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Dialogues
12
Des abonnés
si patients
Médiatrice
Véronique Maurus
F
idèles entre les fidèles, les abonnés sont aussi nos correspondants les plus réguliers. Usant
de leur qualité comme d’un
droit – « abonné depuis… » –,
ou la brandissant comme une
menace, ils commentent, corrigent, critiquent le contenu du journal, mais, en général, se plaignent peu de leurs petites misères propres. De-ci de-là, quelque infortunée victime de l’irrégularité du service ou
des impondérables de la facturation
s’adresse au médiateur en désespoir de
cause, après avoir exploré en vain tous les
autres recours.
Dans cette cohorte, les malchanceux
chroniques, ceux que les spécialistes mettent au rang des « aberrations statistiques ». « A l’inverse des gagnants du Loto,
Au courrier
des lecteurs
ceux-là ont la mistoufle », soupire le chef
des abonnements, Hervé Lavergne. Heureusement, ils sont fort peu, un sur dix mille en moyenne, soit, à l’échelle de nos
150 000 abonnés, quelques dizaines.
Depuis quelques mois pourtant, le courrier des abonnés déçus, frustrés ou furieux
a spectaculairement gonflé au point d’atteindre, en ce début d’été, un rythme quotidien. Parmi ces plaintes en ritournelle,
quelques morceaux choisis telle la missive
de Jean-Maurice Burkard (Paris), si bien
troussée qu’elle mérite d’être quasi intégralement livrée ici : « Depuis des mois, les quatre abonnés du Monde des 58 et 58 bis rue
d’Assas, Paris 6e deviennent enragés, narre-t-il. Certes, chaque semaine, pendant cinq
jours, le courrier dépose l’après-midi un stock
de quatre exemplaires dans notre boîte unique. Mais sans étiquette sur ces journaux :
aucun nom, aucune adresse (…). Ainsi notre
gardien commun distribue équitablement
les quatre exemplaires (…). Mais, mystérieusement, le samedi, le coursier n’apporte que
trois exemplaires… Comme le gardien n’intervient jamais le samedi, les abonnés eux-
0123
Dimanche 15 - Lundi 16 juillet 2007
mêmes se précipitent jusqu’à la boîte. Las, le
dernier des Mousquetaires, écœuré, remonte
chez lui sans journal.(…) Dans notre immeuble, conclut M. Burkard, nous regardons
avec dépit la diffusion parfaite du Figaro, de
Libération chez nos voisins : tous les jours de
semaine, mais aussi le samedi et même encore les jours fériés. »
Enquête faite auprès du service logistique, le coupable vient de l’intérieur – de
l’immeuble en l’occurrence. En effet, la distribution le samedi, à Paris, n’est pas systématique (certains préférant retrouver leur
exemplaire le lundi). Or, l’un des « quatre
mousquetaires » a omis de cocher la case
ad hoc. Il ne se sert pas moins le samedi
dans la boîte commune, semant – involontairement ? – la zizanie.
C
e genre de mésaventure n’arrivait
pas lorsque chaque exemplaire
était distribué dûment étiqueté
par La Poste. Hélas !, ce temps est
révolu. Depuis plusieurs années, la distribution vespérale du courrier, déficitaire, a
été lentement supprimée. En 2006, la tournée du soir, à Paris, était une survivance et
Le Monde son dernier client. La Poste a
donc proposé de transférer cette tournée à
une filiale de droit privé, Média Poste, qui
assurait déjà le portage en banlieue.
Malheureusement, cette filiale, juridiquement cantonnée au portage sur liste,
n’a pas le droit de distribuer du courrier
adressé. D’où la disparition des étiquettes,
source d’infinis déboires : certains exemplaires sont égarés, d’autres purement et
simplement volés par des voisins indéli-
cats. En outre, Média Poste, faute d’effectifs et de support logistique, n’a pas parfaitement réussi à faire face à la montée en
charge.
Depuis le mois d’avril, les problèmes de
livraison se sont multipliés. Certains arrondissements, comme les 13e et 9e, sont considérés comme pratiquement sinistrés.
Dans le 16e, on a retrouvé des exemplaires
dans les poubelles… Au Monde, les services concernés s’arrachent les cheveux,
mais en vain. Seul espoir : à partir de la rentrée, les livraisons à Paris seront assurées
par une nouvelle filiale dédiée de La Poste,
ce qui, si les promesses sont tenues, doit
permettre un retour à la normale.
En attendant, le traitement des réclamations, confié depuis quatre ans à une société extérieure, Presse Informatique, et qui
fonctionnait sans problème en régime de
croisière, se retrouve totalement débordé
face à l’afflux des abonnés frustrés,
d’autant plus furieux qu’ils se heurtent à
un mur.
« La courtoisie, pour moi légendaire, du
Monde est en défaut, écrit, entre autres, Gilbert Sussmann (Paris), mes lettres de protestations sur les irrégularités de livraison du
journal restent sans réponse ! » « La désinvolture dont Le Monde fait preuve n’est pas
admissible ! », tempête Jean-Claude Blondeau, un autre abonné parisien, qui a fini
par venir en personne au siège du journal
pour se plaindre.
Certains, parmi les indéfectibles, ne se
résignent pas. Tel Américo de Carvalho,
lecteur parisien particulièrement malchanceux : « J’ai résisté longtemps à vos offres,
Euro-dollar par Tiounine
Voilà des années qu’ils galèrent à vouloir
sauver le monde (…). Celui des hommes,
des femmes et des enfants qui n’en finissent pas de souffrir et/ou de mourir sans
rien comprendre à leur malheur, si ce
n’est qu’ils ne sont pas nés au bon
moment, au bon endroit… (…). D’année
en année, malgré l’aide alimentaire, le
suivi médical et les abris de fortune, la
condition humaine reprend le dessus :
maladies, magouilles, corruptions, pollution, vols, rackets, agressions dans et à
l’extérieur des camps prennent de plus
en plus d’ampleur. Les autorités locales
profitent au maximum de la « bonne
conscience » occidentale et les populations aux alentours n’hésitent plus à se
transformer en réfugiés. Dans un tel
contexte, oubliés, « citronnés », les
volontaires passent progressivement du
doute au dégoût.
Colonisation, puis coopération, puis
encore « ONGénisation », l’Histoire
nous montre que les phases successives
d’occupation, d’exploitation et actuellement de donation ne sont aucunement
favorables à un développement cohérent
de ces lieux à la fois de conflits et de
misère.
Electrons libres
Depuis le 1er juillet, tout un chacun peut,
semble-t-il, choisir son fournisseur
d’électricité. Derrière cette réalité, conséquence de la concurrence libre et non
faussée, ne se cache-t-il pas une vraie
escroquerie intellectuelle ? Supposons
que je choisisse le fournisseur bleu et
mon voisin le fournisseur rouge. Doit-on
penser que des électrons bleus arriveront à mes prises et uniquement à mes
prises, alors que des électrons rouges
arriveront à celles de mon voisin ? L’histoire se complique car des électrons
peints en verts sont aussi disponibles, à
un prix plus élevé bien entendu.
Pas besoin de grandes connaissances
scientifiques pour se rendre compte que
les électrons bleus, rouges ou verts
n’existent pas. Les électrons sont les
mêmes pour tout le monde. Le choix véritable est celui de l’émetteur de la facture,
seul lien concret entre le fournisseur supposé et l’utilisateur.
Pour EDF, producteur qui injecte la majorité de l’énergie sur le réseau de distribution, l’opération revient en fait à sous-traiter de multiples facturations et encaissements à des entreprises privées. Entreprises qui en profiteront pour empocher de
substantiels bénéfices sur le dos des
consommateurs, privant ainsi EDF de ressources pour ses investissements futurs.
Au final, cette libéralisation peut donc
s’analyser comme une publicité mensongère et un détournement de fonds publics
vers des profits privés.
Yves Mulet Marquis
Courriel
Puissances d’argent
A ma connaissance, de Gaulle, à la Libération, a arraché la presse aux puissances
d’argent. Le président actuel aura fait
l’inverse pour arriver (…). Depuis
mai 2007, le pouvoir de l’argent tient en
main les médias importants. Il n’est pas
besoin de censure ; il suffit de maintenir
la joyeuse connivence instaurée par
M. Sarkozy depuis des mois (…). Je le dis
sans mépriser ces médias. Que ferais-je à
leur place ? Il ne s’agit pas d’éthique,
mais de référence aux valeurs de la liberté de la presse.
Un journaliste qui se fait payer des repas
et des billets d’avion, qui demande ou
accepte des décorations n’est pour moi
qu’un agent de celui qui paie (de même
qu’un magistrat décoré n’est pour moi
qu’une marionnette).
(…). Je ne me moquerai pas de Sarkozy
piégé à la vodka par Poutine mais je tiens
à la liberté de dire qu’il a bu après avoir
vérifié que c’était bien le cas. J’attends la
levée des journalistes après la suppression d’« Arrêt sur image ».
Si Le Monde devait accepter d’être dans
ce monde-là, je n’aurais plus qu’à crier
dans le désert « Beuve-Méry, reviens, ton
journal est devenu fou. » Et je me contente-
raconte-t-il. J’ai décidé finalement de
m’abonner. Et j’en étais content. Je descendais l’escalier, j’ouvrais ma boîte, je prenais
le journal, je m’en allais. Tout marchait très
bien. Mais La Poste a décidé de créer une
filiale “spécialisée” dans la distribution de la
presse. Vos services me l’ont annoncé. A partir de là, c’est un désastre. (…) En seize jours,
je n’ai reçu Le Monde que deux fois. »
Depuis le 29 mars, M. de Carvalho a
envoyé vingt-neuf courriels aux différents
services responsables, « Et, surprise des
surprises, sans un mot de leur part. (…) C’est
ce silence (j’allais écrire ce mépris) que je ne
digère pas. »
Au Monde, les responsables, consternés, ne savent comment s’excuser. « Nous
sommes très attachés à ces clients qui nous
font confiance, quels que soient les problèmes, assure Patrick Collard, directeur général délégué. Pour nous, un abonné qui ne
reçoit pas son journal, c’est grave. » Après
avoir passé le cap des 100 000 en 1993, les
abonnements n’ont pas cessé d’augmenter et assurent grosso modo la moitié des
ventes du journal. « Nos abonnés sont très
patients », souligne Philippe Basmaison,
chef de la logistique.
Pour certains drogués du quotidien, ni
les excuses ni même les « gestes commerciaux » n’y font mais. « Vous m’avez proposé de prolonger mon abonnement de
15 jours, écrit Alex Duthil (Paris 9e), c’est
mieux que rien, mais à côté de la plaque : l’essentiel est de vous démener pour que le journal soit livré aux abonnés dans les meilleurs
délais. Point barre. » On se démène, on se
démène… a
Frédéric Rubio
La Réunion
Les sept nouvelles merveilles
Dessin paru dans « Kommersant » (Moscou). [email protected]
rai de lire de temps en temps ce journal et
La Croix, Marianne, Le Canard, et Charlie
Hebdo. (...)
Robert Clément
Champagnac-la-Noaille (Corrèze)
re, la faute à Rousseau. » Il aggrave sa
propre faute en y entraînant Hugo, Clemenceau, Gambetta, de Gaulle et les
« héros de vingt ans de la Résistance et de
la France libre ».
Daniel Lion
Paris
Rôle des médias
Mme Sarkozy aurait-elle rendu sa carte de
crédit débitée sur le compte du Trésor
public, si Le Canard enchaîné n’en avait
pas parlé ? Pouvez-vous nous faire
savoir quel est officiellement le rôle de
l’épouse du président de la République ?
Evelyne Henkel
Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône)
Contresens
A-t-on remarqué l’étonnant contresens
par lequel François Fillon a conclu son
discours de politique générale ? Voulant
donner un peu de souffle lyrique à une
intervention qui en manquait singulièrement, il invoque fièrement les mânes de
Gavroche. Et là, patatras ! Alors que tout
lecteur des Misérables sait que Gavroche
meurt en chantant : « Je suis tombé par
terre, c’est la faute à Voltaire, le nez dans le
ruisseau, c’est la faute à Rousseau », celui
qui fut ministre de l’éducation nationale
proclame : « Tel Gavroche, la République
se relève toujours, et c’est la faute à Voltai-
répression sans faille de tout abus pouvant être commis ! Méditons cette phrase de Benjamin Franklin : « Une société
qui est prête à sacrifier un peu de sa liberté
contre un peu de sa sécurité ne mérite ni
l’une ni l’autre, et perdra les deux. »
Aline Adam
Paris
Précieuse liberté
Le doute des « humanitaires »
Gardons-nous de troquer trop vite une
de nos libertés fondamentales, la liberté
d’aller et venir sans être constamment
surveillés contre un peu plus de sécurité
(du moins en apparence) ! On peut craindre le pire quant à l’usage que feront certains policiers peu scrupuleux des bandes enregistrées par les multiples caméras vidéo que le gouvernement voudrait
installer dans l’espace public. Rappelonsnous qu’il a fallu des années avant de
légaliser certains fichiers des Renseignements généraux, rappelons-nous les
nombreux coups tordus des services
secrets contre des citoyens qui n’avaient
commis aucun crime (écoutes téléphoniques illégales pratiquées sur des avocats
et des journalistes, fiches sur le passé de
certaines personnalités surgissant en
pleine campagne électorale). Une telle
installation de caméras nécessitera pour
le moins de sérieuses garanties en matière de protection de la vie privée et une
(…) Même les « humanitaires » doutent
de plus en plus de leurs propres actions.
Il est permis de n’accorder aucune légitimité au résultat du concours désignant
les sept nouvelles merveilles du monde,
puisque l’UNESCO ne s’est pas associée
à cette entreprise. Cependant cette initiative a le mérite de vouloir actualiser une
liste de sites désignés 200 ans avant
Jésus-Christ et qui ont totalement disparu depuis, hormis la grande pyramide
d’Egypte. On peut contester la méthode
de sélection, on peut déplorer le choix
des sites, mais on ne peut que reconnaître le bien-fondé de l’objectif recherché.
Car je ne vois pas l’intérêt de conserver
encore sur la liste des Sept Merveilles du
monde des sites de l’Antiquité totalement disparus et que personne n’a
jamais vus et ne verra jamais. Autant les
7 000 km de la grande muraille de Chine
m’impressionnent, autant l’imaginaire
colosse de Rhodes m’indiffère.
Jacques Guillemain
Versailles (Yvelines)
RECTIFICATIFS ET PRÉCISIONS
Jack Kachkar. Dans un article consacré aux déboires de Jack Kachkar, ancien
candidat à la reprise de l’Olympique de
Marseille (Le Monde du 11 juillet), nous
avons cité le site d’information sur Internet Backich, en lieu et place de Bakchich.
tie française et la partie néerlandaise de
l’île, qui restera inchangé après le
15 juillet.
Tour de France. Nous avons publié
Saint-Martin. Contrairement à ce
un crédit erroné pour la photo qui accompagnait l’article sur le Tour de France
(Le Monde du 10 juillet). L’auteur de cette photo est Joël Saget, de l’AFP.
que nous avons écrit dans le titre de l’article « L’île de Saint-Martin prend le large » (Le Monde du jeudi 12 juillet), la
transformation de Saint-Martin en collectivité d’outre-mer (COM) n’implique
en rien une modification du traité de
1648, régissant les relations entre la par-
Boris Becker. L’ancien joueur allemand Boris Becker n’a pas gagné le tournoi de Wimbledon en 1986, 1990 et 1995
comme nous l’avons écrit par erreur
dans Le Monde du 10 juillet, mais en
1985, 1986 et 1989.