« Vers une nouvelle politique des rempoissonnements » Cas de la
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« Vers une nouvelle politique des rempoissonnements » Cas de la
« Vers une nouvelle politique des rempoissonnements » Cas de la truite commune (Salmo trutta fario L.) Fiche de vulgarisation – GIPPA Asbl – www.gippa.be Contexte Cette fiche a été élaborée à partir du document « Vers une nouvelle politique des rempoissonnements » publié dans le cadre du colloque organisé par le GIPPA le 10 novembre 2006. Cette fiche résume des propositions de gestion des populations de truite commune (Salmo trutta fario L.) en Région wallonne dans une perspective de gestion durable des ressources naturelles, en respect notamment avec la mise en œuvre de la Directive Cadre sur l’Eau. A l’heure actuelle, la truite commune a été largement étudiée et il est possible de dégager certaines pistes de gestion scientifique des populations, tout en adaptant les recommandations aux situations environnementale, économique et sociale rencontrées en Région wallonne. Notamment la pratique de la pêche de la truite commune est un loisir développé en Wallonie qui engendre des demandes particulières en terme de rempoissonnement. Nous rappelons que toute initiative de rempoissonnement ou d’écloserie artisanale est soumise à l’autorisation du Service de la Pêche, DNF. De même, toute prise d’eau et tous travaux sur cours d’eau sont soumis à autorisation du gestionnaire du cours d’eau. Quelques définitions : rempoissonnement, population « sauvage », souche, bassin versant, gènes et adaptabilité On distingue le rempoissonnement pour la pratique de la pêche et celui pour la conservation des espèces et la restauration des écosystèmes. Les deux objectifs de ces types de rempoissonnements ne sont pas incompatibles et ils sont d’ailleurs souvent confondus. En Région wallonne, la dégradation de la qualité écologique des cours d’eau et la pratique des rempoissonnements en truite commune dans l’ensemble du réseau hydrographique depuis plus d’un siècle forment un contexte particulier dont il est tenu compte dans l’élaboration des recommandations. L’étude de la génétique de certaines populations de truite commune en Région wallonne, a été abordée grâce aux travaux de l’UCL (J. Tigel Pourtois, M.C. Flamand et P. Baret ; chap. 4 point I). Cette étude permet de mettre en évidence en Région wallonne, au sein de la population de truites communes issues d’une reproduction naturelle, des poissons considérés « sauvages » ou de type « rivière », ces populations étant distinctes d’un point de vue génétique selon les bassins versants1. Le programme d’études GENESALM en France arrive à la même conclusion pour le territoire français. document « Vers une nouvelle politique des rempoissonnements », GIPPA Asbl, 2009. La taille des bassins versants concernés reste à préciser – un bassin versant est une portion de territoire délimitée par des lignes de crête, dont les eaux alimentent un exutoire commun 1 GIPPA Asbl www.gippa.be 1 La distinction génétique des populations de truite commune permet d’identifier des populations par bassin versant, chaque bassin versant ayant à priori sa population de truite commune avec un profil génétique propre. Cependant, deux bassins versants proches ont souvent des profils génétiques de populations très proches également. D’ailleurs un certain nombre de géniteurs effectuent des migrations, ce qui permet un apport génétique « extérieur » à la population. Au vu du rempoissonnement parfois très anciens (on rempoissonne en truite commune depuis 1884 en Wallonie), l’introgression, ou transfert de gènes étrangers à la population via la reproduction, entre des poissons « de pisciculture » et des poissons « sauvages » peut être qualifiée de moyenne. De fait, la mortalité des truites communes issues de pisciculture est souvent très importante (prédation, pêche récréative plus aisée, etc.). De plus, ces poissons de pisciculture n’ont pas toujours la capacité de se reproduire en milieu naturel (recherche des frayères potentielles, compétition avec les géniteurs « sauvages »,…), surtout s’il s’agit de poissons rempoissonnés au stade adulte ayant été élevés dans des conditions d’élevage intensif. On distingue encore actuellement en Région wallonne des populations de truites communes de type « rivière ». Il s’agit de certaines têtes de bassin, comme le chevelu amont du bassin versant de la Masblette, qui ne contiennent pas de poissons dont la génétique présente des gènes de pisciculture. On ne peut pas réellement parler de « souche » de truite clairement identifiée, par contre ces populations de truites communes se reproduisent naturellement transmettant leur patrimoine génétique et sont soumises à la sélection sur le long terme. Or il est considéré que l’adaptabilité d’une population de truite commune est notamment dépendant de son patrimoine génétique, souvent spécifique, qu’il convient donc de préserver. Propositions de gestion des populations de truite commune en Région wallonne La gestion des populations de truite doit être considérée par bassin versant. On peut distinguer trois contextes en Région wallonne : 1. Le contexte est pas ou peu dégradé : il apparaît important, voire prioritaire de protéger les têtes de bassin dont les populations de truites ne contiennent pas ou peu de gènes de pisciculture (étude génétique indispensable). Il s’agit de bassin versant de bonne qualité écologique comme la Masblette amont. Les rempoissonnements sont à éviter. Toutefois, si des rempoissonnements sont jugés nécessaires, par exemple suite à une pollution, il est préférable d’utiliser des géniteurs locaux en respectant certaines contraintes de reproduction (cf. « Les écloseries artisanales » ci-après). 2. Le contexte est de qualité moyenne : la population naturelle (ou « sauvage ») en place est faible pour de nombreuses raisons (inaccessibilité aux frayères, colmatage des frayères, faible présence de caches et berges de qualité médiocre, …). Il est prioritaire d’intervenir sur la restauration du milieu afin de favoriser la reproduction naturelle, garante à long terme d’une population diversifiée de qualité. Les rempoissonnements peuvent venir en parallèle d’un programme de restauration du milieu et il convient d’utiliser des géniteurs locaux, avec de nombreuses précautions afin de ne pas altérer la GIPPA Asbl www.gippa.be 2 population encore présente, porteuse de certains gènes caractéristiques (cf. « Les écloseries artisanales » ci-après). Si les contraintes liées aux écloseries artisanales sont trop difficiles à respecter et la pression de pêche est importante, une solution alternative est de rempoissonner à partir de truite 100 % stériles de taille adulte, par exemple des truites communes femelles triploïdes. Un marquage de ces individus (marquage par ablation de l’adipeuse, etc.) peut faciliter la reconnaissance par le pêcheur et le règlement de pêche peut favoriser le développement de la population sauvage en n’autorisant uniquement que la mise à mort des poissons stériles. 3. Le contexte est dégradé : la population naturelle est inexistante ou de qualité génétique complètement perturbée (introgression forte). La priorité reste la restauration du milieu. La réimplantation d’une population naturelle peut être envisagée à long terme à condition que le milieu soit restauré. Par ailleurs, si la demande en rempoissonnement existe pour la pêche récréative, il peut être utilisé des truites communes stériles ou diploïdes non stériles, ces dernières étant de préférence à la génétique proche de la population disparue (« souche wallonne » - bassin versant proche, par exemple des petits affluents préservés). Il convient d’éviter au maximum les repeuplements dits « surdensitaires » dans les contextes 1 et 2, voire 3. En effet, une grande quantité de poissons déversée localement stresse les populations naturelles en place et a ainsi un effet négatif global (prédation, concurrence, risque sanitaire, etc.). Les écloseries artisanales Mise en garde : certaines pratiques recommandées sont parfois difficiles à mettre en œuvre concrètement sur le terrain, cependant les pratiques préconisées ci-dessous constituent à l’heure actuelle une façon de faire limitant les effets négatifs sur la population en place. A. Contexte – définitions : Les écloseries artisanales, par exemple celles mises en place par des sociétés de pêche, sont créées dans un souci de produire des poissons davantage rustiques et donc mieux adaptés au milieu d’introduction, lorsque les conditions de reproduction naturelle sont altérées (inexistence ou colmatage des frayères, inaccessibilité aux ruisseaux frayères, pollutions, etc.). Toutefois, une écloserie artisanale de truite commune doit respecter certaines contraintes si les géniteurs sont prélevés dans le milieu naturel en automne et ce, afin de minimiser les effets négatifs sur l’adaptabilité de la population en place, via la modification, du patrimoine génétique. B. Précautions à prendre pour minimiser l’impact du rempoissonnement à partir de juvéniles issus d’une reproduction à partir de géniteurs prélevés dans le milieu naturel (truite commune – Salmo trutta fario L.) : 1. Reproduction - vérifier la nécessité de réaliser un rempoissonnement, donc vérifier l’état de la population en place, souvent porteuse de gènes synonymes d’adaptabilité (une étude génétique paraît indispensable afin de vérifier que tous les individus sont de type « rivière ») ; GIPPA Asbl www.gippa.be 3 - prélever suffisamment d’individus (> 100) et un nombre identique de femelles et de mâles ; prélever le même nombre d’ovules par femelle* puis les mélanger et créer un nombre de lots correspondant au nombre de mâles ; prélever la laitance de chacun des mâles isolément, ne surtout pas les mélanger, la concurrence entre laitances étant forte ; féconder chaque lot d’ovules par un mâle différent ; changer de géniteurs chaque année, via un échantillonnage aléatoire dans la population naturelle. Remarque : certains mâles sont stériles, dans ce cas un lot d’ovules est perdu, cependant cette méthodologie permet de maximiser la biodiversité dans la population de juvéniles créée artificiellement. 2. Elevage Soit les alevins sont relâchés avant qu’ils commencent à se nourrir (en fin de résorption de vésicule), soit ils sont élevés afin d’être relâchés dans le milieu par exemple à la fin du printemps, lorsque les conditions d’accueil du milieu sont meilleures (nourriture, absence de fortes crues, …). Dans ce dernier cas, la période d’élevage diminue les chances d’adaptation des alevins dans le milieu naturel, celui-ci étant hostile pour les alevins nourris issus d’un milieu artificiel (prédation, nourriture naturelle à capturer, concurrence pour les postes de chasse et les refuges, etc.). Le rempoissonnement dans le milieu naturel doit être effectué sur un linéaire suffisant, de façon à diminuer la densité en alevins et donc la compétition entre ceux-ci. Besoin de davantage d’informations ? Le document « Vers une nouvelle politique des rempoissonnements » est disponible sur le site du GIPPA : www.gippa.be Vous pouvez également contacter le GIPPA via mail : [email protected] conclusions du programme d’étude GENESALM GIPPA Asbl www.gippa.be 4