Chère mademoiselle Henriette Vocabulaire
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Chère mademoiselle Henriette Vocabulaire
LE 27 AVRIL 1915 - 2 HEURES DU SOIR Chère mademoiselle Henriette J’ai reçu hier au soir votre lettre datée du 21, je vous remercie. Je suis actuellement loin du bruit des canons, dans une petite ville de Lorraine, au repos. Cela malheureusement ne durera pas longtemps. Nous sommes casernés tout comme à Béziers. Non loin une rivière assez connue, des petits bois de pins à proximité, les sujets de paysage ne manquent pas dans le pays ci. Surtout maintenant que la campagne prend des tonalités merveilleuses. Dommage que l’on ait pas sa boîte à peinture. Il n’y a que 3 jours que nous sommes dans notre nouvelle « résidence » nous l’avons mérité. Tout dernièrement l’on a passé les nuits au devant des tranchées, aux postes d’écoute. C’était pas rigolo pour les copains. Moi j’étais agent de liaison entre ces postes et le commandant, cela fait que j’étais relativement en arrière. J’aime bien les embusques et je finis par croire que lorsque je serai cité à l’ordre du jour, ce sera sûrement involontairement. Je ne le ferai pas exprès. Le dernier jour, ou pour mieux dire la dernière nuit les Boches ont attaqué, ils ont eu de la casse, des infirmiers et beaucoup de blessés prisonniers = à ma grande joie. Je n’étais pas de la fête. Ces honneurs m’intimident; heureusement je ne suis pas le seul. Donc ne rougissons pas. A vrai dire il me tarde un peu de revoir le « Clapas » la nostalgie trottine souvent en moi et cela pourrait devenir dangereux si je n’y prenais garde. Je passerais bien au neurasthénique, mais cela ne m’irait pas = Ce sont des poses qui ne vont qu’aux étudiants en médecine ou aux élèves des Beaux arts à grandes cravates noires et aux idées à la Werter. Cela n’irait pas à un hussard démonté, tous le sont pour le moment. Adieu cavalerie, on est un peu comme le pitous dans la flotte des tranchées quelques fois même en avant. Mais je ne vais pas me plaindre cela va vous paraître un peu « barbe » A propos de Silammel, que fait-il ? Militaire sans doute comme les camarades Je plains monsieur Courtine de sa surdité, qui sait s’il pourrait entendre le chambard du canon. J’aimerai bien de le faire enrager, comme autrefois au cours du jeudi. Dernièrement je vous ai envoyé deux petites photos prises aux avants postes, faites moi savoir si vous les avez reçues. J’espère bien vous envoyer d’autres épreuves par la suite, mais actuellement je profite de mon « dulce farniente ». Je suis flemme comme 36 escadrons d’élèves des Beaux Arts. C’est peu dire !!!! Mon copain Caze est revenu paraît à Montpellier. Depuis je ne sais ce qu’il est devenu, il m’a écrit une seule fois. J’ai répondu, et depuis … je n’en sais plus rien. Le bonjour à sa sœur de ma part J’attends une lettre de vous avec impatience Amitiés Laurent Medus Vocabulaire : être cité à l’ordre du jour : recevoir une citation (un honneur) militaire pour une action méritante. postes d’écoute : lieux rapprochés de la première ligne ennemie dans le no man’s land où l’on cherche à s’informer des mouvements et des intentions de l’adversaire . agent de liaison : soldat chargé de faire passer les ordres du commandement auprès des troupes engagées en première ligne. idées à la Werter : avoir des idées et un comportement romantiques par allusion au personnage romantique de l’écrivain allemand Goethe. chambard : mot familier pour traduire chez l’auteur la violence de la guerre et du champ de bataille. (syn. : vacarme) flemme : grande paresse dulce farniente : douce oisiveté (endroit où on prend plaisir à ne rien faire) « La représentation du soldat pendant la Grande Guerre » Dossier du sercice éducatif et culturel de l'Historial de Péronne. (Somme - France) © CRDP de l'académie d'Amiens, septembre 2004 Tous droits réservés. Limitation à l'usage non commercial, privé ou scolaire.