SWINGING

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SWINGING
Les Ronettes
cès (N°8), mais le rock n’est plus la priorité de
Cliff, comme ses succès ultérieurs le prouvent.
Mais il ne renie jamais cette musique, particulièrement lors de ses concerts plus excitants que
jamais, ni le merseybeat ni le rhythm’n’blues
anglais ou pas.
Début 1964 correspond à la venue en Albion d’un
sensationnel trio féminin dont le talent le dispute
au charme, les RONETTES, emmenées par Ronnie Bennett, future madame Spector, plus pour le
pire que pour le meilleur comme on le sait. Leur
premier concert a lieu le 5 janvier à Nottingham
et, le 6, elles rejoignent les Stones, les Swinging
Blue Jeans, etc., à Harrow-on-the-Hill, près de
Londres, pour participer au périple Group Scene
64. C’est leur première excursion hors des EtatsUnis, Hawaï excepté. Un mois jour pour jour
après leur arrivée, le 5 février, un film – appelé
alors insert – les présente dans leur deuxième
gros tube, « Baby I Love You », de Phil Spector,
Jeff Barry et Ellie Greenwich, les génies du Brill
Building new-yorkais où se conçoivent tant de
succès plus extraordinaires les uns que les
autres. Il fait suite à « Be My Baby ». Personne ne
sait alors qu’une des choristes, qui a officié dans
l’enregistrement de ce tube, typique du wall of
sound, est Cher qui deviendra à son tour une star
des années 60. Les Ronettes confient à Ray
Coleman du Melody Maker que les idées de production de Spector lui ont été inspirées par les
orchestres symphoniques.
CILLA BLACK, CRYSTALS
l n’est tenu compte ici que des artistes
visibles à l’occasion de leur premier passage
(les retours avec un même succès étant un
principe de Top Of The Pops), mais pas des
disques diffusés avec des danseurs. Ainsi, pour
le 5 février, on ne revient pas sur les prestations
des Merseybeats, Bachelors, etc., déjà vus en
janvier (JBM N°294). D’autre part, Rick Nelson
n’est pas venu au studio de Manchester où se
tourne Top Of The Pops en 1964, pour y défendre
« For You » sur lequel se déchaînent des jeunes,
seul le titre étant entendu, malheureusement sans
lui. En février, Top Of The Pops cherche ses
marques à en croire un article assez féroce dans
Pop Weekly du 15 février 1964, sous la plume de
l’éditeur Albert Hand et de David Cardwell. Ils
confirment qu’ont droit de cité seuls les artistes
figurant dans le top 20, compilé d’après les classements anglais. Selon eux, ils sont mal présentés, à côté de photos d’eux-mêmes, faisant penser à un chaotique Ready Steady Go (sic !). Les
DJ ne sont pas sûrs de ce qui se passe, l’émission paraît se dérouler au milieu de répétitions.
Les adolescents ne semblent pas savoir quoi
faire, à l’inverse des mods de Ready Steady Go.
Top Of The Pops n’a pas de vie ! Un jugement
bien sévère sur une émission qui s’impose tout
au long de la fabuleuse décennie 60, et au-delà !
Des lecteurs prennent ensuite la défense de ce
programme violemment critiqué dans les
colonnes de cette revue.
I
CLIFF, RONETTES
Le sixième épisode est diffusé le 5 février 1964.
CLIFF RICHARD montre qu’il est plus que jamais
dans le coup en pleine beatlemania, n’en déplaise aux révisionnistes qui ont évacué cet artiste à
la renommée internationale – sauf aux USA – de
l’histoire du rock. Il vient sans les Shadows qui
jouent pourtant derrière lui sur l’excellent rock
« I’m The Lonely One », enregistré le 23 novembre1963. Il est dû à Gordon Mills, des Viscounts,
qui va devenir un des agents les plus importants
du show-business anglais, puis international,
gérant les carrières de Tom Jones, Engelbert
Humperdinck, Gilbert O’Sullivan. Prévu comme
titre d’album au départ, ce morceau vigoureux est
finalement retenu comme face A de son nouveau
45 tours, en raison de la vague beat. Un bon suc56
Cet épisode de Top Of The Pops coïncide avec
l’explosion d’une chanteuse de Liverpool, qui
bénéficie de l’amitié des Beatles : CILLA BLACK.
John Lennon et Paul McCartney lui ont fourni la
face A de son premier 45 tours en 1963, « Love
Of The Loved ». Managée par Brian Epstein, c’est
la seule fille de son écurie en croissance exponentielle. A la Cavern de Liverpool, la jeune scouse, au caractère bien trempé, s’amuse à chanter
avec les Big Three, Rory Storm & The Hurricanes... et un jour (de chance) avec les Beatles.
Quand elle attaque avec eux le classique « Summertime », elle est remarquée et signée par Brian
Epstein. C’est lui qui ramène d’un voyage aux
USA le tube de Dionne Warwick « Anyone Who
Had A Heart ». George Martin est d’accord pour
le proposer à Cilla Black. Elle l’enregistre avant
d’autres reprises britanniques dont une par Mary
May et, surtout, par la formidable Dusty Springfield. En attendant, Cilla est catapultée en N°1,
c’est la première artiste féminine à réussir cet
exploit depuis Helen Shapiro en 1961. La version
de Cilla est très bonne, mais n’ajoute rien à celle
de Dionne, interprète de soul de luxe, à l’opposée d’une Aretha Franklin. Du coup, cet immense tube de Cilla n’est pas dû à John et Paul, mais
à Burt Bacharach et Hal David ! Comme quoi la
vague anglaise pop s’opère, dans certains cas,
avec l’aide de pointures américaines ! D’autres
exemples de ce genre se retrouvent au fil de cette
randonnée dans ces années glorieuses. Tout
Cilla
Black
TOPOF
POP
SWINGING
Voici la suite de l’historique de
la fameuse émission télévisée
hebdomadaire de la BBC, Top
Of The Pops, qui a commencé
au premier jour de l’an de grâce
beatlemaniaque 1964 (mais
avec aussi les Rolling Stones,
Cliff Richard, Roy Orbison, les
Animals et tous les autres !).
C’est le fil rouge pour livrer des
triomphe attire des critiques, des rancœurs, du
scepticisme. Dans le cas de « Anyone Who Had
A Heart », cela prive Dionne Warwick d’un succès en Angleterre où elle n’est que 42e. On remarquera ici que les violents contempteurs des
adaptations françaises ne se rendent pas du tout
compte que les artistes anglais puisaient eux
aussi à l’envi dans le répertoire américain ! Deux
poids deux mesures pour peser leurs opprobres.
Le 22 février, une controverse fait la une du Melody Maker, hebdo des fans et musiciens de jazz
qui se divise entre jazz et pop/rock en 1964, un
mélange surréaliste imposé par les nécessités
commerciales. Après les Ronettes, un autre groupe vocal féminin noir, les CRYSTALS, produit par
Phil Spector, arpente la Grande-Bretagne, lors
d’une tournée de six semaines à partir du 16
février. En évoquant « Anyone Who Had A Heart »
par Cilla Black, les Crystals dénoncent une mauvaise reprise de la version à succès de Dionne
Warwick. Elles reprochent à la chanteuse anglaise d’avoir copié le style de Dionne, plutôt que
d’en présenter une interprétation personnelle.
Dee Dee Kenniebrew (Crystals) pense que Cilla
ne la chante pas aussi bien que Dionne. Elle ajoute que Cilla a du mal à atteindre les notes hautes,
ce que Dionne fait avec aisance. Cilla se défend
en expliquant qu’elle n’a pas copié la voix très
douce de Dionne, ajoutant même que, vers la fin
du disque, le chant de Dionne devient monotone.
Cilla Black conclut : Je ne dis pas que mon disque
est meilleur que le sien, mais je l’ai fait et il se vend
ici. La protégée de Brian Epstein dit que l’arrangement sur son 45 tours est fantastique. Il est dû
à Johnny Pearson, son directeur musical, qui l’a
réalisé en quatre pistes. Parmi les musiciens figurent le guitariste Judd Proctor (qui a plus tard travaillé avec Serge Gainsbourg, sur l’album « Histoire De Melody Nelson »), le batteur de jazz
Kenny Clare (à ne pas confondre avec son quasihomonyme américain Kenny Clarke), George
Martin au piano et le trio vocal féminin les Breakaways, habitué d’innombrables séances des
années 60. Dans l’édition précédente du Melody
Maker (15 février), Cilla Black précisait qu’elle ne
croyait pas au potentiel de ce titre, mais l’avait
choisi car elle le trouvait superbe. Elle a bien fait.
Fin mai, conclusion tardive de cette polémique,
lors d’une fête des disques Pye et des Searchers,
Dionne Warwick dément les commentaires désobligeants envers Cilla Black qu’un reporter lui a
attribués. Et Pye International se dépêche de sortir le disque suivant de Dionne, un autre classique, « Walk On By », avant même sa parution
aux USA, pour prendre de vitesse une éventuelle reprise ! Une dernière info sur « Anyone Who
Had A Heart » par Cilla Black se trouve dans

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