LOST IN TRANSLATION : ENTRE SUBVERSION ET
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LOST IN TRANSLATION : ENTRE SUBVERSION ET
LOST IN TRANSLATION : ENTRE SUBVERSION ET TRANSGRESSION David MARIE1, Laura PEYLA2, Claire VITALE1, Camille REICHLING3, Eric DUDOIT4 v v v Nous souhaitons parler ici et maintenant de Duke, la quarantaine, un sarcome des tissus mous avec métastases cérébrales. Dès ses premières hospitalisations, il présente un syndrome confusionnel avec des bizarreries et de violentes douleurs. Très vite les équipes sont désemparées devant ces comportements : il est mis sous sédation puis maintenu par des contentions à répétition. Il souffre aussi d’un délit de faciès, ses conduites addictives et son look y contribuent. On le surnomme « shitoman », on lui confisque son cannabis. Ainsi commence son histoire… Duke a assourdi nos oreilles de soignants en questionnant notre entendement et notre vision d’un bon patient pour une bonne pratique. Souffrant d’épisodes d’agitation et de confusion, Duke est aussi considéré comme déviant par sa psychopathologie dite « limite ». Ses comportements, son histoire ainsi que son image le stigmatisent tel un transgresseur, un agresseur de notre transdisciplinarité ! Ce « shitoman » se pose et s’impose comme un « monstre » à voir dans la laideur et la perspective d’une déchéance de l’homme, au pied des lits de nos institutions. Par cette rencontre, nous souhaitons témoigner de ces situations « transgressives » qu’il s’agit de ne pas confondre avec une réponse négative aux thérapeutiques. Transgresser, en effet, ce n’est pas s’opposer, c’est aller au-delà des lois et des pactes (conscients et inconscients) à la base des rencontres humaines. C’est plongés dans ce malaise, cette maladie du malade, qu’est naît une résonnance affective nécessaire au nouage d’une relation dans le soin, faite de liens et de ruptures, de peurs et de déchirures. v Duke, à la fois proche et étranger, est venu réveiller nos peurs et « l’inter-dite » colère impropre à notre fonction de soignants. Duke et ses avatars nous ont ainsi conduits aux frontières de notre éthique. Attaché et attachant, dans un méli-mélo de contention physique et psychique, il est venu mettre en exergue la difficulté à apposer une limite à la transgression. v En effet, la transgression ne se juge que d’elle-même dans son caractère transitif : « est ce que je me transgresse dans la transgression ? ». Autrement dit, c’est aussi un sentiment qui s’instaure dans un vécu qui tenterait de nier la condition essentielle de nos pratiques : être humain. v Finalement poser une limite à la transgression, ne sert à rien, il est, nécessaire pour maintenir quelque chose de l’humain et de la rencontre, d’aborder la dynamique de la subversion, au sens de bouleverser la première version, de la renverser. La contention ne signifie pas nécessairement contenir car être contenant nécessite d’être « aimant » et d’attirer à soi et en soi ce qui fait parfois étincelle… v Duke a pu trouver des moments de calme et de quiétude dans les bras de sa fille qui étaient devenus les plus efficientes contentions. Peut-être n’avions nous pas réussi à ouvrir nos bras de soignants à cet homme qui n’attendait sans doute qu’à être « embrassé » par l’Homme… 1 Psychologue clinicien(ne). Unite de psycho-‐oncologie. Service d’oncologie médicale et soins palliatifs, Pr F. Duffaud, CHU TImone Marseille @[email protected] 2 Psychologue de la santé. Unite de psycho-‐oncologie. Service d’oncologie médicale et soins palliatifs, Pr F. Duffaud, CHU TImone Marseille 3 Psychologue clinicienne. Fondation Mimi. Unite d’oncologie de jour. Hôpital Saint Joseph, Marseille. 4 Psychologue clinicien. Docteur en psychologie clinique et psychopathologie. Responsable de l’unite de psycho-‐ oncologie. Service d’oncologie médicale et soins palliatifs, Pr F. Duffaud, CHU TImone Marseille