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Chroniques bleues
Domenech, un bilan comparé
samedi 3 juillet 2010, par Bruno Colombari
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Avec 79 matches dirigés, Raymond Domenech est désormais le sélectionneur le plus capé de l’histoire de l’équipe de
France. Mais que vaut son bilan par rapport à celui de ses prédécesseurs ? A-t-il fait mieux qu’Hidalgo, Lemerre ou
Jacquet ?
Le vieux record de longévité détenu par Michel Hidalgo depuis juin 1984 est tombé, même si peu de monde en a fait cas. C’est au
soir du 5 juin dernier, à Saint-Denis de la Réunion, que Raymond Domenech a dirigé son 76e match en tant que sélectionneur,
nouveau record porté à 79 à la fin du premier tour. Hidalgo peut toutefois se consoler : il n’a fallu qu’un peu moins de six ans (très
précisément 2134 jours) à Domenech pour parvenir à ce résultat, loin des 3014 jours (8 ans et 3 mois entre 1976 et 1984) pendant
lesquels le découvreur de Platini, Bossis et Tigana a officié chez les Bleus.
En pourcentage, avec un petit 52% de victoires, il faut nettement moins bien que Santini (79%), Lemerre et Jacquet (64%), Houiller
(58%), Hidalgo et Platini (55%). Il faut remonter à Henri Michel (1984-1988) pour trouver un plus mauvais résultat (44% de
victoires).
Côté matches nuls, Domenech en a obtenu 24, soit 30% du total, un peu moins que Louis Dugauguez et Henri Michel (33%) et
autant que Aimé Jacquet. Sur ces 24 nuls, on compte onze 0-0, plus que le spécialiste du genre, Aimé Jacquet (neuf).
Enfin, rayon défaites, Domenech a perdu 14 fois (contre 18 à Hidalgo), ce qui donne une moyenne honorable de 18% de défaites,
bien loin toutefois des excellents résultats de Jacquet (6%) ou Santini (7%, deux matches perdus sur 28 joués !). Il faut également
rappeler que Raymond Domenech n’avait perdu aucun match en 2004 et en 2005, et un seul au terme de la coupe du monde 2006
(un amical contre la Slovaquie en mars de cette année-là). Ce qui signifie que depuis août 2006, le bilan s’est considérablement
terni avec 13 défaites pour 51 matches (25% du total).
L’attaque n’aura pas été le point fort des années Domenech : 110 buts auront été inscrits en 79 matches, soit 1,39 but par
rencontre disputée, le plus mauvais résultat depuis 22 ans. La meilleure moyenne est au crédit de Santini (2,46 entre 2002 et 2004),
devant Lemerre (2 entre 1998 et 2002). La défense n’aura pas été beaucoup plus impressionnante, malgré de bonnes stats entre
2004 et 2006, suivies d’un brusque effondrement depuis deux ans : au total 55 buts encaissés (0,70 par match), dont 42 depuis la
coupe du monde 2006 (en 51 matches, soit 0,82 par match).
Enfin, si on regarde de près les matches les plus importants, à savoir ceux des phases finales (coupe du monde et Euro), Hidalgo
reste celui qui en a le plus disputé (15 en trois éditions, 78, 82 et 84), devant Domenech (13), Jacquet (12) et Lemerre (9), ces deux
derniers ayant dirigé les Bleus lors de deux phases finales. Avec seulement 4 victoires (toutes obtenues en 2006), Domenech est
celui dont les performances auront été les plus décevantes (31% de matches gagnés, contre 67% à Jacquet, qui n’en a perdu aucun
et qui est donc le seul sélectionneur français invaincu en phase finale, et 60% à Hidalgo).
17 décembre 1993 : Aimé Jacquet est nommé sélectionneur.
Il se définit lui-même comme un intérimaire.
Quatre ans et demi plus tard, il sera champion du monde.
Les cinq matches nuls des Bleus de Domenech constituent également un record, avec la particularité d’avoir fait un 0-0 d’entrée à
chaque phase finale (Suisse en 2006, Roumanie en 2008 et Uruguay en 2010). Enfin, l’attaque aura été indigente, avec 11 buts en
13 matches (0,85 de moyenne), bien loin des festivals offensifs de l’époque Hidalgo (35 buts marqués, soit 2,33 par match). La
défense aura mieux tenu (13 buts encaissés, 1 par match), mais c’est loin des stats de l’époque Jacquet : en 1996 et 1998, la
défense française n’aura cédé que 4 fois en 12 rencontres.
Si on devait résumer le bilan de Raymond Domenech en quelques lignes, on pourrait le qualifier de bon sur les deux premières
années (29 matches joués, 16 victoires, 12 nuls, 1 défaite) qui se sont achevées par la finale de la coupe du monde perdue à Berlin
face à l’Italie. De août 2006 à mai 2008, les résultats se sont lentement dégradés avec une qualification laborieuse pour l’Euro, une
défense encore assez robuste mais quatre défaites inquiétantes face à l’Ecosse en compétition (0-1 en 2006 et 0-1 en 2007),
l’Argentine (0-1 en 2007) et l’Espagne (0-1 en 2008) en amical.
La chute finale a commencé lors de l’Euro en Suisse avec un effondrement défensif qui s’est prolongé jusqu’à la fin 2008 (15 buts
encaissés en 7 matches). L’année 2009 n’aura offert qu’un bref sursis à une équipe en déliquescence, qui aura fini par imploser en
Afrique du Sud.
Raymond Domenech s’en va dans une ambiance qui rappelle celle connue par Henri Michel en 1988, débarqué par un complot
médiatico-affairiste et qui aurait dû partir un an plus tôt, après l’échec de la qualification pour l’Euro en Allemagne, ou encore
Jacques Santini en 2004, qui avait lui aussi annoncé son départ avant l’Euro et qui avait perdu tout pouvoir sur son effectif.
L’arrivée de Laurent Blanc rappelle celle de Michel Platini à l’automne 1988, qui avait dû rebâtir sur un champ de ruines [1]. On
souhaite au Cévenol plus de réussite qu’au Lorrain, même si c’est ce dernier qui l’avait fait débuter en Bleu contre l’Irlande à Dublin.
C’était le 7 février 1989.
7 février 1989 : présentation de Laurent Blanc, appelé pour la première fois
en équipe de France.
Notes
[1] J’ai raconté dans mon article Ainsi finissent les sélectionneurs dans quelles circonstances les sélectionneurs français avaient quitté leur
poste.