Les D}au}îrs en med,ectne - Pratiques, les cahiers de la médecine
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Les D}au}îrs en med,ectne - Pratiques, les cahiers de la médecine
Lescnhiersdela medecine unpique DOSSIER tl o Les D}au}îrsen med,ectne T .- I RT IO1'| l'|A Dossier : Les pouvoirs en médecine 3 tA NÉBULEUSE DESPOUVOIRS Plaldoyer pour le pouvoir 4 Pouvolrs d'argent sur fond de mort 5 Pouvoirs obscurs mis en scène a Deux ou le contraire de un 9 Le pouvoir de dire oul - Le pouvolr de dire non lO Pouvolr quand tu nous tiens 11 Se retourner 13 En Chine comme ailleurs 16 Nous avons lu pour vous 20 Exproprier et réapproprier 2L Décider de son pouvoir sur la maladie 25 INERTIES,COLTUSIONS ET USURPATIONS Visages 26 Des pouvoirs à n'en plus savoir 27 Les prescriptions mode d'emploi 29 Pouvoirs masqués 30 Publlcité et. télé-médecine" Une mise en scène du pouvolr 32 Une justlve qui aveugle 34 Malgré I'Ordre, protéger et soigner 35 Non au contrôle des médeclns patronaux 37 A qul profite le crlme ? 38 Arrêt de travail légitime 3A Rôle des déterminants économiques 39 L'avis d'expert 40 CONTRE-POUVOIRS Vlsages 44 L'école du diabète 45 L'outil du partage 47 L'histoire des luttes de pouvolr autour de I'IVG 49 Comment trouver la bonne.. prise ,' ? 52 Le pouvolr des malades : mlrthe, danger ou utopie ? 55 Mise en scène 59 ElisabethMaurel-Arriehi Anne-Maric Pabois Anrc-Maric Pabois SyluinLagabricllc SylainCognaril Bertrand Riff Philippe Réfabert luan P. Kam.enaroait Jean-LucBoussard ChristianeVollaire Martine Lalande Sylai.eLagabriellc, CatherineJung AnræPerraut Soliueres Syluic Simon Patrice Mullcr ChristinePorcher Anne-lWarinPabois YaelincFrilay Martine Lalanile Martine Deuri.es Martine Dearips Pinrre Volouitch Chrktian Lehmann Pinrre 4., Martine Laland.e VincentColfuhe Euelynede Wildeman JoëllnBruneric Philippe Pi6narre Jean-Paul Gauilillière ElisabethMaurel-Arri,ehi Rubriques Édftorial 6 l Actu politico-médicale : Résister et construire 62 Lettre à un ami médecln catalan 63 Construlre une chatte éthlque de la Formation Médlcale Continue 64 Quelles économies ? 65 Un jugement décisif 67 lmages du corps : Le haut débit des télé-corps 69 lVG, trente ans après : L'avortement en ville, un progrès ? 72 Courrler des internautes 73 Courrler des lecteurs 7 4 Nous avons lu pour vous 7 5 Coup de gueule : trente ans après... le recul ? 76 Le médlcament : Montrer patte blanche 7A Un forum sous influence 79 Publicité pharmaceutique BO Santé publique : Des allergies tout en couleur A2 Aireurs, autres,.ffU-l*'#il*îL: :ffilï"îl; ; A6 90 ElisabethPénidc Diàicr Ménard. Maric Kayser Eli"sabethPénid,e Maily Denantes MoniqueSiraril MartiræLalnwle lVlarip-Jeanne Martin FrançoiseDucos,Patrù:eMullnr DenisLabaylc PhilippeMasqueli.er Luc Beaumadi.er Jean-PierreLellouche Anni.eLobé JacquesRichaud Marin-ChristinePouchelln t t Les pouvoirs en médecine le pouvoir en médecine, c'est aujourd'hui le penser au pluriel, car le .. pouvoir médlcal ', n'est plus lsolé, mais il s'articule et se <onfronte avec d'autres pouvoirs plus ou moins occultes que nous allons estayer l-enser de mettre à jour. Bien sûr, il reste encore l'intime de la relation entre médecin et patient, un pouvoir lié aux enjeux de vie et de mort, fait selon les cas d'humanité ou d'arrogance. Mais le pouvoir médical a changé, il a reculé pour de bonnes et de moins bonnes raisons. Les bonnes, on les connaît, ce sont les combats d'associations d'usagers en lien avec des professionnelr minoritaires autour, par exemple, de la contraception, du VIH ou de l'amiante. Les moins bonnes, elles sont Ià masquées, mais redoutablement présentes, ce sont les collusions de ceux qui font de la médecine un marché économique et un espace de mystification pour toute la société. Qui sont les acteurs de cette usurpation ? Comment cela retentit sur le soin et la société ? Comment se positionnent les soignants ? Quels Gontre-pouvoirs peuvent s'élaborer ? Voilà les questions que Ge numéro veut poser. Ceur qui aujourd'hui influent contre le soln, ce sont les firmes pharmaceutiques, les technocrates qui décident à mille Iieues du vécu des gens, les gestionnaires qui ont une vision comptable à très couft terme, les politiques qui veulent privatiser la Sécurité sociale, les agsureurs privés qui profitent l'institution du déremboursement des soins, judiciaire qui croit pouvoir se substituer à l'absence de dialogue et de réflexion collective. Voilà pour le soin. Mais il y a aussi tout le champ de la santé, en Gestemps où la société sublt ou tolère une dégradatlon des <onditions de vie et de travail de tant et tant de gens. Le pouvoir médical serait aujourd'hui de faire de la santé publique, de témoigner non seulement contre la privatisation du soin, mais aussi contre la dérlve Iibérale qui Gassetoutes les solidarités. Dans la violence des rapports de force actuels, où l'on voit des professionnels et Ie gouvernement troquer Ia diminution de l'accès aux soins contre la liberté des honoraires médicaux, la mobilisation des soignants s'impose pour rassembler tous ceux qui croient encore aur valeurs de leur métier. Mais surtout, il existe aussi des contre-pouvoirs chez les usagers qul essaient de défendre une autre conception du soin et de la santé, citoyens ou associatlons de malades, mutuallstes, syndicalistes, militants du mouvement social, qui cherchent à confronter leurs points de vue, et à unir Ieurs efforts. Pour ensemble faire de la médecine et de la santé un espace de réslstance. Elisabeth Maurel-Arrighi Plaidoyer pour le pouvoir t l i s a b e t h Reprendrele pouvoir l ' , | a u r e l - A r r i g h iAujourd'hui,si les soignésont Médecingénéraliste culturelles, lesinjustices I'histoirepersonsociales, des reprochesà nousfaire,ce n'est plus tant l'arrogancebrutale que la cécité et la complicitévis-à-visd'autres pouvoirsplus ou moinsoccultés.Et pour lessoi- nelleet la grandeHistoirese sont imprimésautrefois et s'imprimentencoredansle corps. Celase tissedifféremmentselonlescas.Biensûr, gnants,le pouvoirà reprendre,c'esttout simple- cela fonctionne mieux quand il s'agit d'une pathologie connue qui laissedisponible pour ment celuide fairevraimentnotre métier.Contre ceux qui empêchent I'accèsaux soins, contre entendrele contexte.Quand, par ignoranceou par fatigue,j'ai fait une erreur,continuerà être ceuxqui organisentdesconditionsde vie qui rendent malades,contre ceux qui se moquent des inégalitéssocialesde santé et de soins,contre médecin,c'est de savoirprivilégierle lien à la toute-puissance du savoir,en reconnaissant ma ceux qui veulentque I'organisation du système de soinsprivilégiele paiementà I'acteet la tech- des patientsqui ont été malmenésenfantset qui défaillancepour tenter d'y pallier.Parfois,pour répètentdes impossibilités de s'occuperd'eux- nique, contre ceux qui acceptentque l'épuise- mêmes,il s'agitde formuler" halteà la maltraiment soit la rançondes soignantsqui choisissent tance ", pour qu'ilspuissentsortirde leur paralyd'écouter,de faire de la préventionet de la coorsie.Parfois, ce sont des personnes qui se méfient dination,et de continuerà se former. Le pouvoir de la rencontre tellementde l'emprised'autruiqu'ils ont besoin de mettre en échecleursinterlocuteurs, et là le pouvoirestde savoirreculeret d'évoquerle para- Pourtant,la rencontreentre le soignantet le soi- doxe de la coexistence du désird'autonomieet gné peut être un espaceprécieuxde résistance. A quelles conditions et comment ? Le pouvoir médicaltient par des contrairesqui s'adossent : d'aide.Maisaujourd'hui,ce qui freinele soin,ce pour le médecinentre savoiret humanité,entre maladies,que la réalitésocialeactuelle.Et là, la certitude et humilité, pour le soigné, entre force du lien thérapeutiquepeut participerau mouvementpour changerleschoses. confianceet exigence.ll est donné au médecin par le patient,à conditionque le médecinveuille sont moins les complicationspsychiquesdes gens,lesdramesde leurenfanceou la gravitédes bien à la fois le prendreet le partager.ll s'agitde lloutil du témoignage m u l t i p l e s a l l e r - r e t o u r sd, ' u n e d é m a r c h e t a n t Actuellement,lesmédecinssont condamnéssoit cognitivequ'affective et politique,où soignantet soignéémettentdes hypothèses à partirde leurs à renier leur mission,soit à être paralysés dans l'impuissance ou l'épuisement. A moinsqu'ilsne savoirs réciproques,pour mettre en place des fassentle choix de reprendrele pouvoir et de décisionsdiagnostiqueset thérapeutiques,et trouverensembleles recours.C'est parceque je m'engageque je peux réfléchiret aussiexiger témoigneraux côtésdessoignés. oue l'autrese mobiliseaussi. Dansleursdifficultés de santé,lesusagers, eux,se heurtentau silencedespolitiques.Pourreprendre le pouvoirsur leur vie, ils sont en droit d'exiger Alorspeut se dévoilerl'arrière-fonddes problèmes de santé,pour cherchercomment lesaléasde la que lesmédecinsrenoncentà la passivité, repren- génétique,les carencesmatérielles,affectiveset tion de réponsesindividuelles et collectives. PRATIQ.'UES nent la paroleet participentaveceux à l'élabora- R é s u m é: L a s a n t é e s t , p o u r n o u s t o u s , u n e n i e u d e v i e f a c e à l a m o r t . M a i s c ' e s t u n m a r c h é l u c r a t i f p o u r l e s p o u v o i r s d ' a r g e n t q u i d i f f u s e n t , s a n s c o n t r e - p o u v o i r ,l e u r s p r o p r e s d é f i n i t i o n s n o r m a t i v e s . R e p r e n d r e l e p o u v o i r p a s s ep a r l a r é a p p r o p r i a t i o n c o l l e c t i v e d e s d é f i n i t i o n s d e l a santé. Ponvoirs d'argent sur fond de mort . Le pouvoir médical ? Heureusementque vous en sentationsde la médecine varient suivant le ovez,sinonqui pourrions-nousoller volr 7 Parolede patiente: le pouvoirde mon médecinrelèvedu (ellem'en a donnédes savoirque je lui reconnais valeurset les choix pris par le pouvoirpolitique temps, les sociétés,les individus,les échellesde preuves),et que je n'ai pas. o Lepouvoir de foire des ordonnances? Non merci, Sur scène, des figurants aux rôles interchangeablesau gré des décideurs,des rôlesmajeurs masqués,des pigeonsplumés.Tout est jouable gordez-letje n'en veuxsuftoutpo, je soigne.Parole mais, en médecine,le pouvoir est d'argent sur d'infirmière:le médecinordonne un traitement. l'infirmièresoigneun malade. . Docteur,qu'est-ceque vousdécidezet à quelspé- fond de vie et de mort. cialistevousm'envoyez? - Ce n'est pos urgent, on Poserla questiondespouvoirsen médecine,c'est voit ensembleles problèmes,vous décidezensuite. Négociations,transmissions d'informations,avis tout d'abordproposerun cheminementdans ce p a y s d e s i l l u s i o n sp e r d u e s o ù s o i g n a n t se t Des pouvoirset des possiblesen médecine donnéset demandés: c'estune grandepartiedu face maladessont de plus en plus impuissants temps relationnelen médecinegénérale,une aux pouvoirsexercés,sousdes flots de discours par des puissances médiatiquesanesthésiants, attentionqui prend de l'énergieet beaucoupde temps. . Le vaccincontre lo rage, à la télé, ils ont dit qu'il était nocif et inutile,je ne veuxpos le faire, donnezmoi un certificot,docteur- Non, pos d'occordpour pour lesquelles ll y a certes tout est marchandise. le certificot.On voccinesi on o eu un contoct. Lo pharmaceud'un petit groupe (multinationales tiques, consortiumbancairesvia les assurances rage, c'est la mort assuréedès les premierssymp- le verbepouvoirqui, déclinéselonet à toutesles personnes, Maisles ouvrede largespotentialités. pouvoirs? Pouvoirconfisquéau profit exclusif privées,conseilde I'Ordredesmédecins,syndicat tômes: si votre fille se fait baverpar un chienenrogé, vousdéciderezquoi ? Parolede médecin : j'ai des patrons...)opposéau pouvoirpartagéentre du mal à exercerun pouvoir,mais le droit de refusersi le motive. de soins.Pouvoirabsolu soignantset utilisateurs d'un médecinou d'un politiquequi, par rétention C e s r é f l e x i o n sa p p a r e m m e n t c o n t r a d i c t o i r e s d'information,exige soumissioninconditionnelle montrentque le pouvoirmédicalen soi n'existe ou pouvoirsconsentispar lesdeux protagonistes, pas,il y a des pouvoirsen médecine.Lesrepré- A n n e - J ' | a r iPea b o i s maladeet médecin. PRATIQ-UES Médecin généroliste Des pouvoirsincertainsface aux enjeux de vie et de mort Devantla maladieet la mort toujourspossible,le jeu de rôlesestinégalentrele médecinet le malade : l'un est malade, l'autre non. Cependant, contrairementà ce qu'il croit, le médecinn'a de té. Desviatiquesdansleurshistoires de malades? Certes,maisje suiset restevigilante: ne pas me laisserallerà prendrele pouvoir,même et d'autant plus s'il m'est offert (la maladierend fragile, dépendantet je veille pour deux). Bien sûr, s'il s'agitd'une croisadecontre le pouvoirdu corps pouvoirque si le patienty consent! Pouvoirs réels médicaldans laquellemon interlocutrice s'enga- ou supposés,faits de compromis de part et ge (en me créditantde ce genrede pouvoirabsolu), alorsje croisele fer : si elleveut s'emparerde d'autre, de nécessairecroyance en un pouvoir illusoiresur la mort, ce face-à-face supposelibre ce pouvoirexclusif,qu'ellele prenne,ailleurs, cela j'ai choix et confiance,échangessansdépendance, fait longtempsque choisimon camp. Depuis sansprisede pouvoir. le début de mes études,ce monde médicallà m'estétrangerainsique, confisquépar une caste, Du côté du potient, choix relatif et pouvoirscrédités ce pouvoirlié à un savoirdit supérieurpour auto- Qui choisitle médecin,initiela relationet parfois I'arrête? Lui, le patient-sujet.Ses raisons? S'il lustifierleur hiérarchieet code de " benns5trrtiques", savoirdénaturécarseulementtechnique peut choisirsansproblèmed'accèsaux soins,ses et dépouillédu savoirsoigner.Parcontre,s'il ne s'agitpas de pouvoirabsolu,maisde reconnais- raisonssont forcément subjectives,faites de son histoirequi, depuis l'enfance,a stratifiéses renmédecine.Lacompétence,il la décrètedu fait ou qui sont miennesdu fait de sancedes possibilités ma profession et de ma personne-médecin, alors, j'accepte: j'ai un savoirqui me donne la possibi- malgré le diplôme, ou/et les qualitésrelation- l i t é d ' a i d e rà c h e m i n e ro u à d i a g n o s t i q u eurn e nelles.Malade,atteint dans son intégritéet sa croyanceen I'invincibilité, it saitqu'il pourraalors maladie,et parfoisme donne le droit de prendre le pouvoir: dire non sansconfondreautoritéet se confierau médecinde son choix aprèsI'avoir o vitalement crédité des pouvoirsnécessaires : " une santéinaltérable,le pouvoirde guérir grâce à sonsavoir,ou, au moinsgrâceà son pouvoirde autoritarisme. parole; I'aiderà comprendreet intégrersa maladie dans son histoire.Le pouvoir inaliénabledu d'accèsaux soins,souscouvertde libéralisme en matièrede santé(voir le dépècementde la pro- médecinaux yeux du malade,c'estdonc ce pouvoir de vie et de mort oui est inhérentà sa fonc- tectionsolidairedevantla maladie) contresaveclesmédecinsen représentation de la tion. Des pouvoirs obscursface au marché du soin Les pouvoirspublicsont aggravéles inégalités Egalet libreaccèsde tous à dessoinsde qualité? Non, pas dans des zonesruralesdésertifiées ou certainesbanlieuesoù il n'estpas de choix pos- Du côté du médecin,choix relotif et pouvoirsincertoins sible réciproquementaccepté entre patient et soignants: médecinsgénéralistes et infirmières (rares,éloignés,pas de difficilementaccessibles Cespouvoirsdont il estcrédité,encorefaut-ilque le médecinlesaccepte! De fait,je me sensenco- transportsen commun), longsdélaisde rendez- re paralyséedans ma fonction et emprisonnée vous pour certainsexamenscomplémentaires. dans ma personnequand on m'accolele mot pouvoirrr, moi, médecinde profession qui suis " aussi sujet d'une histoireface à la médecine, médecin-sujet. Oui, ils m'engluent,ces pouvoirs Liberté tarifaire ? Accordée ou que s'accordent certainsmédecins,à qui profite-t-elle ? Pasaux nombreux sansemploi ou aux bas revenusdu travailprécaireintensifiéqui ne peuventse payer dont mes oatientsme créditentcontrema volon- ces tarifspeu rembourséspar la Sécu,mais qui PRATIQUES rendent inaccessibles les cotisationscomplémen- Le morchéde lo sqnté est entre lesmoins de pou- privées.Ne parlonspas des tairesaux assurances soinsdentaireset prothèsesauditives,ni des per- voirs de plus en plus offichés Le pouvoir médical est limité dans sa pratique sonnesâgéesdont le maintien à domicile, " " théoriquementidéal, relèvede l'épuisementde par des pouvoirs gestionnaireset marchands a u x q u e l sl a s o u m i s s i o e n s t i n c o n d i t i o n n e l l el e, s tous et de la retraite.Un fossése creuseentre les discourséthérésdes politiquesau pouvoir et la pouvoirsen place livrant la protection sociale, l a s a n t é a u t r a v a i l ,I ' h o s p i t a l i s a t i oent l e s o i n réalitépossiblesur le terrain. proprement dit aux intérêtsprivés : les multi- Difficultésd'exercicedes médecinsgénéralistes? nationalespharmaceutiques,les banques vro Le terrain des soins où ils exercent est à des les assurancesprivéeset chaînesde cliniques v P RATIQ*U E S Le pouvoir, une question de définition la mort fait partiede la vie, la maladiefait partie Finalement,qui, actuellementdans le domaine de la santé,décide des normes définissantl'état d e l a s a n t é . Q u e s t i o n d ' é q u i l i b r ei n d i v i d u e l (. je me sensen bonne santécar j'arriveà main- de santéet l'état de maladie? Qui a confisqué pour son profit I'artd'aménagerlesnormes,pas- tenir un certainéquilibrequi est ma définition sant même de la norme au normal ? Le pouvoir suprêmeappartientà qui s'estadlugéle droit de environnementadéquat,et questiond'équilibre actuellede la bonne santé possibledans un "), entre lesdroits individuelset lesdroits collectifs. définir ce qui est normal (car répondant aux normes de la santé) et ce qui est anormal (car Alors, quelles définitions de la santé voulons- non en bonne santé,donc malade).Soumettre toute une sociétéà ses propresdéfinitionsn'est nous ? Quelle sociétévoulons-nousconstruire ? La place,modeste,des médecinsest peut-êtrelà aussi: jouerle rôlede sentinelle faisantcirculerles qu'une action < force de vente > : les médias achetésdistillentla définitionde la santéet nous tous qui risquonsde mourir un jour (gouvernants, élus politiquesde tout bord, soignants, maladesqui s'ignorent)adhérons,contaminés. savoirs,collaborer,dans le partage consentides pouvoirs,avectous ceux qui æuvrent sur ce terrain de I'humainsanslimite entre soin, hygiène, social.ll pourra ainsi, modeste,participerà la Soumisà qui ? Sansmême le savoirnousentrons réappropriationcollectivedes définitionsde la alorsdans une logiqued'exclusion: il n'y a pas santé,aux choix de politiquesde santépublique une, maisdesdéfinitionsdu normalet du pathologique. Définir la santé comme le bien, c'est qui en découlent.Refuseraux pouvoirs marchands le pouvoir exclusifde s'appropriernos définir la maladiecomme le mal et releter,fautif, celui qui n'estpas conformeaux critèresédictés corps, notre vie et notre mort, c'est refuserles par ceux qui exploitentnotre peur de la mort pour avoir le marchéde la santé.De même que normesqu'ilsont confisquées, c'est devenircollectivementacteursresponsables de notre santé et revendiquerleur garantiepar l'Etat. Pouvoirs obscurs mrs en scene \ A n n e - l ' | a r iP e abois Médecin généraliste Un bureau étroit rectangulaire.Contre un des Dresséentre patientet médecin,un rempartserré d'objets divers (stylos,colifichets,porte publici- longs côtés,le siègedu docteur.En face, à distance du bureau, mais approchable,un siège. Un troisième est collé contre le petit côté tés), ferme les trois côtés du bureau, à hauteur gauche. des stocksde médicaments. Médecin et patient sont au même niveau (en hauteur).Ce dernier choisit sa place selon ses Pouvoirsobscursen médecine: médicamentsfétiches, barrière informative " ". Un docteur diplômé homme-sandwich.Un patient qui, s'il besoins: collé au flanc du médecin,à son côté (sécurité affective),face à face plus ou moins proche(autonomie).Ouverture,dialogue. PRATIQ.UES d'yeux.Surle mur d'étagèresderrièrele médecin, n'est pas grand, s'imprègnedu même slogan. Tout finit par passer. Deux ou le contraire de un Ellea un joli nom, ma " maladie" : thyrorditede Hashimoto.C'esttoi qui me l'asdit. Tu me souristoujoursquand je rentredans ton J'ensuistoujourslà : à cette idée que je peux si l'on me donnedesclés.Jeveuxdire : il y a ce que tu sais,il y a l'idéeque je m'en fais,ce que je peux cabinet,comme à tous ceuxqui viennentte voir, mobiliseren moi d'énergies.Resteà savoirvers Tu as mon dossierétalésur ton bureau d'ailleurs. et tu m'expliquesle sensde cesexamensque je quoi et c'estlà que le dialogueest important.Ce ne saisdécrypter.Ce que tu as à me dire aujourd'hui n'est pas très agréable.Les résultatsde la dosagede l'informationutile est ton domaine subtil.ll y a aussice que je ne te dis pas,non par malice,maissouventparceque je n'y pensepas. et tu me dis pourquoi. La confianceest danscesblancs.Elleest indicible et inestimable.EÇ de ce fait, le risqueest, du On a toujoursété ensembledepuisle début. le saisque tu ne me dis pastout, pastout de suite Cette attitudete fait peur ? Tu ne m'en as jamais en tous cas,i'ai pu le vérifier.Maistu m'en dis suffisammentpour que je soisle plustranquillepos- rien dit, maisle pose la questionpour toi. Dans cette sociétéqui aspireà l'innocuité,c'estpresque Ce " je sibleet ce calme-làme sembleessentiel. saisque tu sais" marchedepuisdouzeans.Tu me parlesdes enjeux,tu me dis ton sentiment,je te racontecommentje me sens,on discute,je t'in- inimaginable ce contratlà, non ? Et pourtant" l'ai l'innocencede penserque l'impermanence terroge et on décide. Ce o on " est important pour moi. C'estun peu comme si tu me rendais la de techniquemais a à voir la reconnaissance, considération, l'acceptation duelled'une réalité. Tu me regardeset je me sensvue, appréciée,non cyto-ponctionsont douteux, mais tu t'interroges mon corps.C'estsurtoutque tu me signifiesque je ne suispas,dansce chemin,un objet maisun moinsil me semble,mutualisé. même de la vie, la guérisonn'est étant l'essence pas seulementune questionde médicamentou pas comme une somme, mais comme un tout. sujetcapablede prendresa part. lci, dansune cultureoù le touchersedésapprend, J ' a ic o n n ul e s i l e n c ea b s o l u c, e l u id a n sl e q u e lo n s'étiole,celui dont on ne s'affranchitque si l'on et la vue se stéréotype,cette bienveillanceest est assezsoutenupar ailleurs; celui dont on se Maispasimpossible. sort malgrétout, maisnon sansmal. Jet'ai parléparfoisde gensqui m'étaientproches et ton attituden'a jamaisvarié.Ce qui m'impor- Je ne passeraipas sur le billardfinalement.Pas que tout de suite,lesexamenscomplémentaires tait valaitle coup qu'on échange. Peut-êtrele faudra-t-ildans d'accord là-dessus. un an ? Peut-êtreplustard, peut-êtrejamais...va Jecroisque tu m'aimesbien et c'estréciproque. ll y a dix anstu m'asexposé,dessinà l'appui,ce qui m'attendait.Ce que j'auraispu craindre,je réconfortante. ldyllique, ce deux ? Peut-être. et nous sommes tu as prescritssont rassurants mainsavoir.Maissi cela s'étaitavérénécessaire tenant,nousétionsprêts. l'avaisen main. Jene me rappellepasavoirsouffert,je ne me souviensoas avoir douté. Titre emprunté au livre d'Erri de Luca, nouvelles Callimard,ianvier2004. PRATIQ-.UES lylvie Lagabrielle luriste Le pouvoir de dire oui Le pouvoir de dire non tylvie (ognard OUl, je vais examiner le grand frère de Léa, même s'il n'a pas de rendez-vous, il est malade Médecingénéraliste aussiet c'estsa mamanqui me le demande,elle NON, je ne suispasd'accordpour vous prescrire ce médicamentpour maigrir, dont vous avez entendu parler. n'a pasosé le demanderà la secrétaire. NON, mois pourquoi voulez-vousmaigrir ? le peux OUl, porce que c'est plus simpleoinsi. Léo n'o pos fait exprèsde o tomber moladeet sa momon n'o " personnepour gorder Léopendant qu'elle romène- peut-être vous aider à vous aimer telle que vous êtes,c'estmoinsdongereuxque de prendrece médicament... rait Léoà lo consultotion... + 10 minutesde retard. NON, je ne veux pas vous réinscrirece médicament prescritpar le spécialiste sur votre ordon- OUl, je veux bien vous rajouter du paracétamol sur votre ordonnance,même si je vaisdevoir le nance. rajouterà la main, puisquel'ordonnanceet son duplicatasont déjàsortisde l'imprimante. OUl, porce que Modome Multipatos, est bien que lesoutres,pas moinsdangereuxque lesoutres,ou capoblede soignertoute seule sespetites douleurs, NON, je ne suispasd'accordpour que vousopé- pendant trois mois ovont son prochain renouvelle- riezmonsieurCancerpulmo. ment d'ordonnonce. NON, porce que nous avons longuementparlé ensemblede sa moladieet que so famillecomprend + 2 minutesde retard. OUl, je vaisvous donner explications et avissur vos résultatsd'analysesque vous me tendez,l'air penauden regardantlesautresqui attendent. OUl, porce que vous êtesinquiet, et que vous vous êtes déplocéjusqu'ici et que si vous n'étiez pos NON,parcequej'oi apprisqu'il n'estposplus efficoce controire,et qu'enplus il coûtetrèstrèscher... sonpoint de vue. Noussouhoitonséviter des souffroncesinutiles,je m'occuperoide progrommer Ia rodiothéropieavec le cancérologueet les soinspalliotifs à domicilequand cela seranécessoire. NON, je ne veux pas vous prescriredu Nopron venu, votts m'ouriez téléphoné... Ah bon, vous n'ovezplus le téléphone,il a été coupé... pour fairedormir votre bébé. + 10 minutesde retard. votre fatigue. OUl, entrez dans mon bureau pour causerun peu... NON, je ne reçoispaslesvisiteursmédicaux,non, jamais. OUl, porce que vousovez les yeux rougeset qu'on NON, mols je n'oi rien contre vous en tont que devine que vous avez beoucouppleuré, que c'est maintenant et pas demainqu'il fout vousécouter. qu'être humoin, vousm'evez l'air foft sympathique + 25 minutesde retard. pas sympothiquedu tout. PRATIQ-UTS NON, maisporlonsde sestroublesdu sommeilet de et c'est votre trovoil, mais votreemployeurne m'est Pouvoir quand tu nous tiens Tout se complique Un jour une Africaineoriginairede Guinée,peule B e r t r a n dR i f f Le médicalaurait un pouvoir,supérieurà bien d'autres.Ce sont souventles médecinsou ceux et musulmane, à qui j'annonceque je seraiabsent la semainesuivanteme dit : o Tu ne peux pas Médecin généraliste qui aimeraientl'êtrequi aimentà pensercomme partir, tu es notre sorcier Le petit peuple gui". cela.Deuxoriginesà cetteévidence: le médecin est un bourgeois,bien représenté aux chambres néen m'annonceainsi qu'il avait remarquéque j'avaisdespouvoirspeu ordinaires. ll leursemblait élues,sénateuret député.De plus,c'est un soi- évidentqu'il fallaitrendrepubliccet état afin de gnant,un homme à part,un surhomme,presque l'authentifier.l'étais nommé sorcier. Le petit peuplea le pouvoirde nommer.Moi je n'avaispas demi-dieu.Lesdieux et demi-dieuxabusenttoujoursdu pouvoirque leshommesleur confèrent. Le médecin,de même, profite du pouvoir dont il est investi pour remplir sa mission,et en tire le pouvoir de refuser.Une telle nomination s'impose. l'ai bien essayé,au nom de la raisonpoli- des médecinsprofitantde leur pouvoirséduisent Petitpeuplene nomme pas lesprinces, " les stars, les demi-dieux, il vont en profiter. " Peineperdue,j'étaisnommé et du coup, le réali- et copulentavec la femme de l'autre,venue le saisle peu de pouvoirque j'avaisà convaincrele consulter! C'est un standardchez les dieux et petit peupleque sesyeux l'avaienttrompé et que demi-dieuxque de profiterdu sommeilde l'humaine pour la séduireet user de ses charmes. le pouvoirqu'il me concédaitn'existaitpas,que j'étaisun humain comme les autres.Autre rétablissementde l'ordre des choses,moi, l'athée,le non croyant, le matérialiste,voilà que je faisais quelquemesquinprofit. Quelqu'unm'a dit que Certainspensentque la femme de l'autre profitant de quelque pouvoir, avantage et autre, séduiraitle pauvredemi-dieuqui en perdraittous sesmoyens,sesdistances,sa raison,sa déontologie. Cette réflexiond'homme posela questionde tique : partie d'une confrérie au pouvoir surnature., impossible ! ll y avaittromperie.Maisvoilà,le petit l'autorité. peuple peul est tenace, coriace, impossiblede débattre,c'estcomme cela,je suisleur sorcier.lls A partir de quand je faisautoritésur toi et à partir viennentvoir le sorcieret non le médecingénéra- de quand ton consentementest-iléclané? ll nous faudra revenirà la questionde l'autorité. quoiqueje ne fassepasautoritéen la matière. c'estlà que j'ai des pouvoirs.Maisdeuxièmesur- populairefait qu'il vaut mieuxconfiersa Lasagesse santé,sa vie, lessiensà quelqu'undont on pense qu'il détientdes pouvoirsen ce sens,des pouvoirs supérieurs à ceux de ma mère.Elleest la première liste.On vient me voir pour faire venir les bébés, prise,voilà qu'investipar la tribu, elle me posait d'embléela questionde la permanencedessoins: tu ne peux paspartir ! Certes,j'ai despouvoirssurnaturels,c'est décidé,sansdébat possible,mais du coup, ie ne peux plus partir,assignéà résiden- bien sut reinede l'urgence,de l'alcool $uérisseuse de menthe,de l'aspirine du Rhône,de l'imposition ce ! Ainsil'on m'autorised'être détenteurde pouvoir, maisil y a des contreparties.Dont la premiè- desmainset de quelquechansonantalgique. re seraitla disponibilité. PRATIQTUES 11 Depuisquelquestemps, une partie du monde l'équilibre et respecter le choix de certains médicaltentede négocieravecla société: garder les pouvoirsqui nous sont conférés,indispen- d'entrenousprêtsà déléguertous lespouvoirsà l'autre ? sablesà la missionoui nous est confiée.Mais nous ne voulonsplus des obligationsliéesà ces Contrôle continu pouvoirs.Les médecinsne sont plus décidésà faire des journéesde 10 heureset des semaines de 45 à 55 heures.lls se tournentversle salariat, Je trouve que ce texte de Deleuze datant de 1990, gardeune actualitéet donne à réfléchir. . Foucaultest souventpensécomme le penseur les 35 heuresavecgardesrécupérées.La médeci- des sociétésde discipline,et de leur technique ne est de moinsen moins l'uniqueraisond'être principale,l'enfermement. Maisen fait, il est l'un du médecin.Maisvoilà,il me sembleque l'abandon de la permanence,du sacerdoce,du don, des premiersà dire que lessociétésdisciplinaires, c'estce que noussommesen train de quitter,ce des prérogatives,entraîneune perte des pouvoirs que et une déconsidération. lmpossiblede revendiquer d'être un travailleurcomme lesautres,mais sommes plus. ayant des pouvoirspas comme les autres. entronsdans des nous sociétés ne déià Nous oe La question de l'autorité qui contrôle, Revenons à la questionde l'autorité,je travaille fonctionnentnon un jour par semainedansle serviced'infectiologie plus par enfermede Lille,je suisattachécomme dit joliment ma ment, mais par fichede payeà ce service. Jene travailleque dans contrôle continu le champdu sidaet ce, depuis15 ans.Une partie et de mon travaildevenantde plus en plus technique,protocolaire,nécessitant des misesà jour tion instantanée. et un travailbibliographique important,je ne me et d'hôpital: cesinstitutions sont en crise.Maissi sentaisplus ni le courage,ni le temps,ni l'intérêt à ce travail.Aussije décidaisde démissionner et ellessont en crise,c'est précisémentdans des combatsd'arrière-garde. Ce qui se met en place, allaisvoir Yves,le patron. ll m'a répondu que, à tâtons,ce sont des nouveauxtypesde sanction, concernantles protocoles,les associations théra- d'éducation, de soin. Les hôpitaux ouverts, les peutiques,la complexité,cela nécessitaitun avis collectifet que la réuniondu jeudiétait le lieuoù équipessoignantesà domicile,etc., sont déjà mon incompétencetrouverait des aménagements.Lesjeunessont capablesde fairela biblio- l'éducationserade moinsen moinsun milieuclos graphieque lesvieux n'ont plus le temps ni l'envie de faire.Cela leur donne du pouvoir.Puisil me dit que, lui étant carré et dirigiste,et moi communica- Biensûr,on ne cessede parlerde prison,d'école apparusdepuislongtemps.On peut prévoirque se distinguantdu milieuprofessionnel comme un autremilieuclos,maisque touteslesdeux disparaîtrontau profit d'une terribleformation permanente,d'un contrôlecontinus'exerçantsur l'ou- rond et laxiste,il lui semblaitimportant pour l'harmoniedu serviceque je resteet garde ma vrier lycéen ou le cadre universitaire.On essaye consultation. ll existedonc une clientèlequi va là où il y a l'autorité, et une autre là où elle fait que c'est une liquidation.Dans un régime de contrôle,on n'en a jamaisfini avecrien. " (1) de nousfairecroireà une réformede l'école,alors défaut.ll existeune clientèlequi désiredes vérités sansle doute, et une autre qui acceptedans le doute d'approcher la vérité. Faut-il garder 12 P RAT IQ*U E S 1. CillesDeleuze,Pourporlers : 1972-l 990, Leséditions de Minuit,septembre2003. Résumé: Pour aider ceux qui sont aux prisesavec des abus de pouvoir, un psychanalyste p r o p o s e d e u x t y p e s d ' o u t i l s . L a c o m p r é h e n s i o nd e p h é n o m è n e s v é c u s d a n s I ' e n f a n c e d u p a t i e n t , l ' a b s e n c ed e " c a m p d e b a s e " l i é e à l ' i m p o s s i b i l i t éd e s e r e t o u r n e r c o n t r e u n p a r e n t . E t I ' e x p é r i e n c ev é c u e a v e c l e t h é r a p e u t e s i c e d e r n i e r s a i t r e c o n n a î t r e s a p r o p r e d é f a i l l a n c e . Se retourner Pratiques : Les médecins ne savent pas c o m m e n t a i d e r l e u r s p a t i e n t s m a l a d e sd u qui n'ont pas étê Ceux qui portent des blessures pansées,ceux qui ont participéà dei événements Intretien avec Philippe Réfabert f a i t d ' a b u s d e p o u v o i r , c o n t r e l e s q u e l si l s n'arrivent pas à lutter, surtout quand ils qui excèdentla possibilité de penser,par exemple trop humainequ'a été la folie meurla catastrophe Psychonolyste sont démunis.Comment peut-on résister à un abus de pouvoir ? trièrede la guerrede 14 pour tant de nosgrandsceux-là peuparentsou arrièresgrands-parents, vent faire<<comme si de rien n'était". Maisleur Philippe Réfabert : Des millionsde gens sont dans I'incapacitéde dire non, ne saventpas se retournercontre celui oui exerce un abus de corps, ie préfèrece terme à celui d'inconscient, et s'ils échappeà cettevolontéde méconnaissance que la lacune signifiera ont un enfant,leur corps pouvoir, par absenced'assiserelationnelle,par absencede camp de base.Que ce soit du fait porte la matricepsychiquedans laquelleils ont d'un exil, de conditionssocialesprécaires,ou encore des effets sur eux d'une catastrophe au anciennequi a affectéun de leursascendants point de se répercutersur la façon dont ils ont été portés. J'utilisel'imagedu camp de basepour me figurer le Moi précoce.Un camp de baseest bien délimité, bien gardé et on y trouve tout ce qui est conçu cet enfant. Dans la relationprécoce,c'est par une dysharmonieentre les rythmesdes différentslangagesque l'enfantseraaffecté. Si un tel enfantne trouvepaschezl'autreparent un témoin capablede le soutenirdans sa quête qui ne témoignepas pour lui de de consistance, la réalité de sa sensation,cet enfant n'a pas d'autre issueque d'avaler,d'avaliserla réalité tronquée,la dysharmoniequi lui est proposéeet tanceet leslimitesdu Moi dépendentde la qua- Lecamp de basede ces qui cacheun impensable. personnesest comme mal gardé, une porte le ferme,maiselle n'a pasde serrure.Parfoisce site lité du portage dont l'enfant bénéficie.Quand tous leslangagesde celuiou cellequi assureune estcommesaccagéet l'enfantse retrouvehabiter un siteouvert à tout vent, sansporte ni fenêtreet fonctionmaternelles'écoulentselondes rythmes harmonieuxentre eux, l'enfantse constitueun de se retourner seradès lors dans l'impossibilité sur son parent,d'exigerce qu'il ne sait pas lui site intérieur qui lui donne un sentiment de pour s'engagersanstrop de confiancenécessaire être dû. fraisdansl'explorationdu monde. L'enfant,le prisonnierle récit de deux faits divers, pour reconstituersesréserves, se reponécessaire ser,voirese réfugieren casde besoin.La consis- De Freudà Kafka- lJorigine en procès, Ed.Colmann-Lévy; 2001 septembre Annie Leclerc rapporte dans son beau livre PRATIQ*UES 13 de deux attentats.Dansle premier,une jeunefille est violée par trois jeunes loubards dans un passagers wagon de RER.Plusieurs assistent à la imaginairebon, dévouéet dépourvude tout sentiment négatif. scènesansbroncher,maisle trait sur lequelinsiste Annie Leclerc,c'est que la jeune fille n'a pas Vous pouvez reconnaîtrevos défaillanceset, en même temps, vous pouvez dénoncer les coups crié. Annie Leclercoppose cette scèneà celle de la jeune fille dans le métro qui s'emparede la qui frappentou ont frappévos analysants. main qui tente d'abuserd'elle,la lèveen l'air en disant: " C'està qui cette main ? > et provoque le rire dans le wagon et la confusionde l'agres- Je ne suispas sûr que le terme de dénoncersoit pertinent.Jepréfèredire que je peux traduire,lire, dévoilerlesfaits,faire apparaîtreles mouvements de l'âme qui jusque-làétaient, chez tel ou tel, seur.le fais l'hypothèseque la premièrea appris trèstôt à taire l'impensable, un impensablequ'a interditsd'existenceou censurés. Jepeux révélerà qu'il resteaveugleà la haineque lui tel analysant subi quelqueparentet la secondeau contrairea porte un proche qui lui dit " ie t'aime " alors qu'un geste contredit aussitôtcette parole. Un apprisà se retournersur un parent qui n'exprimait pas de demandetacite de protection. À la questioncommentun médecinpeut-ilaider son patient-victime,je répondrai cursivement analysanta mis des annéesà comprendrele fonds que dispense de véritéque recèlel'enseignement que c'estpar la compréhension et par l'expérienj'entends l'analyse ce vécue.Parcompréhension, SergeGainsbourgquand il met en chansonson fameux " Je t'aime - Moi non plus >. La haine qu'un garçonpeut éprouverà l'égardd'un frère de la situationdanstoute sa complexité,subjecti- ou d'un parent étaif dans cette famille bonne ve, historique,sociopolitique. Lorsqu'unpatient chrétienne,interdite de séjouret les déclarations estdoté d'un bon camp de basecelapeut suffire, dans la relationavec le médecinest réparatrice. d'amourétaientde rigueur. de Jen'ai pu moi-mêmeentendrel'enseignement que Gainsbourgque le jour où j'ai pu reconnaître le voudraisparler de ce qui fait qu'on est soimême abuseur de pouvoir. le considère avec l'amourque le portaisà mesproches,à messemblables,n'étaitjamaistrèsraffinéet qu'il compor- commisération ma pratiqued'il y a vingt ou trente ans où je craignaisd'être pris en faute, de faire des erreurs,et où, quand j'en faisais,je tentaisde tait toujoursquelqueimpureté.Jene peux écouter que si je peux me voir moi-mêmeavectous lescacher,que ce soit un assoupissement, ou une en passant,l'usagedu mot mais pour les autres, seule l'expériencevécue attitudeou interprétationagressiveà l'égardd'un analysant.Aujourd'hui,j'ai compris que recon- mes défauts,mes lacuneset mes travers.Soit dit écoute> est devenu " obscène.C'estdansla mesureoù l'analystepeut naîtremes défaillancesest une partie fondamen- se retournersur lui-même,qu'il peut se réfléchir dans le miroir de sa pensée,que son analysant tale de mon activité,et je le dis tout de suite. La s'autorisera à se retournersur son analyste.De marchede la cure s'en trouvegrandementfacilitée. Si à un moment mon analysantressentune grandetristesse,je peux lui dire : < Votretristesse lui-même, après quelques expériencesde ce genre, l'analysantse permettra de se retourner est due au fait que vous avezperçu que je n'étais plus avec vous, en effet je regardaismon agenda. " Quelque chose de l'abus de pouvoir est alors réparé.Quand je fais comme si l'autre est je commets un abus de pouvoir,je insensible, t4 s'évertueà garderinchangéesa staturede parent sur ceux qui lui causentun dommage.Dansma un jour mon anadeuxièmeou troisièmeanalyse, lyste m'a dit : * vous avez peut-êtreraison", je suistombé des nues.Une porte s'ouvraitdans le mur que je portaisen moi, ce mur qu'avaitérigé répètel'attitude du parent qui fait tout pour que un parentpour cacherune détresserestéeignorée.Trèstôt, ie m'étaistenu pour dit que ce géant pas; qui sadétresse, sa défaillance n'apparaissent ne pouvait pas se tromper. PRATIQ-UES Qu'est ce qui fait que vous décidez d'entendre ce que vous entendez ? Et de le dire à votre analysant ? porte, mais j'avais trouvé une explication plausible.Quand enfin je me suisrendu dans la salle Commentje déjoueles piègesoù était enfermé l'enfantqu'a été mon analysantactuel? le recon- me dire qu'il s'estcertainementtrompé d'heure, qu'il avaitdû oublierqu'un changementd'heure nais très vite que mon patient n'a pas pu se retournersur lessiens,même quand il subit une était intervenu. ll s'évertuait désespérémentà agression de leur part. Maisle passage à un autre régimede relationà l'autrene peut avoirlieu,se penserd'abord puis se réaliser, que si le patient fait l'expériencein vivo, avec son analyste- en d'attente j'ai été tout étonné de l'y découvrir. Mon étonnementredoublequand je l'entends m'inventer une excuse.J'ai dans un premier temps ressentiune grande culpabilitéà avoir oubliéla séancehabituelled'un patientsifidèleet si dévoué.lusqu'aumoment où j'ai pu me dire que j'avaisété convoqué,à mon insucomme au analysecela s'appelle dans le transfert,,, d'un " retournement.Et cela ne peut avoir lieu que si l'analystel'autorise,mieux l'invite à reconnaître qu'il a été conduit,tout analystequ'il soit,à répé- sien, à prendre le rôle de la mère de sa prime enfance.J'aicomprisce jour-là,il a comprisau ter le mouvementsubjectifd'un parent. mèred'avoirà en prendreconscience. Par exemple,il m'est arrivéd'oublier la séance d'un patient. J'avaisentendu l'ouverture de la même instant,dansun éclair,qu'il n'avaitpasété attendu et qu'il avait tout fait pour éviter à sa Proposrecueillispor ElisobethMaurel-Arrighi PRATTQ*UES R é s u m é: L a C h i n e e s t m a r q u é e p a r d e u x t y p e s d e m é d e c i n e q u i c o h a b i t e n t b i e n q u e f o n d é e s sur des visions du monde et des causei des maladies très différentes. La médecine t r a d i t i o n n e l l e d ' u n e p a r t , q u i < o n s i d è r el a m a l a d i e c o m m e u n e p e r t e d ' é q u i l i b r e d e l a p e r s o n n e dans le monde dans lequel elle vit et la médecine ociidentale d'autre part, avec ses c o n c e p t i o n s p h y s i o p a t h o l o g i q u e sd o m i n a n t e s . P o u r c h a c u n e d e c e s d e u x m é d e c i n e se x i s t e u n e typologie différente du pouvoir du médecin et de l'autorité qui découle de son exercice. En Chine comme ailleurs l v a n P . K a m e n a r o v i Ec nC h i n ec o m m ea i l l e u r sl e, m é d e c i ne, n t a n tq u e Enseignont à l'Université, membredu Centre de recherches sur l'ExtrêmeOrient de Paris-Sorbonne dépositaired'un savoira priori non partagépar peut dire que la relationqu'il établit avec son patient est du même type que celle que nous sespatients,détientune autoritéen mêmetemps qu'il exerceun pouvoir.Avant d'entrerdans les L'autorité,le pouvoir qui sont les connaissons. siensa pour origine un savoirparticulier,suffi- détailsde certainesspécificités chinoises,préci- sammentéloigné de tout autre type de savoir pour justifierune confianceaveuglede la part de sonsqu'un payssortantd'environquatredécen- . a n sl e c a sd e l a m é d e c e l u iq u i r e ç o i tl e ss o i n s D v é o a r d i x a n n é e s t e r r i b l e sd e il en va tout autrement.Nous R é v o l u t i o n cine traditionnelle, " culturelle>, peut être à certainségardsconsidéré allonsessayer d'expliquerbrièvementpourquoi. niesd'un systèmepolitiquesocialiste dur, aggra- commeconvalescent. La médecinea dû, en effet La mentalitéchinoise,tout comme la nôtre, est à cette époque,comme toutes les autresdisciplines,se réclamerdirectementet impérativement de la penséede Marx et de Lénined'une nourrie d'une penséenécessairement exprimée par une languedéterminée.La mentalité,la pensée,la languechinoiseont pour fondementune part, et de la pensée de Mao Zedong, de o r g a n i s a t i o ng é n é r a l e ,r e s s e n t i ec o m m e u n e l'autre, pour pouvoir simplement exister. Or nécessité aussi aucunde cestroisauteursn'a laisséde nom dans l i n g u i s t i q u ep, h y s i o l o g i q u e ou même morale. biologique que la littératuremédicale... va de pair avecla référencepreCette nécessité Cette étape de l'histoirechinoise récente n'a mièreet impérativeà un ensembleavantde pou- cependantpas fait disparaître des réalitésmédi- voir envisagerune partiede cet ensemble.C'est ainsi qu'un mot chinois n'a, sauf exception calesoui concernentaussibien tout l'ExtrêmeOrientsinisé(Japon,Viêt-nam,Corée).Le casdu Le conflit, perceptions chinoiseet occidentale, YvonKomenorovic, coll Lo nuit surveillée, éditionsCERF bien rare,ni genre,ni nombre,ni nature.ll est indis- monde chinoisprésentecette singularitéqu'il y pensable,pour connaître ces différentspara- existedeux systèmesmédicauxqui sont censés mètres.de le voir dans son contexte.ll n'en va non seulementne pasêtre en concurrence, mais pasde même pour nos mots, immédiatementet bien être complémentaires. La médecinetradi- isolémentidentifiables.De même, une notion tionnellechinoiseest en effetenseignéeet pratiquée au même titre que la médecine occiden" tale ". Du praticienexerçantcette dernière,on chinoisene reçoit sa significationqu'à partir du PRÂTIqUES contextedanslequelon la trouve,contrairement à nos conceptsqui, idéalement,sont suffisam- ment < clairs et distincts> pour être touiours affectésde la même signification,indéfiniment d'une pensée,d'une renouvelable. L'expression théorie,quel que soit le domaineconcerné,obéit à cette même loi. Outre cette obligation de Ainsiparcourupar des notionsqui se rencontrent partout,le discoursque tient le médecinchinois de médecinetraditionnellerencontreun écho certainchez ses patients.On peut trouver des phrasesà peu prèsidentiquesdans lestraitésde c o n t e x t u a l i s e r s y s t é m a t i q u e m e n tm o t s e t notions,les Chinoisse meuventdans un univers médecine,de politique,de moraleet même de musiqueou de peinture.ll en ressortl'idéegéné- mental régi avant tout par l'idée centraleque anaraleque le mondeest organiséen structures logues,que la recherched'un équilibrede vie communiquent touteschosesse correspondent, à desschémaset à des prinentreelles,obéissent c r o e sc o m m u n s . Celaveut dire d'une part que chaqueactivitéparticulièrene prend sensqu'en fonction de l'ensemble que constitue l'existencemême de la sociétéhumaineet que, d'autrepart,il existeune analogieentre tous les domainesque l'homme est appeléà aborder.On retrouveradonc, dans de chaqueactivitéaussibienque dansl'ensemble peut se traduireaussibien en termesmédicaux qu'en termesartistiques, et que l'exercicede la profondément reliéà une observamédecineest tion et à la fois une observancedes lois fondamentalesqui présidentà l'existencede toutes cnoses. L'autoritéqui est accordéeau médecin,le poune provient voir que sespatientslui reconnaissent donc en aucunefaçon d'une régionmystérieuse I'existence, un certainnombrede principeset de notions de base,qui en concerneronttous les et inaccessible du savoirhumain.S'ilfaut donner un modèleà l'imagedu praticienchinois,ce sera aspects.Par conséquent,le vocabulairede la recouperle vocabumédecineva nécessairement le sagebien plus que le savant.Comme le politique, comme le moraliste,comme le poète, le lairede la politique,de la morale,de la géologie et aussibien de la poésieet de la peinture.Des médecinestd'abordceluiqui saitvoir.Saqualité A l'époqueoù il était premièreest l'observation. notions aussi fondamentalesque le yin eL le interdit de toucher un corps en Occident, les yong, qui échappentà toute tentativede traduc- médecinschinoisfaisaientdéjà des dissections. Prendrele pouls est un des actesmédicauxles plusanciens.ll ne s'agitpas ici de prétendreque tion, que le qi (souffle,élan vital), ou la voie (doo),ont leur placeaussibien dans le discours médicalque dansle discoursmoralou artistique. ll en résulteque le langagetenu par le médecin véhiculedes notionsde basequi permettentau patientd'en rapprocherla teneurde ce qui estau sur la la médecinechinoiseauraitune supériorité maisplutôt d'en souligner médecineoccidentale, les présupposésrespectifsafin de comprendre pourquoila relationentrele médecinet le patient fondementmême de son existence.ll ne s'agit pas ici, on l'a dit, de notions dont le contenu différentedans les deux est fondamentalement seraitétabli une fois pour toute. Toutefois,leur réapparitiondansdes domainessi différentsper- de vie d'un patientdans le contextegénéralde familialeet socialefait évidemment son existence met, aussibienà celuiqui lesemploiequ'à la perun repérage,une sonnequi l'écoute,un balisage, partiedu regardque posele praticienchinoissur son patient.On saitqu'en médecinechinoise,la orientationdansun mondedont la mentalitéchinoisesait qu'il est sanscesseanimé par le changement.L'un des ouvrageslesplus luset lesplus préventionrevêtplusd'importanceencoreque le soin.Scruterleséquilibresvitauxest la tâchepre- commentésde la culturechinoisen'est-ilpas le Clossiquedu changement,ou Livre des mutqtions avant que les symptômes nir les déséquilibres n ' e n d e v i e n n e n t d e s m a l a d i e s .C ' e s t a i n s i (Yijins) ? que, dit-on, les Chinois ancienspayaient leur pratiques.Replacerles habitudeset les attitudes mièredu praticien,afin d'être à même de préve- PRÂT IQ-UES 't7 médecintant ou'ilsdemeuraienten bonne santé t e l e f a i r e l o r s q u ' i l st o m b a i e n t e t c e s s a i e nd malades... 5s ". Là encore, le vocabulairerisque de nous induireen erreur.ll n'existepas,dansla tradition et chinoise,de branchedu savoirqui, spécialisée employantson langagepropre,correspondrait à A u m i l i e ud u x r x ' s i è c l el e, m o n d ee x t r ê m e - o r i e n - ce que depuisdes sièclesnousappelons" philosophie' en Occident.Là encore,il a fallu invent a l s ' e s t t r o u v é b r u s q u e m e n t c o n fr o n t é à l'Occident.Les laponais,qui écrivaientà cette ter un néologismepour faireentrercettecatégo- époque en chinois classique,ont été les prem i e r s à r e c h e r c h e rs y s t é m a t i q u e m e nct e t t e rie, dans la langue chinoise.La " philosophie c h i n o i s e" , i n s é p a r a b l ee n c e l a d e s a u t r e s confrontationet à se trouver dans l'obligation particulièrement ardued'en traduirelestermes. branchesdu savoir,met en ordreet transmetdes notionsuniverselles, appeléesà être utiliséespar- D i s o n s s i m p l e m e n t ,p o u r f a i r e c o m p r e n d r e l ' a m p l e u rd u p r o b l è m e ,q u ' i l n ' e x i s t a i dt a n s l e tout. Dansce sens,la philosophiechinoise" ne " constitue nullement une constructionintellec- v o c a b u l a i r ceh i n o i s( e m p l o y éa u s s ib i e n p a r l e s Coréens et par les Vietnamiensque par les tuellequi auraitpour objectifd'être logiquement irréprochable, imparable.La penséechinoise,en J a p o n a i sa)u c u nt e r m ep o u r t r a d u i r ed e sn o t i o n s a u s s éi v i d e n t e sp o u r l e sO c c i d e n t a u q xue celles effet,se donnetoujourspour but de pouvoirêtre depays, nation, régime politique, démo- traduite dans les faits, dans les actes,dans les c o m o o r t e m e n t sd e l a v i e q u o t i d i e n n e .S o n cratie, république, liberté, et aussi bien art, beauté,Absolu,Être,ou encore logique et expressionet sa constructionobéissentdonc à d ' a u t r e s i m p é r a t i f sq u e c e u x a u x q u e l sn o u s furent essayés santé.Des néologismes avant de sommesaccoutumés,ce qui ne manque pas de plus ou moins satisfaitrouver des expressions nous dérouter,voire de nous scandaliser. C'est s a n t e sl.l e n f u t d ' a i l l e u r d s e m ê m e d a n sl ' a u t r e s e n s . . .P o u r e n r e v e n i rà l a s a n t é ,i l n ' e s t p a s sansintérêt de remarquerque l'expressionqui pourtant ainsi que s'expliquentles très nombreusesrencontresentre la " philosophie" et la médecinechinoises.ll n'est pas envisageable de d a n sl a l a n g u ea n c i e n n es e r a p p r o c h el e p l u sd e lire un traité médical sans être préalablement c e t t e n o t i o n e s t c e l l e q u i d é s i g n e" l ' h o m m e é q u i l i b r é" , l ' i d é e d ' é q u i l i b r eé t a n t r e n d u ea u moyend'un pictogrammereprésentant lesdeux informéde la naturedes instrumentsde pensée qui ont présidéà sa rédaction,et qui sont pré- p l a t e a u xé g a l e m e n ct h a r g é sd ' u n e b a l a n c eC . e q u i e s t r e c h e r c h ép a r l a m é d e c i n ee s t d o n c u n sentsaussibien dansla " philosophie" que dans l'art de gouverner. Biensûr, la médecinechinoisen'est pas demeuréeimmuabledevantlesconnaissances et lespra- é q u i l i b r e .D e m ê m e , c ' e s t u n é q u i l i b r eq u e recherchentla politique,la peinture,la morale tiques de la médecineoccidentale,et l'on se ou la musique.Partant,on ne s'étonnerapasdes doute bien que la présencesimultanéedes deux innombrablespasserelles existant entre toutes médecinesn'estpassansposerde multiplespro- cesdisciplineset bien d'autresencore. blèmes.Un observateurfait notamment remar- Toutesont en commun d'être exercéespar des humains,pour des humains,au seind'un univers quer que les efforts déployéspour rendre les dont nouspouvonslirelesstructures et lesloisde davantagesur lesaspectspratiques,proprement fonctionnementen nous-mêmescomme dans nos diversesactivités.ll est donc évidentque le que sur l'élaboration thérapeutiques, de théories m é d i c a l e sp e r m e t t a n t d ' e n r e n d r e c o m p t e: programmedes étudesmédicalesdu cursusde médecinetraditionnelle comporte,dèsla premiè- vise " l-'effortde raisonnement surtoutà démontrer le caractère" scientifique " de la médecine philosophiechinoi- plutôt qu'à la rénover Le résultat traditionnelle, ". re année,une formationen P RAT IQ-U E S " deux médecinescohérentesentre ellesportent a donc tendanceà être simplementune iuxtapo- politique,à admettreaussibien la gravitéd'une sition de méthodesdifférentes,exposéessuccessivementdanslesmanuelsmédicauxdatantde la r ' u n e é p i d é m i eC . 'est i n o n d a t i o nq u e l ' a m p l e u d cette recherchesystématiquedes correspon- fin du xx"siècle.Ainsi,tenter d'expliquerles loci (lespoints)de l'acupuncture et de la moxibustion de la dancesentreleschosesqui fait la spécificité pensée,de la mentalité,et, partant,de la méde- au moyen des lois de l'anatomietelle qu'on la conçoit en Occident s'avère impossible.Par cine chinoise.ll en ressortque la médecineest davantage immergée, si l'on peut ainsi réinterconséquent,vouloir systématiquement parler,dans l'existencequotidienneque ne l'est préter les normes médicalestraditionnelles à la lumièrede la médecineoccidentaleconduit par- la médecineoccidentaleen Occident,et a fortiori en Chine.ll en ressortégalementque l'aspect d e s i n c o h é r e n c e s .C o m m e n t , p a r préventif de la médecine, c'est-à-direla recherched'un équilibre de vie (par exemple fois à exemple, expliquer ce que sont les q' (souffles,soufflesvitaux)si l'on veut en donner ? ll s'agitpourtant une analysephysico-chimique là d'élémentsfondamentauxde la médecine dont le bien fondé,justifiépar extrême-orientale, fait parphysiologique...) diététique,musculaire, tie intégrante de la médecine et connaît un développementinconnudans la médecineoccidentale.La venue de la maladie,c'est-à-diredu dysfonctionnement,du manque ou de l'exune très longuepratique,ne se situepas dansle même lieu de la penséeque les démonstrations cès,constituedanscette optiqueun échecde la scientifiques,lesquelles,rappelons-le,évoluent en fonctionde l'évolutiondes considérablement médecine,le rôle curatif de cette dernièrene v e n a n tô u ' e ns e c o n dl i e u . procédures qui lessous-tendent. fexistencedes correspondances établiespar la de la médecine En fin de compte, la persistance traditionnelles'expliquesansdoute à la fois par traditionentre lesdifférentsdomainesde l'activi- qu'ellerencontreet par sa lessuccèsindéniables té humaine et l'ensembledes règlesnaturelles inciteà établirun lien entre la santéde la socié- intégrationdansle systèmede référemarquable qui balisel'horizon renceset de connaissances té et celle des individusqui la composent.Les naturelles, comme des inondations catastrophes La d'une grande majorité d'Extrême-orientaux. confianceque l'on a dansle médecinreposenon si redoutéeset si meurtrièresen Chine, les épi- pas sur ce qu'il sait des chosesque tout un chacun ne pourrajamaissavoir,mais plutôt sur ce démies,les ravagesde la guerresont interprétés ce dont chacomme résultant vraisemblablementd'écarts qu'il saitmieux,plusprofondément, i d é e , m a i s par gouvernants. a d é l à u n e t r op vague. commis les Ces déséquilibres c u n L'explication du médecin,plutôt que de décousont réputésne pas se produire sous un bon gouvernement,et leur apparitiondiscréditeles autoritésen place. C'est à ce sentiment,puissamment ancré dans les mentalités,qu'il faut vrir des pans entiersde véritésinconnues,prolonge, précise,éclaire des vérités diffuses,des attribuer les réticencesdu gouvernementchi- de basedont est porteusela cultuconnaissances re commune.ll n'y pas de césureentre le savoir nois,qui ne connaîtpourtantaucuneopposition médicalet le savoirvivre. PRATIQUES Nousavonslu pourvous et DominiqueMemmi,Legouvernementdescorps, Sousla directionde DidierFassin Editionsde l'EcoledesHautesEtudesen sciences sociales, 2OO4, Paris (clonage...), Au-delàdes" affaires" (sangcontaminé,amiante...),descontroverses au-delàde la gestion (de quotidienne la protectionsociale,du systèmede soin...),l'interventionde la sociétéet de l'Etatsur la relationdes individusà leur corpss'exprimede multiplesfaçons,moinsvisiblesmaissouventbanales et familières. C'estce < gouvernementdes corps>>, témoin de la placecroissante occupéepar lesquesgouvernement qu'analyse tions du corps et de la santédans le des sociétés, ce livre collectif,écrit sousla directionde DidierFassinet de DominiqueMemmi. Couvernementmédicaldes corps,aveclescampagnesde préventiondu tabagisme,où la sociologie,la psychologie, le cinéma,la publicitésont sollicités pour transformerune injonctiond'abstinence en ode à la vie saineet à la libertéreconquise de l'ex-fumeur. Avec la médicalisationde l'impuissance,rebaptisée dysfonction érectile > sous l'égide des sociétés " savantes d'urologieet de l'industriepharmaceutique, et son corollaire,l'autorisation de misesur le marché du Viagra@. Avec la délégationd'une part croissante des soinsaux patientsà leur entourage,revendiquéeparfois, à domiciledes maladesdu Sida,imposéesouvent,comme le maintienà domicicomme l'hospitalisation le des maladesmentaux,sourcede nouvellesinégalitéssociales,cette < part profanedes soins" n'est ni politique. reconnue,ni mesuréeà sa justevaleur,ni aidéeà hauteurdu désengagement Avecl'autorisation souscontrôle,aprèsl'interdiction,de la contraception, de l'interruptionde grossesse, : contrôleéconomique,par lestaux de priseen charge; contrôde la procréationmédicalement assistée le desmotifsde la demande,et de leurconformitéà la loi ; maisaussiautocontrôle demandéaux patients, par lesdélaisde réflexionimposés,par l'exigencede consentement éclairé. Maisaussigouvernement socialdescorps,avecla réintroduction desdébats du délitde racolageréveillant anciensautour de la prostitutionentre réglementarisme et abolitionnisme, entre aliénationet libre disposition du corps ; débatsoù l'Etat ne tranche pas, réprimant les manifestationsattentatoiresà l'ordre public, et déléguant à des instancespubliques ou associativesla gestion des difficultéssanitaireset sociales. Avecle refusdu droit au mariageou à l'adoptionpour leshomosexuels, le caractère aggravantde l'adultère homosexuel danslesdivorcespour faute,témoignantque la sexualité conlugalehétérosexuelle reste encorela norme institutionnelle. Aveclesprisons,où lesdétenusdoiventtoujoursnégocierl'accèsaux soinset au statut de malade,où une part dessoinsquotidiensaux maladeschroniquesest dévolueau bon vouloirdes co-détenus. Aveclesdemandeursd'aidesociale,ou d'autorisation de séjourpour raisonsmédicales, où c'estle corps du sujet qui doit être exposédanssa souffrance,au travailleursocial,pour ouvrir un droit à des subsides, ou au médecininspecteurde la DDASSpour obtenirune cartede séjour,lorsquetous lesautresfondementsd'une légitimitéont été épuisés. A traversla multiplicitédesformesd'interventions étatiqueset de régulationsmédicales ou sociales, c'estbien qui une nouvellebiopolitique se dessine,loin des modèlesanciensde la surveillance et de l'hygiénisme. feon-Luc Boussord 20 PRArrauEs | R é s u m é : L a d é n o n c i a t i o n d u b i o p o u v o i r , t e l l e q u ' o n l a t r o u v e c h e z F o u c a u l t ,n o u s o b l i g e p a r a d o x a l e m e n td. a n s s e s a p p l i c a t i o n sc o n t e m p o r a i n e sà, p e n s e rI ' E t a tn o n c o m m e I ' o r i g i n ed u biopouvoir, mais comme un recours contre lui. Une telle recomposition des pouvoirs et des contre-pouvoirs réorganise les positions respectives des professionnelset des usagers de I ' i n s t i t u t i o nm é d i c a l e . Exproprier et rêapproprier Partonsde l'élémentaire : on ne veut ni souffrirni mourir, et on y est naturellementdestinés.La ( h r i s t i a n eV o l l a i r e priation " est, dans son origine, la condition même d'unepossibilité de soigner: c'esten délé- Philosophe est d'abord celle de la nature, toute-puissance pouvoiraveugleet sansvolontéqui nous inscrit guant son pouvoirà un soignantqu'un malade dans un cycle biologiqueauquel on n'échappe part, par un effet de réaction en chaîne, cette pas.Faceà elle,I'uniquecontre-pouvoir, partielet expropriationva elle-mêmeen susciterd'autres. provisoire,est celui du langageet de la technique,qui permet de contrerou forcer momen- Le oouvoir de décisionmédicaleva être en effet lui-mêmeexpropriéde la volonté du médecin tanémentce coursnatureldeschoses.Ce forçage pour être transféréà des instances décisionnelles momentanés'inscritlui-mêmedans une organi- politiques(concernant le systèmede santé),elles- sationculturelle,dans des rapportsde savoir,de pouvoir,d'échangeet de production,qui consti- mêmes expropriéespar des systèmeséconomiques (les compagniesd'assurance) ou indus- tuent ce qu'on appellela médecine.Cetteméde- pharmaceutiques). triels (les laboratoires Simple cine a elle-mêmeune histoire,qu'on peut écrire, rouagedansce système,le colloquesingulier,s'i selon l'expressionde Foucault,reprisedans le peut s'analyser en termes de pouvoir,relativise le pouvoirdu médecinqui le considérablement titre d'un ouvragequi vientde paraître,en termes de " gouvernementdes corps" (1). D'embléedonc, le pouvoirsur la natureque les peut reprendrepossession de son corps.D'autre conduit,le soumettantà desimpératifssocio-économiquesdont il ne maîtriseà peu prèsrien. hommesse donnentoar la médecines'affirmeen termespolitiques.ll ne peut se revendiquerque Maisc'estprécisément dansla margeouvertepar peu près qu'il peut cet " à exercerce qui définit " collectivementpar la transmission d'uneautorité. En 1975,lvan lllich,danslo Némésismédicale(2), la positivitéd'un pouvoir en le soumettantau le décrivaiten termes d'" expropriationde la t u'elle ait été, à un s a n t éo , p r é s u p p o s a n q droit de regardd'un patient: sa responsabilité. moment ou à un autre,appropriéepar lessujets Le concept d'usager Dans le n" 29 de la revue Vacorme,consacréen d'expropriation du eux-mêmes.Or ce processus a u t o m n e 2 0 0 4 à M i c h e l F o u c a u l t ,P h i l i p p e sujetpar I'institutionmédicales'avèreambivalent niveaux.D'unepart,en effet,l'" exproà plusieurs Mangeot publie un article," Sida : anglesd'attaque >, où il analyseainsila pratiqued'Act Up : PRATIQUES 2'l " Soit à Act Up une pratiqueininterrompuedu court-circuit: universaliste et minoritaristeen même temps ; défiant vis-à-visde I'Etatet lui et d'un nouveaurapport aux organesdécisionnelséconomiques et juridiques.Lorsquedesasso- d e m a n d a nst a n sc e s s ed e sc o m p t e s . ( p . 8 1 ) " un processus de rechercheou de productionde médicaments,pour diffuserla réalité de leurs Dans cette formule se concentrela multiolicité des paradoxesd'une penséecontemporainedu effetssecondaires ou pour impulserla mise en la malaserviced'appartements thérapeutiques, pouvoir,appliquéeà la questionde la santé. de faidie cessed'êtreun facteurde soumission. D'une part, en effet, le maladey apparaîtnon pour devenirun levierde blesseou de démission, ciationsde maladesfont pressionpour accélérer comme patient,maiscomme usager,c'est-à-dire revendication. C'esten quelquesortela maladie acteur dans un rapport d'échange.Or, cette elle-mêmequi changede statut : là où elle promutation n'engage pas seulementla relation d u i s a i t l a d i s p a r i t i o nd u p a t i e n t d e I ' e s p a c e médecin-malade, danslaquellele statutd'usager public, sa relégationderrièreI'opacitédes murs permettraitd'affirmerun contre-pouvoir face au pouvoir de décisiondu médecin. Elle engage privé de I'hôpitalou son occultationdansI'espace de la protectionfamiliale,elledevientau contrai- aussiun nouveaurapportdu maladeà la maladie, re le vecteur de son apparitiondans I'espace rapport informé dans lequelle savoirn'est plus public et de son interventionsur la scènepoli- monopolisépar le professionnel, mais réappro- tique. Etre malade,ce n'est plus être anormal, prié par I'usager,qui utiliseses proprescanaux maisêtre producteurd'une critiquede la norme, d'information,les réseauxde communicationde et la maladieapparaîtalors, par sa fréquence la vie associative, I'expérience des autresusagers même, comme I'une des normes de la réalité ou lesconfrontations dont il a connaissance entre sociale,qu'une normativité mensongèreavait jusquelà occultée. des stratégiesmédicalescontradictoires.Et se donne ainsitout simplementun pouvoircritique On touche probablementlà à I'une des raisons sur lesdécisionsdont il est I'objet. pour lesquellesI'apparitionla plus essentielles Cettemutationengageenfinun nouveaurapport spectaculaire de la revendication de maladiedans à I'institution,car se déclarerusager,comme le montreMathieuPotte-Bonneville dansson article I'espacepublic s'estfaite par la médiationde la mouvancehomosexuelle: non pas seulement du même numérosur la politiquedes usages " ", ne consistepasà adopterune positionconsumé- parceque la multiplicitédes échangesen a fait riste individualisante, maisau contraireà recon- mais parce que son statut même I'engageaità une cible privilégiéede la transmission du sida, naîtredanslesusagesdesvaleursqui nécessitent interrogeravec le plus de radicalitéla violence d'être collectivementdéfendues: le concept des normes,et en particulier, dès lors,de cellede d'" usage' a chezFoucaultle statutpolitiquede la santé. la confrontationau réel et à I'action,engageant touteslesdimensionsde la pratique.Etreusager, effet conférerun pouvoirque dansla mesureoù c'estdonc reconnaîtreà la fois les formesde la elle imposeune rectificationdu savoir.Ce n'est singularité et cellesde la solidarité. alorsplus seulementle maladequ'il faut traiter, La maladie,affaiblissante par essence, ne peut en mais I'espacepublic où s'opèrecette rectificaChangementde statut de la maladie Maisprécisément, dansce rapportà I'institution, tion. Et c'est de cette position(au sensle plus stratégiqueet guerrierdu terme) que prétend le contre-pouvoirde l'usagerengage aussi sa parler une organisationcomme Act Up. C'est citoyenneté.Lesformesde la solidaritépeuvent cette positionqui légitimeI'adresse aux pouvoirs publics. alorsse lireen termesde responsabilité collective, PRATTqUES Maisalors,cetteadresseplaceI'organisation elle- D'où le droit de regardsur la vie et la mort que même en porte-à-faux,relativementà la pensée foucaldienne ll esten dont elleprétends'inspirer. confèrentles pratiquesde réanimationou celles assistée. de procréationmédicalement effet pour le moins paradoxalde se réclamer d'unepenséequi dénoncele contrôlesocialet les de Foucaultmontreraourunetelle médicalisation la vie ne conduitoasseulementà la normer,mais gouvernementalités de la biopolitique,pour exiger une interventionde I'Etatdans une revendi- à réduireun peupleà l'étatde population,objet passifet massifié statistique et de I'argumentation cationde santépublique.C'estce paradoxeque PhilippeMangeot appelle< un court-circuit". Mais,précisément, si I'on ne veut pas qu'il pro- de la décisionpolitique.Or, c'estprécisémentici voque une panne idéologique,il vaudraitmieux que la questiondu pouvoirtrouve son articulation. La positionfoucaldiennepose en effet la question du pouvoir médical à deux niveaux. que se contenterde le mentionner. I'expliciter D'une part, dans lo Noissoncede lo clinique (publié en Problématiquesdu biopouvoir 1964), il pré- Que vise en effet Foucaultlorsqu'en1976, n introduiten philosophiele conceptde " biopou- sente voir " ? ll viseà montrerque ce qui est au cæur même de la pulsionvitale,à savoirla sexualité, comme une la médecine authentique est dansson identitémême I'objetd'une production discursive. ll le dit trèsclairement: le pouvoir savoir, tirant puissancede ne sertpasà masquerle sexe,maisau contraireà son pouvoir de le produire comme objet de discours.Le sexe la visibilité à devientainsi le moyen par lequel l'individuest laquelle elle assujettià la norme collective: il ne s'agitdonc ouvre pas de fairetaire,maisau contrairede faire par- corps.C'est une purssance pro- ler, et le premiertome de l'Histoirede lo sexuolité constitueune charge redoutablecontre la psychanalyse, en tant que moyencontemporainprenant le relaisde la confessionreligieusepour les prement contraindreà I'aveu.Le pouvoir,dira-t-il,ne se démiurgique, dont le pou- manifesteplusen termesde souveraineté comme une loi extérieureau sujet,maisen termede gotr- voir d'institutionnalisation n'est oue la conséquence,et dont Foucaultmontre la généalogieà v e r n e m e n t a l i t é ,c o m m e u n e n o r m e q u i l e la périodecharnièrede la révolutionfrançaise. construitde l'intérieur, et le rend par là intégrale- D'autre part, dans Lo Volontéde sovoir,premier ment contrôlableiusque dans son intimité. La médecineest par excellencele moyen de cette tome de l'Histoirede lo sexuolité,il présentela par une puismédecinecomme instrumentalisée par laquellela puissance normalisation, étatique que pour sancepolitiquequi ne I'institutionnalise investitsubrepticementles moindresrecoinsde lui déléguerson propre droit de regarddans le I'espaceprivé, puisque la biopolitiqueconsiste Le biopouvoirn'est contrôledescomportements. précisémentà assurerle contrôle corrélatifdu physiqueet du mental par I'encadrementdes donc pas le pouvoir de I'institutionmédicale, maisau contrairela forme de son instrumentali- pratiquesintimes.D'où le droit de regardsur la sation.Et I'on peut dire à la périodecontempo- s e x u a l i t éq u e d o n n e n t l e s p r e s c r i p t i o n sd e raine que ce pouvoir d'instrumentalisation contraceptifsou les autorisationsd'avortement. concernemoinsI'Etat,que lespuissances éconoPRATIQ.UES miquesauxquellesil est contraintde s'affronter, A ce contrôle échappent les formes diffusesde et par rapportauxquelles, s'ilne joue passon rôle jl de médiateur, devralui-même,dansla logique gouvernementalité qui contraignent,disciplinent et surveillentdans une intentionnon plus poli- libérale,sefaireinstrumentaliser. Réclamer I'intervention de I'Etat, c'est donc paradoxalement tique mais commerciale,exerçantainsi un véri- contesterleslogiquesdu biopouvoir. la moindre forme de rétrocontrôle.C'est ainsi désormaisaux compagniesd'assurancequ'est Lesdeux représentationsdu politique dévolule rôledécisionnel de savoirqui, selonl'état Une telle logique nous oblige à assumerdeux de ses artères,son rapport poids-tailleou ses représentations du politiqueissuesde la réalité de son devenir libéral : I'une dans laquelleun récentsséjourshospitaliers, seraen droit d'acheter un appartementou d'envisagerune activitécom- Etat,passéde la souveraineté à la gouvernemen- merciale.De même que crestaux laboratoires talité, s'inscritcomme instrumentd'un biopou- pharmaceutiques de déciderquelssujetsmérite- voir lui-mêmecontraintpar des logiquesécono- table biopouvoirsansque puisses'exercersur elles miques de profit qui assujettissentde façon ront qu'on produisele médicamentdont ils ont besoin,en fonction de la solvabilitéde leur pays diffuseune population; l'autredans laquelleun d'appartenance. Etat,représentant d'une communautésociale,a le devoird'assumerla défensedes intérêtsd'un A ce staded'omniprésence des biopouvoirséconomiques, le pouvoir politique ne peut plus ensemblede sulets constituésen peuple, en apparaîtreque comme complice ou comme régulantdes logiqueséconomiquessusceptibles recours.Maison peut en dire autantdu pouvoir de contredire son intérêt. Dans la seconde médicallui-même.C'esten effet dans la mesure logique,la reconnaissance d'un pouvoir régula- où il est détenteurd'un savoir,et de ce fait d'un teur de I'Etatest nécessaire dans les stratégies pouvoiret d'uneforme d'expertise, qu'il doit être mis en demeurenon pas de renoncerà ce pou- d'affrontementaux diffusionsdu biooouvoir. C'est du caractèreimplicite de cette double logique,que PhilippeMangeottire le paradoxe d'un comportementcorrélativement " défiantvis à vis de I'Etatet lui demandantsanscessedes comptes>. Autrementdit, il est bien nécessaire, à un moment voir nécessaire, mais de choisirson camp. Dans un ouvrage récemment paru, lean-Paul analysantle comportementde I'instiCaudillière, tution médicalefrançaiseface à I'irruptiondes biotechnologies dans les annéesd'après-guerre, dressaitce très simple constat : o Les cliniciens ou à un autre,d'assumerpolitiquementune forme de " gouvernement descorps> pour n'avoirpasà en subir subrepticement les effetséconomiques. pour Et, cela, nécessaire d'en finir avec I'appella- françaisn'ont jamaisjugé que cette méfiance(à l'égardde l'industriepharmaceutique) imposait > pour revention dégradanted'" Etat-providence développerune administrationspécialisée dans pour l'évaluationdes thérapies, officialiserdes diquer celle d'Etat responsable.Ce n'est en effet en rien une position( providentielle", avectout ce que ce termeconnotede religieuxet d'infanti- une allianceavecI'Etatafin de contrôleret réguler I'industrie.lls n'ont jamaislivré bataillepour procéduresd'enregistrement et normaliserdes procédures d'essai.> (3) lisant dans son sens protecteur,que celle qui consisteà répondredevant des citoyensdu mandat pour lequelon a été déléguéet d'un cahier C'estcettedémissionde I'institutionmédicaleface aux formesdu biopouvoirqu'ils'agitprécisément, des chargesqu'on a le devoir de respecter.Mais précisément,ce nrestque sous contrôle citoyen qu'ilspourrontse cher.Etc'està ce prix seulement que peut s'exercerun tel gouvernement. reconnaîtreun pouvoir légitime. PRATIQ*UES pour lesmédecinseux-mêmes,de tenter d'empê- En ce sens,si le pouvoir médicalpeut s'avérer nécessaireà la défensede la vie, il ne l'est pas pouvoirs.C'est-à-dire, d'abord, des dispositifsde contre-pouvoir. moins à la défense d'un espace politique, et d'une réappropriationde la santé dans une logique de responsabilité citoyenne.Mais cela supposeévidemment,entre professionnels et usagers des systèmesde soin, comme entre suietset institutions,un authentiquepartagedes 1. Dir. Didier Fassinet DominiqueMemmi, Legouver2004. nementdescorsa EHESS, 2. Ed.du Seuil. Lo 3. fean-PaufCaudillière,lnventer la biomédecine. Fronce,l'Amériqueet lo production des savoirs du vivont (1945-1965),La découverte,2002. Décider de son pouvoir sur la maladie Tahara du diabète.ll le sait depuislongtemps, mais ne s'en occupeque lorsquele médecindu déséquilibredure longtemps,et l'on craint des complications.Le pouvoir des traitementset des | ' 1 a r t i n eL a l a n d e travail lui interdit de monter sur les toits (il est conseilsest faible face à la vie qui est dure et le destin inluste.Mais un jour, alors que le senti- Médecingénéroliste couvreur).ll vient consulter,on proposeun traitement : conseils alimentaires,médicaments actifs et activité physique(non acrobatique),et un bilan (le cæur, le rein, les yeux, les pieds, la peau et les vaccins).ll repèreque la marchefait baisserle taux de sucre,l'énervementl'augmente, et prendrelescompriméssansmangerentraîne des malaises.ll trouve que le diabèteest une ment d'impuissancedomine, et que l'on se résigneà l'accompagnerdans l'attentede nouveauxsymptômes,lesglycémiesdeviennentparfaites, on peut même diminuer le traitement. Que s'est-ilpassé? On ne le saurajamais.Celane va pas mieuxdansla vie ni à la maison,maisil a faut dire qu'il y a desproblèmesà la maison,trois décidéde reprendrele pouvoirsur sa maladie.ll ne délègueplusau médecinque ce qui est nor" mal " : les ordonnances,le rythme du suivi,les Le pouvoir du relationsavec les spécialistes... médecin n'est rien sanscelui du patient, il n'est enfantsen basâge et maintenantle chômage.Le que de le soutenir... maladie sournoise, irréelle et encombrante. ll perd son carnetde surveillance, vient faire sa glycémieau cabinet.Elleest toujourstrès élevée,il PRATIQ-UES La spiroïde du tibia Sylvie Lagabrielle- luriste ve d'un passérévolu. Que prennent quelques mots ? Un peu de temps,maisce temps là, pour C'était il y a 15 ans. Leshasardsd'un rapatrie- l'avoirgoûté,n'estpas perdu. ment sanitairem'avaientamenéedans ce service où j'avaisattendu des heuresdans un couloir Un joli pied de nez qu'on veuillebien s'apercevoir de ma présence. Finalement, on m'avaitrouléejusqu'àcettepièce Catherinefung - Médecin généraliste Quandle pouvoirne s'appuieplussurun savoirou sombre où celui-ci,sansse présenterni même dire bonjour,s'étaitemparéde mes radiospour une expérience,maissur ce que le médecinimagine que le patientdevraitfairepour sasanté,qu'il s'écrier: " Mais ça ne se fait plus ces fractures là ! ". J'aigrincéque j'avaistoujoursété une fille porte un jugementsur leshabitudesde vie, alorsil plutôt classiquemais,qu'aprèstout, il n'était pas excluque je relanceune mode.L'ironieétaittom- lulie, 20 ans,est assezenveloppée.Ellea vu un gynécologue,car elle a des règlesirrégulières et grossesse tarde voudraitêtre enceinte,maiscette bée dans un vide sidéralet peu après,je reloignaismon couloir. Un peu plus tard, une autre blouseblancheme voitura jusqu'à ma chambre après m'avoir n'estpluslégitime,il estabusifet dangereux. à venir.Le gynécologuen'a pastrouvéd'anomaliesmajeures, alorsà bout d'arguments,il lui a dit qu'il fallaitd'abordmaigrir.Leton a peut-êtreété demandé: * C'est bien vous la spiro'rdedu tibia ? ". C'est ainsique ma dépersonnalisation commenç4. Jefus également,ensuite,< ça > et " elle ". Jeme risquaisparfois à un o ça ne cicatrisepas très vite " mais " elle va pas trop mal quand même >, boutadesqui n'étaientpas relevées. Le un peu condescendant. Julies'estsentiehumiliée. Aujourd'hui,elle est en larmes.le saisles efforts qu'elle a fait pour essayerde perdre quelques chef de service, qui venait parader devant ne qu'il reçoit. moi, n'avaitque fairede cette pathologiemaussadeau fond de son lit. Quinzelours plus tard, lulie revientrayonnante. est positif.Ellelui a fait un loli Le test de grossesse Cette indifférenceest un no men's/onddont il est pied de nez à ce gynécologue: elleétaitencein- difficilede s'extraire.J'aimeraiscroire qu'elle relè- te quand ellea consulté. PRATIQ.'UES kilos.Ellese sentgrosseet laide.J'essaie de la rasje surer,mais n'arrivepasà effacercesparolesqui qui dit ce l'ont blessée. J'enveux à ce spécialiste pour qu'il a apprissansaucun respect la person- R é s u m é: E n t r e c o r p o r a t i s m e , t r a n s f o r m a t i o n d e p o s t e s e t t r i o m p h e d ' u n e t e c h n o c r a t i e t o u t e p u i s s a n t e ,q u e l e s p a c e r e s t e r a - t - i l p o u r s o i g n e r l e s m a l a d e s ? Des pouvoirs a n en plus savorr \)to Lesabusde pouvoirsont de naturedifférenteet prennentdes cheminsinéditsdans l'institution tementsdes acteurs,ainsique sur lesvaleursqui portaientjusquelà, tant bien que mal, notre mis- hospitalière. sion de soignants.Le comblen'est-ilpas que ces Je veux parler des nouveauxpouvoirs transversaux: hygiénisme,sécuritarisme, changements, dont chacunpeut mesurerà quel juridismeet autresbarbarismes biotechnolibéra- point ils nous déshumanisent, s'effectuentsous listesqui justifientl'absurditéde certainespraprétexted'évolutiond'unedemandedesusagers ? tiqueset leur coût, quelsque soientleurseffets (ou non effet).Le pouvoirde la technologie,de l'informatiqueet sa normativitéécrasante,sa Médecinssansmédecine Pourquoi,quandon parlede l'hôpital2007 et de chronophagie, induisentsansle dire des change- sa nouvellegouvernance, ai-jele sentimentdou- mentsprofondsdanslespratiqueset conceptions du soin.Le pouvoirtotalitairede la magie médi- blé de malaisequ'on parle d'une situationdélà bien ancréedans le paysagehospitalierque je cale,sa mainmisesur les contenuset idéologies supporteau quotidien? Pourquoi,s'il ne s'agit encore que d'un projet, toutes les dispositions de formation des infirmièreset des médecins, a i n s iq u e s u r l e sl o b b i e sd e s u s a g e res n c o l l u s i o n avec elle, associéaux pressionsde l'industrie pharmaceutique rend bien dérisoires leslamenta- Anne Perraut loliveres Cadresupérieurinfirmier de nuit, chercheuren sciences de l'éducation sont-elles prisespour que la miseen placesefasse tionsdes infirmières et alimententleur incaoacité presquesansqu'on s'enaperçoive? A l'issued'un colloquesur Hôpital2OO7et aprèsun débat au j'ai saloninfirmiersurcettenouvellegouvernance, à faire front. au moinsacquisune certitude: le mal estfait. En effet, si l'on entend les questionslégitimesdes Le retour du corporatisme Difficile d'aborderla questiondu pouvoirà l'æuvre dans l'institutiontant il est à l'évidencele nceud gordiendans lequelse nichenttouteslescontradictionset sur lequelse réactivent " en toute légitimité " lescorporatismes lesplusdurs.Sanocivité cadresde la professioninfirmière,cette réformea pour objetde redonneraux médecinsune partdu pouvoirqu'ilsavaientperduau profitdesgestionnairesà conditionqu'ilsfassentallégeance au dieu ANAES(1). Ce qui leurestproposéaujourd'huiau tienten particulier dansle décalage de plusen plus traversde la miseen pôle n'est ni plus ni moins qu'un rôle administratifet gestionnaire dont les sournoisentre lesdiscoursdes décideurset la réa- contraintessont énormeset auquelils n'ont pas lité sur le terrainqui ne cessede se dégrader.Les effets dévastateursde cette dissociationsur les été formés.Outre ou'il leur faudrarenoncerà la pratiquede la médecine,puisqu'ilsdirigerontà idéologies,qui sous-tendentles changements tempspleindesgroupements conséquents de ser- structurelsen cours, s'observentà différents vices,il leurfaudradevenirdes chefsd'entreprise niveauxet influentinsidieusement surlescompor- avectouslesrisques attachésà l'exercice, d'autant IRATIQUES Le savoirde la nuit Anne PerroutSoliveres Poris,PUF,2002 qu'ils devront faire cohabiter,selon les choix dence,aucun servicehospitalierne sauraittour- locaux, des intérêtsparfoistout à fait contradictoires (médecine, chirurgie, rééducation,soins ner sanseux, des soignantset de leur placedans l'institutionil n'estmême pasquestiondanscette palliatifs)ainsi que des personnesdont l'ego énièmeréforme,commes'il allaitde soit qu'ilsse glisseront sansdiscussion dansla casequi leurest risquefort de mettre à mal la difficileentreprise (qui pour le coup . connaîtrala crise"...;. destinée.Entregestionde la pénurie,application des protocoles,obligationssécuritaires de tout Des absencesremarquables poil qui relèguentloin en amont le sensde leur Inutilede dire que nous nouséloignonstoujours missionau profit d'une distributionde soin dans davantagede la préoccupation et de l'intérêtdu jamais questionà quelque citoyen,dont il n'est le paysagedévastéde l'hôpital, les infirmières baissentde plusen plusleursbrasrebutésde por- niveaude décisionque ce soit, bien qu'il soit le prétexte muet à d'étonnantesdispositions(c'est ter des patientsqui continuentà demanderles mêmessoins,la même attention,voire pour cer- < pour son bien qu'on a dévoyéle conceptde " continuitédes soins en découpantà l'envi ses tains,commencentà lesexiger. organes,sesfonctionset sesséjours...et qu'on La perte du pouvoir symbolique rend de plus en plus mobilesles soignantsqui Ce nouvelétat n'est pasétrangerà la désaffection valsentd'un serviceà l'autreau hasarddes plan- pour un métierbasésurle don, qui desinfirmières ningssousprétextede polyvalence... ne peut donc s'exercer sansune relativeconfiance, et qui n'ont pasété préparéesà cesexigences llencadrementinfirmier en question nouvelles des oatients.Ainsi,au lieude faires'ou- Cette gestionà courte vue a pour effet d'obnubi- vrir lesconsciences versune considérasoignantes ler les cadressoignantssur leur place perdue, puisquel'organisation en pôles redistribuantles tion pluséthiquede l'accueilet dessoinsaux personnes,l'informationdes patientssur leursdroits pouvoirsentre administrationet médecinene provoqueau contrairele repli des infirmièressur laisseplus aucunespaceà la hiérarchieinfirmière un sentimentde frustrationd'un pouvoirqui tirait qui était déjà assezmal assise.Quant aux infirmières,ellesne se sententpas souventreprésen- sa légitimitéde l'abandonde la maîtrisepar les patients.Ces questionsn'étant iamaisabordées, qui, selonlespersonnes, les infirmièresrestent avec le sentiment tenace téespar cettehiérarchie, est plus souventen collusionavec l'administra- d'être lesvictimesdu changementquel qu'il soit. tion qu'à l'écoutede la basesoignante.La question du malaisedes cadres infirmiersest, par hiéconséquent, à l'aunede leur positionnement rarchiquedéjà très problématique, entre pouvoir médicalet pouvoir administratif,tentant de se frayer une place qui leur permette de rendre le dirai pour ma part qu'ellespensentavoir perdr, ce pouvoirsymboliquedont ellesusaientsansen avoir conscienceet que, devantla difficultéd'être elles confrontées à des demandesplus explicites, ont tendanceà jeter le bébé avec l'eau du bain. Pour ajouter encore au sentiment de perte, au visibleune professioninfirmièreen mal de légiti- nom de la pénurie,ce sont despansentiersde la mité. Pource faire,c'estune certainevisionde la philosophie soignantequi s'évanouissent au profit professionqui s'est dessinée,dans laquellefort de théoriesfumeuseset surtout managériales peu de soignantesse reconnaissent. A tenter de totalement décaléesdans cet universoù la souffrancedomine.Ainsipasde contre-pouvoirà l'ho- montrer les aspectsthéoriquesles plus valorisants,ellesont perdul'occasionde fairevaloirles aspectsmoinsvisibleset cependantlesplussatisfaisantsde l'exerciceau quotidien.Car,si à l'éviPRATIQUES rizon2007,sinonpar l'absence... 1. AgenceNationaled'Accréditation et d'Evaluation en Santé. Les prescnptrons OO mode d'emploi Une prescriptionkiné mode d'emploi, c'est une o r d o n n a n c eq u i d i c t e a u k i n é c e q u ' i l d o i t f a i r e au coursde la séancede rééducation.Qu'est-ce qui se passedans la tête des patientsqui arriv e n t a u c a b i n e td u k i n é a v e c u n e o r d o n n a n c e marche pas, retournezvoir votre médecin,je ne le connaispas,j'ai bien essayéde lui parler,mais tylvie limon il est très occupéet en plusavectoutescesdécisionsà prendretout seuldansson cabinet. je vois de moins en moins de Heureusement, Kinésithéropeute m o d e d ' e m p l o i ? Q u ' e s t - c eq u e c e s p a t i e n t s - l à prescription mode d'emploi,j'ai la chancede traattendentde la rééducation? vailleravecdes médecinsrespectueux des autres professionnels J'aile souvenird'un patientdansmesdébutsprode santéet, par la même soucieux fessionnels, il était mécontentparce que j'avais de leurspatients,maisj'ai lu, il y a encorepeu de un peu de retard,alorsque je m'étaisexcusée,il temps, une lettrequ'une patientem'a montrée. est entrédans le cabinet,tout en m'engueulant, s'estdéshabilléet s'estallongésur la table pour que je lui massele dos. Biensûr,je lui ai demandé de se rhabiller,il est parti très fâché en m'assurant< qu'il allaitse plaindreà mon supérieur ", son médecin.Biensûr,il s'agissait d'une personne mal éduquée,mais je me souviensque son ordonnance était une prescription mode d'emploi. Cespatients-làne viennentpas pour apprendre, Elleétait adressée à son chirurgien,sa rhumatologuelui demandaitson avissur la rééducation et sur leschancesde récupération. Encoreune fois, les kinésn'ont pas d'avisà donner sur la rééducation, pas de recul sur lestraitements,pas d'expérience.Cette patiente,je la connaisbien, j'ai donc acceptéde l'aiderpour sa rééducation, mais à condition,et elle était d'accordavecmoi, que je ne suivepas la prescriptionmode d'emploide la rhumatologue. maisilss'essaient à exercerun pouvoirinsidieuse- fe me plaisà rêverqu'un jour, médecinet kiné se ment suggéré le médecina dit que vousdevez téléphoneront, se rencontreront de temps en " me faire 10 minutesd'ultrasonso. lci on vient tempspour discuterensembledu pourquoiet du achetersa marchandise, on n'estplusdansle lien, comment de l'indication en kinésithérapie,des n i d ' a i l l e u rdsa n sl e s o i n . antécédents despatientset commentlesmotiverà Remarque,il suffit de suivre la prescription,un peu de massageun peu de physiothérapie,merci mieux se soigner.Biensûr,ce ne serapas possible Madame,à bientôt, si ce médicamentkiné ne systématiquementil faudraattendrela révolution maisce seraitbien, ça redonneraitde la dignité. PRATIQ-UES Pouvoirs masquês , Patrice l'|uller Médecingénéroliste ll y a lespouvoirsvisibles qui façonnentnotre médecine.ll en est ainsides corpsconstitués de notre démocratie; l'exécutif,le législatif qui, pousséspar le vent fort du libéralisme, sonten trainde fairebasculer par voie législative (cf. la loi portant réformede l'Assurance maladie)ou technico-administrative (le dossier médicalpersonnel)l'assise de notre système de santédu servicepublicversla logiquecommercialeoù seulesles personnessolvables, jeunes et peu malades,y trouveront leur compte.Lejudiciaire, lui,de plusen pluspénaliselesdifférentsqui opposentusagers et soignants,fautede procédures contradictoires où les comportements collectifs,structurels, des unset desautrespourraientêtre misen question. Cettemontéeen puissance de la justice pénalecontribueà créer un climat délétère dansl'esoace du soin. Tentonsquelqueséclairages du côté d'autres pouvoirsbeaucoupplus discretsqui ont, de plus, la particularitéde ne s'accompagner d'aucundiscourspour lesporter. La technologiemédicale,entre fascination et fulguration La plupartdes nouvelles imageriesmédicales se sont imposées aux deux acteursprincipaux que sont le patientet le médecinavanttoute évaluationraisonnée de leursutilisations. Qui plusest,ellesont renduobsolètes bon nombre de savoirs cliniques patiemmentrecueillis, enrichiset transmispar desgénérations de médecins.A quoi bon savoirausculter finementun soufflecardiaquesi une échographiedonne des renseignements bien plus précissur la natureet l'importance de la valvulopathie suspectée.Lescardiologues les plus à la pointe P R A T t q u ES aujourd'huiavouentavoirperdutotalementla pratiquede cessavoirs qui ont étéen cliniques, quelquesorte incorporéset amplifiéspar la machine.Les métiersdu soin qui reposent essentiellement surla clinique(l'utilisation des cinqsens)ont du soucià sefairepourla pérennitéde leurmétier,tant le champde cesgestes cliniques a tendanceà se rétrécir.L'adaptation professionnelle devant cette montée inexorable des pouvoirsde la machinepourrait cependantparfaitements'imaginer,à condition d'une évolutiondes règlesprofessionnelles: un jour probableviendra où les groupesde médecinsgénéralistes, organisés pourassurer la médecinede premièreligne,se formerontet s'équiperont dansleurscabinets médicauxd'appareilséchographiques ou de mini-laboratoires sanguins pour pouvoir dépasserles limitesde leur pouvoirclinique, sanspasserla main,ce que ne verrontpasforcémentd'un bon æil lesdirecteurs deslaboratoiresd'analyses médicales ou la corporation des échographistes sur le marchéde l'offre libéralede soins. Lespouvoirsqui figent pour le seulentretien de leurassise économique, par peurde disparaître.Un soignant,unestructure de soinspeupar toutessortesde désirsde vent êtrepoussés changement, saufsi celui-ciin fine revientà scierla brancheéconomiquesur laquellela structureou le professionnel est assis.C'est ainsique le paiementà l'actecuratifdu médecin généraliste représente une logiqueéconomiquestrictementopposéeà toute actionde préventionbien conduite,qui aboutiraità terme à diminuerle nombred'actescuratifs dudit médecinet donc, par voie de consé- quence,le niveaude ses revenus.De quoi profesrefroidir beaucoupd'enthousiasmes pour s'attaquer le plusen amontpossionnels sible" auxvraiescauses desmaladies Saufsi ". politiquearrivaità substituer une intelligence à ce manqueà gagnerdu côté du curatifun revenuau moinségal(supérieur seraitencore plus astucieuxpour amorcerla pompe du professionnel), changement rétribuantlesactivitésde santépublique.De la mêmefaçon,le directeurd'hôpitalou le médecinchefde serviceferonttout (lestriturations de la codification desactessontun sporttrèsimportantpratiqué danstous lesétablissements hospitaliers qu'ilssoientpublicsou privés)pour se préva- ' loir d'un coefficientd'occupationdes lits le plusimportantpossible, avecdes maladesles plus lourds possibles du point de vue de " " leurcotationfinancière pourobtenirde la part du financeurle maximumd'argentpourfinancer la structurede soins.Chacunde cesétablissements de soinestobjectivement dansdes stratégies, non dites,de concurrence l'un par rapportà l'autrepour < fairedu malade afin " de tirerle maximumde lait de la mèrenourricière(devenuede moinsen moinsprodigue) qu'estl'Assurance maladieet qui ne saitpayer qu'enaveugle. Le pouvoirde la hiérarchie Lesrapportsdes soignantsayantà collaborer pour la priseen charged'un maladedonné devraientpouvoirsefairesansaucunearrièrepenséede hiérarchie professionnelle. Ce type de rapportshorizontauxhautementsouhaitablepour la qualitédessoins,où chacuns'exprime et argumentelibrement,voire critique l'autredansune démarcheconstructive, reste exceptionnel.Les rapportsentre soignants sont plombéspar des rapportshiérarchiques bienréels,intrinsèquement liésà desrèglesdu jeu professionnelles intériorisés et danslespratiquesquotidiennes. Dansl'exercice libéral,de professionnels nombreux paramédicaux sont de fait sousla dépendance économiquedes qui prescrivent médecins lesactesdont ilssont les exécutants et dont ils vivent,ce qui rend impossibletout rapport d'égal à égal lors d'unepriseen chargecoordonnée d'un même malade. Dans un Centre Hospitalier Universitaire, c'estselonle seulbon vouloirdu prince chef du service,que l'interneen " " pourraou médecinedudit servicehospitalier non poursuivresa carrièrehospitalière, en y étant acceptépour poursuivre son clinicatet prétendreainsi à une carrièrehospitalière pérenne.ll devientimpossible pour ce médejoue un rôle qui fort cin, déjà expérimenté, et pivot dans le soin du maladehospitalisé, de ruerdanslesbrancards. lJargent,remèdede la frustration Beaucoup de médecins libérauxtombentrapidementsousla coupede l'argent.Destraites de l'empruntfait à une banquepours'installer, un loyerà payer,unefamilleà nourrir,unecertaineidéedu prestigede la profession et voilà notre médecin commençantà compter le nombred'actesqu'il auraà fairedanssajournéepourrembourser toussesfraisde fonctionnementavantmêmede pouvoirs'acheterun sandwichpourmanger.Dèslors,plusou moins insidieusement, il devientmoinsexigeantvis-àvisdespatientsou de lui-même: il accepteles actes courts, multiplie les reconvocations de qualité malades au détrimentde la dessoinset de l'estimede soi. La journéedu médecin devientde la sortepeu gratifianteet la seule compensation serade gagnerde l'argentpour o se réaliser r en dehorsde la médecine. Touscespouvoirset d'autresencoreagissent sansannoncerla couleur.lls influentpourtant fortementle façonnagedes soinsque nous sommesamenésà prodigueret nécessitent d'êtreprisen considération par tous ceuxqui se battentcontrele rouleaucompresseur libépour améliorerla ral et font des propositions qualitédessoins. PRATIQTUES ll Publicité et ,ène du pouvoir I (hristine Porcher Sociologue . Du senset de la simplicité (1). Tel est le slo" gan de la campagnepublicitaire d'une entreprise La publicité télé " 3D " est une succession d'imageséchographiques d'un fætusqui défilent é l e c t r o n i q u eq u i d é f i l e a c t u e l l e m e n st u r n o s pendantquelquessecondes, sur un fond musical écransde télévision et couvrede pleinespagesde nos magazines. Aux côtésd'un téléviseur à vision évoquantune berceuse. Apparaissent ensuite,en caractèresblancs sur fond noir, l'argument o périphérique, d'un lecteurDVD-Rqui peut enre- Parceque les enfantsne naissentpas en deux gistrer 130 heuresde programmesou encore d'une brosseà dents qui possèdeun " sonic >, power on nousdévoiledes imagesd'échographie en troisdimensions, et on nousinformeque dimensions", puis une photographiede l'appareil 3D (qui sembleempruntépour l'occasionà les médecinspeuvent désormaisobtenir d'un site de la firme précisentque " leséchographies sont désormaisplusvraiesque nature" et que < lessouvenirs commencentmaintenantplustôt ,,, . premiersourire: - 3 mois o (nousdécouvrons s c a n n e rl e s i m a g e s d o n t i l s o n t b e s o i n e n quelquessecondes. Cesfilms ont respectivement pour titres< 3D > et < Patient Lediscourspubli". c i t a i r e n ' e s t p l u s s e u l e m e n ti n s t i t u t i o n n e li,l une scènede La guerre des étoiles).Le visuel presseet l'animationnumériqueprésentée sur le alorsson plus beau rictus).On croiraitvoir dans touchedésormais aussile grand public: lestech- certainesde ces séquences,prisesindividuelle- niquesd'imageriemédicaledeviennentdes produits de consommationcourante! En bref, les ment, des représentations de ciresanatomiques Q u a n t a u o p a t i e n t" , i l é v o l u ed a n su n u n i v e r s m é d i c a l c a r i c a t u r a lt o t a l e m e n t a s e o t i s é .L e avantagesde la haute technologiesont d'une telleévidenceaujourd'huique tout le mondedoit " t i c - t a c " i n c e s s a ndt e l a b a n d e s o n a c c o m en bénéficier... Pourquoicontinuerà se satisfaire p a g n eu n b r a n c a r de t s o n h ô t e j u s q u ' àl a f i n d e de clichésd'échographie flousen noir et blancet l ' e x a m e n ,s y m b o l i s a n tl ' u r g e n c ed e l a s i t u a accepterde passerplus de tempsque nécessaire t i o n . L e p e t i t é c r a n s e d i v i s ee n d e u x : d ' u n dansun angoissant tunnelde scanner? c ô t é , l ' i m a g e d u s c a n n e r e n g l o u t i s s a n lte La surprisedéclenchéepar ces images plutôt p a t i e n t ; d e l ' a u t r e ,s o u s l e r e g a r d s e r e i nd u inhabituelles cède rapidementsa placeau ques- cobaye,la reconstitutionnumériqueprogressit i o n n e m e n t : d a n s q u e l l e m e s u r e l ' e x i g e n c e v e d e s o n a n a t o m i e g r â c e a u b a l a y a g ep a r d'une compétencetechniquesuscitéepar une r a y o n sX . D a n sl e d é c o r b l a n cs e d é t a c h e n st u r l o g i q u e c o m m e r c i a l ep e u t - e l l e c o n f é r e r a u f o n d n o i r l e s o r g a n e s c o l o r é sd ' u n é c o r c h é patient l'illusiond'un pouvoir sur la profession n u m é r i s éL. a s c è n ea d e s a l l u r e sd e s c i e n c e - f i c médicale? t i o n . U n e v o i x o f f c o m m e n t e( 2 ) : " D a n su n e ll s'agitici de livrer, à chaud quelquespistes " ", de réflexionouant à la distributiondes oouvoirs v o i r , p l u sv i t e i l p e u t a g i r .L e s c a n n e rC T d o n n e entredifférentsacteursde la scènemédicale. u n e i m a g e d é t a i l l é ed u p a t i e n t e n q u e l q u e s PRATIQUES s i t u a t i o nd ' u r g e n c e ,p l u s v i t e l e m é d e c i np e u t s e c o n d e se , t n o n p a s e n q u e l q u e sm i n u t e s . Cagner du temps sauve des vies ,,... . en a p p u y a n ts u r u n b o u t o n " . Sur son site Internet la firme explique pourquoi avoir choisile thème de la simplicité: " La révolution numériqueest censéenous simplifierla vie, maisdes étudesont montré que ce n'était pas le cas.Parexemple,prèsde 30 o/odes produitspour photos de famille. Le scannerprend ensuite le relais. La technique permet à la médecine de prendresoin de son < patient de vérifiersi tout ", est < normal Et ainsijusqu'auderniersoupir. ". Ce discourspublicitaires'inscritdans un processusde médicalisation de la société,une médicalisationdu corps sain, non du corps malade.La pathologie,la souffrance,l'angoissesont exclues le réseaudomestiquesont retouméspar dls utilisateursqui n'aniventpas à lesfairefonctionner.[...] de cette lecturedu corps. La parole disparaîtau profit des imageset des chiffres.Le corpsvécu est Nousavonsprisconscience de simde la nécessité mis à distancepar la représentationd'un corps plifierla technologieet noustravaillonsen ce sens. objectivé par une technique toute-puissante. [...] Notre marque affirmeque la simplicitépeut être une finalitéde la technologieet peut lui donner tout son sens.> Soit. Maispasn'importelaquelle! Seulela technologie Mais s'agissantde techniquesd'imageriemédi- enfouisdu corps humain. Danscette orchestra- cale,lesargumentsdu discourspublicitairepeu- tion de la technologie,le médecin n'occupe vent-ilsfaire autorité ? Fairevaloir la simplicité qu'un rôle de secondplan. Acteuranonyme,sa technologiqueau nom d'une efficacitédiagnostique n'est-cepas mettre en questionla compé- compétenceest soumiseau contrôlesocial. tence techniquedu praticien? C'est également même stratégieque certainespublicitésconsa- donner au spectateurconsommateurpotentiel créesà descosmétiquesou à des produitslaitiers, d'examenscomplémentairesune légitimité de prescripteur. il s'agit de persuaderdu caractèreindispensable de cesmachinessophistiquées voire,de manière C'est un fait : les absentsont toujours tort. Les sous-entendue, du risquemortel auquel on s'ex- médecinsn'ont pas été conviésà ce show média- pose avec des techniques plus anciennes(3). tique. Parcequ'il n'est pas questionici de médecins, mais de médecine.Parcequ'en esthétisant Soyonsclair,il n'est pasquestionici de mettre en causela compétencedes ingénieursni la qualité la plus récente,dernier cri, détient le pouvoir de révéler en toute quiétude les secrets les plus Souscouvert d'argumentsscientifiques,selon la ainsilescorpsque l'on donne à voir,tant dansleur ou traitementgraphiqueque dansleur miseen scène, Seulement,tenter d'élever le patient au rang on inscritle corps dans une extérioritémédicale. d'expert et l'investir d'un pouvoir de décision On confieà la techniquemédicalele soin de réali- quant au choix de telle ou telle marque,de sur- l'efficacité des techniques d'imagerie. ser une image de l'enfant à naître bien avant sa croît en dehorsde tout contextemédicalréaliste, venueau monde,ce n'estpasune nouveauté;les sembleen contradictionavecun discourscentré futurs parentspeuvent aujourd'huiconserverun enregistrementvidéo des mouvementsdu fcetus sur l'efficacitémédicale. Depuis longtemps les radiologuesne sont plus considéréscomme des observéspendantquelquesminutes.La médecine, photographes.Lesexperts,ce sont eux. plusencoregrâceà l'échographietroisdimensions plusvraieque nature>, fait existervirtuellement " le futur enfant en dépossédant en quelquesortela mère de son fætus. lmage qui va, socialement, susciterémotion et émerveillement.Le but n'est passeulementesthétique,précisela publicité,tout en offrantla premièreplaceau fætus dansl'album l. " Senseand simplicity", slogande la campagne publicitairemondiale,presseet W, de la marque. 2. Traductionde l'auteurà partir de la versionanglaise. 3. " Gagnerdu tempssauvedesvies", dit la publicité " oatient". P R A T I q U E S 33 Résumé : Après la mainmise du corps médical sur la santé, voici le règne des iuges. Les c o n s é q u e n c e ss u r l a r e l a t i o n d e s o i n s o n t p r o f o n d e s . TT o o o Une Justrce çlur aveugle A n n e - l " l a r i eP a b o i s Médecin generoliste Dépossédés de leur santé,lesconsommateurs de s o i n s f o n t v a l o i r l e u r s d r o i t s i n d i v i d u e l se n c o n s o m m a ndt u j u d i c i a i r em, é d i c a l i s a t i oe nt j u d i - I patient dont la signaturedéresponsabilisera le médecin (mais remplacerla non information faites-moiconfiance" oar l'étouffementne " prouvepasque le patienta comprislesbénéfices ciarisation de la sociétéobligent.L'irruptiond'un troisièmepersonnage,le juge, dans la relation et lesrisquesencourus).Contraires au secretpro- duelle médecin-malade, altère l'essencemême fessionnel et au sermentd'Hippocrate: la présen- d u s o i n ,a l o r sq u e l a l o g i q u ei n q u i s i t o r i a ldee s juridictions ordinaire et ordinale empêche " " " " l ' u t i l i s a t i odnu s a v o i lru r i d i q u ee n v u e d ' u n ea m é liorationdes pratiquesmédicalescollectives. Le ce d'un témoin lors de la consultationde oersonnes" sensibles" (enfants,adolescents, sexe opposé)par craintede plaintepour attentatà la pudeur, précautionscontrairesaux besoinsde consommateuren tire des bénéficesd'ordre confidentialité de nosconsultants, et l'application financieret moral : il se voit confirmédans ses d e s o b l i g a t i o n sd e r e c h e r c h e rl ' i d e n t i t é d e s patientset de dénoncerlesétrangersen situation droits,la légitimitéde son existenceet son pouvoir de faire passerle médecin sur la balance irrégulière. a v e u g l ed ' u n e d o u b l el u r i d i c t i o nP. o u rl e m é d e - Autre conséquence, le changementdu rapportà cin, la prisede conscience de ce risquepeutdeve- l'écrit: le tri sélectifappliquéau dossiermédical. nir envahissante et la méfianceemooisonnerles rapportsde confiance: le dialogueestune épreu- Le dossierpartagéavecle patientne peut contenir des notesqui, si le médecindevaitse présen- ve de forceentre malade(plaignantpotentiel)et ter devant une luridiction,seraientconstitutives de preuvesà sa charge,lesjugeset leursexperts médecin(accuséperpétuel). Conséquencepernicieusede la judiciarisation ayantune fâcheusetendanceà interpréterce qu' croissante sur la pratiquemédicale: le médecin estécrit,ce qui ne l'estpas,maisdevraitl'être,ce va donner la priorité,avant même l'élaboration qui l'estet ne devraitpasl'être. de stratégies de soin,à l'élaboration de stratégies A u t o c e n s u r ep e r m a n e n t e ,p r a t i q u e sd e s o i n d'évitementdes risques: refus de prendre en c h a r g et o u t m a l a d ep o s a n tu n p r o b l è m eq u e l ( pour se couvrir de listes conque; prescription " interminables d'examens complémentaires (" j'auraitout fait ") ; éliminationdu mot pro" bable" ou " douteux" dans l'explicitation de la démarchemédicale(le doute n'est pas admis dans les tribunaux); affluxde protocoleslistant dégradées,déresponsabilisation, ouverturemassive de parapluies: le glaivejudiciaireaveugle tous lesaccidentspotentielsauxquelss'exposele sationcollectiveau partagedes responsabilités ? P R A T I Q T UI S toute la société.Pour instaurerun rapport nouveau entre patientset soignants,chacunacteur de sa vie et responsable, suffit-ilde fairecirculer les informations,partager les pouvoirs,reconnaître les droits, mais aussi les devoirsde c h a c u n? C o m m e n tp a s s edr e l a d é r e s p o n s a b i l i - R é s u m é: L ' O r d r e d e s m é d e c i n s e s t t o u j o u r s l à , m e n a ç a n t l e s m é d e c i n s d e p o u r s u i t e s l o r s q u ' i l s se sentent tenus de faire un signalement pour maltraitance. Les conséquencesdes c o n d a m n a t i o n sp a r l ' O r d r e p o r t e n t a u s s is u r l ' a c c è sa u x s o i n s .U n e r e f o n t e d e l a l o i s ' i m p o s e : en cas de maltraitance, alerter les autorités iudiciaires devrait être une obligation assortie d'une immunité pénale. Malgré l'Ordre, proteger et sorgner -t.O Les injonctions paralysantesde l'Ordre Aujourd'hui,alorsque la une desjournauxtélévi- pendantdeux semainespar une tiercepersonne. Au mois d'août, à l'occasiond'une .. errance> Y v e l i n ef r i l a y sés nous abreuvede cas de maltraitance,des dans le hall de l'immeuble,l'entourageréussità l a f a i r e h o s p i t a l i s e rs a n s p a s s e r p a r v o u s . Médecingénéroliste médecinssontcondamnésoar l'Ordredesmédede maltraicins quand ils font des signalements intrafamiliale envers des enfants, sousprétance Vousévoquez,bien sûr, alorsun risquede mal- texte < d'immixtion dans la vie privée". Je fais partiede ces médecins.J'avaisfait, en urgence, un signalementauprèsdu juge des affairesfami- Le Conseilde l'Ordre vous dit " Lorsquevoussuspectez une moltroitonce, faites hospitaliserIa patiente (sous-entenduelle sera à l'abri des lialespour protégerune de mes patientesâgée de douze ans. Ce signalementa été reçu par la justiceet a abouti à la protectionde l'enfant. coups), leshospitaliersvousoiderontà confirmerle diagnosticde moltroitonce, (maissorti du milieu, Mais,à la demandede la personnemiseen cause traitance. peut-on l'établir ?). Vous respirezdonc, c'est pour maltraitance,l'Ordre des médecins m'a l'hôpitalavecson assistante socialequi va le faire, jours quatre mais aprèsle début de l'hospitalisa- condamnéeà un mois d'interdictiond'exercice (dont quinzejours avecsursis).Un appel auprès tion, aucune mesurede sauvegardede justice n'estenvisagée, l'entouragen'estpasvenuvoir la du Conseild'Etatest en cours. patiente.Pendantce temps,lesbiensmobilierset Depuis,c'est devenuun véritabledilemme que l'argent peuventêtre spoliés.Sollicitéeet infor- de procéderà une demandede sauvegarde de justice(1). Comment protégerune patienteque je connaisdepuisde nombreuses années,devant mée par un membre de l'entourage,l'article44 et une suspicionde maltraitancepsychologique du Codede déontologievousautoriseà signaler: qu'une personne " Lorsqu'un médecin discerne auprèsde loquelleil est oppeléest victimede sévices de négligence? Faireou ne pasfaire,celarevient encoreune fois à une immixtiondans la vie pri- ou de privotions,il doit mettre en æuvrelesmoyens lesplus odéquotspour lo protégeren foisontpreuve vée, puisquel'auteurprésuméde la maltraitance de prudence et de circonspection.S'il s'ogit d'un est un membrede la famille. mineurde moinsde 15 ons, ou d'unepersonnequi Voilàce qui s'estpasséet qui pourraitvousarriver n'est pas en mesurede seprotégeren roisonde son à vousaussi: votre patiente,une dame trèsâgée est en carencevitaminique,son traitementn'est pasdonné,on lui criedessus, ellevit dansla peur. ôge ou de son étqt physiqueou psychique,il doit, souf circonstqncesporticulièresqu'il apprécie en conscience,olerter les autorités judicioires,médi- Sestremblements, sestroublesmnésiquesdispa- coles ou odministrotives). vor.rs décidez de raissent totalementlorsquela patienteestgardée demanderune mesurede sauvegarde de iustice. PRATIQ-UES Après réflexion,comment rédiger ? Riend'utilisable sur le sitede l'Ordre; sur servicepublic.fr,pasde modèle,simplementle contenu: " Le médecinn'est tenu qu'ou signolementdes foits constatés.ll ne dénoncepos leur euteur >, o Le Iégisloteuroutoriselo levéedu secretprofessionnel pour informer les outoritéscompétentesdes sévices ou privotionsimposéesà une personnehors d'étqt de seprotégerelle-mêmeen roisonde sonôge ou de son étot physiqueou psychique., ll est même précisé que les médecinspeuvent être poursuivis Et pourtant, quel professionnelde santé autre que le médecingénéraliste peut le mieux appréhenderla maltraitance familiale,lui qui soignela personnedansson milieufamilial,socialet culturel ? Comment peut-onse faire entendre,d'un côté la loi dit, o il faut dénoncero, de l'autre le conseilde l'Ordre nous le défend : " immixtion dons la vie privée 7 " Un retentissementsur l'accèsaux soins Pendantce temps,je découvreaveceffarementles pénalementpour non assistance à personneen péril : même s'ilssont soumisau secretprofes- conséquences de l'interdictiond'exercicedont l'ai tion constatée,son hospitalisation, maissorti de la désorganisation du travailau retour,mais aussi et surtout,j'ai reçu de la CPAMune lettre recom- été frappéepour l'affaireprécédentequi concersionnel,la loi leur imposedonc le signalement. nait donc cette enfant de douze ans. Cela ne se Vous rédigezalorsla demandeen mentionnant limite pasà prendredes congésà une date préciuniquementlestroublespsychiques et leurévolu- se,sanspouvoirorganiserla continuitédessoins,à son contextefamilial,ce certificatestbienvidede sens. Un parcours de combattant mandée,m'avertissantque du fait des dispositifs conventionnels, dans un délai d'un mois, je ne seraiplus jamaismédecinréférent: avec impossi- Et le parcoursdu combattantne fait que combilitéde fairele tiers-payantpour des patientsparmencer...Trouverle nom, l'adressedu procu- fois en situationprécaireet avec des pathologies reur...Six jours plus tard, vous avez le récépissé lourdesqui ne peuventavancerl'argent d'une de l'accuséde réceptiondu signalement, maisle consultation ou d'une visiteà domicile! juge des tutellesn'est pas encore prévenu,un Restent aujourd'hui l'interpellationaux polimembrede la familleest allédemanderune sauvegardede justice.Et pourtant on (le conseilde tiques,et le recoursau Conseild'Etat pour que soit levée la condamnation (2). Resteaussi la l'Ordre)vous avaitdit que le mode d'emploidu batailleplus généralepour demanderla fin des poursuites et des sanctionscontreles200 méde- signalement était simpleet facile. f hôpitaln'entendraque lesproposdu maltrai" tant ', et non la parolede la maltraitéeconsidérée comme démente. L'expertisepsychiatrique cins qui ont été condamnéspour avoirdénoncé de la familleet de son entourageseraréfutéepar pénal et du Code de déontologie: alerter les autoritésjudiciaires en casde maltraitance devrait l'équipe hospitalière,votre parole de médecin généraliste ne serapaspriseen compte.De plus, la fille a été au courant de votre lettre ce qui constitueune violationdu secretmédical. des maltraitances à enfant. S'imposeenfin une refonteclairede l'ensembledes articlesdu Code être une obligation assortied'une immunité pénale. Affaireà suivre... Conclusionsde l'hôpital,la patientene peut plus resterdans son appartement elle doit être dans une maisonde retraitemédicalisée, contreson gré, alorsqu'un de sesenfantssouhaitela prendrechez lui. Comment faire ? Un contre-pouvoirassociatif pourra-t-ilaidervous,le médecinet votrepatiente? P R A T I Q U ES 1. La sauvegarde de justiceest une mesured'urgence destinéeà protéger temporairementdes personnes dépendantes,décidéepar le luge des tutellesaprès signalement. 2. Un communiquéde pfesseet des pétitionssont en cours,consultables sur le sitehttp://smg-pratiques.info. N[on au contrôle des médecinspatronaux Salariés,syndicats,médecinstraitants et médecins du travail : comment résisterensembleà doivent reprendrele sujet de la santé au travail comme axe de lutte, car c'est une questionpoli- l T a r t i n eL a l a n d e l'offensivecontre le droit d'être malade ou fati- Médecingénéroliste gué et d'arrêterparfoisde travailler? tique. Répondreà l'accusationde " la montée de > par une réflexionsur la santéau tral'absentéisme llAssociationpour l'Etudedes Risquesdu Travail organisaitune journée,le 23 octobre 2004, pour vail et le respectde la dignité.Lesmédecinsdu travail peuventdéfendrel'importancedu secretmédi- en débattre entre < experts sociaux " (syndicats cal et soutenirles salariésface aux pressionsdes mais aussi ergonomeset psychologuesdu travail...)et < expertsmédicaux (médecinsde ville " et médecinsdu travail)pour fairefaceà la culpabilisationgénéralisée et relayéepar les médiassur employeurs,lesmédecinstraitantsdoivent résister aux et proposerleur assistance à la culpabilisation .. l'abus des arrêtsmaladie,et à l'organisation de " patronaux, par l'exles médecins dont soncontrôle pertiseest maintenant reconnuepar l'Æsurance conseilsde la Sécuritésociale.Pourdévelopperune maladiepuisqueleur avis,coupléà celuidu méde- ce qui génèrele risque,et organiserle travailen réseau,que lessalariés soientacteursde leur deve- cin conseilde la Sécuritésociale,suffità fairesupprimerlesindemnitésjournalières. La questiondes patientsfaceaux médecinspatronaux,se servirde leur rôle d'interlocuteursface aux médecins autre approchede la santé au travail,il faut être dans une démarchede prévention: réinterroger nir, décidentde ce qu'ilsdélèguentà la médecine, arrêtsde travailest liéeà cellede l'aliénationpar le travail, de sa pénibilitécroissanteet des consé- et refusentles faussesexpertisesmédicales.Les o observatoires locauxde la santéau travail" sont quencesdu vieillissement Lessyndicats dessalariés. desoutilsà construire,en urgence. PRATIQ-UES 37 ALERT: Associationpour l'Etud, des Risquesdu Travail: 8. bis rue du BuissonSoint-Louis 75010 Poris http :/ /www.olert.a sso.fr A qui profite le crime ? l'lartineDevries Médecingénéroliste '1975, ie connaissais très bien le sujet à l'époque. le vous Le traitementdessciatiques, en'1974ou résume: le traitement,c'est le repos,au lit, et les médicaments, c'est juste pour ne pas avoir mal c'estvraimentgénéreux ! Médicaments,priseen pour éviterla chronicisachargepsychologique " ,, tion lire,pour fairepressionsur le patientpour qu'il reprennele travailavec sa douleur,et de pendantqu'on est au lit. Voilàce qui se disaiÇ dans les meilleurspublications,spécialisées et tout... Quellene fut pas ma surprisela semaine tion de sa chargede travail.Ce n'est évidemment pasla même chosede travailleravecune sciatique dernière,de liredansune bonne revuemédicale, si on estmanæuvre,magasinier, conducteurd'en- un consensus sur le traitementdes lombalgieset g i n ,o u c a d r e . . . des sciatiques,bien fait, tous les cas étaientenvisagés,un arbre décisionnelmagnifique.Je vous Cette publicationsert à fairepressionsur le médequi a la chargede déciderde l'arrêt cin généraliste, résume : surtout ne pas se reposertrop long- de travailet de l'expliquerau patient.Et à qui cela temps. Donc, lombalgie sans irradiation,trois joursd'arrêtde travail,lombalgieavecirradiation partielle,cinq jours, sciatiqueentière,huit jours, profite-t-il? On peut craindreque ce ne soit pasau bonne humeur.Riensur la modulationen fonc- patient ! Maisaux entreprises, et au budget de la Sécuritésociale,maisà court terme seulement. Arrêt de travail Iêgrtime J ' | a r t i n e D e v r i e s Valérievient en consultationaujourd'hui,elleest Médecingénéroliste enceintede six mois,et ellea vu < son gynéco " hier.Tout va bien pour cette grossesse, qui est la première; simplement,elle est fatiguée.Elletravailleà Auchan,au standcharcuterie à la coupe, ellesert,se penchepour prendredansla vitrine, combiende fois par jour ? A ma question Vous " n'avezpas demandéau Dr Z de vous faire un arrêtde travail? , . Si, maisil n'a pas voulu ; il - Elleestenceintede six moiset elleestfatiguée. Elletravailleà Auchanet ... - Ah bon, mais vous ne mettez pas toutes les femmesenceintesen arrêt de travail? - Non, seulementcellesqui sontfatiguées, et qui ont un travailqui lesfatigue. - Ah bon, parce que la grossesse est un état physiologique, et celane lustifiepasun arrêtde travail. ne fait d'arrêtde travailque lorsquela grossesse ll n'a oas refusél'arrêtde travailde Valérie. se passemal... et que l'enfant risquequelque M a i s c o m b i e n d e m é d e c i n ss ' a u t o c e n s u r e n t chose." Jefaisdonc l'arrêtde travailen pestant sur le collègue. La semainesuivante,je reçoisun coup de télé- téléphone? Touslesgynécologuesde la ville,à phonedu médecinconseil(1) : - Chèrecollègue,MadameR est en arrêtde travail, pour quelleraison? P RAT IQ*U ES pour ne pas recevoir un tel coup de m a c o n n a t s s a n €e . l. Médecinde la caisseprimairede Sécuritésociale, contrôlemédicalde l'échelonlocal,ça s'appelle. R é s u m é : U n é c o n o m i s t eo u v r e d e s p i s t e sd e r e c h e r c h es u r l e s q u e s t i o n sc o m p l e x e sq u i s o u s t e n d e n t l e r ô l e d e s d é t e r m i n a n t sé c o n o m i q u e sd a n s l e c h a m p d e s p o u v o i r s e n m é d e c i n e . Rôle des déterminants economrç[ues , jouent également tions...)et d'autresinfluences (règleséthiques, regarddespairs...) ; - lespratiques par le biaisde la des professionnels sensible à la situaelle-même demandedespatients, Comment les politiquesde contraintesfinand'emploides tion de l'emploi.Ainsiles problèmes sur les pratiques? cièresse répercutent-elles Ces politiquesont des résultatstrès inégaux.Elles mèreset de gardedesenfantsse combinentégalepaysau prixd'un ration- ment pour déterminerun type de demandede danscertains sontefficaces à comprendre en soins.Il y a ici desenchaînements nementde l'offre.Dansd'autres,en particulier ; du capital France, en échec.La résistance - enfin les impératifsde rentabilisation ellessontlargement sontau cæurdesactionsde ceuxpourqui la santé des professionnels a sansdoute sa part dans cet technoont estun marché: industriepharmaceutique, échec.Dansle mêmetemps,lesprofessionnels C'estsansdoutela partie un sentimentde perte de pouvoir.Lespolitiques logiedu soin,assureurs... et pratique budgétaires seraientmisesen échec desrapportsentrepouvoiréconomique d'enveloppes plus grand qui la étudiée, ce qui pouvoir qui est aujourd'hui par un dessoins médical amoindrit? Un jeu perdant/perdant ? C'est possible,mais alors, ne veutpasdirequetout soitclair. commentça marche? financières Pourquoides pays,dont leséconomiesfonctionAutrepoint.Lespolitiques de contraintes ontnementtoutesdansle cadredu capitalisme, sont impuissantes à dire quoi que ce soit sur la du systèmede soinssi différépartitionde l'enveloppe. Ainsi,dansle domaine ils des organisations hospitalier, lesrèglesinternesde répartition(achat rentes? que lesEtatsd'un matérielde pointeou financementdu suivi La Suèden'estpas moinscapitaliste pourtant, que noussavons lesmodesd'orpsychiatrique) échappenttrès largementaux ges- Unis.Et ganisation de soins,les niveauxdes des systèmes tionnaires et se réaliseen fonctionde rapportsde revenus,lestypesde pratiques,lesrapportsentreteforceslocaux.ll faudraitallervoir commentça se professionnelles du passeici et en ville. catégories nuspar lesdifférentes que ces caractéristoutes secteurdu soin...bref tiques sont différentesd'un pays à l'autre. Les Comment les impératifsde rentabilisationdu capital influent sur les pratiques profession- contrainteséconomiquesarriventdonc dans le chamode la santéet du soinen étantmédiatisées nelles? Lesimpératifs de rentabilisation du capitalinfluent par diversesstructuressociales.Le pouvoir propre du champmédicaljouesansdouteun rôleici, mais sansdoutesur : - lespratiques d'autresconstructions socialescommele mode de à la recherche d'un desprofessionnels financement dessoins,le type de réactiondu corps certainniveaude revenu.Mais cette influencese ne de santé,la capacitédans le socialaux inégalités développedans un cadreque le professionnel de santéen amontdu médicalede la région, paysà prendrelesproblèmes maîtrisepas (démographie de soinsdes popula- soin...iouentsansdouteun rôleici. habitudedesconsommations questions, aujourd'hui sansréponsesatisQuelques pour pourl'avenir. imaginer des scénarios faisante, IRATIQfJE5 Pierre Volovitch Chercheuren économie à l'lnstitut de recherches économiqueset sociales(IRES) IRES 16, boulevarddu Mont-d'Est Cedex 93142 NoisyJe-Grond p [email protected] Résumé : Le principe d'autorité nous est inculqué dès le début de nos études. Les cours m a g i s t r a u x p r o f é r é s p a r d e s s p é c i a l i s t e sh o s p i t a l o - u n i v e r s i t a i r e sd e s s i n e n t p o u r n o u s a u f i l d e s a n n é e s u n e v i s i o n d e l a m é d e c i n e s a n sg r a n d r a p p o r t a v e c l e m é t i e r q u e n o u s e x e r c e r o n sp l u s t a r d p o u r p €u q u e n o u s c h o i s i s s i o n sl a m é d e c i n e g é n é r a l e . Uavis d'expert ( h r i s t i a n L e h m a n n D'où parles-tu? Medecin génerolisLeet euivoin C'estl'injonctionque se lançaientlesétudiantsen m a i6 8 . Récemment, dans lestravauxde PierreBourdieu Jepensequ'aujourd'hui,leschosesayantévolué, la relationmédecin-patient doit devenirla rencontre de deux confianceset de deux conScrences. et de SergeHalimi,cettequestionest réapparue, s'adressant, entreautres,aux journalistes, comme En tant que médecin,.jedois pouvoiréveilleret nourrir la consciencedu patient, mais je dois aux " experts> qui squattentnos écransde téléaussipouvoirlui faireconfiance. vision.D'où parles-tu? Pourquoidevrions-nous Sije dois participerà son éducation la vieille, " ", s u b i rt a g l o s e? question,va seposerà moi : o D'où sempiternelle Depuisvingt ans,j'exercela médecinegénérale. L'un des clichésle plus fréquemmentcolporté, tu parles? " Carsetromper,c'estembêtant,mais diffusersespropreserreurs,c'estcatastrophique. Le médecin qui se préoccuped'éducationdu c'estqu'en vingt ans,la relationentrele médecin patientse trouvedonc confrontéà une immense et le patients'estprofondémentmodifiéeparce tâche,cellede sondersesprésupposés, de revenir que les patientsseraientdevenusplus exigeants, c a r m i e u xi n f o r m é s . s u rc e q u ' i l a t e n u p o u r a c q u i s . C'est peu dire, hélas,que de constaterque nos Encoreun autrecliché,celuide cettefracture,qui étudesne nousy préparentguère. séparerait comme un abîmeceuxqui ont accèsà Le principed'autoriténous est inculquédès le cetteinformationet ceuxqui n'y ont pasaccès. début de nos études.Lescoursmagistrauxproférés par des spécialistes hospitalo-universitaires pour dessinent nous au fil des annéesune vision Pourtant.pour ceux d'entre nous qui ont utilisé l'outil Internet,le problèmemajeur,aujourd'hui, n'est pas de trouverdes informationsmédicales, de la médecinesansgrandrapportavecle métier mais de savoir quelle crédibilitéattacher aux que nous exerceronsplus tard, pour peu que informationsque l'on reçoit. nouschoisissions la médecineqénérale. Dernierouvrogeporu : Patients,si vous saviez..., EditionsRobertLaf{ont,2003 www.chri stionIehmonn.net D a n s l e s a n n é e sc i n q u a n t e ,u n p r é s i d e n td u conseilde l'Ordrea écritque la relationmédecin- Pendantmes études,je n'ai jamaisentendupar- consciencedont le patient serait dépourvu.Et que le patient,lui, n'a qu'à faireconfiance. prenait.le donneraiun exemple,entre mille.Au cours des années80, plusieursmédicamentsà ler de " lecturecritique de l'information.Pourla " patient,c'était la rencontred'une confianceet bonne raison que ceux qui m'enseignaient d ' u n e c o n s c i e n c eD. é f i n i ra i n s i l a c o n s u l t a t i o n - n'avaientprobablementpas grand intérêt à ce c'est poser que le médecin est doté de la que je poseun regardcritiquesurce qu'on m'ap- IRATIQUES basede fluor sont mis sur le marchépour préve- ment de synthèse,le GRIOaffirmequ'il s'agit-là nir les rechutesde tassementsvertébrauxchez la femme ménopausée.Rapidement,ces produits du principe même de ce type de document : volontairementconcis,et ne retenant " synthétique, que les pointsd'accordindiscutables.D'oilleurs,s'il ovoit été plus long, l'auriez-vouslu jusqu'ou bout ? vont subir un élargissement d'indication,et être utilisésmêmechezdesfemmesn'ayantpasd'antécédent de tassementvertébral,conformément à l'adageselonlequel" qui peut le plus peut le moins "... Pourtant,dès 1987, il serafait état de S'il ovoit été plus complexe, l'ouriez-vous compris7 ,. Une telle manifestationde mépris,de la part d'expertsauto désignés,enversun contra- la survenue de fractures spontanéeschez les dicteurisolédont le seultort estde ne pasappar- ostéoporotiquestraitéspar le fluor. En 1988, la revue Prescrire sera le théâtre d'une tenir au sérail, est symptomatique.La revue Prescrire répondra: empoignadesur le sujet: s'esten effet dérouléeà Pariscette année-làune journéebaptisée confé" rence de consensussur les ostéoporoses> organisée par le Groupe de Recherche et < 1" ll est bien évident que le but des traitements d'lnformation sur les Ostéoporoses,alias CRIO, curatifsn'est pos d'ougmenterlo mosseosseuse ; il est de prévenirI'apparition ou lo récidivedes froctures vertébrolesou des os longs. o 2" Quand bien mêmeI'efficacitéthéropeutiquedu associationfondée à l'initiative des laboratoires fluor pourrait être offirméeà portir des seulscritères Merck-Clévenot.Rassemblant un groupe de spé- non cliniquescitésdonsle compte-rendude la séance, la justification de l'indicotion du fluor sur so cialistesessentiellement hospitaliers,la conférence sembfe,selon la revue Prescrire, avoir peu à seule efficacitéoinsi définie sons mention de ses voir avec une vraie conférencede consensus " ". Elle a consisté en une suite d'interventions effetsindésirobleslaisserêveur.Nousn'ollonsquand courtes,n'excédantpas un quart d'heure,sur un grand nombre de sujets." Par oilleurs), note la I'injure de supposerqu'ils ignorent que l'indicotion rcvue Prescrire, lorsque dans lo salle un interve" a soulevé lo question du rqpport nont bénéfices/risques du fluor, la discussiona été interrompuepar le présidentde séonce.On ne s'étonnera donc pos que lesrésultotssoientà lo houteur de même pas foire aux membresdu bureau du CRIO éventuellede toute thérapeutiquese fondesur I'évo(et non du seul luation du ropport bénéfice/risques bénéfice)." La polémiqueva enflerdans les annéesqui suivront, mais déjà, dans cet échange entre des la méthode adoptée. Ainsi,dons les 24 lignes du expertssoutenuspar l'industrie,et des médecins sepermettantde douterde la pertinencedesinfor- document de synthèseconsocréesou traitement curatif de I'ostéoporose, il n'est mêmepos foit allu- mationsqui leur sont communiquées, des points essentiels sont à noter : l'utilisationpar l'industrie sion oux effetsindésirablesdu fluor ! " La charge est rude, car si elle s'avèrejuste, une d'experts,de " leadersd'opinion ", médecinshos- aimable causerieentre spécialistes,sponsorisée par l'industriepharmaceutique, et maquilléeen ( conférence >, risqued'amenerles de consensus diffusion large envers les confrèresexerçant en ville,et la confusionentretenueentre des objectifs pitaliersreconnus,pour faire passerun messageà intermédiaireset des objectifs cliniques finaux, médecinsqui auront uniquementconnaissance seuls déterminantsréellement appréciablespar du documentde synthèsefinal à estimerque le médecinet malade.Comme l'énonceraplus tard débatsur le fluor esttranchéune fois pour toutes en faveurde celui-ci. assezsèchementune étude américaine: Desos " plus densesne signifientpas forcémentdes os de La réponsedu CRIOdansle numérosuivantde la meilleurequolitéarchitedurole., rcvue Prescrirene s'embarrassedonc pas des pré- La revue Prescrire oréconisede n'utiliser le fluor que dans le cadre d'études rigoureuses. Cette cautionsd'usage.Au sujetde la brièvetédu docu- PRÂTIQ*U ES étude clinique,miseen placepar le ministèrede la Santéfrançaisen 1991 (mieux vaut tard que j a m a i s ) , r e n d r a s e s c o n c l u s i o n se n 1 9 9 8 : On pourraiten citer d'autres.Comme les prises de positions de l'AFU, AssociationFrançaise pos so placeactuellementdonsle troi" Le fluor n'o tement de prévention secondaire des froctures matique du cancer de la prostate, quand ostéoporotiques.ll en est de même en prévention pflmatre...> ne le recommandepas, et que les fondateurs d'Urologie,incitantfortementau dépistagesystéI'ANAES, Agencefrançaised'évaluationen santé, même de la technique de recherchedu PSA Dansle mondeentier,au coursde cesannées90. reviennentaujourd'huisur son utilité.Aussibien des étudesde plus en plus nombreuses ont indi- que grand public, dans la presseprofessionnelle qué une probable augmentationdes fractures le dépistagedu cancerde la prostateest présen- des os longs chez les personnestraitéespar le té par I'AFUet sesreprésentants comme un enjeu fluor... et révélé une nette augmentationdes de santépublique,une réalitéprouvéeet incon- fractures du squelette périphérique (mains, tournable. La forte distorsionqui existeentre les doigts,pieds...).Toutse passeen fait commesi le fluor entraînaitune densificationdes vertèbreset sociétéssavantesne devrait-ellepas conduire les recommandationsde l'AFU et celles d'autres des os longs au détriment des os courts, et qui pouvoirspublicsà s'interrogersur les causesde plus est en détériorantla soliditéarchitecturale ces différences? des os longs! Ayant abordécette questiondesavisd'experts,je m'en voudraisde ne pas citer l'exempleanglais. John Le Carré, dans un interview au Voncouver Sun, avait abordé le sujet avec une colère non c'6TQut feinte : " Aurions-nousI'idée de demanderà notre médecingénéraliste,quond il nousprescritun médicoment,s'il est payé por la compagniephormaceutique pour le prescrire ? Bien sûr que non. C'est notre enfant. Ou notre épouse.C'est notre cæur, notre rein, notre prostate.Et Dieu merci,lo pluport desmédecinsont refusél'oppôt. Mais d'autresI'ont occepté,et Ia conséquence, dons Ie pire desces,est que leur opinion médicalen'est plus odaptéepour leurspotients,mois pour leurs sponsors., Que dire, dans ce cas, des < experts>)et autres leadersd'opinion> qui interviennent fréquem" ment, lorsdu lancementd'un produit (et parfois Depuis1990, note la revue Prescrire au moment même avant) pour en tresserles louanges? Un cardiologue anglaislèvele voilesur l'utilisation de du retrait des sels de fluor en 2002, les risques étaient connus. o Depuis, silencerodio dons les certainsgrandsnoms de la médecinedans une lettre au BritishMedicallournol : ,, Une compagnie milieuxrhumotologiqueset pormi les leadersd'opi- phormaceutiqueemploieplusieurséminentscardio- nion. Silenceaussidu côté des autorités. Falloit-il doncloissers'écoulerlesstockspharmoceutiques? , loguesbritonniquesqui pafticipent à un circuit itinérant de conférencessur l'ensembledu poys, ofin Est-ilbesoinde signalerque le GRIO ne publia jamais de mea culpa / C'est un exemple, entre de promouvoirlesmédicamentsde lo firme. Chocun mille. appellent"The RoadShow" (nda : qu'on pourrait PRATIQ-UE5 des cardiologuesde ce que les employésde lq firme traduire soit par " La Tournée" soit par " Le Cirque Ambulant >>)reçoit entre 3 000 et 5 000 livres (soit 5 000 à 8 000 euros),selon la fiques indépendantes,les quelques parlemen- taille de l'audience,en sus des frois de déplacements,pour une conférenced'une heure. Lesconfé- l ' a u t r e , u n e i n d u s t r i e p h a r m a c e u t i q u eq u i comme aux Etats-Unisplaide l'informationdu rencesà I'étranger,oinsi que les conférencesplus longues,sont encoremieuxpoyées...Lerésultotest patient,expliquequ'ellese borneraà communiquer sur de grandespathologiesméconnues: qu'ils reçoiventplus d'orgent onnuellementde cette l'asthme,le diabète,le sida...Dansle but louable seulecompagniephormaceutiqueque ce qu'ils tou- d'améliorerla priseen chargedes et désintéressé maladesqui s'ignorent,ou que les médecins chent en solaireà I'hôpital ou à I'université." taires qui ont saisi l'enjeu majeur de santé publiqueque représentela publicitédirecte.De Cesdernièresannées,de nombreuxmédecinsse Alorsque dépistentou traitentinsuffisamment... révélantplus rétifs à avaler sans sourcillerces < informations>>en provenancedirecteou indi- cescontrevérités cherchentsouventtout simple- recte des firmes pharmaceutiques,celles-cise sont tournéesversle grand public.En feuilletant culpabilisantles soignants,et en générant un besoin dans le public, au risqued'inventerde le New Yorker,magazineculturel de haute tenue, toutespiècesun conceptde maladiepour vendre le lecteurpeut tomber sur une doublepagecouleur annonçanl : " Provacholoide à prévenir les cordioques crises ". Depuis1997, dateà laquellela publicitédirecteau consommateur a été facilitée un produit. par la FDAaux Etats-Unis, une étude publiéepar l'AmericanMedical Associationrévèleque 73 o/o ment à créerun marchélà où il n'y en a pas,en rapidementsur la DHEA,la mélatoniJe passerai ne, ou la papayedu pape.En France,au coursde grandsquotiYété2002, leslecteursde plusieurs diens nationauxont pu découvrirun encart les des patientsqui demandentà leur médecinun médicamentvu dansune publicitésont exaucés. la nécessité d'échangeravecleur " informant" de médecinau sujetde leurstroublesde l'érection. Lespouvoirspublicsayantlaisséfaire,on a conti- Plus besoin d'intermédiaires, les industrielsdu nué, avecl'incitationà fairedoserle cholestérol, médicamentremplacentici lesmédecins... Car l'intérêtfinancieren jeu est ici majeur: entre l'HbAlC. ll y a de tout danscettecommunication 1996 eT1999,le budgetconsacrépar Big Pharma directe au patient engendrée et payée par les firmes,du bon et du très mauvais.Maismême si à la publicitédirectea fait un bond de 500 mil- cela est contre-productif en terme de santé lionsde dollarsà ... 1,8 milliardde dollars,dépas- publiqueou de maîtrisedes dépenses, l'Etatlais- sant largementle budget alloué à la publicité se faire parcequ'intervenirl'obligeraità mettre dansla pressemédicale... en placeune réellepolitiquede santéet d'informationdu public. Et même si l'on parlebeaucoup,car c'est politiquement correct,d'informer le citoyen, de lui permettrede participerà la priseen chargede sa santé,le retour sur investissement, on s'en doute, est conséquent: entre 1998 et 1999, les pres- Alors que nous reste-t-ilà faire ? A nous méde- criptions pour les 25 premiers médicaments revuesindépendantesde l'industrie,et auprès bénéficiantde la DTCA (publicité directe aux consommateurs)augmentèrentde 34 o/0,tandis que les autres prescriptionsmédicamenteuses < que de 5 o/o... n'augmentaient " En Europe,la batailles'amorce.D'un côté lespro- d'elles seules.Aux patients, d'acquérir cette fessionnelsde santé informés,les revuesscienti- seraun long combat. cins, continuer de travailleret d'affiner notre savoir, sans cesse remis en cause, auprès des que tout ce qui est véhiculédansles conscience, médias n'est pas forcément innocent, que la paroledu grand professeur vu à la télé " n'est " pas pour autant paroled'évangilesanctifiée. Ce PRATIQ-UES Un.dialogue q u i parai-ssa it acqu is Anonymes(1). Eux seulsarriventà faire comprendreaux étudiantsqu'un toxicomaneest une PierreA. - fournaliste ll y a vingt ans, l'épidémiede sidafait vacillerle personnedigne d'être considéréecomme un patient.Cesanciensusagersde drogue introdui- pouvoir médical,et les associations (Aideset Act sentlescourspar leurstémoignages, pittoresques Up notamment)portentla paroledes maladesau et poignants,expliquantcomment, aprèsavoir réaliséqu'ilsétaientdépendants,ils ont réussià arrêter les drogues grâce à I'aide de leurs ( pairs >, Çui y étaient parvenusaussiet qui cceurdes dispositifsthérapeutiques. Un acquis, croyons-nous.Puis,enfin, lestrithérapiesarrivent. Effetpervers: sanssa chargedramatique,le vécu des maladesn'intéresse plus.Mon médecinhospitalier,pourtant crédité des meilleuresintentions, membre d'organismesinternationaux, ne m'écoute plus non plus. Ce qui fait du bruit désormais,c'est le déficit de la Sécu (satanés assurés!), le prix des traitements(satanésséropos !), le déséquilibreNord-Sud(sacrésprivilégiés !). Comme si on était revenuau suivimédic a l d e sa n n é e s8 0 . . . U n j o u r ,à l ' h ô p i t a lj,e r â l e : mes prélèvementsqui restent en carafe quinze jours(raisonbudgétaire),qui ne sont pas analysésselonlesdemandesdu spécialiste (raisonécon o m i q u e ) . . .S i x m o i s q u e n o u s n a v i g u o n sà l'aveugle.Qu'allons-nous faire ? Mon médecin s'étonne. Voyons, ce ne sont que des contretempstechniques.Maisce " nous" ? Aurais-je un avissur la stratégiethérapeutique? ll faudratrois mois, trois rendez-vous,houleux, où je m'entends proposerde changer de médecin,pour qu'il accepte,de mauvaisgré, un dialoguequi paraissait acquisdepuisvingt ans. Tu peux t'en sortir Martine Lalande- Médecin généraliste Pouranimerle coursà la fac aux futursmédecins généralistessur < la priseen charge des patients toxicomanes )>, nous invitons les Narcotiques PRATIQ-UES avaient vécu la même histoire. Immanquablement, les étudiants, qui comprennent qu'ils ont réussi à s'en sortir grâce à l'aide d'autresusagers, donc sansla médecine,demandent : < Maisnous,lesmédecins,qu'est-cequ'on peut faire? j'ai ". Et à plusieursreprises, entendu les intervenantsleur raconterqu'ils avaientun jour rencontréun médecinqui leur avaitsimplement dit : Tu esdansla galère,maistu peuxt'en " sortir > et que cette confiance,isoléemais évidente, leur avaitservipar la suite.Ce qui n'aura pas empêché les annéessuivantesd'errance,de rechuteset de galère encore,jusqu'à ce qu'ils trouvent eux-mêmesles soutienset les moyens d'y arrivervraiment. Depuis,je me suispromisd'essayer, dansma pratique de généralisterencontrantdes usagersde droguesou des membresde leur famille,de ne pas manquercetteoccasiond'une paroleutile et simple. 1. Les NarcotiquesAnonymes sont une association fille des Alcooliques Anonymes, qui regroupe d'anciensusagersde drogues qui travaillentsur la dépendance et s'entraident, par un système de réunionset de parrainage, pour arriverà l'abstinence. http///www. nafrance.org Résumé: Dans le réseau Rédiab, les infirmières et les différents professionnelsprennent p r o g r e s s i v e m e n tl e u r p l a c e , l e m a l a d e y g a g n e u n s e r v i c e d i v e r s i f i é e t g l o b a l . Vêcole du diabète Rédiab est un réseau Diabète qui s'est constitué général,le médecin prenait beaucoupde place, les autour du concept d'éducation thérapeutiquedu pas à le bousculer,elles infirmièresne s'autorisaient patient faite par des binômes médecinsgénéralistes étaientdéjà tellementcontentesqu'on les invite... et infirmierspour des groupes de patients. Rédiab Cependantlesenquêtesfaitesauprèsdes patientsne va actuellementdébuter sa 3" phase après un pro- reflètentpas du tout cela : au contraire,ils ont appré- gramme d'éducationfinancé par le Fonds National cié les infirmièresdans les groupes,et ils se sentent de Prévention, d'Education et d'lnformations '1997-2001), Sanitaires(FNPEIS, la phase expérimentaledite Soubie (2001-2004). " " proches d'elles. Leur parole est passéemalgré le Pratiques : ll y a actuellement des modifications concernant la place des infirmières dans le réseau ? Intretien avec Vincent(oliche Diobétologue, p rati cien hospital ier, c brdonnoteur du réseou Rédiob malaisequ'ellesrapportent. Comment avez-vousdécidé d'améliorer les choses? En juin 2004, lors d'une assembléegénérale du réseau,il y a eu un atelierqui a planché là-dessus, pour faire ressortirles problèmes.ll y a eu plusieurs propositionsadoptées. Vincent Coliche : On ne s'estaperçu du mécontente- Dans le nouveau projet proposé pour la nouvelle ment des infirmièresqu'à la fin de la périodeexpéri- phase(2005-2008),les infirmièrespeuvent mainte- mentale: ellesont osédire qu'ellesn'étaientpasassez nant faire adhérerleurspatients,leursrémunérations rémunérées(1), au bout de trois ans !Pour nous, le binôme médecin-infirmière fonctionnait bien ! sont plus élevées(2). Les binômes ne seront plus D'ailleurs,sur les évaluationsdu début, rempliespar lesprofessionnels de santéqui le souhaitentet qui se les professionnels,rien n'apparaissait.Cependant, parallèlementà ces fichesd'évaluation,un étudiant sont Tormésau sein du réseau(pharmaciens,podo- de sociologieavait fait des entretiensavec les professionnelset j'avaisdécouvertqu'un médecingénéralis- teurs médico-sportifs), cela va peut-être décom- te avaitpu faireson groupetout seul,sansinfirmière... souples.Le réseaua un objectif : coordonner les Ça m'avaitlaissépantois.A la fin de la périodeexpérimentale, nous avons réaliséune enquête écrite, et soins autour du patient, ça peut être fait par le médecin, s'il en a envie ; mais sinon, quelqu'un d'autre peut le faire ! Une infirmière,par exemple, une séancede uniquement médecin-infirmière, mais élargisà tous logues, diététiciens,psychologues,kinési, éducaplexer les infirmières,en tous cas, nous seronsplus A " brainstorming" sn11sinfirmières. question côté de la de la rémunération,il y avaitaussi formée et investiedans le réseau.ll s'agit de l'exa- la question du recrutement des patients pour les groupes de patients : seuls les médecins pouvaient men clinique,bien codifié,il y a une grille de question, la prisede la tensionartérielle,la palpationdes faire entrer . leurs pouls,l'examendes piedset le monofilament(3), du patients, les infirmières,si leurs " patientsétaienttraitéspar un autre médecin qui n'ap- suivibiologiqueannuel,de la présentationdes diffé- partenait pas au réseau,ne pouvaient leur proposer rentssoignantsdu réseauet de la tenue d'un dossier de bénéficierde la formation. médical partagé (4), ce travail de coordinationest rémunéré au professionnel60 euros par patient et On a donc réuni les infirmières,à part, pour comprendre: celles-ci ont expriméavoirdu mal à prendre leur placedans le groupe,à avoir une parolepropre. compétencesde l'infirmière.Lesbiologistesaussiont être reconnue comme soignant à part entière. En envie de s'impliquer. par an. Cela correspond à un élargissementdes PRATIQ-UES Rédiab 3, place Navarin 62200 Boulogne/Mer http:/ /www.rediob.org 0l\/ ohupe -t\Htlt 16 Est-ceun partage du pouvoir ? die, qui requièrent de la technique. C'est que la Oui, je crois.C'est d'autant plus intéressantqu'avec le conceptionde la maladieest extrêmementrestrictive, manquede médecins,il faut quand même trouverles on ne traite que les complicationssansvouloirconsi- moyensd'assurerun servicepour le patient, l'objectif dérer la genèsedu diabète,conséquenced'un état annoncé(5) est que 80 7o des patientsaient un suivi psychologiqueet social sur un terrain particulier... satisfaisantselon les o bonnes pratiques>. Pource qui n'est pas nommé et défini, on ne peut pas Un des gros problèmesde la médecine,c'est de croi- mettre en ceuvre les moyens pour s'en occuper ! re que le médecin peut tout faire : ce n'est pas vrai ! Pourtant, si on a une approche plus globale de la Même le professeurde diabétologie,s'il n'a pas son maladie, pour la soigner,on a besoin d'interventions équipe derrière lui, pour faire " l'éducation du patient>, il n'obtiendrapasgrand-chose! ll y a eu des réactionsamusantesau sein du réseau.Après le cycle diverses.Le médecin, qui pourrait resterchef d'équi- initial de formation des patients,sept séancesanimées En conclusion? pe, doit être conscientde l'ensembledu processus. par le médecin et l'infirmièreensemble,il y a un cycle Le pire, c'est l'isolement. Dans la relation médecin- de " suivi dont trois séancessont animéespar l'in", firmière seule,et trois séancespar l'éducateursportif. infirmier,la notion de pouvoir tombe en discutant,en travaillantensemble,en groupe.C'est le groupe qu' Certainsmédecinsn'ont pas supportéque le groupe est responsabledu savoir,la personne n'est pas res- de patientsfonctionne sans eux, et ont suppliéde pouvoirvenir,même sansêtre rémunéréI ponsableà elle tout seule.Donc, quand on ne sait Enfait, peu de médecinsgénéralistessont prêtsà faire du travaild'équipe. une réponse, et quand le savoir vient du groupe,le médecin n'a pas à faire comme si il savaittout, et était A quoi cela tient-il ? voir ! Nous, nous travaillonssur le diabète,mais on Dans notre formation initiale,on n'a jamaisapprisà peut faire le pari que, si on modifie des comporte- travailleren équipe. Et l'exercicelibéralne favorisepas mentset desfaçonsde concevoirle soinsur un thème pas, on discute, on échange, on construit ensemble responsablede tout. ll n'a plus à exercertout le pou- non plus cela. En pratique hospitalière,le médecinest particulier,cela entraîne pour les professionnelsune obligé de fonctionner avec d'autres, mais quand on évolution dans toute leur pratique. voit comment, dans un service,un médecin change les traitementsdu collègue qui a vu le patient la veille... Mais la médecines'estcomplexifiée,on ne peut pas soignerun diabétiquederrièreun bureau,il faut un accompagnement,une sorte de . coaching des ", séances d'éducation physique, nutritionnelle, le médecin lui-même ne peut tout faire, et le malade a droit à tout le service,ce qui implique des prestations diversifiées,donc, il faut travailler en équipe ! L'élémentlimitant n'est pas l'argent mais le temps. je ne fais Le praticien isolé, plutôt que de dire " pas... fait semblantd'arriverà tout faire...et c'est le ", patient qui en fait les frais.C'est difficile ausside dire j e n e s a i sp a s . . . " . S u r l e sd o s e sd ' i n s u l i n ec, e r t a i n s " médecins sont virulents ! Et pourtant, parfois ils se trompent. Là encore,s'ilssont autoritaires,c'est parce qu'ilsne saventpas,et ilsfont comme s'ilssavaient... ll y a une autre difficulté pour les médecins: ils n'ont apprisà s'occuperque des complicationsde la mala- PRATIQ-UES Proposrecueîllispor Mortine Devries 1. Lesprofessionnels sont rémunéréspour toutesleurs activitésau seindu réseau: notammentpour lesjournéeset lessoirées de formationqu'ilsreçoivent, et pour les séancesde formation qu'ils animent pour les patientsdu réseau. 2. Ellesrestentde 2O o/oinférieuresà cellesdes médecins: c'estun choix basésur un rapportdu CRESC qui demandede prendreen considération la responsabilité du professionnel danssarémunération. Ainsi,lorsd'une séanced'éducationdu patienten groupe,le médecin reçoit25 eurospar patientet l'infirmière 20 euros. 3. Utilisation d'un filamentoour testerla sensibilité du pied,examensimpleet bien codifié. 4. Loin du DossierMédicalPersonnel de M. DousteBlazy,il s'agit d'un dossieroù avec l'accorddu patient chaqueprofessionnel entrelesdonnéesqui concernent le diabète,classées, synthétisées. 5. Dansle dossierprésentéà la DRDR,dotationrégionale de développementdes réseaux,financéepar la région,et l'agencerégionalede l'hospitalisation, DRDR qui validele projet de réseauet assureson financement oour troisans. R é s u m é : L o r s q u e l e s s o i g n a n t s ,i c i , i n f i r m i è r e s ,n e s o n t p a s s e u l e m e n td e s t e c h n i c i e n s , m a i s s o n t i m p l i q u é sd a n s c e q u ' i l s p e r ç o i v e n td e l a s i t u a t i o n d e l e u r p a t i e n t s ,i l s v e u l e n t s e d o n n e r les moyens de mettre ensembleleurs compétences. IJoutil du partage Le pouvoir de témoigner lie. Et mon statutd'infirmièredonnede la forceà par que je dis.l'étaisla personnequi pouvaitvoir commencerai raconter l'histoire des M., un ce Je couplede personnesâgées,et très handicapées et dire.L e médecingénéraliste a ététenu au coutous lesdeux.le m'en occupaisavecma collègue rant et il était d'accord. fntretien avec Evelyne de Wildeman pour la toilette,les soins.Danscette maison,en fait un baraquementon avait l'impressionqu'i Rivalitéset impuissances n'y avait pas d'argent,pas de possibilitéd'avoir A nous, infirmières,les gens disent parfoisdes du lingeou du matérielconvenable. Nousavions chosesqu'on doit répercuter: une dame âgée donc décidé,avecleuraccord,d'allerà la banque avaitun traitementdiurétiquepour desoedèmes Infirmièrelibérole présidentedu réseouPasserelles, réseoude coordination de soinscontinus et d'accompagnement pour savoirprécisément,et de voir l'assistante desjambes,pourtantcelan'allaitpasmieuxet le socialepour demander des aides. En fait, ils avaient des revenus corrects,simplement ce n'était pas eux qui en profitaient.Nous avons médecinn'y comprenaitrien.l'allaisfairetous les joursdes pansements, et je parle..." Cescompri- doncfait une demandede misesoustutelle,et les més-là? le ne lesprendspas,ilsme font fairepipi tout le temps et je ne peux pas sortir ! o Cette pour eux : on a pu chanchosessesontarrangées ger le matelas,le plus jeunefils s'estoccupédes information,transmiseau médecin,l'a beaucoup aidé,pour la poursuitedu traitement.... courses,le budgetétait contrôlépar le déléguéà Mais parfois,l'informationest plus conflictuelle. tutelle.La maisona été arrangée,lesfenêtresont MadameN. étaiten phaseterminaled'un cancer, été changées,ils peuventmangeret se chauffer correctement. A tour de rôle,l'auxiliaire de vie les ellesouffraitbeaucoupet était sousmorphineen comprimés; ce n'était plus suffisant,et il fallait emmène en promenadeen fauteuilroulant; le passerà la morphineen injectable, à l'aided'une monsieurétait heureuxde dire à son médecin qu'il avaitvu sa bellemaisonet de lui parlerdes pompe, et avecdes bolus.C'étaitle tout début de cette technique.Lorsquej'en parleau méde- qu'il avaitconstatés changements dansle village. cin traitant, un vendredi, il est catégorique: .. Non, ça ne se fait pas à domicile,c'est trop Nous, les infirmières,nous aurionspu faire nos soinset ne pasnousoccuperd'autrechose.Mais dans la confianceque nos patientsnousfont, ils compliqué! " l'expliquequ'à Lille,ça se fait, que nous, nous étions au point, nous étions nous demandent implicitementde porter leur parole,de leur permettrede recevoirce dont ils capables... ll restesur sespositions.Le samedi,la p a t i e n t e , t r è s d o u l o u r e u s e ,l e r a p p e l l e . L e ont besoin.C'estune doubleresponsabilité, celle d i m a n c h eà, 1 3 h e u r e sl,e m é d e c i nm ' a p p e l l el u i - de citoyen,témoin d'une anomalie,et celled'un même (il étaittrèsdisponiblepour sa patiente,la professionnel, bien placépour constaterl'anoma- suivaitbien),il me demandede poserune pompe P RAT tQ.'U E S Passerelles 21 ter, rue d'Alembert 62100 Colais reseaupasse reIles@ hotmoil.com à morphine,ce que j'ai fait et la patientea été compétenceet on la met au servicedes autres soulagée.ll avait réfléchi,s'était renseignésans doute. Je le rencontrelundi, chez la patiente, la professionnels et du patient. La première patiente dont j'ai parlé, une fois maladele remercie,il se tourne vers moi : ,. C'est vrai,ce n'estpassi compliquéque ça,finalement, qu'ellea eu sa pompe, à un moment, il a fallu augmenterles doses: ce n'était pas le médecin maisvoussavieztout ça,vous. Maisil y a quand " même eu deux journéesterribles. qui était là, maisson remplaçant: A cette même période,une de nos maladesavait sie ! " J'ai expliqué qu'il s'agissaitde monter modérémentet progressivement, que ça sefaisait ainsi,< Ah bon, vous avezdéjà vu ? Et comment du Temgésic@, et là encore,ce n'était plus suffisantet il fallaitpasserà la morphine: le médecin a ajouté la morphine en plus ; or, Temgésic@ et morphine sont antagonistes, mais le médecin, visiblementne le savaitpas! Problèmedélicat...ll a fallu lui faireobserverque la maladeétait plus mal à chaqueinjectionde morphine.Une fois,je Ah, non, ce " n'est pas possible,ce sont des dosesd'euthana- on fait ? ' le n'ai pas du tout penséqu'il était incompétent,moi, je sortaisd'une formation sur le sujet, et je trouvais normal, et bénéfique de l'ai appelépour lui signifierque le ne donnaispas partagerce que l'avaisappris.ll a accepté,et c'est amusant,il a noté sur l'ordonnance En " accord avec l'infirmière,j'augmente les dosesde le compriméde Temgésic@. .. - Non, non, donnez-luison Temgésic@, je vous morphine...>>,comme s'il était en danger avec cette prescription,et que cette mention de mon l'ordonne! Et marquezdans le cahierde liaison ce que vous faites| " o - Certainement, et je marqueaussice que je ne accord le protégeait. Lesauxiliairesde vie ont, ellesaussi,des informa- fais pas ! tions à partager, parfois, c'est maladroit : " Le lendemain,il a demandé qu'on arrête le Temgésic progressivement.Dans cette situation, j'étais mal, j'avaisun sentimentd'impuissance, la " MonsieurT. tousse,il lui faut du sirop rouge, comme la dernièrefois ', maiscelaa son impor- maladepâtissait,et je ne pouvaisrien faire. ll ne car elle avait peur que sesmalaises soientdus à je un manque de sucre : lui ai apprisà faire la nousa pasdonnéla parole,et c'étaitinsupportable. tance.Une de mes malades,diabétique,esten fin de vie, la garde-maladem'appelaittout le temps, mesurede la glycémieavecle dextro, pour qu'elReconnaître les compétences et les fonctions le sacheelle-mêmesi elledevaitm'appeler:cela de chacun ne porte pas atteinteà mon o pouvoir ! " Ce qui est remarquable dansle réseau,c'estqu'il Ce sont des situationscomme ça, répétées,qui sont à l'origine du réseau: avoir des formations ensemble,médecinset infirmières(1), discuter, n'y a pas d'enjeu de pouvoir entre nous. En fait, on ne voulait pas faire un réseau,on voulait se connaître,ça facilite le travail ! Pour le méde- répondreà des difficultéséprouvéesdans le quo- cin, exercernon pas le pouvoir, mais l'autorité, tidien des soins, on voulait répondre à la souffrance qu'on éprouvaitde ne pas être aussiper- comme dans lesexemplescités,c'esttenter de se protéger pour éviter d'être jugé, d'être mis en cause. formantsqu'on aurait pu l'être. On en est encore là, dans notre groupe, on n'a pas dénaturénotre Les formationscommunes donnent un savoir projet. C'est l'outil qui nous intéresse,le réseau commun, reconnu par tous, la fonction de chan'est pas un but en soi. cun est mieux connue aussi,et la reconnaissance Proposrecueillispor Mortine Devries mutuelle, un atout pour le travail ensemble. Personnene peut tout savoir,on ne contestepas le pouvoirquand on donne un avis,on amènesa PRATTQ-UES 1. Et aussipharmaciens, et kinésithérapeutes maintenanr. R é s u m é : D e I ' a v o r t e m e n tm i l i t a n t a u M L A C à I ' l V G m é d i c a m e n t e u s ee n v i l l e , J o ë l l eB r u n e r i e K a u f f m a n n ,q u i a v é c u c e t t e e x p é r i e n c ed e 3 0 a n s d e p r a t i q u e , p a r l e d e l a q u e s t i o nd u p o u v o i r m é d i c a le t d e c e l u i d e s f e m m e s s u r l e u r c o r p s . Uhistoire des luttes lo de pouvorr autour de I'IVC Pratiques : Vous avez participé à la pratique des avortements clandestinsau Mouvement nousavonscommencé,un petit noyaude méde- tntretien avec du MLF cinset lesfemmesdu MFPF,lesféministes pour la Libération de l'Avortement et la : le MLAC a été créé en et olein d'associations J o ë l l eB r u n e r i e Contraception(MLAC), quand c'était interdit en France.Au MLAC, il y avait aussides non En mars1973, nous 1973 avec40 organisations. médecinsqui pratiquaientles lVG. Vous aviez accepté de partager votre <<pouvoir ' médi- avons publié le manifestedes 300 médecins, nous avionsdécidé de nous dénoncerdès que nousserions100, le manifesteétaitsignésurtout cal ? Comment cela s'est-ilpassé? Nousavonsdit officiellement par despsychiatres. que nousfaisionsdes lVC, c'étaitde la désobéis- J o ë l l eB r u n e r i e: C e l a v a f a i r e 3 0 a n s . . . N o u s avonscommencéà faire des avortementsclandestinslin 1972,quandon a découvertla métho- sancecivile.Les ouvriersde Lip en grève nous de Karman.le faispartiede ceuxqui étaientulcérésde ne rienfairepour aiderlesfemmes,la seule avaientfabriqué du matériel,tous ceux qui le oouvaientfaisaientdes lVC, nous nous sommes formés en même temps que les militantes.Les méthodeà l'époqueétait le curetage,à l'hôpita,, femmesétaientreçuesau Jardindes Plantes,les p l u s r i c h e s a l l a i e n t à l ' é t r a n g e r ,l e s a u t r e s où les femmes allaientaorès avoir utilisé une venaientnousvoir. Lesféministesdu MLACs'ap- sonde...Nousavonscommencéaveclescopains du Gl5, le Groupe Information Santé, formé comme les Croupe Action Prisons(CAP) de pelaient lesintermédiaires ellesfaisaientaussi ", " lesavortements. ll y a eu des problèmesde pou- MichelFoucaultdanslesprisons,c'étaitaprès68, on voulait révolutionnerla médecine,on défendait fean Carpentierqui avait été rayéde l'Ordre pour son tract sur la sexualité...Karman,un psy- Gynécologue oyant porticip é au MUC et onimépendont 24 annéesl'équipedu centre d'lVG de Clomart(92) voir, lesféministesaccusantlesmédecinsd'acca- AssociationNationale des Centres d'lnterruption de Grossesse et de Contraception (ANCTC) r www.oncic.osso.f p a r e r l e p o u v o i r . E l l e sd i s a i e n t " V o u s , l e s femme mecs...". Moi j'avaisla doublecasquette, et médecin.C'étaitl'époquedes luttesféministes Mouvement Français pour le PlanningFamilial p o u rl a n o n - m i x i t é . M . . a i sn o u sn e r e v e n d i q u i o n s 4, squoreSoint-lrénée pas le pouvoir,nousétionsd'accordpour le par- chologueaméricain,est arrivéavec sa méthode d'aspiration,une canuleet une seringue,la pre- était politique,et sa pratique tager.L'avortement mière IVC a été faite chez DelphineSeyrig.Puis, a fait bouoer les choses.Le MFPFavait voté en PRATIQ-.UES 75 011 PARTS T é 1 . : 0 41 8 0 7 2 9 1 0 Fox: xx 47 00 79 77 www.mfpf75 @wonadoo.fr au risquede mettre son mouvementen danger. SimoneVeila héritéde cettesituationet il fallait '1975, I'avortementétait un crime,puis f usqu'en on a dit aux médecinsqu'il fallaitlesfaire.Hormis ceux qui attendaientcela sansavoir osé militer, remettrede l'ordrelà-dedans, aussiparceque des les médecinsn'étaientpas prêts à faire les lVC. non-médecinsfaisaientdes lVC, et le faisaient partout où c'était possible. Quelquespatronsintelligentsont saisil'opportunité et demandé des crédits pour ouvrir des centres,mais ils avaientpeu de médecinspour Lesfemmes qui avaient participé au MLAC ont faire des lVC. Souvent,ce sont des généralistes abandonné la pratique des avortements ensui- qui s'y sont mis. De plus,il a fallu se battrepour te, ont-elles demandé une place en tant qu'usagèresdans les centres d'lVG ? fe crois que non, d'aprèsvous, pourquoi ? pratiquerla méthode Karman,pour les obstétriciens,l'lVCsefaisaitpar curetagesousanesthésie congrèsle fait de faire des IVC dans sescentres, générale.Notre savoirtechniqueétait nié, car il n'étaitpasenseignéà l'université, maisissud'une Dès le passagede la loi en 1975, il y a eu une volonté de repriseen mainsde la part du gouvernement.Lesfemmes avaientmilité, d'autres pratiquemilitante.Quand on a militésur le sida, celaa été la mêmechose,ce sont lesmédecinsde Parallèlement, basequi s'y sont intéressés. dans payseuropéensavaientévolué,mais on ne pouvait pas laisserdes non-médecinsfaire des avor- tement, on a pu ouvrir des centresd'lVC plus tementset le dire.Aprèsla loi, lesféministesont arrêtéde faire lesavortements.Nous,médecins, fonctionné. Les médecinsmilitants ont formé sommesun certainnombreà avoircontinuédans nos cabinets,moi je l'ai fait jusqu'en 1985, on avaitdes canuleset des seringueset c'étaittellement plus simple pour les femmes.Mais après, les hôpitaux où les patronsétaient contre l'avorindépendants, et ce sont ceux qui ont le mieux d'autres médecins vraiment préoccupés par qui l'lVC, et plutôt des médecinsgénéralistes, saventce qu'estla " médecinesociale". c'estdevenudifficileà justifier,l'illégalitén'avait Est-ce que le fait que des médecins généra- plus de sens et les femmes revendiquaientla listes travaillent dans des centres d'lVG a per- sécuritéde l'hôpital.J'étaisalléevoir l'anesthésie mis de freiner la récupération> par les gyné" localeaux Etats-Unis avec ElisabethAubény,làcologues-obstétriciens des moyensallouésaux bas les IVG se faisaientdans les cabinetsmédi- IVG? Est-ce parce que le mouvement des caux.Nousavonsfait un rapportau ministèredes femmes s'est désintéresséde la question après Droitsdes Femmespour proposerde fairelesIVC la légalisationque les moyenspour les IVG res- en ville, mais cela ne s'est pas fait. ll a fallu attendretrente ans pour que celadeviennepos- tent aussiinsuffisantsen France? sible... La pratiquedes IVC à l'hôpital est très Des patronsqui ne voulaientpas faire d'lVG au contrôlée,il y a des bulletinsstatistiques, des démarches administratives... À partirdu moment départ ont voulu récupérerles moyensdonnés aux centresd'lVG, comme cela s'est passéà où l'avortementest devenulégal,il y a eu une repriseen mainspar lesmédecins. faire les avortements,mais ils ne supportent pas Crenoble. Les chefs de servicene voulaient pas que le pouvoir leur échappe,que les médecins ll y a eu des difficultés pour faire accepter les centresd'lVG dans les hôpitaux où les gynéco- généralistes qui travaillentdanslescentresfassent logues étaient contre l'avortement, comment ception, et que se créent ainsides petites unités avez-vousdéveloppé un rapport de force suffi- concurrentielles. Depuisla disparitionde la gyné- sant pour que ces centresexistent? cologiemédicale,les gynécologues de ville sont P R A T I Q UE 5 ausside la gynécologieordinaireet de la contra- prêts à se saisir de cette méthode en ville nat, le clinicat,ont une formationtrèstechnique, (...)? (2) Aprèsla loi, lesmilitanteset lesfemmes et ils sont choquésque ce soit des généralistes s'en sont remisesau corpsmédical,ellesne sont ils ont fait l'interdevenusdes hyper-spécialistes, qui pratiquent les avortements.Mais à Clamart, quand nous avons fait grève pour avoir des pas en revendicationd'autonomie, contrairement à l'époquedu MLAC.C'estun pouvoirpour pour l'lVC,ce sont desgénécontratsspécifiques ralistesqui étaientintéressés. Du côté des fémi- elles,maisellesne sont pas prêtesà le prendre. En 1982,quand le RU486(3) est arrivé,c'étaitla À nistes,aprèsla loi, ellesse sont démobilisées. fin de l'époquemilitante,il y a eu une demande, partir du moment où un problèmeest légalisé, lesfemmesétaientséduitespar une méthodequi l'activitémilitanten'a plus raisond'être. Pour la jusqu'àla pilule,c'est pareil,on s'estmobilisées leur permettede déclencherleursrèglestoutes et les seules.Depuis,on a beaucoupmédicalisé, loi Neuwirth, puis un peu pour le rembourse- femmesont intégrél'idéeque < l'avortementest ment, maisaprèsil n'y avaitplus rien à revendi- un geste médical qui se fait à l'hôpital ". quer. Et alors le pouvoir reprendles chosesen Pourtant,c'étaitune grandeautonomiepour les femmesd'avoircette loi de 1975, et encoreplus marns. la loi sur la contraception.Lesfemmes avaient Pensez-vousque l'lVG médicamenteusesoit revendiqué l'autonomie pour elles-mêmeset une bonne opportunité pour les femmes et que la possibilitéde faire les IVG en ville permette de leur donner plus de pouvoir plutôt p o u r l e u r c o r p s . L e s f é m i n i s t e sd e B o s t o n disaient: .. Notre corps,nous-même". Le corps que de s'en remettre aux médecins ? comme avec la médicalisationde l'accouchement, la PMA (4)... Vont-ellesêtre capablesde Lesfemmesne sont pas prêtes,ellesont été très médicalisées. La loi Veil est une loi de santé sortir de I'hôpital? D'autantqu'il n'y a plus de réflexioncollective.Lesfemmesmanquentcruel- publiqueet une loi de contrôle.Peu de gestes lementde lieuxde parole... desfemmesa bien été récupérépar lesmédecins, médicauxsont aussicontrôlésque l'avortement. Nous avonstoujoursrêvéde sortirl'lVG de l'hôpital, quand est apparuel'lVC médicamenteuse, nous avonspenséque cela pourraitse faire. le Proposrecueillispor Mortine Lolande de Grossesse. f . Interruption Volontaire participe au réseau de Saint-Vincent-de-Paul, 2. Desdécretsd'applicationde la loi prévoientque les mais lesfemmesà qui le l'ai proposéont toutes choisid'allerà l'hôpital.Ellesne sont pas rassurées. Cela évoluera, avec l'expérience des copines... Mais est-ce que les médecinssont médecins génaralistes,comme les gynécologues, devront iustifier d'une formation effectuée dans un centred'lVG pour pouvoirprescrirel'lVC médicamenteuse(ndlr). moléculede l'lVC médicamenteuse. 3. Mifépristone, 4. Procréation médicalement assistée. PRATIQ-UES 5l R é s u m é: N o u s s o m m e s n o u s b i e n b a t t u s c o n t r e l a r é f o r m e d e l a S é c u r i t és o c i a l e? E n f a i t , n o u s n ' a v o n s p a s s u < i n t é r e s s e r > >à n o t r e l u t t e c e u x q u i s o n t c o n c e r n é s e n p r e m i e r l i e u p a r l e s questions liées à la maladie et à la santé. Peut-êtreest-ce parce que nous n'avons pas su non plus apprendre, d'eux. " Comment trouYer la bonne prtse Philippe Pignarre Directeurdes Editions I o< Fmnàrhot tr< de penseren rond dénoncer.Commesi la dénonciationpouvaitêtre d'une quelconqueefficacité| Si la dénonciation donner d'adresse,ni de numéro de téléphone était efficace,il y a longtempsque le capitalisme pour lesvictimesou leursfamilles.De ce point de auraitcrevé. Je ne suis pas d'accord avec cette manièrede vue/ nousétionsplus mauvaisque lesAméricains p o s e rl e p r o b l è m e l.l m e s e m b l eb e a u c o u pp l u s qui ont mis en placedesassociations immédiate- fructueuxde poser une autre question: avons- ment (comme PublicCitizen)capablesde se sai- nous eu " prise" sur le problèmequi nous était posé ? Quelles leçons pouvons-noustirer de l'expérience> que nous venonsde faire ? Et " c'est dans ce cadre que j'ai envie de poser la avec la créationéventuelled'une association de patientsspécifiques. C'estce qui a été à l'origine de cette interventionaux EtatsCénérauxde la Santé,puisde ce texte. 52 o J'aiété dansun profonddésarroiquand,invitésur une radio à commenterle retraitdu Vioxx@du marché,je me suisaperçuque je ne pouvaispas sir de ce type de problèmeset de faire le pont Le Grand secretde l'industrie pharmaceutique, Lo Découverte, 2004 et Comment sauver (vraiment)la Sécu, Lo Découverte, 2004 ? questionde la démocratiesanitaireet des associationsde patients.Nous avonsinvité ces dernièresà venirparticiperaux ÉtatsCénérauxorga- Comment fabriquer de l'unité ? nisés par Attac, le Syndicatde la Médecine On entend souvent dire que l'on a perdu la Cénéraleet d'autres. La plupart ne sont pas bataillede la Sécuritésociale,après celle des retraites,et on s'interrogesur les raisonsobjec- venues. La vraie question à se poser serait : qu'avons-nous fait pour qu'ellesaient envie de tivesqui nousont amenésà ce résultat.Du coup, venir ? Avaient-elles quelquechoseà apprendre on est amenéà faire porter la responsabilité aux mutuellesn'ont pasjoué le rôle autres: syndicats, s e v e n i r? e n v e n a n ti c i .d o n c d e b o n n e sr a i s o n d qui aurait dû être le leur. De manièreplus or, Et surtout,étions-nousen situationd'apprendre quelque chose de leur expérienceparticulière, moins ouverte,on reprend le refrain : ils ont s i n o np o u r l e sm e t t r ea u p i e dd u m u r ? p e u s e u l s ,n o u s " t r a h i " . . . N o u s s o m m e su n avons raison contre tout le monde... Et on On entend aussidire : " Mais ces associations sont-ellesreprésentatives ? " Ce n'est pas non e n t e n d m ê m e d i r e q u e l e s a s s o c i a t i o nd se patients,à quelquesexceptionsprès,commeAct- p l u s l a b o n n ea p p r o c h ed u p o i n t d e v u e d é m o serait beaucratique. La question intéressante Up ou Aides,sont à mettredansle mêmesac.Du coup plus : constituent-elles un cadrefructueux coup, on se réfugiedans la dénonciationet on pour imaginer,inventer,élaborercollectivement é l a r g i ts a n sc e s s el e c e r c l ed e c e u x q u ' i l f a u t politiquesqui pourront de nouvellespropositions PRATIqUES être ensuiteproposéesà un public plus large ? plutôt bêtes en argumentanttoujours face à C'est seulementdans ce cadre que l'on peut regarderavec modestieet un intérêt gourmand I'AFM c'està l'Étatde le faire". Maisils savent " bienque l'Étatne le fait pas! C'estjustementtout ce qu'ont fait aussibien Act Up que l'Association le sensde leursinitiatives! Celafait même des Française contrela Myopathie(AFM)à l'initiative années que leur principal messagepeut être ramenéà cela: on ne peut pasfaireconfianceà du Téléthon. Notre échec finalement,c'est notre échec à l'industriepharmaceutique et à l'Etatpour inven- apprendre.Ainsi,quand on parlede surconsom- dont nos enfantsont besoin. ter lesmédicaments mation de médicaments,on assisteimmédiate- Maisnousne savonsoasécouter. En prononçant cette parole qui fabrique une alternativeinfernale,. C'est à l'État de le faire ", ment à une levéede boucliers: " Commentosezvous porler de surconsommationolors que I'on se bot iustement contre lo restrictionde l'accèsoux soins? On n'o pas le droit de porler de cela. C'est donnerdesarmesà nosennemis., Du coup, l'unité du mouvement n'est pensée qu'en terme négatif : nous laissonsau gouvernement,au Medef,la capacitéde nousunir contrelui (" tsrl5 nous leur proposonsl'impuissance, à eux qui essaientiustement de sortir de l'impuissance. Fabriouernous-mêmesdes alternativesinfernales,c'est la chose la plus terrible qui puisse nousarriver: nousfaisonscomme le capitalisme. On reconnaîtjustementcelui-cià ce qu'il nous ensemble..."). Ne serait-ilpas plusfructueuxde penserque l'unitédoit êtrefaite sur la based'apprentissagesréciproques,sans que les expé- enferme dans ce type d'alternatives, par exemple: si vousvous battezpour une augmen- riencesdes uns et des autres ne soient vécu vous renforcezle chômage.Ou encore : les pro- tation des salaireset des conditionsde travail, f i t s d ' a u j o u r d ' h u i s o n t l e s m é d i c a m e n t sd e comme un obstacleéventuelà l'unité mais,au véritable contraire,comme ce qui enrichit la possibilité demain.C'est ainsique le capitalisme, d'un travailen commun ? C'estsansdoute plus tête de Méduse,paralyse,tétaniseceux qui veulong à faire, mais cela rempliraitnos batailles lent s'opposerà lui. C'est son aspectsorcier.Tout d'un contenuautrementplusriche.Ainsi,si on ne le travailde la politiquedoit consisterà desserrer veut pas parlerde surconsommation de médicaments,comment poser le problèmede l'action cesalternativesinfernales.Celapeut être extraordinairementdifficileet c'estpourtantla seulevoie en directiondes médecins,c'est-à-dire comment versl'action.Maisouand on en est réduità faire imagineraiderles médecinsà mieux résisterà la de la dénonciation(ce qui peut arriver),c'estque pressionde l'industriepharmaceutique? C'est pourtant une questionqui se discutedans cer- l'on ne savaitplus comment faire. C'est finalement reconnaîtreque l'on est déjà en situation tainesmutuelles; mais encorefaut-il cesserdes considérercomme des . traîtres> ! d'échec,que l'on n'a passu " faireprise" au bon Et si ce n'était pas à l'Etat de le faire... endroit.La dénonciationsignetoujoursun repli. Le problèmeest que beaucoupcroientque c'est la meilleuremanière de faire de la politique. la dénonciationest le pendantsyméJ'imagineun instant I'AFM et d'autresassocia- Finalement, tions de patientsmobilisantles familleset leurs trique d'une autre attitude catastrophique: enfantsdans la rue contre la réforme.J'imagine l'adaptationet la pédagogie.On voit alors les les mutuellesexpérimentantun réseaude visite médicaleindépendant.Comment le gouvernement aurait-ilpu résister? Est-ceun rêve? Mais hommespolitiquesnousexpliquerqu'on ne peut pas faire autrement,. que leur réforme est la seulepossibleu (versionla plusidiote: à quoi sert qu'avons-nousfait pour que ce type d'événe- alorsla politiquesi une solutionest la seulepos- ment soit possible? Nous noussommesmontrés sible ?), et qu'ils sont là pour expliquer les PRATIqUES < contraintes> auxquellestout cela est inexorablementsoumis! ll faut donc arriverà trouverle chemin entre dénonciationet adaotationsi on gré lesincroyables pressions qu'ellea subiesde la part des pouvoirspublics qui voulaientmême avoir le droit de nommer la moitiédes membres veut refairede la politique. de son conseild'administration et contrôlerl'argent recueilli- ou des scientifiques qui voulaient Faireproliférer les expertises déciderentreeux desallocations de budget. que crois nous devons apprendre à construire Je Lesassociations de oatientssont un des événements les plus importantsen médecinede ces trentedernières années.Ellesont opposéla " pro- patiemmentdesliensentreceuxqui s'intéressent à l'efficacitédes médicaments,à leur coût (une liférationdes expertises au modèlehabituelde " revuecomme Prescrire en premierlieu),ceux qui la vulgarisation auquella gaucheest malheureu- travaillentdansl'industriepharmaceutique et qui sementsi attachée.Ellesnous ont montré com- saventcommentcette dernièreétablitsespriori- ment on pouvaitentrerdans des lieux qui nous tés de rechercheet qui tentent d'imaginerdes étaientinterdits: lesétudescliniquesavecAct Up, leslaboratoires de recherche avecl'Afm.Lescher- moyensalternatifs(je penseau travailfait par la CCT chez Aventisavec l'élaborationdu projet cheurs ont souvent détesté cela. La plupart Néréis),le mouvementmutualistequi ne peut d'entre eux préfèrentnégocieravec les pouvoirs publics,ou avec les patrons,plutôt qu'avec le pas resterindifférentà l'augmentationdes coûts des nouveauxmédicaments,les associations de public > quand il commenceà apparaîtresous patientssanscroireque l'on va leur donner des " la forme de ce type d'associations. lls auraient leçons,et un mouvementd'éducationpopulaire voulu que l'argentn'aillepas à des projets,mais comme Attac. à leurslaboratoires et ilsauraientvoulugérereux- Alors peut-êtreque nous ferons des " expériences" différenteset que nous n'auronspas cettesensation d'avoirtouloursraison,maisseuls. mêmescet argentsansque lesassociations s'en mêlent,c'estce que I'AFMa toujoursrefusémal- PRATIqUES R é s u m é: D a n s l ' é c o n o m i e d e s p o u v o i r s , l a m o n t é e e n p u i s s a n c ed e s a s s o c i a t i o n sd e m a l a d e s a p e r m i s d e c o n t r e b a l a n c e r l e s p o u v o i r s e n p l a c e d e s p r o f e s s i o n n e l sd e s a n t é e t d e l ' i n d u s t r i e p h a r m a c e u t i q u e .L ' a u t e u r p o s e a u s s il e s l i m i t e s e t c o n t r a d i c t i o n s d e c e s n o u v e a u x p o u v o i r s . Le pouvoir des malades : mythe, danger ou utopie ? Scène1. Le cabinetde oédiatriedu docteur L. Mme 8., enseignante, est venue consulterpour ont trouvé le site d'une associationaméricaine son fils de deux ans.llenfanta une banalerhinopharyngite.On en profitepour feuilleterle carnet basedes premièresanalyses,le protocolen'apporte aucunallongementde la durée de survie. de santéet parlervaccination.Mme B. vient jus- Le chef de cliniquerétorqueque ce n'est pas à tement de lireun articledu Mondesur la vaccina- s'eneux de décider,maisà M. R. Lesdiscussions tion contre l'hépatite B. Interrogé,le docteur récapitulece qu'il saitdu lien avecla sclérose en lisent.Le lendemain,l'équipeapporteun nouvel non significatif, inexistantchez l'enfant.Mme B. M. R entredansl'essai. changepas.Finalement, lui rétorquequ'il n'y a pasd'épidémied'hépatite et qu'ellene voit paspourquoielleferaitcourirun Ces deux scènessont évidemmentfictives.Mais risqueà son fils pour fairegagnerplusd'argentà ellessont plausibles. Ellesrenvoientà ce qui serait Pasteur-Mérieux. un nouveaupouvoirdes malades.Au-delàde la Scène2. Le serviced'oncologiegastriqued'un grand centre anti-cancéreux parisien.M. R. est reconnaissance récentedu droit à l'information (par le biaisde la loi Kouchnerde 2002),il s'agit surtout de l'implicationcroissantedes patients arrivéce matin pour une nouvellechimiothéra- dans la prise de décisionmédicale.Indice de pie. ll souffred'un hépatocarcinome. La semaine précédente, l'imageriea révélédesélémentssus- l'érosionde la relationautoritaireet oaternaliste qui liaitmédecinet patients,lesnouvelles formes pectsau niveaudes poumons.féquipe veut ten- de négociationdes interventionssuscitentdes ter une nouvellecombinaison de molécules, dont réactionscontrastées. qui donne un avisnégatifsur ce protocole.Surla Jean-Paul Gaudillière Chercheur à I'INSERM Vice-président de lo Fondation SciencesCitoyennes argument : l'intérêtde la moléculeest palliatif, plaque,très faible chez l'adulte,statistiquement ellediminuelesdouleurs,mêmesi le pronosticne une importée des Etats-Unis. Pour cela, il faut s'estdérangé,son formulairede consentement à ll y a d'abord ceux qui tiennentce pouvoirdes maladespour un mythe. Au-delàde quelques la main, il expliquece qu'on attend de la molé- zonestrès particulières, correspondant soit à des cule. Entrentle fils de M. R et sa belle-fille.La priseen chargede confort soit à des actions " ", les praticiensont de préventionpour lesquelles faireentrerM. Rdansun essai.Lechefde clinioue veille,ils ont passédes heuressur l'lnternet.lls PRATIQUES h ttp:/ / sciencescitoye nnes.org affaireà despersonnes en bonnesanté,rienn'au- défavorisées,de ceux créés par les effets iatro- rait changé.Quand lesmaladessont malades,ils sont justementmalades,en positionde deman- gènesdes interventionsmédicales,ou de ceux qui touchent aux déterminantsnon biologiques de, de faiblesse et de non-compétence. Pourl'es- de la maladie. sentielde la médecine,le changementne saurait être que cosmétique.Ce que tendent à démontrer lesconditionsde signaturedesformulaires de Nombre de ceux qui ont milité pour soigner autrementse sentirontprochesde cettedernière consentementéclairé ou encore les grandes perspective.Pourtant,on ne peut écarterd'un messescomme les ÉtatsCénérauxdes malades reversde main lesargumentsdes sceptiques. Le du cancerqui constituentun bon forum pour discuterde l'expérience humaineet socialede la vie tant que l'on se contentede réfléchirla médeci- avecun cancet maissûrementpas de l'utilitéet ne à partir du colloquesingulier,en faisantdu du choix destraitements. patientun individusouffrantet isolé.L'utopiene ll y a ensuiteceux qui tiennent le changement pour réel, mais qui considèrentqu'il s'agitd'un pouvoir des maladesest une utopie. Du moins que si on la penseen termesd'exdevientréaliste périencecollective.Ce passage au collectifest en pour compenserles dépeneffet indispensable danger.Un dangerpour lesmaladeseux-mêmes. La pressioncroissantedes patients-clients seraità danceset infériorités crééesoar l'existence même d'antibiotiques ou de psychotropes seraitlà pour nellement,desoutilspour < pouvoir> fairerecon- de la maladie,pour capitaliser les savoirsacquis l'originede beaucoupde mauvaises par décisions, de chacunau coursde sa trajectoirede patient. prescriptions inutileset finalementpréjudiciables ll est surtoutindispensable pour créerdes outils à la santé publique.La consommationfrançaise permettantde pesersocialementet institutionen témoigner.Pire,en transférant sur lesmalades une partie du poids de la décisionen situation naître,négocieret imposerdes changementsde pratique.En d'autrestermes,il s'agitd'allerdans d'incertitudequi était jusque-làl'apanagedu le sensd'un o empowerment De ce point de ". médecin,les nouvellesrelationsthérapeutiques vue, les deux dernièresdécenniesnous ont mettraientlespatientsdansune situationimpos- apportédesexpériences contrastées. sible.Ceux-cin'ont ni le temps, ni la distance indispensables à un choix informé.Au final, le La mieux connueaujourd'huiest celledes mou- droit à savoiret le droit à choisir ne peuvent vementsde lutte contre le sida.Au départde la qu'augmenterleursangoisses et, parfois,aggraver la pathologie. mobilisationassociativeautour de l'épidémie causéepar le VlH, il y a bien sûr la nature des populations touchées, l'expériencesociale et ll y a enfin ces raresavocatsqui voient dans les politiquepropreaux mouvementshomosexuels. nouvellesformesde négociationune composante de la démocratiesanitaire,un moyen pour bataillescontre la stigmatisation des personnes redonnerau systèmede santé une fonction de s a n t é " p u b l i q u e" . D o n n e r d u p o u v o i r a u x Les années 80 furent ainsi marquéespar les contaminéeset des groupes" à risque Avec ". pour résultatmarquant la décisionde ne pas maladesest, dans cette perspective,un moyen recourirau dépistagesystématique et de veiller pour diminuerle poidsdes intérêtset idéologies professionnels, pour élargirla significationde la aux strictesconditionsde confidentialité dans la réalisationdes testsde séropositivité.Ou encore, m a l a d i e a u - d e l à d u b i o m é d i c a l ,p o u r f a i r e entendreet reconnaîtredes besoinsmal pris en la bataillepour leséchangesde seringueet une gestion alternativedu o risque , attaché à la compte. Qu'il s'agissede ceux des populations consommationde droguesdures.Ce fut aussila PRATIqUES lutte pour la mise en placed'une infrastructure maladesoour suivrela miseen olaceet le déroupour lier priseen charge* d'urgence à l'hôpilementdesessaiscliniquesde moléculesà activi" tal, priseen charge" quotidienne' par lesgénété anti-rétrovirale a conduit les associations à ralistes,et pratiquesde self-helppar insertiondes Encoldévelopperune véritablecontre-expertise. séropositifs danslesréseauxcommunautaires. lectantles informationssur chaqueessaiauprès de leursmembres,en s'appropriantla littérature Cesmobilisations eurentune doublesignification médicale,en mutualisantleurssavoirset en main- politique.On a d'un côté ce qui a le plus attiré tenant la pressionmilitantesur les industrielset l'attentionet eu le plusd'impactsur l'administra- l'agence,lesassociations ont réussià modifier,au tion sanitaire: les manifestations et pressions moins temporairement,la conduite des essais. pour que plus de moyenssoientconsacrés à la Ellesont réussià faireadmettreque, du point de (et de la qualitéde l'informalutte contre l'épidémie,pour que les responsabi- vue des personnes litésdes acteurspolitiqueset économiquesdans l'essai tion), randomiséavecplacebosur des mill'extensionde la contaminationne soient pas niées.D'autre part, il y a eu une transformation liersde personnesn'était pas la panacée; qu'i, fallait parfoissacrifierla puissancede l'analyse moinsvisible,maispeut être plus profondede la statistique à la pertinenceclinique; que l'on pou- médecine: l'inventionde pratiquesun peu diffé- vait inventerdes mécanismes donnantaccèsaux rentes,laissantplus de place à la parole des patients(d'autantplusfacilementque ce ceux-ci étaient jeunes, culturellementet socialement nouvellesmoléculesavant la misesur le marché définitive; que l'évaluationd'utilité était une dotés),à la décisionnégociée(d'autantplus que de vie. En un mot si personnene peut soutenir l'on était initialementen situation d'urgence, que l'implicationdes maladesest à l'origined'un partiellement d'impuissance reconnuefaceà une paradigmealternatifà la priseen chargechimiothérapeutique,il est tout aussicertainque sans cette < co-construction" des essaisla natureet le mode d'utilisationdes trithérapiesauraientété maladienouvelle),à l'articulationentre le médical et le social. L'effetle plus inattendude l'interventioncollecti- affairede chargevirale,maisausside conditions ve des séropositifset de leursprochesa toutefois été son impact sur le " noyaudur ' du système biomédical,c'est-à-diresur l'organisationde la recherche.Sansla pressiondes associations, les généralisable ? Compte tenu de l'importance différents. Dans quelle mesure cette expérience est-elle (INSERMpour le fondamenstructures classiques qu'a eue pour le mouvementSidason inscription tal, CHUpour la clinique)seseraientoccupéesdu sidasansque l'on estimenécessaire de créerune dans les pratiquessocialeset politiquesde communautésporteusesd'une identitéforte, d'une institution particulière,l'Agence Nationale de expériencede lutte contre lesdiscriminations, et Recherche sur le Sida.Or, I'ANRSa constituéun terrain d'expérimentationpour une recherche plus ouverte,en < participation au sensoù ses " destinataires ont fini par imposer un droit de d'un rapport critiqueaux professions médicales (ne serait-cequ'à causedu rôle que les institutions médicalesont eu dans le maintien des normestraditionnelles en màtièrede sexualitéet regard sur ce qui s'y faisait,et contribuer à de reproduction),on seraittenter de répondre la définition des programmesd'investigation. q u ' i l s ' a g i t d ' u n e s i t u a t i o n t r è s p a r t i c u l i è r e . L'expérience des essaiscliniquesest de ce point Pourtant,lesexpériences de pouvoircollectifdes de vue la plusintéressante. factivité desgroupes maladesne sont pas limitéesau domaine sida. de travailassociantchercheurs,industrielsde la Aux Etats-Unis, des milliersde collectifsconstitués pharmacieet représentantsdes associationsde autourd'une maladieont surgiau coursdesdeux PRATIQ-UES un médecintout-savant,si ce n'est tout-puissant, génétique,elle l'a fait en se réappropriantles (jouantlesfonsavoirsd'un grouped'innovateurs est loin d'avoirdisparue,le phénomèneestmoins damentalistes contre les cliniciens),sanscontri- massif,maistout aussiréel. U n b o n i n d i c e e s t l e d é v e l o p p e m e n td e l'Association françaisecontre les myopathieset le buer à l'émergencede nouvellesformes de savoir,sans déplacer (ou si peu) les critèresde jugementet les pratiquesde l'élitebiomédicale. De plus, à l'inversedes mouvementssida qui, succèsde son Téléthon.A partir des années80, tout en entretenantdes rapportscontradictoires I'AFMa réussià faire des maladiesneuromuscu- avec l'industriepharmaceutique, ont investide lairesun problème de santé publique. Plus,la puissance financièreacquisepar l'association lui a façon critique le terrain de la mondialisation pharmaceutique, I'AFM s'estalignéesur les pra- permis de peser significativement sur la façon tiques dominantesde valorisationdes connaissances,en particulieren matièrede brevetssur le En Franceoù la confianceen dernières décennies. dont le systèmebiomédicals'occupaitdes maladiesgénétiquesen généralet des myopathiesen particulier.D'un côté, I'AFM a poursuivilesinter- vivant. ventions(matérielles et financières) visantà facili- La juxtapositionde ces trajectoirestrès contras- ter la prise en charge (soin et vie sociale)des jeunesmalades.De l'autre,l'association a lancé tées permet de se convaincreque le pouvoir croissant desassociations de maladesn'estpasde sespropresprogrammesde recherche,faisantdu soutienà la génétiquemoléculaire un trait fonda- lui-même une garantie de transformationdes pratiquesde santé.Lesexpériences desdeux der- mentalde son identité.Le gène est devenupour (avecl'insistance l'AFMune valeurscientifique sur nièresdécenniesont certainementmodifié les la réductionde la maladieà la causalitémoléculaire), un résultattechnique (avec le développe- bué au désenclavement de la rechercheet à une rapportsentre maladeset professionnels, contricertaineredistributiondes oouvoirsde décision. ment des technologiesd'analysede I'ADN, le montage du laboratoireGénéthon)et une justifi- Ellesfont toutefoisapparaîtretrois zonesde tensionsqui tendentà limiterleurseffets.La premiè- cation symbolique(avec les promessesrenouveléesde la thérapiegénique).Vingt ans aprèsles re difficultéest la conséquencedes fortes asymétries de moyenset de compétencesqui existent premièresinitiativesd'ampleur,le bilan est mitigé. Pour ce qui est des interventions,la thérapie entre groupesde maladeset grandsacteursdL systèmede santé,que ce soit l'industriepharma- géniqueest,à quelquesexceptionsprès(qui por- ceutique ou les structuresprofessionnelles. En tent sur des pathologiesdu systèmeimmunitaire), dansl'impasse.Le principalacquisa été l'ex- peuventfacilement conséquence,lesassociations tensionconsidérable despossibilités du dépistage au rapportnécessairement ambiguqui leslie à la génétiqueet de l'interruptionthérapeutiquede grossesse.Du point de vue des chercheursen poursuitedu miracletechnique.La quêtede thérapie est un levier remarquablepour l'engage- être instrumentalisées. La secondedifficultétient génétiquehumaine,l'actionde I'AFM a été un ment et la constitutiond'une exoertisecollective p o i n t d ' a p p u i r e m a r q u a b l e .L e s m a u v a i s e s à partirde ce que chacunsaitde sa maladie.Elle languesdisentque l'association n'a toutefoisfait qu'aider à l'accouchementd'un < programme génome > qui aurait de toute façon vu le jour, peut aussidevenirun obstacleentravantl'émergenced'une visionplusglobaleet plussocialede la santé,la constitutiond'une expertisecritique. même sansl'argentdu Téléthon.Plusimportant La troisièmedifficultétoucheà la questionde la est sansdoute le fait que si I'AFMa, au coursde représentation et de la constitutiondu bien com- son intervention,constituésa propre expertiseen mun à partirdes intérêtsde groupe.Pourexister PRAT IQ-U E5 doivent partir de l'idenet peser,les associations tité de malades de leurs membres. Mais cette identité peut être construite de façon plus ou moins large,en intégrantou non d'autresparamètreset sourcesd'inégalitésque le fait d'être touchépar une pathologiedonnée.Comptetenu de cestensions,il n'est pas de voie royalepour passerde l'identitéde " victime' d'une maladie à cellede . citoyeno d'une démocratiesanitaire' Tout dépend du coursdes actions,de la manière et dont fonctionnent dont se nouentlesalliances lessolidarités. On pourraitêtretentéde conclureque le pouvoir des maladesest plus un mythe qu'un proiet et qu'il vaut mieux, pour changer le systèmede santé, construirel'allianceentre professionnels éclairés,politiquesde gaucheet assurés'Sousla TroisièmeRépublique,de nombreux socialistes pensaientque l'octroi du droit de vote à l'ensemblede la populationfrançaise(mâle)ne servirait à rien parceque les paysansvoteraienttoujours à droite. Auiourd'hui, les débats sur la démocratiesanitairesont à fronts renversés'La craintedu lobbying et des intérêts< particuliers> poussesouventla gaucheà s'en remettreexclusivement aux dispositifs de représentationdes citoyens.Paripour pari,on préfèreraceluid'une démocratiesanitairequi ne fassepas l'impasse sur l'implication collectivedes premiersconcernés,sur leursbesoinset leurssavoirsspécifiques' Mise en scène llaurel'Arrig Elisabeth Médecingénéroliste Mettre en scène les différentspouvoirs qui s'affrontenten médecine,pour imabeaugineret construireune alternative, toux d'un ouvrierqui, certes,fume, mais qui surtouttravailledans l'industriechimique et comment on Pourrait faire coup de soignantset de citoyensen ressentent la nécessité.Le Syndicat de la MédecineGénéralea élaboré un outil dansun autremonde. Où on voit tous les protagonistescachés du soin,protaderrièrelesprofessionnels théâtral,leu de rôleà la fois burlesqueet sérieux,proposéà tous ceux qui voudraientl'utiliser: propositionde miseen gonistesqui agissentcontre la santé,et tous ceux qu'on pourraitmobiliserpour des conditions une véritablesauvegarde si on le décisanté de vie,de travailet de scène pour théâtre forum, canevas, fiches pour chacun des personnages, dait collectivement. Où chacun,comédienamateurou néoll a déiàtourné et répliques... accessoires phyte pourraallierle plaisirdu ieu à celui lors de différentes interventions, et d'animer un débat Participatifauprès notamment lors de l'universitéd'été 2004 d'Attac. Où on voit comment le systèmelibéral traite (ou plus précisémentmaltraite)la d'un publictout venant. surle site: A consulter http://wwwsmg-Pratiques.info. tûla. P R A r t q u EsSe I E D I T O Mensonges et impostures – Vous dites coordination par le nouveau « médecin traitant » et c’est la légitimation des dépassements d’honoraires des spécialistes. – Vous dites amélioration des soins, mais c’est une moins bonne prise en charge du périmètre des Affections de Longue Durée, et pas de projet pour pallier la désertification médicale de certaines zones du territoire. – Vous dites efficacité, et c’est un Dossier Médical Personnel informatisé dont l’empilement de données ne servira qu’à casser le secret médical vers les assurances privées. – Vous dites économies d’un milliard sur le remboursement des soins, mais c’est 500 millions pour les médecins spécialistes. – Vous dites que chacun doit changer pour sauver la Sécu, et ce sont les industries pharmaceutiques qui augmentent leurs prix en vendant des produits dont elles cachent les effets secondaires dangereux. – Vous dites économies sur la prescription de médicaments et génériques, et c’est l’annulation du seul organisme, le FOPIM, qui se voulait garant d’une formation indépendante des firmes pharmaceutiques. – Vous dites que chacun doit faire un effort, mais ce sont les malades qui subissent l’augmentation du forfait hospitalier, le forfait de consultation. – Vous dites que le paiement à l’acte garantit la liberté, mais c’est la liberté pour les médecins de multiplier les actes et pour les patients de payer de plus en plus, surtout dès qu’ils voudront avoir un rendez-vous rapide chez les spécialistes. – Vous dites que vous voulez améliorer la qualité des hôpitaux et avec le Plan Hôpital 2007, vous démantelez l’hôpital au profit des cliniques privées, vous cassez les équipes, et vous délaissez le soin des malades chroniques et âgés pour privilégier les actes techniques rentables. Alors, nous, soignants, syndiqués ou non syndiqués, membres d’associations différentes et soignés, citoyens bien portants ou malades, nous sommes un certain nombre à vouloir dénoncer ces mensonges et impostures. Les soignants veulent combattre une réforme qui casse la Sécurité sociale, empêche le soin, et aggrave les inégalités. Les soignés refusent que l’accès aux soins devienne impossible pour une grande partie de la population, et que rien ne soit fait pour la prévention des pathologies liées aux conditions de vie et de travail. Sur le quotidien du soin et de la santé, il y a à faire connaître la réalité de la réforme du gouvernement, pour ensemble résister. RUBRIQUE Actu politico-médicale Résister et construire Elisabeth Pénide Membre du Syndicat de la Médecine Générale Les 26 et 27 novembre 2004, à l'occasion du 30 congrès du Syndicat de la Médecine Générale, e qui s’est tenu à Angers, deux tables rondes ont eu lieu, qui permettent d'alimenter la réflexion et d'orienter les actions du syndicat pour l'année à venir. En voici un compte-rendu succinct. Première table ronde Santé et Travail : « Repérer et prévenir plutôt que réparer » Marc Andéol, pour l’Association pour la Prise en Charge des Maladies Eliminables, a présenté un logiciel informatique, dont le but est de constituer une mémoire cumulative, une galerie de cas. Cet outil permet aux professionnels de santé d’un bassin de vie, de mieux repérer et prévenir par la consultation de cas similaires répertoriés. Annie Thébaud-Mony, directrice de recherche à l'université de Paris XIII, cherche à fédérer des initiatives contre les toxiques comme l'amiante, en diffusant les informations via Internet, expliquant le rôle des pays (Brésil, Canada, France) dans le prolongement de son utilisation (multinationale Saint-Gobain). L'absence de visibilité des cancers professionnels repose sur la difficulté à identifier les toxiques, à travers l'analyse des parcours professionnels. Cela est encore plus vrai pour les entreprises de sous-traitance : à EDF, 80 % de l'exposition au rayonnement repose sur des entreprises sous-traitantes, souvent non contrôlées par la médecine du travail. De plus, 40 % des travailleurs touchés par les maladies professionnelles sont immigrés et plus encore sont sous-déclarés. Corinne Provost, du collectif Égalité-Mixité CGT Nantes, souligne les inégalités de salaire homme femme, les violences, les harcèlements sexuels... Annie Touranchet, médecin inspecteur du travail, et Dominique Huez, médecin du travail, nous encouragent à remplir des déclarations détaillées de maladies professionnelles (obligation du médecin : article L. 461-6 du Code de Sécurité sociale), même celles ne figurant pas dans le tableau des maladies professionnelles, car elles permettent une réouverture à l'action collective. Les tests de toxicité doivent être faits par les employeurs, mais sur plus de 100 000 molécules, seulement 140 sont testés. L’industrie américaine freine et s'oppose au projet de directive (programme REACH) pour ces tests. Seconde table ronde autour du Dossier Médical Personnel (DMP) Pierre Suesser, du collectif DELIS, nous décrit leur réflexion autour de cet outil de travail, objet de standardisation, qui, en niant ce qui se déroule au cours de la démarche de soins, aboutit à un chaînage des pathologies, en quelque sorte un « casier sanitaire ». L’état défavorable du rapport de forces conduit DELIS (Droits et Libertés face à l’Informatisation de la Société) à proposer des amendements modestes, mais d’une importance majeure : – L’identifiant : un chiffrement irréversible et strictement dédié au dossier doit être fait à partir du numéro de Sécurité sociale. – Le dispositif de sécurisation pour avoir accès au dossier doit comprendre la carte du professionnel et un code personnel. – L’accès doit être différencié en fonction de la nature des professionnels concernés. – Le droit pour le patient, d'accepter ou non l’inscription d’une information, ainsi que le droit à l’« oubli » d’une information, doit exister. – Les hébergeurs doivent avoir une délégation de service public sans aucun lien aux employeurs ou à la Sécurité sociale. – Il faut supprimer le déremboursement lié à la non présentation du dossier. Gilles Hebbrecht de la SFMG (Société Française de Médecine Générale) nous apporte un éclairage technique. Les hébergeurs ne peuvent être que des poids lourds (Oracle, Noos) : ce qui pose la 62 P R AT I Q U E S RUBRIQUE Actu politico-médicale question de leur indépendance. Pour ce qui est des coûts et des délais, installer un pareil système en trois ans paraît délirant : en Angleterre, ils ont prévu dix milliards de livres sur dix ans, dont 1/3 pour la rémunération des médecins ; en France, on escompte 3,5 milliards d'économies pour probablement 3 à 4 fois plus de dépenses. Le volume, la hiérarchisation, le tri des documents, demandent un travail considérable. Se pose aussi le problème du secret professionnel qui devient simple « confidentialité » : le DMP ne semble pas pouvoir être le dossier du médecin, faudra-t-il qu’il fasse deux dossiers ? Didier Ménard du SMG constate qu’il existe un consensus autour du DMP en France chez les assurés, les pouvoirs politiques, cet outil informatique étant présenté comme un élément de bon sens. Pourtant, l'outil doit être au service du projet et non l'inverse. Le vrai débat porte sur la coordination, la qualité des soins qui nécessitent une transformation du système de santé. Mais pour l’instant, on espère des économies par l’incitation à la renonciation aux soins. Le débat et la réflexion de tous permettent de tracer des pistes d’action pour le Syndicat de la Médecine Générale pour l’année à venir : un Appel en direction des soignants sur la défense du système solidaire en acteurs de santé publique que nous sommes et l'Observatoire des inégalités de santé liées à la réforme, outil à utiliser pour une bataille politique. Il faut alimenter notre discours par des faits précis mettant à l’évidence la violence de la culpabilisation des personnes malades, victimes et non coupables. Lettre à un ami médecin catalan Cher Pedro, Tu risques de voir débarquer sur les ramblas début décembre une troupe de médecins français. Connaissant ta curiosité et ton intérêt aux « choses » de la médecine, je suis certain que tu vas aller leur parler. Il faut que je te renseigne sur ces médecins, et sur les raisons de leur escapade catalane. Je ne veux pas influencer ton jugement que je connais pertinent, mais simplement éviter une trop forte déception à un ami démocrate et progressiste. Ces médecins sont réellement aujourd’hui dans une grande difficulté, parce qu’ils perçoivent qu’ils sont « dindons de la farce ». Lors de notre dernière rencontre nous parlions, te souviens-tu, des difficultés à comprendre les changements et évolutions d’une société. C’est typiquement ce qu’il leur arrive. L’économie libérale qu’ils défendent, plus par idéologie que par obligation corporatiste, les met dans une situation difficile. La marchandisation du soin transforme progressivement leurs pratiques professionnelles en une succession d’actes marchands. Par exemple, leur responsabilité professionnelle est devenue une valeur financière et leur prime d’assurance est démesurée. Aussi, sans comprendre qu’ils sont assis sur la branche qu’ils sont en train de scier, ils protestent pour obtenir une liberté totale pour fixer le montant de leurs honoraires. Si tu leurs parles, explique-leur qu’au jeu de la concurrence libérale avec les acheteurs de soins (les assurances complémentaires), ils sont forcément perdants. Ils seront de plus en plus considérés comme des prestataires au service d’entreprises qui veulent de la rentabilité et qui n’ont rien à faire de l’éthique, de l’humanisme, du respect de la personne malade qui sont les fondements de l’action de soigner. Toi qui est un médecin salarié heureux, parce que suffisamment libre pour exercer la médecine de ton choix, tu seras peut être plus efficace pour les convaincre qu’il font fausse route en passant par Barcelone, même et surtout dans cette ville qui s’est battue pour la démocratie. Adeu l’ami, à bientôt en Catalogne Ton ami Didier P R AT I Q U E S Didier Ménard Médecin généraliste 63 RUBRIQUE Actu politico-médicale Construire une charte éthique de la Formation Médicale Continue Marie Kayser Fin octobre, sur l’initiative de la SFTG (Société de Formation continue des Médecins Généralistes), ont eu lieu les « Etats Généraux de la Formation Médicale Continue Indépendante ». Médecin généraliste, présidente du Syndicat de la Médecine Générale La formation des médecins, pourtant obligatoire depuis 1996, est jusqu’à présent laissée au choix de chaque médecin. Elle prend différentes formes : soirées financées par les firmes pharmaceutiques, Formation Professionnelle Conventionnelle (FPC) rémunérée indépendante des firmes et délivrée par des associations agrées... La formation va être désormais « régie » par les Conseils Nationaux de la Formation Médicale Continue (CNFMC), mis en place début 2004 par le gouvernement (il faut noter que la SFTG a été « éliminée » de cette instance de décision, alors qu’en tant qu’organisme de formation, elle y avait toute sa place). C’est dans ce contexte que se sont retrouvés tous ceux qui luttent pour que la formation médicale soit réellement indépendante, en particulier des industries de santé ; cette volonté d’indépendance a été explorée dans une table-ronde où sont intervenus la SFTG, la revue Prescrire, le collectif pour une Formation médicale indépendante (Formindep), et nous Syndicat de la Médecine Générale ; elle semblait évidente pour la plupart des présents : individuels, acteurs de la FPC, Syndicat des Jeunes Médecins Généralistes… mais l’intervention du président du collège des médecins libéraux du CNFMC a bien prouvé qu’au niveau de cette instance, il n’en était rien : il ne voyait aucune raison de ne pas agréer les formations faites avec le financement de l’industrie pharmaceutique, refusant d’admettre l’influence directe ou indirecte de cette dépendance. Trois ateliers ont permis de travailler sur les conditions de la qualité de la FMC, les attentes des usagers et de la santé publique, et la prescription en Dénomination Commune Internationale qui est un des éléments de l’indépendance de prescription. A l’issue de cette journée a été élaboré le projet de charte éthique de la FMC. Projet de charte éthique de la Formation Médicale Continue La formation médicale continue doit avoir une indépendance totale vis-à-vis de toutes les industries de santé. Les intervenants en formation médicale continue doivent systématiquement déclarer leurs conflits d'intérêts. La formation médicale continue doit être replacée dans son contexte sociétal, donc être en adéquation avec les besoins et attentes des patients. La formation médicale continue (comme la formation médicale initiale d'ailleurs) doit parler des médicaments en dénomination commune internationale, et il faudrait disposer d'une banque d'information sur les médicaments indépendante. La formation médicale continue doit s'intégrer dans le temps de travail et être rémunérée par des fonds mutualisés. SFTG http://www.paris-nord-sftg.com 64 La formation médicale continue doit être critique et interdisciplinaire. P R AT I Q U E S RUBRIQUE Actu politico-médicale Le gouvernement actuel martèle à qui veut l'entendre que le déficit de la Sécurité sociale est dû à Elisabeth Pénide ces irresponsables que sont les assurés. En tout premier lieu, tous ces malades bénéficiaires d'une prise en charge à 100 % à travers l'ALD Médecin généraliste (affection longue durée). Pour ceux-là un contrôle plus strict des ordonnances bi-zone est déjà mise en place : il faudra à chaque fois argumenter la prise en charge du Doliprane® pour les douleurs associées au diabète ou à l'hypertension... D'ailleurs ils devront s'acquitter du forfait de consultation à chaque acte de consultation ou de biologie, avec interdiction aux assurances complémentaires d’en assurer le remboursement : pour une patiente diabétique équilibrée, cela représente au minimum vingt forfaits annuels. À un (si peu !), voire deux, voire cinq euros l'unité, quand beaucoup de personnes âgées ont pour tout revenu le minimum vieillesse à 587,75 euros/mois... Il faut responsabiliser ces malades = vous êtes accusés d'être malades ! N’encourageons surtout pas le suivi régulier et la prévention des complications des maladies de longue durée ! Que penser de ces accidents du travail qui, eux aussi, devront s'acquitter également de ce forfait : on sait bien qu'ils le font exprès ! Surtout ne cherchons pas à limiter les causes de ces accidents, en enlevant tout moyen de prévention à la médecine du travail. Et ne chargeons pas trop ces employeurs qui « cassent » régulièrement à des Quelles économies ? mêmes postes des travailleurs : le financement de la Caisse des Accidents du Travail et Maladies Professionnelles a d’ailleurs été plafonné... Ceux des Etats-Unis, bienfaits du libéralisme à outrance, ont au moins compris par des primes indexées sur le coût réel des accidents du travail, qu'il était plus rentable de les prévenir. Ces assurés qui prêtent leur carte de Sécurité sociale pour faire profiter de la C.M.U. (couverture maladie universelle) certains autres, seront mis à défaut par l'existence d'une photographie sur cette carte : les médecins seront sommés de faire le contrôle d'identité de la personne soignée (annexe de la loi Sarkozy sur la prévention de la délinquance). Surtout ignorons les changements survenus dans la délivrance de la C.M.U. qui ouvre les droits de la famille à partir du mois qui suit la délivrance de cette prise en charge : lorsque les personnes nous ramènent enfin l'attestation de leur prise en charge si difficilement acquise (en moyenne en Alsace, deux mois), nous devons leur signaler souvent qu'il leur faut attendre le mois suivant. En attendant, comment les soigner ? Rendons les gens « responsables », ne simplifions pas l'accès aux soins : j'ai le souvenir dans les années 90 d'une dame de cinquante ans, qui relevait du régime général tout en n’ayant que 2600 francs par mois pour vivre sans avoir droit à l’aide médicale gratuite. À partir d'ulcères variqueux non soignés, faute de moyens, elle a présenté un état de choc septique qui a exigé une prise en charge dans un service de réanimation durant un mois à plus de 10 000 francs la journée, puis un mois d'hospitalisation en service de chirurgie à au moins 2500 francs la journée à l'époque… à la suite de quoi la caisse dont elle dépendait lui a accordé une prise en charge ALD hors liste qu’elle avait refusé de donner jusque-là. P R AT I Q U E S 65 RUBRIQUE Actu politico-médicale Le retard donné à un recours aux soins peut avoir re, la Sécurité sociale a déboursé 593 euros. des conséquences économiques (s'il ne faut par- L’ophtalmologue ne pratiquait pas cela dans son ler que de celles-là) gravissimes. cabinet : les impératifs en temps et en personnel d'une bonne stérilisation... Il y a donc fallu aller Les autres accusés sont les médecins : évidem- dans une salle d'opération d'une clinique, voir en ment, ceux-là qui prescrivent trop d'arrêt de tra- bilan préopératoire un anesthésiste, et tutti quan- vail : surtout restons quantitatif et non qualitatif. ti... Mais ce sont des dépenses justifiées, qualité N'analysons pas trop les causes de ces arrêts, les de soins oblige ! profils de clientèle, des catégories socioprofes- Et surtout, ne touchons pas au paiement à l'acte, sionnelles des assurés concernés. Tant qu'il n'y même pour des actes d'urgence, qui en tant que aura pas de définition de la pénibilité de certains tels, devraient relever d'un paiement au forfait : emplois, nous nous verrons obligés de surseoir à comment peut-on espérer qu'un médecin de cet état de fait par des arrêts de travail, puis, plus garde payé à l'acte encourage des assurés à n'uti- tard, au fil des handicaps cumulés, une inaptitu- liser l’urgence qu'à bon escient ? Est-ce qu'un de, un chômage, une invalidité, avant qu’ils puis- patient réellement dans l'urgence doit d'abord sent toucher une retraite minimaliste... Sans que penser comment il va s'acquitter de ses soins ? jamais en soit évalué le coût pour la collectivité ! Non, au contraire : dès janvier 2005, tous les Les patrons pour- médecins auront accès au secteur 2 (de dépas- ront sement des tarifs conventionnels), du moment eux-mêmes faire ces que l'assuré ne passera pas par le médecin « trai- arrêts maladie par annuler tant ». Nos confrères libéraux pourront appré- des médecins qu'ils cier les bénéfices d'une logique marchande et financeront directe- oublier une certaine éthique du soin. En contre- ment, et dans ce cas partie le Dossier Médical Partagé, devenu les indemnités jour- Personnel (DMP), et le codage des actes leur nalières (I.J.) indû- seront exigés. ment versées, devront être rem- Ce bel outil, le DMP, qui doit nous faire faire boursées 3,5 milliards d'économies grâce à son utilisation, par les assurés ! quand beaucoup chiffrent son coût à deux ou La tarification à l’ac- trois fois les économies espérées, n'a pas pour tivité imposée dans autres objectifs que d'aggraver irrémédiablement les établissements le déficit de la Sécurité sociale et de mettre en publics et privés ne place les moyens d'un contrôle : de ces malades tient évidemment vraiment malades et souvent pauvres, et de ces pas compte de la médecins, tous également irresponsables. Pour sélection « naturelle » : au privé l’appendicite du ouvrir le marché des soins vers ceux qui peuvent jeune en bonne santé, au public la personne âgée payer ! malade qui fait le même appendicite, mais plus Au même moment, le Medef a pris le contrôle de compliquée sur un terrain fragilisé avec la même la Sécurité sociale à travers l’UNCAM (Union tarification… (d’ailleurs bientôt réapparaîtrons les Nationale des Caisses Maladies) : 50 % des voix officiers de santé sous qualifiés pour ce public-là). leur sont dévolues avec nécessité d’une majorité Usons et mésusons des protocoles : pour l'abla- des 2/3 pour contrer une proposition… tion d'une petite verrue de la paupière supérieu66 P R AT I Q U E S Pour qui les profits ? RUBRIQUE Actu politico-médicale Un jugement décisif D ouze familles, dont les enfants ont été intoxiqués par le plomb, soutenues par l’AFVS (Association des Mady Denantes Familles Victimes du Saturnisme), ont déposé un dossier auprès de la CIVI (Commission d’Indemnisation des Victimes d’Infraction) en 2002. La CIVI est saisie quand on pense avoir été victime d’une infraction pénale. Le Médecin généraliste tribunal de la CIVI détermine s’il y a eu infraction pénale, mais n’a pas pour mission de déterminer les responsables. Ces enfants ont été intoxiqués par le plomb contenu dans les peintures dégradées de leur logement insalubre. Certaines familles étaient locataires, d’autres squatteuses. Quelle que soit leur situation, la CIVI a conclu en 2002 qu’il y avait infraction pénale à maintenir des enfants dans un logement contenant du plomb à des doses toxiques, au vu et au su de tout le monde, en connaissant les conséquences irréversibles sur le développement psychomoteur de l’enfant d’une intoxication au plomb, même à faible dose. Cette décision a été contestée, mais le 28 octobre 2004, la Cour d’Appel vient de confirmer le premier jugement : l’infraction est reconnue, avoir maintenu des enfants dans un endroit dangereux est considéré comme une violation du code pénal. Aujourd’hui, laisser un enfant s’intoxiquer au plomb est une infraction pénale qui mérite indemnisation (1). A la suite de cette décision juridique, l’AFVS propose la création d’un comité scientifique : il aura pour rôle d’assurer un suivi vigilant des recommandations faites par le jury de la conférence de consensus en novembre 2003, afin que ce problème majeur de santé publique qu’est le saturnisme soit enfin résolu. Les médecins intéressés pour faire partie de ce comité scientifique doivent contacter Mady Denantes au 06 20 69 38 64 ou à l’adresse [email protected]. Extraits des recommandations de la conférence de consensus – publication de l’imprimé de DO (déclaration obligatoire) ; cet imprimé a été publié, mais seuls les médecins pédiatres en ont été informés et en ont reçu un exemplaire ; – faire figurer sur les certificats de santé des 8e jour et des 9e et des 24e mois, des items permettant d’identifier le risque d’intoxication au plomb en raison de la nature des lieux d’habitation et d’accueil habituels des enfants ; – inscription du saturnisme dans la liste des maladies prises en charge à 100 % pour une plombémie m g/l ; supérieure à 100m – recherche systématique du risque d’exposition au plomb chez toutes les femmes enceintes. Certaines recommandations ont particulièrement besoin de la vigilance des médecins généralistes : – Retirer rapidement l’enfant du milieu exposé, notamment pendant la période des travaux indispensables au domicile. – Surveillance renforcée du développement neuropsychologique des enfants intoxiqués, notamment aux âges clé : examen des 9e, 24e mois, des 3-4 ans, des 5-6ans en école maternelle. Ce suivi doit continuer après 6 ans. – Application rapide en France de la directive européenne abaissant de 800 à 300 microgrammes par litre la plombémie maximale autorisée chez les travailleurs exposés. Pour une femme en âge d’avoir des enfants, le jury recommandait que la limite maximale soit portée à 100 microgrammes par litre. – Demande au comité paritaire de formation professionnelle conventionnelle (2) que le thème santé/environnement soit considéré comme prioritaire. L'Association des Familles Victimes du Saturnisme c/o Espace, Solidarité, Habitat 78-80, rue de la Réunion 75020 Paris Tél. : 01 44 64 04 47 e-mail : [email protected] 1. La décision complète de la cour d’appel est sur le site de l’AFVS : www.afvs.org. 2. Instance dont dépend la formation professionnelle des médecins généralistes. P R AT I Q U E S 67 RUBRIQUE Images du corps Photographie : Assistance Publique-Hôpitaux de Paris. 68 P R AT I Q U E S RUBRIQUE Images du corps Résumé : Les technologies des flux d’images et d’informations ne sont pas pensées, encore moins débattues. Elles font pourtant une irruption massive et « sauvage » dans le champ médical. Mettant en danger mortel la clinique et l’espace de confidentialité du soin. Ie préfixe est à la mode. Etre branché, c’est être télé. Télé-médecin, télé-chirurgien, télé-surveillant. Monique Sicard Pratiquer le télé-diagnostic, la télé-assistance, les télé-consultations. Etre acteur d’une télé-santé. L’action à distance exercée sur ses concitoyens, la mise en circulation dans un espace semi-public des informations intimes les concernant, serait un gage de modernité. Une adhésion à l’utopie d’une cité idéale où, chacun, ancré « at home », se verrait soigné par un insaisissable, mais efficace Chercheur au CNRS en histoire et esthétique de l’image et du regard au-delà. L’imagerie, déjà, servait parfois d’intercalaire entre soignant et soigné : l’écran, lui, autoriserait la télé-vision, la télé-action, la télé-intervention. Non seulement au sein même du bloc opératoire, mais loin, parfois très loin : sur l’autre bord de l’océan pour une télé-ablation de la vésicule biliaire commandée depuis Strasbourg, dans le sud de la France pour une télé-échographie réalisée à Paris. Le haut débit des télé-corps Les arguments sont « droit-de-l’hommistes ». Les militaires engagés sur les champs de bataille doivent recevoir les mêmes soins que leurs concitoyens hospitalisés. Les habitants des zones rurales doivent bénéficier des mêmes examens que ceux des grandes villes. La télé-médecine garantirait en outre le maintien des hôpitaux de proximité en palliant le déficit de personnel. L’idéal égalitaire et démocratique est appelé au secours du projet de « dossier médical partagé ». Communication absolue, transparence maximale, garantie d’une parfaite « traçabilité du parcours du patient » (1). Il s’agit de construire « un réseau de soins virtuels » (2). Le malade, chaque fois – on l’affirme – est « au cœur du projet » (3). Il s’agit de satisfaire ses demandes, de lui garantir l’« efficacité et l’efficience des soins » (4) par l’appel aux experts. La révolution du haut débit atteint de plein fouet la médecine, plus violemment peut-être que celle des biotechnologies. Avant elles, il y eut les bousculades de la pénicilline, du laboratoire, de l’asepsie, de l’antisepsie, de l’anesthésie, de la clinique… La télé-médecine, elle, éloigne. C’est là son moindre défaut. Le patient, loin du médecin ; le médecin loin du patient. Tant physiquement que symboliquement. Face au patient, le soignant pianotera sur le clavier de l’ordinateur, remplira des fiches, des cases, réclamera une illisible carte mémoire, enverra finalement ses données quelque P R AT I Q U E S 69 RUBRIQUE Images du corps viduelles entre professionnels de la santé sous un numéro identifiant unique, bien repérable. Le patient sera titulaire d’une carte contenant une clé d’accès électronique. A condition que ses raisons soient « légitimes », il pourra s'opposer à l’inscription informatisée d’informations nominatives le concernant. Dans les hôpitaux, il pourra consulter son dossier sans passer par un médecin. On ne s’appesantira pas sur le serment d’Hippocrate : « Je m'interdirai d'être volontairement une cause de tort ou de corruption. » dit le texte original dans la traduction Littré. « Je ne ferai pas usage de mes connaissances contre les lois de l’humanité. J’informerai les patients (…). Photographie : Assistance Publique-Hôpitaux de Paris. Je ne tromperai jamais leur confiance. Admis dans l’intimité des personnes, je tairai les secrets qui me seront confiés. » dit le serment réactualisé. (4) part, ailleurs, à d’autres. Car cette médecine pro- On ne s’attardera pas sur la Déclaration univer- méthéenne se soucie des choses avant de s’occu- selle, susceptible d’être bafouée au nom même per des gens. On ne saurait lui en vouloir. Il faut des Droits de l’homme : « Tous ont droit à une assurer la santé des outils : cela réclame des soins, protection égale contre toute discrimination de l’attention, une vigilance de chaque instant. (article 7). Toute personne a droit à un recours Au nom du bien, la télé-médecine sera investie effectif devant les juridictions nationales compé- d’un pouvoir exorbitant. Le dossier médical tentes contre les actes violant les droits fonda- « informatisé » mais dit, par euphémisme, « per- mentaux qui lui sont reconnus par la constitution sonnalisé » est, d’évidence, une dépossession du ou par la loi (article 8). Nul ne sera l'objet d'im- secret par la diffusion dans un espace intermé- mixtions arbitraires dans sa vie privée (…) ni d'at- diaire, mi-privé, mi-public des données d’un dia- teintes à son honneur et à sa réputation. Toute logue entre médecin et patient. Passons outre personne a droit à la protection de la loi contre l’immense problème soulevé par l’atteinte aux de telles immixtions ou de telles atteintes libertés individuelles. Rappelons juste que le (article 12). » secret, que conserve jusqu’à présent pour lui seul 70 le médecin, est un pilier de l’exercice médical. L’espace béant, hybride, qui s’ouvre entre le Que la parole de l’un à l’autre n’est pas une patient et son médecin, et dans lequel s’en- conversation de salon, qu’elle a ses codes, ses dits gouffre le secret médical en direction de terra et non-dits, ses modulations attentives. Qu’elle incognita, n’a été ni décrit, ni vraiment pensé. Au est l’instrument d’un diagnostic, l’outil d’un soin ; contraire, la promotion du temps réel, du direct, en outre, la garante de l’autorité médicale. Celle des performances télé-médicales affichent leur par qui la médecine fonctionne dans le respect transparence, leur légèreté. Le temps, l’espace et mutuel des soignants et des soignés. jusqu’aux machines elles-mêmes, sont abolis. Les Jusqu’à présent, le dossier médical était propriété chimères du patient-machine, du médecin-com- du médecin généraliste. Obligation pour lui de le puter, de l’écrit-parlé, de l’immédiat-médié, de protéger contre toute indiscrétion. Le projet de l’intime-public, des écrans-écrans… sont igno- dossier personnalisé fera circuler les données indi- rées, pas même imaginées. P R AT I Q U E S RUBRIQUE Images du corps Ces dispositifs homogénéisant nécessiteraient Les règles implicites, pratiques, éthiques, com- pourtant d’être pensés si l’on ne souhaite pas voir merciales, politiques héritées d’une très longue disparaître les singularités au fondement même tradition médicale, s’en trouveront évidemment de la personne. Celle du patient, mais également bouleversées. L’apparition d’une langue de bois celle du médecin, sans laquelle ne saurait exister médicale sera la première conséquence de la cir- une médecine de qualité. Mais dans ce « faire culation des données personnelles. Le duo millé- comme si… », le double corps physique et sym- naire médecin-patient, reposant sur le respect et bolique du soignant prend inexorablement la la confiance mutuels sera ébranlé. Le double fuite, comme si les seules images, les seules don- regard en chiens de faïence ne serait qu’un nées indexées pouvaient « tenir lieu de… ». moindre mal. Le pire serait que, multipliant Comme si l’inscription n’était que pure trace. Ce plaintes et procès, soignants et soignés ne se qui prend naissance est une médecine de flux où montrent respectivement les crocs. Il ne s’agit la circulation des données et des images revêt pas d’être technophobe, mais de prendre le Photographie : Assistance Publique-Hôpitaux de Paris. plus d’importance que leur signification. Elle a temps de la réflexion. La cité entière est concer- pour terrible corollaire la négation des compé- née. En fin de compte, dans cette nouvelle méde- tences tant humaines que scientifiques. Elle cine qui s’installe avec l’assentiment de presque sonne le glas de la médecine clinique. tous, s’est-on demandé où résidaient désormais Le réseau virtuel qui se met en place, en pro- les instances de décision ? mouvant une médecine d’experts, abolit les corps intermédiaires. Loin de favoriser la démocratie, il la fragilise. L’Internet invite à s’adresser au Président de la République plutôt qu’au conseiller municipal ; au spécialiste californien plus qu’au médecin de quartier. Quitte à écrire… 1. Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, rapport sur les télécommunications à haut débit du système de santé, 23 juin 2004. 2. Idem 3. Idem 4. Idem 5. Serment d’Hippocrate réactualisé par le professeur Bernard Hoerni, Bulletin de l’Ordre des médecins - n° 4, avril 1996. P R AT I Q U E S 71 RUBRIQUE IVG, trente ans après La loi autorisant en France l’interruption volontaire de la grossesse (IVG) a 30 ans. C’est l’occasion de revenir sur l’évolution des pratiques, et comment elles peuvent être vécues. D’autant plus que les modifications récentes permettent maintenant l’IVG médicamenteuse en « ville ». Quid de ces acquis et des problèmes qui perdurent ? L’avortement en ville, un progrès ? Martine Lalande Il y a deux façons de faire un avortement : l’aspiration et la méthode médicamenteuse. Celle-ci associe de la Mifégyne® (mifépristone) qui arrête l’évolution de la grossesse et, dans un deuxième Médecin généraliste temps, du Cytotec® (misoprostol) qui entraîne des contractions aboutissant à l’expulsion, dans les trois heures suivantes le plus souvent, mais parfois seulement quelques jours plus tard. Pendant ce temps, la femme saigne, comme lors d’une fausse couche, parfois énormément. Dans le centre d’interruption volontaire de grossesse (IVG) où je travaille, à Colombes, le premier jour, la femme voit les infirmières qui lui donnent les informations, puis le médecin, et la deuxième fois, elle reste trois heures à l’hôpital, accompagnée par les infirmières qui surveillent sa tension, lui donnent des médicaments contre la douleur et parlent avec elle. Les femmes semblent satisfaites de cette façon de faire et remercient pour la gentillesse de l’accueil, spécialité de ce centre. Mais on fait très peu d’IVG médicamenteuses à Colombes, car cela demande beaucoup de disponibilité de la part des infirmières, toujours en nombre insuffisant… Comme il n’est pas besoin de matériel compliqué ni d’anesthésie, tout cela peut se faire en ville. Il y a eu un consensus entre les associations représentant les femmes, les médecins faisant des IVG et les gynécologues, pour demander cette simplification et elle a été obtenue, de haute lutte, du gouvernement. Les médecins qui ont commencé à le faire semblent contents, les femmes aussi (?), la preuve en serait que deux tiers d’entre elles n’ont pas besoin d’appeler le médecin qui les suit avant la date du rendez-vous suivant (au bout de trois semaines, pour vérifier que tout est terminé)…Elles se débrouillent toutes seules… Est-ce un progrès ? N’est-ce pas surtout un moyen de décharger les services qui font des IVG, qui n’obtiennent pas les moyens de répondre correctement à la demande ? Et de ne pas donner de moyens supplémentaires aux services qui peuvent assurer l’accueil des femmes ? Est-ce que la demande de l’IVG en ville par les femmes n’est pas liée à la crainte de ne pas obtenir de rendezvous à l’hôpital puisqu’il y en a si peu ? Est-ce que les femmes n’appellent pas le médecin parce qu’elles ont compris qu’il ne fallait pas le déranger « pour rien » ? Est-ce qu’elles vivent bien ces situations où elles saignent beaucoup sans savoir quand se fait l’avortement et avec des douleurs, seules chez elles ou au travail ? Moi qui ai tant de mal à prendre en charge les femmes qui font des fausses couches, car elles ont besoin d’être vues tous les jours, parce qu’elles sont angoissées, et qu’elles sont mal reçues aux 72 P R AT I Q U E S RUBRIQUE IVG, trente ans après urgences, je ne sais pas où j’aurais la place de les aider pour leurs IVG à domicile, n’ayant d’autre lieu que ma salle d’attente pour qu’elles se reposent, et peu de temps entre les rendez-vous et les visites pour gérer les problèmes imprévus. Même si je voulais me rendre disponible au téléphone, je ne pourrais pas leur tenir la main comme les infirmières dans un lieu accueillant où elles peuvent parler avec d’autres femmes. Alors, si l’on se prenait à rêver qu’il existe des « Maisons de santé des femmes », où seraient faites les IVG, le conseil en contraception, et aussi l’aide à l’allaitement et d’autres activités utiles aux femmes, et qui soient des lieux d’accueil ouverts toute la semaine avec un personnel qualifié et volontaire et la présence d’associations, alors l’IVG médicamenteuse en ville serait simple et possible dans de bonnes conditions. Mais c’est une autre conception que celle qui prévaut aujourd’hui, visant à décharger le service public d’activités qui étaient dans ses missions, sur « la ville », qui fait ce qu’elle peut pour accompagner les patients dans leurs problèmes de santé, mais avec peu de moyens et beaucoup de frustration. Courrier des internautes L’article précédent a suscité un débat parmi les membres du comité de lecture A La Roche sur Yon où nous pratiquons au moins 60 % d'IVG médicamenteuses, le Cytotec® est pris à domicile, lorsque la femme le souhaite et que sa situation le permet. Lors de la prise de la Mifégyne®, nous remettons à la femme un document expliquant ce qui va se passer, une ordonnance pour le Cytotec®, et des numéros de téléphone en cas de besoin. Beaucoup de femmes choisissent cette formule, la plupart en sont satisfaites et il y a peu d'appel aux numéros inscrits sur la feuille. Quelquesunes nous disent que le moment d'expulsion a été hyperalgique et très difficile à vivre. Parmi celles qui choisissent de venir au centre pendant trois heures pour le Cytotec®, un certain nombre n'expulsent pas pendant ce séjour, et lorsque je viens leur dire qu'elles peuvent rentrer chez elle, je suis toujours un peu inquiet de les voir faire 10, 20 ou 50 kilomètres pour rentrer chez elles, parfois seules, car il n'y a plus de conjoint dans leur vie. Alors, à travers cette expérience, je ne pense pas qu'il y ait de solution parfaite. Il existe une situation différente pour chaque femme, à évaluer avec chacune, et il est important que le choix offert soit le plus vaste possible. C'est pourquoi, il est important que l'IVG médicamenteuse en ville existe. Christian Bonnaud, médecin généraliste Martine Lalande a pointé tout à fait justement certains écueils à éviter dans la mise en place de l'IVG médicamenteuse en ville. L'arrêté ayant fixé un forfait ne pouvant donner lieu à dépassement, il n'y a déjà pas de dérive financière possible, ce qui n'était pas gagné au départ. Certains médecins avaient déjà commencé à organiser des filières juteuses... Mais ce serait une très mauvaise réponse d'imposer cette méthode parce que c'est plus rapide ! Même pratiquée à l'hôpital, l'IVG médicamenteuse ne convient pas à toutes les femmes et donc encore moins à domicile. Des critères de sélection rigoureux ont été établis pour aider les médecins et les patientes à faire le meilleur choix. Un de ces critères est que la femme puisse être entourée le jour de la prise de Cytotec® et il n'est donc pas question qu'elle soit seule ou à son travail ! Ce doit être un choix de plus offert aux femmes et pas un non-choix... C'est également une possibilité pour les médecins de prendre en charge leur patientes qu'ils connaissent bien (c'est pour ça qu'il faut largement diffuser la méthode), à condition d'être formés correctement, indemnisés pour leur formation, en liaison avec le centre référent et les partenaires de ville concernés P R AT I Q U E S 73 RUBRIQUE IVG, trente ans après (conseillères conjugales, échographistes, biologistes...). Il n'est pas question que le médecin soit seul dans son coin et frustré, même s'il est évident qu'il s'agit d'une prise en charge assez lourde nécessitant des consultations longues, mais au final très peu d'appel : à Bichat sur 433 patientes, 7 ont appelé le médecin de ville, 20 ont appelé le centre de planning familial… Je pense que c'est une vraie révolution que l'IVG sorte de l'hôpital. Les équipes hospitalières sont ellesmêmes très réticentes et peuvent le vivre comme une perte de pouvoir. Cette pratique, si elle est encadrée et largement diffusée, sera un vrai plus pour les femmes qui choisiront d'en bénéficier. Comme le dit Nathalie Bajos « Il n'y a pas de femmes à risque d'IVG, mais des moments de fragilité dans la vie de la femme qui sont des périodes à risques d'IVG ». Le médecin traitant, qui connaît bien la femme, est le mieux placé pour comprendre le contexte, les ambivalences et pour aider la femme à choisir une contraception adaptée en fonction du moment de sa vie. Sophie Eyraud, médecin généraliste ...Même dans un établissement de soins, la prise en charge ne dure que quelques heures, la femme rentrant ensuite chez elle avec d'éventuels problèmes à gérer. Faute de formation de beaucoup de médecins, le relais pour la prise en charge des douleurs, des saignements ou des infections repose souvent sur SOS médecins ou les urgences des hôpitaux, ce qui n'est pas toujours très satisfaisant. A nous de mettre en place des réseaux pour mieux assurer ce relais et rompre ainsi l'isolement des femmes... et des médecins de ville. Il ne faudrait pas oublier l'importance de proposer à la femme cet espace d'écoute et de parole que l'on appelle « entretien » et qui lui permet de rencontrer un(e) professionnelle formée à l'écoute, non médecin et n'intervenant pas dans le processus de décision et de réalisation technique de son IVG : une conseillère conjugale. Bernard Meslé, médecin généraliste Courrier des lecteurs Réflexions autour d’une modification de la loi ...Le décret de juillet 2004 précise la faisabilité de l’IVG en ville. Le médecin doit pouvoir faire valoir une justification d’expérience professionnelle adaptée et faire reconnaître sa compétence à la pratique régulière d’IVG médicamenteuse. Il assure au sein de son cabinet toutes les étapes de l’IVG, depuis la première demande jusqu’à la consultation de contrôle. Cela se fait dans le cadre d’une convention conclue entre le médecin et un établissement de santé comportant un centre d’IVG. Cette convention prévoit des réunions d’échanges, de formations et d’actualisations autour de la pratique de l’IVG médicamenteuse. Il ne s’agit pas là d’un simple « passage » en ville d’un médicament. Jusqu’à présent, certains médicaments ont des prescriptions restreintes et ne peuvent être prescrits que par un médecin hospitalier... Or, voici que selon le décret de juillet 2004, la compétence ne tiendra plus à un diplôme de spécialiste ou de généraliste, ou à un lieu d’exercice, mais bien à une pratique prouvée et reconnue. D’autre part, le paiement de cet acte en ville devient un forfait qui est défini par l’acte « IVG médicamenteuse en ville » et non par le diplôme spécialiste ou généraliste. Enfin, la convention oblige à l’organisation des réunions entre le centre d’interruption volontaire de grossesse et les médecins praticiens d’IVG médicamenteuse en ville. Ainsi, la compétence est reconnue par la pratique, le paiement se fait pour cette pratique, le travail de réseau se trouverait reconnu comme participant de la pratique. Je ne vois pas d’autre endroit fonctionnant ainsi dans l’exercice de la médecine... Marie-Jeanne Martin, médecin généraliste 74 P R AT I Q U E S RUBRIQUE Nous avons lu pour vous Nous avons lu pour vous Simone Veil, Les hommes aussi s’en souviennent, Une loi pour l’Histoire, Editions Stock, novembre 2004 J’aimerais que ce livre fasse bouger chaque citoyen, que toutes les femmes l’achètent, l’offrent, qu’on le traduise dans toutes les langues, et qu’il figure dans le programme des lycées... Le titre est formidable Les hommes aussi s’en souviennent, Simone Veil explique que seule une femme a réussi à défendre la loi sur l'avortement, mais que, pour elle, c’est la loi Neuwirth de 1967 sur la contraception qui constitue la plus grande avancée pour la femme. Le discours du 26 novembre 1974 est suivi d’un entretien de Simone Veil par Annick Cojean (journaliste au Monde) et d’un historique de l’avortement. Un témoignage d’une grande sincérité à une période où l’on a commencé à attaquer très sévèrement la prise en charge médicale de chacun d’entre nous. Ce livre nous donne en quelque sorte le courage de défendre des acquis extraordinaires. Françoise Ducos Olivia Benhamou, Ce que c’est d’avorter aujourd’hui, Editions Mille et une nuits, janvier 2005 C’est un travail journalistique très documenté et complet que nous livre l’auteure pour cet état des lieux des conditions vécues de l’avortement dans notre pays, aujourd’hui. Qui plus est, le ton du livre est juste, avec des portraits très variés de femmes qui galèrent toujours en 2005 pour leur IVG. Malgré l’élargissement de la limite du terme à 12 semaines de grossesse, elles sont nombreuses à faire le déplacement en Hollande ou en Angleterre pour des termes dépassés. Olivia Benhamou accompagne ces femmes qui cumulent difficultés morales et financières, dans leur voyage en bus aux Pays-Bas. Elle interroge là-bas l’équipe soignante efficace et chaleureuse, qui prend en charge ces femmes venues de France, et pose la question de l’exemplarité de ce pays voisin à la législation plus souple et qui néanmoins, grâce à des actions de santé publique efficaces auprès des jeunes en matière de contraception, présente un nombre d’avortements bien moindre que chez nous. Un tour de France aussi de tous ces acteurs militants et professionnels du soin qui ont vieilli et qui ne trouvent pas de successeurs, faute d’enseignement et formation dans les facultés de médecine. Dans ce livre, on voit la droite rétrograde, Douste-Blazy en tête, qui continue à tout faire pour mettre des entraves à l’IVG. On y lit aussi comment cette conquête politique et militante est récupérée, pour les meilleures intentions du monde, par le pouvoir médical hospitalouniversitaire. Trente ans après le vote de la loi Veil, rien n’est acquis, tout reste fragile. Patrice Muller P R AT I Q U E S 75 RUBRIQUE Coup de gueule Denis Labayle Aujourd’hui, qui ne rend hommage à Simone Veil pour son courage à l’Assemblée nationale, en 1975, lors du débat sur le droit à l’avortement ? Tous les médias font son éloge, y compris les jour- Médecin gastro-entérologue naux de droite qui, à l’époque, ne ménageaient pas leurs efforts pour faire échouer le projet. Et c’est vrai qu’il en fallait du courage pour s’opposer à cet aréopage d’hommes sûrs de leurs valeurs et de leur morale et au monde religieux abrité derrière ses dogmes. Mais il ne faudrait pas oublier que cette loi n’a été que l’aboutissement d’un mouvement populaire, initié par un groupe de femmes associé à une minorité de médecins, regroupés au sein du mouvement pour la libération de l’avor- Trente ans après… le recul ? tement et de la contraception (MLAC). Sans ces militants et militantes de bases, insultés, conspués, méprisés, soumis à la justice, jamais il n’y aurait eu de débat à l’Assemblée nationale. Etonnante époque où l’on croyait qu’enfin les médecins avaient découvert de nouvelles frontières à l’exercice de leur profession et osaient s’immiscer dans la vie publique. Depuis, les voix se sont tues ou sont restées si discrètes qu’elles ont pesé bien peu sur l’évolution des mœurs. Et pourtant, ce ne sont pas les sujets qui ont manqué : lutte contre la douleur, prévention du sida, sort réservé aux plus vieux, choix de mourir dans la dignité, dégradation sanitaire des pays en développement, santé des sans-papiers, recul de la liberté de la femme dans bien des pays et dans bien des domaines… beaucoup de médecins ont regagné leur cabinet, leur hôpital, leur pratique soignante, la vision d’une médecine limitée aux pathologies. Pour le reste, le corps médical a observé, constaté, au mieux il s’est offusqué, le plus souvent il a toléré. Prenons la situation des femmes aujourd’hui dans le monde. Ce qui, hier, aurait suscité révolte, manifestations, pétitions, laisse placide. Qu’importe si la femme afghane se drogue sous sa burka (article de Libération [1]), que la femme yéménite souffre sous son voile noire à un œil. Surtout ne rien dire. Au nom du soi-disant respect des cultures et des religions. Avec le risque de se faire accuser d’islamophobie si, d’aventure, on dénonce les lois iniques et pathogènes de la charia. Comme l’on traite d’antisémites ceux qui s’opposent à Sharon ou d’américanophobes ceux qui n’apprécient pas la folie de Bush. Où sont passés les militants qui appelaient à l’égalité des sexes avec une vision internationale de ce principe intangible ? A moins de considérer que la femme indienne ou pakistanaise a moins de valeur que celle du Poitou ou de la Charente ! Et, même autour de nous, dans nos banlieues, quoi de plus intolérable pour ceux qui se sont battus pour l’égalité des sexes, que de voir ces religieux obsédés répandre des idées d’un autre âge et appeler à la ségrégation des femmes. 76 P R AT I Q U E S RUBRIQUE Coup de gueule Sommes-nous devenus aveugles, hypocrites ou qui se passaient juste à côté de chez eux, chez le faussement culpabilisés pour tolérer l’indéfen- Grand Frère ? Alors ayons le courage de rappeler dable ? Attention là, vous vous égarez, cher ami. que les règles de santé et d’équilibre psycholo- Vous n’écrivez pas pour une gazette politique. gique sont les mêmes partout, que la médecine a N’oubliez pas que vous êtes médecin. des principes universels. Sans manichéisme, mais Justement, c’est au nom des principes de la sans hypocrisie, sans fausse culpabilité, sans petits médecine, de la défense de la santé de l’autre arrangements avec ses idées. qu’il est de notre devoir de nous insurger contre Il y a trente ans, des hommes et des femmes toutes les situations pathogènes : misère, injusti- avaient permis à la société de franchir une étape ce, mais aussi oppression des femmes et répres- essentielle. L’histoire montre une nouvelle fois sion sexuelle. On en connaît les ravages psycho- que rien n’est acquis. Ne laissons pas aux reli- logiques. Ce sont les médecins, membres de la gieux de tous bords l’occasion de reprendre du société de psychiatrie de Téhéran, qui l’ont rap- terrain. Cela relève de la médecine préventive. pelé récemment aux autorités politiques de leur pays, affolés par l’augmentation des troubles psychiatriques dans la population iranienne du fait de la répression sexuelle. Qu’est devenu le cri du docteur Charpentier qui, dans les années soixante-dix, dénonçait à la sortie des écoles la répression sexuelle chez les enfants ? Aujourd’hui, on voit de prétendus progressistes révolutionnaires s’allier avec des religieux intégristes qui prônent l’obscurantisme. Ne sont-ce pas les mêmes qui, hier, se présentaient en défenseur de la justice et la liberté, et fermaient les yeux sur les exactions 1. Il faut lire dans le journal Libération du 20 novembre 2004 un article édifiant sur le développement de la culture du pavot en Afghanistan. Contrairement au discours de ces fous de Talibans qui prétendaient encourager la fabrication de l’opium pour détruire la cerveau des « incroyants », et l’utiliser comme arme de combat, l’héroïne fait des ravages au sein même de la population afghane, et en particulier chez les femmes écrasées par le pouvoir machiste musulman. L’actuel président, ancien allié des Talibans et homme des Américains, ne fait rien pour l’instant pour enrayer le phénomène. Quant aux pays occidentaux engagés dans ce pays, que font-ils pour lutter contre ce fléau et aider ces femmes, physiquement et psychologiquement ? C’est vrai, ce ne sont que des femmes et Afghanes de surcroît… P R AT I Q U E S 77 Résumé : Comment l'industrie pharmaceutique, atteinte par les scandales récents, essaie d ' a m é l i o r e r s o n i m a g e d e m a r q u e , d e p r o f i t e r d e l a c a r e n c e d e l a s a n t é p u b l i q u e e n F r a n c ee t d e d é p a s s e rs a f o n c t i o n d ' i n d u s t r i e l p o u r e n d o s s e rc e l l e s d e l a f o r m a t i o n d e s p r o f e s s i o n n e l sd e santé et celle de l'éducation des patients. A propos de la campagne intitulée : .. Prévention de la iatrogénèse médicamenteuse évitable chez le sujet âgé ". P h i l i p p e l , |a s q u e l i e r > ,r e g r o u p e m e n t pd reosf e s s i o n n e sl sadnet é L u n . e " p a r <s a n t é eanc t i o n l i b é r a udxe, s é t a b l i s s e mentsde santéprivéset des industriels médide la santé(pharmaceutiques, matériels,dispositifs Médecingénéroliste caux...),cettecampagneestprésentée commeune actionde santépublique,initiéepar desacteurs p r i v é s( 1 ) . qui remettenten quesfrançaises, Le projetest séduisant, il reposesur des basesépidémiologiques tion les prescripteurs et les patientscomme étant les principauxacteursde la iatrogéniemédicamenteuse.Maisaucunobjectifévaluablesur des indicateurs de santén'estannoncé,le seulobjectif affichéest celuide faireparlerlesprofessionnels et lespatientsâgésau sujetde leur traitement! La iatrogénieest un problèmede santémajeurdanslequella responsabilité de I'industrie du médicamentestoubliéecommeproducteurdu produit,maisaussicommepromoteurde ce dernier,I'entreprisen'ayantcomme intérêtnaturelque la croissance de sesventeset de sesprofits.Cettecrois- tte blanche sancepassepar une promotionla plusactivepossible: élargissement des indicationset de la cible patients,augmentationdes doses,minimisationdes risques,des contre-indications et des effets (2), auprèsdu plus grand nombrede professionnels prescripteurs secondaires et de pharmaciens. La promotions'exerceaussisur les patients,directementpar des publicitésdéguisées en information danslesmédia,ou indirectement: un très grand nombred'associations de patientssont subventionnéspar leslaboratoires. DansI'actionannoncée,il existeun conflitd'intérêtmajeurentre I'industriepharmaceutique et le thèmede la iatrogénie, dénoncépar le Formindep(3). Ce type d'action,si elledevaitêtreengagée, ne devraitl'êtreque par ceuxdont le travailestd'êtreau servicedu seulintérêtdespatients,à savoir lesservicesde santépubliqueet les professionnels soignants.L'actionen questiontelle qu'elleest présentée, est manifestement : - un outil de promotiondes entreprises pharmaceutiques qui laissentpenserque leur intérêtprincipal est d'êtreau servicedes patients(cesentreprises ont le soucide la iatrogénie,on y a pensé pour vous,noussommeslà pour vousaider...); - un outil pour changerleur imagede marqueaprèslesnombreuxscandales de iatrogénierécents (cerivastatine, rofecoxib...); - un outil pour entreteniret accroîtrela dépendancedesprofessionnels de santévis-à-vis desentreprisespharmaceutiques par I'intermédiaire de sesvisiteurs médicaux(leslaboratoires ont prévudans leur stratégiede faireconnaîtrel'actionpar leursvisiteursmédicauxqui proposerontun réassortiFormindep http:/ /www.formindep org ment en affiches...), et profiterdu contactpour poursuivrela promotionde leursproduitset donc l'accroissement desventes(4). ,8 PRArrquEs | En conclusion, le risque iatrogénique médica- les acteursde santépublique, les associations de menteux est un problème trop important pour laissersa priseen chargedirigée par le LEEM(Les patients se doivent d'être particulièrementvigilants et refusertout partenariatavec l'industrie Entreprisesdu Médicament),dont l'intérêt premier n'estpasla santépublique,maisle dévelop- pharmaceutique,délétère pour les coûts de la santéet lesservicesrendusaux patients. pement de ses entreprises.Celles-ciinvestissent d a v a n t a g ed a n s l e m a r k e t i n g q u e d a n s l a recherche, cette tendance devrait s'accentuer dans les annéesà venir ; pour améliorerleur image de marque, elles occuperont de façon croissantele champ des associations de patients, de la causehumanitaireet de la santépublique. Les professionnels de santé, leurs représentants, 1, Elle prévoit un site Internet www.sante-enaction.com,des documentset des référencespour les professionnels, des affichetteset une fiche d'information pour les patients. 2. Revue Prescrire,mars 2003/tome 23, n" 237, pp.225-226. 3. Collectifpour une formationmédicaleindépendante. 4. Orlowski .f., WateskaL., Theeffectsof phormoceutical firm enticementson physicionprescribingpotterns,Chest. 1992;102:270. Unforumsousinfluence D u Z Aa u 3 0 o c t o b r e 2 X 0 4 s ' e s t d é ràoTuol éu l o u suen F o r u m d e m é d e c i ngeé n é r asl eu rl ' é v a - L u c B e a u m a d i e r (1). L'industrie pharmaceutique luationdes pratiquesprofessionnelles était partoutdansceforum: dans les standsà I'entrée,comme trop souvent,mais surtout directementdans les ateliersoù ont été travailléesles recommandationsde I'Anaes(2). généraliste Médecin En analysantsimplementle site de présentationde ce Forum,je note qu'il y a trois sociétéspharmaceutiquesen position de o partenairemajeur : ffizer, Pierre-Fabre, Santéa(Sanofi-Aventis). " >, et onze en < autresformes de parteI'observeaussicinq laboratoiresen < partenairesclassiques nariat On y voit même la sociétéCegedim(3), aux fortes tendancesmonopolistiquessur le ter". rain de I'informatique médicale,et qui n'hésitepas à visiterlesdisquesdurs de certainsmédecins pour affiner le marketing pharmaceutique.Mais surtout, presquechaque atelieroù a été travaillé une recommandationest sponsoriséspécifiquementpar un laboratoire,qui souvent a un intérêt direct dans le sujetsponsorisé. j'ai noté le sujetde tous lesateliersou tables-rondessponsorisés, Ci-dessous, le laboratoiresponsor, informationsqui sont dans le programme,et surtout ce qui n'est pas dans le programme,à savoir le ou les médicamentsvenduspar le sponsoren rapport direct avecle sujet. (Revia@) Lo molodieolcoolique, sponsorisépar Bristol-Mayer-Squibb L'arrêtdu taboc, Sanofi-Aventis 1v l,l w (Permixon@,Enoxor@) L'andrologie, Pierre-Fabre L'insulinedons le diobètede type 2, Sanofi-Aventis(insuline Lantus@et Amarel@) Lo douleurou quotidien,Sanofi-Aventis(Profenid@,Di-Antalvic@,Céluprane@,ldarac@,Topalgic@) Lesdyslipémies,ffizer (l-ahor@) L'obésité,Sanofi-Aventis(Vasten@) Hypertensionoftérielleet dyslipémies,Pierre-Fabre(Lercan@,Briem@,Briazide@) PRATIQ,UIS Le reflux gostro-oesophogien,Sanofi-Aventis (Gaviscon@) L'ostéoporoseen gynécologie, Lilly (Evista@ et Forsteo@) (Naramig@) Lesmigroines,Glaxo-Smith-Kline des conférenciers.Prétendrele contraireest être soit " narï >, soit <<intéressé ". Que va faireI'Anaesdanscette histoire? Quel créquand dit apporterencoreà sesrecommandations L' hyperactivit é, Lilly on constatececi? Alorsque cet organismeauraun rôle à jouerdansl'évaluationde pratiquesdes pro- Lessymptômesdépressifs morqués,Lilly (Prozac@) fessionnels ! Et surtout,posonscette questionaux Lestroublesbi-poloires,Sanofi-Aventis(Téralithe@) politiques: pourquoiI'Anaesn'a-t-elle responsables La douleurneuropothique,Pfizer,(lance en Europe paslesmoyensd'organisersur son proprebudget, la tilidine,et vend Neurontin@) un tel travailde diffusionde sesrecommandations. sansdevoirse fourvoyerà ce point ? Assezédifiant, non ? Comment peut-on croire qu'un atelierpuisseêtre neutre,et scientifique, quand le laboratoirequi le parrainea des intérêts commerciauxdirectsdansla pathologietraitée? Même s'il ne fait pas de pressiondirectesur les intervenants,le laboratoiresait bien que sa seule présencesuffit à faire fonctionner I'autocensure Jean-Pierre Lellouche 1. http://www.forum-mg.com 2. AgenceNationaled'Accréditationet d'Evaluationen santé. 3. Voir dans Pratiquesn' 12 " L'informationet le patient>, l'articlede DominiqueTavé, Bienvenuechez " Cegedim". pharmaceutique La publicité pardes estintolérable. Elleestpourtant tolérée. Et passeulement médecinsà la recherchede stylos-billes et de porte-clés.ll y a des genstrès bien qui sont furieux Médecin pédiotre quand la publicitédérapeou nous prend pour des idios, maisqui n'ont rien à redirequand la publicité reste< correcte>. Certainsmédecinspensentque I'obésitéest un problèmede santépublique; d'autrespensentque l'asthmeou lesdépressions ou lestoxicomanies sont à combattreprioritairement. Si un laboratoireorganiseun dépistage,s'il met en placeun numéro vert et des affiches, beaucoupde médecinsjugerontde cesactionsau caspar caset pasà partird'une positionde principe. Réfléchir au caspar cas,crestse demanders'ilestopportunde se mobilisercontreI'obésitéet si oui, si la méthodeutiliséeest bonne. Une position de principeconsisteà dire que les laboratoiresdoivent produire et vendre des médicaments,et donnerune informationsur ceux-ci,informationqui doit être contrôlée.lls ne doivent rienfaired'autre.Un laboratoirequi dit regretterqu'il y ait beaucoupd'obésitésort de son rôle,et s'ildit qu'il faut se mobiliser,il débordeencoreplus.Et s'il organisela réponse,il n'estplusdu tout dansson domaine. Si la très grande agressivitédes laboratoiresne rencontrepas une oppositiontrès ferme, c'est me semble-t-ilpour deux raisonsprincipales : la première,c'estqu'ilsremplissent un vide ; la seconde, c'est qu'ils nous transportentau paysdu rêveet de la toute-puissance. E0 PRArra_uES | Le vide je ne diraisque quelquesmots du vide. ll n' y a pasen Francede volontéde santépublique,ni de structuresde santé publique,ni de réflexion,ni ll n'y a pas de lieu où I'on soit d'organisation. capablede recenserlesproblèmesde santé,d'en apprécierI'importance,de déciderdes priorités, ce, de I'imprévu.Notre projetn'estpasd'installer pour demainun paradis,maisde chercherà attén'a rien nuerun peu lessouffrances. " Ce discours il est le discoursde la modestieet de merveilleux, ne sont pasoblide I'honnêteté.Leslaboratoires gés d'y adhérer.Et de fait, ils se situentdélibéréVousavezde I'asthme,de I'eczéma ment ailleurs. ou un ulcèregastrique,ils ont le médicamentqui entreprise,il est rare qu'elle soit sérieusement est souventoffert par un parent souriantet beau d'établir des stratégies.Lorsqu'uneaction est évaluéeet plus rareencoreque celaentraîneune réorientationet des correctifs. à un enfantsouriantet beau. Lespouvoirspublics,dont ce devraitêtre la fonc- imparfaitesest remplacépar un monde où tout est Le réel de la souffranceet des solutionstoujours tion d'intervenirsérieusement dansle cadrede la résoluparfaitemententregensgentils,compétents santépublique,ne le font pas (1). Même s'ilsle voulaient,ils ne sont pas en situationde mener et infinimentsouriants.Par ailleurs,et surtout, la publicitéestle domaineoù I'onpeutdire n'impor- des actionscohérenteset prolongées.En ce qui te quoi : il n'estpasnécessaire de respecterla véri- concerneI'obésité,par exemple,ils n'ont pas les té, la cohérence,la chronologie.On dit n'importe moyensde modifierles conditionsdans les can- quoi en ayant le sentimentd'avoirle droit de dire tines ou les restaurants d'entreprise,ni les pro- n'importequoi, il n'y a aucuneresponsabilité. On peut dire une chose,puis son contraireou même ni duits commercialisés dans les supermarchés, de promouvoir l'activitéphysique...En ce qui concerneI'asthme,ils ne peuventintervenirni sur dire une choseet son contraireen même temps. la pollutionautomobileet la circulationroutière Dansla vie réelle,lesgensattribuentde I'importance à leursproblèmesde santé,ilsont enviede rencon- ni sur la oollutionindustrielle. trer un médecinqui écouteleurhistoire,qui lesexa- Même s'ilsétaientréellementmotivéspar la santé mine,qui fassepreuvede compétencede sérieuxet du public,leslaboratoires ne pourraientagir que que le médecinsoittout d'implication.llsaimeraient sur quelquesfacteurset passur tous. lls ne pourraientagirque sur lesfacteursfacilementet ponc- puissant.Le médecinest toujours confrontéau fait qu'il n'estpasdansson pouvoirde supprimertoutes tuellementaccessibles, et d'abordsur lessolutions lessouffrances et d'offrirI'immortalité. médicamenteuses éventuellement disoonibles. Dans le champ de la publicité,tout est possible: Le laboratoire qui entreprendune actionde santé toutes les souffrances sont soulagéesimmédiate- publique occupe une place laisséevacante,i donne I'impressionqu'ON fait quelque chose, ment, tous les problèmessont résolustrès simplement et trèsvite. Et puis,de toutesfaçons,si tout même si ce quelquechoseest dérisoire,et si le n'estpasrésolu,celan'a aucuneimportance,la vie est un jeu sansligne directrice,sansprojet.ll n'y a ON qui organisecela n'a aucunevocationà le faireet aucunecompétenceparticulière. rienà construireet pasde responsabilité. Un grand philosopheirlandaisa dit n La médecine Le rêve et la toute puissance décrit les maladiestellesqu'ellessont ; Aventiset Si les pouvoirspublicss'occupaientde la santé Claxo lesdécriventtellesqu'ellesdevraientêtre." ll publique,ils seraientconduitsà le faire sur une base réaliste.lls diraient aux médecinset au public . Vous êtes des êtreshumains.Lesêtres humainssontvouésà la mort. Surleurchemin,ils peuventrencontrerde la douleur,de la souffran- me semblequ'iln'y a rienà ajouterà cela,sinonque ça aide à comprendrepourquoitant de médecins aimentAventiset Claxoet AstraSquibbet MSD. l. Leslaboratoirespharmaceutiques, dont ce n'est pas la fonction,interviennent. PRArta_uES l8t R é s u m é: L ' u n d e s p r o d u i t s d é r i v é s l a n c é p a r H a r r y P o t t e r , l e j e u n e e t d é j à l é g e n d a i r e s o r c i e r I i t t é r a i r e e t c i n é m a t o g r a p h i q u e ,c o n t i e n t u n c o l o r a n t c o n n u p o u r i n d u i r e d e s r é a c t i o n s d e t y p e a l l e r g i q u e . P l u s d e 7 0 0 0 0 . c o f f r e t s d ' a c t i v i t é s c o m e s t i b l e s o n t é t é c o m m e r c i a l i s é se n F r a n c e " par Mattel, le numéro un mondial du jouet. Desallergies tout en couleur rF An n ie Lobé I a r t r a z i n eC.e n o m é t o n n a m m e n t f a c i l e à m é m o r i s e r d é s i g n e u n c o l o r a n t d Measi ys n p tahsèns' iem. portelequel: < La tartrazine par excellence affirmele toxicochimiste est le colorantjauneallergisant ", européenne d'évaluation desproduitschimiques JournolisteAndréPicot,expertauprèsde la Commission en milieu de travail." Lastructure chimiquede cettemoléculepossède unedoubleliaisonazote-azote, unecaracpropreà tous lescolorants téristique azorques. La tartrazine estsusceptible de déclencher asthme,urticaireet colites,y comprischezdespersonnes qui n'ont eu jamaiseu d'antécédent allergique. Ellepeut également provoquer desréactions croisées avecl'aspirine chezlespersonnes intolérantes. " jaunessont autorisés en Europe,maisc'estprécisément la tartrazineque la Quatrecolorantsalimentaires sociétéaméricaineFood-Tek, concepteuret fabriquant,a choisicomme ingrédientdu ieu Atelierde Polynector, un produitdiffusépar Mattel,souslicencede WarnerBros,propriétairede la marqueHarry Potter. Venduà plusde 70 000exemplaires, le < jeu" estcomposé pourobtenirdesboisde poudresà mélanger quelesenfantsingèrentpourimiterl'undesexploits sonset gelées de HarryPotter,lejeunehérosapprenti sorcierdont leslivressesontvendusà 90 millionsd'exemplaires dansle monde: " Le Polynectar permet de prendrel'apparence quelqu'un (1) de d'autre." Lesenfantsinvitentcopains > et déguster et copinespour cuisiner < C'estbon, lespréparations colorées. " je lesai toutesgoûtéesen un après-midi avecmon frèreNoé,qui a7 ans>, raconteTom,10 ans.Quels sont lesingrédients de cesgoûtersmiraculeux ? Despoudresblanchâtres, composées uniquementde sucreet d'additifs: colorants, arômes, acidifiant, émulsifiant, gélifiant, épaississant et stabilisant. Troisdes (citronvert,fruitsrougeset orange)contiennent six sachets (E 102),tandisque deux de la tartrazine (orangeet pêche)contiennentun autrecolorantazoiQue,le rougeallura(E 129), qui était interditen jusqu'àl'entréeen vigueurde la législation France européenne surlescolorants alimentaires en 1997.(2) Despropriétésallergisantes bien documentées Deuxclicsdansun moteurde recherche pouraffichersur l'écrande n'importequelordinateur suffisent reliéà l'lnternetune listeofficielle, intitulée< allergieà la tartrazine retirésde ", de douzemédicaments la venteentre1990et 1998 (3), dont la vitamineC Vitascorbol@, désormais commercialisée avecune nouvelle formulesanstartrazine. Parmilesprécautions d'emploimentionnées sur leurnoticefiguraitun avertissement : < Cettespécialité contenantde la tartrazineestsusceptible d'entraînerdesréactionsd'intolérance: à éviterchezlessujetssensibles la (aspirine). à tartrazineet/ou à l'acideacétylsalicylique " Latartrazinen'estpasd'inventionrécente: ellefut l'un des premierscolorantsde synthèsebrevetéen... 1884! Plusde 170 étudescliniques paruesentre1959(4) et 2003dansdesrevues scientifiques à comité de lecturedocumententl'hypersensibilité à la tartrazinechezl'adulteet l'enfant.L'éventail des troubles s'étenddesmanifestations allergiques classiques à despathologies dont l'issuepeut êtrefatale. Spécialiste des allergies alimentaires, le professeur Dominique-Anne Moneret-Vautrin, Chef du service lmmunologie Cliniqueet Allergologie de l'HôpitalCentralde Nancy,écrivaiten 1992: L'allergie et l'in" 821PRAila,urs toléranceaux colorantsalimentaires et médicamenpriorité lescolorantsde synthèse, teux concerneen Lestableauxcliet parmieux lescolorantsazorques. niquessontmultiples, à dominance cutanéeou respiratoire: cedèmede Quincke,urticaire,érythème polymorphe,dermitesde contactou eczémagénéet des ralisé,asthme.Des chocs anaphylactiques purpurasont été signalés. (5) " Une libérationd'histamine. facile à mesurer" Gabrieledi Lorenzo,professeur d'allergologie à l'université de Palermeen ltalie,est l'un des rares Européens à continuerla recherche sur lesadditifs question alimentaires. Saréponseà la : " Que pende la tartrazine? estaussiclaireoue lacosez-vous " o. Auteurd'une étude parueen nique : " Évitez-la 2002 dansla revueAllergy(6), il rappelleque l'histamine libéréedanslesorganesen réactionà un allergènes'élimine danslesurinessousformed'un méta(N-MH). bolite,la N-méthylhistamine Selonlui, " la recherche de ce métaboliteurinairede l'histamine estun moyenrapide,sûret facilede quantifierla libérationde ce médiateurdesréactions allergiques". Ayantmisen évidence la présence de N-MH chezdespatientsatteintsd'urticairechronique,après administration oralede tartrazine, souscontrôleplacebq,iJa établib preuvedu caractèrehistamino-libérateurde ce eolorantchezl'homme.Ceciprouveque peutinduiredesréactions la tartrazine allergiques. < Nousrespectonsla réglementationen vigueur " Mattela-t-ilfranchila lignejauneen choisissant la tartrazinecommeingrédientd'un jouet ? Lasociété a été contactéedès le 7 lanvier2004 au sujetde la présencedans ce jeu de colorantspour le moins étranges.. Nous respectonsla réglementation en vigueur.La tartrazineest un colorantautorisédans lesdenrées alimentaires. S'ily a un problèmesurce composant,il faut le faire interdireo, se défend CatherineLepetz,directriceiuridiquede Mattel." Le pourcentagede tartrazineutilisé dans l'Atelierde Polynectar esltrèsnettementinférieurau taux autopar kg contre risépuisqu'ilesTde 227 milligrammes autorisés le 28 jan300 milligrammes écrivait-elle ", vier en réponseà notre confrère Que Choisir,qui venaitde publierune alertesur ce produitdansson numérode février2004.(7) Également saisie débutjanvier2004,la Commission (CSC)a saisià son la de sécuritédesconsommateurs tour l'Agencefrançaisede la sécuritésanitairedes aliments(AFSSA) et la Directiongénéralede la concurrence, de la consommationet de la répressiondesfraudes(DCCCRF), tandisque l'lnstitutde veille sanitaireétait questionnésur les statistiques d'accidentsliésà ce jouet dont il pourraitavoireu connatssance. . Ce jeu contenantun colorantalimentaireconnu pour être allergisant,la tartrazine (...), la (...)a décidé(...)de saisir Commission l'Agence franqu'elle de sanitaire des aliments afin se sécurité çaise prononcesurle fait d'introduire un colorantalimentairetel que la tartrazinedansune préparation destinée à être ingéréepar des enfantsnon surveillés, dans le cadre d'un jeu (...) ', écrivaitle docteur MichèleVédrine,présidente de la CSC,le 23 ianvier 2004 en réponseaux auteursde la premièresaisine. Las! Malgréla parution,fin mars2004,d'un article dans/e Figoro(8), le sujeta été rapidemententerré. Le Quotidiendu Médecintitrait dès le 1" avril : < Fausse alerteaux potionsHarryPotter>, une brève reprisele 4 avril par le magazinepour parents lnfobébés.Le journal indiquait que l'affaireavait fait l'objet d'un classement sanssuite >, et que " <<commepour lesorganismes de contrôle,il existe procédures que rien ne soit prévu des d'alerte,sans pour notifierun avisde faussealerte,la rumeurcirculede plusbelle,au granddam des responsables de la CSCet de la DCCCRF. Maisqu'on se rassure, la sorcellerieselon Harry Potter, jusqu'à nouvel ordre,n'estpas nuisiblepour la santé>. Un commentairequi n'a suscité aucunemiseau pointde la part des fonctionnaires concernés.Pourtant si la DGCCRF a bien confirméla teneuren tartrazinedu produitannoncéepar Mattel,le comitéd'expertsde I'AFSSA, réunile 1"'luin2004 surce suje! n'a toujourspasrendusonrapport... Mattel,qui avaitpendantun tempsretiréle produit de la vente,a ainsipu soldersesstocksen toute discrétion,débutjuillet2Q04.,, Au prix de 9,95 euros, et avecdeux recharges de poudresgratuites", précisaitune vendeusedu magasinMattel de Fresnes, situéà quelquesencablures du siègede la société basé à Rungis(pendant les fêtes de fin d'année PRAila*uES 183 2003,le produitcoûtaitplusde 30 eurosdansles grandessurfaces). Des colorantsallergisants: dans les aliments,les médicamentset les cosmétiques Plusde dix colorantsazoïques tels que la tartrazine sontactuellement autorisés et utilisés danslesdenréesalimentaires, les médicamentset les produits (voirencadré1). Lespersonnes cosmétiques dotées d'une assezbonne vue pour déchiffrerles petits caractères figurantsur lesemballages remarqueront la présence (colorantEl02) dansdes de tartrazine chewing-gums et boissons de couleuriaune,bonbons,sucettes,glaces,boîtesde chocolats,crèmes caramelou pâtissières, flanset entremets. Un coupd'æildansdesarmoires à pharmacie familialesréservequelquessurprises.Ellescontiennent plusieursmédicaments(voir encadré 2), vendus avecou sansprescription, contenantdes colorants azorques.Certainssont à destinationdes enfants (sirops),d'autressont des produitscourants(paracétamol,alcoolà désinfecter). Que celasoiten pharmacie,parapharmacie ou en grandesurface, mieux vaut vérifierl'étiquetageavantde prendredesvitamines.Ainsidansla VitamineC Vitascorbol@, la tartrazine(E102) a été remplacée par...le iauneorangé S (Ell0), le colorantazoiQue désormais le plus fréquentdanslescomplexes vitaminéset lesspécialitéspharmaceutiques. Au rayoncosmétique,lesdécouvertes surprenantes continuent. Un designde flaconmanifestement destiné auxenfantsou une mention< testésouscontrôle dermatologiquen'empêche pasla présence de " colorantsazorques,parfoisassociéspar deux ou trois, dans des produitspour doucheet bain, des laits de protectionsolaire,des shampooings,des parfums,des lotions ou laits démaquillants,des crèmeshydratantes pour le visageou pour le corps, desgelsnettoyantspour lesmains.. au miel o 69 ", lait " à l'huiled'amandedouce y compriss,ils ", ", sontvisiblement transparents. Une. huilenettoyan> te recommandée par lesdermatologues et vendue en pharmaciecontientégalementde la tartrazine. Mais ne cherchezpas le E102 sur l'étiquette: les colorantsétant indiquéspar leur numérod'index,la tartrazineest rebaptisée Cl 19140 (voir enca" " dré 1). Mêmechosedu côtédesgelsdentifrices, qui s 4l r R A r r Q _ u E S I II I peuventcontenirde l'azorubine (E122),un colorant azorquerouged'oreset déjàinterditau lapon. Les consommateurs devraient-ils ranger dans leur portefeuillela listedescolorantsazoïquespour passerau criblelesétiquettes avantde remplirleurcaddie ? (9) ll y a assurément là de quoi relancer l'intérêtdesFrançais pourl'alimentation biologique, dans laquelle aucuncolorantn'estautorisé. (10) Quantà Tom et Noé, ils n'ont pashésitéà se séparer du Polynector lorsqu'ilsont su les dangersqu'il présentait.Même à 7 et 10 ans, les enfantssont capables de préférerla santéau plaisirde la consommation.Le sorcierHarryPotteraurait-iljeté un sort aux nouveaux( ogres qui confondentnourriret " distraire, soigneret empoisonner ? l. J.K.Rowling,Harry Potteret la chambredes secrets, Ed.CallimardJeunesse, FolioJuniorn" 961, page 172, tsBN2-0l-052455-8. 2. Directive94136lCEtrancriteen droit françaispar l,arrêtédu 2 octobre1997. 3. http://www.biam2.orglwww/SpePEMCALLERCt E_ A LATARTMZ|NE.html. '1959 4. Ann Allergy ; 17 :719-725 : Allergicreactions due to F D ond C Yellow#5 (tortrozine),on oniline dye used os o coloring ogent in vorioussteroids(Réactions allergiques à la tartrazine, un colorantà l'anilineutilisé dans plusieursséroides)LockeySD. 5. Allergies alimentoires et fausses ollergies olimentoirespar D.-A. Moneret-Vautrin, in Allergologie, Ed.Médecine-Sciences Flammarion,1992,p. 355. ISBN 2-257-10464-1 . 6. Allergy2002 Dec 57(12) :1180-l186. Urinarymetabolitesof histamineand leucotrienes beforeond ofter olocebo-controlledchallengewith ASAond food additivesin chronicurticoriapotients(Metabolitesurinairesde l'histamine et des leucotriènesaprèstest contrôlé par placebo avecl'aideacétylsalicylique et des additifsalimentaireschez des patientsatteintsd'urticairechronique). Di LorenzoC., PacorM.-1.,VignolaA.-M., ProfitaM., Esposito-Pelleitteri M., BiasiD., CorrocherR.,CarrusoC. 7. " La tartrazine n'est pas magique ", Que choisir n" 412,février2004,page4. 8. . Un colorantallergisantdans des potions Harry Potter >, Le Figoron' 18550 du samedi27 mars 2004, page 16. 9. En revanche,la liste dite < de Villeluif qui circule " depuislesannéesI 970 estfausse.Lancéedansle cadre d'une concurrence commerciale, elleprésentait comme dangereuxl'inoffensif acidecitrique(E330). lO. Règlement CEE|2092/91 du 24 juin t99t modifié, AnnexeVl. Colorants azoiQuesautorisés dans les denrées alimentaires, les produits cosmétiqueset les médicaments Autorisé danslesdenrées alimentaires en Europe' Numéro CE Autorisé dansles médicaments en Franceb Numéro de ColourIndex (produits cosmétiques) Colorant autorisé aux Etats-Unis Dénomination aux Etats-Unis E102 (jaune) Tartrazine Oui cr 19140 Oui FD&CYellowNo. 5 E l1 0 JauneOrangé5 Oui ct 15985 Oui FD&CYellowNo. 6 (SunsetYellow) 8122 Azorubine(rouge) Oui cl 14720 't4700 cl E123 Amarante (brun rougeâtre) Oui cr 16185 8124 Ponceau4R, (Rougecochenille A) Oui ct 16255 E't28 Rouge 2G E129 RougeAlluraAC Oui cr 15035 E151 Noir BrillantBN (NoirPN) Oui ct 28440 El54 BrunFK E155 BrunHT ct 20285 E180 Litholrubine BK(rouge) cr 1s8s0 D & C R e dN o . 4 (interditdansI'alim.) cr 180s0 F D & CN o . 4 0 ,A l l u r aR e d Oui " Directive94/36 CE transcriteen droit françaispar l'arrêtédu 2 octobre 1997. b Listedes excipientsà effet notoire, du 29 août 1999, p. 12943.(Doseseuil: pas de doseseuil Voied'administration: touteslesvoies). lO ; Quelques spécialités(para)pharmaceutiquescontenant des colorants azo'rques trouvéesdans des armoiresà pharmaciefamiliales (E102) Tartrazine Exoméga@, huilenettoyantepour la douchepour peauxatopiques A-derma@(conseillée par lesdermatologues) Stago@(teinturede boldo) l a u n eO r a n g éS ( E l 1 0 ) Apranax@(naproxène) Arcalion@(sulbutiamine) (paracétamol) Géluprane@ (quinine/thiamine) Hexaquine@ Moduretic@(amiloride/hydrochloroth iazide) M ucolator@(acétylcystéine) (fenspiride) Pneumorel@ Supadol@(paracétamol) (E122) Azorubine Dafalgan@ (paracétamol) Hextril@ (hexétidine) Nifluril@ (acide niflumique) Sympathyl@ (aubépine/eschscholtzia) (El24) RougeCochenille (chlorhexidine Eludril@ /chlorbutanol) (quinine/thiamine) Hexaquine@ PRArra_u Es 8s | R é s u m é : U n r e g i s t r e s é c u r i s éa l i m e n t é p a r u n e d é c l a r a t i o n o b l i g a t o i r e r e n d r a i t p o s s i b l e u n e enquête épidémiologique et l'identification de causes que l'on se proposerait d'éradiquer permettant une véritable lutte anti-cancer. Cette ambition suppose des réformes structurelles avec la création d'organismes régionaux et nationaux et des outils iuridiques nouveaux ainsi q u ' u n e é v o l u t i o n c u l t u r e l l e p o u r i m p o s e r l e p a s s a g ed u s o i n à l a s a n t é e t r e f u s e r l e f a t a l i s m e d'une société devenue cancérigène. Avons-nous un plan< anti-cancer 3" partie:du soinà la santé,un enjeupolitique J a c q u e sR i c h a u d Proticien hospitolier I- réambule N" 25 avril 2004, 73-77), nous avonsmontré que le Dansune premièrepartie< La fausseroute " (in Pratiques < avec>>cancer.Dansune planannoncécentrésur la médecinecurativen'étaitqu'un pland'accompagnement pour uneépidémiologie active> (in Pratiques N" 26, 79-82),nousavonsargudeuxièmepartie" Unedéclaration menté l'exigenced'un registresécuriséalimentépar une déclarationobligatoirequi deviendral'outil d'une le parcours de vie de chaquesujetatteintpour rechernouvellevisantà reconstituer démarcheépidémiologique à la priseen chargedes soinsfournicher une " pathogéniepossibleo. Ce nouveaumétierd'enquêteparallèle d'initierune authentiquedémarchede prévention. ra un recueilde donnéesconfiéà un organismesusceptible de Alorsseulementdébuteraun plan . anti ' cancervisantà éradiquerlescausesqui aurontpu être identifiées aux risqueset une dimice fléau.Cettedémarche,et elleseule,permetd'espérerune réductionde l'exposition nutiondes nouveauxcas. Lesmoyensde cette ambition,au-delàde la déclarationobligatoire,du registreet de l'enquêteépidémiolopolitiquesfortesà la hauteurdu défi posépar la " sociétécancérigène gique,relèventde décisions " évoquée nouvelles : troisinitiatives dansla premièrepartiede ce travail.Nouspréconisons - Une nouvelleforme de veillesanitaire régionale". " - Une agencenationalede préventiondes risquesde cancersévitableso, dont les missionsdéborderontle " champde la médecine. - Une évolutionindispensable du cadrelégislatif. imolicationdu mouvementsocialet sur une réflexionde la sociététout entièNousconclurons sur la nécessaire re sur son devenir. Une nouvelleforme de veille sanitairerégionale La veillesanitaireexistantene paraîtpas adaptéeà ce nouveloblectif: son recueilde donnéesest plusstatisdes risquesprofessionnels visentplusl'indemtiquequ'épidémiologique. Lesmodalitésactuelles de déclaration despostesde traque l'identification desrisques. ll n'existepasd'archivage nisationindividuelle et l'éradication de ces postespathogènes.Les vail incriminésni de mesurecontraignante de préventionpar assainissement risquesenvironnementaux non professionnels sont encoremoinsrépertoriés. Le projeten matièrede cancerdoit promouvoirune " fonctionde veillesanitairerégionale" alimentéepar les obligatoires. La proximitérégionalepermetl'établissesuccédantaux déclarations enquêtesépidémiologiques ou le recoupement desinformations et le déclenchement d'investigations ment d'une cartographie desrisques, du travail,lesservices d'hygièneou en articulationpar exempleavecl'inspection expertises complémentaires Un " devoird'alerte" doit êtrejuridiquementreconnuainsiqu'un droit d'investiagencesenvironnementales. gationauquelnul ne pourraits'opposer. Le constatd'une miseen dangerpatenteau regardde risquesconnus doit être rendu public et débouchersur une injonctionjudiciairede correctionimmédiate.Lesconstatations 86 PRArrauES | autresseront avec les premièrestransmisesà l'agence toxicologiquesou environnementalespour que ces nationalepour complément d'expertise.Un droit de filièressoient valorisées.La création d'une fondation recherchede substances cancérigènes dans le sangdoit pour la rechercheen sécuritésanitairepourraitêtre pro- être affirmé pour tout su,et atteint et reconnu auss' pour tout sujet exposé. Un rapport annuel d'activité poséedont l'indépendancedoit être garantie. - Enfin,l'agencedoit imposerdansl'enseignement de englobant les données recueillieset les procédures la médecinequ'une place conséquentesoit faite à la entreprisesdoit être remisau conseilrégionalet trans- connaissance des pathologies d'origineenvironnemen- mis à l'agencenationaleaveclesrequêtesde ce conseil. tale ou duesau travail. Cette structurerégionaledoit être indépendante,collégiale et soumiseà contrôle démocratique,la transpa- La deuxième missionde l'agence nationaleprolonge rence doit être la règle pour la meilleureinformation l'action des organismesrégionaux pour étendre le des populationset du monde du travail. champ du savoirsur la sociétécancérigèneet pour proposerdes actionscorrectrices. Une agence nationale de prévention des risquesde La concentrationdes donnéesépidémiologiques et leur cancersévitables exploitation complétée par des expertises ou Son seulobjectifseraitla préventionet son champ d'in- recherchescibléesdevrait débouchersur la reconnais- tervention se doit d'être diversifié: le rôle de cette sancerapidede risquesjusqu'alors ignorésou négligés agence ne serait pas de coordonner les structuresde qui étendront immédiatementle champ de la préven- soinsou de superviserl'institut nationalde lutte contre tion possible.Un champ d'incertitudesansdoute beau- le cancermais d'æuvrer seulementpour la promotion coup plusvastealimenterala réflexionpour des études de la santé globale des populations et générations pluslongueset l'application éventuelle d'un " principe futures.Cette missionde préventionclairementidentifiée justifierades engagementsfinanciersdistinctsde de précaution>. ceux consacrésau soin et très substantiellement supé- et les propositionscorrectricessoumises connaissances rieursà ceux actuellementconsacrésà la orévention. à la représentationnationale.lci aussila transparence Lesmodalitésd'interventiondoiventêtre diversifiées. La dans une agencecollégialeet souscontrôle démocra- premièremissionseraitéducativeet culturelle: - En collaboration avec le ministère de l'éducation tique doit être la règle pour éviter la rétentiond'infor- nationaleil conviendrait de comblerle gouffred'igno- L'agence devra rendre publiques les avancéesdes mation et contraindrela puissancepubliqueaux actions préventivesutiles. rancedes populationsexposées,seulmoyen d'une responsabilisation généralprimaire future. L'enseignement Uarsenaljuridique doit être adapté et secondairedevrait développerun < champ disciplinaire ' portant sur les relationsentre l'homme et son devront être réviséesou abrogées,des mesuresnou- environnementet sur les basesde la santéhumaine.La Des mesures orotectricesdes intérêts industriels biologieauraitvocationà enseigner aussice qui mena- vellesserontnécessaires. - Pour la mise en æuvre des registreset enquêtes,il ce et détruit l'homme. Uhistoirequi est aussicelle des convient que la violationdes normespour la sécurisa- peut enseignerce qui participeà la servitucivilisations tion des données soit sanctionnableoénalementde de et la destructiondes populations.On parle < d'ouvrir l'écoleau monde de l'entreprise>, pourquoi pas ? façon très dissuasive. La protectionjuridiqueet professionnelledes < lanceursd'alerte " doit être garantie (comme dans certainspays anglo-saxons),aussi bien Mais enseignonssurtout la connaissance du statut et des droits des travailleurs,la légitimité de la défense syndicale de ces droits et les enjeux des rapports pour les investigateurs régionauxque nationaux. - ll conviendraitd'aller bien au-delà de la directive sociaux,y comprisen terme de santépublique,au sens d'une santé < physique,mentale et sociale" selon la définitionde l'Organisation Mondialede la Santé. - En collaborationavec les universités,l'agence doit européenne transposéedans le droit du travail en définir les besoinsen chercheurset exoertsen sciences à organiserla prévention. Une circulairedu 18 avril Francedepuis1991, maisbien mal appliquéeencore: cette directive oblige les employeurs à évaluer les risquespour la santéet la sécuritéde leursemployéset PRArra_uES 187 2002 a reconnuque les retardataires à l'applicationde travailleur,sur simplerequêtedu monde du travailou à cette directive(plus de 10 ans après)ne peuventêtre sanctionnés! La premièrecohérenced'un plan antican- l'instigation de l'agencede veille. - Une révisiondes barèmesd'indemnisationdoit mettre cer seraitl'abrogationde cette circulaireet I'application fin au scandaleque représentele u prix u dérisoirede la de la loi. - Une autre loi dite vie d'un travailleurdécédé au regard des barèmesde relativeaux nouvellesrégulations " (NRE) économiques adoptéeen 2001 concernaitles " données socialeset environnementales en entreprise, droit commun. - Tous les testset procéduresde dépistagedu cancer maisrestepeu appliquée.ll faut exigerdes employeurs doivent échapperau brevetage. - L'applicationdessept recommandations de l'appelde les déclarationsexhaustivessur les risquesencourus, Parisdu 7 mars2OO4doit être soutenue,visantà pré- mais aussila levée du secretde certainesprocédures venir la dégradationde notre environnementet la mise mettant les travailleursau contact de substances en péril des générationsfutures. toxiques, la déclaration obligatoire du recrutement d'intérimairesou de sous-traitantspour des tâches Conclusion exposéesà de tels risques.Des contrôleset sanctions Les pistesévoquéessont aux antipodesdu plan anti- doivent être prévus. - La législation doit imposerune mesurenouvellepar cancer qui annonce une inévitabledésillusion.Trente deux ansavantjacquesChirac,RichardNixon en 1971 l'obligationde l'employeurà fournir pour chaqueposte traitance,une fiche mentionnantla naturedu risqueet avait lui aussi déclaréla guerreau cancer et multi" " plié par dix le budget de ce secteuren espérantune baissedes cancersd'au moins 50 0/o; aprèsvingt ans la au contenuvalidépar l'agencede veillesanitairerégio- croissancea été de 6O o/o... nale. femployeur aurait obligation par périodeou au Le problèmeabordéest politiqueet sociétal.ll s'agit de et quel que soit le statutde l'employé,même en sous- terme du contrat de déclarersur un volet de cettefiche refuserla fatalitéd'une sociétédevenuecancérigènepar la durée et la sévéritéde l'expositionselondes modali- effetde seschoix économiques,industriels et politiques. tés de quantificationproposéespar l'agencenationale Nous pouvonsdouter de la capacitéou de la détermi- de prévention des risquesde cancersévitables.Ces nationde certainsdécideursà sortird'un modèleoatho- documentssuccessifs seront pour chaque individu un gène sur lequel est fondée la prospéritéde quelques- élémentessentielde son dossier< santéet travail". La uns. Les mêmes lobbies industrielset leurs alliés non-délivrance seraitsanctionnante oénalement. - Le suivi individuelprofessionnel, mais aussipost-pro- politiquessont intervenusen force pour entr,averhier le protocolede Kyotoet négocierle maintiend'un droit " de polluer et auiourd'hui,pour contrer les tentatives " y comprispar Ia recherche fessionnel, sanguinede produits toxiques décelables,doit devenir obligatoire et européennesd'imposerque toute substancechimique gratuit. - Le statutdu médecindu travailne doit plus dépendre mise sur le marchésoit soumiseà des testsde toxicité de l'employeur,mais du ministèrede la santé. ll doit and Autorisationof Chemicals).La récente" charte de potentielle(ProgrammeREACH,Registration-Evaluation être en relationétroite avec les agencesrégionalesde l'environnement> a vu s'élevercontre son articlecinq veillesanitaireet partagertoutes lesdonnéesrecueillies avec les médecinstraitantsdans des réseauxde santé tous lesadversaires du " principede précaution avec ", le renfortdes académiesde scienceet de médecine! Le de proximité.Unedesmissions estde veillerà la rigueur textefinal adoptéle 25 iuin 2OO4exclurale champ de la de la tenue du dossiersantéet travail.Lesdisoositions santédu dédommagementpossible.Lesmêmesforces législatives de 2001, déjà condamnéespar le comité consultatifnationald'éthioueet sollicitantlesmédecins du travail pour la rédaction de certificatsde .. non- qui organisentleur impunitépour demaintentent de contre-indication" à l'expositionaux risquesprofessionnelsdoivent être abrogées.Une logique inverse conscientsde la manipulationdont ils sont l'objet de la par laquellele médecindu travailévalue doit s'instaurer dérégulationet maximisationdes profits,y comprisdans poste de travail à être occupé par un " l'aptitudedu " l'industriedu traitementdes cancers. sslPRArrQ-uEs I I II réduireI'indemnisation desvictimesd'hier de l'amiante. Certains de leurs complices ne sont même pas part de puissances économiquesqui ne rêvent que de Cancéreuxpeut-être déjà ou menacésde le devenir, nous devons sortir du statut Dassifd'intermittent de l'accèsau soin pour devenirdes permanentsactifsde la défensede la santé et d'un modèle de sociétéoui lui soit favorable. La médecineest au cæur de cet enjeu entre la soufqu'il nousest demandéde soulager franceindividuelle et les oérilscollectifsdont nous refusonsla fatalité. Notre rôle est de dire qu'une société malade d'ellemême et diffusantsespropresagentsmortelsn'est pas une sociétésainemaisune sociétécriminelle.Unevaste résistance collectives'imoose. L'évolutiondes relationsde l'homme avecson environnement et sa sociéténe pourra se faire qu'au prix de rapportssociauxradicalementtransformés. L'avenir démontrerait probablement si cette option était retenue, comme ce fut le cas dans d'autres domaines,que la préventionvéritabledes cancersest un investissementéconomiquement,socialementet humainementplus rentableque la seuleinflationdes moyensconsacrésà la médecinecurative. Bibliographie < Avonsnousvraimentdéclaréla l. BarbierCeneviève, guerreau cancer? Pratiques n' 22, juillet 2003. ", 2. Barbier Ceneviève," Le nouveau plan national contre le cancer : Entre appel d'offre et désinformation> - communiquéde pressedu SMG 14 février 2003, Pratiques n" 21, avril 2003. 3. BarbierCeneviève,FarrachiArmand, Lo sociétéconcérigène,lutte-t-on vroimentcontrele concer?, Ed. de la Martinière,2004. 4. Belpomme Dominique, Ces moladiescrééespor l'homme,Ed.Albin Michel,2004. 5. BelpommeDominique,., Pourune politiquede prévention des cancers>, L'écologiste vol 4 n' 2, juin 2003. 6. BourdonWilliam,. Multinationales : commentlespoursuivre? ", L'écologiste vol 4 n" 1, février2003. 7. 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P o u c h e l l e récemmentprésentésa stratégie(radiothérapie) Nombred'attitudesguerrières faceà la maladie,et aux confrères, contrastentavecla bienveillante part personnes, tranquillité d'autre voireà la médecineelle-même associée au soin des corps et des Anthropologue, o (3). directricede rechercheou CNRI modernePaixde Dieu" CETSAH Y aurait-ildonc une connivence particulière entrecesdeux pôlesde l'activitéhumaineque sont l'art de guériret la guerre? Une connivencequi se situeraittrèsen amont des avancées scientifiques et par la pratiquechirurgicale thérapeutiques suscitées sur leschampsde bataille,ou des interférences desstratégies militairesavecla recherchebiomédicale. Sur le théâtre des opérations De même que le champ de bataille,le terrainmédico-hospitalier est, au senspropre en ce qui concernelesopérationschirurgicales, un " théâtredes opérations>, le mot " opération apparte" nant depuisle xvttt'siècleau vocabulaire militairecomme au vocabulaire chirurgical(4). Lamédecine, artdeguerre ? (hôpital corps et âme, essai d'anthropologiehospitalière, CeliArslan,2003 Centred'Etudes Transdisciplinaires Sociologie AnthropologieHistoire 22, rue d'Athènes 75009 Paris . Se battreo contrela maladieest généralement considérécomme allantde soi,chezlesprofanes commechezlesprofessionnels, parfois,danslesmargesde bienque d'autresattitudesapparaissent la médecine académique,du côté de la médecine psychosomatique ou de l'homéopathie. Conséquence de ce rapportdominantà la maladiedansla médecinepost-humorale : lesgestesthérapeutiques lesplusagressifs et/ou à bénéficeimmédiatont été jusqu'aujourd'hui lesplusvalorisés danslescultureshospitalières. ll est vrai que les moyensthérapeutiques les plus violentssont parfoislesplus efficaces. C'estune réalitébien connuedès l'Antiquitéen ce qui concernel'usagemédicinaldes toxiques.Le pharmakon grecrenvoieainsià l'ambivalence des remèdes,poisonsguérisseurs de maniementdélicat,tels la digitale,l'aconit,la jusquiame(5). On saitaujourd'huice qu'il en est des cytotoxiques employés dans la chimiothérapie du cancer.Cependant,à l'actionconcrètede dangereuxoutilsthérapeutiquesil faut ajouterla dimensionimaginairelargementrépanduetout au long de l'Histoire,chez les patientscomme chezlesthérapeutes, qui fait mesurera prioril'efficacitédes traitementspresqu'ilsimpliquent. critsà l'agression En dehorsdu bloc opératoire,maisobéissanten partieau modèlechirurgical,le fonctionnement traditionneldes réanimations s'estrevendiquélui aussicomme nécessairement violent,sansque grand-chose ait pendantlongtempsété fait pour compenserlesagressions subiespar les patients au nom de leur sauvetagethérapeutique.D'où nombre d'effetsiatrogènes, tant chez les professionnelsque chez lessoignés(6). Uurgencevitale,maîtremot en milieu hospitalier, légitimel'action à la hussardesansqu'on tienne trop à s'encombrerni d'émotionsni, éventuellement, de règlements(ce dernieraspectvaut surtoutpour les années60-80,grande périodede développement desservices de réanimationet de l'acharnement thérapeutique). e0 PRArra_uEs | - en deçà représentent un casextrême. vité a une dettesymboliqueparticulière Si lesréanimations de tout aspectfinancier- à l'égardde cesavences remarquespeuventaussis'appliquerà l'ensouturiersnon seulementdu corpsd'autrui,maisde semble d'une culture médico-scientifique leur propreesprit. vent plus axéesur le traitementque sur le soin. c o m m e l ' a e x c e l l e m m e n t m o n t r é M a r i e - De toute façon, le goût du risque,l'excitationà Françoise Collière(7). La violenceest structurelle braver la mort et à faire triompher la vie sont dansune priseen chargequi concernedavanta- communs aux chirurgienset aux combattants, même s'ils n'y sont pas impliquésde la même ge la maladieque le malade(8). manière. S'oublieret se dépasser,au-delà de s'engagercorps toute fatigue,faire l'impossible, Portrait des hospitaliersen guerriers sont là des injonctionsdans l'action, ce fils d'un chiruret âme Au xrx"siècle,Maximedu Camp, que professionnels de santé les et des ivresses gien militaire,fait une descriptiondétailléedes hôpitaux parisienset du personnelde santé.ll note que pendantl'épidémiede choléraen 1832, dans les " ambulances" (lieux d'hospitalisation provisoires), de deux lesmédecins" se relevaient heuresen deux heurescommedessoldatsen faction > (9). " La garde > est en effet une activité des médecins(et d'abord aussicaractéristique que des militaires. des chirurgiens) Quant au personnelsoignant et ancillairedes il hôpitauxplacésousles ordresdes religieuses, composé d'indiviest,d'aprèsMaximedu Camp, paresseux et alcooliques, dus plus que suspects, vénaux. Mais en temps d'épidémie" on lesl retrouvetoujoursau premierrang à l'heuredu combat)),commelessoldats,cesderniersn'étant pour leur part guère plus recommandables, o mauvaissuiets,[et] familiersde la sallede police " (10).Ce n'estpaslà seulementimaged'écrivain,maisun trait qui convergepar exempleavec le modèle militaireen usage à l'Assistance Publiquede Paris(crééeen 1849): jusqu'enplein xx" siècle,la hiérarchieinfirmièrey fut signalée par des galons plus ou moins étoilés,sur le devant d'une coiffe arborantaussiune cocarde rougeet bleueaux couleursde la capitale. La guerre, c'est d'abord " trouer la peau de l'autre'. Un tel gesteestceluidu chirurgienaussi bien que du soldat.Bienqu'il soit perpétréà des fins différentes,cela fait que l'homme de l'art peut se sentirprochedu guerrier(11), voire de l'assassin si l'on se place sur le registrede l'inDe sorte conscientet de sescontenusarchaïques. que du point de vue psychique,la chirurgie, comme la réanimation,peut être considérée comme un métierà risque.A ce titre, la collectr- ont longtempspartagéesavecles gens d'armes, dansun voisinagecommun avecla mort, voisinage dont le terme" carabin> portemanifestement la trace (12). Riend'étonnantà ce que chez les le médecins, et en particulierchezleschirurgiens, folkloredes sallesde garde,mariantallègrement ditesde Eroset Thanatos, évoquelesplaisanteries associées corpsde garde,d'ailleursgénéralement aux groupesde jeuneshommes.Manièrestrès ritualiséeschez les médecinsde faire pièce à l'émotion, à la peur, au dégoût, voire au désir(13). Débridementspropresà des groupes qui furent d'abord exclusivementmasculins,et ont d'autrepart lourdementpeséles sur lesquels contrainteshiérarchiqueset leur corollaire,la lutte pour le pouvoir. la valoriQuel que soit le sexedes professionnels, sationdu traitementet des aspectstechniquesà l'hôpital, fortement associée aux actions >, surtouten France,avecle " viriles contrastent, peu d'intérêtque continuede susciterle soin en tant que tel, qui restedévoluaux " infirmières" (femmesà 90 o/o).La lôgiquedu faire,de l'action, et de l'acte(voirle paiement" à l'acte") que nos médecinspartagentaveclesmilitairesa du reste pour conséquence qu'encoreaujourd'hui,dans de santé, l'espritde nombre de professionnels ,r, pour les soinspalliatifs " " soigner c'estbon ", lorsqu'ona renoncéà sauveret donc à " traiter >... Pasde combat,plus rien d'héroÏque. Enfin,la formationmédicaleet le cheminement des carrièress'appuienttrès fortement sur la concurrenceet la rivalité,et sollicitentd'emblée chezlespraticiensnon seulementla quête d'une gloire personnelle,mais un type de pugnacité PRArra.'uEs lel plutôt associéedans notre culture aux mæurs masculines. Cet aspectfoire d'empoigne de la médecinen'est pas nouveau: en 1894 dans les Morticoles,Léon Daudet, étudiant en médecine, intimede la familleCharcotet familierdu milieu médico-hospitalier de la capitale,a fort bien décrit, à grands traits barbelés,les luttes intestinesde la corporationdans la deuxièmemoitié du xrx"siècle(14). Guerresde positionssur frontières brouillées En France,lesrelationsmédecins-patients se sont aujourd'huidiversifiées (15). Certainsmédecins diraientsansdoute qu'ellesont été surtoutcompliquéespar le droit à l'informationdu patientet l'obligationde lui demanderson consentement éclairéaux soins,soinsqu'on estcensédésormais lui proposeret non lui imposer. Les usagersde notre système de santé mettent en question l'imageguerrièreque notre médecinese fait de l'excellence, même si d'autrepart lespatientsou leursprochessont aussisouventpartisansd'un < combat > contre la maladie,celafait partiede notrecultureambiante.De toute manière,le rapport des forcesentre expertset profanesa commencéà se modifier,depuislesannées1980et le début de l'épidémiede sida (16), avec l'émergence des droits du patients (loi du 4 mars " " 2002) et la reconnaissanced'une compétence chez les usagers.D'autre part, les recommandations de I'ANAES (Agence Nationale d'Accréditation et d'Evaluation en Santé)insistent sur la satisfaction des oatients... Voicidonc que la sociétéciviles'immiscedansle colloque singulier médecin/maladerevendiqué par les professionnels comme emblèmede leur art. A tort ou à raison,ceux-cise sentent parfois mal à l'aisedevantlesnouvellesdispositions relatives aux droits des malades,leur anxiétéétant d'ailleurspuissamment alimentéepar lessociétés d'assurances, qui en ont profitépour augmenter leurstarifs.Lesmédecinsredoutentdésormais les procès, de manière probablement exagérée puisqueles recoursen justicesemblenten fait n'avoir qu'assezpeu augmenté.Certainscherchent de plusen plusà s'entourerde protections médico-légaleset, en particulier de protocoles e2lPRArrauEs thérapeutiques, sanstoujoursvoir que lesprocès intentés ne sont souvent oas l'aboutissement d'une erreurtechniqueen elle-même,maisd'un dialoguedéfectueuxavecle patientou safamille. En tout casest à l'honneurchez les médecinsre principede précaution,car ce ne sont pas ces risques-là- les procès- qui lestentent. Mais il n'y a pas que les patientset la législation pour compliquerla vie des médecins.ll y a les administrations hospitalières, vis-à-vis desquelles la culturemédicalemanifesteune défiancede principe. Lesdirectionsadministratives occupentdésormais dans les établissements une place qu'elles étaientloin d'avoiril y a trenteans.Certainess'occupentactivementà restreindrel'étenduedu pouvoir médical,sans position critique véritablepar rapport à la médecineacadémique,mais avec le soucide faire pièceaux féodalitéslocaleshéritées des grandspatronsd'antan. Danscette perspective, substituerdes pôles )>aux <<services> est " aujourd'huià l'ordre du jour, de même que nombrede recommandations insistent surla transversalitédes fonctionsdans les établissements et leurdéterritorialisation, théoriquementfacilitéepar la logistiqueinformatique.De plus, les médecins ont le sentimentque lesadministratifs leurdemandent de s'engagertoujours davantagedans des préoccupationsgestionnaireset économiqueset donc, pensent-ils,dans des labyrinthes- labyrinthes de papiers et labyrinthesdes circuits " " imprimésde l'informatique. en tous cas lesdirecteurs, Que lesadministratifs, puissentse conduireaussien guerriers(comme avanteux les capitainesd'industrie),voire apparaître comme hommes de sang et hommes de main (" tueurs> [17]), et que de leur côté les médecins,parmi lesquelsles chirurgienssont autant de Princesdu Sang(18), se sententcontaminés par la paperasse >, met en questionla " dualité symbolique sur laquelle les médecins avaientconstruiten partie leur identité.Un tel brouillage de frontièresentre clercs et gens d'armes contribue peut-être,côté médecins,au malaiserepérableaujourd'huidans les professionsde santé.En effet, quellesdéfensesimmunitaires pour protéger leur spécificitéde guer" riers o ? La situationexige peut-êtreun profond Fautede retournementdes mentalitésmédicales. quoi reste peut-être une solution : la fuite. L'humanitaire en serait-ilune ? Pour réenchanter la médecine (19), le front de l'humanitaire? Le front n'est plus ce qu'il était. La démotiva" " être comparée tion de nos médecinspourrait-elle dansl'Eglise avecla crisedesvocationsreligieuses de la deuxièmemoitiédu xx"siècle? A quoi donc nos médecinsont-ilscesséde croire? S'agit-ilde la disparition des compensationssymboliques jusqu'icien usage? N'est-cepassefourvoyerque de s'en tenir à la revendicationfinancièrerécemment formulée,par exemple,par leschirurgiens (juillet2004)?Ne s'agit-ilpasau moinsautantde la perte des référencesidentitairesqui faisaientle seldu métier,dans un moment de recomposition des pouvoirsau sein du systèmede santé? des2/3 d'un article 1. Cetarticleestuneversionraccourcie qui sera publiée début 2005 sur le site Web de o Cuerreet Médecine (miseen lignepar la l'Association " Inter-Universitaire de Médecine). Bibliothèque 2. Témoignagede la patiente,7 avril2O04. 3. André Soubiran,LeBaronLarrey,chirurgiende Napoléon, Fayard,'1966,526 pages@. a8a). 4. PaulRobert,Dictionnoireolphobétiqueet onologiquede lo LongueFronçaise, tome lV 1980,article" Opération" 4' et 5'. 5. .. Despoisons: natureambigi.ie)>,numérothématique d' EthnologieFronçaise,2OO4| 3. 6. Voir fes travaux de Michèle Crosclaude,Réanimation, Paris,Massoncomo : à lo Recherche du Sujetlnconscient, 1996,ainsique lesouvragescollecEditionsHospitalières, tifs qu'elle a dirigés,en particulierEn réonimation.Ombres Masson,1996, Vers et Clortés,Paris,EditionsHospitalières, une Histoirede lo Réonimotion,Paris,Clyphe et Biotem Editions, 2002, eT les Cohærs du Réseou Européen lnterdisciplinoire sur Psychologie et Réonimation (Strasbourg).Marie-ChristinePouchelle,L'HôpitolCorpset Paris,Seli Arslan, Ame, Essois d'onthropologiehospitalière, p. 20O3,218 7. Marie-Françoise Collière,Promouvoirlo Vie: de lo pratique soignonteoux soinsinfirmiers,Paris, Interéditions, 1996. 8. Bruno Dujardin," Le médecin des systèmesde santé pubfique: un extra-terrestre malgrélui SontéPublique& ", Sciences Sociales, n"' 8 et 9, iuin 2OO2,17-36) désignele paradigmepasteurien> comme un facteurde cette vio" lencestructurelle, en raisonde la causalitémécanisteet linéairequ'il assigneà l'étiologiedes maladies. 9. Maximedu Camp, Poris,sesorganes,sesfondions,sa vie Lesréflexionspresquegourmandesou envieuses à proentenduesici ou là chez les professionnels posde l'humanitaire incitenten tout casà s'interroger sur lesséductionsque ce secteurtrès particulier pourrait désormais exercer sur certains médecins.On peut, en effet, se demander si pas aulourd'hui" l'humanitaire> ne représenterait aussil'espoird'échapperaux contraintesde plus en plusfortesque la sociétécivilefait portersur les métiersde santé,tout en fournissantl'occasionde retrouverl'aurade la profession.Plutôtque rester o à l'arrière> chez soi, choisirde se porter ailleurs sur < un front " retrouvé,sur une scèneoù rejouer une partie devenuedifficile à l'hôpital, un autre théâtre où renoueravec une identité professionnellequ'à tort ou à raisonils sententmenacée.En ce sensl'engagementdans" la médecinehumanitaire >, fruit d'une incontestablegénérosité, pourrait-il constituer un symptôme du malaise de santé? collectifde nos professions '1993, p. 407. (1869-1875), Monaco, Ceorges Rondeau, p.4"15. lO. lbidem, >, Duvauchelle ll. Pr.Bernard " DéfigurationscommuParis,7 février nicationau colloqueGuerreet Médecine, 2004. CodeauLo coutumedes carobins. 12. Emmanuelle Ethnologie Ethnologie de l'internot,Toulouse,EHESS, lecarabin estun 2004.Auxv'siècle, Historique et Sociale, soldatde cavalerielégère(le Roben,déjàcité, article " carabin "). Yoiraussison article Codeau,lbidem. 13. Emmanuelle . Dansun amohithéâtre... desmorts La fréquentation ,,, Terrain, n' 20, mars dansla formationdes médecins 1993,pp.82-96. (1894),Paris,Crasset, 14. LéonDaudet,LesMorticoles Pouchelle" Lire LesMorticoles 1984. Marie-Christine ,,, in L'Hôpitol Corps etAme,délàcité. aujourd'hui... desMalades. M. Callon,le Pouvoir 15. V. Rabeharisoa, et lo Recherche, Fronçoise contrelesMyopothies L'Association de l'Ecole desMines,1999. Paris, LesPresses de la médecine 16. NicolasDodier. Recomposition du sida", rn aveclascience. Lesleçons danssesrapports n"' I et 9, iuin 2002, et Sciences Socioles, SontéPublique pp.37-52. parun directeur d'hôpital a étéappliqué 17. Lequalificatif étantdésigné de la même à un de sespairs,lui-même (entretiens, 1998et 2003). façonparuneinfirmière... du Sang,Paris,Fayard, 18. CilbertSchlogel,LesPrinces 1992 eTLivrede Poche.1994. Bouchayer" Lesvoiesdu réenchantement 19. Françoise professionnel in P.Aiachet D. Fassin(éds),les Métiersde ", Ia Santé. Enjeuxde pouvoirs et quête de légitimité, Paris, Anthropos,1994, 2O1-225. PRArrorES le3 n'l : La soclété n" 4 : Santé et envlronnement du n ' E : L as a n t é n'est pas à vendre n" ll : Choblrsa vle, choisir sa mort n" 12 : L'informatlon et le patlent n" 16 : Lesémotlons dansle soln (retimge du dosier) n' lE : Quelssavolr pour solgner ? 21 : Le médlcament, une marchandise pas commelesautres n'20 3La santédes femmes : tout reste à faire n'19: Lavieillesse, une maladle? n'22: La santé, un enieupubllc auirefrient Fûilf n" 23 : lls Yonttuer la Sécu ! no24 : Le métier de médedn généraliste n'27 : Falreautrement pour soigner n'25 : Hold-up sur nor asslettes n" 26: L'exil et I'accuell en Abonnement un an Abonnement deux i --l -l Abonnement jeune (étudiant,remplaçant, de trois anset demand TARIFS PERIMES Abonnementà durér prélèvementsautoma.,r--de prélèvement) RIB+ autorisation Commandeà l'unité (14 € + 1,50 € de frais d'envoi) : - nombre d'exemolaires: - intitulé du numéro : --l --r Commandeà l'unité numéro doubfe14/15("16,80 € + 1,50€) profession 15,50euros/no 1E,30 eurcs Chèque à l'ordre de Protiquesà envoyer : 52, rue Gallieni - 92240 Malakoff - France Té1.: 01 4 57 8585 . fax : O1 46 57 08 60 e-mail : [email protected] site : http://www.smg-pratiques.info U n r e ç u v o u ss e r a a d r e s s éù r é c e p t i o nd e v o t r e r è g l e m e n t PRATIQUES n" 28 Les pouvoirs en médecine Revue trimestrielle Rédoction et abonnements : té|. : 01 4 57 85 85 o fax. : O1 46 57 08 60 e-mail : [email protected] site internet : http://www.smg-pratiques.info 52, rue Gallieni, 92240 Malakoff o France Directeur de lo publicotion: Marie Kayser Rédoctriceen chef : Martine Devries Secrétoirede rédoction ; Marie-Odile Herter Secrétoriot, relotionspresse; focelyne Deville, MarieOdile Herter Responsoblede dîffusion : Dominique Tavé Comité de rédaction : Geneviève Barbier; Christian Bonnaud ; fean-Luc Boussard; Martine Devries; Patrick Dubreil ; FrançoiseDucos; Monique Fontaine ; Hélène Girard; Catherine lung ; Marie Kayser; Sylvie Lagabrielle ; Evelyne Malaterre; ElisabethMaurel-Arrighi; Didier Ménard; Patrice Muller; Anne-Marie Pabois;Elisabeth Pénide; Anne Perraut-Soliveres ; ChristianeVollaire. 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