Le calibrage en phase unique liquide des appareils d`analyse des

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Le calibrage en phase unique liquide des appareils d`analyse des
Le calibrage en phase unique liquide des
appareils d'analyse des gaz et des électrolytes
du sang
Annales de Biologie Clinique. Volume 55, Numéro 3, 255-6, Mai - Juin 1997, Lettre à la revue
Auteur(s) : C. Sachs, Département de physiologie, CHU Necker-Enfants malades, 149, rue de Sèvres,
75743 Paris cedex 15.
Résumé : Depuis la commercialisation, à la fin des années 1950, des appareils permettant la mesure
du pH et des gaz du sang en biologie clinique, il existe une certaine incohérence du mode de
fonctionnement de ces appareils dont l'étalonnage se fait avec des gaz alors que les mesures sont
effectuées sur des liquides [1].
ARTICLE
Depuis la commercialisation, à la fin des années 1950, des appareils permettant la mesure du pH et des
gaz du sang en biologie clinique, il existe une certaine incohérence du mode de fonctionnement de ces
appareils dont l'étalonnage se fait avec des gaz alors que les mesures sont effectuées sur des liquides
[1]. En plus de cette aberration méthodologique, ce mode opératoire a d'autres inconvénients qu'il faut
avoir présents à l'esprit :
- la nécessité de recourir à des facteurs de correction gaz/liquide pour le moins discutables ;
- les électrodes de PO2 et de PCO2 étant étalonnées avec des gaz, le pH devait l'être avec des
liquides ; une calibration biphasique liquide/gaz et des circuits hydrauliques séparés pour les liquides
et les gaz ont donc été nécessaires, à l'origine d'une complication de l'instrument ;
- la disposition sur la même ligne d'électrodes sélectives pour les électrolytes et d'électrodes de gaz du
sang a généré des difficultés supplémentaires en raison de l'incompatibilité qu'il y avait entre les
meilleurs calibrateurs disponibles et certains des détecteurs ;
- enfin, le calibrage en phase gazeuse exige le recours à des mélanges gazeux de composition en
pourcentage connue avec précision. En règle il s'agit de gaz comprimés dans des bouteilles ou,
beaucoup plus rarement, de mélanges produits dans l'appareil au moyen de pompes doseuses de
précision.
En conséquence, il semble logique de proposer un système de calibrage en phase unique liquide. Pour
parvenir à ce résultat, il faut prendre en compte un certain nombre de préalables fondamentaux :
- Le pH doit être calibré avec des solutions tampons. Le calibrateur primaire du pH est la solution de
phosphate de sodium du Nist (National Institute of Standards and Technology, ex-NBS : National
Bureau of Standards). De faible force ionique, il n'est pas directement utilisable pour l'étalonnage des
analyseurs pour spécimens biologiques isotoniques. Les calibrateurs secondaires commerciaux usuels
sont des tampons phosphates étalonnés par rapport au tampon Nist. Ils sont incompatibles avec les
électrodes pour calcium ionisé, d'où le recours aux tampons de Good : Hepes, Mops [2] qui sont en
fait des seconds choix.
- La PCO2 doit être calibrée avec des solutions tonométrées soit au préalable, soit de façon
extemporanée avant usage, ou alors avec des solutions de calibrage dans lesquelles le CO2 dissous est
généré par une réaction chimique.
- La PO2 ne peut être calibrée qu'avec des solutions tonométrées avec de l'oxygène (ou bien préparée
au préalable ou générée de façon extemporanée avec l'oxygène de l'air dans certaines conditions
spécifiques).
- Le calibrage des électrodes pour électrolytes nécessite des solutions aqueuses de composition
définie, en particulier de force ionique isotonique.
Cependant, en raison des nombreuses difficultés rencontrées dans la mise au point d'une procédure de
calibrage en phase unique liquide, c'est la méthode en phase gazeuse avec deux bouteilles de mélange
gazeux qui prévaut encore sur le marché des appareils de gaz du sang. Cette attitude, qui était peutêtre justifiée à l'époque où le calibrage en phase gazeuse concernait deux des trois détecteurs existant
dans un appareil de gaz du sang, est plus discutable aujourd'hui dans la mesure où seuls deux
détecteurs sur six, voire sur huit, sont concernés.
Utiliser un calibrage en phase liquide est une idée ni nouvelle, ni récente. Il existe deux approches
méthodologiques : le recours à des solutions tonométrées avant usage et le mélange extemporané de
deux solutions. La première pose avant tout un problème de stabilité de la solution pour les gaz
dissous par tonométrie (étanchéité des contenants, effet néfaste de tout volume gazeux existant ou se
constituant au contact de la solution) ou pour les électrolytes (précipitation de sels peu solubles : ions
bicarbonate et calcium). La deuxième est pratiquement irréalisable en raison du besoin de pompes
doseuses de haute précision pour obtenir une composition finale ciblée, ces pompes étant d'un prix
prohibitif.
La première tentative remonte à 1973 réalisée par Radiometer dont le « ABL1 » était calibré avec
deux solutions tonométrées. Le procédé a été abandonné en raison de difficultés avec le système
hydraulique.
En 1989, Mallinckrodt a proposé la série « Gem System » dont l'originalité réside dans l'incorporation,
au sein d'une même cartouche, des détecteurs et des solutions de calibrage prétonométrées à la
fabrication. Le handicap du système était la durée limitée de la stabilité des solutions. Initialement de
3 jours, elle est dans les derniers modèles de 15 jours. Ces appareils ne sont en fait pas des instruments
destinés au laboratoire d'analyse.
En 1991, Technomedica (Japon) a mis sur le marché le « Gas Stat-3 ». Cet appareil est pratiquement
inconnu en Europe. Il fonctionnerait avec deux solutions de calibrage prétonométrées.
En 1991, une méthodologie originale de calibrage « hybride » a été proposée parallèlement par Ciba
Corning (C-238) et AVL (Compact 1). Le calibrage se fait avec un point en phase gazeuse (mélange
gazeux 5 % CO2 et 20 % O2) et un point en phase liquide (ampoule tonométrée à PCO2 basse), le zéro
PO2 étant fixé par voie électronique.
En fait le véritable progrès dans le calibrage en phase unique liquide a été permis par le procédé
original proposé récemment par AVL dans la série des OMNI [3, 4]. La procédure est fondée sur la
génération extemporanée de deux solutions qui sont préparées immédiatement avant le calibrage par
mélange de deux solutions-mères. L'astuce réside dans le fait que la détermination de la précision n'est
pas dans la qualité de la pompe mélangeuse mais dans le calcul du rapport du mélange à partir de
mesures conductimétriques. Au moment du calibrage, le système produit deux mélanges à environ 30
%-70 % et 70 %-30 % des deux solutions-mères. Une mesure très précise de la conductivité (0,0001
Siemens) des deux solutions-mères et des deux calibrants générés permet le calcul des deux rapports
correspondant aux deux mélanges. Connaissant les compositions des solutions-mères (lues par le
microprocesseur moyennant un système de codes à barres figurant sur le contenant de chaque
solution-mère) et ces rapports, les compositions exactes des deux mélanges sont calculées avec
précision. Le fait de ne mélanger les solutions-mères qu'au moment de l'emploi évite les inconvénients
d'instabilité (insolubilisation de sels) des solutions de calibrage. Les deux calibrants assurent le
calibrage des électrodes de pH, PCO2, (CO2 généré par réaction chimique dans les mélanges) Na+,
K+, Ca++ et Cl-. L'électrode de PO2 est calibrée au point zéro avec une solution réductrice, le
deuxième point étant obtenu avec de l'air ambiant saturé à 37 °C et tenant compte de la pression
barométrique mesurée par l'appareil au moment du mélange.
En résumé, le recours à la conductimétrie permet de déterminer avec une très grande exactitude la
composition des solutions de calibrage préparées extemporanément et de remettre à l'ordre du jour le
calibrage en phase unique liquide des appareils de gaz du sang.
Cette approche permet de surmonter tous les écueils rencontrés auparavant :
- la préparation extemporanée juste avant usage permet de disposer de calibrants de la composition
nécessaire, sans aucun problème d'instabilité ;
- le mélange des solutions ne nécessite pas de pompes doseuses onéreuses ;
- les solutions-mères ne comportent pas de composés incompatibles et ont une stabilité dans le temps
suffisamment longue pour en permettre la commercialisation.
De plus, tous les inconvénients du calibrage en phase gazeuse sont supprimés :
- plus de contraintes liées aux bouteilles de gaz et à leurs accessoires (manodétendeurs, tuyaux, etc.) ;
- simplification de l'hydraulique des appareils.
Références
1. Mollard JF. Single phase calibration for blood gas/electrolyte analysis. Proceedings of the XVIth
International Symposium « Preparing for critical care analysis in the 21st Century » Hawaii, February
1996, 1 vol., Chiron Diagnostics special ed. 1996 ; 16 : 38-47.
2. Good NE, Winget GD, Winter W, Connolly TN, Isawa S. Hydrogen ion buffers for biological
research. Biochemistry 1966 ; 5 : 467-77.
3. Sachs C, Rabouine P, Mollard JF, Finetti P. Accuracy of an original single phase calibration
procedure based on extemporaneous solution generation. XVIIth annual meeting of the American
Society for Clinical Chemistry, Anaheim, July 1995. Clin Chem 1995 ; 6 : 159 (A).
4. Sachs C, Finetti P, Rabouine P, Mollard JF. Le calibrage en phase unique liquide : percée technique
dans l'analyse des gaz du sang. 9e Colloque international de Pont-à-Mousson, octobre 1996.
Médecine/Sciences 1996 ; 12 : 40 (A).
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