Les notices techniques s`animent grâce à la CAO
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Les notices techniques s`animent grâce à la CAO
| 76 TECHNOLOGIES & INNOVATIONS DOCUMENTATION l Le remplacement des manuels de montage ou des modes d’emploi, souvent abscons, par des notices interactives 3D, bien plus explicites, débute. Des outils apparaissent pour réaliser ces versions électroniques directement à partir des fichiers CAO. p PAR AURÉLIE BARBAUX Les notices techniques s’animent grâce à la CAO pour comprendre > Plug-in Petit logiciel à télécharger pour lire et interagir avec des animations 3D. (conception assistée par ordinateur). Logiciels et techniques permettant de concevoir, de tester, et de réaliser outils et produits. > CAO > Java Langage de programmation qui permet de produire des logiciels indépendants de toute architecture matérielle. > Réalité augmentée Système qui permet de superposer l’image d’un modèle virtuel sur une image de la réalité et ce, en temps réel. Q ui ne s’est jamais arraché les cheveux en essayant de comprendre le mode d’emploi d’un appareil mal traduit ? Ou en lisant une notice d’installation imprécise ou trop complexe ? Et ce genre de déconvenue n’est pas réservé au seul consommateur. Combien de techniciens butent-ils sur des manuels de montage incompréhensibles ? L’arrivée des notices 3D, animées et interactives, devrait résoudre le problème. Déjà, dans les ateliers d’assemblage de Boeing ou d’Airbus, les instructions de montage sur papier sont progressive- ment remplacées par des Tablet PC sur lesquelles l’opérateur visualise l’enchaînement des tâches à accomplir via des animations 3D qu’il pourra faire défiler à sa convenance. De leur coté, des fabricants de machines ou de véhicules, Man, par exemple, envisagent la création de notices de maintenance en images animées, à destination des ateliers ou des garages. Quant aux constructeurs d’électronique grand public ou d’électroménager, ils testent déjà la publication sur le web de versions 3D interactives de leur manuel d’utilisation. Dans toutes ces démarches, l’idée est Le format 3D idéal manque encore > le format vrml (virtual reality modeling language), destiné à une publication interactive sur le web, publié en 1994 et certifié ISO, a longtemps servi de référence. Il évolue aujourd’hui vers le X3D (eXtensible 3D), pour intégrer des données XML, mais sans séduire l’industrie. Une déclinaison adaptée à la CAO – le CDF (CAF Distillation Format) – est en développement. > le format universal 3d (u3d), développé par un consortium mené par Intel depuis 2004, a l’ambition de devenir le Jpeg (format de compression pour les images) de la CAO. Il est en cours de certification ISO mais reste encore trop lourd. > le format xvl, développé au Japon, fait un peu mieux en matière de compression. Dassault Systèmes l’a d’ailleurs choisi pour développer son format 3DXML. > en fait, il existe plusieurs centaines de formats de visualisation de fichiers 3D, chaque éditeur proposant le sien. d’utiliser directement les fichiers CAO 3D créés au bureau d’études pour les scénariser en animations, exécutables à la demande et assorties de commentaires techniques. Objectif : communiquer plus intuitivement avec des non spécialistes, s’affranchir au maximum de la barrière des langues ou, au minimum, abaisser les coûts de traduction en réduisant l’importance du texte. Une dizaine d’éditeurs, souvent de jeunes entreprises innovantes, proposent des solutions total es ou partielles adaptées à la conception de ces notices techniques embarquant des animations 3D interactives. En janvier 2006, l’éditeur américain Adobe, spécialiste de la publication électronique, a fait une incursion remarquée dans ce domaine avec la sortie de son logiciel Acrobat 3D. Il rend possible la publication de ces notices de nouvelle génération dans son format de document électronique quasi universel, le PDF. Pourtant, ces solutions peinent encore à convaincre, surtout en France, où la plupart des projets sont au mieux en phase pilote, le plus souvent à peine au stade de l’étude. « Les projets n’entreront en production que d’ici à deux ou trois ans », prévient Eric Piccuezzu, le 7 SEPTEMBRE 2006 | N° 3021 | L’USINE NOUVELLE 77 ÉGALEMENT DANS CETTE PARTIE batteries peinent à suivre 80|Les les performances des portables portail pour personnaliser système d’entraînement 83|Unl’accès extranet 84| Unlinéaire à forte rigidité 2 3 D.R. 1 Un document interactif pour la maintenance d’un train d’atterrissage 1 Les plans sont disponibles à l’écran, plans généraux et/ou plans de détail. 2 L’opérateur voit n’importe quelle partie du train à sa convenance et sous n’importe quel angle, comme s’il tournait autour. président de l’éditeur français Seemage. Les américains et les allemands, toujours plus prompts à adopter les nouvelles technologies, sont plus avancés. Il est vrai que le choix d’une solution n’est pas aisé, surtout en l’absence de standards ou d’acteurs dominants ; les grands éditeurs de CAO ne proposant pas encore d’offre intégrée, hormis la possibilité de créer des vidéos montrant la cinématique d’un système ; mais sans interactivité. Et de nouveaux acteurs apparaissent sans cesse, chacun avec sa technologie et son format propriétaire. 3 Il veut accéder au frein ? Les séquences de démontage se succèdent au rythme qu’il souhaite. Chaque pièce est identifiée et visuellement accessible. DES FICHIERS ENCORE TROP LOURDS Surtout, des obstacles techniques persistent. « Même si le haut débit démocratise l’accès à la 3D, le problème de la taille des fichiers demeure », observe Didier Lourme, consultant en CAO. Pourtant des technologies permettent des taux de compression allant jusqu’à 95 %. Mais cela reste un maximum. « Et les postes utilisateurs des ateliers sont bien moins puissants que ceux utilisés dans les bureaux études », rappelle Benoît Vandangeon, gérant L’USINE NOUVELLE | N° 3021 | 7 SEPTEMBRE 2006 de l’éditeur et distributeur Westimages. Même Adobe le reconnaît. Ses fichiers PDF 3D sont encore trop lourds. « Les PDF ne sont, pour l’instant, adaptés qu’à la circulation des fiches techniques simples, pas aux manuels de maintenance de plusieurs pages », observe Alberto Franzetti, le président d’Antea, spécialiste de la documentation technique. Le problème viendrait du format choisi par Adobe, l’U3D, il y a deux ans. « Il n’y avait pas beaucoup d’autres solutions à l’époque », recon- Suite page 78 3 | |78 TECHNOLOGIES & INNOVATIONS D. R. Même si de nouveaux outils rendent la scénarisation plus intuitive, leur adoption sera affaire de formation et d’évolution culturelle. Pour toute opération, l’opérateur peut zoomer sur une partie du train. Les pièces à manipuler se colorent, les opérations à effectuer sont visualisées. 3Suite de la page 77 naît Jimy Barnes, chez Acrobat France. Pour faire mieux, Adobe vient d’acquérir l’éditeur lyonnais TTF, qui dispose d’une technologie de conversion de fichier plus performante. Mais elle ne sera incluse que dans la prochaine version d’Acrobat 3D. Son module d’édition d’animation pourrait, lui aussi, être amélioré, car il requiert des connaissances en programmation Java à certains stades de la scénarisation des animations. Une chance pour le petit éditeur français VB2S, qui propose un outil plus intuitif pour créer des scènes 3D à partir de la CAO, publiables en ligne ou dans un PDF. Le problème de la taille de fichier résolu, il faut aussi s’assurer que les utilisateurs finaux pourront consulter sans problème les notices. La visualisation de fichiers passe en effet toujours par l’utilisation d’un plug-in spécifique. Celui des PDF (Acrobat Reader) présente l’avantage d’être déjà largement installé sur les PC, ce qui permet d’assurer la diffusion de fichiers 3D auprès d’utilisateurs dont on ne maîtrise pas le poste de travail. Dans le même esprit, il est possible d’inclure des animations 3D dans des documents bureautiques, comme les diapositives PowerPoint ou des documents Word. Mais les multiples versions disponibles et le poids du fichier rendent cette voie trop hasardeuse. Microsoft multiplie néanmoins les partenariats pour proposer des solutions plus légères. Une dernière option consiste à programmer les animations entièrement en Java, un langage interprétable par tous les PC et très léger. « Mais le rendu visuel n’est pas bon », tranche Hervé Heully, créateur de l’agence de communication 3D News3S. LA MISE À JOUR AUTOMATIQUE RESTE DIFFICILE L’autre point faible des notices techniques interactives 3D réside dans leur mise à jour en cas de modification du fichier CAO d’origine. Si le problème se pose peu pour les manuels d’utilisation des produits finis, il apparaît très vite dans le cas des documents techniques de montage-démontage. Les éditeurs précurseurs, comme le japonais Lattice3D ou l’irlandais Parallel Graphics, proposent, au choix, de connecter leur éditeur de scénario soit directement aux logiciels de CAO, soit à un gestionnaire de données techniques (PDM) ou à un serveur intermédiaire propre à la documentation technique. Mais, dans tous les cas, la scénarisation demande une intervention humaine. Un dernier facteur doit être pris en considération : la publication 3D interactive fait appel à des compétences aujourd’hui absentes dans l’industrie. « Nous allons vers des métiers où les rédacteurs techniques vont devenir autonomes en terme de production d’images », prévient Pierre Calviera, spécialiste de la documentation technique chez Sedoc. Cette mutation ne s’improvise pas, même si de nouveaux outils rendent plus intuitive la scénarisation. L’adoption de ces technologies est donc aussi affaire de formation et de culture. « La 3D n’est encore utilisée qu’au sein des bureaux d’études », regrette Pierre Calviera. Le manque d’expérience rend difficile l’évaluation du retour sur investissement de l’usage de la 3D hors de la conception. De surcroît, « les notices interactives ne sont pas adaptées à tous les contextes et leur usage a un gros impact sur les processus métier », remarque Alerto Franzetti, d’Antea. D’autant que souvent, « l’application ne se résume pas à un petit projet. Le passage à des notices techniques 3D interactives peut concerner des milliers d’utilisateurs finaux. Les entreprises prennent donc leur temps », explique Eric Piccuezzu, de Seemage. C’est la formation, qui tire le meilleur profit de la réutilisation des fichiers CAO, comme chez EdF, pour l’entraînement à la maintenance dans des zones à risques. Une frilosité due aussi aux interfaces. Le PC n’est pas forcément le meilleur outil, surtout en situation de mobilité. Des développements sont donc en cours pour rendre accessibles les documents 3D depuis un PDA. Un cran plus loin, c’est la réalité augmentée qui pointe son nez. Un acteur de la documentation technique, 4Dconcept présente déjà un prototype d’une solution libérant les mains des techniciens grâce à des lunettes superposant à la vision des informations techniques contextuelles et ciblées. Un prototype seulement. . LES REPÈRES DE L’USINE NOUVELLE A RETENIR > Il n’existe pas de format 3D unique adapté à la documentation technique. Chaque éditeur mise sur des formats propriétaires ou sur les standards existants imparfaits. > La lecture d’un fichier 3D nécessite toujours un plug-in, même si dans certains cas il est déjà installé sur le PC. SUR LE NET > La mise à jour automatique pour suivre les modifications n’est pas encore assurée. > De nouvelles compétences sont à acquérir en interne pour produire ces documents. > La propriété industrielle est peu menacée, car les données confidentielles disparaissent lors de la production des animations. http://www.usinenouvelle.com Complétez vos informations sur notre site : Les portails : CAO.fr, 3d-test Les formats existants : U3D, X3D… > Les analyses des cabinets américains spécialisés > Les éditeurs spécialisés > > 7 SEPTEMBRE 2006 | N° 3021 | L’USINE NOUVELLE