La mémoire d`une information distinctive : l`influence de l

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La mémoire d’une information distinctive :
l’inuence de l’âge
Serge Nicolas et Yannick Gounden
L’Année psychologique / Volume 110 / Issue 03 / September 2010, pp 365 - 377
DOI: 10.4074/S0003503310003039, Published online: 29 September 2010
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Serge Nicolas et Yannick Gounden (2010). La mémoire d’une information distinctive :
l’inuence de l’âge. L’Année psychologique, 110, pp 365-377 doi:10.4074/
S0003503310003039
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La mémoire d’une information distinctive :
l’influence de l’âge
Serge Nicolas* et Yannick Gounden
Laboratoire de Psychologie et Neuropsychologie Cognitive, FRE 3292 CNRS,
Université Paris Descartes
RÉSUMÉ
Une expérience a examiné les différences mnésiques liées à l’âge pour de
l’information distinctive. Si un effet facilitateur d’orthographie a été obtenu
quel que soit l’âge des sujets (jeunes adultes vs. personnes âgées), l’effet
de bizarrerie n’a été observé en rappel libre que pour les jeunes adultes et
non pour le groupe de sujets âgés (au-delà de 70 ans). Les résultats sont
discutés en lien avec la théorie de la distinctivité de Hunt (2006) qui prédit
que les fluctuations dans les traitements relationnels et spécifiques à l’item
influenceront les effets sur la mémoire.
Memory for distinctive information : The influence of age
ABSTRACT
One experiment examined age-related differences in memory for distinctive information.
Although a facilitative effect of orthographically distinctive words was obtained for the
two groups of age, the bizarreness effect was only obtained in free recall for young adults
but not for the oldest group (over age 70). The results are discussed in relation to Hunt’s
(2006) theory of distinctiveness which predicts that fluctuations in the degree item-specific
and relational processing will influence the effects on memory.
Des différences de mémoire liées à l’âge peuvent être mises en évidence
avec de nombreux tests de mémoire épisodique (Kausler, 1994 ; Light, 1991 ;
Zachs, Hasher, & Li, 2000). En effet, les adultes âgés ne se souviennent pas
aussi bien d’une information que des adultes plus jeunes, et cette altération
de la mémoire liée à l’âge est plus à même d’apparaître lorsque des tests de
rappel libre sont utilisés que des tests de reconnaissance (Craik & McDowd,
1987). Une explication possible de ces différences mnésiques liées à l’âge
est de supposer que les sujets adultes les plus âgés s’engagent dans un
*Correspondance : Serge Nicolas, Laboratoire de Psychologie et Neurosciences Cognitives, CNRS,
Université Paris Descartes, 71 avenue Édouard Vaillant, 92774 Boulogne-Billancourt Cedex. E-mail :
[email protected]
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traitement « distinctif » moins approfondi que les sujets plus jeunes. Si l’on
prend appui sur la conception de Naveh-Benjamin (2000), les sujets âgés
seraient dans l’incapacité d’utiliser la « distinctivité » d’une information
comme aide à la récupération. Ces différences supposées liées à l’âge dans
le traitement de l’information « distinctive » peuvent être attribuées selon
Smith (2006) à une réduction de la disponibilité des ressources cognitives
nécessaires à la récupération.
Au plan théorique, la distinctivité (cf. Hunt & Worthen, 2006) se
rapporte à une forme spéciale de traitements conduisant à une meilleure
mémoire pour des items qui sortent de l’ordinaire (pour une discussion
voir Hunt, 2006). Selon Einstein et McDaniel (1987) ainsi que McDaniel,
DeLosh et Merritt (2000), la distinctivité pourrait même constituer le cadre
théorique le plus prometteur dans l’avenir pour intégrer les résultats de
la littérature actuelle sur la mémoire humaine. Plus précisément, un item
distinctif produirait une trace mémorielle plus saillante perceptivement qui
constituerait un indice spécifique efficace lors de la récupération. Même s’il
existe une spécificité du codage des items distinctifs, de nombreux auteurs
s’accordent néanmoins à considérer que l’avantage pour la mémoire de ces
items inhabituels se situe essentiellement au niveau de la récupération (voir
McDaniel et al., 1995 ; Riefer & Rouder, 1992 ; Waddill & McDaniel, 1998).
Il est probable que l’épreuve de rappel libre impliquerait la délimitation
d’un espace de recherche au sein duquel l’encodage de l’information
distinctive constituerait la dimension la plus importante qui détermine la
récupération (cf. McDaniel & Geraci, 2006). On va poser ici l’hypothèse
que les personnes âgées présenteraient surtout des difficultés à se servir de
cette information distinctive.
Si les premiers travaux publiés sur le thème de la distinctivité et de
la mémoire datent déjà de près d’un siècle (cf. Calkins, 1894), ce n’est
que depuis une trentaine d’années qu’a été démontrée sans équivoque
l’influence positive sur la mémoire des événements distinctifs et inhabituels
(Hunt & Worthen, 2006). Schmidt (1991) a reconnu que les stimuli
peuvent être distinctifs soit par rapport à un contexte spécifique (on
parle de distinctivité primaire ou intraliste) soit par rapport à toutes
nos connaissances déjà enregistrées en mémoire (on parle de distinctivité
secondaire ou extraliste). L’effet von Restorff (1933) ou effet d’isolation est
un exemple de distinctivité primaire (Hunt, 1995) : si tous les items d’une
liste, sauf un, sont similaires sur une dimension quelconque, le souvenir
pour l’item différent sera plus accentué que pour tous les autres items
de la liste. Bireta, Suprenant et Neath (2008) ont récemment montré que
l’effet von Restorff pouvait être fortement atténué chez les personnes âgées
suggérant ainsi que les séniors souffriraient probablement d’un déficit dans
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le traitement de l’information distinctive. Des exemples de distinctivité
secondaire sont fournis par l’effet de bizarrerie (McDaniel & Einstein,
1986 ; Einstein & McDaniel, 1987) et l’effet d’orthographie (Hunt &
Elliot, 1980 ; Hunt & Toth, 1990). Dans ces cas, les images étranges ou
les mots composés de séquences de lettres inhabituelles sont en minorité
lorsqu’on les compare à toutes les connaissances déjà stockées dans notre
mémoire. Du fait de cette minorité, ils deviennent plus distinctifs en
mémoire. Des résultats préliminaires que nous avons récemment obtenus
(Nicolas & Worthen, 2009) montrent que l’effet de bizarrerie pourrait
disparaître chez les sujets les plus âgés, une conclusion qui demande
aujourd’hui à être appuyée par de nouvelles séries d’expériences destinées
à conforter l’hypothèse du déficit de la distinctivité avec l’âge. C’est à
cette distinctivité secondaire que nous allons nous intéresser ici plus
particulièrement.
Lorsqu’on considère la littérature sur l’effet de bizarrerie, il existe de très
nombreuses différences entre les études (cf. Einstein & McDaniel, 1987).
En effet, une variété considérable de méthodes a été utilisée pour explorer
cet effet. Dans nos expériences les plus récentes (Marchal & Nicolas, 2000 ;
Nicolas & Marchal, 1996, 1998 ; Nicolas & Worthen, 2009) nous avons
simplement comparé la mémoire de dessins bizarres construits par ajouts
de caractéristiques (par ex. girafe à 6 pattes) avec des dessins normaux.
Habituellement, on se souvient mieux en rappel libre (test de mémoire
consciente) des images bizarres que des images communes. Puisque ces
résultats sont en accord avec la littérature sur l’effet de bizarrerie qui
utilise le plus souvent des phrases comme matériel expérimental, nous
avons décidé ici d’employer ce type de matériel surtout parce qu’il était
indispensable de reproduire les résultats de l’étude pilote de Nicolas et
Worthen (2009).
Lorsqu’on considère la littérature sur l’effet d’orthographie, on constate
une constante dans les procédures utilisées. On observe que des mots
orthographiquement distinctifs sont mieux mémorisés que des mots à
orthographie commune (Geraci & Rajaram, 2002 ; Hunt & Elliot, 1980 ;
Hunt & Toth, 1990 ; Kirchhoff, Shapiro, & Buckner, 2005). Toutes
choses égales par ailleurs, des mots orthographiquement distinctifs (ex.
« bazooka » ou « onyx ») contiennent des combinaisons de lettres ou
possèdent des apparences visuelles qui les rendent atypiques des mots
appartenant à une langue donnée (ici le français). Marchal (2000) avait
réalisé les premières recherches (non publiées) en français sur ce thème
en effectuant une sélection rigoureuse du matériel et avait montré qu’un
traitement visuel des mots était nécessaire à l’apparition d’un effet de
distinctivité orthographique.
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L’accumulation des preuves empiriques montre aujourd’hui qu’un
bénéfice mnésique pour un matériel distinctif apparaît seulement lorsqu’au
moins deux variables sont contrôlées : a. la méthode de test, et b. la structure
de la liste d’étude. Un premier facteur critique déterminant l’efficacité
mnésique de la bizarrerie ou de l’orthographie est la méthode de test
utilisée. Les effets de bizarrerie ou d’orthographie sont obtenus lorsque des
tests de rappel libre sont appliqués mais n’apparaissent généralement pas
lorsque des tests de rappel indicé ou de reconnaissance sont utilisés (par
ex. Cornoldi, Cavedon, de Beni, & Pra Baldi, 1988 ; McDaniel & Einstein,
1986 ; Pra Baldi, de Beni, Cornoldi, & Cavedon, 1985 ; Wollen & Cox, 1981).
Un autre facteur important dans l’apparition de ces effets est la structure
de la liste. Des listes panachées, dans lesquelles le matériel distinctif et
commun est présenté (par ex. McDaniel & Einstein, 1986 ; O’Brien &
Wolford, 1982 ; Pra Baldi et al., 1985), conduisent à une supériorité de la
condition inhabituelle contrairement à ce que l’on peut observer dans des
listes homogènes (par ex., Collyer, Jonides, & Bevan, 1972 ; Cox & Wollen,
1981 ; Marshall, Nau, & Chandler, 1980). Ces conditions de présentation et
de test seront respectées dans la recherche que nous proposons ici : listes
panachées d’items normaux et distinctifs présentées à des groupes de sujets
jeunes et âgés dont la mémoire sera testée avec une épreuve de rappel libre.
L’objectif de notre travail sera ici d’examiner sur une même population
de sujets jeunes et âgés diverses formes de distinctivité secondaire.
L’originalité de notre recherche est de comparer directement chez
les mêmes sujets l’effet de bizarrerie et l’effet d’orthographie afin de
s’interroger sur l’unité des phénomènes distinctifs de mémoire à travers
la manipulation du facteur âge. Les travaux réalisés par Einstein et Hunt
(1980) et Hunt et Einstein (1981) indiquent que la mémoire implique une
combinaison de traitements basés sur l’analyse de la similarité (traitement
relationnel) et de traitements basés sur l’analyse des différences (traitements
spécifiques). Ainsi, un déficit sur l’un ou l’autre de ces traitements devrait
diminuer la distinctivité et par conséquent réduire l’effet de distinctivité
en mémoire. Certains auteurs (cf. Smith, 2006, pour une revue) supposent
que les personnes âgées ont des déficits dans les traitements spécifiques à
l’item. En considérant que les effets de bizarrerie ou d’orthographie sont
dus en partie aux traitements spécifiques induits par les stimuli bizarres
ou orthographiquement distinctifs (Nicolas & Worthen, 2009 ; Worthen,
2006 ; Worthen & Loveland, 2003), cette théorie prédit une réduction des
effets de bizarrerie et d’orthographie chez les personnes âgées. Sur la base
des résultats préliminaires de Nicolas et Worthen (2009) qui ont étudié
l’effet de bizarrerie, on s’attend ici également à une disparition de l’effet
orthographique avec l’âge.
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EXPÉRIENCE
Methode
Sujets. Soixante-quatre sujets représentant deux groupes d’âge différents (32
participants dans chaque groupe) ont été testés individuellement. Le groupe de
sujets jeunes était constitué par des travailleurs actifs issus de diverses professions
et volontaires pour passer l’expérience (âge moyen = 27,06 ans ; σ = 4,51 ;
étendue = 20-36 ans). Les sujets âgés, recrutés dans diverses associations culturelles,
étaient tous des retraités également volontaires pour passer l’expérience (âge
moyen = 80,31 ans ; σ = 5,48 ; étendue = 72-92). Les deux groupes d’âge ont
été appariés sur leurs niveaux d’éducation et leurs capacités verbales. Ils étaient
tous en bonne santé et ne présentaient pas de troubles dépressifs. Les deux groupes
ont également été appariés sur leurs performances (F < 1) au test de vocabulaire
MILL HILL (partie B) (Raven, 2005). Les sujets âgés retenus pour cette étude
présentaient un score supérieur à 26/30 sur la version française du MMS (Kalafat,
Hugunot-Denier & Poitrenaud, 2003).
Plan
On présente aux participants, jeunes et âgés, une première liste panachée contenant
des dessins normaux et bizarres, suivie d’une première épreuve de rappel libre, puis
une seconde liste de mots orthographiquement communs et distinctifs, suivie d’une
seconde épreuve de rappel libre. Ainsi le facteur groupe d’âges est un facteur intersujets, alors que les facteurs type de dessins (première partie de l’expérience), et
type de mots (seconde partie de l’expérience) sont des facteurs intra-sujets.
Matériels
Les stimuli utilisés lors de la première partie de l’expérience étaient rassemblés
en quatre listes de 20 dessins au trait, chacun d’entre eux représentant des noms
concrets avec une haute valeur d’imagerie. Ces mots avaient été sélectionnés à
partir de vingt catégories différentes et les listes étaient construites de manière à
inclure deux items (un bizarre l’autre normal) par catégorie. Tous les mots ont
été sélectionnés sur la base des tables de fréquence établies par Marchal et Nicolas
(2003) avec une population de sujets jeunes et âgés. Pour chaque liste, la moitié
des dessins étaient bizarres et l’autre moitié normaux ; pour la procédure de
contre-balancement chaque nom était représenté à la fois par un dessin bizarre
et un dessin commun. Cependant, chaque participant était confronté soit avec
une version bizarre soit avec une version commune, mais pas les deux. Les
dessins bizarres étaient créés en multipliant certaines caractéristiques de l’objet
dans chaque dessin. Par exemple, le dessin bizarre du « landau » était représenté
avec de nombreuses roues. Chaque dessin était présenté individuellement sur une
carte. De manière à atténuer les effets de primauté et de récence, deux items
supplémentaires étaient placés en début de liste (un bizarre et un commun) et deux
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items supplémentaires étaient placés en fin de liste (un bizarre et un commun).
Ainsi, chaque participant était confronté à une liste de 24 images contenant 20
images cibles. Chaque participant recevait une liste différente où les images étaient
mélangées d’un sujet à l’autre avec la contrainte qu’un maximum de deux images
du même type (bizarre ou normale) apparaissent consécutivement.
Issus des travaux de Marchal (2000), les stimuli utilisés lors de la seconde
partie de l’expérience étaient rassemblés en deux listes de 18 mots chacune.
Chaque mot était présenté individuellement sur une carte. La moitié des mots était
orthographiquement distinctive (OD), l’autre moitié était orthographiquement
commune. La distinctivité orthographique avait été déterminée par Marchal sur
la base d’une sélection des items par 20 sujets qui n’avaient pas participé à ses
expériences. Elle avait demandé à ses sujets de coter l’aspect visuel d’une centaine
de mots sur une échelle en 9 points. Des résultats de cette cotation, deux listes de
9 mots OD et OC de basse fréquence linguistique ont été construites. Pour chaque
liste, les mots étaient appariés sur leur longueur, leur imageabilité et leur fréquence.
Chaque mot était présenté visuellement imprimés en lettres minuscules sur une
carte. Il est important de souligner qu’avec ce matériel Marchal (2000) avait montré
que les mots OD étaient mieux rappelés que les mots OC en présentation visuelle
mais pas en présentation auditive (voir aussi Hunt & Toth, 1990 ; Hunt & Elliott,
1980) suggérant ainsi que l’information sur la forme visuelle inhabituelle des mots
OD doit être encodée pour qu’un effet d’orthographie se produise. De manière à
atténuer les effets de primauté et de récence, deux items supplémentaires étaient
placés en début de liste (un mot OD et un mot OC) et deux items supplémentaires
étaient placés en fin de liste (un mot OD et un mot OC). Ainsi, chaque participant
était confronté à une liste de 22 mots contenant 18 mots cibles. Chaque participant
recevait une liste différente où les mots étaient mélangés d’un sujet à l’autre avec la
contrainte qu’un maximum de deux mots du même type (OD ou OC) apparaissent
consécutivement.
Procédure
Dans la première partie de l’expérience les sujets étaient confrontés à une liste de
dessins. Leur tâche était de dénommer chaque dessin et de coter leur bizarrerie sur
une échelle en 5 points (0 = commun ; 4 = très bizarre) ; 5 secondes étaient allouées
pour coter chaque image. Il n’était fait aucune mention du but réel de l’expérience.
Après la présentation, les sujets étaient confrontés à une tâche interpolée d’une
durée de 2 minutes, qui consistait à écrire sur une feuille de papier autant de
pays européens que possible. Un test surprise de rappel libre, d’une durée de 3
minutes, était ensuite proposé ; celui-ci consistait à écrire tous les noms de dessins
préalablement présentés dont ils se souvenaient sans se préoccuper des fautes
éventuelles d’orthogaphe qu’ils pourraient faire.
La seconde partie de l’expérience avait lieu un mois plus tard. Les sujets étaient
à nouveau convoqués pour participer à une nouvelle épreuve de mémoire. Les
participants avaient pour consignes de lire à haute voix le mot présenté (OC
ou OD) sur la carte et de le mémoriser. Chaque carte était présentée pendant 5
secondes. Après avoir étudié tous les mots, les sujets réalisaient une tâche interpolée
(écrire autant de pays américains que possible) d’une durée de 2 minutes avant
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le test de rappel libre. Les participants avaient 3 minutes pour écrire tous les
mots précédemment présentés à l’étude sans se préoccuper des fautes éventuelles
d’orthogaphe qu’ils pourraient faire.
RÉSULTATS
Bizarrerie
Cotation
Les images bizarres sont évaluées comme étant plus bizarres (m = 3,67,
σ = 0,27) que les images communes (m = 0,37, σ = 0,32) pour les deux
groupes d’âges [F(1, 62) = 3708,6, p < 0,0001]. Ni l’effet principal du
facteur âge [F(1, 62) = 2,7, p > 0,10] ni l’interaction entre l’âge et le type
d’image (F < 1) ne sont significatifs. Ainsi, la présentation d’une image
bizarre (ou normale) conduit réellement les sujets à la juger comme bizarre
(ou normale) ; aucune différence n’apparaissant entre les groupes d’âges.
Rappel
Les proportions de rappels corrects pour les items cibles sont présentées
dans le tableau 1. Les résultats de l’analyse de variance indiquent que le
rappel des noms correspondant aux images bizarres est meilleur que celui
correspondant aux images normales, F(1, 62) = 6,6, p < 0,01, mais aussi
que le rappel varie selon l’âge des sujets, F(1, 62) = 24,2, p < 0,0001. Les
Tableau 1. Proportion d’items correctement rapportés en rappel
libre en fonction du type de dessins et de l’âge des sujets (les
écart-types sont entre parenthèses)
Table 1. Proportion of items correctly reported in free recall as a function of picture
type and age of subjects (standard deviations are in parentheses)
Type de dessins
Age
Commun
Bizarre
Jeunes
0,45 (0,14)
0,54 (0,09)
Âgés
0,33 (0,19)
0,33 (0,17)
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jeunes adultes ont de meilleures performances que les séniors. Cependant,
on note la présence d’une interaction entre l’âge et le type d’image, F(1,
62)=4,40, p < 0,04. Des analyses complémentaires indiquent que l’effet de
bizarrerie est présent chez les plus jeunes participants (p < 0,01), mais n’est
pas observé chez les plus âgés (F < 1). Ces résultats confirment des données
préalablement recueillies par Nicolas et Worthen (2009) qui ont montré
une absence d’effet de bizarrerie chez leurs participants les plus âgés.
Distinctivité orthographique
Les proportions de rappels corrects sont présentées dans le tableau 2.
Les résultats de l’analyse de variance indiquent que le rappel des noms
orthographiquement distinctifs est meilleur que celui correspondant aux
mots orthographiquement communs, F(1, 62) = 41,32, p < 0,0001, et que
les taux de rappel varient avec l’âge, F(1, 62) = 27,05, p < 0,0001. Les
jeunes adultes ont de meilleures performances que les personnes âgées.
L’interaction entre ces deux facteurs n’est pas statistiquement significative
[F(1, 62) = 1,12, p > 0,30].
Tableau 2. Proportion d’items correctement rapportés en rappel
libre en fonction de l’orthographe et de l’âge des sujets (les
écart-types sont entre parenthèses)
Table 2. Proportion of items correctly reported in free recall as a function of
orthography and age of subjects (standard deviations are in parentheses)
Orthographe
Age
Commune
Distinctive
Jeunes
0,26 (0,13)
0,47 (0,19)
Âgés
0,15 (0,12)
0,30 (0,16)
Analyses corrélationnelles
Si l’on prend comme mesure les performances globales (calculées par la
somme pour chaque sujet entre, d’un côté les conditions DB et DN pour les
dessins, puis entre les conditions OD et OC pour les mots), il apparaît une
corrélation positive entre les performances au test de rappel total des images
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(normales + bizarres) et au test de rappel total des mots (OC + OD) chez
les sujets jeunes [r(32) = 0,43, p < 0,01] et chez les sujets âgés [r(32) = 0,36,
p < 0,04]. Ainsi, il existe un lien positif significatif entre les performances
obtenues à la première tâche (dessins) et celles obtenues à la seconde tâche
(mots).
Cependant, si l’on prend comme mesure l’amplitude de l’effet de
bizarrerie et d’orthographie (calculé par la différence pour chaque sujet
entre d’un côté le pourcentage de DB et de DN correctement rappelés puis
d’un autre côté entre le pourcentage de mots OD et de mots OC correctement rappelés), aucune corrélation significative n’apparaît entre les performances au test de rappel différentiel des images (% images bizarres – %
images normales) et au test de rappel différentiel des mots (% mots OD – %
mots OC) chez les sujets jeunes [r(32) = –0,12, p > 0,40, ns] et chez les sujets
âgés [r(32) = –0,19, p > 0,20, ns]. Ainsi, les deux effets, l’effet de bizarrerie
et l’effet d’orthographie, semblent être indépendants l’un de l’autre.
DISCUSSION
Les principaux résultats de cette expérience sur la mémoire pour un
matériel distinctif (dessins ou mots) peuvent être résumés comme suit :
1. l’effet de bizarrerie disparaît progressivement avec l’âge ; 2. l’effet
d’orthographie semble perdurer avec l’âge ; 3. ces deux effets paraissent
indépendants l’un de l’autre.
Chez les sujets jeunes, l’effet de bizarrerie semble être un phénomène
robuste lorsqu’on utilise un matériel composé de dessins (Marchal &
Nicolas, 2000 ; Michelon et al., 2003 ; Nicolas & Marchal, 1996, 1998 ;
Nicolas & Worthen, 2009 ; mais voir Schmidt & Williams, 2001 ; Worthen &
Eller, 2002). Pour ce qui concerne les personnes âgées, les résultats de
notre expérience confirment nos premières données (Nicolas & Worthen,
2009) montrant que l’effet de bizarrerie disparaît après l’âge de 70 ans
lorsqu’on utilise des listes d’étude contenant 50 % d’images normales et
50 % d’images bizarres.
Cependant, la seconde partie de notre expérience indique que les
mots orthographiquement distinctifs sont mieux rappelés que les mots
orthographiquement communs (voir aussi Geraci & Rajaram, 2002 ;
Hunt & Elliot, 1980 ; Hunt & Toth, 1990 ; Kirchhoff et al., 2005 ; Marchal,
2000), et ceci quel que soit l’âge des participants. Notre étude est la première
du genre à montrer l’existence d’un effet d’orthographie chez les personnes
âgées. Ainsi, avec les mêmes participants, la distinctivité est affectée chez
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les séniors quand la bizarrerie est manipulée, mais pas lorsque des facteurs
plus subtils comme l’orthographie sont utilisés.
Si l’on prend appui sur la théorie du traitement de Hunt (2006)
présentée en introduction, on s’attendait à ce que les personnes âgées
souffrent d’un déficit au niveau des traitements spécifiques à l’item (Smith,
2006) réduisant ainsi l’amplitude de l’effet global de distinctivité, ici étudiée
à travers l’effet de bizarrerie et l’effet d’orthographie. Les résultats de notre
expérience ne confirment pas cette hypothèse dans la mesure où seul
l’effet de bizarrerie est significativement affecté avec l’âge. La présence d’un
effet normal d’orthographie chez presque tous les sujets âgés contraste
avec l’absence d’effet de bizarrerie chez un grand nombre d’entre eux
(soit 21 participants sur 32). Ceci nous conduit à nous interroger sur la
question, encore non soulevée dans la littérature actuelle, de l’unité des
effets de distinctivité secondaire (Schmidt, 1991). Il est ainsi probable que
des différences importantes existent entre l’effet de bizarrerie et l’effet
d’orthographie, tous deux généralement considérés comme des effets de
distinctivité secondaire. Il existe une différence conceptuelle fondamentale
entre ces deux effets. Ainsi le caractère distinctif des dessins consiste à les
modifier de sorte qu’ils représentent un objet virtuel mais proche d’un objet
réel. Au contraire dans l’effet d’orthographie, les mots orthographiquement
distinctinfs (OD) sont bien réels. L’observation d’une absence de liens
statistiques, pour le groupe de sujets jeunes et le groupe de sujets âgés,
entre les deux effets de distinctivité va dans le sens de la remise en question
de l’unité des phénomènes distinctifs. On pourrait par exemple avancer
l’hypothèse que les personnes âgés sont capables dans une certaine mesure
de réaliser des traitements spécifiques à l’item lorsque les représentations
pré-existent déjà en mémoire et représentent des objets réels (c’est le cas
des mots OC et OD) mais éprouvent de sérieuses difficultés lorsque les
représentations ne pré-existent pas en mémoire et sont plus inhabituelles
(c’est le cas des dessins bizarres). Une autre explication possible serait de
s’appuyer sur l’étude des différences de traitements : la présentation de mots
pourrait impliquer davantage de traitements conceptuels et la présentation
de dessins davantage de traitements perceptifs ; dans ce cadre, les personnes
âgées pourraient présenter des difficultés à traiter les indices perceptifs
inhabituels présents dans les dessins.
Cependant, il est vrai que les différences obtenues entre nos deux
tâches peuvent être expliquées de multiples manières sans avoir recours
nécessairement à de nouvelles distinctions. En effet, d’importantes
différences existent concernant le matériel (des dessins pour la première
tâche vs. des mots pour la seconde tâche), les conditions d’étude (encodage
incident pour la première tâche vs. encodage intentionnel pour la seconde
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tâche), etc. Par exemple, il est possible qu’un encodage incident conduise à
un effet de distinctivité de moindre ampleur qu’un encodage intentionnel,
surtout avec les dessins. Mais il est difficile ici de conjecturer car la bizarrerie
et l’orthographie n’ont pas été manipulées dans cette étude de manière
orthogonale ; ce travail, bien que difficile à réaliser à cause des contraintes
de construction du matériel, reste à faire pour asseoir des conclusions plus
solides.
Reçu le 2 février 2009.
Révision acceptée le 24 septembre 2009.
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