Léon Spilliaert Léon Spilliaert

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Léon Spilliaert Léon Spilliaert
Léon Spilliaert
1. Un esprit libre
Du 22 septembre 2006 au 4 février 2007, les Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique présentent une
exposition consacrée à l'oeuvre originale et singulière de Léon SPILLIAERT. Soixante ans après sa
disparition, il est en effet opportun de faire le point sur la diversité de style, de contenu et de spiritualité
d'une oeuvre qui se développera bien au-delà du Symbolisme.
2. Biographie de l’artiste.
Léon SPILLIAERT est né en 1881 à Ostende. A dix-huit ans, il fait un
court séjour à l’Académie de Bruges mais pour l’essentiel il restera
autodidacte. Il est employé à Bruxelles chez l’éditeur d’Emile
Verhaeren et de Maurice Maeterlinck. De caractère très tourmenté,
Spilliaert va pendant dix ans transformer la réalité ostendaise en vues
hallucinées qui l’apparentent au symbolisme. Son mariage en 1916,
puis son installation à Bruxelles et la naissance de sa fille vont détendre
son caractère. Son art, peu à peu, se fera plus désinvolte. Les arbres,
qui avec l’élément marin, furent les éléments principaux de son
imaginaire deviendront les thèmes prépondérants de son oeuvre. Sa vie
se partagera entre les joies de la famille et son art. Malgré deux
expositions considérables en 1929 et 1944 à Bruxelles il mourra en
1946, sans connaître la reconnaissance internationale qui ne lui sera
accordée qu’au cours des années quatre-vingt.
3. La singularité de la vision de l'artiste
Préférant suivre son imagination nourrie d'images littéraires, de réflexions philosophiques et de réalités
sociales, Spilliaert débute une carrière d’autodidacte. L'originalité de son interprétation s'impose
immédiatement dans les lavis sombres de ses premières années. Son œuvre est pleine d’une solitude
angoissante, d’une mélancolie qui est proche de la folie. Artiste inclassable, il ne fait partie d’aucun
mouvement pictural, tout en s’illustrant entre symbolisme et expressionnisme. On dit de lui qu’il fut un
précurseur des surréalistes.
« Autoportrait » 1908. Encre de Chine, pinceau,
crayon de couleur, aquarelle sur papier
48,8 x 63 mm
« Autoportrait au miroir » 1908.
Encre de chine, aquarelle, crayon de couleur
sur papier. 485 x 631 mm.
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3. Comprendre l’œuvre de Léon Spilliaert.
Analyse d’une œuvre : « Autoportrait au miroir »
Les symbolistes ont placé le « Moi » au centre de leurs préoccupations. Le « Moi » est inquiet, souvent
tourmenté par l’angoisse du vide, de la névrose ou de la mort. C’est justement la terreur provoquée par
son propre visage qu’illustre ce tableau : l’œil vitreux au centre de la toile, le visage en décomposition,
l’horloge qui symbolise la menace du temps, la perspective en contre plongée. Tout dans cette œuvre aux
teintes sombres est fait pour accentuer le caractère inquiétant.
4. Léon Spilliaert, précurseur.
Spilliaert se frotte aux courants artistiques de l'époque, se confronte ou développe des affinités avec ses
contemporains, peintres et écrivains : Emile Verhaeren, Maurice Maeterlinck, Fernand Khnopff,
Edouard Munch, Pablo Picasso, Odilon Redon, Edouard Vuillard, James Ensor … Il est précurseur
d'un géométrisme abstrait, d'un expressionnisme construit et coloré, d'un surréalisme aux images
télescopées et recadre l’espace dans une vision tirée de l’estampe japonaise.
« Femme sur la digue » 1907. Crayon, aquarelle, gouache,
crayon de couleur sur papier 343 x 744 mm.
De la nature, il retient en premier lieu l'immensité de la mer, l’étendue des plages, la verticalité
majestueuse des arbres. L'homme, l'être humain, le préoccupe dans sa relation problématique avec le
monde : solitude, attente, angoisse existentielle.
« Le vertige » 1908
Encre de Chine, lavis, pinceau, crayon de couleur
sur papier. 637 x 476 mm
« Baigneuse » 1910
Encre de Chine, lavis, pinceau, pastel sur papier.
649 x 504 mm
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5. Les œuvres
L’exposition, réunit plus de deux cents œuvres. Elle aborde les deux pôles créatifs de l’artiste: les oeuvres
autonomes et les contributions à l'illustration. En introduction, les encres de Chine de petit format,
réalisées au pinceau et à la plume, font surgir la vision d'un esprit libre marqué par ses lectures
(Nietzsche, Chateaubriand...)
Représentation allégorique de l’homme
sous l’aspect d’un animal monstrueux perdant du sang.
1903. Crayon, lavis à l’encre de chine, pinceau,
plume sur papier. 252 x 334 mm.
" Les serres Chaudes" de Maurice Maeterlinck ,
1918. Lavis d'encre de Chine, crayon de couleur sur papier.
L'exposition présente la totalité des recueils et livres
que Spilliaert illustra par des centaines de dessins,
témoignant du rapport privilégié qu’il entretenait
avec certains auteurs comme
Verhaeren et
Maeterlinck.
Par ailleurs, une approche originale est aussi
proposée au visiteur par la présentation côte à côte
d’oeuvres de Spilliaert et d’artistes de son temps,
avec des aquarelles et des dessins de Khnopff,
Redon, Rops et Ensor ...
6. Techniques de l’artiste.
Les grands thèmes de l’œuvre de Spilliaert, profondément liés à l'évolution de sa pensée, s'expriment par
une riche diversité de techniques : les lavis noirs aux voiles d'encre de Chine superposés intensifient les
vertiges et promenades nocturnes en solitaire, les vues de mer et de digues, les fascinants clairs de lune,
l'échappée fabuleuse des dirigeables, les rehauts de crayon de couleur modulant les trouées de ciel, les
éclats de lumière sur les sables mouillés, la géométrisation en diagonale des plages.
« La nuit » 1908. Encre de chine, lavis, pastel sur papier. 480 x 630 mm
« Plage au clair de lune » Encre de chine, lavis,aquarelle, gouache ,
pastel , crayon de couleur sur papier. 500 x 650 mm
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Quand l’angoisse de l'artiste fait place à une vision
plus légère de la vie, l'aquarelle se fait chatoyante
dans les marines fantaisistes et les paysages d'arbres
en fleur. Mouvante et couvrante, la gouache,
mélangée à la caséine, décline des marines lourdes de
couchers de soleil, de ciels de plomb, de visions
imaginaires et de légendes. En fin de vie, le retour à la
spiritualité et à une forme de contemplation active
réintroduit dans son oeuvre l'aquarelle et l'encre de
Chine traitée à la plume et rythmée par une lente
réflexion. Le regard de Spilliaert à nouveau introverti
se pose alors sur les troncs d'arbres, sur les écorces
noueuses aux visages humains.
« Femme au bord de l’eau » 1910 Encre de chine, lavis, pinceau, crayon de
couleur, pastel sur papier. 471 x 602 mm.
Sans cesse sollicité par une vision nouvelle de la
réalité, Spilliaert découpe, recompose. Il traduit la
réalité de manière spirituelle pour choquer, pour
glacer ou faire frémir l'âme des choses et des
êtres. Son analyse est claire et sans détours.
Alors que ses œuvres sont exécutées en majorité
sur papier ou carton, il n’affectionnera jamais la
peinture à l’huile.
S'inscrivant dans la continuité des grandes
manifestations consacrées à Léon Spilliaert, cette
nouvelle exposition s'efforce de montrer des
oeuvres récemment redécouvertes ou restées
inaccessibles au public depuis plus de vingt ans.
« le poteau » 1910 encre aquarelle crayon de couleur
650 x 500mm
« Le vent » Encre de Chine, pinceau, plume sur papier
38,4 x 30,9
Léon Spilliaert
Arbres, blanc et noir
Encre de Chine, aquarelle sur papier
49 x 61,5 (jour)
1941
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7. Mots à connaître.
Le symbolisme : Il s’exprime entre 1886 et 1900 dans tous les domaines de la création : la littérature en
premier lieu, la musique et les arts plastiques. Les peintres rejettent l’inspiration de la nature, ils
s’adressent à l’esprit, à l’imagination et non au regard. les peintres et les poètes dans une communion
d’idée, s’évadent dans le rêve et la mélancolie. Ils s’inspirent des romans de la poésie du passé et
contemporaine. Le rêve, le fantastique, l’imaginaire, l’étrange, la magie, l’au-delà, la solitude et la mort
sont les thèmes de prédilection des symbolistes.
L’ expressionnisme: Il se développe entre 1900 et 1925. les peintres s’éloignent des préoccupations
plastiques et rejettent la réalité. Pour eux l’art est le moyen d’exprimer les névroses individuelles et une
conscience souvent révoltée face au malaise économique et social face à la guerre de 1914. Ils exposent
sans pudeur la misère physique et morale. Ils peignent des sujets mystiques, se concentrent sur le visage
et suppriment l’objet. Le paysage prend une intensité extatique. La présentation des personnages suggère
le drame par la déformation et l’agrandissement de certains éléments anatomiques. Les tableaux
présentent des accords colorés violents et des tons salis, le noir et le rouge dominent.
« Jeune femme sur un tabouret » 1909 Encre de Chine, pinceau, crayon de couleur, pastel
gras, gouache sur papier. 703 x 599 mm.
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« La buveuse d’absinthe » 1907 Encre de Chine,lavis, pinceau, craie de
couleur, gouache, aquarelle sur papier. 1050 x 770 mm.
« Arbres, blanc et noir » 1941
Encre de Chine, aquarelle sur papier. 490 x 615 mm.
« Troncs de hêtres » 1945. Aquarelle, encre de Chine,
plume sur papier. 590 x 480 mm.
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