De qui se moque Eric Besson

Lyon, le 13 avril 2010
De qui se moque Eric Besson ?
Eric Besson a répondu ce matin à une interview sur la question du droit d'asile et devait visiter un
CADA (Centre d'Accueil des Demandeurs d'Asile) en région parisienne dans la journée. L'objectif ?
Annoncer la création de 1000 places supplémentaires dans ces centres, parce que, dit-il, « la
France se donne les moyens de respecter sa tradition de terre d'asile ».
Eric Besson, généralement sur un versant sécuritaire et répressif, ferait un geste envers les
personnes persécutées ? Quelle bonne surprise !
Ne nous réjouissons pas trop vite.
Le ministre annonce la création de 1 000 places dans les centres d'accueil, alors que les
associations estiment à 20 000 le nombre nécessaire. Aujourd'hui les demandeurs d'asile en
attente d'une décision résident non seulement dans les CADA existants, mais sont souvent logés à
l'hôtel ou même parfois dans les centres d'hébergement d'urgence. Sous un affichage de
générosité, c'est en fait une goutte d'eau dans l'océan qu'annonce Eric Besson.
Ou plutôt, l'arbre qui cache la forêt. Car que lit-on par la suite ? « La vraie défense du droit d'asile
passe par la capacité à distinguer le « vrai » réfugié, qui a besoin de notre protection, du « faux »
demandeur, qui utilise le droit d'asile pour contourner nos lois sur l'immigration »
Ainsi, comme les chômeurs sont soupçonnés de frauder l'assurance chômage, comme les
malades sont soupçonnés de frauder l'assurance maladie, les demandeurs d'asile sont
soupçonnés de vouloir frauder le droit d'asile. Pour ce gouvernement en général et Eric Besson en
particulier, les personnes vulnérables ne sont jamais des victimes, mais des a priori des suspects.
Enfin, le ministre de l'Immigration n'oublie pas de se payer Bruxelles : « Tant que l'Europe n'aura
pas adopté de statut commun du demandeur d'asile, elle sera à la merci des filières et des
« faux » demandeurs ». Cela tombe très bien, car c'est précisément sur ce sujet que nous
travaillons en ce moment, avec la révision de plusieurs directives européennes concernant l'asile.
Je me demande seulement pourquoi, en novembre dernier, avec plusieurs de ses collègues
européens très réticents à l'harmonisation de l'asile, il a déclaré que ce processus représentait
« des contraintes qui risquent d'être contre-productives ».
Une fois de plus, l'Europe a bon dos. Alors que le Parlement et la Commission européenne
cherchent les voies d'une Europe harmonisée de l'asile, le ministre français de l'Immigration,
malgré ses déclarations d'intention, ne manque jamais une occasion de freiner ce processus et de
défendre sa véritable vision de l'Europe : forteresse, inhospitalière et méfiante envers l'extérieur.
Eric Besson, une fois de plus, fait des questions d'immigration et d'asile un marqueur sécuritaire,
au détriment des droits humains les plus élémentaires.
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