On a recroisé Fishbach aux Trans

Transcription

On a recroisé Fishbach aux Trans
On a recroisé Fishbach aux
Trans
Fishbach. Un nom qui court en ce moment sur toutes les lèvres.
Chez Manifesto XXI, on ne vous la présente plus, mais si vous
avez loupé quelques trains, voici de quoi vous rattraper ! On
a eu l’occasion de la croiser en coup de vent, au cours de sa
semaine de spectacles pour la création des Trans Musicales.
Interview « On va vibrer » – 5 nov. 2015 / Interview « Tout
dans le regard » – 31 juil. 2016
« Fishbach dévoile deux nouveaux titres » – 24 nov.
2016 / Live report Fishbach première aux Trans – 1er déc. 2016
https://www.youtube.com/watch?v=AMc_72BRMt0
Manifesto XXI – Comment t’es-tu retrouvée à monter un
spectacle ici pour la création des Trans, et quelle a été ta
réaction en apprenant cette nouvelle ?
Fichbach : De manière assez classique et belle, on a fait une
petite tournée à l’arrache avec Cléa Vincent et Michelle
Blades…
Ah, et vous étiez passées à Rennes justement, non ? On était
là !
Eh bien voilà, vous la connaissez l’histoire ! Rappelle-toi.
Jean-Louis Brossard passe, danse, il nous invite à l’UBU pour
faire un after, on s’entend très bien – c’est vraiment une
très belle rencontre humaine je crois, au-delà des enjeux
artistiques, etc. –, je pense que l’artistique lui a plu, mais
qu’il y avait aussi l’humain. Il revient me voir au Printemps
de Bourges, il m’attend en bord de scène, je jouais à 14h, je
n’étais pas réveillée… Et quelques jours après, il me dit :
« Flora, est-ce que tu veux venir jouer aux Trans ? ». Je fais
: « Ah bon ? Merci Jean-Louis, trop cool ! », puis : « Tu veux
venir faire la création des Trans ? ». Je lui dis : « C’est
quoi ? » – « Ben écoute, en gros tu prépares un spectacle
unique, et tu le joues six soirs de suite avec la générale » –
« Ok, super, j’adore les défis ! ».
Tu t’es dis que tu t’attaquais à un gros challenge ?
Je n’ai pas réfléchi. J’adore les défis, j’avais beaucoup aimé
la personne, je savais que ce serait aussi une très belle
vitrine, mon album était prévu pour janvier… Tout ça collait
plutôt bien !
Et c’était aussi l’occasion pour moi de monter un groupe, car
au bout de trois ans toute seule, je commençais à avoir fait
le tour, à être arrivée au bout du truc – enfin peut-être pas,
mais au bout d’un processus en tout cas.
Ça tombait bien de pouvoir mettre un groupe en avant, et
d’aller en plus au bout « de mes rêêêves » ! C’est une forme
de prolongation. On est dans un théâtre, et comme j’étais déjà
dans quelque chose d’extrêmement expressif, je voulais
prolonger ça visuellement. Dans le théâtre, on a pu mettre
tous les moyens en œuvre. Donc j’ai pu aller au bout de mon
idée grâce à cette création. C’est l’honneur quoi !
On a vu ta première mercredi soir, et effectivement on a été
frappées par l’importance de la mise en scène, qu’on pouvait
d’autant plus apprécier que c’était – une fois n’est pas
coutume en musiques actuelles – un spectacle assis… ce qui
était très agréable !
Ah cool, parce que moi d’habitude, en tant que spectateur,
j’ai un peu de mal à être assise devant un concert, c’est
aussi pour ça que je l’ai anticipé. Debout dans un concert tu
vas un peu divaguer, écouter à différents points, tchatcher
avec quelqu’un… il y a plein de choses à faire. Là assis… tu
restes là quoi.
Du coup, je me suis dit on est dans un théâtre, on va essayer
de mélanger ça, tout en gardant la liberté qu’on aurait dans
un concert debout. Ça m’amusait un peu le côté théâtral, même
si je n’en ai jamais fait, que ce n’est pas mon métier, et que
je n’ai pas envie de mettre du théâtre – on fait du live, on
est là pour faire des concerts – cependant, le spectacle
global m’intéresse. Dans ce que vous avez vu, il y a
énormément d’effets ; peut-être qu’on va alléger, peut-être
qu’on va en rajouter, on essaie. Vous avez vu quelque chose de
totalement expérimental, mais ça me plaît moi, marcher sur le
fil comme ça.
https://www.youtube.com/watch?v=HodI69BNdCk
On a pu discuter de ton spectacle avec pas mal de gens. Il y a
beaucoup de retours positifs, mais aussi des détracteurs,
comme partout. Pour faire simple, ceux-ci reprochent notamment
à la mise en scène de prendre le dessus sur la musique. Nous,
on pense que précisément cette mise en scène te permet d’aller
au bout d’un personnage, d’emmener le spectateur dans un
univers complet, de le happer dans une histoire, une
aventure au-delà de la limite de ses goûts musicaux,
précisément. Quelle est ta position à toi ?
Eh bien merci pour ces mots et cette position, car c’est celle
que je défends également. C’est-à-dire que dans ma musique,
même moi des fois je sens que je suis à la limite du bon et du
mauvais goût. Puis il n’y a eu quasiment aucun clip, parce que
des fois je vois des clips magnifiques, et j’en oublie la
musique.
Cependant, tout ça va de pair. Et comme j’accentue la voix sur
l’EP comme sur l’album, et le personnage que j’incarne, c’est
logique de prolonger ça sur scène. Nous, on tâtonne encore
avec les effets, etc., mais j’espère justement que les effets
ne serviront qu’à appuyer. Comme mes gestes, comme le côté
théâtral. L’idée, c’est que le décor serve juste à appuyer le
propos.
Et puis c’est normal, là c’est le tout début, j’espère bien
que ce ne soit pas parfait, ce serait même inquiétant. Et les
erreurs… Comme je sublime beaucoup la tragédie dans mes
paroles, je remercie les malheurs qui me sont arrivés dans la
vie. J’en ai chié dans la vie pour plein de choses, eh bien
tant mieux, car ça fait partie du processus.
Eh bien là c’est pareil, tant mieux que ce soit bancal, parce
que du coup là tu vas suivre l’évolution, et quand tu
reviendras voir ce sera autrement, pas mieux, pas pire, ce
sera autre chose. Il y aura une évolution, et c’est ça qui me
plaît ! Vivre l’instant, se projeter, ne pas avoir peur.
J’essaie, je me trompe, je change d’avis, et ce n’est pas
grave ! Tant mieux, on change, et c’est fabuleux.
Et je change aussi avec les gens, je ne fais pas de la musique
que pour moi, je ne fais pas de la musique pour plaire, mais
le partage, putain, c’est génial. Donc avec les commentaires
positifs et les encouragements, et puis les choses qui ne
marchent pas, et moi je fais le tri dedans, et puis on est
bien !
Dernière question, qu’on s’est nous-mêmes posée, et qu’on a
entendue courir sur d’autres lèvres également : Fishbach,
future Christine & The Queens ?
C’est normal que les gens aient besoin de comparaisons. Tout
le monde me dit Catherine Ringer ; je n’ai jamais écouté
Catherine Ringer avant qu’on me dise qui c’était quand j’avais
19 ans… Mais j’adore cette femme, je suis très heureuse de
cette association.
Avec Christine & The Queens, on ne fait pas du tout la même
chose, et je ne suis pas fan de tout ce qu’elle fait ;
cependant, elle a une singularité, un personnage. Elle dénote
des codes de la beauté, elle dénote des codes de la musique…
Même si tout ce qu’elle fait ne me parle pas forcément, j’ai
un putain de respect pour ce qu’elle fait, parce qu’elle va au
bout des choses. Et qu’une nana aussi singulière arrive à
basculer du côté grand public – elle est en train de défoncer
dans le monde entier –, c’est juste génial.
Qu’on me compare à Christine ou Catherine Ringer, eh bien
c’est très bien. Je parlais tout à l’heure de cette nouvelle
scène française. On ne fait pas tous la même musique, mais on
vit quelque chose d’assez beau ; on assume d’être français, on
est heureux de cette poésie, on n’a pas de complexes. Et tant
mieux si on me compare à Christine, elle fait une super
carrière, c’est un honneur, on ne fait pas la même chose, mais
la meuf, elle défonce tout.
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Propos recueillis par Eléna Tissier et Alice Heluin-Afchain.

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