modelisation des couts de maintenance : application sur l

Transcription

modelisation des couts de maintenance : application sur l
3e Conférence Francophone de MOdélisation et SIMulation « Conception, Analyse et Gestion des Systèmes
Industriels » MOSIM’01 – du 25 au 27 avril 2001 – Troyes (France)
MODELISATION DES COUTS DE MAINTENANCE : APPLICATION SUR
L'INSTALLATION D'EXPERIMENTATION AIRIX
Lionel DUMONT, Laurent MOREL
LIGERON S.A.
Bâtiment Euclide, Parc des Algorithmes
Saint-Aubin
91194 GIF SUR YVETTE CEDEX
Mail : Lionel.Dumont @ligeron.com
RESUME : Cette présentation expose la démarche de modélisation du coût de maintenance qui a été mise en place au
CEA pour préparer et optimiser l'exploitation de l'installation d'expérimentation AIRIX.
L'installation AIRIX, récemment inaugurée, est un dispositif de radiographie X à haute énergie, nécessitant la mise en
œuvre de technologies diverses et complexes. En particulier, les « tirs » effectués requièrent une disponibilité
opérationnelle élevée de l'ensemble des équipements, sans oublier la sécurité. La maintenance nécessite donc d'y être
planifiée, préparée.
Un modèle de coût prévisionnel de maintenance a pu être établi pour :
−
estimer le coût de maintenance, avant même la mise en exploitation,
−
identifier les articles critiques au sens de la disponibilité,
−
optimiser les contrats de maintenance,
−
à plus long terme, permettre aux exploitants d'optimiser le plan de maintenance.
Ce modèle, inséré dans un outil informatique de gestion de base de donnée, permet d'analyser les conséquences des
décisions relatives à l'organisation des tâches de maintenance sur les coûts de maintenance et sur la disponibilité de
l'installation.
MOTS CLES : Plan de maintenance, disponibilité, coût global de possession, base de données.
1. INTRODUCTION
AIRIX (Accélérateur à Induction de Radiographie pour
Imagerie X) est l'une des grandes installations de la
Direction des Applications Militaires (DAM) du CEA
mise en œuvre dans le cadre du programme
SIMULATION. La SIMULATION doit permettre de
garantir la sûreté et la fiabilité des armes nucléaires lors
de leur renouvellement. L'un des points clés de la
SIMULATION passe par l'amélioration des moyens
d'expérimentations froides, c'est-à-dire sans matière
nucléaire. Le complexe AIRIX aura pour mission la
réalisation de mesures radiographiques éclair de forte
puissance, ainsi que d’autres mesures
A compter de la fin de l'année 2000, l'installation
entrera dans sa phase d'exploitation et devra
fonctionner avec une disponibilité opérationnelle et une
sécurité élevées. Un plan de maintenance a été élaboré.
Par conséquent, il semblait nécessaire au CEA de
construire un modèle afin d'estimer le coût de
maintenance avant puis pendant l'exploitation, cela dans
une optique d'optimisation de la rédaction des contrats de
maintenance et d'amélioration du plan de maintenance.
2. MODELISATION DU COUT DE MAINTENANCE
Le coût d'exploitation d'une installation telle qu'AIRIX
peut se décomposer en deux postes principaux :
−
Le coût de maintenance qui regroupe les coûts des
interventions correctives et préventives nécessaires pour
maintenir l'installation au niveaux de disponibilité et
sécurité requis. Il comprend également l'ensemble des
coûts logistiques nécessaires aux opérations de
maintenance ainsi que les frais généraux imputables à
l'existence d'une infrastructure de maintenance (hommes
et équipements).
−
Le coût d'expérimentation qui regroupe les coûts
relatifs à l'utilisation effective de l'installation, dans le
cadre de sa mission. Il est composé pour l'essentiel du coût
MOSIM’01 – du 25 au 27 avril 2001 – Troyes (France)
relatif à l'équipe d'expérimentation, hors personnels de
maintenance. Ce coût dépend donc pour l'essentiel de
l'effectif et de l'organisation de cette équipe
d'expérimentateurs.
Les éléments constitutifs du coût d'expérimentation
(effectif et organisation de l'équipe d'expérimentateurs)
sont en dehors du périmètre du modèle. L'étude a été
focalisée sur la synthèse du coût annuel prévisionnel
de maintenance.
Le plus généralement, les coûts de maintenance d'une
installation se décomposent comme suit :
a
b
Coût de main d'œuvre d'intervention : temps
passé x taux horaire
Frais généraux de la fonction maintenance
(main d'œuvre indirecte, énergie, outillages,
etc.)
c
Coût de possession des stocks d'article de
rechange
d
Consommation en articles de rechange (achat,
transport, passation de commande)
e
2.1. Analyse des tâches de maintenance
Le principe de base du modèle proposé consiste à
effectuer un calcul prévisionnel de coût direct et
d'indisponibilité pour chacune des tâches définies dans le
plan de maintenance. En effet, le plan de maintenance de
l'installation recense et définit :
−
les tâches de maintenance préventive (opérations
périodiques destinées à éviter l'apparition de défaillances),
−
les tâches de maintenance corrective (opérations
destinées à remettre en état le matériel après apparition
d'une défaillance).
Les paramètres utilisés dans la synthèse des taux de
disponibilité (Dia) et coûts directs de maintenance (Cda)
sont les suivants :
Symbole Grandeur physique associée
I
Taux d'indisponibilité
consécutif à une tâche de
maintenance (prévue au plan
de maintenance)
sans
dimensions
Fa
Fréquence annuelle
prévisionnelle de la tâche de
maintenance
an-1
λ
Taux de défaillance de
l'article (ou sous-ensemble)
concerné. λ= 1 / MTBF.
h-1 ou tir-1
T
Durée d'arrêt (indisponibilité) h
consécutif à une tâche2
Contrats forfaitaires de maintenance (part
indépendante du nombre d'interventions)
f
Travaux sous-traités sur interventions
(contrats en dépense contrôlée)
g
Coût d'arrêt d'expérimentation
Les coûts b, c et e sont dits coûts fixes, car ils sont
indépendants du nombre d'interventions réalisées sur
une année1.
Les coûts a, d, f, g sont dits coûts proportionnels car
ils dépendent directement du nombre d'interventions de
maintenance réalisées pendant l'année.
On appelle coûts directs de maintenance l'ensemble
des coûts relatifs à la réalisation des opérations de
maintenance
(approvisionnements
et
frais
administratifs compris). Les coûts directs regroupent
les rubriques a à f.
Unité
dimensionnelle
K3
Coefficient correcteur
caractérisant des articles
fortement ou faiblement
contraignants en termes
d'indisponibilité
sans
dimensions
d
Périodicité de la tâche de
maintenance préventive
h
n
Population de l'article
considéré sur l'installation
AIRIX
sans
dimensions
(nombre
d'unités)
Tableau 1. Paramètres utilisés
On appelle coûts indirects de maintenance l'ensemble
des coûts engendrés par l'indisponibilité de
l'installation (renouvellement d'une campagne d'essais,
personnel inutilisé, etc.) les coûts indirects de
maintenance correspondent à la rubrique g.
2
1
Nota : Le coût de possession des stocks (c) n'est pas
complètement indépendant du nombre d'interventions
car il dépend du volume de matériel stocké. Par
hypothèse, on suppose l'indépendance de ces données.
en maintenance corrective, cette durée d'arrêt doit inclure
les temps logistiques de préparation de l'intervention et
d'arrivée des équipes sur les lieux.
3
K est un coefficient pondérateur du taux de défaillance, il
n'intervient donc pas dans le calcul de l'indisponibilité en
préventif
MOSIM’01 – du 25 au 27 avril 2001 – Troyes (France)
2.2. Calculs de l'indisponibilité relative à une tâche
de maintenance
(coût de main d'œuvre + coût des articles de rechange +
autres coûts éventuels (logistiques)).
Selon les différents cas, le taux d'Indisponibilité (I)
s'exprime (de manière simplifiée)4 par :
Le coût annuel de maintenance (CAM) s'exprime alors :
Cas d'un
MTBF
exprimé par
tir
Cas d'un
MTBF
exprimé en
heures
Tâches de
A I = n.λ.T.K
maintenance I = n.λ.T.K. B
Corrective
Cas d'un
MTBF
infini
(Pièces de
structure)
I=0
Tâches de
T
T
T
I = n.
I = n.
I = n.
maintenance
d
d
d
préventive
Tableaux 2. Calcul de l'indisponibilité
La durée d'indisponibilité annuelle Dia, imputable à la
tâche, s'exprime alors :
Dia = I × B .
Le résultat s'exprime en h/an.
Le paramètre B représente le nombre d'heures dans une
année (ici B= 8760). Le paramètre A représente le
nombre de tirs machines effectués dans une année.
NB : pour affiner l'efficacité du modèle il convient
d'identifier les tâches de maintenance telles que I = 0.
Il s'agit des tâches qui, par nature, ne provoquent pas
d'indisponibilité d'installation (exemple : réglages en
cours de fonctionnement).
2.3. Calculs du coût direct imputable à une tâche de
maintenance
Selon les différents cas, la fréquence annuelle d'une
tâche (Fa) s'exprime par :
Cas d'un
Cas d'un
Cas d'un
MTBF infini
MTBF
MTBF
exprimé exprimé en (Pièces de
structure)
heures
par tir
Fa = A.λ. Fa = B.λ.
Fa = 0
Tâches de
maintenance
Corrective
Tâches de
B
B
B
Fa =
Fa =
maintenance Fa = d
d
d
préventive
Tableau 3. Calcul du coût direct
Le coût direct annuel de maintenance Cda, imputable à
la tâche s'exprime alors Cda = Fa × n × Ct , où Ct
représente le coût direct de la tâche de maintenance
4
on considère que les équipements sont en série, donc
lorsqu'une unité est défaillante l'installation est
indisponible.
t
CAM = b + c + e +
∑ (Cda
i
+ α.Dia i )
i=1
t représente le nombre de tâches de maintenance prévues
au plan de maintenance. i caractérise chaque tâche de
maintenance.
α correspond au coefficient de proportionnalité entre le
coût d'arrêt d'expérimentation et le temps d'indisponibilité
de l'installation, sur un an. Ce coefficient de
proportionnalité étant à ce jour inconnu, l'application
informatique associée met uniquement en évidence le
nombre d'heures d'indisponibilité prévisionnelle en cumul
annuel.
3. APPLICATION SUR LA BASE DE DONNEES
DES TACHES DE MAINTENANCE
Ce modèle de calcul des coûts de maintenance a pu être
mise en œuvre sur la base de données qui contient :
−
l'inventaires
« logistique »,
des
équipements
:
arborescence
−
l'inventaire des tâches de maintenance préventives,
correctives, logistiques : plan de maintenance,
−
le lien entre les tâches de maintenance et les
équipements.
Pour cela, un outil de modélisation / simulation a été
spécialement développé car la base de données des tâches
de maintenance n'est pas une GMAO "conventionnelle" du
commerce, mais une base de données spécifiquement
élaborée pour le projet du CEA.
La base de données relationnelle obtenue correspond au
type de structuration suivante :
MOSIM’01 – du 25 au 27 avril 2001 – Troyes (France)
Ces formulaires comportent :
−
Un filtre permettant de sélectionner un article (code
LCN ) ainsi que les articles qui le constituent.
−
Un filtre permettant de sélectionner une seule
catégorie de tâches de maintenance (préventif, correctif,
logistique).
−
Une commande permettant de trier parmi les tâches
de maintenance affichées, les tâches les plus pénalisantes
en terme d'indisponibilité ou en terme de coûts directs.
−
Figure 1. Structuration de la base de données
Cette base de données est pilotée par une interface
utilisateur dédiée au fonctionnement du modèle de coût
de maintenance.
3.1. Menu général
L'interface utilisateur de cet outil de modélisation /
simulation recherche la simplicité. Le menu général
donne accès aux fonctionnalités suivantes :
−
« LCN » : accès aux données de l'arborescence
logistiques et notamment aux valeurs des MTBF
associées à chaque article.
−
« Indisponibilité » : accès au tableau de synthèse
des tâches prévisionnelles de maintenance analysées au
point de vue des durées d'indisponibilité.
−
« Coût direct » : accès au tableau de synthèse des
tâches prévisionnelles de maintenance analysées au
point de vue des coûts directs.
Une commande permettant d'exporter ces données
vers EXCEL pour faire d'autres analyses.
4. RESULTATS OBTENUS
L'outil de modélisation a permis de réaliser plusieurs
analyses avant le début d'exploitation, permettant ainsi au
CEA d'avoir une vue plus précise des futurs coûts de
maintenance de l'installation.
Il a permis en particulier, à partir du plan de maintenance :
−
D'identifier les tâches pénalisantes en termes de coût
et/ou de disponibilité,
−
De calculer les coûts directs annuels de maintenance
préventive,
−
D'évaluer la part du coût de maintenance corrective
compte tenu des taux de défaillance définis pour les
organes concernés,
−
D'évaluer la valeur optimale d'un seuil de dépense
forfait / dépenses contrôlées, en vue de la rédaction des
contrats de maintenance.
−
Paramétrer les taux horaires de main d'œuvre, pris
en compte pour l'évaluation des coûts directs
(prévisionnels) de maintenance.
−
Etat des données modifiées suite aux simulations,
pour décision. Les tâches de maintenance et articles
LCN ayant étés modifiés sont listés pour permettre leur
prise en compte dans le plan de maintenance, si cela est
décidé.
4.1. Identification des tâches pénalisantes :
Cette identification permettra de concentrer les efforts
d'amélioration sur les tâches les plus pénalisantes
sélectionnés afin d'optimiser au mieux le plan de
maintenance et donc de diminuer l'indisponibilité de
l'installation et les coûts de maintenance.
4.2. Calcul des coûts directs annuels de maintenance :
3.2. Interfaces « Point de vue indisponibilité » et
« Point de vue coût direct »
Ces interfaces permettent respectivement d'effectuer
des simulations sur les temps annuels d'indisponibilité
et sur les coûts directs. Ces formulaires se présentent
sous la forme d'une liste des tâches du plan de
maintenance,
faisant
apparaître
les
données
d'indisponibilité (respectivement, les données de coût
direct) imputables à chacune des tâches.
Pour chaque type de tâche de maintenance, les résultats
ont été présentés dans un tableau indiquant pour plusieurs
tranches de coûts directs unitaires, le nombre de tâches
prévues au plan de maintenance, le nombre de tâches
annuelles et le coût direct annuel (voir exemple ci-dessous
concernant un groupe d'équipements).
MOSIM’01 – du 25 au 27 avril 2001 – Troyes (France)
Coût direct
unitaire
Nb de
Nb de
Coût direct
tâches
tâches
annuel
prévues au annuelles
plan
0 : 4999
80
834,19
5000 : 9999
6
6
10000 : 14999
2
2
15000 : 19999
1
1
20000 : 24999
2
2
95000 : 99999
1
0,57
Total des coûts =
Tableau 4. Exemple de tableaux de coût direct
4.3. Evaluation de la part dépenses contrôlées et
part forfaitaire par fixation d'un seuil :
Les contrats de maintenance de l'installation AIRIX
comprennent deux types de modalités de rémunération
des travaux :
−
redevance ferme et forfaitaire annuelle concernant
toutes les tâches de maintenance préventive et les
tâches de maintenance corrective dont le montant est
inférieur à un seuil fixé,
−
dépenses contrôlées concernant les tâches de
maintenance corrective dont le montant est supérieur
au seuil fixé ; ceci signifie que ces tâches sont facturées
individuellement.
Le principe du seuil a pour but de limiter le nombre
d'interventions facturées individuellement, afin de
réduire les frais administratifs de traitement de
commande. Ainsi, il est recherché une proportion
d'environ 90% des interventions correctives dans
l'enveloppe forfaitaire.
SommeDeFréquence annuelle
9
9
:5
69
99
9
00
50
56
20
00
00
:2
04
99
9
69
99
9
99
54
:1
16
50
00
:1
9
15
00
00
:1
39
99
9
99
24
13
50
00
9
99
:1
09
00
00
9
99
94
:1
0:
00
50
10
00
90
12
9
79
99
9
99
64
75
00
0:
9
99
0:
00
60
45
00
0:
49
99
34
99
19
00
30
15
00
0:
0:
49
99
9
500
450
400
350
300
250
200
150
100
50
0
0:
Fréquence annuelle
Le modèle permet de déterminer ce seuil en proposant
une courbe indiquant la fréquence annuelle des tâches
de maintenance corrective en fonction des coûts
unitaires directs (voir exemple ci-dessous).
Coût unitaire direct
Cumul Somme DeFréquence annuelle
Figure 2. Exemple de courbe de fréquence des tâches
Il suffit alors d'en déduire le seuil permettant d'avoir le
pourcentage désiré d'interventions correctives comprises
dans l'enveloppe forfaitaire.
Cette analyse permet alors d'évaluer la valeur optimale du
seuil en vue de fixer une enveloppe forfaitaire lors des
révisions de contrat.
5. CONCLUSION
Le modèle exposé ci-dessus présente l'avantage d'être
simple et pragmatique. Compte tenu de sa structuration,
proche des concepts normatifs, ce modèle est aisément
utilisable sur d'autres parcs d'équipements.
Les apports et atouts de cet outil sont :
−
La possibilité d'effectuer des simulations sur le plan
de maintenance,
−
La participation à l'approche du "coût global de
possession" dans le cadre d'un projet tel qu'AIRIX,
−
L'identification rapide des articles et tâches
pénalisantes sur le coût de maintenance et sur la
disponibilité.
REMERCIEMENTS
Les auteurs remercient Monsieur DARIZCUREN du
CEA/DAM pour sa bienveillante approbation pour la
publication de cet article.
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
D. Boitel et C. Hazard, 1987. Guide de la maintenance –
Nathan Technique.
F. Monchy, 1987. La fonction maintenance - Masson,
Collection Technologies
Contrats de maintenance – Guides de l'utilisateur 2ème
édition – AFNOR, 1988.
Maintenance industrielle – Recueil de normes françaises –
AFNOR, 1988.
RG Aéro 00040 {NF X 50-410}, Recommandation
Générale pour la Spécification de Management de
Programmes (aéronautiques et spatiaux), BNAE, 1991.