dépistage comme outil de prévention ...................................................................................... 6 Les comportements de prévention des personnes atteintes ......................................................... 7 Les recommandations de l’ONUSIDA sur le dépistage et le conseil à l’initiative du prestataire de services dans les établissements de santé....................................................................................... Les recommandations .................................................................................................................. Dépistage et contexte épidémiologique ........................................................................................ La mise en pratique...................................................................................................................... 7 8 8 8 Les recommandations des Centers for Disease Control and Prevention ....................................... 9 Le rapport du Conseil National du Sida............................................................................................. 10 Elargir l’offre de dépistage............................................................................................................ 11 Repenser le counseling et la réalisation du test............................................................................ 11 Les évolutions de la pratique du dépistage : des pistes et des expériences.................................. 12 Augmenter les circonstances d’offre du test ................................................................................. 12 Améliorer et compléter le dispositif existant.................................................................................. 12 Conclusion........................................................................................................................................... 14 Bibliographie ....................................................................................................................................... 15 CRIPS Provence-Alpes-Côte d’Azur, novembre 2007 1 Le dépistage en France L’organisation du dépistage de l’infection à VIH en France repose sur le volontariat et une organisation médicalisée. Ceci a pour objectif de garantir que le test sera réalisé au moment le plus opportun, complété par d’autres recherches si nécessaire, et que le résultat pourra être rendu et expliqué par un professionnel. Le contexte Dans la circulaire du 20 janvier 1988 du Ministère des Affaires Sociales et de l’Emploi, il est précisé que « le gouvernement a exclu jusqu’à présent toute politique de dépistage systématique ou obligatoire pour lui préférer une politique de responsabilisation basée sur l’information d’une part et le dépistage volontaire d’autre part ». Le dépistage en France nécessite un consentement libre et éclairé. La démarche de dépistage est une démarche personnelle volontaire auprès de son médecin ou d’un médecin exerçant dans un centre de dépistage. Le dépistage ne peut être fait qu’à la demande de la personne ou avec son accord s’il lui est proposé. Les seuls cas où le test du VIH est obligatoire sont les dons de sang, d’organes, de gamètes et de lait. Lors de l’examen pré-nuptial ou du premier examen pré-natal, le test de dépistage doit être systématiquement proposé. Sa réalisation n’est pas obligatoire. Bien souvent, le test est prescrit dans le cadre d’un bilan préopératoire ou pendant la grossesse. Dans toutes les circonstances, la personne doit être informée, donner son accord et avoir communication des résultats. Il s’agit d’un acte biologique médical confidentiel, protégé par le secret médical et qui doit s’accompagner de conseils et de possibilités de dialogue. Le résultat d’un test est strictement confidentiel. Seul un médecin est habilité à annoncer le résultat à la personne concernée. En raison des implications sociales et des connotations morales de l’infection par le VIH, la politique de la France protège la confidentialité des résultats du test ainsi que de la nature de la maladie. Le dispositif des CDAG Dès le milieu des années 80, un test de dépistage de l’infection à VIH est mis au point. Le 1er août 1985, le test du VIH est rendu obligatoire en France pour tout don du sang. En parallèle, son utilisation en dehors de ce contexte reste limitée et compliquée. De ce fait, on assiste à une fréquentation importante des centres de collecte de sang par des personnes ayant eu des comportements à risques ou suspectant une possible séropositivité, dans le but de connaître leur statut sérologique. Face à cette situation, pour encourager et faciliter les tests volontaires tout en garantissant le secret des résultats, la possibilité d’un test anonyme et gratuit a été mise en place dans tous les départements avec la création des centres de dépistage anonyme et gratuit (CDAG). Dans d’autres centres tels que les centres de planification et d’éducation familiale, le dépistage n’est pas anonyme, mais il est également gratuit et, bien sûr, protégé par le secret médical. Le test peut également être prescrit par un médecin dans le cadre d’une consultation et être réalisé dans un laboratoire d’analyses médicales. Le dispositif des CDAG est inscrit dans le cadre de la loi de santé publique du 30 juillet 1987 qui spécifie que « dans chaque département, le représentant de l’Etat désigne une consultation destinée à effectuer de façon anonyme et gratuite le dépistage de l’infection par VIH ». Le décret d’application du 18 janvier 1988 et la circulaire du 20 janvier 1988 expose la philosophie de l’ensemble du dispositif et précise les modalités pratiques de fonctionnement. Ces textes de loi stipulent que les CDAG doivent venir compléter le dispositif de lutte contre l’infection par le VIH et assurer des fonctions d’accueil et d’information, d’examen médical et biologique ainsi que d’orientation. Par la suite, leur mission a été élargie au dépistage des hépatites et des IST. CRIPS Provence-Alpes-Côte d’Azur, novembre 2007 2 Dans les faits, il existe au moins un centre de dépistage anonyme et gratuit par département. La loi de santé publique d’août 2004, redonne à l’Etat sa prérogative en matière de prévention et de lutte contre la lèpre, la tuberculose et les IST. Ainsi, depuis 2005, l' organisation des CDAG est revenue sous la tutelle de l' Etat, même si dans de nombreux départements les conventions ont été reconduites avec les Conseils Généraux. La consultation de dépistage Le test de dépistage doit être prescrit par un médecin et ne peut se faire qu’avec le consentement de la personne. Une information préalable doit être donnée afin de préparer la personne à l’éventualité d’un résultat positif. Ce temps de dialogue permet également d’aborder les questions de prévention. Le rôle du médecin est de procéder avec la personne à un examen de la situation puis, si nécessaire, de prescrire les tests diagnostiques adaptés. En effet, une consultation de dépistage n’aboutit pas automatiquement à la réalisation d’un test. C’est le dialogue avec le médecin qui conduira à la décision de prescrire ou non un test. La législation prévoit que le test de dépistage fasse appel à deux examens ELISA par des techniques différentes. Si un des deux ELISA se révèle positif, on réalise alors une confirmation par un autre test plus spécifique, le Western Blot. La très grande sensibilité des tests ELISA fait qu’ils peuvent dépister parfois de fausses positivités. De ce fait, il est important de faire confirmer le résultat par le Western Blot qui est très spécifique des anticorps du VIH. Le résultat, qu’il soit positif ou négatif, doit être rendu et expliqué lors d’une consultation. La personne peut alors s’entretenir avec le médecin et bénéficier de conseils adaptés à la situation. L’accompagnement et le counseling mis en place sont des facteurs favorisant la prise en charge des personnes atteintes après l’annonce du résultat du test. Ils sont également propices à une réflexion sur les comportements de prévention. Le recours au dépistage Dans l’enquête KABP [1], le recours au test de dépistage au cours des 5 dernières années est stable entre 2001 et 2004 par contre, le recours aux CDAG dans les 5 dernières années diminue. En effet, en 2001, 12,9% des répondants déclarant avoir fait un test dans les 5 dernières années l’ont fait dans un CDAG contre seulement 8,9% en 2004. En 2004, 48,5% de la population déclare ne s’être jamais fait dépister. La principale raison invoquée reste l’absence de risque dans 77,8% des cas tandis qu’un peu moins d’une personne sur dix ne sait pas où s’adresser et 7,5% pensent que cela ne sert à rien. 10% redoutent d’en connaître le résultat. Notons que 32,2% des répondants déclarent n’avoir jamais pensé à faire un test. Les personnes « concernées par le VIH » sont les plus nombreuses à avoir fait le test au cours de l’année : jeunes, célibataires, multipartenaires, personnes se percevant comme ayant un risque supérieur à la moyenne d’être contaminées, personnes connaissant une personne séropositive et celles déclarant avoir utilisé des préservatifs au cours de l’année. L’activité de dépistage L' activité de dépistage du VIH (hors don du sang) fait l' objet d' une surveillance particulière au niveau national et par région. Contrairement aux résultats de l’enquête KABP, les données publiées par l’Institut de Veille Sanitaire [2] montrent une augmentation du nombre de sérologies réalisées : +4% par an entre 2001 et 2004 et +8% entre 2004 et 2005. CRIPS Provence-Alpes-Côte d’Azur, novembre 2007 3 Au niveau national, le nombre de sérologies VIH réalisées dans la totalité des laboratoires est estimé à 5,3 millions en 2005 (dont 74% en laboratoire de ville). Le nombre de sérologies VIH effectuées rapporté à la population est de 84 pour 1 000 habitants. Le nombre de sérologies confirmées positives est estimé à 11 600 dont 38% en laboratoire de ville. En PACA, en 2005, 520 557 tests de dépistage ont été réalisés soit 110 sérologies pour 1 000 habitants. Le nombre de sérologies positives est de 763 pour l' année 2005, soit 161 sérologies positives par million d' habitants, ou 1,5 sérologies positives pour 1 000 tests. La région est la deuxième région de France métropolitaine derrière l’Ile-de-France tant pour le nombre de dépistages réalisés pour 1 000 habitants (110 en PACA contre 112 en IDF) que pour le nombre de sérologies positives par million d' habitants. C' est donc une région où l' activité de dépistage est importante. L' enquête CDAG 2004 [3], parue en novembre 2006, montre qu’en France 8% des dépistages sont réalisés dans le cadre d’un CDAG et que 12% des sérologies positives y sont dépistées. En région PACA, on dénombre 31 078 consultants au cours de l' année 2004, ce qui représente environ 6% des dépistages réalisés. Les CDAG sont habituellement présentés comme le cœur du dispositif. C’est le cas pour une partie de la population, qui fréquente régulièrement ces lieux, cependant les CDAG ne réalisent qu’une minorité des tests en France. Ils touchent en revanche une population particulièrement exposée, puisqu’environ une personne séropositive sur 10 est dépistée dans un CDAG. Les problématiques actuelles Le dépistage tardif Selon la définition donnée par l’InVS, le dépistage tardif concerne les personnes qui n’ont découvert leur séropositivité qu’au stade sida. Certains auteurs y ajoutent les patients diagnostiqués à un stade d’immunodépression avancé (moins de 200 CD4/ l) même sans signes cliniques de sida. D’autres comptent un délai de 0 à 6 mois entre la découverte de la séropositivité et le diagnostic de sida. En France en 2005, 48% des cas de sida diagnostiqués concernent des personnes qui ignoraient leur séropositivité avant le stade sida. En région PACA, cette proportion au diagnostic tardif est seulement de 36%. Cependant, depuis 2002, ce pourcentage de diagnostic tardif est en progression en région PACA (26% en 2002, 28% en 2003, 30% en 2004, 36% en 2005) alors qu' il se stabilise plutôt en France (49%, 47%, 45%, 48% de 2002 à 2005). En résumé, en France le nombre de dépistages tardifs au stade sida est mauvais mais stable, alors qu' en PACA, il est meilleur mais évolue dans la mauvaise direction. Pourcentage de diagnostics tardifs en France et en région PACA par an au 31 décembre 2006 60% 50% 50% 48% 47% 49% 44% 46% France PACA 40% 34% 30% 36% 29% 26% 28% 30% 20% 2000 2001 2002 2003 2004 2005 Plusieurs facteurs sont évoqués pour expliquer les dépistages tardifs : CRIPS Provence-Alpes-Côte d’Azur, novembre 2007 4 - certaines personnes ne se perçoivent pas comme « à risque », d’autres personnes ont conscience d’avoir pris des risques mais ils n’ont pas fait la démarche de dépistage, certains groupes de population ont un accès difficile au dispositif de dépistage. La vulnérabilité sociale, la précarisation ou l’exclusion représentent des barrières évidentes pour l’accès à la prévention, aux soins et bien évidemment au dépistage. La notion de vulnérabilité multifactorielle peut être aggravée par une barrière culturelle et/ou linguistique qui fait que certaines personnes n’ont pas accès à l’information parce que les messages et les vecteurs de communication ne leur sont pas adaptés. La répartition par nationalité des découvertes de séropositivité en PACA montre une très importante augmentation de déclarations dans la population d’origine d’Afrique subsaharienne en 2005. Bien que dans une proportion moins importante qu’en région Ile-de-France, cette augmentation de diagnostic VIH dans la population d’Afrique subsaharienne est nette et significative. Elle est à rapprocher du plan régional de lutte contre le VIH dans les populations migrantes dont les actions ont permis de faciliter l’accès au dépistage pour ces personnes. L’absence de perception des risques, un réseau relationnel pauvre ou encore une méfiance par rapport au monde médical sont autant de facteurs expliquant le recours tardif au test. Les home-tests Dans certains pays, tels que les Etats-Unis ou le Canada, différents tests à domicile ou « home-tests » sont commercialisés. Sous cette appellation sont regroupés le test par auto-prélèvement à domicile et analyse en laboratoire et le test par auto-prélèvement et auto-analyse à domicile. Le test par auto-prélèvement à domicile (« home sample collection » ou « home-access testing ») permet au sujet lui-même de prélever un échantillon de sang en bout de doigt à déposer sur un buvard avec un numéro de code. L’analyse est réalisée par un laboratoire et le résultat est rendu par un soignant ou un « conseiller qualifié » qui accompagne le résultat d’explications et de conseils. Le test par auto-prélèvement et auto-analyse à domicile (« home self-testing » ou « home validated testing ») est composé d’un kit de prélèvement et d’analyse. Le sujet réalise lui-même le mélange avec le réactif et lit le résultat par coloration. Le mode d’emploi contient des messages d’information et de conseils. Un certain nombre d’interrogations et de réflexions existent autour des auto-tests concernant tant leur efficacité que l’impact de leur utilisation : problèmes liés au prélèvement, à l’auto-analyse ou à l’interprétation du résultat. L’utilisation d’une goutte de sang pose le problème de la quantité (quelques microlitres au lieu de quelques millilitres dans un prélèvement classique) et d’un test réalisé sur du sang complet et non sur du sérum, comme dans les tests classiques ELISA. Dans l’auto-analyse s’ajoute également la possibilité d’une fausse manœuvre de l’utilisateur pour la réalisation du test. Ainsi, des études [4] ont montré que si les home-tests jouissaient d’une bonne acceptabilité de la part du public, la plupart des sujets commettaient des erreurs au cours du processus de prélèvement ou d’analyse. Les home-tests peuvent apparaître comme une solution palliative pour ceux qui ne souhaitent pas, ou ne peuvent pas, recourir au dispositif classique de dépistage. Ainsi, les personnes qui n’osent pas aller se faire dépister ou celles qui sont géographiquement éloignées d’un centre de dépistage pourraient réaliser anonymement leur test à domicile. Cependant, des doutes persistent sur l’interprétation du résultat. Une lecture négative traduit-elle réellement une absence de contamination : validité du processus de prélèvement et d’analyse mais aussi prise en compte de la fenêtre de séroconversion. On peut aussi s’interroger sur l’impact du résultat obtenu hors de tout accompagnement et soutien psychologique. En effet, on peut se demander si un résultat positif appris dans la solitude incite à une démarche de prise en charge. De plus, l’accès à CRIPS Provence-Alpes-Côte d’Azur, novembre 2007 5 l’utilisation des auto-tests ouvre également la possibilité de les employer dans des situations coercitives. Le test pourrait alors être imposé par toute personne ayant autorité ou force morale et/ou physique sur l’intéressé. Les home-tests sont actuellement illégaux en France où le cadre législatif du dépistage du VIH est extrêmement rigide. L’autorisation de diffusion et/ou de commercialisation d’auto-tests (autoprélèvement + auto-analyse) nécessiterait une révision de la législation sur le dépistage. Le sérotriage Dans un contexte de relâchement des comportements de prévention, certaines personnes et associations ont développé une pratique de réduction des risques sexuels : le « serosorting ». La pratique du sérotriage consiste à choisir son partenaire sexuel en fonction de son statut sérologique et elle se développe essentiellement au sein de la communauté homosexuelle masculine. Les individus ayant recours à cette stratégie ne se protègent pas systématiquement et entendent minimiser les risques en choisissant leur(s) partenaire(s) en fonction de leur séroconcordance. Les personnes pratiquant le sérotriage ont recours au test de dépistage de manière régulière. Cependant, le résultat du test ne renseigne que sur le statut sérologique de l’individu à un moment donné et ne permet pas d’identifier les contaminations liées à une prise de risques très récente (fenêtre de séroconversion) ou ultérieures au test ni sur d’autres infections virales. Une étude récente [5] a mis en évidence des contaminations hépatite C chez des homosexuels pratiquant le sérotriage et ayant des relations sexuelles avec traumatisme sanglant (pratique de fist-fucking). Notons que le dispositif actuel de dépistage qui associe la réalisation du test à l’évaluation de prises de risques et à un counseling pré-test et post-test n’est pas adapté aux attentes des personnes pratiquant le sérotriage qui ont besoin à la fois d’une information récente et répétée sur leur statut sérologique et qui cherchent aussi à se rassurer après des prises de risques. Le rôle du dépistage dans la prévention Le dépistage est classiquement considéré comme un outil de prévention secondaire qui vise à détecter et à traiter une maladie à sa phase asymptomatique. Il est mis en place à partir du moment où l’état de gravité le nécessite, où des tests fiables sont disponibles et où la possibilité d’une prise en charge permettant de contrôler l’évolution de l’infection est réalisable. Dans la lutte contre le sida, le dépistage est aussi un outil de prévention primaire. Les CDAG sont des lieux d’information délivrant des messages ciblés et personnalisés. De plus, le fait de se faire dépister entraîne une réflexion sur son comportement. Le dépistage comme outil de prévention En terme de prévention primaire, aux côtés des campagnes d’information et des actions de proximité, les CDAG offrent un espace d’échanges privilégiés avec des professionnels capables d’écouter, de soutenir, d’informer et de conseiller. Ces lieux sont a priori des lieux privilégiés pour la diffusion et la compréhension des messages de prévention. Plusieurs raisons peuvent entraîner une démarche de dépistage : crainte d’avoir pris un risque ou accident de prévention, besoin de se rassurer par rapport à son comportement ou de faire le point dans le cadre d’un tournant de vie : rupture, nouvelle rencontre ou relation stable. CRIPS Provence-Alpes-Côte d’Azur, novembre 2007 6 Si la démarche de dépistage permet le plus souvent de lever l’inquiétude, elle aide également, si nécessaire, à compléter ses connaissances sur les pratiques de protection. Le counseling lors de la consultation offre aux personnes l’opportunité de parler, notamment de sexualité, de poser des questions sur la base de leur vécu, de leur situation personnelle, de leurs peurs et de leurs difficultés. La remise d’un résultat négatif par le médecin en précisant les limites du test effectué, comme le délai de séroconversation, permet d’éviter une fausse assurance et/ou un sentiment de soulagement et de déresponsabilisation lié à ce résultat. La consultation peut également permettre d’aborder les difficultés de la prévention et amorcer une réflexion sur ses comportements. Comme pour toutes les actions de prévention, il est difficile d’attribuer les changements de comportements individuels au test ou au counseling en raison de la complexité des déterminants des comportements. L’annonce d’un résultat positif nécessite du temps afin d’aborder tous les problèmes qui peuvent surgir, qu’ils soient psychologiques, sociaux ou médicaux. Le médecin informe sur les structures susceptibles d’aider la personne et met en place un calendrier pour la prise en charge, voire organise le premier rendez-vous. Les personnes séropositives doivent pouvoir bénéficier rapidement d’une prise en charge globale et d’un soutien psychologique et social durable. Au cours de cette consultation la question de la prévention et du dépistage du ou des partenaire(s) est systématiquement évoquée. Elle doit être reprise lors des consultations de suivi. Les comportements de prévention des personnes atteintes Faire une démarche de dépistage c’est, en cas de résultat positif, pouvoir bénéficier d’un traitement mais aussi pouvoir être informé et encouragé à adopter des moyens de prévention pour protéger ses partenaires éventuels. Le rapport Delfraissy précise que l’un des principaux objectifs des consultations de prévention est d’aider les personnes séropositives à mettre en place des stratégies adaptées à leurs besoins, centrées sur la relation à l’autre, prenant en compte leur contexte de vie et intégrant les dimensions socioculturelles. Des études [6] basées sur les changements de comportements des personnes une fois détectées séropositives réalisées aux Etats-Unis montrent que le taux de transmission par des personnes ne connaissant pas leur séropositivité et 3,5 fois supérieur au taux de transmission par des personnes connaissant leur séropositivité. Cependant, il s’agit essentiellement d’études réalisées avant la mise au point de traitements efficaces. Or, depuis l’avènement des trithérapies la perception de la dangerosité du sida a diminué dans la population générale ce qui contribue au relâchement des comportements de prévention et donc probablement aussi chez les personnes séropositives. De plus, la majorité des enquêtes ont porté sur un laps de temps assez court après l’annonce de la séropositivité allant de quelques mois à quelques années. Les recommandations de l’ONUSIDA sur le dépistage et le conseil à l’initiative du prestataire de services dans les établissements de santé L’amélioration des dispositifs et des modalités de dépistage est un des éléments centraux de la lutte contre le sida tant au niveau des différents pays qu’au niveau international tout comme la prise en charge des personnes séropositives. C’est pourquoi, en parallèle aux initiatives qui ont permis de développer l’accès au traitement, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) et l’ONUSIDA ont mis en place un travail de réflexion pour améliorer les pratiques de dépistage dans les pays en développement. Ce travail a débouché en 2007 sur la publication d’un guide en matière de dépistage et de conseil à l’initiative du prestataire de soins dans les établissements de santé [7]. CRIPS Provence-Alpes-Côte d’Azur, novembre 2007 7 Les recommandations L’OMS et l’ONUSIDA se sont intéressés à la stratégie de dépistage à l’initiative du prestataire de soins. En effet, les établissements de santé, en raison de leur position clé de contact avec les personnes qui pourraient être infectées par le VIH, sont considérés comme l’une des possibles composantes d’une stratégie globale visant à accroître le recours au dépistage et la connaissance du statut sérologique. Dans cette approche il est recommandé que le test VIH avec une information pré-test simplifiée fasse partie intégrante de la prise en charge médicale pour les patients fréquentant les établissements de santé surtout dans les contextes d’épidémie de VIH généralisée. Le dépistage et le conseil à l’initiative du prestataire dans les établissements de santé doivent toujours viser au mieux de l’intérêt du patient et respecter la confidentialité. Il faut pour cela fournir aux individus une information suffisante pour qu’ils décident en toute connaissance de cause et en toute liberté de se faire tester, avec la possibilité de refuser le test. Le conseil post-test et l’orientation vers les services appropriés sont essentiels pour tous les patients que le résultat soit positif ou négatif. Il est également préconisé une approche « opt-out » du dépistage et du conseil à l’initiative du prestataire. C’est-à-dire que les individus doivent refuser le test de façon explicite s’ils ne veulent pas qu’il soit réalisé. Cependant, le refus du dépistage par le patient ne devra jamais conduire à un refus de services par le prestataire, à un traitement coercitif ou à une rupture de la confidentialité. Il ne devra pas non plus affecter l’accès de la personne aux services de santé qui ne dépendent pas de la connaissance de son statut sérologique. Dépistage et contexte épidémiologique L’OMS et l’ONUSIDA distinguent deux types de dépistage et de conseil à l’initiative du prestataire : le dépistage à visée diagnostique du VIH et le screening, ou dépistage systématique, du VIH pour toute personne consultant dans un établissement de santé. Le dépistage à visée diagnostique du VIH devrait faire partie du standard de soins à recommander aux adultes, adolescents ou enfants qui se présentent dans un établissement de soins porteurs de signes et symptômes ou de maladies pouvant indiquer une infection à VIH, y compris la tuberculose. Dans le cas d’épidémie généralisée d’infection à VIH, pays de forte prévalence, l’OMS et l’ONUSIDA recommandent le dépistage systématique du VIH pour tous les adultes et adolescents reçus dans un établissement de soins quelle qu’en soit la raison. Cette recommandation s’applique aux services de médecine et de chirurgie, aux établissements publics et privés et aux établissements hospitaliers et ambulatoires. Les contraintes liées aux ressources et aux capacités peuvent imposer d’établir des priorités pour le choix d’établissements où le dépistage systématique du VIH sera mis en œuvre sur la base d’une évaluation du contexte épidémiologique et social local. Les décisions de mettre en œuvre ou non le dépistage systématique du VIH dans certains établissements en cas d’épidémie concentrée et de faible prévalence doivent s’appuyer sur une évaluation du contexte épidémiologique et social car la plupart des personnes un risque faible d’exposition. La mise en pratique L’information pré-test simplifiée doit au minimum préciser : les raisons pour lesquelles le dépistage du VIH et le conseil sont recommandés, les avantages du dépistage en terme de prise en charge et de prévention et les effets négatifs potentiels, CRIPS Provence-Alpes-Côte d’Azur, novembre 2007 8 - le fait que le patient a le droit de refuser le dépistage et que le test sera effectué à moins qu’il n’exerce ce droit, le fait que le refus du dépistage par le patient n’affecte pas l’accès aux services de soins. Le conseil post-test fait partie intégrante du processus de dépistage du VIH, et tous les individus qui se soumettent au dépistage doivent bénéficier d’un conseil lorsque les résultats de leur test sont donnés, quels que soient ces résultats. La fréquence des tests effectués pour un même patient dépendra des risques qu’il continuera à encourir, de la disponibilité des ressources humaines et financières et de l’incidence du VIH dans la zone considérée. Les individus dont la séropositivité pour le VIH est connue n’auront pas besoin de nouveaux dépistages. La mise en œuvre et l’extension du dépistage et du conseil à l’initiative du prestataire devront être suivies et évalués en terme de couverture, de qualité, d’effets néfastes, de financement et de fonctionnement global des services. Il conviendra de compléter le suivi systématique des programmes par des évaluations ponctuelles portant sur des aspects spécifiques de la mise en œuvre, tels que la performance des personnels soignants et la satisfaction des patients. La décision d’employer des tests rapides ou des tests ELISA devra prendre en compte des facteurs tels que le coût et la disponibilité des produits réactifs, de l’équipement approprié et du personnel compétent. L’emploi de tests rapides dans le dépistage et le conseil à l’initiative du prestataire présente de nombreux avantages, notamment dans les établissements de santé dont les services de laboratoire sont insuffisants. L’accès au traitement antirétroviral n’est pas un préalable absolu à la mise en œuvre du dépistage et du conseil à l’initiative du prestataire mais il est bien évidemment un facteur favorisant et incitatif au dépistage. Simultanément à la mise en œuvre du dépistage et du conseil à l’initiative du prestataire, les recommandations préconisent d’instaurer une politique de soutien et un cadre juridique permettant d’obtenir le maximum d’effets positifs et de réduire les risques pour le patient. Cela suppose de mettre en place un processus éthique afin d’obtenir le consentement éclairé, d’adopter des mesures de maintien de la confidentialité, de protection de la vie privée et de prévention de la stigmatisation. Les recommandations des Centers for Disease control and Prevention Aux Etats-Unis, les Centers for Disease Control and Prevention (CDC) se sont également penchés sur la problématique du dépistage et ont publié en 2006 de nouvelles recommandations pour un dépistage élargi dans les lieux de soins [8]. Notons que le dispositif et le contexte de dépistage américains diffèrent de la situation française notamment par le fait qu’aux Etats-Unis la personne devait exprimer son consentement par écrit. Les CDC se sont basés sur un certain nombre d’arguments pour établir ces nouvelles recommandations : - le manque d’efficacité du dépistage ciblé et le poids des diagnostics non faits, - une efficacité du counseling pré-test qui n’est pas totalement établie, - l’existence d’opportunités de dépistage manquées, - un rapport coût-efficacité acceptable d’un dépistage de routine. En effet, les études américaines montrent qu’un quart environ des séropositifs aux Etats-Unis ignorent leur statut et qu’au moins 54% des nouvelles infections sexuelles sont transmises par ce quart de personnes non dépistées, soit 3,5 fois plus de transmissions parmi ces dernières que parmi les séropositifs connaissant leur statut. CRIPS Provence-Alpes-Côte d’Azur, novembre 2007 9 De plus, la démographie de l’épidémie a changé et les stratégies de dépistage basées sur l’évaluation des risques ne suffisent plus. Si l’on reconstruit le parcours de vie des séropositifs avant que leur diagnostic ne soit posé, on peut observer qu’il comprend des contacts avec des structures de soins qui n’ont pas conduit à un dépistage plus tôt. Les nouvelles directives américaines recommandent en population générale le dépistage de l’ensemble des patients de toutes les structures de soins. C’est-à-dire que l’ensemble de la population adulte se voit proposer en routine, voire même de manière systématique, un test de dépistage lors de ses différents contacts avec le système de santé. Concernant les personnes à risque élevé vis-à-vis du VIH, les recommandations avancent la possibilité d’un test répété chaque année. Le nouveau dispositif prévoie également une simplification du déroulement du test avec la possibilité de s’affranchir d’un recueil de consentement préalable (stratégie opt-out) et du counseling pré-test. La stratégie de dépistage opt-out repose sur l’idée que le patient recourant aux soins donne son consentement pour réaliser un dépistage, au même titre que pour les autres actes. Le patient est informé qu’une sérologie VIH peut être pratiquée et il doit exprimer son refus expressément s’il s’y oppose. L’objectif est de faciliter la réalisation des tests et d’augmenter le nombre de sérologies réalisées en étendant radicalement la pratique de dépistage au delà des groupes à risque et des zones de forte prévalence du pays. Il s’agit d’augmenter le dépistage de la population, au travers de toutes les structures de soins, pour détecter plus précocement et identifier les personnes ignorant leur séropositivité. Dans les recommandations, le recueil d’un consentement écrit est clairement abandonné. Le dépistage est systématiquement proposé et la personne concernée doit s’inscrire désormais dans une démarche active de refus. Cependant, il n’est pas spécifié comment le consentement ou le refus doit être recueilli, ni les conditions précises de proposition du test qui permettraient de préserver la capacité de choix du patient. Enfin, les recommandations n’incluent pas de procédure pour le counseling post-test alors que le counseling pré-test est abandonné. S’il existe un consensus sur la nécessité d’élargir l’accès au dépistage, en revanche le débat demeure sur les composantes de l’offre de dépistage et comment procéder : opt-in (il faut exprimer son consentement) ou opt-out (il faut exprimer son refus), degré d’information et de counseling pré-test ou encore existence d’un counseling post-test. Les opposants aux nouvelles recommandations, craignent notamment une dérive vers un consentement qui pourrait devenir seulement implicite à « l’insu du plein gré » des patients. On peut également craindre que la volonté d’augmenter le nombre de sérologies réalisées, voire de rendre le test de dépistage systématique ne s’inscrive dans une logique de contrôle social plus que dans une optique visant à favoriser la prise en charge précoce. Dans la même lignée, les CDC se penchent aussi sur la publication de recommandations concernant la notification au partenaire. Le rapport du Conseil National du Sida Malgré l’existence d’un dispositif national de dépistage et un système de prise en charge efficace, la situation actuelle française fait état de problèmes évidents de retard au dépistage. C’est dans ce cadre qu’en 2006 le Conseil National du Sida (CNS) a auditionné les principaux acteurs concernés par les questions de dépistage et a rédigé un rapport suivi de recommandations sur l’évolution du dispositif de dépistage en France [9]. CRIPS Provence-Alpes-Côte d’Azur, novembre 2007 10 Elargir l’offre de dépistage Le rapport aborde les nécessaires changements de paradigme concernant le dispositif de dépistage. Il plaide en faveur d' un élargissement des propositions de dépistage en général et d' un effort plus spécifique à mener dans les régions de forte prévalence. L’optimisation du dépistage passe autant par une meilleure utilisation des structures existantes que par l’augmentation du dépistage dans les régions prioritaires et auprès des populations les plus exposées. En ce qui concerne les moyens d' optimiser le dépistage, le rapport propose que les Coordinations Régionales de lutte contre l’infection à VIH (COREVIH) contribuent à l’évolution de l’offre de dépistage tandis que les Consultations de Dépistage Anonyme et Gratuit (CDAG) orientent leurs actions vers les communautés qui font face à de fortes prévalences. Le CNS recommande de généraliser la proposition de test de dépistage soumis à l’accord du patient lors de recours aux soins tout en proscrivant le dépistage à l’insu. La proposition de dépistage doit devenir plus systématique lors des pratiques courantes de soins pour l’ensemble des publics. L’incitation au recours au dépistage doit pouvoir être faite lors d’un bilan de santé systématique, dans les associations humanitaires de santé, dans le cadre de la permanence d’accès aux soins, dans les structures bas seuil mais aussi au cours d’une incarcération. Un test VIH devrait être systématiquement proposé aux futurs pères, comme il l' est aux femmes, pendant la grossesse. Dans la même optique, le CNS veut promouvoir un dispositif mieux adapté aux personnes à fort risque d’exposition au VIH à travers les opérations hors les murs des CDAG qui se déplaceraient vers les publics les plus touchés ou les plus en difficulté d’accès aux soins, dans les CAARUD par exemple. Repenser le counseling et la réalisation du test Le rapport défend également l' idée que les pratiques de dépistage, comme le counseling et l’utilisation des tests rapides, doivent évoluer. De manière concrète la proposition de test devrait être assortie de la mention du « droit de pouvoir refuser » et d’un temps pour la réflexion. Cependant, le CNS note que l’obligation d’un counseling prétest peut parfois apparaître comme un frein au dépistage et préconise une évolution du counseling en fonction des situations. Les auditions effectuées par le CNS confirment que de nombreux médecins ont du mal à aborder les questions liées à la vie intime du patient et préfèrent éviter le sujet. C’est pourquoi, le rapport propose de dispenser du counseling le médecin qui pourrait plus facilement proposer un test de dépistage au patient à l’occasion d’examens courants. En parallèle, le counseling doit être renforcé dans le cadre de consultations liées à une prise de risque, un changement de vie sexuelle, une rupture ou de prescription de contraceptif. D’autre part, le CNS évoque la possibilité de confier le suivi et le counseling à d' autres professionnels tels que des infirmières, des psychologues ou des membres d' associations. Concernant les tests de dépistage, il est notamment proposé d’évaluer la pertinence d’un seul test ELISA et d’élargir l’utilisation des tests rapides. Le dépistage par test rapide pourrait être utilisé, par exemple, au cabinet du médecin, ou à l’accueil de certaines associations. Ceci premettrait l’accès au dépistage et la connaissance du résultat dans le même temps et de mettre en place une consultation et un suivi si nécessaire. On pourrait éviter ainsi la déperdition de certains patients entre la proposition de test, sa réalisation et la notification du résultat. L’ensemble des propositions vise le renforcement de l’efficacité du dispositif de dépistage dans le but de diminuer le dépistage tardif et d’atteindre la part de personnes vivant avec le VIH et ignorant leur infection. CRIPS Provence-Alpes-Côte d’Azur, novembre 2007 11 Les évolutions de la pratique du dépistage : des pistes et des expériences Un travail de réflexion sur le dispositif et la pratique du dépistage en France est d’actualité. Deux approches complémentaires existent pour améliorer l’offre de dépistage : - augmenter les circonstances d’offre du test à travers une proposition systématique du dépistage notamment lors de contacts avec le système médical, - améliorer et compléter le dispositif existant à travers les opérations de dépistage hors les murs, l’amélioration du rendu du test ou encore l’utilisation de tests rapides. Augmenter les circonstances d’offre du test Augmenter l’offre de dépistage se traduit par la mise en place d’une offre concrète de test lorsque les circonstances amènent les individus à fréquenter le milieu médical ou des structures d’accueil et de prise en charge de populations vulnérables ou ayant des comportements à risques. Ainsi, le test de dépistage pourrait être plus souvent proposé par les médecins généralistes en particulier lorsque la consultation aborde la thématique de la sexualité. Les consultations en centre de planification, ou chez le gynécologues, traitent de sexualité et de contraception et sont donc aussi des moments privilégiés pour aborder les thématiques du VIH/sida et du dépistage. Enfin, si le test est systématiquement proposé à la femme lors de la grossesse, il serait également intéressant de le proposer au père. Les organismes et associations communautaires proposant un accompagnement des personnes migrantes, les centres de soins à destination des personnes en situation précaire et les lieux d’accueil pour les usagers de drogues peuvent aussi s’inscrire de manière active dans l’offre de dépistage. Tout contact avec le milieu hospitalier peut également être l’occasion de se voir proposer un test. L’élargissement de l’offre de dépistage basé sur la proposition du test par les prestataires de soins peut permettre d’approcher des personnes qui ne se seraient pas inscrites d’elles-mêmes dans une démarche active de dépistage. Cependant, on peut s’interroger sur la perception et l’acceptabilité du test proposé à l’initiative du prestataire de soins. Si le test ne s’inscrit pas dans une démarche volontaire, il est possible que le taux de personnes ne venant pas chercher leur résultat soit plus important que dans le dispositif actuel. Il est aussi intéressant de s’interroger sur l’impact du résultat du test et des conseils de prévention dans le cadre d’un dépistage où la personne n’est pas l’initiateur et l’acteur principal de la démarche. D’autre part, il est également nécessaire que chaque médecin se livre individuellement à un travail de réflexion concernant sa volonté et sa capacité à mettre en place les conditions indispensables à un bon déroulement du dépistage. En effet, le médecin doit savoir instaurer un climat favorable pour pouvoir aborder le thème de la sexualité et le faire sans jugement. Améliorer et compléter le dispositif existant Les tests hors les murs L’absence d’accès au dispositif de dépistage est l’un des facteurs de dépistage tardif. En effet, si certaines personnes ne savent pas où réaliser un test ou s’inscrivent dans un rapport de méfiance avec le monde médical, d’autres ont des préoccupations qu’ils placent avant la connaissance de leur statut sérologique. C’est notamment le cas des personnes en situation précaire économiquement ou socialement, pour lesquelles les questions de logement et de nourriture sont des priorités vitales. Il est donc nécessaire de diversifier les lieux d’accès au test et d’améliorer la visibilité du dépistage à travers des opérations de dépistage « hors les murs ». Ces initiatives consistent à apporter l’offre de dépistage dans des lieux non liés au domaine médical fréquentés par le public visé. Le contexte reste le CRIPS Provence-Alpes-Côte d’Azur, novembre 2007 12 même que dans les CDAG avec une démarche volontaire de la part du consultant. C’est l’occasion de créer un contact, d’informer, de faire connaître le dispositif existant et de réaliser le test si la personne le souhaite. Les opérations de dépistage hors les murs traduisent une volonté de construire une relation privilégiée avec le public visé et repose sur une prise en compte, voire une anticipation, des problèmes propres aux populations ciblées auxquelles on apporte une réponse adaptée et la possibilité de faire le test. Ce type d’initiative peut également ne pas être orientée vers un public spécifique mais chercher à sensibiliser le plus grand nombre en les informant sur les missions et le travail des CDAG. Dans ce cas elles se déroulent dans des lieux fréquentés par le grand public tels que les gares ou les centres commerciaux. L’impact de ces actions ne se chiffre pas uniquement à travers le nombre de tests réalisés. En effet, c’est aussi l’occasion d’instaurer des échanges avec les passants, de les informer, de répondre à leurs questions éventuelles et d’offrir une visibilité accrue au dispositif existant. Les tests rapides Dans son rapport sur l’évolution du dispositif de dépistage en France le CNS se penche sur la réévaluation et l’amélioration de la pratique des tests et s’intéresse à l’utilisation des tests rapides sanguins. Effectué à partir d’une goutte de sang prélevée au bout du doigt ou à partir d’un prélèvement classique, le test rapide permet d’obtenir un résultat entre 20 et 40 minutes sans avoir besoin d’avoir recours aux équipements sophistiqués d’un laboratoire. Le fait de réduire significativement le temps d’attente permet une récupération plus importante des résultats par les patients. Cependant, le délai de quelques jours actuellement nécessaire pour connaître son statut sérologique est un moment marquant, notamment lié à l’inquiétude générée, qui permet de se préparer à l’éventualité d’un résultat positif. Cette période est aussi propice à la réflexion de la personne par rapport à son comportement, ses prises de risques éventuelles et les pratiques de prévention qu’elle pourra adopter dans l’avenir. Le recours aux tests rapides sanguins allège les barrières matérielles ce qui facilite les propositions de dépistage et la réalisation des tests tant dans le cadre du dispositif actuel de dépistage que dans le cadre d’une offre élargie. Ceci pourrait se traduire par la réalisation du dépistage par test rapide par le médecin généraliste dans son cabinet ou dans les structures associatives. En Europe, différentes initiatives associatives à destination de populations vulnérables ou ayant des comportements à risque ont vu le jour dans l’optique de proposer une consultation de dépistage rapide dans un cadre alternatif au dispositif général. Ces expériences sont un succès tant dans la perception de l’offre que dans la fréquentation du lieu. Les lieux d’accueil « checkpoint » [10] mis en place notamment à Amsterdam et à Genève illustrent cette situation. Il s’agit de dispositifs de dépistage rapide où la consultation permet en une heure de faire un test, d’obtenir le résultat et de réaliser un counseling prétest et post-test. Différents tests rapides ont obtenu aux Etats-Unis une autorisation de mise sur le marché par la Food and Drug Administration et certains sont autorisés également sur le marché européen. Leur spécificité et leur sensibilité se rapprochent de celles des tests classiques sauf au moment de la séroconversion. Cependant, la France est l’un des rares pays européens à imposer un double test dont au moins un ELISA. De ce fait, l’utilisation des tests rapides en tant que test unique nécessiterait une évaluation de leurs performances et de la pertinence de leur utilisation ainsi qu’une évolution de la législation. Cela nécessite en parallèle une réflexion sur l’accompagnement du test à travers notamment la réorganisation de la démarche de counseling. Un autre point à prendre en compte concerne la perception que les patients auront de ce test et de sa fiabilité. CRIPS Provence-Alpes-Côte d’Azur, novembre 2007 13 Le counseling et le rendu des résultats La qualité du rendu des résultats, y compris négatifs, et du counseling est également un élément important. Une standardisation des pratiques à travers une formation commune et une implication volontaire du personnel pour devenir acteur du dépistage permettraient de valoriser le dispositif. Pour pallier le manque de temps, de formation ou d’implication des personnels des centres de dépistage, il est possible d’envisager un partenariat avec des associations de lutte contre le sida. Ces structures pourraient prendre en charge l’accompagnement et le counseling des personnes fréquentant les centres de dépistage Des expériences de ce type ont été menées en milieu hospitalier. Cette approche nécessite la définition d’un cadre fixant les modalités d’action et les compétences indispensables aux différents intervenants. Il faut également prendre en compte la perception et l’acceptabilité de ce type d’interaction tant par les personnels du dépistage que par les personnes venant en consultation. Conclusion La France s’est dotée assez tôt dans l’histoire de l’épidémie d’un dispositif de dépistage réglementé et reposant sur la démarche volontaire et individuelle de réalisation du test. La pratique de dépistage et les structures mises en place telles que les CDAG se sont inscrites en interaction avec la politique de prévention. Cependant, les acteurs de la lutte contre le sida doivent actuellement faire face à un certain nombre de problématiques telles que le dépistage tardif, le sérotriage ou la diffusion des home-tests sur internet. Dans ce contexte où l’on semble atteindre les limites du dépistage tel qu’il avait été défini, un travail de réflexion a été mis en place qui s’est traduit notamment par la rédaction par le Conseil National du Sida d’un rapport sur l’évolution du dispositif. Cette volonté de faire évoluer les pratiques de dépistage se retrouvent également dans d’autres pays développés comme les Etats-Unis. Les recommandation de l’OMS et de l’ONUSIDA visent à améliorer les dispositifs de dépistage dans les pays en développement à forte endémie. Elles ont pour objectif de développer des pratiques s’inscrivant dans un cadre éthique. Enfin, l’aspect volontaire du test et son caractère confidentiel sont des éléments incontournables, différentes approches apparaissent comme des pistes possibles pour faire évoluer le dispositif et la pratique du dépistage en France. Ceci passe notamment par l’amélioration et la diversification du dispositif existant ainsi que par l’augmentation des circonstances d’offre de dépistage. CRIPS Provence-Alpes-Côte d’Azur, novembre 2007 14 Bibliographie Les références bibliographiques sont classées par ordre alphabétique d' auteur physique ou moral. Tous les documents référencés sont disponibles et consultables dans les deux centres de documentation du CRIPS Provence-Alpes-Côte d' Azur. ACT-UP PARIS Sérotriage, what’s up ? Action, n°108, 2007, pp. 4-6 BAYER R, FAIRCHILD A L Changing the paradigm for HIV testing – the end of exceptionalism New England Journal of Medicine, vol.355, n°7, 2006, pp. 647-649 BECKWITH C G, FLANIGAN T P, DEL RIO C et al. 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