Camera obscure voir c`est toujours voir par un petit trou et peindre c

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Camera obscure voir c`est toujours voir par un petit trou et peindre c
Camera obscure
voir c’est toujours voir par un petit trou et peindre c’est lever le voile ou alors
le store et ouvrir une fenêtre, ronde, carrée ou en feuilles de trèfle, un look-out
pour laisser entrer la lumière, l’air et les images qui voltigent à travers, les ombres passantes,
plusieurs profils, plusieurs verts, une partie du monde et ses histoires,
une jolie chambre avec vue, elle remplace la promenade et le théâtre, le pire et le meilleur se
trouvent derrière. Reflétés et dessinés à l’envers sur le mur opposé ou bien dans les nuages
visibles d’une manière souvent d’une autre, les formes et les couleurs, le ciel retourné et le
soleil agrandi aux dépens de la lune, tout, comme un paysage en une chambre noire, le sloop
aérien en un éclair, une super boite à écho et des voix résonnant de loin en loin, au fond des
rêves on entend parler la matière qui imite toutes sortes de figures aussi nombreuses que les
feuilles de la forêt et les fleurs des plaines. Ni sommeil ni veille, des rêveries passées ou des
songes lugubres, un fâcheux ressouvenir lequel fabrique un genre de toile d’araignée sous
deux chênes verts ou au coin d’une fenêtre, un réseau de lignes courbes et droites, un
étonnant labyrinthe qui va partout, de la mer à la terre en été et en hiver, un jour égale 1 000
ans, un état second où la pensée flotte sur l’onde chavirant entre deux portes et deux eaux.
Elles bougent au-dessus en dessous, si flexibles passent d’une forme à la suivante, elles
s’évaporent plus que le mercure mais moins que l’eau de vie, celles du fleuve en brouillards,
d’un petit bassin, d’un lac irrégulier – un grand œil qui prend bien la lumière ou d’un océan et
avec elles des villes et des hommes, des caps et des montagnes, dans l’espace et le temps
s’amusant autant qu’un enfant, les nombres entassés, un chaos de chaos, l’ensemble
s’ébauche et s’évanouit à l’envi et à une vitesse infinie. Pour mieux revenir, ces images
fantômes, de belles effigies, les têtes privées de cou et les yeux de front, un masque qui
s’ouvre et laisse voir un deuxième visage puis un de plus, une foule sans nom, c’est une
sacrée mêlée générale, un méli-mélo sans orientation ni bon sens, n’importe quoi peut
arriver mais rien n’arrive pourtant car tout s’est déjà produit, les morts ne reviennent pas
mais leur secret si. Les ombres passantes et ce calme inquiétant, plusieurs profils et plusieurs
verts, les chimères et les monstres fantasques qui se plient et se replient, plus loin que l’Inde
et la Chine, de ce voyage obscur souvent on revient pâle et confondu
Suzanne Doppelt