comment etablir les priorites budgetaires par
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COMMENT ETABLIR LES PRIORITES BUDGETAIRES PAR OPTIMISATION DU RATIO COUT/RISQUE BUDGETING PRIORITIES WITH COST/RISK TRADE-OFFS Sébastien MOINE & Xavier AMEYE ASSETSMAN 2 bis, passage Roche 78000 Versailles Tél. : +33 (0)1 39 50 79 48 E mail : [email protected] [email protected] www.assetsman.com Lucien HENRIO SAMIR BP 89 - Mohammedia Maroc Tél. : +212 (0)23 30 40 50 E mail : [email protected] www.samir.ma Résumé Cet article a pour but de présenter un moyen efficace et pertinent de définir une hiérarchisation entre différents projets de modifications éligibles aux budgets futurs. Les méthodes modernes d'Asset Management permettant la gestion du compromis risque/coût assurent une approche objective des cas étudiés, complémentaire aux approches classiques qualitatives ou quantitatives portant essentiellement sur les seuls montants directs en investissement. Le but est ici de permettre d'optimiser et de faciliter la justification des choix d'investissement pour une enveloppe budgétaire donnée et de les réajuster tout aussi facilement lorsque cette enveloppe change. Summary This document is aimed at presenting a simple and relevant way to define a ranking between different modification projects eligible for future budgets. Modern methods allowing to manage the risk/cost ratio activities ensure an objective approach of studied cases, complementary to classical approaches, more qualitative or quantifying mostly direct investment amounts. The goal is here to allow an optimized and easier justification of investment choices for a defined budget and to readjust them easily when this budget changes. Ce document présente l’apport des méthodes de gestion du compromis risque/coût pour une Direction Générale lorsque la question d'investir pour réaliser des modifications techniques se pose. Les nouvelles méthodes d’Asset Management sont un outil complémentaire aux approches classiques plus qualitatives ou comptables pour déterminer et justifier de façon encore plus objective des priorités d'investissement. Tous d'abord, cet article resituera le contexte des mises au budget de modifications techniques et les difficultés liées au choix de l'une par rapport à l'autre. Ensuite, sera abordée la méthode mise en pratique auprès d’un industriel pour collecter les informations nécessaires à ce travail et analyser chacune des demandes de modifications. Enfin, une évaluation des gains mis en lumière par cette analyse sera présentée, permettant de montrer qu'il est possible de valoriser la diminution du risque de manque à gagner dans un calcul de rentabilité, au même titre que les investissements nécessaires pour réaliser la modification. Le travail décrit a été réalisé de juillet à septembre 2005 pour le compte de la raffinerie SAMIR de Mohammedia (Maroc). Des choix à faire Lorsque le budget de l'année suivante est en cours de préparation et que chaque service présente ses demandes de capitaux pour la réalisation de modifications techniques, des choix sont à faire pour tenir la part du budget dévolue à cet égard. On comprend facilement que les besoins d'évolution d'un site industriel exploité depuis plusieurs dizaines d'années soient généralement supérieurs à ce qu'il est envisageable de réaliser sur un an. Même en cas de volonté ponctuelle de réinvestir de façon importante dans l'outil de production pour une grande remise à niveau, tout n'est pas finançable en une fois et un échelonnement des investissements est à définir. La difficulté réside alors dans la prise de décision la plus pertinente et dans la justification pour les décideurs et les demandeurs des projets reportés ou écartés. Vers une justification plus objective Face aux diverses demandes arrivant sur le bureau des responsables de maintenance, différentes approches sont couramment rencontrées. Tout d'abord, une approche consensuelle peut être de distribuer des crédits de modifications aux différents services afin de n'oublier personne et ainsi éviter de créer des tensions entre les intervenants. Même si elle part d'un sentiment équitable, il est bien évident que cette méthode ne prend nullement en compte les contributions respectives des différents services à la valeur ajoutée de l'entreprise et n'a donc pas la justification économique ou technique nécessaire pour établir un consensus. Une autre approche consiste à retenir prioritairement les modifications sur les équipements les plus sujets aux pannes, en réalisant par exemple un classement de type Pareto sur base des interventions réalisées au cours des années précédentes. Ces réparations imprévues sont consommatrices en heures de maintenance corrective et perturbent l'ordonnancement prévisionnel des travaux préventifs. Il s'agit donc principalement de faciliter le travail des équipes de maintenance et de réduire le « backlog » dû à ces sollicitations imprévues. Cette démarche permet également dans une certaine mesure de montrer que le management prend en compte les problèmes opérationnels en donnant aux acteurs de terrain les moyens de solutionner leurs problèmes récurrents. L'investissement dans une modification peut alors être comparé aux coûts horaires de la main d'œuvre nécessaire aux dépannages pour évaluer une rentabilité. Mais cette façon d'envisager les choses occulte les manques à gagner engendrés par les défaillances, souvent bien plus importants que les coûts matériels ou humains. Ainsi, lorsque des équipements n'ayant pas ou peu d'impact sur la production subissent des modifications onéreuses, on s'oriente plus vers une solution de confort d'exploitation et de maintenance que vers de réels gains économiques. Enfin, dans le cadre d'une approche système plus analytique basée sur des indicateurs de performance (Key Performance Indicators), un lien peut être interprété sur base du retour d'expérience entre les résultats d'exploitation et les perturbations de la production dues à des défaillances matérielles. Il faut cependant s'assurer que les indicateurs employés soient compris et acceptés par tous et qu'un suivi régulier de chaque indicateur ait été mené. Ce travail permet de pointer les fonctions dont les performances sont à améliorer et dans quelles proportions pour atteindre un objectif donné. On fixe ici un objectif d'amélioration et l'analyse inverse doit être menée lors des propositions de modifications pour estimer leur impact sur l'augmentation des performances système par rapport à leur coût. Au-delà de la démarche présentée ici, cette approche peut permettre d’identifier d’autres pistes d’améliorations possibles en complément aux propositions de modifications techniques. La méthode employée ici consiste à analyser les propositions de modifications au cas par cas en évaluant leur impact sur le fonctionnement global et le bénéfice engendré par rapport à la situation actuelle. Le coût du risque L'intérêt de cette démarche intégrant le ratio coût/risque par rapport aux approches classiques est la prise en compte du risque technique en tant qu'impact financier au même titre que des coûts d'exploitation. Nous nous intéressons ainsi à la combinaison entre la fiabilité d'un moyen et les conséquences fonctionnelles en cas de perte. Il n'est donc pas suffisant de considérer simplement qu'une défaillance est fréquente ou a des conséquences importantes pour qu'elle soit jugée critique, c'est l'association de ces deux paramètres qui permet de définir un risque financier annuel moyen. Lorsqu'un risque potentiel est ainsi ramené à un coût au même titre que les dépenses sonnantes et trébuchantes de l'exploitation et des modifications, il devient alors possible de l'associer à ces autres données décrivant une situation. L'impact financier sert alors de dénominateur commun. Une analyse comparative Le principe de cette analyse nécessite de décrire la situation en l'état actuel des choses, la situation future attendue après la réalisation de la modification et bien sûr le coût de cette dernière permettant de passer d'un état à l'autre. C'est la mise en relation du budget requis pour l'intervention par rapport à l'écart de coûts annuels globaux entre avant et après qui permettra d'évaluer la rentabilité de l'opération. Afin de faciliter la définition des données et permettre une sensibilisation directe du résultat, l'outil de simulation prend en compte une fourchette de valeurs minimum et maximum pour les paramètres décrivant la situation. Cet état des lieux passe par la définition des données suivantes (pour l'état actuel et l'état futur suite à modification) : coûts d'exploitation, incluant le cas échéant main d'œuvre, maintenance, énergie consommée, consommables,… fiabilité des moyens, c'est-à-dire fréquences d'apparition des défaillances principales qui motivent la modification, conséquences fonctionnelles et manques à gagner associés en cas de défaillance. Il n'est pas nécessaire de définir les valeurs des paramètres qui ne changent pas d'une situation à l'autre puisqu'ils ne sont pas impactés par les choix de modification, sauf bien sûr pour le manque à gagner qui sert à l'évaluation du risque. La collecte des données Les informations ont été collectées auprès des différents demandeurs, les plus à même de justifier les propositions faites. Il s'agissait pour l'essentiel de chefs d'équipe de maintenance et travaux neufs. Leur temps de contribution a donc été réduit à son strict minimum sans pour autant affecter la qualité de l'analyse, puisqu'elle se réalise ensuite de façon très autonome. Les informations ont été toutes regroupées dans un tableau afin de s'assurer de leur exhaustivité dans chaque cas et de permettre une vue globale de l'ensemble de l'analyse. Les informations collectées sont essentiellement basées sur le retour d'expérience pour ce qui concerne la situation actuelle et sur les avis d'experts sur les pratiques du type d'industrie pour les évaluations de la situation future. Concernant les coûts d'exploitation, des cas de modification les impactait et leur définition était assez précise puisqu'il s'agissait de pénalités contractuelles (frais horaires d'attente des pétroliers lors du déchargement du pétrole brut). Cela n'a donc pas été un point bloquant dans ce cas d'étude et d'une manière générale lorsque les prestations de maintenance ou les consommations énergétiques sont bien connues, les coûts d'exploitation sont habituellement assez facilement évaluables. Le niveau de fiabilité des équipements en place a systématiquement été repris sur base du retour d'expérience. Cela a été facilité par l'emploi de fiches d'historiques de dysfonctionnements pour chaque équipement concerné, permettant d'évaluer le taux de défaillance annuel lié à chaque cause. On a ainsi la garantie d'exploiter une source d'information fiable. Pour ce qui est de la fiabilité attendue suite à la modification, des fourchettes de temps de bon fonctionnement standard ont été employées selon le type de matériel et la fonction réalisée. Il s'agit en effet d'évaluer ce que l'on est en droit d'attendre après mise à niveau d'un équipement. Les fourchettes d'incertitudes sont alors réduites sur les matériels à usage continu et à remplacement rapproché (ex : garnitures mécaniques sur les pompes) puisque les performances attendues sont déjà éprouvées. Ces évaluations sont en revanche plus larges sur les équipements de secours ou sollicités de façon auxiliaire, pouvant aller dans certains cas du simple au double (ex : système d'amorçage des pompes). Le coût du manque à gagner lors de l'occurrence d'un défaut a nécessité de définir l'impact fonctionnel (perte immédiate ou reprise par un secours), le manque à gagner horaire selon le type de production concernée et la durée de remise en état de fonctionnement pour chaque cause. Enfin restait le coût de réalisation de la modification, assez facilement évalué par les demandeurs ayant une vue bien définie de ce qu'ils souhaitaient voir réaliser. Dans la plupart des cas, ces modifications peuvent être réalisées lors d'arrêts programmés et ne perturbent donc pas la production ; dans les rares cas où la production est nécessairement réduite ou stoppée pour accomplir le travail nécessaire, les manques à gagner associés sont ajoutés à ce coût de réalisation. Une description fonctionnelle simple Comme évoqué précédemment, un des points fonctionnels sur lequel une attention particulière est portée est de déterminer si la production est modifiée (en partie ou totalement) lors d'un dysfonctionnement ou si une redondance permet d'éviter ces conséquences. Dans certaines structures fonctionnelles redondantes, une pondération de l'impact a été apportée par l'application d'un coefficient de défaillance simultanée de deux équipements et ce afin de rester dans une vue objective d'un point de vue statistique. Considérer que la probabilité d'apparition simultanée de deux défaillances est nulle et donc qu'aucun impact n'est envisageable sur la production reviendrait à condamner immédiatement la viabilité de certaines modifications de fiabilisation ; ainsi l'investissement ne pourrait pas apporter une quelconque diminution du risque de manque à gagner et le bénéfice se situerait uniquement au niveau des coûts directs de réparation, généralement moindres. Des indicateurs économiques parlants Une rentabilité mesurée Après introduction des différentes données dans le simulateur A7S-PROJECT d’Assetsman, des indicateurs financiers sont produits pour chaque cas étudié. Cette application évalue les coûts annuels liés au risque et les associe aux autres coûts directs, d'une part pour la situation actuelle et d'autre part pour la situation envisagée suite à la modification. Il propose en sortie plusieurs indicateurs moyens encadrés par une valeur minimum et maximum. Les indicateurs minimum et maximum sont calculés en croisant les valeurs globales minimum et maximum des situations avant/après modification. Par exemple, le gain maximum de la modification sera évalué en considérant le coût global maximum de la situation actuelle par rapport au coût global minimum de la situation future. Et inversement pour le gain minimum. On cherche ainsi à couvrir l'ensemble des résultats pour des combinaisons extrêmes des données d'entrée. Parmi toutes les demandes de modifications soumises par les équipes techniques, le gestionnaire a pu établir une sélection de propositions retenues au budget CAPEX (budget des investissements annuels) de l'année 2006, sur base des indicateurs calculés pour chaque cas analysé. Des propositions ont été rejetées car leur délai de retour sur investissement (« payback ») n'était atteint que dans un délai de plusieurs dizaines d'années, inenvisageable par rapport à une échelle industrielle actuelle. D'autres propositions dont le cas le plus défavorable faisait également état d'une rentabilité à long terme n'ont pas été retenues mais ont été assorties d'une remarque sur le coût maximum envisageable de la modification pour qu'elle soit rentable, aux demandeurs de voir si cette réduction de dépense sera tenable ou pas pour de futurs demandes. Cette démarche permet ainsi également de définir le seuil économique où un projet devient viable et ainsi proposer formellement le rejet ou l'accord d'un projet au-delà de l'intuition première. Les indicateurs disponibles les plus intéressants pour établir un classement industriel sont : le ROI (Return On Investment) donne, en fait, le délai de rentabilité de la dépense (« payback ») en mois ; cela permet de voir si ce délai est compatible avec les orientations au niveau Direction Générale à court terme ; le NPV (Net Present Value) (€) donne la somme actualisée de tous les coûts et gains d’un projet de modification (somme des « cashflows ») ; cette addition permet d'évaluer si un projet est rentable sur un délai à long terme ; le PI (Profitability Index) : PI = NPV / coûts du changement Cet indice montre à quel point la création de valeur générée par d’un projet est bonne par rapport à l’investissement initial ; il favorise les projets rentables sans grande prise de risque initiale ; L'IRR Internal Rate of Return (%) : valeur du taux d’actualisation annulant le NPV. L’IRR est le taux « d’intérêt » du projet ; un projet doit avoir un IRR bien supérieur au taux d'actualisation pour être considéré peu risqué. Dans le cas présent, il a été choisi de trier les différentes propositions étudiées selon leur délai de retour sur investissement (« payback ») en favorisant bien sûr les modifications présentant les bénéfices les plus rapides. Les autres indicateurs et leurs valeurs limites sont également à consulter pour s'assurer que chaque projet s'inscrit bien dans les orientations générales de la direction. Partant de ce classement, il était possible pour le décideur de définir ses choix prioritaires pour tenir son budget de l'année suivante et ceux qui méritaient d'être pris en compte mais de façon différée. A titre indicatif, l'ensemble des modifications prévues au budget 2006 représente une rentabilité annuelle moyenne équivalente à 70% de l'investissement initial. Conclusion Cette étude est l'illustration d'une mise en pratique concrète d'une méthode moderne d'intégration quantitative du risque dans une approche de justification économique globale de solutions techniques. Déployée en l'espace de seulement quelques semaines, elle a permis de prouver avec succès l'intérêt que représentent conjointement cette méthode et l'outil de simulation informatique associé lorsqu'une aide à la décision est nécessaire pour attribuer les fonds requis pour des améliorations techniques. Comme pour d'autres problématiques technico-économiques, les outils de l'Asset Management permettent un dialogue unifié des différents niveaux de l'entreprise. Cette compréhension est rendue possible grâce à l'interprétation des données techniques et de risque par leurs impacts financiers respectifs. Remerciements Nous tenons à remercier la Direction du Raffinage de la SAMIR ainsi que les équipes de la Direction Maintenance pour leur collaboration fructueuse et la confiance qu'elles nous ont accordées dans le déroulement de cette étude.