Ce cœur changeant Agnès Desarthe (Editions de l`Olivier – 2015
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Ce cœur changeant Agnès Desarthe (Editions de l`Olivier – 2015
Ce cœur changeant Agnès Desarthe (Editions de l’Olivier – 2015/Prix littéraire Le Monde) Ce roman, c’est le destin de Rose qui quitte à vingt ans le manoir familial de Soro, au Danemark. Nous sommes en 1909, Rose la candide qui « connaissait plusieurs pays, plusieurs continents…qui récitait joliment les sonnets de Shakespeare…qui savait monter à cheval, jouer au croquet mais ne savait rien de l’argent, des hommes, de la politique, du sexe » Rose s’échappait d’une enfance marquée par le désintérêt maternel. « Chacun dans la maison savait la gêne et le désarroi qu’éprouvait la mère face à sa fille. Demande-t-on au râteau son avis sur la photosynthèse». Seule dans un Paris cruel et cynique, Rose vit quatre années de misère. « Elle était devenue la faim, elle était devenue la soif, les démangeaisons, le froid puis l’opium ». Suit la renaissance, la découverte du luxe, de la sensualité, avec Louise son amante, sa protectrice. Survient la guerre, Rose dit : « Nous avons vu des choses que nous n’aurions jamais dû voir, nous avons perdu notre innocence ». Rose se regarde vivre plus qu’elle ne vit vraiment, elle marche sur un fil, oscillant entre son passé et le présent. Mais soudain sa vie va basculer. Pour la première fois Elle prend une décision, fait un choix qui va bouleverser sa vie, un choix magnifique, courageux et définitif. Ce roman m’a touchée par son souffle et son originalité. Le parcours initiatique de Rose est peuplé de portrait baroques de femmes libres, terrifiantes, parfois, dans leurs libertés conquises. C’est un vrai récit romanesque, au style léger et riche, descriptif, coloré et sensuel, qui nous entraine du « début du siècle » jusqu’aux années folles, en passant par l’horreur de la guerre 14, sans aucune pesanteur. Admiratrice de Virginia Woolf, Agnès Desarthe est intime avec les écrivains anglais et maitrise leur art consommé du roman. « Ce cœur changeant » au titre tiré d’un vers d’Apollinaire, c’est, avant tout, une magnifique vision de l’Homme et du Monde. Catherine Goulpeau